COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 5

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 9 octobre 2002
(Séance de 11 heures 30)

Présidence de M. Guy Teissier, président

SOMMAIRE

 

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- Audition du général Richard Wolsztynski, chef d'état-major de l'armée de l'air, sur le projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2003 à 2008 (n° 187) et sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230)

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- Examen de l'avis budgétaire air (M. Jean-Louis Bernard, rapporteur pour avis).

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Audition du général Richard Wolsztynski, chef d'état-major de l'armée de l'air, sur le projet de loi de programmation militaire 2003-2008 et le projet de loi de finances pour 2003.

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu le général Richard Wolsztynski, chef d'état-major de l'armée de l'air, sur le projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2003 à 2008 (n° 187) et sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230).

Le général Richard Wolsztynski a d'abord présenté les responsabilités du chef d'état-major de l'armée de l'air. Elles sont doubles. En tant que conseiller opérationnel air du chef d'état-major des armées, il est chargé de préparer les moyens que l'armée de l'air doit savoir mettre de façon instantanée à la disposition de celui-ci ; il lui revient aussi de préparer l'avenir. La maîtrise de cet équilibre, lequel doit prendre en compte l'évolution du contexte international depuis le 11 septembre 2001 et l'inscription dans le cadre européen de la défense de la France, implique un « grand écart » permanent.

S'agissant du projet de loi de programmation militaire, le besoin de l'armée de l'air est de disposer à la fin de la période 2003-2008 d'une capacité opérationnelle améliorée, grâce à une optimisation des conditions de travail et de vie du personnel, ainsi qu'à l'arrivée en fabrication du Rafale et, on peut l'espérer, de l'A 400M. Le projet de loi de programmation soumis au Parlement permet de satisfaire ce besoin. Les opérations militaires sont aujourd'hui encore plus qu'hier interarmées et multinationales. Dans ce contexte, ce qui caractérise avant toute chose l'arme aérienne, c'est sa réactivité. Dans une opération militaire moderne, elle est la première employée. C'est pourquoi l'armée de l'air doit être en mesure de fournir avec une forte réactivité des capacités cohérentes sur lesquelles peuvent s'appuyer les autres composantes de la défense.

En matière de renseignement, afin de garantir l'autonomie stratégique et de maîtriser l'emploi des forces, il est nécessaire de disposer de trois types d'équipements complémentaires, des satellites, des avions et des drones. En ce qui concerne les satellites, les orientations prises dans la loi de programmation s'inscrivent dans cette logique de complémentarité. L'armée de l'air, qui utilise et met en œuvre une partie de ces systèmes, n'est cependant pas en première ligne, l'état-major des armées étant responsable des systèmes spatiaux. S'agissant des avions, l'armée de l'air disposera à partir de 2006 de « pods » de reconnaissance de nouvelle génération  qui seront installés sur les Mirage 2000, puis sur le Rafale en version F3, le total prévu pour 2009 étant de 15. La mise en service opérationnel de drones dits MALE (moyenne altitude longue endurance), en 2004 pour la version intermédiaire et 2009 pour la version définitive, permettra de compléter cette flotte de reconnaissance, dont la complémentarité doit permettre de raccourcir les boucles de décision.

Dans le domaine de la protection, la mise en œuvre du système sol air futur (FSAF) représentera un progrès considérable, qu'il s'agisse de protection du territoire ou de protection des troupes sur les théâtres d'opérations. Ce système apporte un potentiel d'évolution, notamment en matière de défense antimissile balistique, et une portée dont chacune des armées pourra tirer profit.

L'efficacité des opérations aériennes impose que leur préparation et leur conduite soient systématiquement centralisées entre les mêmes mains. C'est le cas notamment sur le théâtre afghan où les opérations sont dirigées à partir d'un centre unique de commandement basé en Arabie Saoudite. Ce principe de l'exécution décentralisée et du commandement centralisé guide la politique de modernisation suivie par l'armée de l'air en matière de moyens de commandement. Avec les fonctionnalités offertes par le système de commandement et de conduite des opérations aériennes (SCCOA), elle sera en mesure de mettre en réseau des moyens aéroportés et des systèmes fixes et mobiles plus ouverts vers l'international et plus réactifs, grâce notamment au système de transmission satellitaire SYRACUSE III. Ainsi, le centre de Lyon qui pourra accueillir des officiers étrangers permettra d'assurer le commandement et la conduite des opérations aériennes interalliées.

