COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

COMPTE RENDU N° 13

(Application de l'article 46 du Règlement)

Jeudi 13 novembre 2003
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Edouard Balladur, Président

SOMMAIRE

 

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- Accord sur la création de l'Organisation internationale de la vigne et du vin (n° 1146) - rapport
- Accord d'association entre la Communauté européenne et la République libanaise (n° 946) - rapport
- Accord d'association entre la Communauté européenne et la République algérienne (n° 948) - rapport


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Création de l'Organisation internationale de la vigne et du vin

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Jacques Remiller, le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord signé le 3 avril 2001 à Paris portant création de l'organisation internationale de la vigne et du vin (n° 1146).

M. Jacques Remiller, rapporteur, a déclaré que l'accord dont la Commission des Affaires étrangères était saisie visait à créer une Organisation internationale de la vigne et du vin, devant succéder à l'actuel Office international de la vigne et du vin (OIV). Cette organisation internationale a été créée en 1924 par l'Espagne, la Tunisie, la France, le Portugal, la Hongrie, le Luxembourg, la Grèce et l'Italie. Devenu l'Office international de la vigne et du vin en 1958, l'OIV a cherché alors à regrouper un plus grand nombre de pays en permettant aux pays producteurs de raisin de table et de raisins secs d'adhérer à l'organisation. Cette stratégie s'est avérée payante, puisque des huit pays fondateurs en 1924, l'organisation est passée à 47 pays aujourd'hui, auxquels il convient d'ajouter deux observateurs, l'Irlande et le Québec.

Le présent accord vise à moderniser l'organisation internationale en la dotant d'organes décisionnels rénovés et de nouvelles procédures de décision. Cette révision, dont le principe a été accepté par l'Assemblée générale de l'OIV en 1997, est justifiée à la fois par l'augmentation du nombre de membres et par la nécessité d'adapter l'institution au nouveau contexte mondial du secteur vitivinicole, notamment au développement du commerce international. Cet accord, conclu le 3 avril 2001, a connu un important succès puisqu'il a été signé par les représentants dûment mandatés de 35 pays, rejoints ensuite par 11 pays supplémentaires.

Les objectifs assignés à l'Organisation par l'accord sont inchangés. En revanche, celle-ci est dotée d'attributions élargies précisément énumérées : la promotion et l'orientation des recherches et des expérimentations scientifiques et techniques ; l'élaboration et la formulation de recommandations dont le suivi est assuré en liaison avec les Etats membres ; un pouvoir de proposition en matière de garantie d'authenticité des produits issus de la vigne ; l'harmonisation et l'adaptation des réglementations par les membres, ainsi que le rapprochement des pratiques ; la protection de la santé des consommateurs et de la sécurité sanitaire des aliments, par l'exercice d'une veille scientifique.

L'OIV demeure structurée autour de deux principaux organes : l'Assemblée générale et le Comité exécutif. Le consensus est le mode de décision normal de l'Assemblée générale pour l'adoption des propositions de résolution. Cependant, le Président peut faire procéder à un vote à la majorité qualifiée des deux tiers plus un des membres présents ou représentés. Si un membre considère que ses intérêts nationaux essentiels sont menacés, le vote est reporté d'un an. Si cette position est confirmée officiellement par écrit par les autorités compétentes du pays concerné, il n'est pas procédé au vote. Par ailleurs, dans l'arrangement en vigueur, les Etats disposent d'un droit de vote proportionnel au montant de leur contribution. L'accord modifie ce point, afin d'assurer une répartition plus objective des voix pondérées : chaque Etat dispose désormais de deux voix de base auxquelles s'ajoutent un nombre de voix additionnelles calculées à partir de critères objectifs déterminant la place relative de chacun dans le secteur vitivinicole mondial, comme la production, la superficie ou la consommation.

Enfin, le siège de l'Organisation demeure à Paris et les langues officielles en sont le français, l'espagnol, l'anglais, auxquels ont été ajoutés, à la demande des pays concernés, l'italien et l'allemand.

Le présent accord vise à conforter l'OIV dans ses missions en faveur du développement de la filière vitivinicole dont on connaît l'importance pour notre pays. Pour entrer en vigueur, il doit être ratifié par trente et un Etats et vingt-neuf d'entre eux ont déjà déposé leur instrument d'approbation. Il importe donc que notre pays puisse approuver rapidement le présent accord, car une entrée en vigueur le 1er janvier 2004 semble possible. Pour ces raisons, le Rapporteur a proposé à la Commission d'adopter le présent projet de loi.

