COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 20

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 29 octobre 2003
(Séance de 17 heures 30)

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président

SOMMAIRE

 

pages

- Suite de l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004 (n° 1093) :

 

La Commission a poursuivi l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004 (n° 1093).

La Commission a tout d'abord examiné, sur le rapport de M. Augustin Bonrepaux, Rapporteur spécial, les crédits du tourisme. Après avoir rappelé que le tourisme constituait un secteur économique de toute première importance pour notre pays, le Rapporteur spécial a souligné la faiblesse des crédits qui lui sont consacrés. Si, avec un nombre d'arrivées de touristes étrangers estimé à 77 millions, 2002 a encore été une bonne année touristique, en revanche, après la succession d'événements néfastes, notamment le naufrage du « Prestige », les tendances observées de mai à août derniers laissent entrevoir un constat assez pessimiste pour 2003. La baisse de fréquentation s'est étendue cette année aux européens qui constituent 85 % de la clientèle internationale de la France, avec des conséquences particulièrement lourdes pour certaines régions. En outre, les difficultés, déjà évoquées, conjuguées à la situation économique ont, en 2003, fait évoluer les habitudes de consommation touristique des Français vers plus de mobilité et de courts séjours. Selon certaines sources, la baisse des recettes touristiques pourrait atteindre plus de 10 % sur l'année. Ce n'est cependant pas le cas de l'Espagne qui, bien qu'ayant elle aussi souffert du naufrage du « Prestige », a vu le nombre de ses visiteurs augmenter. Il faut rappeler que cette situation touche, en France, un secteur qui représente, pour ses seules activités caractéristiques, 180.232 entreprises, 765.200 emplois salariés et 144.000 emplois non salariés. Le tourisme international, à l'origine d'un excédent de notre balance des paiements de l'ordre de 15 milliards d'euros, demeure malheureusement en dessous de ses potentialités en matière de recettes et, malgré des progrès, la France ne parvient pas à rattraper l'Espagne.

Le Gouvernement a réuni, le 9 septembre dernier, un comité interministériel consacré au tourisme qui a débouché sur une série de mesures visant à « accompagner et démultiplier les initiatives des acteurs économiques, organiser une régulation de l'activité touristique adaptée aux enjeux d'avenir et adapter le dispositif public ». Ces mesures n'ont, malheureusement, pas trouvé leur traduction dans la loi de finances pour 2004. Cependant, l'une d'entre elles, consistant à mettre en place une campagne de relance de la « destination France » devra faire l'objet d'un abondement de 4 millions d'euros des crédits en loi de finances rectificative pour 2003. Une autre, adaptant à l'immobilier de loisir les avantages fiscaux accordés au secteur du logement, a été adoptée par l'Assemblée nationale lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances grâce à l'initiative de M. Michel Bouvard.

Avec une dotation de 70,11 millions d'euros, les crédits de paiement du tourisme sont en baisse de 6,6 % par rapport au projet de loi de finances pour 2003. Le Secrétariat d'État entend mobiliser ces maigres crédits autour des trois grandes priorités que constituent le renforcement de la promotion de la destination France, la mise en œuvre d'un plan « Qualité France » pour accompagner le développement des activités touristiques et l'accès de tous aux vacances.

La baisse des crédits du tourisme touche l'ensemble des titres budgétaires. Les moyens des services sont réduits de 3,2 %, et, malgré la hausse de 4,3 % prévue pour la subvention à « Maison de la France », les moyens d'intervention accusent une chute de 8,7 %. La plus forte baisse de ces crédits concerne la dotation destinée aux actions consacrées au développement de l'économie touristique, dans le cadre des contrats de plan État-régions (-55,7 %). Pour ce qui concerne les crédits d'investissement, la baisse de la dotation en autorisations de programme s'élève à 16,3 %, celle des moyens de paiement à 6,6 % et seuls les crédits destinés au financement des contrats de plan sont épargnés.

Le soutien à la politique du tourisme ne se limite, cependant, pas à ces crédits, il convient d'y ajouter l'effort considérable consenti par les collectivités territoriales. On peut citer, à ce titre, la contribution financière des conseils régionaux aux budgets des comités régionaux du tourisme. Cette contribution représente plus de 82 % du budget total des CRT qui s'est élevé, en 2002, à 94,8 millions d'euros. Le budget global des comités départementaux, eux-mêmes largement financés par les départements, a atteint 174 millions d'euros. Il faut encore considérer la dotation aux communes touristiques, dont le montant global pour 2003 atteint 197,5 millions d'euros et le produit de la taxe de séjour qui, perçue par près de 2.000 communes, a rapporté 114,52 millions d'euros en 2001. Ce résultat devrait être accru lors des prochains exercices, grâce aux modifications apportées au dispositif de perception de cette taxe, sur proposition de la commission des Finances.

Les crédits consacrés aux contrats de plan subissent une importante baisse résultant d'un transfert vers le Fonds national pour l'aménagement et le développement du territoire (FNDAT). La dotation inscrite sur le titre IV, 3,21 millions d'euros, représente moins de la moitié de la dotation de 2003 qui avait déjà subi une baisse de 20,8 % par rapport à l'exercice précédent, le Secrétariat d'État ayant été conduit à concentrer l'effort budgétaire sur les moyens en capital. La subvention à « Maison de la France » progresse de 4,3 % et est portée à 29,3 millions d'euros. Le Gouvernement a, par ailleurs, annoncé lors du Comité interministériel du tourisme, qu'il consacrerait en 2004 une dotation supplémentaire de 4 millions d'euros à la mise en œuvre d'un plan de relance de la destination « France ». Une dotation identique a, en outre, été promise pour 2005. Malgré une progression constante depuis plusieurs années, cet effort pour la promotion n'en reste pas moins très inférieur à ce que nos concurrents investissent en faveur de leur tourisme : celui de l'Espagne est, par exemple, le triple du nôtre. Pour les autres crédits d'intervention, la baisse des crédits supportée par l'article 21 : « interventions stratégiques », qui avait atteint 23 % dans le projet de loi de finances pour 2003, est contenue à 11 %. Elle concerne, en particulier, des organismes comme l'Agence Française de l'Ingénierie Touristique (AFIT) dont l'avenir mérite d'être repensé, notamment dans le cadre d'un regroupement avec d'autres organismes liés à la Direction du tourisme, tels que l'Observatoire National du Tourisme. Sont également touchés, les crédits destinés au secteur associatif, qui seront réduits de 28 %. La subvention accordée à la « Bourse Solidarité Vacances », d'un montant d'un million d'euros en 2002, devrait ainsi être réduite à 831.000 euros. Ce groupement d'intérêt public qui collecte et redistribue les offres de séjour à prix très bas faites par les partenaires touristiques, privés ou associatifs, à l'intention de personnes en difficulté devra donc rechercher d'autres partenaires.