Dans le domaine de la projection de forces, il ressort de l'engagement en Afghanistan que toutes les composantes des armées ont besoin d'une capacité de transport aérien instantanée suffisante et souple d'emploi, ce qu'en aucun cas l'affrètement n'est en mesure d'apporter. La déflation des Transall qui commencera en 2005, ne sera que partiellement compensée par l'acquisition de deux Casa CN 235 et de deux Airbus A 330 ou A 340 d'occasion. Il est de fait que le déficit capacitaire de la France tend à s'accroître. Tout repose donc sur l'A 400 M. Plus la mise en service opérationnel de l'A 400 M tardera, plus le déficit se creusera. Le calendrier qui prévoyait une livraison en 2008 des trois premiers A 400 M est d'ores et déjà compromis. Les premières livraisons ne peuvent plus aujourd'hui être envisagées qu'en 2009, ce qui est particulièrement préoccupant. L'A 400 M est la bonne réponse au besoin qui a été exprimé ; il est donc essentiel que ce programme soit lancé au plus tôt.

En matière de projection, le programme d'hélicoptères Cougar Resco, que l'armée de l'air mettra à la disposition du commandement des forces spéciales et qui lui permettra de conduire la mission très importante de récupération des équipages en territoire hostile, est aujourd'hui consolidé. Ces hélicoptères apporteront plus de réactivité et de souplesse, une meilleure survivabilité, ainsi qu'une allonge accrue, une fois qu'ils seront dotés de la capacité de ravitaillement en vol.

S'agissant de la projection de feu, la capacité des armées françaises va gagner en cohérence, en puissance de frappe et en flexibilité d'emploi. L'avenir en la matière, c'est évidemment le Rafale, un appareil caractérisé par sa polyvalence, son fort potentiel d'évolution et son haut degré d'interopérabilité. Le programme Rafale est consolidé : deux commandes globales sont prévues sur la période (46 appareils en 2003, 48 appareils en 2006). 57 Rafale seront livrés entre 2004 et 2008, et les premier et deuxième escadrons seront opérationnels respectivement mi-2006 et début 2008. A plus court terme, la capacité au combat des avions de combats actuels va être améliorée, avec notamment l'installation sur Mirage 2000 D de nouveaux armements à guidage de précision, les missiles Apache (100 à compter de 2002) et Scalp (450 à compter de 2003). L'utilisation opérationnelle de ces missiles de croisière permettra à la France de rentrer dans le cercle très restreint des nations capables d'employer ce type très particulier d'armement.

Ainsi, les capacités s'améliorent. L'évolution des équipements est équilibrée entre le court, le moyen et le long terme. Pour cela, l'effort de l'armée de l'air pour le financement des programmes Rafale et A 400 M s'élèvera en moyenne à 40 % du titre V sur la période de la prochaine loi de programmation, alors qu'il en représentait 17 % en 1996.

Les équipements ne valent que par la valeur des hommes qui les emploient. Il faut à ce titre saluer les efforts prévus en ce qui concerne l'entraînement des forces. L'armée de l'air, qui considère comme efficace le programme qualitatif et international d'entraînement qu'elle a élaboré, est satisfaite qu'il ait été repris sous forme d'indicateurs dans le texte du projet de loi de programmation, le premier à traiter de cette question. L'effort prévu lui permettra notamment d'accroître sa participation aux exercices interarmées et interalliés. Cet effort est d'ailleurs en conformité avec les premiers enseignements de l'engagement des armées françaises sur le théâtre afghan. La qualité et la régularité de l'entraînement que l'armée de l'air peut fournir à ses équipages conditionnent en effet la réussite de ce type de missions.

Un autre facteur déterminant est la disponibilité des appareils. La flotte aérienne militaire vieillit et ce vieillissement accroît les contraintes en matière de maintien en condition opérationnelle. S'est ajouté le constat d'une logistique dégradée, qu'il fallait rendre réactive et plus prédictive. La création il y a deux ans et demi de la structure interarmées de maintenance des matériels aéronautiques de la défense, la SIMMAD, s'inscrivait dans cette logique. Les résultats obtenus, en l'occurrence une remontée de 10 points du taux de disponibilité des appareils, sont encourageants et engagent l'armée de l'air à persévérer dans cette voie, en poursuivant notamment l'optimisation de ses concepts et la rationalisation de ses structures de maintenance. Les crédits prévus par le projet de loi de programmation militaire aideront à poursuivre la remontée engagée.

