COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 5

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 8 octobre 2003
(Séance de 16 heures 30)

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président

SOMMAIRE

 

pages

-  Suite de l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2004 (n° 1093) (M. Gilles Carrez, Rapporteur général)

2

- Article 3

2

- Article 9

15

- Article 4

3

- Après l'article 9

15

- Après l'article 4

3

- Article 10

21

- Article 5

6

- Après l'article 10

22

- Après l'article 5

9

- Article 11

22

- Article 6

10

- Après l'article 11

26

- Après l'article 6

13

- Article 12

27

- Article 7

14

- Après l'article 12

28

- Article 8

14

   
       

La Commission des finances, de l'économie générale et du Plan a poursuivi, sur le rapport de M. Gilles Carrez, Rapporteur général, l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2004 (n° 1093).

Article 3 : Amélioration de la prime pour l'emploi (suite) :

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Jean-Louis Idiart, tendant à supprimer la pénalité pour renseignements inexacts des bénéficiaires de l'acompte de prime pour l'emploi.

M. Jean-Louis Idiart a estimé que la majorité et le Gouvernement, qui dénoncent régulièrement la complexité des obligations déclaratives, notamment celles relatives à la prime pour l'emploi, ont jugé bon d'introduire une pénalité d'un montant exorbitant. En outre, cette pénalité pourrait viser des contribuables de bonne foi puisqu'elle vise la communication des « renseignements inexacts », sans mention d'intentionnalité.

Le Rapporteur général a convenu que l'amende prévue par l'article 3 est lourde. Il s'agit cependant d'un dispositif nouveau, qui nécessite, au moins dans un premier temps, une pénalité dissuasive. Les possibilités de fraude sont importantes. Il conviendrait d'introduire dans le dispositif gouvernemental le critère d'intentionnalité, ce qui pourrait faire l'objet d'un amendement présenté à un stade ultérieur du débat.

M. Didier Migaud a indiqué que le groupe socialiste a pris acte des efforts entrepris par le Rapporteur général, avec l'appui du président de la Commission des finances, pour améliorer la rédaction du dispositif proposé par le Gouvernement. Ces efforts ne suffiront pourtant pas. Le mécanisme de l'acompte de la prime pour l'emploi est d'une extrême complexité et les erreurs de déclaration pourront être très nombreuses et importantes. Rapportée à ce risque et au montant de la PPE elle-même, une amende de 100 euros est disproportionnée.

De plus, l'augmentation de la prime pour l'emploi prévue par le projet de loi de finances pour 2004 ne correspond pas à 500 millions d'euros, comme l'a complaisamment affirmé M. le Premier ministre. Celui-ci entretient une confusion peu convenable, car, d'une part, l'augmentation de la prime pour l'emploi ne bénéficiera pas à tous les bénéficiaires actuels et, d'autre part, le produit réel de l'augmentation est plutôt de 360 millions d'euros, c'est-à-dire environ 3,5 euros par mois et par personne.

On ne peut s'empêcher de mettre cette mesure en parallèle avec celle de la baisse de l'impôt sur le revenu. La politique fiscale du Gouvernement est encore pire que ce qu'on pouvait craindre. Il développe une grande imagination pour taxer ceux qui peuvent se tromper, tout en étant de bonne foi. Toutes ses faveurs sont ciblées en direction des classes les plus aisées. Les petits et les humbles, au contraire, ne sont bons qu'à se faire taxer.

Le Rapporteur général a jugé souhaitable de préciser que le dispositif du II de l'article 3 ne concerne pas la PPE en tant que telle mais un nouveau mécanisme de versement, reposant sur la création d'un acompte.

La Commission a repoussé cet amendement.

Elle a ensuite examiné un amendement présenté par le Rapporteur général, tendant à ce que le Gouvernement dépose, avant le 30 juin 2004, un rapport présentant les moyens de rapprocher le versement de la prime pour l'emploi de la période d'activité et, notamment, d'inscrire son montant sur la fiche de paie.

La Commission a adopté cet amendement, la date du 1er juin 2004 ayant été substituée à celle du 30 juin 2004.

La Commission a adopté l'article 3 ainsi modifié.

Article 4 : Adaptation de la réduction d'impôt au titre des frais de dépendance supportés par les personnes âgées hébergées en établissement spécialisé :

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Thierry Carcenac, tendant à transformer en crédit d'impôt la réduction d'impôt pour frais de dépendance.

M. Thierry Carcenac a indiqué que l'allégement d'impôt devait être étendu aux personnes non imposables plutôt qu'être limité aux personnes imposables.

Le Rapporteur général a relevé que la thématique des réductions d'impôt suscite des débats récurrents, avec comme objectif la transformation de toute réduction d'impôt en crédit d'impôt. S'agissant de cet amendement, il faut souligner que l'allocation personnalisée d'autonomie voit son montant modulé en fonction des ressources du bénéficiaire. Elle complète utilement la réduction d'impôt pour les personnes les plus modestes qui peuvent, n'étant pas imposables, ne pas bénéficier de la réduction d'impôt. Cet amendement n'est donc pas utile.

Le Président Pierre Méhaignerie a souligné que l'allocation personnalisée de logement constituait également un élément du financement de la dépendance : la personne non imposable qui perçoit l'APA et l'APL dispose d'une bonne prise en charge.

M. Thierry Carcenac a estimé que l'effet provenait surtout de la hausse constatée des retraites, qui conduit à ce que les personnes âgées dépendantes recourent moins souvent qu'auparavant à l'aide sociale.

La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a également rejeté un amendement présenté par M. Thierry Carcenac, tendant à instaurer un crédit d'impôt plafonné au montant de l'impôt dû, ce qui équivaut à laisser le dispositif inchangé.

La Commission a ensuite adopté un amendement rédactionnel présenté par le Rapporteur général, tendant à préciser que le plafond de 3000 euros s'applique aux dépenses prises en compte et non à la réduction d'impôt elle-même.

La Commission a adopté l'article 4 ainsi modifié.

Après l'article 4 :

La Commission a examiné un amendement présenté par le Président Pierre Méhaignerie, tendant, d'une part, à réduire d'un an l'âge du dernier enfant pris en compte pour fixer la date à partir de laquelle est allouée la demi-part supplémentaire accordée à vie au parent isolé qui l'a élevé et, d'autre part, à ramener de 980 à 700 euros le plafond de cet avantage fiscal.

Le Rapporteur général a indiqué que cet amendement fait écho à une recommandation formulée par le Conseil des impôts dans son vingt-et-unième rapport au Président de la République sur la fiscalité dérogatoire. Il poursuit d'ailleurs une démarche engagée par la précédente majorité. L'avantage fiscal visé par cet amendement est de plus en plus discutable, notamment au vu de l'allongement continu de la durée de vie. Il peut aboutir à des situations paradoxales, par exemple lorsque disparaissent les enfants ayant motivé la création de cet avantage alors que survit le parent qui en bénéficie. Dans les années 1950, lorsque ce dispositif a été créé, les retraites étaient encore très modestes et le législateur avait considéré que les personnes qui élevaient seules un enfant - au demeurant bien moins nombreuses qu'aujourd'hui et représentées surtout par des veuves de guerre - affectaient toute leur épargne potentielle à l'éducation de leurs enfants et qu'elles étaient donc empêchées de l'utiliser pour améliorer leur retraite.

Aujourd'hui, le niveau de vie a considérablement augmenté, pour les actifs comme pour les retraités, et les mœurs ont changé. L'avantage fiscal provoque des comportements matrimoniaux ayant pour seul objet la « sécurisation » indue d'une demi-part supplémentaire. Une séparation sans remariage ou une recomposition familiale sans mariage peuvent par exemple constituer des comportements de pure optimisation fiscale.

Pour autant, cet amendement ne va pas jusqu'à proposer la suppression totale de la demi-part supplémentaire à vie. En 1998, M. Didier Migaud avait soutenu une diminution du plafond applicable à la demi-part supplémentaire, démarche qu'il est proposé de poursuivre aujourd'hui.

Le Président Pierre Méhaignerie a rappelé que cet amendement vise à la fois à réduire le montant du plafond et à abaisser l'âge à partir duquel la demi-part commence à être accordée. Cet amendement s'inspire des propositions présentées par le rapport Ducamin (1994), le rapport La Martinière (1996) et le dernier rapport du Conseil des impôts. La réduction de 280 euros proposée pour le plafond reste assez modérée.

M. François Goulard a relevé que le coût total de la demi-part supplémentaire est estimé à 1,6 milliard d'euros, c'est-à-dire la moitié du produit attendu de l'augmentation de TIPP.

M. Charles de Courson a rappelé qu'il milite depuis 4 ans pour rendre plus strict le dispositif de la demi-part supplémentaire à vie. Le Mouvement familial avait soulevé la question de l'attribution d'une demi-part supplémentaire pour parent isolé à chacune des deux personnes vivant en concubinage, qui, si elles se « partagent » deux enfants - fiscalement parlant - peuvent bénéficier au total de 4 parts, au lieu de 3 si elles étaient mariées. Pour des revenus individuels équivalant à une indemnité parlementaire, l'avantage annuel pouvait atteindre 5.300 euros environ. Satisfaction partielle a été obtenue avec la suppression de l'avantage fiscal pour les personnes vivant en concubinage. Restait à traiter la question de la demi-part supplémentaire à vie, la complexité alléguée de ce sujet ayant arrêté, à l'époque, les intentions de réforme. Le système fiscal actuel établit une discrimination scandaleuse entre les personnes mariées, celles qui vivement « faussement » seules et celles qui vivent vraiment seules. Il faut aller plus loin aujourd'hui et supprimer totalement la demi-part supplémentaire à vie pour les personnes vivant en concubinage. Les disparités actuelles ne sont pas acceptables.

M. Daniel Garrigue a estimé que la proposition émise par M. Charles de Courson soulève de nouveaux problèmes. Les situations à prendre en compte peuvent effectivement être très complexes : il peut y avoir, dans un couple concubin, des enfants nés des concubins et des enfants nés d'unions antérieures. Un dispositif rénové doit pouvoir s'appliquer de façon générale et équitable, indépendamment du mode de vie des personnes concernées. Au départ, le dispositif de la demi-part supplémentaire à vie visait à aider les veuves de guerre ; aujourd'hui, il est détourné de son objet par des contribuables qui font preuve de subtilité. Une réforme s'impose.

M. Jean-Jacques Descamps a souhaité connaître l'économie pour les finances publiques d'un abaissement du plafond de la réduction d'impôt à 500 euros.

M. Didier Migaud s'est à son tour enquis de la brutalité de la mesure en souhaitant avoir des précisions sur le nombre des contribuables affectés et le montant du pouvoir d'achat ainsi indirectement confisqué.

Le Rapporteur général a indiqué que l'abaissement de 980 à 700 euros du plafonnement de la réduction d'impôt résultant de l'application du quotient familial aux personnes seules ayant eu mais n'ayant plus d'enfant à charge, toucherait 600.000 contribuables et augmenterait les recouvrements d'impôt sur le revenu de 160 millions d'euros. A 500 euros, la mesure concernerait 1,2 million de personnes et rapporterait 380 millions d'euros à l'Etat.

