COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

COMPTE RENDU N° 10

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 4 novembre 2003
(Séance de 16 heures 30)

Présidence de M. Edouard Balladur, Président

SOMMAIRE

 

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- Examen pour avis du budget des Affaires étrangères pour 2004
- Examen pour avis du budget de la Coopération pour 2004
- Examen pour avis du budget du Commerce extérieur pour 2004
- Information relative à la Commission


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Examen pour avis du budget des Affaires étrangères

M. Richard Cazenave, Rapporteur pour avis, a tout d'abord indiqué que le budget 2004 devait permettre à l'appareil diplomatique de la France de mettre en œuvre les priorités affichées par le Président de la République, malgré une conjoncture économique difficile.

Il a ainsi fait remarquer que ce budget se caractérisait par un effort de rigueur remarquable de la part de l'administration du ministère des Affaires étrangères. En effet, hors Aide publique au développement, le budget du ministère est en baisse de 1,16 %, grâce à un réel effort réel en matière d'emplois (116 emplois seront supprimés, soit un taux de non remplacement des départs en retraite proche de un sur deux), en matière de rémunérations (baisse des primes d'expatriation), et grâce à des économies réalisées sur les frais de fonctionnement et sur les crédits d'investissement.

M. Richard Cazenave a cependant estimé que ce budget permettait de financer les grandes priorités de l'action extérieure de la France. La première priorité concerne l'aide publique au développement, dont les crédits augmenteront de 9,5 %. Les autres priorités qui sont également financées sont la sécurité, la francophonie multilatérale et le financement de la réforme de l'asile.

Compte tenu du contexte budgétaire, ce n'est malheureusement pas cette année que seront comblées certaines des lacunes traditionnelles du budget des Affaires étrangères, par exemple dans le domaine des contributions volontaires de la France aux organismes relevant des Nations unies ou en ce qui concerne la coopération militaire.

Le Rapporteur pour avis a également abordé le problème de la régulation budgétaire, qui pourrait dépasser 250 millions d'euros en 2003, soit l'équivalent de 15 % des dépenses qui n'ont pas à un caractère obligatoire (rémunérations et engagements internationaux). Or, les conséquences de la régulation sont particulièrement perturbatrices tant pour l'organisation des services que pour la visibilité de l'action extérieure de la France. Si l'on peut penser que la régulation devrait être moins forte en 2004 qu'en 2003, il faut néanmoins continuer de réfléchir à une pratique plus « intelligente » de la régulation, qui exigerait une programmation plus fine et plus souple des décaissements.

M. Richard Cazenave a ensuite évoqué le chantier de la réforme de l'action extérieure de l'Etat, ouvert par M. Dominique de Villepin. A ce sujet, il a souhaité que l'on profite de l'opportunité offerte par la mise en œuvre de la Loi organique relative aux lois de finances (LOLF), en créant une Mission « Action extérieure de l'Etat » regroupant l'ensemble des programmes concourant à cet objectif. Il faut malheureusement constater que cette proposition s'est heurtée à un certain nombre d'oppositions, notamment de la part du ministère des Finances. Bercy serait disposé à créer un programme « Aide publique au développement », ce qui n'est pas négligeable, mais refuse d'isoler les dépenses de la DREE, c'est-à-dire des missions économiques à l'étranger qui relèvent pourtant naturellement de l'action extérieure de l'Etat.

Pour autant, afin de convaincre les autres ministères de respecter l'esprit novateur de la LOLF, il faut que le ministère des Affaires étrangères soit exemplaire dans la mise en place de celle-ci en son sein. Il faut donc être extrêmement vigilant quant à la définition des « programmes » qui regrouperont les crédits du ministère. Il faut s'assurer que ces derniers correspondent réellement à des politiques clairement identifiables.

Ainsi, M. Richard Cazenave a estimé qu'il serait souhaitable que les programmes correspondent aux trois grandes missions du ministère : le rayonnement et l'influence de la France (dépenses diplomatiques, action culturelle...), l'aide publique au développement, et enfin la gestion des services publics du ministère (asile, lycées français, assistance aux français de l'étranger...). Cependant, les programmes actuellement envisagés ne correspondent pas à des politiques clairement identifiées et regroupent au contraire des crédits destinés à des objectifs différents, en privilégiant les structures administratives existantes : les crédits d'aide au développement par exemple sont répartis entre les différents programmes, empêchant ainsi d'avoir une vision générale quel que soit le type de politique pour lesquels ils sont utilisés, alors que l'ensemble des crédits destinés au réseau à l'étranger sont concentrés au sein d'un même programme.