Enfin, les crédits d'investissement subissent une réduction de 5,1 % résultant exclusivement d'une diminution de la dotation consacrée au programme de rénovation des hébergements touristiques à caractère social. Les autorisations de programme sont en baisse de 16,3 %, compte tenu du transfert de 2,4 millions d'euros de l'article 10 (contrats de plan État-régions) vers le budget de l'aménagement du territoire au titre des conventions interrégionales de massifs et du plan « Loire grandeur nature ».

La dotation des « Contrats de plan État-régions » a donc été fixée à 8,61 millions d'euros en autorisations de programme et à 7,97 millions d'euros en crédits de paiements (+7,8 %), ce qui devrait permettre de poursuivre la réalisation des engagements pris par l'État envers les régions. Le programme de consolidation des hébergements de tourisme social est doté de 3,41 millions d'euros en autorisations de programme (- 7,8 %) et 2,58 millions d'euros en crédits de paiements, ce qui représente une réduction de 30,6 %.

En conclusion, ce projet de budget amène à s'interroger sur la volonté réelle du Gouvernement de conduire une politique du tourisme. Dans ces conditions, on ne saurait être favorable à l'adoption des crédits. En revanche, il pourrait être proposé, malgré tout la sympathie qu'inspire M. Léon Bertrand, d'adopter un amendement supprimant l'ensemble des crédits du Secrétariat d'État au tourisme, et, par suite, le secrétariat d'État lui-même. Cette solution aurait le mérite de dégager des crédits supplémentaires pour la promotion du tourisme.

M. Michel Bouvard a regretté que le budget du tourisme serve de variable d'ajustement au budget général. Si un bon budget n'est pas nécessairement en augmentation, il convient cependant de s'interroger sur la baisse de celui-ci, puisque la réduction porte sur des crédits d'intervention, dont l'efficacité est réelle. S'agissant de la décentralisation, on ne perçoit pas la cohérence d'ensemble de la démarche de l'État. Si les directions régionales du tourisme sont transférées, quels seront les moyens et l'orientation de la politique nationale ? De plus, le regroupement entre le Service d'études et d'aménagement touristique de la montagne (SEATM) et l'AFIT laisse dubitatif.

Par ailleurs, il convient de s'interroger sur les effets de la cristallisation, qui dure depuis dix ans, de la dotation touristique intégrée à la DGF. Un rapport présenté sous la précédente législature avait illustré les injustices provoquées par cette situation, mais les amendements proposés n'ont pas été adoptés. S'agissant du FEDER, la France devrait restituer à l'Union européenne 15 % des crédits de l'objectif 5b à cause de son incapacité à mettre en œuvre ces crédits. Cette situation devrait encore s'aggraver avec l'entrée en vigueur de la procédure de dégagement d'office.

Quant aux conventions interrégionales de massif, celle qui concerne les Alpes ne peut être mise en œuvre du fait de l'absence de décret d'application de la loi relative à la démocratie de proximité, votée en janvier 2002. En conséquence, les crédits prévus sont gelés.

Enfin, « Maison de la France » devrait pouvoir bénéficier de l'appréciation de l'euro, à moins que la régulation budgétaire ne vienne contrarier les avantages de cet effet de change.

M. Jean-Louis Dumont a souligné que la réalité des crédits proposés pour le tourisme était particulièrement inquiétante : les crédits ne sont pas réduits, ils sont amputés. Pourtant, lorsqu'un secteur économique est en difficulté, il est du devoir de l'État de mobiliser des moyens pour en assurer la relance et la modernisation. Il doit aussi encourager la professionnalisation des acteurs du tourisme. C'est une politique globale en faveur du tourisme qu'il faudrait mettre en place. En outre, la crise risque d'être durable pour un grand nombre de ces acteurs. Il faut que toutes les régions puissent bénéficier de l'action en faveur du tourisme. L'avenir apparaît particulièrement inquiétant au vu de la baisse des dépenses d'investissement. Une agence serait sans doute plus efficace que le secrétariat d'État pour assurer la promotion du tourisme.

S'agissant des contrats de plan État-régions, les mêmes objectifs continuent d'être affichés, alors que l'on sait pertinemment qu'en 2003, l'État n'a pas été en mesure de respecter ses engagements.

Les comités départementaux et régionaux du tourisme ne travaillent pas suffisamment en coordination. La hausse des moyens destinés aux actions décentralisées et déconcentrées ne doit pas éclipser le débat sur la définition du lieu de coordination territoriale des politiques de tourisme.

Enfin, faute de co-financements, de nombreux crédits européens seront perdus à la fin de l'année 2003. Cette situation est d'autant plus dramatique que la disparition de ces moyens de paiement se double de la contraction des crédits d'engagement.

M. Philippe Rouault s'est demandé si l'impact des crédits d'État sur la fréquentation touristique pouvait être évalué. En effet, de nombreux facteurs influent sur celle-ci. C'est ainsi qu'en Bretagne, elle a augmenté en 2003 grâce aux conditions climatiques. Par ailleurs, la hausse des crédits destinés à « Maison de la France » permet de consolider l'effort de promotion de notre pays à l'étranger.

Le Président Pierre Méhaignerie a souligné l'importance des enjeux touristiques, mais a déclaré ne pas partager les vues du Rapporteur spécial sur les solutions qu'il propose. En effet, la promotion de la France n'est sans doute plus un élément clé. C'est la qualité des infrastructures qui permet aujourd'hui à l'Andalousie, la Catalogne ou bien encore l'Algarve d'être compétitives sur le plan touristique. Or, en France, les travaux sur l'A51 n'ont pu avoir lieu et les perspectives de construction de logements ne sont pas à la hauteur des enjeux. En 2003, l'Espagne a construit 600.000 logements pour une population de 40 millions d'habitants quand la France n'en construisait que 300.000, pour une population de 60 millions d'habitants. Pour être attractive, la France doit se doter d'infrastructures et se donner les capacités de les construire. En outre, il faudrait réfléchir à une politique de mise en valeur des arrières pays.