M. Eric Woerth a suggéré de réduire de 50% le plafond de l'avantage consenti par l'application du quotient familial aux personnes seules n'ayant plus d'enfant à charge.

Le Président Pierre Méhaignerie s'est interrogé sur l'affectation des économies induites par l'amendement. Deux possibilités s'ouvrent à la Commission : soit réduire le déficit public d'un montant équivalent, soit n'affecter qu'une partie du gain à l'amélioration du solde de l'Etat, et majorer du reliquat les dépenses d'investissement, si le Gouvernement y consent.

M. Eric Woerth a estimé que la nécessité de clarté et de vertu qu'impose à la Commission l'état des finances publiques suggère d'affecter l'intégralité de l'économie réalisée à la réduction du déficit.

M. Michel Bouvard s'est tout d'abord inquiété de l'impact de l'amendement sur les revenus des veuves de guerre pour lesquelles la réduction d'impôt avait été accordée à l'origine. Par suite, il s'est interrogé sur le problème spécifique des personnes seules ayant élevé de nombreux enfants et qui, pour cette raison, ont dû procéder à des investissements importants, notamment immobiliers, dont elles ne souhaitent pas se défaire lorsque les enfants quittent leur foyer. L'économie qu'elles réalisent sur leur impôt sur le revenu grâce à cette dépense fiscale est de fait compensée par des charges, notamment en matière d'impôts locaux, plus élevées que pour les personnes n'ayant jamais pourvu aux besoins de familles nombreuses. S'agissant des économies, une approche équilibrée consisterait à les affecter pour moitié à la réduction des déficits et pour moitié au relèvement des investissements publics dont la faiblesse constitue un réel handicap en période de morosité économique.

Le Rapporteur général a rappelé que ce type de mesures, pour être mieux acceptées, se doivent de ne pas être trop brutales. C'est ce principe qui a guidé le choix de fixer à 700 euros le plafond de la réduction d'impôt. Concernant l'économie induite, la conjoncture des finances publiques implique de ne pas brouiller le message et d'en affecter l'intégralité à la réduction du déficit.

M. Jean-Jacques Descamps a regretté que la Commission semble s'orienter vers un « effort moyen » qui ne protège pas les personnes faibles plutôt que vers « un effort fort » qui tienne cependant compte des populations les plus fragiles par une disposition de protection spécifique.

M. Hervé Mariton a indiqué qu'une dépense fiscale ne répond pas à la même logique qu'une dépense budgétaire. Dans le cas concret examiné, la mesure participe de la politique familiale et sa réforme pourrait avoir des conséquences sur la cohérence de cette dernière.

Regrettant la modération de l'amendement proposé, M. Daniel Garrigue a présenté un sous-amendement abaissant à 500 euros le plafond de la réduction d'impôt. Il a en outre souligné qu'il était impératif d'affecter à la réduction du déficit l'économie réalisée par la réforme de cette dépense fiscale très contestable en son fondement.

M. François Goulard s'est dit favorable à une mise en œuvre progressive de l'abaissement du plafond afin d'en limiter autant que possible l'impact sur le pouvoir d'achat des populations concernées, M. Hervé Novelli s'associant à cette remarque qu'il a jugée de bon sens.

Le Rapporteur général a contesté la pertinence de cette réduction d'impôt au regard de la politique familiale, mieux servie par des mesures plus concrètes et plus directes comme l'augmentation des aides à la garde d'enfant par exemple, ou de manière générale par les mesures annoncées par M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille auprès du ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Il a en outre souligné que le plafonnement à 700 euros de la réduction d'impôt induite par la demi-part jouerait pour des revenus assez significatifs, tandis qu'avec un plafond ramené à 500 euros, les personnes plus modestes risqueraient de voir leur pouvoir d'achat significativement affecté.

M. Hervé Mariton, après avoir précisé que la politique familiale ne se résume pas exclusivement aux préoccupations de procréation, s'est interrogé sur la cohérence de cet amendement avec la politique générale menée depuis 2002 en matière d'impôt sur le revenu.

Le Président Pierre Méhaignerie a rappelé que la réduction des dépenses fiscales est en parfaite cohérence avec l'allégement global du poids de l'impôt sur le revenu. Il a en outre remarqué que la jurisprudence du Conseil Constitutionnel semble aller à l'encontre d'une distinction entre les veuves ou les autres personnes seules pour l'application d'une mesure fiscale.

Après que M. Daniel Garrigue eut retiré son sous-amendement, la Commission a adopté l'amendement.

Article 5 : Réforme des plus-values immobilières des particuliers :

La Commission a examiné deux amendements identiques, le premier présenté par M. Jean-Pierre Brard, et le second par M. Augustin Bonrepaux, tendant à supprimer le présent article.

M. Augustin Bonrepaux a fait valoir que le dispositif proposé par le Gouvernement bénéficierait essentiellement aux contribuables les plus aisés.

Le Rapporteur général a souligné que ce dispositif simplifie considérablement le régime d'imposition des plus-values immobilières des particuliers. Il substitue à une imposition dans le cadre de l'impôt sur le revenu une imposition au taux proportionnel de 16% à laquelle s'ajoutent 10% de prélèvements sociaux.

Par ailleurs, le seuil de cession au-delà duquel les plus-values immobilières des particuliers sont exonérées augmente considérablement, passant de 4.600 euros à 15.000 euros. Ce seuil sera apprécié pour chaque opération. Autrement dit, toute cession immobilière d'un particulier d'un montant supérieur à 15.000 euros sera exonérée. Cette mesure constitue un avantage fiscal considérable pour les contribuables, notamment pour les plus modestes. Enfin, l'abattement par année de détention sur la plus-value brute réalisée augmente sensiblement. Alors qu'actuellement une plus-value immobilière d'un particulier est totalement exonérée après vingt-deux ans de détention, cette durée sera ramenée à quinze ans.

En outre, les exonérations au titre de la vente de la résidence principale ou des cessions réalisées à la suite d'une expropriation ou d'une opération de remembrement ne sont pas remises en cause.

Le dispositif apparaît donc équitable, favorable aux patrimoines de montant modeste et simplifie considérablement le régime en vigueur.

M. Charles de Courson s'est interrogé sur le point de savoir si le Conseil constitutionnel ne risquait pas d'invalider le nouveau régime d'imposition, au motif que les notaires se verront confier la charge de liquider l'impôt.

Le Rapporteur général a fait valoir qu'en matière de droits d'enregistrement, les notaires procèdent déjà à des calculs d'assiette et de liquidation de droits de succession.

M. Charles de Courson a objecté que les notaires liquident les droits de succession pour le compte de leurs clients, mais ne sont pas habilités à émettre de titres.

M. Didier Migaud s'est étonné que le Gouvernement prétende poursuivre un objectif de simplification qui se traduit dans un dispositif de cinq pages. Cela étant, il serait souhaitable que le Rapporteur général explicite les conséquences du régime proposé en présentant des exemples chiffrés. Il serait fort étonnant que les contribuables aux revenus modestes soient avantagés par l'introduction d'une imposition forfaitaire de 26%. Cette disposition vise, vraisemblablement, à favoriser d'abord les contribuables les plus aisés.

M. Henri Emmanuelli a également souhaité une explication des conséquences du nouveau dispositif sur les contribuables disposant de hauts revenus.

M. Charles de Courson a souhaité obtenir des précisions concernant le gain budgétaire, en année pleine, du dispositif présenté par le Gouvernement.

Le Rapporteur général a précisé que l'année 2004 constituerait une période transitoire : l'Etat percevra, en effet, au titre de l'impôt sur le revenu, l'imposition des plus-values réalisées au cours de l'exercice 2003, d'une part, il percevra également, en application du nouveau régime, l'imposition des plus-values réalisées au cours de l'exercice 2004 qui seront acquittées à l'occasion de l'enregistrement de ces plus-values. En régime normal, la réforme proposée par le Gouvernement se fera à recettes constantes, la seule année 2004 dégageant un gain de trésorerie de 240 millions d'euros.

La Commission a rejeté ces deux amendements.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Alain Marleix, tendant à maintenir le régime d'exonération de plus-value immobilière dont bénéficient les terrains à usage agricole ou forestier non inscrits à l'actif d'une exploitation agricole et dont le prix est inférieur à un plafond différent selon la nature des cultures.

M. Charles de Courson a souligné que la réforme du régime d'imposition des plus-values immobilières des particuliers supprime le dispositif d'exonération applicable, sous certaines conditions, aux terrains à usage agricole ou forestier. Or, ce régime d'exonération présente actuellement un double intérêt : d'une part, en cas d'expropriation, les plus-values dégagées viennent majorer l'assiette des cotisations du régime social agricole, d'autre part, le régime d'exonération des plus-values, en pratique, se révèle extrêmement utile lors des négociations menées pour fixer le montant des indemnités d'expropriation.

Le Rapporteur général a précisé que le nouveau régime d'imposition des plus-values conduit à supprimer le régime d'exonération prévu en faveur des terres à usages agricoles ou forestiers dès lors qu'elles appartiennent au patrimoine privé du cédant et ne sont donc pas inscrites à l'actif d'une exploitation agricole. En revanche, l'exonération de ces terrains pour cause d'expropriation est maintenue sous réserve du remploi de l'indemnité perçue.

Il a rappelé qu'en application de la loi sur l'initiative économique, pour les terrains figurant à l'actif d'une exploitation, le seuil de chiffre d'affaires en deçà duquel les plus-values professionnelles sont exonérées a été considérablement revalorisé, si bien qu'actuellement 85 à 90% des exploitations agricoles ne devraient plus être taxées au titre des plus-values professionnelles.

La Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a examiné un amendement présenté par le Rapporteur général, visant à maintenir le régime d'exonération des plus-values en faveur des retraités non assujettis à l'impôt sur le revenu.

Le Rapporteur général a souligné que cette mesure, motivée par un souci d'équité fiscale, vise à exonérer d'imposition sur les plus-values les contribuables dont le revenu est inférieur au revenu fiscal de référence et qui ne sont pas assujettis à l'impôt de solidarité sur la fortune, pour la cession d'un bien immobilier constituant, souvent, leur seul patrimoine personnel.

M. Charles de Courson a noté que si une personne vend ses biens progressivement, elle pourrait être exonérée.

Le Rapporteur général a confirmé que le nouveau seuil d'imposition des cessions serait relevé à 15.000 euros et qu'il s'appliquerait désormais à chaque opération.

La Commission a adopté cet amendement.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Alain Marleix, visant à étendre l'exonération des plus-values réalisées lors de la cession de terrains inscrits à l'actif d'une exploitation agricole suite à une expropriation lorsque l'exploitation a moins de cinq ans.

