COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

COMPTE RENDU N° 48

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 25 mai 2004
(Séance de 16 heures 30)

Présidence de M. Edouard Balladur, Président

SOMMAIRE

 

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- Approbation de l'accord maritime avec le Vietnam (n° 1415) - rapport

- Approbation de l'accord avec l'Afrique du Sud concernant la navigation de commerce (n° 1416) - rapport


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Approbation de l'accord maritime avec le Vietnam

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Claude Lefort, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord maritime entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République socialiste du Vietnam signé à Paris le 23 mai 2000 (n° 1415).

Avant de présenter le contenu du présent projet de loi autorisant l'approbation d'un accord maritime signé à Paris le 23 mai 2000 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République socialiste du Vietnam, M. Jean-Claude Lefort a souhaité faire deux remarques.

La première concerne l'état des relations maritimes entre la France et le Vietnam. Le présent accord vient combler un vide dans la mesure où un précédent accord signé en 1978 entre les deux gouvernements n'avait pas été suivi d'une mise en œuvre pratique par les acteurs économiques français et vietnamiens. Cet accord de 1978 était un accord de réservation de trafic à parts égales et les armateurs français et vietnamiens, pour des raisons diverses, n'en avaient pas fait application.

La seconde remarque concerne le délai qui s'est écoulé entre la signature de ce texte et sa présentation au Parlement en 2004. Ce retard du côté français -car l'accord a été ratifié par le Vietnam en 2000- résulte d'une interprétation divergente faite par différents services de l'Etat sur la nécessité ou non d'une autorisation parlementaire en application de l'article 53 de la Constitution.

S'agissant du fond, si les dispositions du présent accord sont traditionnelles, elles n'en sont pas moins essentielles pour les acteurs économiques français que le Rapporteur a par ailleurs rencontrés. L'accord permet de consolider leur présence au Vietnam dans la mesure où il sécurise juridiquement leurs activités. Une fois ratifié, cet accord permettra de passer d'une cette situation de fait par définition plus aléatoire, à une situation de droit et il aura un effet « cliquet » permettant d'éviter tout retour en arrière.

Si les armateurs français en général se félicitent des stipulations que cet accord contient, pour le principal opérateur français concerné il constitue une base pour le développement d'autres accords et ententes. En effet, la première licence de Gemartrans, la compagnie détenue à 51 % par l'Etat vietnamien et à 49 % par CMA-CGM, avait été accordée pour dix ans, de 1989 à 1999, avant d'être renouvelée pour cinq ans, soit jusqu'en 2004. Cet accord représente donc une base sérieuse pour améliorer encore la position de CMA-CGM, qui est leader avec plus de 25 % de part de marché sur les segments « Vietnam-pays voisins » et dans une situation plus modeste sur les segments longues destinations avec environ 10 % de parts de marché. Les possibilités d'expansion sont grandes s'agissant des activités maritimes et tout particulièrement dans cette zone géographique. La présence française dans l'espace ASEAN est majeure et ouvre de grandes possibilités, y compris en matière d'aménagements portuaires. On ne peut exclure à terme que les relations maritimes entre cet espace économique asiatique et l'Europe puissent avoir comme tête de pont les acteurs français. Aujourd'hui, ce sont l'Allemagne, les Pays-Bas et la Grande-Bretagne qui, dans cette région, sont les plus en pointe tandis que les Etats-Unis sont très présents dans la zone du Pacifique.

En conclusion, même si l'on peut noter que les agences maritimes au Vietnam ne peuvent être détenues à plus de 49 % par une compagnie étrangère, cet accord assure un cadre juridique stable aux acteurs économiques et leur ouvre des perspectives de développement intéressantes. C'est pourquoi, au vu de ces considérations, le Rapporteur a recommandé l'adoption du présent projet de loi.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (no 1415).

Accord avec l'Afrique du Sud concernant la navigation de commerce

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Eric Raoult, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Afrique du Sud concernant la navigation de commerce et autres matières maritimes connexes signé à Pretoria le 26 juin 1998 (n° 1416).

M. Eric Raoult, Rapporteur, a brièvement rappelé le contexte politique en Afrique du Sud avant de présenter les grandes lignes de l'accord.

L'Afrique du Sud est un garant de la stabilité régionale de l'Afrique subsaharienne. L'organisation du troisième scrutin post-apartheid, les élections du 14 avril 2004, ont montré combien la démocratie est aujourd'hui ancrée dans ce pays, dix ans seulement après la fin de l'apartheid. Au cours de ces dix années l'ANC a dominé le jeu politique. Le Président sud-africain Thabo Mbeki a largement remporté cette élection de 2004 en obtenant près de 70 % des suffrages.

Les relations bilatérales franco-sud africaines se sont renforcées depuis le soutien de la France au Nouveau Partenariat pour le développement économique de l'Afrique (NEPAD) à l'occasion du Sommet du G8 à Evian en juin 2003 et par la visite d'État en France en novembre 2003 à Paris du Président sud-africain Thabo Mbeki.

