COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

COMPTE RENDU N° 21

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 16 décembre 2003
(Séance de 16 heures 15)

Présidence de M. Edouard Balladur, Président de la Commission des Affaires étrangères,
et de M. Pierre Méhaignerie, Président de la Commission des Finances

SOMMAIRE

 

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- Audition, conjointe avec la Commission des Finances, de M. Francis Mer, Ministre de l'Economie, des     Finances et de l'Industrie, sur le Pacte de stabilité et de croissance



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Audition de M. Francis Mer

La Commission des Affaires étrangères a procédé à l'audition, conjointe avec la Commission des Finances, de l'Economie générale et du Plan, de M. Francis Mer, Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, sur le Pacte de stabilité et de croissance.

M. Edouard Balladur, Président de la Commission des Affaires étrangères, a d'abord remercié le Ministre pour sa présence devant les deux commissions, des Finances et des Affaires étrangères. Il s'est interrogé sur la nature et le sens du Pacte de stabilité aujourd'hui, sur les engagements que le Gouvernement avait pris devant les autorités de Bruxelles et sur la possibilité de poursuivre la baisse des prélèvements obligatoires au cours des prochaines années, compte tenu de ces engagements.

M. Francis Mer, Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, a expliqué qu'il partageait la définition du Premier ministre sur le Pacte de stabilité et de croissance, qualifié par celui-ci de « règlement de copropriété » entre plusieurs pays, partageant une monnaie commune. L'objectif est que le comportement de certains pays ne se traduise pas par des conséquences négatives pour les autres Etats membres. Ainsi les membres de la zone euro ont-ils en commun une banque centrale, une monnaie et un taux d'intérêt unique. Ces trois éléments sont liés par la gestion de la politique économique. Il faut d'ailleurs rappeler qu'aujourd'hui le déficit pondéré de la zone euro est de l'ordre de 3 %, ce qui est bien moindre qu'aux Etats-Unis ou au Japon où il est respectivement de 4,5 et de 7 % . Cela permet de relativiser les choses.

Néanmoins, les politiques européennes doivent demeurer convergentes : le seuil de 3 % est important, en particulier dans la mesure où il est directement lié à cet objectif fondamental qu'est la maîtrise de l'endettement public. Ce taux de 3 % est en effet le palier pour que, avec une croissance économique de 2,5 % et une inflation de l'ordre de 2 %, l'endettement public reste inférieur à 60 % du PIB. Ce taux de 60 % n'est néanmoins qu'une convention comptable dont l'application est parfois curieuse. Le changement de traitement par Eurostat, au début 2003, du déficit de Réseau Ferré de France (RFF) en est une illustration. Par ailleurs, le chiffre de 60 % ne prend en compte que la dette explicite. Si la dette implicite, c'est-à-dire les engagements hors bilan, par exemple les charges de retraite, était prise en compte, les chiffres seraient bien plus importants.

Aujourd'hui, quelques Etats connaissent un taux d'endettement de 40 % de leur PIB, plusieurs dont la France avoisinent 60 %, et certains comme la Belgique ou l'Italie dépassent les 100 %. Il y a eu consensus politique pour ne pas appliquer la règle d'endettement à la Belgique et à l'Italie, ce qui a été très positif et a permis à ces pays d'adhérer à l'euro.

Le Pacte de stabilité présente donc l'intérêt d'exister : il s'agit d'un « garde-fou » efficace pour aider les Etats à être responsables vis-à-vis d'eux-mêmes et des autres.

S'agissant des événements récents, si le Pacte avait été appliqué au pied de la lettre, la Commission aurait dû proposer que le déficit français soit ramené en dessous de 3 % du PIB dès 2004. Interprétant librement le texte, la Commission a proposé de reporter à 2005 cet objectif. Le point de divergence entre le Gouvernement et la Commission portait donc non sur l'objectif lui-même, mais sur la manière de l'atteindre. La Commission voulait que la France réduise son déficit d'un point de PIB dès 2004, alors que le Gouvernement proposait une réduction de 0,77 %. La querelle ne portait donc que sur 0,23 point de PIB. Il s'agissait donc d'une question d'influence sur ce point entre la Commission et le Conseil et la Commission n'a pas voulu rentrer dans la discussion. Ce manque de flexibilité est surprenant. Le blocage, puis le vote du Conseil auraient pu être évités si la Commission n'en était pas restée à un calcul arithmétique pour 2004, alors que, par ailleurs, elle avait su faire preuve de souplesse en interprétant le Pacte de stabilité. Cette fois, la Commission s'est considérée comme comptable de l'exécution du traité.