M. Alain Marleix a indiqué que les modifications apportées au régime d'exonération des plus-values professionnelles par la loi pour l'initiative économique ont été accueillies favorablement par les agriculteurs. Il n'est cependant pas normal que certains exploitants ne profitent pas du dispositif d'exonération applicable aux cessions réalisées dans le cadre d'une expropriation lorsqu'ils n'ont pas cinq ans d'activité alors que les plus-values ne sont pas le fruit d'une opération spéculative mais la conséquence de l'expropriation. Cette mesure a donc pour but de ne pas pénaliser les jeunes agriculteurs.

Le Rapporteur général a émis un avis favorable, cet amendement réparant un oubli de la loi pour l'initiative économique. Il n'y a, en effet, aucune raison de défavoriser les jeunes entreprises dans l'imposition des plus-values professionnelles. En outre, cette mesure serait gage de simplification de la législation puisque la même règle s'appliquerait à tous.

Le Président Pierre Méhaignerie a estimé que le nombre de personnes concernées devait être très faible.

La Commission a adopté cet amendement et sept amendements rédactionnels ou de coordination présentés par le Rapporteur général.

La Commission a adopté l'article 5 ainsi modifié.

Après l'article 5 :

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Charles de Courson, tendant à instituer une réduction d'impôt au bénéfice des enfants de personnes déportées ou tuées au cours de la Seconde guerre mondiale, afin que le Gouvernement explique en séance publique quel sera le périmètre de la mesure réglementaire qui sera retenue pour indemniser les personnes déportées et les orphelins de déportés non raciaux. Il est en effet nécessaire que le Gouvernement s'explique sur ses intentions au vu des informations fournies par le rapport de M. Philippe Dechartre. Cet amendement visant à créer une réduction d'impôt n'est qu'un amendement d'appel. En conséquence, le Président Pierre Méhaignerie a proposé que l'amendement soit déposé en séance publique.

L'amendement a été retiré par son auteur.

La Commission a ensuite examiné un amendement présenté par le Rapporteur général, visant à porter à 16% le taux du prélèvement libératoire sur les revenus d'obligations, au même niveau que le taux forfaitaire d'imposition s'appliquant aux plus-values de cessions de valeurs mobilières.

Le Rapporteur général a indiqué que cet amendement permettrait de simplifier la réglementation fiscale tout en apportant des recettes nouvelles à hauteur de 60 millions d'euros. Deux taux d'imposition différents sont aujourd'hui applicables en cas de taxation proportionnelle selon qu'il s'agit de revenus d'obligations (15%) ou de plus-values sur valeurs mobilières (16%). L'unification proposée est sans incidence sur la taxation des actions, dont le marché connaît une légère reprise.

M. François Goulard a souligné la légitimité et la logique de cet amendement.

La Commission a adopté cet amendement.

Article 6 : Mesures fiscales en faveur des jeunes entreprises innovantes réalisant des projets de recherche et de développement :

Relevant que cet article, qui vise à soutenir les jeunes entreprises innovantes (JEI), prévoit l'exonération de leurs bénéfices, qu'il s'agisse d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés, au titre des « trois premiers » exercices bénéficiaires, M. Daniel Garrigue a demandé comment s'appliquerait ce dispositif pour les entreprises créées il y a quelques années et ayant déjà réalisé des bénéfices.

Le Rapporteur général a répondu que ces entreprises bénéficieraient des nouvelles dispositions uniquement pour les exercices bénéficiaires à venir, la notion de premier exercice bénéficiaire étant appréciée à compter de l'entrée en vigueur de la loi de finances pour 2004.

M. Daniel Garrigue a ensuite souligné qu'il serait regrettable que le nécessaire respect de la condition relative au lien de dépendance, pour bénéficier du statut de la jeune entreprise innovante, entrave l' « essaimage », pratique courante à la suite de laquelle des liens forts peuvent demeurer, par exemple, au travers de contrats de collaboration entre deux entreprises distinctes, mais liées organiquement auparavant.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Augustin Bonrepaux, visant à supprimer la faculté offerte aux collectivités locales d'exonérer les jeunes entreprises innovantes de taxe foncière sur les propriétés bâties et de taxe professionnelle, sans compensation par l'Etat.

M. Augustin Bonrepaux a souligné qu'une large partie des allégements fiscaux proposés par l'article seraient à la charge des collectivités territoriales sans aucune compensation de l'Etat. Il faut craindre que seules les collectivités locales disposant de moyens financiers suffisants puissent utiliser cette faculté. Une telle logique ne favorise pas l'aménagement du territoire.

Le Rapporteur général a émis un avis défavorable. La deuxième phase de la décentralisation va être mise en œuvre et la loi organique sur l'autonomie financière des collectivités locales discutée dans les plus brefs délais. Dans cet esprit, il est nécessaire de mettre un frein à la politique des dégrèvements et des exonérations compensés par l'Etat. Le contribuable national se substitue aujourd'hui au contribuable local à hauteur de 10 milliards d'euros. Il faut rappeler qu'un tiers de la taxe professionnelle est pris en charge par l'Etat. Si une solidarité territoriale est nécessaire, elle doit trouver une forme plus appropriée, dans des dispositifs de péréquation par exemple. C'est en réformant la dotation globale de fonctionnement que la péréquation pourra jouer. L'instrument fiscal n'est de toute évidence pas le bon.

Le Président Pierre Méhaignerie a douté que des entreprises investissant 15% de leur chiffre d'affaires dans la recherche soient nombreuses dans les régions les plus pauvres.

M. Henri Emmanuelli a refusé le raisonnement tenu par le Rapporteur général. L'Etat propose des exonérations fiscales en faveur des entreprises, dont il fait reposer la charge sur les collectivités locales. C'est la politique de la facilité.

M. Augustin Bonrepaux a indiqué que cette logique se retrouve dans d'autres textes, par exemple s'agissant du développement des territoires ruraux. Quant à la loi organique sur l'autonomie des collectivités locales, elle sera l'occasion de connaître les intentions du Gouvernement en matière de compensation financière des transferts de compétences. Il convient de s'interroger sur la mise en œuvre de la péréquation. Aucune précision n'a été donnée. La loi constitutionnelle du 28 mars 2003 consacre le principe de péréquation, mais le risque d'une baisse de la DSU et de la DSR en 2004 souligne bien que la péréquation pose problème. Les propositions de transfert de compétence ne seront crédibles que si elles sont équilibrées.

Le Rapporteur général a relevé combien l'effort de péréquation mis en œuvre par l'actuel Gouvernement allait être important à partir de 2004, en raison de l'intégration de la compensation de la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle dans la DGF. Le différentiel d'indexation entre la DGF et la dotation forfaitaire de chaque niveau de collectivités territoriales viendra alimenter les dotations de péréquation. La situation est donc plus favorable qu'au cours des cinq dernières années qui ont été, de fait, caractérisées par une absence ou du moins un manque de péréquation.

M. Augustin Bonrepaux a considéré que les efforts de péréquation prévus pour 2004 n'étaient pas particulièrement significatifs. Il est tout à fait inexact de dire que la péréquation a fait défaut après 1997. D'ailleurs la DSU et la DSR ont connu des augmentations annuelles de l'ordre de 5 % au moins. Dans les années 1999 et 2000, les moyens alloués au Fonds national de péréquation ont été renforcés et les dotations augmentées d'environ 20 à 30 %, notamment au bénéfice des communes les plus défavorisées, par le précédent Gouvernement, qui a mis en place ou conforté de nombreux mécanismes de péréquation.

M. Henri Emmanuelli a estimé que la polémique actuelle sur le coût réel des 35 heures est biaisée, les chiffres avancés par le ministre des Finances étant erronés ou artificiellement gonflés. Il faut rappeler que le précédent Gouvernement a non seulement mis en place un mécanisme d'allégements de cotisations sociales, mais a également diminué les charges en matière de taxe professionnelle qui pesaient sur les entreprises. Ainsi peut-on évaluer que l'impact des 35 heures sur le coût du travail n'est pas de 11 %, comme de nombreux observateurs le pensent, mais de 3 % seulement.

La Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a examiné un amendement présenté par le Rapporteur général, précisant les conditions applicables à l'exonération des plus-values de cessions des parts ou actions de jeunes entreprises innovantes.

Le Rapporteur général a relevé que dans la rédaction de l'article, cette exonération ne s'appliquera que si le cédant et sa famille ne possèdent pas plus de 25% des droits financiers de la société. Par sécurité, et pour renforcer l'incitation en faveur d'apports massifs de financements externes temporaires, il convient d'appliquer le même plafond pour les droits de vote.

La Commission a adopté cet amendement.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Hervé Novelli destiné à éviter les redressements abusifs des jeunes entreprises innovantes.

M. François Goulard a expliqué que cet amendement prévoit que l'administration fiscale, avant d'engager une quelconque procédure de redressement à l'encontre d'une jeune entreprise innovante, doit recueillir un avis motivé des services du ministère chargé de la recherche et de la technologie.

Il a en outre estimé que le dispositif proposé par le présent article est d'une rare complexité et comporte des effets de seuil non négligeables. Il est regrettable qu'un dispositif à la fois plus simple et plus lisible n'ait pas pu être mis en place.

Le Rapporteur général a partagé les réticences exprimées par M. François Goulard s'agissant de la complexité excessive du dispositif proposé, ce qui est d'autant plus dommageable que les mesures en question ont vocation à concerner quelques centaines d'entreprises seulement. On peut en outre s'interroger sur l'opportunité d'ajouter de nouvelles mesures en faveur d'une catégorie particulière d'entreprises alors que des dispositifs nouveaux sont récemment entrés en vigueur suite à la promulgation de la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 pour l'initiative économique.

S'agissant du contenu de l'amendement, le Rapporteur général a émis des réserves : il ne semble pas de bonne méthode de freiner, voire d'entraver, le travail des services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie par l'intervention d'un avis de certains des services du ministère technique « compétent ». Des dispositions analogues, proposées à l'occasion de l'examen de la loi programme pour l'outre-mer, avaient déjà suscité des interrogations de la part de la Commission quant à la lourdeur des procédures administratives envisagées.

Le Président Pierre Méhaignerie s'est dit préoccupé par l'inflation législative dans le domaine des dispositifs fiscaux dérogatoires à destination des entreprises. Ce foisonnement ne leur est peut-être pas favorable.

M. Phillippe Auberger s'est étonné de la teneur de l'amendement au regard des idées développées habituellement par son auteur, tant cet amendement prévoit d'attribuer des prérogatives nouvelles, quelque peu inhabituelles et peu opportunes, à des services administratifs et de créer des procédures complexes. Il a ensuite noté combien les liens entre, d'une part, les chercheurs travaillant dans les laboratoires de recherches publiques et les universitaires et, d'autre part, le monde de la recherche privée, restent insuffisants.

La Commission a rejeté cet amendement et a adopté l'article 6 ainsi modifié.

Après l'article 6 :

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Charles de Courson, visant à ouvrir le bénéfice de la réduction d'impôt au titre des dons faits par les particuliers au profit des associations de défense de contribuables qui ne bénéficient d'aucune subvention publique.