M. Richard Cazenave a conclu que, dans un contexte économique difficile, le budget 2004 du ministère des Affaires étrangères était probablement le meilleur possible, et a recommandé à la Commission de donner un avis favorable à l'adoption des crédits des affaires étrangères pour 2004.

M. Serge Janquin a souhaité savoir quel était le montant des crédits annulés du fait de la régulation budgétaire. Le ministère est-il concerné par les efforts devant être consentis pour satisfaire à nos engagements vis-à-vis de la Commission européenne ? L'expression pudique de la « rationalisation des moyens » ne sert-elle pas à masquer l'insuffisance des crédits, qui risque de mettre en difficulté le réseau diplomatique, le réseau culturel et les établissements de l'AEFE ?

M. Didier Julia a demandé quels établissements d'enseignement implantés au Proche-Orient relevaient de la francophonie multilatérale. Le Président de la République aurait déclaré que les effectifs de certaines ambassades, comme celle de Washington, étaient excessifs ; quelle suite a été donnée à ces propos ?

M. Noël Mamère a estimé que l'effort accompli en matière d'aide publique au développement demeurait insuffisant. Par ailleurs, le désengagement du Ministère des Affaires étrangères au profit du Ministère de l'Intérieur vis-à-vis de l'OFPRA est tout à fait inquiétant et contraire à la vocation même de cette organisation.

Le Rapporteur pour avis a répondu que les crédits du ministère annulés en raison de la régulation s'élevaient à 250 millions d'euros pour le présent exercice. Cette situation s'explique par l'écart entre la croissance réellement constatée et l'hypothèse de croissance retenue dans la loi de finances initiale pour 2003. Elle a durement affecté les crédits d'intervention et l'on peut espérer qu'il ne sera pas nécessaire de renouveler une telle pratique du fait de l'amélioration de la situation économique en 2004. En tout état de cause, la régulation ne doit pas conduire à privilégier l'abondement du FED au détriment de notre aide bilatérale. La Commission des Affaires étrangères devra être vigilante sur ces différents points.

S'agissant de la part que représente le budget du ministère des Affaires étrangères dans le budget global de l'Etat, celle-ci a diminué entre 1996 et 2002, passant de 1,45 % à 1,28 %, avant de remonter à 1,32 % en 2003 : la situation actuelle est donc moins mauvaise que dans le passé.

Il existe un établissement relevant de la francophonie multilatérale implanté au Proche Orient : il s'agit de l'Université Léopold Senghor à Alexandrie, qui est l'un des opérateurs de la francophonie. Quant aux redéploiements au sein du réseau diplomatique, il convient d'y procéder en tenant compte de l'évolution des métiers, par exemple en revoyant les missions des consulats implantés dans l'Union européenne.

L'aide publique au développement est en forte hausse, puisque après être passée de 0,57 % du PIB en 1994 à 0,32 % en 2000, elle remonte à 0,43 % dans le projet de loi de finances pour 2004. Cette progression doit permettre à notre pays de respecter les engagements pris lors de l'élection présidentielle et des élections législatives, d'accroître l'aide de 50 % en cinq ans et de la doubler dans les 10 ans.

Il est inexact d'affirmer que l'OFPRA relève désormais davantage du ministère de l'Intérieur que du ministère des Affaires étrangères, car la suppression de l'asile territorial, qui relevait précédemment des préfectures, a conforté le rôle de l'OFPRA, qui demeure sous la tutelle du Quai d'Orsay et qui est désormais en charge de l'intégralité des demandes d'asile.

M. François Loncle a souhaité rectifier les propos du rapporteur en faisant observer que si la part du budget du ministère des Affaires étrangères dans le budget global avait diminué entre 1995 et 2000, elle s'était stabilisée entre 2000 et 2002.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits des Affaires étrangères pour 2004.

Examen pour avis du budget de la Coopération

M. Jacques Godfrain, Rapporteur pour avis, a d'abord rappelé le contexte international qui a fait apparaître les problèmes des pays du Sud. L'échec à Cancun du Sommet de l'OMC a mis plus que jamais en relief l'urgence d'une politique d'aide extérieure à l'égard des pays du Sud. Il a souhaité que l'aide publique au développement, la coopération multilatérale, mais surtout bilatérale soient les éléments essentiels de la politique extérieure de la France qui doit également s'efforcer de faire partager cette vision à ses partenaires européens.