En réponse aux différents intervenants, M. Augustin Bonrepaux, Rapporteur spécial, a apporté les précisions suivantes :

- le Président de la Commission aurait encore plus d'autorité que le Rapporteur spécial pour proposer la suppression du secrétariat d'État ; cette structure ministérielle ne prouve pas son utilité ;

- les infrastructures, y compris routières, doivent effectivement être développées. Le dispositif fiscal en faveur des résidences de tourisme fonctionne de manière satisfaisante. Son effet sur les zones rurales devrait même être amplifié par l'augmentation des avantages qu'il procure, même s'il convient de s'interroger sur les effets de défiscalisation des revenus les plus élevés qu'il induit ;

- le manque de capacités d'investissement est particulièrement inquiétant pour l'aménagement du territoire. La baisse de ces crédits risque d'asphyxier les zones rurales, et de ce fait, le jugement doit être encore plus sévère ;

- selon les informations données par M. Léon Bertrand à la commission des Affaires économiques, les délégations régionales du tourisme ne seront pas transférées aux régions et des « correspondants territoriaux du tourisme » assureront l'action déconcentrée du secrétariat d'État. Le régime de classement des stations touristiques demeurera inchangé. Le classement des équipements hôteliers deviendra une compétence des présidents de conseils régionaux ;

- s'agissant de la cristallisation de la dotation touristique au sein de la DGF, il convient d'être prudents sur les modalités d'une éventuelle réforme afin qu'elle n'aboutisse pas à un amoindrissement de ces crédits ;

- les « entretiens de la montagne » n'ont pu avoir lieu cette année, faute de crédits. On doit pourtant souligner les effets démultiplicateurs de moyens qu'induit l'action de l'AFIT auprès de ses partenaires.

En ce qui concerne l'application de la loi organique relative aux lois de finances, M. Michel Bouvard a souligné qu'un programme unique était prévu pour le tourisme et non une mission. Ce recentrage vers le bas entre les missions, les programmes et les actions est observable au sein de nombreux autres ministères. En outre, il convient de s'interroger sur la réalité de la décentralisation, si les structures administratives existantes sont maintenues sous des formes déguisées.

M. Augustin Bonrepaux, Rapporteur spécial, a indiqué qu'il ferait état, dans son rapport écrit et en séance publique, des réflexions de la commission des Finances sur la mise en oeuvre de la loi organique dans ce ministère.

M. Didier Migaud a souligné que lorsqu'un ministère n'arrive pas à définir une mission, au sens de la loi organique, il convient effectivement de s'interroger sur son utilité.

La commission a alors adopté, contre l'avis du Rapporteur spécial, les crédits du tourisme.

*

* *

La Commission a ensuite examiné, sur le rapport de M. Marc Laffineur, Rapporteur spécial, le budget des Collectivités territoriales.

M. Marc Laffineur, Rapporteur spécial, a tout d'abord indiqué que les concours de l'Etat aux collectivités territoriales devraient s'élever, en 2004, à 59,4 milliards d'euros, en hausse de 1,2% par rapport aux concours ouverts en 2003 (58,7 milliards d'euros). Sur ce total de 59,4 milliards d'euros, 42,5 milliards d'euros seraient alloués dans le cadre du contrat de croissance et de solidarité, en hausse de 1,67 %. Cette hausse doit être comparée avec la stabilisation en volume des dépenses de l'État. L'État réalise donc un effort financier en faveur des collectivités territoriales supérieur à celui qu'il consacre à ses propres dépenses.

En 2004, les dotations aux collectivités territoriales constitueront le second poste des dépenses de l'État. Par ailleurs, les concours de l'État représentent en moyenne 30,5 % des recettes totales hors emprunt des collectivités territoriales. Ce pourcentage s'élève à 28,4 % pour les communes, à 33,6 % pour les départements et à 55,8 % pour les régions.

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2004, le Gouvernement propose une simplification sensible des concours alloués aux collectivités territoriales. Cette simplification vise, en premier lieu, à globaliser au sein de la DGF un ensemble de dotations spécifiques, qui, pour l'essentiel, compensent des allégements de fiscalité locale. La DGF intégrerait ainsi, à compter de 2004, les compensations de la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle, de la taxe additionnelle aux droits de mutation à titre onéreux (DMTO) perçue par les régions et de la part régionale de la taxe d'habitation, celle des baisses de DCTP subies par les communes et les groupements défavorisés, versée jusqu'en 2003 par le FNPTP et les dotations de péréquation du FNP et 95% de la DGD versée aux régions et aux départements. Cette globalisation de la DGF accroît au total son montant de 17.209,187 millions d'euros en 2003.

Parallèlement à cette opération de globalisation, il est mis fin à l'existence de différents fonds : fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP), fonds national de péréquation (FNP), fonds de correction des déséquilibres régionaux (FCDR), dont les concours sont intégrés, pour l'essentiel, dans la DGF. Celle-ci devient ainsi le pivot central des dotations de l'État aux collectivités territoriales, passant d'un montant de 18.903,66 millions d'euros au titre de 2003, soit 32 % de l'effort financier de l'État aux collectivités territoriales, à un montant de 36.740,19 millions d'euros en 2004 hors abondements exceptionnels, soit 62 % du total de l'effort financier de l'État aux collectivités territoriales.

Cette globalisation de la DGF autorise une révision de l'architecture des dotations de l'État aux collectivités territoriales. Dans un souci de lisibilité, celles-ci seraient désormais articulées selon un schéma identique pour chaque niveau de collectivité territoriale, autour d'une dotation forfaitaire, destinée à préserver les ressources des collectivités d'une année sur l'autre et d'une dotation de péréquation, ciblée sur les collectivités les plus défavorisées sur le plan fiscal.

La DGF des communes serait ainsi constituée, d'une part, d'une dotation forfaitaire regroupant l'actuelle dotation forfaitaire, la compensation des baisses de la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) observée entre 1999 et 2001 et la compensation versée au titre de la suppression de la part salaire de la taxe professionnelle et, d'autre part, d'une dotation de péréquation comprenant la dotation de solidarité urbaine (DSU) et la dotation de solidarité rurale (DSR), ainsi que la dotation nationale de solidarité issue de l'intégration du Fonds national de péréquation (FNP) dans la DGF.