Le Président Pierre Méhaignerie a constaté que, jusqu'à une date récente du moins, les services fiscaux peuvent ignorer l'existence de certains dispositifs récemment adoptés en matière de déductions fiscales. La loi relative au mécénat reste, par exemple, encore méconnue des services fiscaux locaux : une mesure d'information envers ces services s'impose donc. Les associations semblent ignorer le plus souvent si ce texte prévoit ou pas un droit à déduction fiscale en leur faveur.

Le Rapporteur général s'est dit très réservé quant au contenu de l'amendement. Certaines associations qui seraient susceptibles de bénéficier d'une telle déductibilité ont un objet politique. Des mesures de défiscalisation partielle sont déjà prévues en matière de dons à destination des associations de financement électoral et de cotisations à destination des partis politiques.

M. Michel Bouvard a estimé que certaines des associations concernées s'illustrent parfois par des propos fortement anti-parlementaires qu'il ne convient sans doute pas d'encourager.

M. Jean-Pierre Brard a relevé que certaines des associations qui pourraient bénéficier du dispositif proposé tiennent des propos assez proches de ceux développés en leur temps par les ligues des années 30. Il convient d'être vigilants en la matière. D'ailleurs il y a un certain paradoxe pour une association qui prétend combattre l'impôt à demander que ses adhérents profitent d'une mesure de déduction fiscale.

La Commission a rejeté cet amendement.

Suivant l'avis du Rapporteur général, la Commission a rejeté un amendement présenté par M. Marc Laffineur, tendant à assujettir à l'impôt sur les sociétés, les mutuelles et les unions de mutuelles régies par le code de la mutualité, au titre de leurs activités concurrentielles.

La Commission a ensuite examiné un amendement présenté par M. Jean-Pierre Brard, tendant à plafonner l'avantage fiscal en matière d'impôt sur les sociétés, tiré de l'autorisation de consolider au niveau mondial les résultats des exploitations directes ou indirectes, situées en France ou à l'étranger, des sociétés françaises. M. Jean-Pierre Brard a précisé à cette occasion qu'il avait déposé plusieurs amendements ayant pour objet la lutte contre la fraude fiscale et contre les « cadeaux fiscaux » indus afin de promouvoir la justice fiscale. Mais devant la faible probabilité que ces amendements acquièrent force de loi, il sera sans doute plus fructueux d'utiliser toutes les latitudes offertes par la discussion en séance publique, afin de dénoncer le projet de budget du Gouvernement et de valoriser la notion de contribution, au sens de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Suivant l'avis du Rapporteur général, la Commission a rejeté cet amendement.

Puis elle a rejeté un amendement présenté par M. Jean-Pierre Brard, tendant à relever à 36% le taux de l'impôt sur les sociétés sur les dividendes distribués.

Article 7 : Instauration d'une réduction de droit temporaire de 50% pour les donations en pleine propriété consenties quel que soit l'âge du donateur :

La Commission a examiné deux amendements présentés par M. Jean-Pierre Brard et M. Augustin Bonrepaux de suppression de l'article.

Le Rapporteur général a précisé que cet article a pour objet l'instauration d'une réduction de droit temporaire de 50% pour les donations en pleine propriété consenties quel que soit l'âge du donateur, alors que le droit commun réserve cet avantage aux donations effectuées par un donateur âgé de moins de soixante-cinq ans. Cette disposition serait applicable entre le 25 septembre 2003 et le 30 juin 2005. Il s'agit d'une mesure opportune susceptible de favoriser la transmission anticipée du patrimoine entre générations et de contribuer à la diminution du taux d'épargne constaté en France, dont le niveau élevé peut être corrélé avec le vieillissement de la population. Une mesure allant dans le même sens avait été adoptée à l'article 12 de la loi de finances pour 2003 concernant l'abattement applicable aux donations entre grands-parents et petits-enfants.

M. Henri Emmanuelli a fait valoir que ce dispositif n'encouragerait pas, en tout état de cause, les revenus du travail et ce, en contradiction avec le discours actuel du Gouvernement.

Le Président Pierre Méhaignerie a relevé que rien n'excluait que le patrimoine qui fait l'objet d'une donation visée par le présent article ne soit pas le résultat d'une vie de travail.

M. Augustin Bonrepaux a estimé que ce dispositif conduirait à des effets d'aubaine.

Le Rapporteur général a rappelé qu'une disposition semblable avait été adoptée par la loi de finances pour 1999 du 30 décembre 1998, sachant que la réduction de droit temporaire quel que soit l'âge du donateur avait été limitée à 30%, même si le Rapporteur général de l'époque et M. Jacques Barrot avaient souhaité relever ce taux à 50%.

En réponse à M. Jean-Louis Idiart, le Rapporteur général a précisé que le présent dispositif n'entraînait, en tout état de cause, aucune perte de recettes pour les conseils généraux.

La Commission a rejeté ces amendements et adopté l'article 7 sans modification.

Article 8 : Revalorisation du barème de l'usufruit et extension aux mutations à titre onéreux :

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Jean-Louis Idiart, tendant à la suppression de cet article.

M. Jean-Louis Idiart a estimé qu'au regard de la situation budgétaire que connaît la France, l'urgence n'est sans doute pas de consacrer 100 millions d'euros afin de revaloriser le barème de l'usufruit.

Le Rapporteur général a précisé que le barème de l'usufruit en vigueur avait été établi en 1901, à une époque où l'espérance de vie était de vingt ans moins élevée qu'aujourd'hui. En conséquence, la valeur de l'usufruit a subi depuis cette époque une dévalorisation qui a entraîné une survalorisation de la nue-propriété. Il n'apparaît donc pas extravagant de prévoir en 2003 une modernisation du barème de l'usufruit pour l'adapter à la réalité démographique.

M. Jean-Louis Idiart a relevé que chacun a sa conception de la modernisation et qu'en tout état de cause celle du Rapporteur général apparaît sélective.

Suivant l'avis du Rapporteur général, la Commission a rejeté cet amendement.

Elle a ensuite adopté l'article 8 sans modification.

Article 9 : Dispense du dépôt de déclaration et du paiement des droits pour les successions de faible importance :

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Thierry Carcenac, tendant à relever les montants d'actif brut successoral, prévus par l'article 9, en dessous desquels les héritiers sont dispensés du dépôt d'une déclaration de succession et du paiement des droits de mutation.

Le Rapporteur général a précisé que le dispositif tel qu'il est proposé par le Gouvernement présente précisément l'avantage de légaliser la dépense de déclaration pour les successions de faible montant en augmentant sensiblement le seuil d'imposition pour le conjoint survivant et les ascendants ou descendants et en étendant le régime de la dispense aux autres successions, qui en étaient auparavant exclues.

Après avoir rejeté l'amendement, la Commission a adopté l'article 9 sans modification.

Après l'article 9 :

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Marc Le Fur, tendant à priver les personnes pour lesquelles l'administration estime qu'elles exercent une activité occulte, du bénéfice du régime de la franchise en base de TVA et du bénéfice du régime simplifié d'imposition en matière de TVA et de bénéfices industriels et commerciaux. Il s'agit ainsi d'obliger ces personnes à se soumettre au régime réel de la TVA et, en conséquence, à déclarer leur chiffre d'affaires tous les mois et, ainsi, de les rendre susceptibles d'un contrôle fiscal à cette échéance.

Après que le Rapporteur général eut rappelé l'intérêt des mesures fiscales proposées par M. Marc Le Fur suite au travail qu'il a effectué sur le bilan des groupes d'intervention régionaux, la Commission a adopté cet amendement.

La Commission a ensuite examiné un amendement présenté par M. Augustin Bonrepaux, tendant à supprimer la condition de deux ans donnant droit au bénéfice des tarifs minorés d'enregistrement applicable en cas de donation ou de succession entre partenaires d'un pacte civil de solidarité.

Après que le Rapporteur général eut exprimé un avis défavorable et que le Président Pierre Méhaignerie eut rappelé que M. Charles de Courson avait précédemment montré que le pacte civil de solidarité pouvait donner lieu à des détournements à des fins d'optimisation fiscale, la Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Jean-Pierre Brard, tendant à augmenter le montant de l'abattement applicable aux successions ou aux donations entre partenaires d'un pacte civil de solidarité.

Après que le Rapporteur général eut précisé que l'amendement aurait pour effet de rendre la situation de ces partenaires plus avantageuse que celle de personnes mariées, la Commission a rejeté l'amendement.

La Commission a ensuite examiné un amendement présenté par M. Tony Dreyfus, tendant à supprimer la condition de durée préalable de deux ans d'un pacte civil de solidarité pour ouvrir droit à un abattement spécifique sur les droits de mutation à titre gratuit pour les transmissions entre les partenaires de ce pacte.

Suivant l'avis défavorable du Rapporteur général, la Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Charles de Courson, tendant à permettre à un héritier ayant avant bénéficié du dispositif de réduction des droits de mutation sur les titres d'une entreprise ayant fait l'objet d'un engagement collectif de conservation, de céder des éléments affectés à l'exploitation de l'entreprise dès lors que les sommes correspondantes sont utilisées en remploi des éléments cédés, et cela durant la période pendant laquelle il s'est engagé à conserver l'entreprise.

La Commission a rejeté cet amendement, après que le Rapporteur général eut précisé que l'instruction fiscale commentant l'application du dispositif existant répondait à cette situation partiellement.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Michel Bouvard, tendant à l'exonération totale de droits de mutation par décès, sous certaines conditions, de l'ensemble des biens meubles et immeubles, corporels ou incorporels affectés à l'exploitation d'un établissement hôtelier ou d'un centre de vacances privé situé dans une zone de revitalisation rurale qui font l'objet d'un engagement de conservation de dix ans par les héritiers.

M. Michel Bouvard a précisé que ce dispositif a pour objet le maintien de l'hôtellerie familiale, qui est souvent mise en péril par des droits de succession trop lourds.

Après que le Rapporteur général eut relevé que le dispositif proposé était trop ciblé pour justifier, par des considérations d'intérêt général, l'atteinte qui serait faite au principe d'égalité, la Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Jean-Pierre Brard, baissant de 30.000 euros à 15.000 euros l'abattement applicable aux donations entre grands-parents et petits-enfants.

Suivant l'avis défavorable du Rapporteur général, la Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a rejeté deux amendements présentés par M. Jean-Pierre Brard, tendant, respectivement, à l'intégration des biens professionnels et des œuvres d'art dans l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), le Rapporteur général s'y étant déclaré défavorable.

La Commission a ensuite examiné deux amendements identiques présentés par M. Jean-Pierre Brard et M. Augustin Bonrepaux, tendant à supprimer l'exonération de moitié d'ISF dont peuvent bénéficier, sous certaines conditions, les actionnaires signataires d'un engagement collectif de conservation des parts de société sur ces parts.

M. Augustin Bonrepaux a précisé qu'il s'agissait d'abroger l'une des principales dispositions de la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 relative à l'initiative économique.