En matière d'infrastructures, la notion de « grand écart » est également applicable. Il s'agit pour l'armée de l'air de gérer à la fois son héritage, sa modernisation et son passage à la professionnalisation. Une forte priorité vient d'être donnée à l'infrastructure opérationnelle, notamment pour accueillir les nouveaux appareils et équipements. Les crédits alloués au maintien en état de l'infrastructure existante se trouvent limités au strict nécessaire. Il faudra corriger cette tendance au cours de la période 2009-2014.

Mais le grand écart concerne également les ressources humaines. L'armée de l'air conservera un recrutement de qualité en préservant l'attractivité de ses métiers et en développant une politique cohérente d'accompagnement des personnels, du recrutement à la reconversion. Le dispositif visant à consolider la professionnalisation a pour objectif d'attirer, de fidéliser le personnel, dans certaines spécialités en particulier, de valoriser le potentiel et les responsabilités de chacun et en même temps de favoriser la mobilité des personnels. Dès 2003, l'armée de l'air pourra financer un dispositif de valorisation des primes d'engagement lui permettant de faire porter l'effort de recrutement sur les spécialités déficitaires.

La loi de programmation militaire est une loi de fabrication. Strictement respectée année après année, à la fois dans les budgets votés et dans l'engagement financier, cette loi permettra de rejoindre le modèle d'armée 2015. Il convient donc de veiller à ce que les plans de fabrication prévus soient respectés, en particulier en ce qui concerne les Rafale et les A 400 M.

Abordant le projet de budget pour 2003, le général Richard Wolsztynski a jugé que, à plus d'un titre, ce budget était un budget charnière. Premier budget de la période couverte par le projet de loi de programmation militaire 2003-2008, il est conforme à ce projet. L'inflexion ainsi faite était déjà perceptible dans les dispositions de la loi de finances rectificative votée dans le courant du mois de juillet. Celle-ci a non seulement ouvert des crédits au titre III pour combler les dépenses supplémentaires de rémunérations engendrées par les opérations extérieures et par les mesures de revalorisation de la condition militaire décidées après l'adoption de la loi de finances initiale, mais aussi des crédits au titre V en vue de renforcer l'amélioration de la disponibilité des aéronefs de l'armée de l'air, marquant là encore une rupture avec ce qui était devenu une pratique courante, le recours aux crédits du titre V pour combler les insuffisances du titre III.

Comme en témoigne l'augmentation générale de 10 % en crédits de paiement (titres III et V inclus) par rapport à la loi de finances initiale 2002, le projet de budget pour 2003 concernant l'armée de l'air vient conforter cette dynamique. Il lui permettra de progresser dans les trois domaines prioritaires fixés par le Gouvernement, la restauration de la disponibilité des matériels, la modernisation des équipements, la préparation de l'avenir et la consolidation de la professionnalisation.

S'agissant du titre III, les effectifs sont dans leur ensemble stabilisés et permettront d'atteindre le format retenu pour le modèle 2015, soit 70 000 personnels militaires et civils. Les crédits de rémunérations et charges sociales sont en augmentation de 3,4% ; ils représentent 78 % du titre III. Cette augmentation est en partie imposée par l'extension en année pleine du dispositif dit « Sapin » portant revalorisation du point d'indice et des mesures en faveur des bas salaires. Elle s'impose également en raison de la poursuite du plan de revalorisation de la condition militaire.

Le financement de ces mesures ne pénalise pas le fonctionnement courant, puisque celui-ci connaît une augmentation de 6,8 % des crédits, ce qui va notamment permettre de poursuivre les actions menées pour améliorer la qualité de l'entraînement des équipages et, en augmentant leur participation à des exercices interalliés et internationaux, développer leur interopérabilité. En ce qui concerne la réserve, le budget 2003 permettra de garantir une activité moyenne de 25 jours pour les personnels sous contrat.

Les orientations prises vont par ailleurs permettre à l'armée de l'air de poursuivre sa politique d'externalisation, ayant pour objectif de recentrer les activités du personnel vers le cœur du métier militaire. L'ensemble des crédits prévus est déjà affecté à des contrats dont elle tire le meilleur bénéfice.

Les deux principaux volets du titre V sont la restauration de la disponibilité et la modernisation des équipements.