La DGF des départements reposerait, d'une part, sur une dotation forfaitaire regroupant l'actuelle dotation forfaitaire, la dotation « impôts ménages », la dotation visant à compenser la suppression des contingents communaux d'aide sociale, ainsi que la compensation au titre de la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle versée aux départements et 95% de la DGD versée aux départements et, d'autre part, sur une dotation de péréquation, qui reprendrait l'actuelle dotation potentiel fiscal, la dotation de fonctionnement minimale (DFM) continuant d'exister en tant que telle.

La DGF des régions serait constituée, d'une part, d'une dotation forfaitaire regroupant les compensations perçues en 2003 au titre de la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle, de la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation et de la suppression des droits de mutation à titre onéreux, ainsi que de 95% de la DGD versée aux régions et, d'autre part, d'une dotation de péréquation, qui reprendrait l'actuel Fonds de correction des déséquilibres régionaux.

Cette globalisation de la DGF devrait permettre, à terme, de dégager de nouvelles marges de manœuvre en faveur de la péréquation. Le Comité des finances locales sera chargé de déterminer le taux d'évolution de la dotation forfaitaire de chaque niveau de collectivité territoriale. Ce taux d'évolution étant moins rapide que celui de la masse totale de la DGF, la différence viendra, chaque année, majorer les sommes consacrées à la péréquation.

Dès 2004, la dotation de péréquation des régions pourrait augmenter entre 9 % et 39 % selon les décisions que prendra le Comité des finances locales. La dotation de péréquation et la dotation de fonctionnement minimal des départements pourraient croître entre 6 % et 11 % en 2004. En raison du ralentissement de la croissance et de l'importance du financement de l'intercommunalité, ce nouveau mécanisme ne permet pas, s'agissant des dotations de péréquation communale, de faire l'économie d'abondements exceptionnels. Le Gouvernement propose donc d'abonder le solde de la dotation d'aménagement à hauteur de 96 millions d'euros, garantissant ainsi à la dotation de solidarité urbaine (DSU) et la dotation de solidarité rurale (DSR) une progression de 1,5 % en 2004. En revanche, la dotation nationale de péréquation (DNP), issue de la suppression du FNP, pourrait subir une baisse de 4 %.

Le Rapporteur spécial a ensuite évoqué la reconduction du contrat de croissance et de solidarité selon des modalités d'indexation identiques à celles de 2003, à savoir le taux d'inflation de l'année à venir, et 33% du taux de croissance de l'année en cours. Ce contrat de croissance et de solidarité permet de garantir une prévisibilité des ressources des collectivités territoriales et des charges de l'Etat, grâce à une programmation pluriannuelle de l'évolution des dotations, et d'associer les collectivités territoriales à l'effort de maîtrise de la dépense publique. En 2004, l'application des mécanismes d'indexation permet de garantir une progression de 1,67% des dotations sous enveloppe et la prise en compte de la croissance permettra d'abonder le contrat à hauteur de 69 millions d'euros.

En 2004, l'ajustement du contrat de croissance et de solidarité sera effectué par une baisse de 3,46% de la DCTP. Toutefois, si l'on tient compte de l'abondement de 35,58 millions d'euros suite à l'arrêt du Conseil d'Etat « Commune de Pantin », la baisse de la DCTP ne sera que de 1,75% en 2004.

S'agissant des concours hors enveloppe, le Rapporteur spécial a précisé que la dotation inscrite pour 2004 au titre du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) s'élèverait à 3,71 milliards d'euros, (+ 1,26 %). Le FCTVA étant versé automatiquement sur présentation des pièces justificatives, le montant total de la dotation ouverte en 2004 pourrait toutefois être supérieur à cette prévision.

Le prélèvement au titre des amendes forfaitaires de la police de la circulation serait, en 2004, de 430 millions d'euros, en hausse de 16,85% par rapport au montant des crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2003.

Les subventions de fonctionnement de divers ministères s'inscrivent en baisse de 6,7 %, pour s'établir à 685 millions d'euros, tandis que leurs subventions d'équipement s'élèveraient, en 2004, à 1.159 millions d'euros, en baisse de 7,54 %.

Près de 62 % des dotations dites passives sont composées des compensations d'exonérations et des dégrèvements législatifs. Plus précisément, ces dotations se composent de la compensation au titre de la réduction pour création d'entreprise (ancienne REI), des compensations de diverses exonérations relatives à la fiscalité locale et de la contrepartie de divers dégrèvements législatifs. En 2004, les compensations d'exonérations et les contreparties de dégrèvements législatifs se monteraient à 9,9 milliards d'euros.

Cette politique massive de compensation des exonérations de fiscalité locale et de dégrèvements législatifs n'est pas sans conséquence pour les collectivités territoriales. En 2002, elles ont ainsi perçu 66,8 milliards d'euros au titre du produit de la fiscalité directe locale, dont 12,4 milliards d'euros de compensations versées par l'État et 54,4 milliards d'euros de produit fiscal. Au sein de cette somme, 9,9 milliards d'euros n'ont pas été acquittés par les contribuables locaux, mais pris en charge par l'État au titre des dégrèvements. Au total, en 2002, sur une recette de 66,8 milliards d'euros, 44,5 milliards d'euros (66 %) ont été versés par le contribuable local et 22,3 milliards d'euros ont été versés par l'État, qui contribue donc à hauteur de 33 % au produit de la fiscalité directe locale.

Abordant la mise en œuvre de la loi organique relative aux finances publiques (LOLF) du 1er août 2001, le Rapporteur spécial a indiqué que les crédits regroupés dans l'agrégat 21 du ministère de l'intérieur avaient vocation à relever d'une mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Cette mission, d'un montant de 2,5 milliards d'euros, comporterait deux programmes :

- un premier programme de 2 milliards d'euros regrouperait les dotations d'équipement alloués aux départements et aux régions, ainsi que la DGD ;

- un second programme, plus hétéroclite, permettrait d'appréhender « la politique de soutien aux projets des collectivités territoriales », les fonds structurels européens et les dépenses de fonctionnement de la direction générale des collectivités locales (DGCL) du ministère de l'Intérieur.