Le Président Pierre Méhaignerie a vu dans un tel amendement une initiative particulièrement inopportune. Il a témoigné de ses entretiens récents avec les cinq plus grands chefs d'entreprise de la région Nord-Pas-de-Calais qui emploient plus de trente-cinq mille personnes et dont les membres de la famille actionnaires acquittent plus d'impôts qu'ils ne touchent de revenus sur leurs parts. Cette situation constitue une forte pression à la vente des parts de l'entreprise et in fine à leur détention par des étrangers.

M. Augustin Bonrepaux a estimé que le dispositif du « pacte d'actionnaires », qu'il s'agit par l'amendement présenté d'abroger, va conduire à ce que les seuls redevables réels de l'ISF soient les moins fortunées des personnes potentiellement concernées par cet impôt, qu'il a qualifiées de « petits riches ».

M. Henri Emmanuelli a estimé compréhensible que le discours des forces conservatrices sur la fuite des capitaux soit virulent quand celles-ci sont dans l'opposition. Mais un tel discours ne peut plus être tenu lorsque l'on détient l'exercice du pouvoir, alors que l'on constate, d'une part, que la France est classée en deuxième ou troisième position des pays destinataires des investissements étrangers et, d'autre part, que le taux d'épargne en France s'établit à près de 18% du PIB.

Le Président Pierre Méhaignerie a indiqué que les statistiques à l'origine du type de classement évoqué par M. Henri Emmanuelli ne prennent pas en compte les entreprises qui quittent le territoire national.

M. Henri Emmanuelli a estimé pour le moins téméraire de remettre en cause les statistiques de l'OCDE et, par ailleurs, curieux de considérer que les mêmes modalités de calcul ne donnent pas une image fidèle de la situation française mais sont valables pour tout autre pays.

M. Philippe Auberger a souhaité que le débat en revienne à des considérations simples. L'investissement étranger en France est constitué pour partie d'investissements directs, sous forme de participations financières ou d'investissements matériels, et d'investissements de portefeuille. Chacun sait, par exemple, que la majorité des entreprises du CAC 40 ont plus de 50% de leur capital détenu par des investisseurs étrangers. L'investissement étranger est avant tout le fait d'entreprises. Or, les sorties de capitaux hors de France sont également très importantes et elles ont pour origine des entreprises, mais aussi des particuliers. Concrètement, le capital part à l'étranger lorsqu'un chef d'entreprise, prenant sa retraite, vend son outil de travail et est susceptible, de ce fait, d'entrer dans le champ de l'ISF. Souvent, d'ailleurs, la personne concernée part à l'étranger en même temps que son capital.

M. Augustin Bonrepaux s'est indigné de constater que, justement, la politique de l'actuelle majorité tend à favoriser ce comportement, puisqu'elle a récemment fait voter une disposition réduisant l'ISF pour les investissements effectués à l'intérieur de l'Union européenne.

M. Jean-Pierre Brard a regretté que, comme de coutume, la majorité se fasse le défenseur des « Coblençards ».

M. Henri Emmanuelli a dénoncé l'attitude qui consiste à pratiquer une désinformation systématique en matière d'attractivité du territoire. Il n'y pas d'un côté les calculs qui arrangent - que l'on met en avant - et, de l'autre, les calculs qui dérangent - que l'on cherche à écarter ou à discréditer. Il y a deux ans, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a lancé une étude pour éclairer le phénomène supposé de fuite des capitaux : rien n'a été trouvé, sauf quelques cas isolés, qui ne représentent pas grand-chose par rapport aux masses totales de capitaux en jeu. Par ailleurs, si certaines entreprises françaises - et non des moindres - sont aujourd'hui achetées partiellement ou totalement par des capitaux étrangers, c'est peut-être aussi parce que des privatisations irréfléchies ont aiguisé les appétits des fonds de pension anglo-saxons. De plus, le mécanisme de l'avoir fiscal a pu améliorer de façon fictive le rendement apparent des investissements étrangers en France.

La Commission a rejeté ces deux amendements.

La Commission a également rejeté :

- un amendement présenté par M. Jean-Pierre Brard, tendant à relever de 20% à 25% la proportion du capital d'une société (droits financiers et droits de vote) devant être couverte par un pacte d'actionnaires pour pouvoir bénéficier de l'exonération partielle d'ISF ;

- deux amendements identiques, présentés respectivement par M. Jean-Pierre Brard et M. Augustin Bonrepaux, tendant à supprimer le dispositif d'exonération d'ISF des souscriptions en numéraire au capital de PME ;

- un amendement présenté par M. Jean-Louis Dumont, tendant à relever de 50% à 75% le seuil de détention des parts d'une entreprise par rapport au patrimoine taxable à l'ISF qui permet d'obtenir la qualification de biens professionnels pour l'exonération de ces parts de l'ISF ;

- un amendement présenté par M. Charles de Courson, tendant à considérer comme biens professionnels les biens ruraux donnés à bail à long terme (plus de 18 ans), y compris hors du cadre familial.

La Commission a ensuite examiné un amendement présenté par M. Charles de Courson, tendant à étendre le « cercle familial » ouvrant droit à l'exonération des biens donnés à bail à long terme aux conjoints des ascendants ou descendants du redevable.

Le Rapporteur général a déclaré être favorable à cet amendement sous réserve de préciser que le conjoint visé est uniquement celui d'un descendant du redevable et non celui d'un ascendant. Dans ce cas de figure, on maintient l'exigence d'exploitation du bien dans le seul cadre d'une exploitation familiale. En revanche, lors de l'examen du projet de loi sur l'initiative économique, des amendements similaires visant à étendre l'exonération au cas d'une exploitation par une société avaient été rejetés car ils s'écartent de la logique du dispositif dérogatoire en faveur des baux ruraux à long terme.

M. Jean-Pierre Brard s'est élevé contre cet amendement qui participe d'une démarche réfléchie de démantèlement progressif de l'ISF. Au sein de la Commission, les problèmes des uns - préserver les privilèges d'une petite caste de riches - ne sont pas les problèmes des autres - assurer des conditions de vie décentes à des familles modestes. Tout le discours idéologique qui remet en cause la légitimité de l'ISF contribue à créer les conditions de l'« émigration fiscale » que la majorité actuelle se plaît justement à dénoncer. Pourquoi ne parle-t-on jamais des personnes qui reviennent en France ? Car lorsque l'on a des enfants, la vie à Londres n'est pas bon marché puisqu'il faut payer les dépenses d'éducation, de santé, entre autres.

Le Président Pierre Méhaignerie a vu dans ces propos une confirmation de ce qu'un débat est nécessaire sur l'ISF et ses conséquences en termes de délocalisations.

M. Jean-Pierre Brard a estimé que certaines déclarations antérieures du Président Pierre Méhaignerie pouvaient laisser se dessiner des convergences de vue inédites.

Le Rapporteur général a indiqué que les retours de contribuables qui se sont expatriés peuvent être estimés à peu près en proportion d'un quart des départs. La difficulté vient de ce que les retours en France peuvent être mesurés de façon fiable, alors que les départs sont vraisemblablement sous-estimés : ne sont comptabilisées en effet que les personnes qui payaient déjà l'ISF avant l'expatriation. Par nature, les statistiques ne peuvent pas saisir les personnes qui s'expatrient avant d'être assujetties à l'ISF lorsque, notamment, la vente de leur entreprise leur fait perdre l'exonération dont elles bénéficiaient sur les droits de celle-ci au titre des biens professionnels. Là est la véritable cause d'hémorragie.

M. Augustin Bonrepaux a déclaré qu'on aurait quelque difficulté à le convaincre que les biens ruraux peuvent être délocalisés. Cet amendement n'a donc d'autre raison que de consentir un nouveau cadeau fiscal. Il convient de le rapprocher de l'avis défavorable émis par le Rapporteur général sur les propositions du groupe socialiste tendant à élargir le dispositif d'exonération des petites successions prévu à l'article 9. Lorsqu'il s'agit de l'ISF, cette majorité déborde de largesses. Lorsque l'opposition fait des propositions - au demeurant modestes - en faveur des petits propriétaires, c'est encore trop. Les décisions de la majorité ne visent qu'à renforcer l'injustice fiscale.

Le Rapporteur général a rappelé que l'objet du présent débat portant sur l'amendement présenté par M. Charles de Courson, vise à permettre au propriétaire d'un bien rural loué à long terme d'en confier l'exploitation au conjoint d'un descendant. Limiter le champ de l'amendement aux seuls descendants l'oriente plus clairement vers l'installation de jeunes agriculteurs, ce qui ne peut que recueillir l'assentiment général.

M. Henri Emmanuelli a contesté le fait que cet amendement puisse contribuer à revitaliser les campagnes : compte tenu des modalités d'imposition du foncier mis à bail, les bailleurs de biens ruraux assujettis à l'ISF ne sont pas les modestes exploitants agricoles qu'on voudrait faire croire. Il s'agit bien plutôt de riches propriétaires d'immenses exploitations.

La Commission a adopté cet amendement.

Elle a ensuite rejeté un amendement présenté par M. Charles de Courson, tendant à prévoir la même exonération que précédemment dans le cas d'une exploitation du bien loué à bail par une société à laquelle un membre du « cercle familial » serait associé.

La Commission a ensuite examiné deux amendements ayant pour objet de revaloriser le barème de l'ISF :

- le premier, présenté par M. Charles de Courson, tendant à revaloriser de 2% ce barème ;

- le second, présenté par M. François Scellier, proposant un taux de revalorisation de 1,7% de ce barème.

Le Rapporteur général a relevé que le taux proposé par l'amendement de M. Charles de Courson correspond au taux d'inflation hors tabac associé au projet de loi de finances pour 2003 et non au taux associé au présent projet de loi de finances.

M. François Scellier a indiqué que son amendement vise à indexer le barème de l'ISF sur l'évolution prévisionnelle de l'indice des prix, ce qui n'a pas été fait depuis 1997. Il s'agit d'éviter que des « petits riches » n'entrent dans le barème de l'impôt par le seul fait de l'érosion monétaire. Par ailleurs, pour stabiliser le dispositif, l'amendement propose également de mettre en œuvre un mécanisme d'indexation automatique en fonction de l'évolution des tranches du barème de l'impôt sur le revenu.

Le Rapporteur général a précisé que le nombre de contribuables à l'ISF est passé de 244.000 en 2000 à 278.000 en 2001 puis à plus de 301.000 en 2002. Dans le même temps, le produit de l'ISF est passé de 2,24 milliards d'euros en 2000 à 2,26 milliards d'euros en 2001 puis 2,1 milliards d'euros en 2002. Ainsi, alors que le nombre d'assujettis a progressé de 4,5% de 2001 à 2002, le produit de l'impôt a reculé dans le même temps de 7%. Ce paradoxe s'explique car nombre de contribuables sont entrés « automatiquement » dans le barème par le seul fait de l'augmentation des prix de l'immobilier, au titre de leur résidence principale. Un deuxième problème vient de ce que l'ISF n'est pas « familialisé », ce qui fait qu'il est parfois acquitté par des personnes qui bénéficient d'un effet de richesse immobilière mais n'ont pas de revenus importants.