Abordant la question de l'aide publique au développement, il a fait observer que pour l'exercice 2004, le volume d'APD devrait atteindre 0,43% du PIB. Au chapitre 68-91 « Fonds de solidarité prioritaire », les crédits de paiement connaissent un accroissement global de 28 M€ (soit + 25%). Un article 30 nouveau y est créé pour l'aide aux pays sortant de conflits.

S'agissant du fonctionnement de la Direction générale de la coopération internationale et du développement (DGCID), il a indiqué que la réforme institutionnelle étant achevée et l'organigramme stabilisé, la DGCID s'est consacrée à l'animation de la politique de coopération et d'aide au développement en s'attachant à moderniser aussi les instruments, les méthodes et les procédures.

Concernant les contributions volontaires de la France aux grandes agences internationales, il a regretté que notre pays ne figure dans aucune des principales institutions du système des Nations unies parmi les dix principaux contributeurs en raison de la faiblesse de ses contributions volontaires. En 2004, les crédits affectés aux organisations du système des Nations unies seront, au mieux, reconduits à l'identique. Au sein de l'aide multilatérale, qui représente à peine 10% depuis quelques années, l'arbitrage s'est fait en faveur de l'aide européenne conduisant à une perte d'influence de la France dans les organisations du système des Nations unies, et du ministère des Affaires étrangères dans la gestion interministérielle de l'aide. Il a demandé que des choix clairs soient opérés, car la politique qui consiste à reconduire toutes les contributions volontaires sans modifier leur répartition se révèle contreproductive. Mieux vaudrait privilégier certaines organisations dans lesquelles la France doit jouer un rôle important, disposant d'une expertise qui lui permet d'orienter les décisions.

M. Jacques Godfrain a souligné combien le gel des crédits sur les exercices 2002 et 2003 a gêné les actions de coopération extérieure de l'Etat et particulièrement celles engagées au titre de l'APD bilatérale, la seule qui soit directement perçue par les Etats et les populations concernées comme venant de la France. Le gel des crédits a obligé la DGCID à procéder à un abattement de 18 % sur ses crédits programmés et à revoir l'ensemble de sa programmation. Il a également souligné, pour l'exercice 2003, une baisse des crédits consacrés au volontariat associatif due à la régulation budgétaire. Amputées de 10 % de leurs crédits dès le mois de février, les associations ont subi le gel des crédits de report au mois de mai.

Pour 2004, il a recommandé d'éviter la brutalité de ces pratiques et surtout de maintenir l'APD bilatérale à son niveau initialement prévu dans le budget pour 2004, faute de quoi la plus grande partie de l'aide publique française au développement transiterait par le Fonds européen de développement (FED) sans visibilité spécifique sur le terrain ni possibilité d'influer sur les décisions, alors que le besoin de France est exprimé dans toute l'Afrique et au-delà.

Par ailleurs, il s'est félicité de l'action réformatrice menée par le Ministre des Affaires étrangères, qui a ouvert le chantier de la modernisation de l'action extérieure de l'Etat avec pour objectif premier l'adaptation du ministère aux changements. Ainsi, la DGCID pourra mieux organiser ses relations avec les autres directions et notamment les directions politiques. Elle aura pour tâche de restructurer le réseau des centres culturels et de mieux le coordonner avec celui des alliances françaises pour supprimer les doublons. De même, il lui faudra s'adapter à la gestion de contrats d'objectifs, ce qui pose le problème de la co-tutelle des ministères des affaires étrangères et de l'économie et des finances sur l'Agence française de développement (AFD), qui génère des difficultés d'exécution des programmes sur place.

Le Rapporteur a proposé que soient développées des actions de coopération dans des domaines ciblés dans lesquels l'expertise française est unanimement reconnue : coopération en matière de santé, d'aide humanitaire d'urgence, d'aide alimentaire, appui au développement institutionnel.