Le montant des crédits de paiement est en augmentation de plus de 16% par rapport à celui de 2002. Si cette augmentation est significative, la faiblesse relative des crédits de paiement attribués à l'armée de l'air en 2002 conduit à nuancer ce constat. Ainsi, elle est toujours dans l'attente du remboursement des crédits de paiement des deux Airbus gouvernementaux.

S'agissant de la disponibilité, 1 milliard d'euros d'autorisations de programme et 900 millions d'euros de crédits de paiement sont prévus en 2003 pour l'entretien programmé des matériels, ce qui permettra à l'armée de l'air de tendre vers l'objectif d'un taux de disponibilité de 75 %.

Le titre V permet la modernisation des équipements dans plusieurs domaines. S'agissant de frappe dans la profondeur, il faut mentionner les travaux d'adaptation du missile Scalp sur Mirage 2000 D, le développement des standards opérationnels F2 et F3 du Rafale. 41 missiles Apache et les 60 premiers missiles Scalp seront livrés ; 430 missiles MICA seront commandés. En matière de renseignement, l'armée de l'air mettra en œuvre l'année prochaine une version intérimaire du drone MALE. L'année 2003 verra par ailleurs la livraison de 3 avions cargos légers CASA 235, ceux-ci s'ajoutant aux 2 livrés cette année. En matière de planification et de conduite des opérations aériennes, un peu plus de 200 millions d'euros d'autorisations de programme et 130 millions d'euros de crédits de paiement seront consacrés au programme SCCOA. Enfin, huit nouvelles bases se verront équipées en moyens modernes de télécommunications, ce qui permettra de renforcer la cohérence opérationnelle globale du réseau des bases aériennes.

L'armée de l'air obtient avec ce budget les moyens d'honorer son contrat opérationnel et de poursuivre la modernisation de ses équipements. Il appartient maintenant à son chef d'état-major d'accompagner et de surveiller ce grand écart. Les autorisations de programme relatives à la commande globale de 46 Rafale, soit 2,27 milliards d'euros, devront être incluses dans le projet de loi de finances rectificative de fin d'année.

Le président Guy Teissier a demandé au chef d'état-major de l'armée de l'air son opinion sur le nouveau recrutement d'élèves-officiers directement à l'issue de l'université.

Le général Richard Wolsztynski a indiqué qu'il disposerait d'un premier bilan en fin d'année. Il s'agit d'une démarche positive, soutenue par l'armée de l'air, qui permet de diversifier les profils des officiers recrutés et qui est l'une des formes du renforcement du lien entre la Nation et son armée.

Évoquant le retard de l'A 400 M face au retrait progressif des Transall, M. Jean-Louis Bernard, rapporteur pour avis des crédits de l'air, a demandé si l'affrètement d'appareils auprès de sociétés civiles n'allait pas devenir indispensable. Il a également demandé si l'armée de l'air n'allait pas devoir acquérir davantage d'avions de transport Casa CN235. Enfin, il a souhaité savoir quel serait l'avenir des drones et si le développement de ces engins n'allait pas changer la physionomie de l'armée de l'air et le rôle des pilotes.

Le général Richard Wolsztynski a répondu qu'il ne rejetait absolument pas l'affrètement qui représente un complément bienvenu dans le cadre d'un flux logistique disposant de délais de préavis raisonnables. Mais, lorsque les armées doivent se projeter dans l'urgence, l'affrètement n'est pas la solution adéquate. Si l'essentiel du flux logistique de la projection de l'armée de l'air au Kirghizistan a été effectué avec des appareils Antonov affrétés, les premiers éléments projetés l'ont été par des C17 de l'US Air Force.

L'A 400 M ayant pris du retard et les Transall devant être retirés du service progressivement, toutes les solutions seront envisagées en cas de crise grave dans les années à venir. L'achat de Casa CN235 supplémentaires portera le parc à 22, allégeant la charge des Transall. Mais aller au-delà de ce chiffre n'apparaît pas indispensable, dans la mesure où le Casa CN 235, qui rend d'appréciables services dans les missions de liaison outre-mer ou dans les limites de l'Union européenne, est un avion aux capacités de transport limitées. La vraie solution est l'A 400 M.