Il convient de rappeler, en outre, que le Gouvernement précédent a toujours inclus, dans les projets de loi de finances, une disposition prévoyant la revalorisation du barème en fonction de l'évolution prévisionnelle de l'indice des prix. Mais, au cours de la discussion parlementaire, il faisait des concessions à l'une des composantes de la « majorité plurielle » et acceptait que la disposition soit supprimée.

En toute rigueur, il aurait été souhaitable de procéder à un rattrapage intégral du décalage causé, depuis 1997, par la non-indexation. Mais la situation budgétaire ne permet pas ce rattrapage. L'amendement de M. François Scellier propose donc de compenser l'érosion monétaire prévue en 2004 et d'instaurer un dispositif permettant de faire bénéficier le tarif de l'ISF de la même revalorisation annuelle que celle du barème de l'impôt sur le revenu.

M. Jean-Pierre Brard a dénoncé le caractère incomplet de la vision de la majorité relative à l'ISF qui se concentre sur la baisse de l'ISF sans, parallèlement, s'intéresser à l'élargissement de son assiette.

Suivant l'avis défavorable du Rapporteur général, la Commission a rejeté l'amendement présenté par M. Charles de Courson et adopté l'amendement présenté par M. François Scellier.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Charles de Courson, proposant de supprimer le « plafonnement du plafonnement » de l'ISF.

Le Rapporteur général a souligné que cet amendement aboutirait de fait à revenir au dispositif dit « Bérégovoy ». Malgré sa cohérence, il s'est déclaré contraint d'exprimer un avis défavorable en raison du coût prohibitif pour les finances publiques d'une telle mesure.

La Commission a rejeté l'amendement.

Article 10 : Relèvement de la limite d'application du régime simplifié d'imposition des bénéfices agricoles :

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Augustin Bonrepaux, visant à supprimer cet article.

M. Augustin Bonrepaux a souligné que le dispositif proposé, qui représente probablement un coût significatif, ne bénéficiera de fait qu'à 14.000 exploitants agricoles dont les bénéfices sont significatifs, et probablement très peu d'exploitations dans l'Ariège. Il s'est d'ailleurs interrogé sur l'absence d'évaluation de l'impact sur les finances publiques de cet article.

M. Marc Le Fur a souhaité dissiper le malentendu consistant à assimiler le chiffre d'affaires et le bénéfice imposable, qui sont deux notions bien distinctes. Des exploitations bénéficiant certes d'un chiffre d'affaires extrêmement élevé peuvent éprouver de réelles difficultés à dégager des bénéfices, même modestes. Ainsi, la mesure proposée ne concernera que des exploitations affichant un niveau de bénéfices élevé.

Le Rapporteur général s'est opposé à l'amendement. En effet, le régime réel simplifié pour les bénéfices agricoles est, paradoxalement, plutôt moins intéressant que le régime réel normal dans un grand nombre de cas. L'expérience indique en effet qu'environ la moitié des agriculteurs imposés au bénéfice réel le sont par l'exercice de l'option qui leur est offerte, alors qu'ils sont éligibles au régime du réel simplifié.

La Commission a rejeté l'amendement et adopté l'article 10.

Après l'article 10 :

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Alain Marleix, visant à permettre aux détenteurs de parts de sociétés non soumises à l'impôt sur les sociétés, à l'exclusion des sociétés civiles immobilières, qui donnent en location des immeubles nus, de bénéficier du régime du « micro-foncier » prévu à l'article 32 du code général des impôts.

La Commission a adopté l'amendement, suivant l'avis favorable du Rapporteur général.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Charles de Courson, visant à rétablir la possibilité pour les exploitants imposés selon un régime réel, d'opter pour le calcul des cotisations sociales en fonction du revenu de l'année au titre de laquelle ces cotisations sont dues (option dite de l'année n).

Le Rapporteur général a estimé inopportun de revenir sur le système de calcul des cotisations sociales dues par les exploitants agricoles soumis au régime réel d'imposition. En effet, le choix aujourd'hui laissé à ces derniers est de calculer les cotisations, soit en fonction du revenu moyen sur les années n - 3, n - 2 et n - 1, soit en fonction du revenu de l'année n - 1. Ce régime se révèle satisfaisant, tandis que l'amendement implique une imposition basée sur l'année n, par définition non connue, et donc soumise à évaluation, introduisant un facteur d'instabilité du prélèvement.

M. Augustin Bonrepaux a souhaité disposer d'éléments d'évaluation relatifs aux coûts des amendements adoptés par la Commission, afin de les comparer à ceux des amendements qu'elle a rejetés, ce à quoi s'est engagé le Rapporteur général.

M. Jean-Louis Dumont a regretté que la fiscalité agricole ne soit pas au cœur du débat budgétaire cette année, comme l'année dernière d'ailleurs. Il a souligné que le Gouvernement s'était déclaré défavorable à la plupart des amendements déposés en la matière lors du précédent débat budgétaire, invoquant le dépôt imminent d'une grande loi agricole qui n'a toujours pas été soumise à l'examen du Parlement.

Le Rapporteur général a indiqué que la réforme de la fiscalité agricole avait été pour partie traitée lors de l'adoption de la loi sur l'initiative économique, à l'occasion de laquelle la moitié des propositions d'amendements déposés lors du débat budgétaire avait été examinée. En particulier, le problème des plus-values professionnelles a d'ores et déjà été traité. Il a, en outre, souligné qu'une deuxième loi Dutreil était en préparation et qu'elle permettrait de répondre notamment au problème posé par l'imposition des bénéfices agricoles.

La Commission a rejeté l'amendement.

Article 11 : Modification du tarif de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP) applicable au gazole :

La Commission a examiné quatre amendements de MM. Charles de Courson, Didier Migaud, François Liberti et Hervé Mariton, tendant à supprimer l'article.

M. Didier Migaud s'est élevé contre le caractère injuste de l'augmentation de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP) assise sur le gazole. La justification écologique de la mesure s'apparente à un prétexte dans la mesure où sont exclus de l'augmentation du tarif correspondant, les transporteurs routiers professionnels. En outre, les progrès technologiques s'agissant des moteurs diesel rendent les arguments écologiques moins pertinents. Il serait d'ailleurs beaucoup plus opportun d'encourager les propriétaires de véhicules diesel à les changer, plutôt que d'accroître le tarif évoqué dont le caractère forfaitaire pèse lourdement sur les ménages les plus modestes.

Le Rapporteur général a tout d'abord rappelé que le précédent Rapporteur général, dans son rapport relatif à la première lecture du projet de loi de finances pour 2000, avait défendu l'augmentation de la TIPP assise sur le gazole pour des raisons écologiques, invoquant la nécessité d'atteindre à échéance de sept ans, l'écart moyen constaté dans l'Union européenne entre l'accise sur le supercarburant sans plomb et l'accise sur le gazole. La position de l'opposition manque donc de continuité. En outre, l'augmentation du tarif dans le loi de finances initiale pour 2000 avait été mise en œuvre dans un contexte où les prix à la pompe étaient très supérieurs aux prix actuels. Même en prenant en compte l'augmentation de la TIPP assise sur le gazole proposée par l'article, les prix à la pompe resteraient nettement inférieurs à ce qu'ils étaient il y a trois ans. Il a en outre rappelé que l'alourdissement de la TIPP assise sur le gazole dans la loi de finances pour 2000, pour des motifs environnementaux, était presque concomitante à la réduction de l'impôt sur le revenu dans la première loi de finances rectificative pour 2000 et ce, sans que la majorité d'alors ne trouve d'incohérence dans la mise en oeuvre simultanée des deux politiques. S'agissant du présent article, le gain de 800 millions d'euros aura pour stricte contrepartie un relèvement des subventions à Réseau ferré de France, afin de contribuer à son désendettement et au financement de travaux de régénération du réseau ferroviaire. Il y a bien une raison budgétaire au relèvement du tarif de la TIPP assise sur le gazole et il faut bien en comprendre la logique : l'Etat doit affecter des crédits au financement de travaux d'investissement ferroviaires qui, de l'avis de tous, doivent être encouragés, ne serait-ce d'ailleurs que pour développer le ferroutage, élément décisif d'une politique efficace de lutte contre la pollution.

M. Didier Migaud s'est réjoui de ce que la présente mesure ait été présentée au motif du besoin de recettes nouvelles et non sous le prétexte environnemental. Par rapport à la hausse de la TIPP décidée par le précédent Gouvernement, il convient de prendre en compte la différence de situation avec, d'une part, l'existence de progrès considérables dans la lutte contre les particules émises par les véhicules diesel et, d'autre part, un contexte international totalement différent caractérisé par l'effondrement du dollar. Outre les conséquences néfastes sur l'économie, que l'on peut craindre, de la présente mesure, on peut regretter que le budget de l'Etat soit amené à assurer certains investissements en créant une recette nouvelle et en l'affectant, préférant ainsi augmenter la fiscalité sur le plus grand nombre au profit d'un nombre restreint de contribuables.

M. Charles de Courson s'est réjoui à son tour de l'amélioration de la teneur des débats à propos de la TIPP avec la disparition de l'argument environnemental qui n'est pas justifié. Les moteurs diesel aujourd'hui sont en effet les moins polluants. Le présent dispositif est critiquable à plusieurs titres :

- il prévoit une affectation de la nouvelle recette à RFF sans que celle-ci soit juridiquement encadrée ; ainsi la hausse de la TIPP serait affectée à hauteur de 675 millions d'euros au service de la dette de RFF ;

- par ailleurs, la situation internationale est incertaine avec la reprise de la production irakienne et la baisse de la production décidée des pays membres de l'OPEP ;

- surtout, la stratégie fiscale, avec la présente mesure, deviendrait illisible. Si l'on peut en effet se féliciter de la poursuite du mouvement de baisse des charges sociales, de l'augmentation de la PPE et de la poursuite de la baisse du barème de l'impôt sur le revenu, en revanche, on ne peut que s'inquiéter de la hausse de la TIPP qui toucherait inégalitairement les citoyens. De fait, si cette hausse entraînera un coût moyen par personne de 38 euros par an, ce coût serait sensiblement plus élevé en zone rurale et toucherait, par ailleurs, davantage les actifs. Ainsi, la politique fiscale reviendrait à annuler partiellement les avantages accordés.

L'expérience doit éclairer les choix politiques d'aujourd'hui en tirant les leçons des erreurs passées. Il est donc souhaitable de supprimer le présent article et de compenser la perte de recettes de 800 millions d'euros par une réduction équivalente des dépenses.

M. Jean-Louis Idiart a souligné l'incohérence fiscale de la présente mesure qui témoigne de la « cacophonie » du Gouvernement sur ce sujet au cours des derniers mois. Cette mesure constituerait une double pénalisation des populations rurales, défavorisées une première fois en raison de leur dépendance vis-à-vis du transport individuel, en l'absence de transports publics, et défavorisées une seconde fois par l'augmentation des nuisances provoquées par l'encouragement du transport routier, puisque les camions ne sont pas concernés par la hausse de la taxation et que le ferroutage n'est pas favorisé.