Cette mission ne permet cependant d'appréhender que moins de 5 % des concours alloués aux collectivités territoriales, en raison du poids des prélèvements sur recettes.

En 2004, ceux-ci représenteront 76 % de l'effort financier consacré par l'État aux collectivités territoriales. Or, la nomenclature budgétaire sous forme de mission et de programme n'a pas vocation à s'appliquer aux prélèvements sur recettes, mais aux seules « charges budgétaires de l'État ». Le Rapporteur spécial a donc évoqué l'idée d'une structuration des prélèvements sur recettes selon une logique d'objectifs, dans le cadre d'un « jaune budgétaire » consacré à l'effort financier de l'État en faveur des collectivités territoriales.

M. Michel Bouvard s'est inscrit en faux à l'encontre de la prétendue priorité donnée par le Gouvernement à la péréquation. Pour mettre en place une véritable péréquation, il faut tenir compte des charges pesant sur les collectivités locales, et non pas simplement de leur richesse, via le critère du potentiel fiscal. Il est clair, à cet égard, que les critères de répartition de la DGF pénalisent les départements ruraux, ces derniers étant appelés à supporter des charges importantes. Cela est particulièrement le cas pour les départements du Massif alpin. S'agissant des marges de manœuvre financières dégagées par le Gouvernement en matière de péréquation via le différentiel d'indexation entre le taux d'évolution de la DGF et celui de la dotation forfaitaire de chaque niveau de collectivité territoriale, il conviendra de prêter une attention particulière aux décisions du Comité des finances locales et le Parlement devra être soucieux de ne pas trop déléguer de ses compétences à ce comité.

Évoquant la mise en œuvre de la loi organique, M. Michel Bouvard a indiqué que, pour des raisons de lisibilité, il serait sans doute préférable de scinder les programmes de la mission relative aux relations avec les collectivités territoriales entre, d'une part, un premier programme consacré aux dotations de fonctionnement, et d'autre part, un second programme dédié aux projets d'investissement.

M. Jean-Louis Dumont a fait valoir que le souci de simplification qui guide la réforme de la DGF en 2004 n'implique pas automatiquement l'amélioration de l'efficacité économique de cette dotation. Il conviendra donc de veiller à ce que cette réforme ne se traduise pas par des pertes en ligne.

Selon des informations qui lui ont été transmises, la DGF pour 2004 ne serait pas en augmentation de 1,93 % mais, du fait des modalités de versement de la régularisation de la DGF pour 2002, s'inscrirait en baisse de 0,8 %. M. Jean-Louis Borloo, Ministre délégué à la Ville, ayant évoqué une modification des critères d'attribution de la DSU, on doit être perplexe face à cette annonce. La DSU serait en hausse de 1,5 % en 2004. Mais, si ces critères sont modifiés, qu'adviendra-t-il réellement de cette dotation pour les petites communes, dont la situation budgétaire est d'ores et déjà compromise par l'évolution de la fiscalité locale ? La DSR doit baisser en 2004 de 3,7 %. Certes, les dotations de péréquation communale feront l'objet d'un abondement de la part de l'État, mais le caractère exceptionnel de cet abondement indique, à lui seul, que cette mesure n'est pas appelée à être renouvelée.

La complexité induite par la multiplicité des lois adoptées en matière d'intercommunalité rend illisibles les modalités de calcul de la DGF octroyée à chaque groupement : est-on réellement sûr que chaque EPCI touche effectivement les sommes auquel il a droit ?

De manière plus générale, M. Jean-Louis Dumont s'est enfin inquiété du tassement observé quant à l'évolution des concours de l'État aux collectivités territoriales, qui ne répondent pas aux besoins.

M. Denis Merville s'est félicité de la reconduction en 2004 du contrat de croissance et de solidarité selon des modalités d'indexation identiques à celles retenues en 2003, et ce dans un contexte budgétaire difficile. Il s'est également réjoui de l'effort de simplification des dotations de l'Etat aux collectivités territoriales. On ne peut nier que l'essor de l'intercommunalité, compte tenu de la structure de la DGF, ait pénalisé les dotations de péréquation communale. Par ailleurs, il est indéniable que la constitution de groupements à fiscalité propre a pu déboucher sur une hausse de la fiscalité locale. Les communes sont donc sur un plan budgétaire, doublement pénalisées, alors que, du fait notamment de la mise en œuvre des 35 heures ou des emplois jeunes, elles ont eu à supporter des charges importantes.

Le Gouvernement doit s'attaquer réellement à une réforme de la fiscalité locale. Du fait de l'absence de révision des bases locatives, les contribuables peuvent être surimposés et les inégalités observées sur le terrain se révèlent parfois particulièrement fortes. Il convient donc de sensibiliser le Gouvernement à cette question, afin que des mesures soient proposées.

M. Marc Le Fur a souhaité obtenir des précisions sur l'idée, défendue l'an passé par le Rapporteur spécial, d'une régionalisation de la DGF. Cette proposition a-t-elle recueilli un accueil favorable ? Il serait, à cet égard, particulièrement intéressant de disposer d'une carte précisant, pour chaque région, le montant moyen de DGF. La région des Côtes d'Armor représente 1 % de la population française : touche-t-elle 1 % du montant de la DGF ouverte chaque année ?

Les sapeurs pompiers volontaires sont souvent également des employés communaux, si bien que les communes qui y ont recours supportent des charges de fonctionnement élevées. Les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) étant désormais pilotés par les départements, les charges supportées par ces communes sont difficilement justifiables. Ne serait-il pas envisageable de modifier les critères d'attribution de la DGF, afin de compenser aux communes concernées les coûts induits par le recours à des sapeurs pompiers volontaires ?

Le Président Pierre Méhaignerie a fait valoir, s'agissant des communes employant des sapeurs pompiers volontaires, que celles-ci bénéficiaient en contrepartie d'un allégement de la taxe versée au SDIS. La relance de la décentralisation risque de déboucher sur un débat concernant la fiscalité locale, qui servirait ainsi de bouc émissaire. Compte tenu de l'importance des compensations des exonérations de fiscalité locale et des contreparties de dégrèvements législatifs, l'État en arrive, dans certaines situations, à prendre en charge jusqu'à 40% de la cotisation de taxe d'habitation payée par le contribuable. L'opinion publique ne se rend donc pas nécessairement compte du poids réel de la fiscalité locale.