Les drones sont apparus avec la capacité de l'industrie de faire voler des appareils sans pilote, pour des missions opérationnelles qui présentaient trop de risques pour celui-ci. Si, dans un premier temps, certains ont cru à une remise en cause de l'exercice du métier des aviateurs par ces appareils, aujourd'hui les drones sont pleinement intégrés au triptyque du renseignement : les satellites, les avions et les drones sont complémentaires. Le satellite, très bien adapté à une veille stratégique, a en revanche une réactivité limitée, au contraire des avions et des drones. Les drones, sans doute moins réactifs que les avions pilotés, ont cependant une endurance de 20 heures, durée de vol que ni les avions ni leurs pilotes ne peuvent tenir. Il est difficile de réunir les imageries optique, infrarouge et radar sur un avion ou un drone, et un satellite fournit en général un seul type d'image. En revanche, il est possible d'ajuster les configurations respectives des drones et des avions afin de jouer sur leur complémentarité, la configuration d'un satellite étant, elle, déterminée lors de son lancement et ne pouvant plus être modifiée ensuite. En ce qui concerne les perspectives d'évolution des capacités des drones, les industriels proposent des projets d'appareils de plus en plus lourds et polyvalents ; mais ces propositions doivent être concrétisées et leur bilan coût/efficacité finement estimé.

Rappelant qu'une ligne budgétaire du projet de loi de finances pour 2003 était consacrée à un fonds de fidélisation des personnels, qui permettra d'octroyer des primes ou des conditions de travail plus favorables pour certains postes, M. Pierre Lang a demandé si un tel dispositif ne pourrait pas susciter des rivalités et des revendications catégorielles.

Le chef d'état-major de l'armée de l'air a indiqué qu'à la lumière de quelques exemples récents, ce risque était réel ; la solution retenue d'un fonds spécifique résulte d'un compromis qui entraîne inévitablement des traitements différents et des sentiments d'injustice. Cependant, des mesures actives de gestion du personnel sont inévitables pour faire face aux besoins dans de meilleures conditions. Ainsi, les personnels acceptant de travailler à la SIMMAD se sont vu offrir de meilleures conditions de mobilité à l'issue de cette affectation. Ces solutions temporaires sont nécessaires pour le moment.

Soulignant la nette amélioration de la disponibilité des matériels depuis la création de la SIMMAD, M. Gilbert Meyer a demandé par quels moyens l'articulation de l'action de la SIMMAD et des industriels pouvait être améliorée et si un périmètre des prestations destinées à être externalisées avait été déterminé.

Le chef d'état-major de l'armée de l'air a répondu que l'armée de l'air comme la SIMMAD ne disposaient pas de moyens spécifiques pour contraindre les industriels. En revanche, un dialogue courtois, mais ferme, est constamment mené avec eux, notamment sur le respect des délais et la qualité des prestations. En ce qui concerne l'externalisation des prestations, aucun périmètre n'a été défini de manière précise. Le périmètre des missions à externaliser est en cours d'évaluation, le partenaire britannique constituant dans ce domaine un utile point de comparaison.

M. Jean-Claude Viollet a demandé si un escadron de drones allait bien être installé sur la base aérienne 709 de Cognac. Il a souhaité dans l'affirmative connaître le calendrier de cette installation et les moyens et missions de cette unité.

Le général Richard Wolsztynski a confirmé la prochaine venue d'un escadron de drones sur la base aérienne de Cognac. L'installation pourrait commencer à partir de l'été 2003 et l'unité devrait être pleinement opérationnelle environ un an plus tard. Le site de Cognac est particulièrement intéressant en raison de la présence simultanée d'avions et de drones, ainsi que par la proche présence de l'école de sous-officiers de Rochefort. Le savoir-faire acquis par la France en matière de drones est tel que les Pays-Bas ont souhaité mettre en œuvre une coopération dans ce domaine. Plusieurs officiers néerlandais sont attendus à Cognac.

M. René Galy-Dejean a demandé le sentiment du chef d'état-major de l'armée de l'air au sujet de la défense antimissile balistique. Il a également déploré la lacune capacitaire en matière de transport aérien du fait du retrait progressif des Transall et a fait valoir ses inquiétudes concernant l'entrée en service des premiers A 400 M.