Le Président Edouard Balladur a demandé si les nouveaux pays producteurs, qui se sont imposés sur le marché après la crise du phylloxéra et qui occupent une part croissante de la production mondiale, étaient membres de l'OIV.

M. Henri Sicre a souhaité savoir si l'accord visait à donner aux recommandations de l'OIV un pouvoir contraignant en rappelant que les normes en vigueur en France étaient plus drastiques que dans les autres pays producteurs, ce qui était souhaitable pour la qualité de la production, mais entraînait des distorsions de concurrence.

En réponse aux différents intervenants, le Rapporteur a indiqué que si l'Afrique du Sud, l'Argentine, l'Australie, le Chili et la Nouvelle-Zélande étaient membres de l'Organisation, les Etats-Unis n'en faisaient pas partie, au motif qu'ils étaient opposés à la mise en place d'appellations d'origine contrôlée. Quant à l'accord soumis à la Commission des Affaires étrangères, il ne change pas le degré de contrainte des recommandations de l'OIV. En revanche, il étend ses attributions et il permet l'adoption des recommandations à la majorité qualifiée tout en laissant à chaque membre la possibilité de s'y opposer si ses intérêts nationaux essentiels sont en jeu.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 1146).

Accord d'association entre la Communauté européenne et le Liban

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Richard Cazenave, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de l'accord euro-méditerranéen instituant une association entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République libanaise, d'autre part (ensemble deux annexes, cinq protocoles, un acte final, treize déclarations communes et deux déclarations unilatérales) (n° 946).

M. Richard Cazenave a brièvement rappelé la situation politique et économique difficile du Liban, pour ensuite développer le contenu de l'accord.

L'accord d'association s'inscrit dans le cadre du renforcement de la politique méditerranéenne de l'Union européenne, lancée lors de la Conférence de Barcelone (1995). L'architecture générale de l'accord signé avec le Liban est similaire à celle des autres accords conclus avec les pays de la rive sud.

L'accord a pour but d'établir un dialogue politique régulier, de fixer les conditions de la libéralisation progressive des échanges de marchandises, de définir les modalités du droit d'établissement et de prestations de service, de définir les règles de circulation des capitaux et de concurrence, de renforcer la coopération économique, d'instituer un dialogue en matière sociale et culturelle et d'encourager la coopération financière.

Le texte de l'accord prévoit, en outre, dans son article 2 une clause de respect des droits de l'Homme. Le dialogue politique est organisé par le titre 1er, qui prévoit la mise en place d'un dialogue politique et de sécurité régulier. La libre circulation des marchandises est organisé par le titre II et vise à établir une zone de libre-échange à la fin d'une période de transition de douze ans.

Le Rapporteur a également rappelé les principales difficultés rencontrées lors de la négociation de l'accord d'association, qui ont porté sur deux points, d'une part le démantèlement tarifaire industriel et agricole et, d'autre part, la prise en compte du terrorisme.

En conclusion, M. Richard Cazenave a insisté sur le rôle historique que la France joue dans la région. Sur le plan économique, l'accord d'association devra permettre de fortifier les bons échanges commerciaux qui existent entre le Liban et les pays de la Communauté européenne. L'accord offre de nouvelles perspectives aux entreprises françaises au Liban. Il a mentionné que la France y était le premier investisseur étranger. Le développement du partenariat euro-méditerranéen représente un élément essentiel à la réalisation d'un avenir pacifique commun aux pays du Nord et du Sud et au dialogue des civilisations.

Répondant à une question de Mme Martine Aurillac, le Rapporteur a confirmé que l'accord prévoyait la conservation et la restauration du patrimoine historique et culturel (article 67).

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 946).

Accord d'association entre la Communauté européenne et l'Algérie

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Henri Sicre, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de l'accord euro-méditerranéen établissant une association entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République algérienne démocratique et populaire, d'autre part (ensemble six annexes, sept protocoles, un acte final, cinq déclarations communes et neuf déclarations unilatérales) (n° 948).

M. Henri Sicre a tout d'abord indiqué que l'accord euro-méditerranéen établissant une association entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République algérienne démocratique et populaire, d'autre part avait été signé le 22 avril 2002 à Valence en Espagne, à l'occasion de la Conférence des Ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne.

Cet accord s'inscrit dans le cadre du partenariat euro-méditerranéen qui illustre la prise en considération des intérêts du Sud de la Méditerranée par l'Union européenne, permettant ainsi un rééquilibrage de sa politique extérieure, notamment par rapport aux pays d'Europe centrale et orientale qui entreront dans l'Union au 1er mai 2004.