La révision constitutionnelle du 28 mars 2003 a consacré les principes de subsidiarité et de péréquation. Le principe de subsidiarité doit conduire à s'interroger sur les relations entre les communes et les groupements. Il convient à cet égard de rappeler que l'essor de l'intercommunalité a pu être le résultat d'une volonté délibérée de transférer, de manière quelque peu fictive, des compétences aux groupements, afin de gonfler le coefficient d'intégration fiscale (CIF) et d'accroître ainsi la DGF perçue. Cette politique est désormais contraire au principe de subsidiarité et il conviendrait donc de s'interroger sur l'avenir du CIF.

Le principe de péréquation appelle, quant à lui, de nouveaux moyens budgétaires. Cette question devra être traitée en 2004. Selon le Sénateur Yves Fréville, des marges de manœuvre financières considérables, de l'ordre de 3 à 4 milliards d'euros, pourraient être dégagées à partir des communes dont le revenu par habitant et le potentiel fiscal sont supérieurs à la moyenne nationale et qui bénéficient de dégrèvements de taxe d'habitation importants. Il conviendra également de modifier les critères d'attribution des dotations de péréquation, en prenant en compte non seulement le critère du potentiel fiscal mais également celui du revenu par habitant. Le recensement de population de 1999 permet à cet égard de disposer d'informations fiables. Il serait tout à fait pertinent d'allouer les dotations de péréquation en tenant compte pour moitié du potentiel fiscal et pour moitié du revenu par habitant.

La question de l'affectation aux communes de moins de 20.000 habitants du produit des contraventions relevées par les agents de la police municipale mérite d'être posée. Dès lors que ces communes ont accepté de ne plus avoir de police nationale sur leur territoire et de mettre en place une police municipale chargée de relever les contraventions, il semble légitime que ces communes en perçoivent, en retour, le produit, et ce d'autant plus que les préfectures ont tendance à se décharger des problèmes administratifs liés à la gestion de ces amendes. Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2004, le produit des contraventions qui ne sont pas acquittées spontanément et dont le produit est définitivement acquis à l'État serait en augmentation de 20 %. Ne serait-il pas envisageable d'affecter la moitié de cette hausse aux communes qui, par le biais de leur police municipale, dressent les conventions ?

En réponse à ces interventions, M. Marc Laffineur, Rapporteur spécial, a apporté les précisions suivantes :

- la simplification de la DGF en 2004 devrait déboucher sur une réforme de plus large ampleur visant à remettre en cause les critères d'attribution de la DGF. A cette fin, un groupe de travail est d'ores et déjà constitué au sein du Comité des finances locales pour mener une réflexion approfondie sur les critères pertinents d'attribution. Aucun des critères actuels d'attribution de la DGF ne sera à l'abri d'une remise en cause ;

- le potentiel fiscal reste sans doute pertinent pour l'ensemble des collectivités territoriales, à l'exception toutefois des petites communes rurales, dont la fiscalité repose essentiellement sur la taxe foncière sur les propriétés non bâties. La baisse de la population de ces petites communes rurales se traduit automatiquement par une hausse, toutes choses égales par ailleurs, de leur potentiel fiscal, ce qui les pénalise dans l'attribution de la DGF ;

- le critère du CIF a indéniablement perdu de sa pertinence. Il a pu être utile dans le passé pour favoriser l'essor de l'intercommunalité, mais il convient désormais de réfléchir à sa remise en cause. Si le Gouvernement envisageait un blocage du CIF sur cinq ans, en revanche, il ne semble guère favorable à la prise en compte du revenu par habitant comme critère d'attribution de la DGF ;

- les remarques de M. Jean-Louis Dumont concernant la simplification de la DGF semblent contradictoires : on ne peut à la fois se méfier de la simplification de la DGF, au motif que cette simplification pourrait se traduire par des pertes en ligne, et appeler de ses vœux une simplification, qui serait indispensable pour évaluer la DGF versée à l'intercommunalité ;

- la complexité des modalités d'attribution de la DGF fait aujourd'hui l'unanimité contre elle : cette complexité est telle que les modalités de calcul de la DGF sont désormais impossibles à contrôler et que les erreurs dans les attributions individuelles ne sont pas rares. La simplification de la DGF est donc désormais indispensable ;

- la pratique des abondements exceptionnels en faveur des dotations de péréquation communale est traditionnelle et le Gouvernement n'envisage pas de la remettre en cause si ces abondements se révèlent nécessaires pour préserver les dotations de péréquation communale ;

- il est impératif d'introduire une régionalisation de la DGF pour mettre en œuvre une véritable politique de péréquation. Cette régionalisation ne doit pas s'entendre comme la détermination par la région des dotations de péréquation. Elle signifie au contraire qu'il conviendrait de mettre en place des comités de finances locaux régionaux, avec en son sein des représentants des régions, des départements et des communes, chargés de répartir, selon les critères les plus pertinents à la région, les dotations de péréquation. Le Ministre délégué aux libertés locales, M. Patrick Devedjian, semblait avoir repris à son compte cette proposition, à laquelle le Comité des finances locales s'est fermement opposé ;

- il est indéniable que l'essor de l'intercommunalité, qui induit souvent une hausse de la dépense publique, a pu déboucher sur une augmentation de la fiscalité locale. La loi de solidarité et de renouvellement urbains (SRU), ainsi que la législation relative aux plans locaux d'urbanisme, ont également, du fait de leur complexité, favorisé l'accroissement de la dépense publique au niveau intercommunal ;

- des réformes doivent être mises en œuvre s'agissant de la fiscalité locale. Le Gouvernement mène actuellement une réflexion sur le plafonnement des dégrèvements législatifs, afin de responsabiliser les communes dans la conduite de leur politique fiscale ;

- le produit des contraventions relevées par les agents de la police municipale peut avoir vocation à être perçu directement par la commune, comme le Rapporteur spécial l'avait proposé dans le cadre d'un amendement présenté lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2003. Le Gouvernement avait à l'époque fait valoir que les communes concernées seraient financièrement perdantes : ces communes perçoivent actuellement le produit des contraventions acquittées spontanément lorsqu'elles sont émises par la police nationale et la gendarmerie nationale. L'État pourrait être fondé à mettre fin à ce paiement en contrepartie du versement aux communes concernées de l'intégralité des contraventions relevées par les agents de la police municipale. Par ailleurs, l'affectation aux communes du produit de ces contraventions se heurterait à une difficulté technique, à savoir le fait qu'il serait impossible de distinguer les amendes selon le lieu où elles sont recouvrées. Compte tenu de ces arguments, le Rapporteur spécial avait à l'époque retiré son amendement, même si, sur le fonds, il reste convaincu de la pertinence de cette proposition ;

- s'agissant des enquêtes susceptibles d'être demandées à la Cour des comptes, les effets redistributifs des dotations de l'État aux communes, les coûts et gains de l'intercommunalité, ainsi que la gestion du prélèvement de 0,4 % sur le produit des impôts locaux au titre des frais d'assiette et de recouvrement pourraient être évoqués.