Aujourd'hui les engagements de la France vis-à-vis de Bruxelles sont issus, d'une part, des discussions qui ont eu lieu devant le Parlement pendant la discussion budgétaire et, d'autre part, du plan « vieillesse handicap » annoncé par le Gouvernement, qui devrait se traduire, l'an prochain, par un surcroît de recettes.

Par ailleurs, la demande faite au Gouvernement de récupérer 880 millions d'euros, soit 0,05 point de PIB, sur le compte d'EDF au titre de l'impôt sur les sociétés permettrait une diminution des déficits en 2004. Ceci illustre clairement l'approche comptable avec laquelle sont traités les problèmes budgétaires par la Commission alors qu'il serait souhaitable au contraire d'en faire une application plus fine.

Il est évident que le Pacte de stabilité et de croissance répond à un besoin impératif. Néanmoins, la Commission n'a pas su, ou voulu, le faire évoluer de manière intelligente et il est aujourd'hui nécessaire de l'améliorer, pas tant dans sa lettre, que dans la manière dont il est perçu.

Les dépenses d'avenir que sont celles affectées à la recherche et à la défense introduisent des différences significatives. Hors celles-ci, en ordre de grandeur, l'Italie et l'Allemagne seraient à 2 % de déficit et l'Espagne à seulement 1,3 %, soit près de deux points de moins que nous. Mais si la France avait le même comportement que l'Espagne sur ces deux sujets, son déficit serait plus proche de 2 % que de 4 % du PIB.

Après avoir laissé passer les polémiques actuelles, il faudra, sans doute en 2005, chercher à utiliser le Pacte de façon plus efficace. On a bien vu la récession cumulative entraînée au Portugal par le respect comptable de la règle des 3 %.

Comme il a été dit à Bruxelles, la politique du Gouvernement consistera, en 2004 et jusqu'en 2007, à ne pas augmenter les dépenses de l'Etat en volume. Les surplus éventuels de recettes seront affectés en priorité à la baisse du déficit. La continuation de la baisse de certains impôts sera gagée par la réduction de dépenses ou la hausse d'autres impôts.

A une question du Président Edouard Balladur sur la signification du déficit structurel et l'inclusion dans celui-ci des dépenses militaires et de recherche, M. Francis Mer a indiqué qu'il s'agissait de la mesure du déficit hors variations de la conjoncture. Il inclut donc les dépenses de recherche et les dépenses militaires. D'ailleurs la Commission européenne elle-même a introduit cette notion qui n'était pas dans le Pacte de stabilité tel qu'adopté en 1997, afin qu'il ne favorise pas les comportements pro-cycliques. Cela signifie qu'il faut se munir de réserves financières dans les bonnes années pour mieux passer les mauvaises. Les Etats-Unis savent mieux utiliser que nous le déficit comme outil contra-cyclique, puisqu'ils sont passés d'un excédent de 1,5 % à un déficit actuel de  5 % du PIB avec une relance budgétaire massive, soit une variation de 6,5 points du solde budgétaire. L'Union européenne, dans le même temps, n'a fait varier son solde moyen que de 1,5 point (de - 1 % à - 3 %). Les Etats-Unis savent d'ailleurs rebondir en repassant rapidement à des excédents budgétaires en cas d'amélioration conjoncturelle. L'esprit du Pacte de stabilité et de croissance devrait donc permettre de se rapprocher autant que possible d'un déficit structurel nul ; ainsi le programme de stabilité de la France propose un déficit structurel de 0,2 % du PIB en 2007.

Notant que même les Pays-Bas avaient dépassé la norme des 3 % du PIB, M. Pierre Méhaignerie, Président de la Commission des Finances, a tenté de résumer la position du Gouvernement en disant qu'il ne fallait pas renégocier le Pacte, mais l'adapter en période de croissance économique faible. Il a demandé sur quelles bases étaient calculés les chiffres inscrits dans le plan de stabilité de la France fixant la croissance en volume des dépenses d'assurance maladie à 2,5 % et celles des collectivités locales à 2 %, alors que la croissance moyenne des dépenses publiques sera nulle. Les recettes provenant du parc immobilier pourraient aller au-delà des 500 millions d'euros prévus dans le Pacte de stabilité et leur gestion devrait revenir à la Caisse des dépôts et consignations, et non à une quelconque nouvelle agence publique dont on annonce la création. Le programme de stabilité de la France prévoit que la décentralisation en cours entraînera une clarification des compétences, une source d'économies et un levier à la réforme de l'Etat, il faudra donc mettre effectivement en place cette clarification avec les transferts de personnel correspondants.