Il a présenté les moyens mis en œuvre au niveau bilatéral en 2002 par la France dans la lutte contre le Sida : 15 M€ via la DGCID, 8 M€ via l'Agence nationale de recherche sur le Sida et 9 M€ via le projet Ensemble pour une Solidarité thérapeutique hospitalière en réseau (ESTHER) et a rappelé les engagements pris par la France au plan multilatéral pour lutter contre cette pandémie, en soulignant l'ampleur et la diversité des engagements français en matière de lutte contre le Sida.

Constatant que l'action humanitaire d'Etat est une composante importante de la politique étrangère de la France, il a insisté sur le fait que c'est l'un des domaines où la compétence française est unanimement reconnue et qu'il conviendrait de renforcer les moyens de cette action.

En ce qui concerne l'aide alimentaire, il a observé qu'elle permettait à la France d'être présente face aux besoins conjoncturels et structurels dans une logique de prévention des crises sur le long terme. Il s'est étonné de l'absence de synergies dans les actions de coopération entre les différents organismes chargés de la recherche en matière agricole. L'éparpillement des structures, l'absence de concertation entre elles, nuisent à l'action de terrain, d'autant qu'il convient d'améliorer la productivité et la qualité de production du Sud pour obtenir l'autosuffisance alimentaire.

Evoquant l'appui aux institutions africaines, il a jugé que le NEPAD était une priorité, les avancées obtenues à Evian lors de la réunion du G8 en juin 2003 en constituant la démonstration. Il a insisté sur le rôle positif de l'Organisation pour l'harmonisation du droit des Affaires en Afrique (OHADA), que la France soutient depuis l'origine.

Abordant les nouvelles formes de coopération, le Rapporteur a jugé utile de privilégier le co-développement, qui a le mérite de faire du migrant un opérateur potentiel du développement. Par des aides spécifiques, ce processus valorise la compétence des migrants. Des systèmes d'aide à la création d'activités économiques par des migrants dans leur pays d'origine ont été mis en place et sont efficaces. Dans ce cadre, il a proposé à nouveau la création d'un livret d'épargne-développement permettant aux migrants d'utiliser leur épargne à des projets de développement tout en sécurisant les transferts de fonds dans leur pays d'origine.

En conclusion, M. Jacques Godfrain a tenu à faire observer que l'effort de remise de la dette des pays les plus pauvres consenti par la France atteignait près de 2 milliards d'euros, dont près d'1,5 milliard pour les seules remises de dettes aux pays les plus pauvres très endettés. Il a fait remarquer que ces aides représentent près du quart des 9 milliards d'euros de déficit excessif (0,6 % du PIB) que la Commission européenne reproche à la France. Il s'est demandé si on pénaliserait la France parce qu'elle accroît son aide aux pays pauvres très endettés conformément aux engagements de l'ensemble des pays développés et de la communauté internationale et de la Commission européenne elle-même.

M. Serge Janquin a donné acte à MM. Richard Cazenave et Jacques Godfrain de leur franchise dans la présentation de leur avis budgétaire respectif, eu égard aux gels, régulations et autres annulations de crédits qui, en 2003, ont altéré l'exécution de la loi de finances telle qu'elle avait été votée, tout en faisant observer que l'utilisation de la régulation touchait à la sincérité d'un projet de budget.

Il a souhaité connaître le montant précis du crédit inscrit au Projet de loi de Finances initial pour 2004 pour le Fonds mondial de lutte contre le Sida.

M. Jacques Godfrain a remercié M. Serge Janquin pour sa question en prônant un engagement fort contre tout gel budgétaire touchant l'APD. Il a précisé que l'aide française en matière de lutte contre le Sida passait par des canaux bilatéraux et multilatéraux. S'agissant de la contribution de la France au Fonds mondial de lutte contre le Sida, la tuberculose et le paludisme, celle-ci s'élevait à 50 M€ en 2002 dont 70% consacrés au Sida, soit 35 M€. Il a rappelé qu'en juin 2003, le Président de la République avait annoncé le triplement de la contribution française à ce Fonds.

Suivant l'avis du Rapporteur, la Commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la Coopération pour 2004.

Examen pour avis du budget du Commerce extérieur

M. Jean-Paul Bacquet a tout d'abord indiqué que la conjoncture internationale et le commerce mondial sont restés faibles au premier semestre 2003. Le commerce mondial, après un net rebond à la mi-2002 (+2,8 % au second trimestre 2002 en variation trimestrielle), n'a cessé de ralentir. Le point bas aurait été atteint début 2003 (croissance trimestrielle d'à peine 0,5 % au premier trimestre), notamment à cause d'une forte contraction des importations américaines et d'un ralentissement très marqué des importations japonaises.