La Commission a adopté, sur la proposition du Rapporteur spécial, les crédits des collectivités territoriales.

*

* *

La commission a enfin abordé l'examen, sur le rapport de M. Jean-Michel Fourgous, Rapporteur spécial, des crédits de la formation professionnelle.

M. Jean-Michel Fourgous, Rapporteur spécial, a tout d'abord noté que le projet de budget s'inscrit dans un contexte particulier, dans la mesure où les partenaires sociaux viennent de signer un accord historique qui renforce le droit à la formation tout au long de la vie et réforme en profondeur la formation professionnelle. De son côté, le Gouvernement présentera prochainement au Parlement un projet de loi qui permettra d'achever le processus de décentralisation.

Il faut se féliciter de ce que le Gouvernement a mis en place une politique volontariste en faveur de l'emploi et de la formation professionnelle, enjeu économique et social majeur. Ce sont les actions de formations qui garantissent aux salariés leur employabilité, ce qui permet aux entreprises de faire face aux difficultés d'aujourd'hui comme à la conquête des marchés de demain. Il convient de saluer à cet égard la réorientation de la politique publique de formation vers le secteur marchand. Ainsi, la part du budget consacrée à l'insertion professionnelle dans le secteur productif, qui était de 51 % en 2001, s'élève cette année à 66 %. Le seul véritable emploi est celui qui est créé par le marché. L'emploi marchand est durable car il correspond à un besoin ; il est ainsi de nature à assurer la promotion sociale. Il ne coûte pas mais au contraire il rapporte à l'État qui perçoit des cotisations sociales et équilibre ainsi les comptes de la Nation.

Le budget de la formation professionnelle est équilibré et réaliste. L'ensemble des crédits consacrés aux actions de formation professionnelle représente un total de 4.978 millions d'euros. La baisse des crédits de 3,5 % s'explique en particulier par la réduction du nombre des entrées en stage pour les chômeurs de longue durée proposée pour 2004, par une diminution des entrées attendues en 2003 dans certains dispositifs comme les contrats d'apprentissage, de qualification jeune ou de qualification adulte, compte tenu du contexte économique, et par le transfert de certains crédits de rémunération vers les ministères gestionnaires.

Les crédits mobilisés en faveur de la formation professionnelle (hors dépenses en capital) se répartissent sur quatre chapitres budgétaires. Deux chapitres sont regroupés dans l'agrégat 2 relatif à la « Formation professionnelle » : il s'agit du chapitre 43-70 qui regroupe l'ensemble des dépenses de primes, de compensations d'exonérations de charges, de rémunérations et d'aides au fonctionnement des dispositifs ; et du chapitre 43-06 relatif aux dotations de décentralisation. A ces crédits, il convient d'ajouter ceux inscrits sur le chapitre 43-71, principalement constitués de la subvention de fonctionnement à l'Association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), et pour partie, sur le chapitre 44-70 qui comprend notamment les stages de formation au profit des chômeurs de longue durée, le financement du réseau d'accueil des jeunes et celui du programme TRACE (trajet d'accès à l'emploi). Les crédits mobilisés dans le cadre de l'agrégat 2 s'élèveront à 3.880,7 millions d'euros en 2004, soit une légère diminution par rapport à 2003 (3.932 millions d'euros). Toutefois, à structure constante, l'effort global en faveur de la formation professionnelle reste soutenu en 2004.

Le projet de loi relatif à la décentralisation élargit la responsabilité des régions à l'ensemble des publics. Le transfert de compétences concernera notamment l'AFPA, mais également les aides à l'embauche et à la formation des apprentis ainsi que l'orientation des jeunes via les missions locales et les permanences accueil information orientation (PAIO).

Parmi les priorités du budget de la formation professionnelle, il faut citer la mise en œuvre de la validation des acquis de l'expérience (VAE) : le projet de loi de finances pour 2004 prévoit ainsi l'inscription de 4 millions d'euros de mesures nouvelles. En outre, les entrées dans les dispositifs de formations en alternance sont maintenues à un haut niveau. Il assure ainsi les financements nécessaires pour 235.000 entrées en contrats d'apprentissage, 125.000 entrées en contrats de qualification jeunes et 13.000 entrées en contrats de qualification adultes. Au total, l'augmentation du nombre des contrats est de 10 % ce qui constitue un taux de progression significatif, qui marque la priorité donnée à l'alternance.

La négociation avec les partenaires sociaux a abouti à un accord, ratifié à l'unanimité, qui réforme en profondeur le système actuel. Il répond en particulier à un constat largement partagé : l'inégalité d'accès des salariés aux actions de formation professionnelle et le défaut de lisibilité des différents dispositifs. Les principales innovations de l'accord consistent dans la reconnaissance effective d'un droit individuel à la formation, la mise en place du contrat de professionnalisation, qui aurait vocation à regrouper les contrats de qualification, d'adaptation et d'orientation.

L'élaboration de diagnostics et d'analyses prospectives sur l'évolution des métiers et des marchés est très souhaitable. La formation doit devenir un outil stratégique en faveur de l'emploi et de la croissance. En cela, le lien entre la dynamique sociale et la croissance économique doit encore être renforcée. Les politiques de formation devraient être appréhendées en fonction de stratégies à trois ou cinq ans en direction des secteurs porteurs. Une formation professionnelle efficace doit être axée sur les poches de croissance. Il est donc nécessaire d'évaluer les pôles nationaux d'excellence et d'orienter les efforts vers les marchés de demain.