M. Francis Mer a indiqué que le taux de 2 % pour les collectivités locales était le résultat d'une appréciation raisonnable de leur situation et qu'il constituait un maximum. Le taux de 2,25 % pour les dépenses d'assurance maladie résulte d'une nécessaire maîtrise des dépenses de santé qui viendraient ainsi à croître comme le PIB. Les recettes prévues provenant de la cession du parc immobilier sont un minimum et il ne faut pas s'interdire de faire mieux ; une réflexion est en cours pour décider qui sera en charge de ces cessions. La création d'une nouvelle agence n'est pas une certitude, mais une éventualité.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général de la Commission des Finances, a noté la préférence du Gouvernement pour une adaptation plutôt qu'une refonte du pacte, pour mieux prendre en compte les cycles conjoncturels. Les Etats-Unis bénéficient d'une unité de commandement entre les pouvoirs budgétaire et monétaire qui fait défaut dans l'Union européenne, où chaque autorité de décision développe ses objectifs propres. Il s'est interrogé sur l'application du Pacte de stabilité et de la convergence aux pays inclus dans l'élargissement.

M. Didier Migaud a regretté que cette audition intervienne si tardivement, alors que les décisions sont déjà prises. Il a noté que quelques Etats membres pouvaient s'affranchir du « règlement de copropriété » quand ils le veulent, ce qui les met en situation difficile pour demander ensuite plus de souplesse dans son application. Cette situation ne fait pas avancer l'Europe et comporte un risque de réaction négative de la BCE. Les prévisions sont toujours aléatoires comme l'influence négative prévisible de l'appréciation de l'euro, qui est déjà au-delà des 0,7 % contenus dans le programme de stabilité de la France. On ne comprend pas pourquoi le Gouvernement propose de créer une taxe supplémentaire qui apportera des ressources immédiates, taxe qui ne sera pas supportée par les mêmes contribuables qui bénéficient des réductions d'impôt sur le revenu et alors que les dépenses nouvelles en faveur des personnes âgées n'interviendront que plus tard. Il faut s'interroger sur les conséquences récessives d'une diminution du déficit de 0,5 % par an, qui impliqueront une croissance tendancielle de 3 % par an à l'horizon de 2005 ou 2006, ce qui est irréalisable. S'agissant de l'application d'un taux de 5,5 % de TVA sur la restauration, y a-t-il une chance d'entrée en vigueur en 2004 ? Le Gouvernement y voit-il un risque ?

M. Didier Migaud a ensuite interrogé le Ministre sur les impôts qu'il faudra augmenter pour compenser les baisses déjà prévues, ce qui rend illusoire une baisse des prélèvements obligatoires, ainsi que sur les mesures de gel budgétaire qui seront prises en début d'année prochaine. Il a demandé si la limitation de la croissance des dépenses des collectivités locales avait pris en compte les transferts de charges induits par la loi de décentralisation et était gagée par une augmentation de la fiscalité locale, qui est la plus injuste. L'objectif de limitation des dépenses de sécurité sociale à 2,5 % relève de la méthode Coué ; on ne sait pas par quels moyens le Gouvernement y parviendra et on peut craindre un transfert de compétence vers les mutuelles et les régimes complémentaires.

Le Président Edouard Balladur a rappelé qu'un débat sur le Pacte de stabilité et de croissance ne devait pas se transformer en un débat général sur le programme pluriannuel des finances publiques.

M. Hervé Mariton a demandé des précisions sur la stabilisation du taux des prélèvements obligatoires à 43,6 points de PIB alors que la hausse éventuelle des prélèvements décidée par les collectivités territoriales et les partenaires sociaux est difficile à chiffrer. Le Gouvernement a-t-il étudié les perspectives d'évolution des impôts locaux ?

M.  Philippe Auberger a souligné le caractère purement conventionnel du Pacte de stabilité. Il suffit qu'Eurostat décide de modifier un critère ou qu'un membre de la Commission demande une réintégration de recettes fiscales pour que les modalités de calcul des éléments du Pacte de stabilité soient fortement modifiées. Cette situation témoigne du profond déficit démocratique dont souffre l'Union européenne.

La croissance potentielle prise en compte dans le Pacte de stabilité a été revue à la baisse : fixée entre 2,5 % et 3 % au milieu des années 90, elle s'établit désormais à 2,25 % et aucune mesure n'est prise pour améliorer son niveau. L'évolution des taux d'intérêt risque d'être lourde de conséquences. Ils sont actuellement très bas, ce qui allège la charge de la dette, mais il est certain qu'ils vont prochainement augmenter, entraînant un alourdissement de cette charge.