A compter du deuxième trimestre 2003, la tendance pourrait s'inverser. Le fort rebond des importations américaines devrait assurer le redémarrage du commerce mondial, lequel s'inscrirait sur un rythme de progression trimestriel de près de 1 % à compter du second trimestre 2003. Le commerce intra-zone euro, atone au premier trimestre 2003, redeviendrait un moteur du commerce mondial à compter du second trimestre.

Le Rapporteur a ensuite relevé les effets de la conjoncture internationale sur les échanges commerciaux de la France. Au premier semestre 2003, le repli des échanges français s'est poursuivi. La baisse des ventes (- 4,8% par rapport au second semestre 2002) l'ayant emporté sur la baisse des importations (-3,0%), l'excédent commercial s'est réduit à 1,5 milliard d'euros, après 4,6 milliards au second semestre 2002.

Le Rapporteur a particulièrement souligné le fait que l'excédent français avec l'Afrique a été réduit de moitié, tombant à 1 Md€ au premier semestre 2003.

Le Rapporteur a ensuite expliqué que le budget du commerce extérieur a su faire des efforts de rigueur, afin de passer de 472,1 millions d'euro en 2002 à 434,4 millions d'euros dans le projet de loi de finances 2004.

Ce budget traduit une priorité sur les zones de croissance. Le Gouvernement a sélectionné 25 « pays cibles » pour une action de relance et de dynamisation du commerce extérieur français (Asie, pays de l'élargissement...). Il a ainsi été décidé d'élaborer un plan d'action commercial sur trois ans destiné à mieux coordonner et à renforcer le soutien public apporté aux entreprises dans leur approche des marchés extérieurs de ces pays ciblés.

Une deuxième priorité consiste à rationaliser le dispositif national d'accompagnement des entreprises. Avec la création de la nouvelle agence Ubifrance il s'agit de doter la France, à l'instar de ses homologues européens, d'une puissante agence qui jouera le rôle de guichet unique pour l'internationalisation des entreprises.

Le troisième objectif est l'application de la réforme de décentralisation au commerce extérieur qui prévoit le transfert aux conseils régionaux des compétences et des moyens des 23 directions régionales du commerce extérieur. Cette réforme devrait permettre de mobiliser l'ensemble des partenaires du commerce extérieur dans les régions autour de priorités géographiques ou sectorielles articulées avec les priorités nationales.

Quatrièmement, la présence des entreprises dans les manifestations commerciales à l'étranger doit être accrue, et plus particulièrement à travers l'outil des salons internationaux. L'objectif fixé à Ubifrance est de doubler à fin 2005 le programme d'opérations collectives françaises, grâce à la démarche de labellisation.

Le Rapporteur a ensuite abordé la situation des échanges français avec l'Afrique sub-saharienne, à travers la situation très différente de deux pays, le Bénin et le Gabon. Il a souligné que cette question ne saurait être abordée en termes de stratégie commerciale, car l'Afrique subsaharienne n'est pas un marché comme les autres. Il s'agit d'une région dont l'insertion dans le commerce mondial recule, comme reculent les investissements qui lui sont consacrés : si l'on met de côté les investissements consacrés au pétrole, aux mines, à l'énergie en général, on constate que le reste est très faible.

L'insertion de l'Afrique subsaharienne dans les flux d'échanges mondiaux s'est dégradée au cours des vingt dernières années. Sa contribution au commerce mondial de biens est passée de 3,3% à 1,6 % entre 1980 et 2000. Sur la même période, la part du stock d'investissement mondial dans cette zone a reculé de 4,4 % à 1,8 %.

Aussi les relations avec ces pays doivent-elles privilégier certains axes : renforcement des intégrations régionales, développement de projets et d'échanges au niveau régional, aide aux filières locales, promotion de filières de qualité, renforcement des capacités commerciales et, enfin, respect d'une plus grande transparence et lutte contre la corruption.

Le Rapporteur a rappelé l'appui apporté par l'Union européenne (convention de Cotonou) et par la France à la constitution d'intégrations régionales, ainsi qu'à l'accès plus favorable au marché pour les produits des pays les moins avancés. Il a mentionné les propositions récemment faites, notamment le moratoire sur les aides agricoles accordées par les pays riches à leurs agriculteurs pour tous les produits exportés à bas prix vers l'Afrique, et la réflexion sur un mécanisme de stabilisation du cours des produits de base, le coton en premier lieu.