M. Michel Bouvard a appelé au sens des responsabilités. D'un côté, la réintégration de RFF dans le budget de l'Etat exige d'intégrer sa dette tout en lui donnant les moyens de poursuivre ses investissements. De l'autre, la dieselisation croissante du parc automobile, favorisée par l'atténuation du coût supplémentaire des véhicules diesel, le niveau de la TIPP et les progrès réalisés dans la lutte contre les particules au cours des dernières années, ont eu pour conséquence de baisser les recettes de la TIPP. Cette situation impose donc aujourd'hui de choisir entre une recette supplémentaire qui permettra de poursuivre les investissements ferroviaires, à la fois pour le réseau ancien et pour le développement du réseau, et le statu quo en l'absence de crédits budgétaires.

L'une des grandes faiblesses du présent article réside dans l'absence de lien entre la nouvelle recette et son affectation spécifique au financement du système ferroviaire. Dans ces conditions, cette nouvelle recette ne peut être adoptée qu'à la condition d'établir précisément et de manière pérenne son affectation.

M. Jean-Marc Le Fur s'est déclaré en désaccord avec la position précédemment exprimée. Le présent projet de budget présente une certaine cohérence au travers des mesures en faveur de la valorisation du travail et de l'initiative. Or, le présent article est en totale contradiction avec cette cohérence. De plus, l'avenir sur l'évolution des devises et du prix du baril est totalement incertain et pourrait ne pas être aussi favorable qu'on le voudrait.

Par ailleurs, l'affectation de la nouvelle recette aux transports ferroviaires est contestable si l'on considère que le monde rural n'a aucune alternative dans son mode de transport. Ainsi, la mesure créerait une rupture d'égalité considérable entre départements selon leur taux de dieselisation, c'est-à-dire entre les départements où ce taux est le plus faible, au premier rang desquels Paris dont le taux de 27% est le plus bas en France, et les départements où ce taux est le plus fort qui sont des départements de zone rurale, tel que la Lozère où le taux est le plus élevé de France. La hausse de la TIPP aura donc un effet inégal en fonction de la localisation géographique du contribuable.

Il serait donc préférable de se donner le temps de trouver une autre recette pour financer les besoins de RFF à hauteur de 800 millions d'euros.

M. Didier Migaud a estimé injuste le relèvement du tarif de la TIPP assise sur le gazole, car il pénalisera les particuliers qui utilisent leur voiture pour se rendre à leur lieu de travail et ce, en particulier, dans le monde rural. Il est donc nécessaire de supprimer ce dispositif.

En raison du principe de non-affectation de recettes budgétaires à des dépenses particulières, le ministre de l'économie et des finances semble ne pas pouvoir, ni vouloir d'ailleurs, affecter le produit supplémentaire de 800 millions d'euros procuré par ce relèvement à Réseau ferré de France (RFF). Quelles sont les intentions de la majorité sur ce point ?

Il a enfin souligné la contradiction entre la priorité affichée par le Gouvernement en matière d'investissement et la réalité de la politique menée. Déduction faite de l'« affectation » de ces 800 millions d'euros à RFF, le montant des crédits prévus pour l'investissement public en 2004 serait inférieur au montant des crédits initiaux ouverts en 2003.

En réponse à ces interrogations, le Rapporteur général a rappelé qu'il avait évoqué, lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2004 en Commission, l'éventualité du dépôt d'un amendement visant à affecter explicitement à RFF les recettes supplémentaires issues du relèvement du tarif de la TIPP assise sur le gazole.

Cet amendement n'est, en réalité, pas nécessaire, au regard des dispositions prévues dans le bleu budgétaire relatif au budget de l'équipement et des transports, qui affectent bien les dispositions précitées à RFF.

Le Rapporteur général a par ailleurs précisé que ces 800 millions d'euros ne viendront pas en déduction de l'effort d'investissement de l'Etat en faveur de RFF :

- en matière de travail de régénération, une ligne budgétaire nouvelle (article 30 du chapitre 45-43 du ministère de l'équipement) est créée qui sera dotée en 2004 de 675 millions d'euros en autorisations de programme et de 675 millions d'euros en crédits de paiement. Cette ligne budgétaire représente un effort nouveau de la part de l'Etat ;

- la subvention versée par l'Etat en faveur de l'investissement de RFF (retracée à l'article 10 du chapitre 45-43 du ministère précité), est orienté certes à la baisse, puisqu'elle passera de 1,66 milliard d'euros en 2003 à 1,33 milliard d'euros en 2004, mais cette baisse est compensée par une augmentation de 300 millions d'euros au titre des frais de péage.

Par ailleurs, de manière plus générale, le montant des crédits pour 2004 relatifs à l'investissement civil et militaire fera l'objet d'une augmentation au regard du montant des crédits correspondants ouverts en 2003, les crédits d'investissement civil considérés seuls demeurant globalement stables.

La Commission a rejeté les quatre amendements de suppression de l'article.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Jean-Pierre Brard, visant à mettre fin au remboursement d'une fraction de la TIPP assise sur le gazole acquittée par les propriétaires des véhicules routiers à moteur destinés au transport de marchandises et des véhicules tracteurs routiers.

La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a également rejeté un amendement présenté par M. Jean-Pierre Brard, tendant à réduire progressivement le montant du remboursement de la TIPP assise sur le gazole acquittée au titre des véhicules routiers à moteur destinés au transport de marchandises et des véhicules tracteurs routiers.

La Commission a adopté l'article 11 sans modification.

Après l'article 11 :

La Commission a examiné deux amendements identiques présentés par MM. Charles de Courson et Alain Marleix, tendant à reconduire jusqu'au 31 décembre 2009 le régime de réduction de la TIPP applicable aux biocarburants.

M. Charles de Courson a rappelé que l'exonération votée dans la loi de finances pour 2003 n'était que temporaire et deviendrait caduque d'ici la fin de l'année, sauf à être renouvelée. Le Gouvernement semble avoir évoqué l'idée d'une proposition législative dans la loi de finances rectificative pour 2003. Dispose-t-on d'informations plus précises sur ce point ?

Le Rapporteur général a relevé que le projet de directive du Conseil restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité n'avait pas été adopté, contrairement à ce qui était prévu initialement, le 7 octobre 2003. La directive devrait néanmoins être publiée dans les semaines à venir. Toutefois, le Gouvernement informe le Parlement dans le tome I du fascicule des voies et moyens, annexé au projet de loi de finances pour 2004, qu'un dispositif relatif aux biocarburants doit être proposé dans le projet de loi de finances rectificative pour 2003, prenant en compte les dispositions retenues dans la future directive du Conseil. La question du régime fiscal des biocarburants devrait donc être traitée d'ici la fin de l'année.

M. Charles de Courson a souhaité obtenir des précisions complémentaires sur le dispositif que le Gouvernement entend proposer dans le projet de loi de finances rectificative pour 2003. L'importance du problème à traiter nécessite un travail approfondi, qu'il sera difficile de mettre en œuvre, compte tenu des délais d'examen propres au projet de loi de finances rectificative de fin d'année.

Le Rapporteur général a estimé que le dépôt d'un amendement sur le sujet, discuté en séance publique, ne serait pas inutile, puisqu'il inviterait le Gouvernement à préciser le dispositif qu'il entend proposer dans le projet de loi de finances rectificative pour 2003.

M. Alain Marleix a souligné que la filière des biocarburants, qui nécessite au préalable des investissements considérables, doit bénéficier d'un régime d'imposition lisible. Ne serait-ce que pour des raisons environnementales, la France ne saurait être absente de cette filière. Par ailleurs, premier pays exportateur de céréales dans l'Union européenne et deuxième au monde, elle se doit de mettre en œuvre une politique ambitieuse dans ce domaine qui permettra, in fine, de nombreuses créations d'emplois. Dans ce contexte, il n'est pas justifiable que la France n'ait pas développé une filière des biocarburants comparable, par exemple, à celle qui existe en Espagne.

Les deux amendements ont été retirés.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Charles de Courson visant à relever le montant de la réduction de TIPP pour le contenu en alcool de dérivés de l'alcool éthylique incorporés au supercarburant dont la composante alcool est d'origine agricole et pour l'alcool éthylique d'origine agricole incorporé au supercarburant.

M. Charles de Courson a proposé à la Commission de se prononcer en faveur d'une application de la réduction de la TIPP applicable aux biocarburants, à l'incorporation directe d'alcool éthylique d'origine agricole dans les supercarburants. Il faut savoir que la principale entreprise pétrolière française s'oppose, jusqu'ici avec efficacité, à un tel dispositif.

Le Rapporteur général a demandé à M. Charles de Courson de déposer cet amendement en séance afin d'interroger le Gouvernement sur l'opportunité de la mise en œuvre de ces modalités techniques.

M. Charles de Courson a attiré l'attention de la Commission sur le fait que la France livre aujourd'hui des matières premières agricoles qui sont utilisées pour la fabrication de biocarburants dans des usines allemandes ou espagnoles, biocarburants qui sont ensuite acheminés et consommés en France, avant de retirer son amendement.

M. Charles de Courson et M. Alain Marleix ont ensuite retiré deux amendements, tendant à ouvrir le bénéfice de la réduction de TIPP applicable aux esters méthyliques d'huiles végétales incorporées au gazole, à l'incorporation directe d'alcool éthylique dans ce carburant.

La Commission a rejeté, suivant l'avis défavorable du Rapporteur général, un amendement présenté par M. Jean-Pierre Brard visant à réduire le volume de gazole par véhicule de transport routier pouvant faire l'objet d'un remboursement partiel de TIPP assise sur ce carburant.

Article 12 : Taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée sur les services à forte intensité de main d'œuvre :

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Michel Bouvard, visant à appliquer le taux réduit de 5,50% de TVA aux travaux de rénovation des internats d'établissements d'enseignement privés ayant passé avec l'Etat un contrat d'association et visés aux articles L. 442-5 et L. 442-12 du code de l'éducation.

Le Rapporteur général, citant une instruction fiscale en date du 5 décembre 2000, a indiqué que l'instruction fiscale du 28 août 2000 (3 C-7-00, B.O.I. n° 163 du 5 septembre 2000) précise que les travaux afférents aux locaux des établissements scolaires privés ou publics affectés à l'hébergement peuvent bénéficier de ce taux réduit, dès lors que l'activité d'hébergement n'est pas soumise à la TVA. Sont ainsi notamment considérés comme locaux d'hébergement les chambres, cellules et sanitaires.

La Commission a ensuite rejeté cet amendement et adopté l'article 12 sans modification.

Après l'article 12 :

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Denis Merville, visant à soumettre au taux réduit de 5,50% de la TVA les opérations de formation à la sécurité routière. Le Rapporteur général a indiqué que ce service ne figure pas dans la liste des biens et services susceptibles de bénéficier d'un taux réduit de la TVA au regard de l'annexe H à la directive du Conseil 77/388/CEE qui les énumère.