En réponse à ces différentes interventions, M.  Francis Mer a apporté les précisions suivantes :

- il serait excessif de dire que la Banque fédérale américaine est aux ordres de la Maison Blanche ; en revanche, il est certain que ses décisions tentent d'arbitrer entre maîtrise de l'inflation et soutien à la croissance économique. La situation de la Banque centrale européenne est très différente dans la mesure où son objectif principal est la stabilité des prix. Cela ne veut pas dire pour autant qu'elle ne peut pas se soucier de la croissance, surtout lorsque, comme c'est le cas actuellement, les risques inflationnistes sont limités ;

- les nouveaux membres de l'Union européenne, une fois qu'ils auront choisi d'entrer dans le mécanisme de stabilisation des changes dont l'objectif est de permettre ensuite leur intégration dans la zone euro, ne pourront rester à l'extérieur de cette zone une fois les critères de Maastricht satisfaits, car aucun d'entre eux n'a négocié de clause « d'opting out ».

- il est injuste d'affirmer, comme le fait M. Didier Migaud, que les parlementaires ne sont informés qu'après la prise de décision, alors que le programme de stabilité de la France est quasiment identique à celui qui a été transmis fin septembre à la Représentation nationale ;

- la solution retenue par le Conseil des ministres européen ne traduit pas une volonté de s'affranchir du Pacte de stabilité, mais une volonté d'efficacité ; elle résulte d'une décision majoritaire du Conseil, prise sous présidence italienne, avec notamment l'approbation de certains petits pays, y compris du Portugal, qui a lui-même été soumis à la procédure de déficit excessif l'année dernière ;

- la réduction du taux de TVA sur la restauration ne pourra intervenir qu'après une décision unanime. Cette unanimité n'a pas encore été trouvée parce que la Commission a profité de cette demande, à laquelle elle adhère, pour proposer une refonte plus large des listes H et K, réforme dont certaines dispositions ne font pas l'unanimité ;

- le taux de prélèvement obligatoire de 43,6 % prend en compte le surcroît de cotisations sociales lié au financement des nouveaux plans pour le handicap et la dépendance ; ces recettes supplémentaires permettront d'engager de nouvelles dépenses, mais aussi de rattraper le retard pris dans ce domaine depuis plusieurs années ;

- on ne peut pas dire que la diminution du déficit structurel fasse courir un risque à la croissance. La diminution des impôts doit être poursuivie dans la mesure du possible et les dépenses contenues. Mais il n'est pas possible d'amalgamer la réduction du déficit et le taux de croissance ;

- la réforme de la sécurité sociale doit aboutir à la discussion d'un projet de loi avant l'été ; l'objectif n'est pas forcément de réduire le niveau des dépenses mais de mieux maîtriser leur évolution par rapport à celle des recettes. Comme le montre l'exemple allemand, bien des choses sont liées à des comportements de consommation ;

- il n'y a pas de raison que les prochaines mesures de « gel » budgétaire soient très différentes de celles qui ont été prises au début de l'année 2003 ; le Parlement autorise des dépenses maximales et le Gouvernement doit faire en sorte de respecter ce plafond dans un contexte d'incertitude quant au niveau des recettes ;

- s'il est vrai que les exportations ont un effet positif sur la croissance, leur impact sur les recettes fiscales est assez faible ; un affaiblissement de l'euro moins rapide que prévu ralentirait, certes, la croissance des exportations, mais aurait des conséquences positives sur le niveau de l'inflation et le pouvoir d'achat, sans pour autant réduire sensiblement les recettes de l'État, dont chacun s'accorde à reconnaître qu'elles ont fait l'objet de prévisions raisonnables ;

- le contrôle démocratique des décisions prises dans le cadre du Pacte de stabilité est effectivement nécessaire. Cette question est délicate ; il importe avant tout d'en faire quelque chose de compréhensible et d'utile. S'agissant de la hausse des taux d'intérêt, la reprise de la croissance devrait permettre de dégager les recettes nécessaires pour couvrir le surcoût qu'elle occasionne. L'hypothèse de croissance potentielle retenue, qui est de 2,25 %, est comprise entre celle de la Commission européenne, qui est de 2 %, et celle de la Banque de France, qui est de 2,5 %. Elle tient notamment compte de l'impact du vieillissement de notre pays qui explique le fléchissement de son dynamisme. Afin de contrer les effets de ce phénomène démographique, la politique actuellement mise en œuvre par la majorité vise à changer les comportements.