Le Bénin, engagé depuis 1989 dans un programme de réformes structurelles et d'ajustement des finances publiques, est considéré comme le « bon élève », ayant réussi à assainir son économie et à établir une croissance de 5 % par an. Le pays a bénéficié en 2000 d'un important allègement de la dette extérieure, dans le cadre de l'initiative pays pauvres très endettés (PPTE).

Le Gabon se trouve dans une situation difficile : malgré la rente pétrolière, il n'a pas entrepris d'effort pour la diversification de son économie, trop dépendante du secteur pétrolier. En 2001, plus de 40 % des recettes budgétaires avaient été consacrées au règlement des échéances de la dette extérieure. En outre, son statut de pays à revenu intermédiaire constitue pour lui aujourd'hui un handicap ne lui permettant pas de bénéficier de certains types d'aides. Ainsi, il ne peut être assimilé à la catégorie des pays pauvres très endettés, car son économie s'appuie encore sur des revenus pétroliers importants, même fluctuants. Il est cependant souhaitable qu'une solution soit trouvée, afin que le pays soit éligible aux allègements de dettes, financements et soutiens existants, tout en accompagnant les procédures d'engagements de bonne gestion et d'investissements dans des projets contribuant à réduire la pauvreté. Il appartiendra certainement à la France, principal bailleur de fonds, de contribuer à améliorer la situation pour préserver l'avenir.

La France est le premier fournisseur des deux pays, leur premier investisseur et aussi leur premier bailleur de fonds. Au Gabon, l'encours public représente 47 % de la dette extérieure totale.

Cependant, ces pays accueillent de plus en plus d'investisseurs d'autres nationalités, souvent aidés par des financements bilatéraux. Le mouvement des privatisations favorise cette évolution.

En conclusion, le Rapporteur a présenté deux propositions.

Constatant que la liste des vingt-cinq pays « cibles » passait sous silence l'Afrique, mis à part les deux extrêmes que sont les trois pays du Maghreb, d'une part, et l'Afrique du Sud, d'autre part, le Rapporteur a demandé que soit ajoutée à cette liste, éventuellement en liste annexe, les pays d'Afrique francophone où notre pays est en situation d'excédent commercial. En effet, il a estimé que si la France ne maintenait pas ses efforts et n'accordait pas une attention suffisante à cette zone, sa place et son influence viendraient à y diminuer assez rapidement.

Par ailleurs, ayant comparé les modalités d'exercice des compétences régionales en matière de commerce extérieur chez nos principaux concurrents en Europe, il a jugé nécessaire un regroupement des Chambres de commerce et d'industrie (CCI) afin qu'elles atteignent une dimension suffisante leur conférant une crédibilité dans les actions à mener au plan international. Il a estimé que Ubifrance, structure privée remplissant des missions de service public, pourrait jouer le rôle d'incitateur et pourrait labelliser les chambres de commerce avec lesquelles des actions pourraient être engagées. De la même façon, Ubifrance pourrait être chargée de la labellisation des syndicats professionnels les plus représentatifs et pouvant, de ce fait, être réellement opérationnels.

Sous réserve de ces deux observations, le Rapporteur a proposé de donner un avis favorable aux crédits du Commerce extérieur.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du Commerce extérieur pour 2004.

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Information relative à la Commission

La Commission a procédé à la nomination d'un rapporteur sur la proposition de résolution n° 1060 de M. Noël Mamère, Mme Martine Billard et M. Yves Cochet tendant à la création d'une commission d'enquête sur le rôle de la France dans le soutien aux régimes militaires d'Amérique latine entre 1973 et 1984.

Le Président Edouard Balladur a indiqué avoir reçu la candidature de M. Roland Blum au nom du groupe UMP.

M. François Loncle a présenté la candidature de M. Henri Sicre au nom du groupe socialiste.

M. Roland Blum a été nommé rapporteur sur la proposition de résolution n° 1060 de M. Noël Mamère, Mme Martine Billard et M. Yves Cochet tendant à la création d'une commission d'enquête sur le rôle de la France dans le soutien aux régimes militaires d'Amérique latine entre 1973 et 1984.

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