Le général Richard Wolsztynski a répondu qu'en matière de défense antimissile, l'armée de l'air attendait l'arrivée du missile sol-air à moyenne portée (SAMP-T) qui devrait intégrer un minimum de capacité antimissile. En matière de protection antimissile, quelle que soit la qualité du système de tir, la veille est un préalable indispensable. Une approche européenne dans ce domaine est à approfondir. Il existe aussi d'autres moyens de détruire les missiles adverses, en utilisant notamment l'armée de l'air dans sa mission d'attaque au sol.

M. Yves Fromion a fait observer que les drones n'étaient pas seulement utilisables dans des missions de renseignement, mais pouvaient également remplir des missions d'appui tactique. Il a ensuite demandé où en était le projet de coopération entre les Etats-Unis et l'Europe sur un système de surveillance du ciel par un réseau d'appareils aériens.

Le général Richard Wolsztynski a indiqué que les événements du 11 septembre 2001 avaient remis au premier plan la nécessité d'un système de surveillance et de renseignement de qualité et que le bouillonnement d'idées était permanent. Se défendant de cantonner les drones dans des missions exclusives de renseignement, il a fait observer que, si le potentiel d'évolution de ces appareils était grand, les avions conservaient actuellement une nette supériorité pour les autres missions, notamment celles d'attaque tactique.

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Loi de finances pour 2003 : air (avis)

La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Louis Bernard, les crédits de l'armée de l'air pour 2003.

M. Jean-Louis Bernard, rapporteur pour avis, a exposé que l'évolution du titre III était marquée plus par celle des priorités de sa gestion que par celle de ses masses financières d'ensemble. Plus 2,9 %, soit plus 1,9 % en euros constants, c'est un peu plus de confort, ce n'est pas un changement radical. L'armée de l'air attache à sa gestion courante une attention remarquable, caractérisée notamment par une grande capacité d'anticipation, une démarche permanente d'adaptation de ses moyens et un souci constant des montants en jeu.

Le titre III est marqué par deux actions relatives l'une à l'entraînement, l'autre à l'entretien du matériel. L'armée de l'air a toujours rempli de 1997 à 2002 les normes quantitatives minimales d'entraînement. En 2002, elle avait anticipé sur la programmation 2003-2008, en entreprenant de satisfaire à des critères qualitatifs. Les objectifs qualitatifs fixés pour 2003 sont ainsi non pas une nouveauté par rapport à 2002, mais bien la poursuite d'une action plus ancienne. Le maintien en condition opérationnelle des équipements a été une préoccupation de la commission de la défense avant même d'être mise sur la place publique ; lors de l'examen du budget de l'armée de l'air pour 2000, elle avait approuvé à l'unanimité la création de la SIMMAD. A l'issue de ses entretiens, le rapporteur peut confirmer l'opinion positive et témoigner à la fois de l'ampleur de la tâche entreprise, des progrès considérables faits en deux ans et des bénéfices futurs à en attendre.

L'évolution des crédits du titre V, qui augmentent de 16,6 %, peut, quant à elle, être qualifiée de structurante. Ce n'est pas que l'armée de l'air souffrirait de lacunes criantes. Au contraire, il apparaît que, après l'US Air Force, l'armée de l'air française est sans doute la plus cohérente au monde. Les programmes d'équipement actuellement conduits par l'armée de l'air sont de nature à lui garantir le maintien de ce haut niveau opérationnel, qu'il s'agisse des systèmes de conduite d'opérations, de l'appareil Rafale, des missiles air-air Mica, des missiles de croisière SCALP, ou encore de l'A 400 M, du moins quand les partenaires de la France voudront bien débloquer ce dossier.

L'armée de l'air se trouvait néanmoins de plus en plus à l'étroit dans son budget d'équipement, comme le montrait le taux de consommation des crédits. Le caractère contraint des montants alloués n'a pas été sans conséquence sur l'âge moyen des équipements. Eu égard à la nécessité du renouvellement du parc, un budget d'équipement en nette progression était donc nécessaire. L'an dernier, le général Job, qui avait dressé un bilan non insatisfaisant de la précédente programmation, avait en revanche souligné que le non-respect, même à la marge, des montants prévus par le précédent projet de loi de programmation 2003-2008 conduirait inéluctablement à une remise en cause du modèle d'armée 2015. Le projet de budget pour 2003 vient soulager ces inquiétudes.

Tout en félicitant le rapporteur pour l'objectivité de son exposé, M. Jean Michel a indiqué que les membres du groupe socialiste s'abstiendraient lors du vote sur les crédits.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de l'armée de l'air pour 2003.

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