M. Jacques Myard a estimé que la décision du Conseil des Ministres des finances sur le Pacte de stabilité marquait la primauté du politique sur la technocratie. Jugeant que le Pacte de stabilité était fondé sur la doctrine monétariste, il a considéré qu'il s'agissait d'un modèle sans rapport avec la réalité. Il faut abolir ce Pacte tout en gardant des règles de discipline budgétaire, car il repose sur une conception rentière de l'économie contraire à la logique d'investissement et de croissance, que privilégient par exemple les autorités monétaires américaines.

M. Gilbert Gantier a fait observer que l'endettement de la France qui était de l'ordre de 20 % du PIB en 1980 était passé à plus de 60 % en 2002, alors même que les déficits contribuent à aggraver cette situation. Le problème du vieillissement est par ailleurs extrêmement préoccupant. Quel équilibre monétaire est-il souhaitable de mettre en œuvre à moyen et à long terme ?

M. Charles de Courson a demandé s'il y avait un risque que la Commission européenne intente un recours à l'encontre de l'interprétation souple mise en œuvre par le Conseil à propos du Pacte de stabilité. Alors que l'objectif du Gouvernement est de baisser le taux des prélèvements obligatoires, les projections montrent qu'en les maintenant jusqu'en 2007, l'équilibre des finances publiques ne serait toujours pas rétabli en haut du cycle de croissance. Par ailleurs, selon quel partage entre recettes et dépenses la réduction du déficit de l'assurance maladie qui doit être comprise entre 0,3 et 0,5 % du PIB sera-t-elle financée ?

M. Augustin Bonrepaux a demandé comment le Gouvernement comptait faire pour concilier le projet de baisse de la TVA dans certains secteurs, la baisse de l'impôt sur le revenu et les demandes de la Commission européenne tendant à la réduction de notre déficit. Les autres impôts seront-ils augmentés ou les dépenses seront-elles réduites ? Quels services publics seront frappés par ces restrictions ? Le projet de taxe pesant sur les salariés pour financer le plan relatif aux personnes âgées va permettre de dégager de nouvelles recettes : quelle sera leur affectation dans l'attente de l'élaboration de ce plan ? La hausse de 2 % retenue pour le budget des collectivités locales est insuffisante, compte tenu de l'importance des transferts de charge opérés. Y aura-t-il une hausse des impôts locaux ou de la fiscalité nationale ?

En réponse aux différents intervenants, M. Francis Mer a apporté les réponses suivantes :

- à ce stade, il n'est pas possible de répondre à la question relative à l'arbitrage entre la réduction des dépenses et la hausse de certaines impositions, car il s'agit pour le moment d'hypothèses de travail ;

- la Commission européenne pourrait effectivement intenter un recours à l'encontre de la décision du Conseil portant sur le Pacte de stabilité, mais elle ne souhaite pas faire monter la pression et elle ne se trouve pas dans cet état d'esprit ;

- le manque de croissance accumulé dans les années précédentes devrait aboutir à une conjoncture plus favorable d'ici 2007 ; les Etats-Unis tablent pour leur part sur une croissance plus proche de 5 % que de 4 % pour l'année prochaine ; si la France devait rester en deçà de 2,5 % dans les prochaines années, il faudrait réagir pour renouer avec le dynamisme et contrer l'effet induit par le vieillissement de la population ;

- il est indispensable de maîtriser l'endettement, car il pèse sur les générations futures ; il faut poursuivre la discipline budgétaire pour pouvoir rembourser la dette et revenir à l'équilibre des finances publiques, qui devrait être facilité par le retour à la croissance ;

- il n'est pas question d'abolir le Pacte de stabilité, mais il faut corriger ses imperfections pour mieux tenir compte du différentiel d'inflation entre les pays ; le Pacte est en effet nécessaire pour maintenir un cadre commun en matière de politique budgétaire.

Le Président Edouard Balladur a estimé que la période actuelle nécessitait des efforts que la faible croissance rend difficiles ; elle nécessite également, pour que la situation soit assainie à moyen terme, des réformes courageuses afin d'éviter, par exemple, que les baisses de dépenses opérées au niveau de l'Etat ne conduisent à un transfert de ces dépenses au niveau social ou local. On peut se demander si, dans les années qui viennent, il sera possible de réduire de façon importante les prélèvements obligatoires si l'on n'opère pas les changements structurels indispensables. Il est également nécessaire d'adapter le Pacte de stabilité aux aléas de la conjoncture, en incitant les Etats à réduire leur déficit si celle-ci est favorable ; il convient donc d'améliorer la coordination entre les politiques économiques conduites au sein de l'Union européenne.

En définitive, il ne s'agit pas de moins d'Europe, mais de davantage d'Europe.

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