Le Rapporteur a ensuite souhaité rappeler brièvement que le processus de Barcelone s'articulait essentiellement autour d'un système très souple d'accords d'association négociés avec chaque partenaire de la rive Sud, dont les principaux objectifs sont la mise en œuvre d'un dialogue politique, la création d'une zone de libre-échange en 2010 et l'instauration d'une large coopération financée par les programmes MEDA.

Ces accords d'association non seulement se substituent aux anciens accords de coopération conclus dans les années soixante-dix avec la plupart des pays du Maghreb et du Machrek, dont le champ d'application était limité aux dispositions commerciales et à l'assistance financière, mais sont également destinés à adapter les relations contractuelles euro-méditerranéennes à l'évolution des règles commerciales multilatérales en vigueur depuis le cycle de l'Uruguay. Ainsi, le présent accord, lorsqu'il entrera en vigueur, se substituera aux deux accords signés avec l'Algérie le 26 avril 1976.

Cet accord est similaire aux accords conclus précédemment avec l'Egypte, Israël, la Jordanie, le Maroc, la Tunisie ou encore le Liban. Les négociations de l'accord se sont étalées sur quatre ans. Les aspects les plus délicats ont concerné le démantèlement tarifaire, les dispositions sociales, en particulier le droit des travailleurs, et surtout les questions JAI - de justice et d'affaires intérieures.

Ainsi, au titre 8 est inclus, pour la première fois dans un accord d'association euro-méditerranéen, un chapitre Justice Affaires intérieures complet. L'une des spécificités réside dans l'article 90 qui instaure une coopération dans la lutte contre le terrorisme. Il s'agit, à l'instar de ce qui est prévu dans l'accord d'association avec l'Egypte, d'échanger des informations sur les moyens et méthodes employés par chacune des parties dans ce domaine. Par ailleurs, à la demande de l'Algérie, des échanges d'informations sur « les groupes terroristes et leurs réseaux » sont prévus.

Par ailleurs, au titre 6 un chapitre est consacré aux droits des travailleurs algériens, qui est transposé de l'accord de coopération de 1976.

M. Henri Sicre a ensuite souligné que des améliorations avaient été apportées aux conditions de délivrance des visas par la France. Sur les cinq dernières années, le nombre de visas délivrés a été en augmentation constante. Entre 1996 et 1999, il a triplé, passant de 48 000 à 147 000. Cette évolution s'est poursuivie en 2000 et 2001, avec respectivement 178 000 et 277 000, soit une hausse de plus de 55 %. En 2002, le nombre global de visas délivrés s'est tassé avec un chiffre de 180 000 pour une demande annuelle de 830 000. C'est essentiellement la mauvaise qualité des dossiers présentés qui explique cette baisse. Enfin, les conditions d'accueil du public à Alger ont été réformées, avec la mise en service des nouvelles infrastructures, intervenue en février 1999. La France continue néanmoins à travailler à l'amélioration des conditions de délivrance des visas. Ainsi le consulat général d'Annaba a rouvert ses portes en janvier 2001. La réouverture du consulat d'Oran est en préparation. Le ministère des Affaires étrangères annonce également que de nouveaux efforts seront engagés dans les prochains mois pour améliorer les conditions d'accueil du public et réduire les délais de délivrance qui sont aujourd'hui de 4 semaines en moyenne.

Pour finir, le Rapporteur a indiqué qu'une partie de son rapport était consacrée à la présence économique française en Algérie, à la coopération bilatérale en matière culturelle, éducative, scientifique et technique, mais également à la situation politique intérieure qui est totalement conditionnée par l'élection présidentielle d'avril 2004.

En conclusion et après avoir indiqué que le Sénat avait autorisé la ratification du présent accord le 17 juin dernier, M. Henri Sicre a recommandé l'adoption du présent projet de loi.

M. Richard Cazenave a demandé si des avancées pouvaient être attendues dans la constitution d'une zone de libre-échange entre les pays du Maghreb.

Le Président Edouard Balladur a demandé si les trois pays du Maghreb faisaient partie du NEPAD.

M. Henri Sicre a répondu qu'un certain nombre d'instruments visant à une intégration économique progressive du Maghreb avaient été mis en place dans le cadre de l'Union du Maghreb arabe (UMA), mais sans grand succès. Les différends entre l'Algérie et le Maroc, notamment sur la question du Sahara occidental, empêchent toute avancée réelle.

S'agissant du NEPAD, les trois pays du Maghreb en font bien partie.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 948).

Pour la discussion de ces trois textes en séance publique, il a été demandé l'application de l'article 107 du Règlement.

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