A cet égard, il serait utile, non pas de créer un observatoire de plus, mais de financer une étude qui permettrait d'identifier ce qui constitue le PIB français ainsi que les secteurs où la France est la plus reconnue, et ce, afin d'appuyer la démarche prévisionnelle et prospective des emplois et des compétences au niveau des branches et des entreprises. Il semblerait également opportun de s'inspirer de réussites étrangères, comme celle de la Grande-Bretagne qui définit sa politique en matière de formation à partir d'objectifs d'employabilité déclinés, pour chacun d'entre eux, en termes d'actions précises et opérationnelles. De la même manière, un effort conséquent devrait être accompli en matière d'ingénierie pédagogique, afin d'aider les acteurs de la formation à adapter leur offre aux évolutions des marchés. Il faut à cet égard saluer les efforts réalisés dans ce domaine par l'AFPA en collaboration avec les fédérations professionnelles.

Les crédits du chapitre 43-70 « Financement de la formation professionnelle » sont en diminution de 19 %. Ils passent de 2.571 millions d'euros en 2003 à 2.072 millions d'euros en 2004. L'évolution du projet de budget pour 2004 traduit la réalité économique ; la diminution de certains contrats est en effet due à un contexte économique de ralentissement. Néanmoins, à structure constante (et compte tenu du transfert aux régions de la gestion des primes d'apprentissage et des réformes intervenant en 2004 pour les exonérations de charges), les crédits consacrés à la formation en alternance sont maintenus à un niveau quasi équivalent à celui de 2003.

Les crédits consacrés aux actions de formation à la charge de l'État progressent sensiblement en 2004 (+ 5,8 %) afin de financer la revalorisation de la rémunération des stagiaires, la montée en charge du nombre d'allocataires de l'allocation de fin de formation ainsi que la mise en œuvre de prestations d'accompagnement des publics et de validation des acquis de l'expérience sur les territoires touchés par les plans sociaux.

Les crédits du chapitre 43-06 sont en hausse de près de 31 %. Ils passent de 1.389 millions d'euros en 2003 à 1.826 millions d'euros. Ceux demandés pour le chapitre 43-71 « Formation professionnelle des adultes » diminuent de 0,2 % et passent de 722,85 millions d'euros à 721,30 millions d'euros.

S'agissant de l'AFPA, la subvention de fonctionnement passe de 714,98 millions d'euros en 2003 à 712,94 millions d'euros en 2004. Cette diminution s'explique principalement par une modification du périmètre de la subvention : les crédits relatifs à la rémunération du personnel mis à disposition des services centraux et déconcentrés du ministère par l'AFPA (2,061 millions d'euros) seront désormais inscrits sur les chapitres de rémunération du Ministère des affaires sociales en 2004.

Il convient de souligner les efforts réalisés par l'AFPA en termes de gestion et d'organisation. Cette année constitue une année charnière avec la décentralisation qui permettra à l'Association de se recentrer sur son cœur de métier et d'engager les dispositions nécessaires à son entrée sur le marché concurrentiel. En 2002, on a dénombré 143.222 entrées en formation dont 99.382 concernent les demandeurs d'emploi ; 62 millions d'heures de formation ont été réalisées. D'après les enquêtes de l'Association, 79,1 % des bénéficiaires auraient trouvé un emploi au cours des six mois suivant leur formation.

M. Jean-Louis Dumont a souligné le caractère indispensable des crédits de formation professionnelle, compte tenu de la crise de l'emploi qui frappe notre pays. Ils sont essentiels pour favoriser la mobilité. Les passerelles entre les services de formation comme l'Éducation nationale, les centres de formation pour adultes et les autres organismes de formation professionnelle sont sans doute insuffisantes, mais il ne faut pas caricaturer leur rôle. Ces services se rencontrent beaucoup plus sur le terrain qu'il n'a été dit.

Les crédits sont sans doute insuffisants, mais l'action des régions est très complémentaire de celle de l'État, lequel doit être le garant de l'équité dans l'accès à la formation promotionnelle sur l'ensemble du territoire. Les régions sont un lieu de cohérence et d'ambitions partagées tout à fait essentiel.

Beaucoup est attendu de la validation des acquis et des expériences. Le retard de la France en la matière doit être rapidement comblé.

M. Michel Bouvard a estimé nécessaire de mesurer le taux de consommation des crédits du Fonds social européen en matière de formation professionnelle.

Le Président Pierre Méhaignerie a demandé quels étaient les organismes reconnus pour la validation des expériences professionnelles et l'état de préparation de l'entrée en vigueur de la loi organique dans le champ de la formation professionnelle.

M. Jean-Michel Fourgous, Rapporteur spécial, a apporté les éléments de réponse suivants :

- l'effort est à juste titre porté sur les populations les plus fragiles. L'AFPA forme ainsi, essentiellement, des demandeurs d'emploi ;

- il faut sans doute aller plus vite en matière de validation des acquis de l'expérience. Mais on doit malheureusement constater des différences culturelles d'approche entre le monde de l'Éducation nationale et celui de l'entreprise ;

- s'agissant de la mise en œuvre de la loi organique, rien n'est définitivement arrêté. Néanmoins, cinq programmes semblent actuellement envisagées au ministère de l'Emploi ; aucun ne concerne spécifiquement et exclusivement la formation professionnelle ; les crédits correspondants feront l'objet d'une ventilation entre différentes actions de plusieurs programmes ;

- il serait utile que la Cour des comptes procède à des études sur le rôle des missions locales et des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA), sur l'efficacité des dispositifs de formation professionnelle et sur les mises à disposition d'agents publics dans le secteur de la formation professionnelle.

M. Jean-Louis Dumont a estimé que la reconnaissance des équivalences de diplômes soulevait les mêmes difficultés que celles pouvant surgir s'agissant de la validation des acquis de l'expérience.

Le Président Pierre Méhaignerie a souligné les obstacles rencontrés par la deuxième génération issue de l'immigration pour l'obtention de stages en alternance dans les entreprises. Les jeunes des banlieues rencontrent de réelles difficultés pour obtenir des contrats de qualification ou d'apprentissage. Cette question mériterait certainement d'être approfondie.

La Commission a ensuite adopté, conformément à l'avis du Rapporteur spécial, les crédits de la formation professionnelle.

--____--


© Assemblée nationale