La France soutient l'Afrique du Sud à travers le programme européen de reconstruction et de développement (21 millions d'euros) et par une aide bilatérale de 6,8 millions d'euros en 2003. Par ailleurs, la France contribue à la lutte contre le Sida, le paludisme et la tuberculose. La France est le cinquième partenaire de l'Afrique du Sud, avec la présence en Afrique du Sud de 70 filiales de sociétés françaises.

Sur le plan économique, l'Afrique du Sud est longtemps restée en retrait du commerce maritime mondial mais ce pays est important du point de vue du transport maritime, tant par son commerce propre que par son rôle de porte de l'Afrique Australe et sa situation sur les routes maritimes qui contournent l'Afrique. L'économie de l'Afrique du Sud est d'ailleurs aujourd'hui la plus riche et la plus diversifiée du continent africain.

Les échanges maritimes directs entre ports français et sud-africains sont encore de faible ampleur : le présent accord maritime entre la France et l'Afrique du Sud devrait contribuer à développer ces relations bilatérales.

L'accord est un traité bilatéral qui s'applique d'une manière générale à l'ensemble des problèmes de marine marchande et des problèmes maritimes connexes entre la République française et la République d'Afrique du Sud, ainsi qu'à la navigation fluvio-maritime.

En réaffirmant les principes du droit international applicable, les Parties s'engagent à appliquer de manière effective le principe du libre accès au marché et au trafic sur une base commerciale.

L'accord s'appliquera à tous les navires affrétés et assimilés battant pavillon de l'État signataire, à l'exception des bâtiments de guerre et autres navires utilisés à des fins non commerciales, des navires de pêche, des navires affectés aux services portuaires (pilotage etc.) et des navires de plaisance. L'Accord ne concerne pas le cabotage national.

Les clauses économiques ne mettent en place aucun système discriminatoire par rapport aux autres membres de l'Union européenne. Les dispositions de l'accord s'appliquent aux Parties sans préjuger des droits et obligations relevant de la Convention des Nations unies de 1974 relative au code de conduite des conférences maritimes.

Dans les ports, les Parties assurent l'accès et l'utilisation de toutes les installations portuaires à des fins commerciales. Les Parties percevront les mêmes droits et taxes portuaires que sur leurs propres navires en des circonstances similaires.

L'accord prend en compte le cas des passagers clandestins. Leur débarquement peut être autorisé par les autorités compétentes. Une clause de réadmission des passagers clandestins et de coopération dans l'établissement de la nationalité des passagers découverts est insérée.

Enfin, les Parties conviennent de coopérer en promouvant le transport maritime entre elles. Pour cette raison les Parties établissent un Comité de liaison bilatéral du transport maritime.

D'un point de vue économique l'accord vient conforter les conditions de développement de l'activité des opérateurs maritimes français, notamment Delmas et CMA/CGM. Il garantit un cadre juridique stable et non discriminatoire. L'ouverture du transport maritime en Afrique respecte, pour les opérateurs français, le droit de la concurrence communautaire.

Cet accord participe au soutien politique accordé par la France au processus de réforme et de transition en cours en Afrique du Sud à la suite de l'abolition du système d'apartheid et de l'instauration d'un nouvel ordre politique. L'accord offre l'occasion de prendre acte de la libéralisation du commerce et de la réforme économique.

Le Président Édouard Balladur a remarqué le faible PIB de l'Afrique du Sud - environ 15 fois inférieur à celui de la France - malgré le fait que celui-ci représente environ un quart du PIB africain. Il a en outre souhaité des précisions sur la pandémie du SIDA et s'est demandé si l'Afrique du Sud ne se trouvait pas dans une situation très spécifique face à cette maladie.

Le Rapporteur a indiqué que c'est en Afrique du Sud que le Sida était le phénomène le plus connu et le plus recensé. Il a rappelé que l'Afrique du Sud n'avait d'abord montré aucune contre volonté de lutter efficacement contre l'épidémie, alors qu'il est l'un des plus touchés au monde par la pandémie (5 millions de séropositifs, soit près de 12% de sa population). Le Président Thabo Mbeki a maintenant décidé de mettre en œuvre une campagne nationale de traitement par les trithérapies gratuit pour ces personnes.

La mise en œuvre de ce vaste plan d'action va également nécessiter l'amélioration du système de santé sud-africain ainsi que l'augmentation et la formation du personnel médical. L'Afrique du Sud va ainsi consacrer près de 12 milliards de rands (1,75 milliard de dollars) à la lutte contre le sida. Cette nouvelle politique s'accompagne de l'accord conclu en 2003 autorisant les médicaments génériques antisida dans toute l'Afrique subsaharienne.

L'autre problème auquel est confrontée l'Afrique du Sud est la violence, surtout juvénile. Dans une société où la violence est perçue comme une chose «normale», quotidienne, les femmes sont les premières victimes. On dit ainsi qu'en Afrique du Sud il ne se passe pas une seule minute sans qu'une femme soit violée.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (no 1416).

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