Cet amendement a été retiré.

La Commission a ensuite examiné un amendement présenté par le Président Pierre Méhaignerie, visant à supprimer la possibilité pour les importateurs situés dans certains départements d'outre-mer d'opérer la déduction de la TVA sur les produits qu'ils ont importés en exonération de TVA.

Le Président Pierre Méhaignerie a indiqué que ce dispositif, véritable curiosité, peut être considéré comme une aide aux entreprises exerçant leur activité dans certains départements d'outre-mer. Il est, en tout état de cause, nécessaire d'interroger le Gouvernement sur le fondement et la légitimité de cette mesure, comme l'y invitent d'ailleurs les travaux du Conseil des impôts.

Le Rapporteur général s'est dit sensible aux arguments développés tant par le Conseil des impôts que par le Président Pierre Méhaignerie. Sur le plan de la réflexion, il est en effet peu compréhensible que des entreprises n'acquittant pas la TVA puissent imputer cette dépense de TVA virtuelle sur la TVA récoltée sur les ventes auxquelles elles procèdent.

On peut par ailleurs penser intuitivement que les bénéficiaires de ce dispositif sont les importateurs et non les entreprises locales. Peut-être les importateurs répercutent-ils l'avantage tiré de ce dispositif en abaissant leurs prix de vente, mais il n'est en tout état de cause pas observé que ces prix se situent à des niveaux moins élevés qu'en métropole. Il a ensuite précisé que ce dispositif résulte d'une instruction de 1953, publiée avant même la création de la TVA sous sa forme actuelle, et qu'il s'est sans doute appliqué au préalable à la taxe locale.

M. Marc Laffineur a ajouté que les importations dans les départements d'outre-mer, si elles ne sont pas soumises à la TVA, sont assujetties à l'octroi de mer, qui constitue une ressource pour les collectivités locales d'outre-mer. Il a exprimé son accord de principe avec cet amendement, sous réserve que puisse être connu le montant de la TVA virtuelle ainsi déduite, au regard des montants recouvrés s'agissant de l'octroi de mer. Par ailleurs, si une économie devait être réalisée, il faut bien souligner qu'elle devrait nécessairement être affectée à l'investissement dans les départements d'outre-mer concernés.

M. Charles de Courson a fait part de sa perplexité, se souvenant de ce qu'un débat avait eu lieu sur la question de la TVA et de l'octroi de mer et que ce débat avait été tranché en faveur d'une soumission, soit à la TVA, soit à l'octroi de mer.

Le Rapporteur général a précisé que si la TVA est appliquée à la vente sur les marchés locaux, les importations dans les départements d'outre-mer en sont exonérées, alors qu'elles sont soumises à l'octroi de mer.

M. Marc Laffineur a estimé que le bénéfice du fonds de compensation pour la TVA pour les collectivités locales qui n'acquittent pas la TVA sur leurs investissements, relevait du même esprit.

Le Président Pierre Méhaignerie a souligné que la complexité même du sujet nécessitait un débat en séance publique avec le Gouvernement.

Le Rapporteur général a ajouté qu'en matière de fiscalité, les dispositifs favorables à l'outre-mer se sont multipliés sans que les strates successives de mesures fassent l'objet d'un réexamen régulier et sans que des projets de redéploiement des dépenses ainsi engagées soient formulés.

Suivant l'avis favorable du Rapporteur général, la Commission a adopté cet amendement.

La Commission a ensuite rejeté deux amendements présentés par M. Jean-Pierre Brard visant, respectivement, à abaisser le taux normal de TVA à 18,60% et à soumettre l'ensemble des produits destinés à l'alimentation au taux réduit de 5,50% de la TVA .

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Jean-Louis Dumont, visant à appliquer le taux réduit de 5,50% de la TVA à la vente des protections pour l'incontinence adulte.

Le Rapporteur général a noté que la vente de ces protections pouvait effectivement, le cas échéant, bénéficier d'un taux réduit de TVA du point de vue du droit communautaire, mais, eu égard au coût de la mesure, évalué à 80 millions d'euros, il ne paraît pas opportun de mettre en œuvre ce dispositif.

La Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Didier Migaud, proposant d'appliquer le taux réduit de la TVA de 5,5% aux frais d'obsèques et d'achat de concessions funéraires.

M. Didier Migaud a noté que de nombreuses familles confrontées au décès de l'un des leurs, rencontrent aujourd'hui de graves difficultés financières s'agissant des frais liés aux obsèques.

Le Rapporteur général a relevé que les frais considérés pouvaient effectivement, le cas échéant, bénéficier d'un taux réduit de TVA du point de vue du droit communautaire, mais, eu égard au coût du dispositif, qui pourrait s'élever à 110 millions d'euros, il n'apparaît pas opportun de le mettre en oeuvre. Pour répondre au problème soulevé par M. Didier Migaud, il a souligné que l'article 14 de la loi de finances pour 2003 du 30 décembre 2002, adopté à son initiative, a permis d'établir une déduction de l'actif de la succession au titre des frais funéraires.

M. Didier Migaud a considéré qu'une mesure tendant à réduire le taux de TVA est en tout état de cause plus efficace, notamment parce que toutes les familles et personnes concernées ne sont pas redevables de droits de succession.

La Commission a ensuite rejeté cet amendement.

La Commission a rejeté un amendement présenté par M. Jean-Pierre Brard, visant à appliquer le taux réduit de la TVA de 5,50% à un certain nombre d'équipements de sécurité obligatoires.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Didier Migaud, visant à l'application du taux réduit de 5,50% de la TVA aux services de restauration.

M. Didier Migaud a évoqué les annonces du Premier ministre en la matière et a déclaré ne pas comprendre que les engagements pris par le Gouvernement ne se traduisent pas dès à présent par une inscription de cette mesure en première partie de la loi de finances. Le Gouvernement présente en effet en deuxième partie du projet de loi de finances une mesure de baisse du taux de TVA applicable aux services de restauration. Ce choix est en contradiction totale avec le discours volontariste exprimé par le Premier ministre qui s'est fait fort de convaincre les partenaires de la France au sein de l'Union européenne. Il serait opportun d'inscrire cette mesure dans la première partie du projet de loi de finances, afin qu'elle soit mise en œuvre à compter, par exemple, du 1er avril 2004. L'adoption de cet amendement conforterait la majorité s'agissant du respect de ses engagements fiscaux.

Le Rapporteur général a expliqué que la question des secteurs concernés par le taux réduit de 5,50% de TVA est traitée dans deux articles du projet de loi de finances pour 2004 : en première partie, à l'article 12, s'agissant des travaux réalisés dans les logements construits depuis plus de deux ans et en deuxième partie, à l'article 69, s'agissant des services de restauration. A ce titre, la démarche proposée par le Gouvernement est, contrairement aux propos tenus par M. Didier Migaud, empreinte d'une honnêteté scrupuleuse.

La dépense fiscale correspondant à l'application du taux réduit de TVA pour les travaux dans les logements construits depuis plus de deux ans, s'élève à 3,6 milliards d'euros. Selon toute vraisemblance, son application en 2004 devrait être effective, et ce, soit au terme d'une pérennisation du dispositif de l'actuelle autorisation applicable uniquement à titre provisoire, si les États membres de l'Union européenne parviennent à un accord global applicable en 2004 concernant l'ensemble des taux réduits de la TVA, soit au terme d'une prorogation du dispositif actuellement applicable, dans l'attente que ces Etats membres aboutissent effectivement à l'accord global évoqué. Il reste que d'ici la fin de l'année 2003, il sera sans doute plus simple d'obtenir la prorogation de cette autorisation que de parvenir à un accord global.

S'agissant d'ailleurs du coût du dispositif évalué à 3,6 milliards d'euros, il n'est pas exclu que l'impact économique très favorable de cette mesure puisse conduire à le minorer, du fait notamment de la diminution du travail clandestin, qui se traduit par l'augmentation du montant des cotisations sociales recouvrées et l'augmentation de la profitabilité des entreprises du secteur, ce qui relève d'autant les montants d'impôt sur les sociétés recouvrés. Certaines études prétendent ainsi que le coût net de la mesure s'établit en réalité à un montant compris entre 2 et 2,5 milliards d'euros.

La question de l'application du taux réduit de la TVA aux services de restauration se pose dans des termes différents dans la mesure où ce taux n'est pas actuellement appliqué. L'hypothèse de la prorogation d'une mesure actuelle n'existe donc pas. La mise en œuvre d'une telle mesure ne peut donc découler que d'une modification, approuvée à l'unanimité des Etats membres de l'Union européenne, de l'annexe H à la directive 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977. Dès lors, cette mise en œuvre est concrètement plus hypothétique que la poursuite de l'application du taux réduit de la TVA pour les travaux dans les logements construits depuis plus de deux ans. En tout état de cause, dès lors que la modification évoquée aura été acquise, l'article 69 du projet de loi de finances pour 2004 prévoit, sans ambiguïté, qu'une loi fixera les conditions dans lesquelles les services de restauration seront soumis au taux réduit de 5,50% de la TVA.

M. Didier Migaud a estimé que si le Premier ministre était réellement convaincu que le taux réduit de la TVA pourrait s'appliquer aux services de restauration en 2004, comme il l'a d'ailleurs laissé penser aux professions concernées, une dépense fiscale correspondante aurait été prévue s'agissant du calcul de l'équilibre de la loi de finances pour 2004. Soit le Premier ministre n'y croit pas lui-même, soit le budget que nous propose son Gouvernement est totalement insincère.

M. Charles de Courson a estimé que la mesure la plus profitable au secteur de la restauration consisterait davantage dans la mise en œuvre d'un régime de réduction des cotisations sociales sur les bas salaires que dans une baisse du taux de la TVA applicable aux services correspondants.

Le Président Pierre Méhaignerie a exprimé son accord avec cette position.

M. Daniel Garrigue a rappelé que la conclusion de la négociation au niveau communautaire se heurte à des difficultés substantielles étant donné la nécessité d'un vote à l'unanimité sur les questions fiscales. Chacun sait que l'Allemagne, notamment, a exprimé une opinion défavorable s'agissant des options défendues par la France.

Suivant l'avis défavorable du Rapporteur général, la Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a ensuite rejeté quatre amendements présentés par M. Jean-Pierre Brard, visant à l'application du taux réduit de la TVA :

- à la fourniture de repas à consommer sur place ;

- aux matériels destinés à la production et au stockage d'énergie d'origine solaire, géothermique ou éolienne ;

- aux abonnements relatifs aux livraisons d'énergie calorique distribuées par réseaux publics, alimentés par la géothermie et la cogénération ;

- aux prestations de services funéraires.

La Commission a ensuite rejeté deux amendements identiques, l'un présenté par M. Michel Bouvard et l'autre par M. Denis Merville, prévoyant de soumettre au taux réduit de la TVA la partie relative à l'abonnement à un réseau de chaleur.


© Assemblée nationale