COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 44

(Application de l'article 46 du Règlement)

Jeudi 26 février 2004
(Séance de 11 heures 30)

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président

SOMMAIRE

 

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- Examen de la proposition de résolution (n° 1102) de M.  Gilbert Gantier, tendant à la création d'une commission d'enquête sur le fonctionnement du Consortium de réalisation (CDR), société anonyme constituée en vue de céder les actifs du Crédit lyonnais après sa défaisance, et sur les « risques » nouveaux et importants que cet organisme aurait transférés à l'Établissement public de financement et de restructuration (EPFR) (M. François Goulard, Rapporteur) et de la proposition de résolution (n° 1281) de MM.  Éric Besson et plusieurs de ses collègues, tendant à la création d'une commission d'enquête visant à analyser les conditions des négociations menées par le Gouvernement dans le cadre de l'affaire dite « Executive Life » et à apprécier les risques, notamment financiers, pris dans ce cadre par le Gouvernement (M. François Goulard, Rapporteur).......................................................................

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En préalable, M. Augustin Bonrepaux a souhaité qu'une information soit apportée par la commission des Finances sur la mise en œuvre des contrats de plan et l'utilisation des fonds structurels européens. Le Rapporteur spécial des crédits européens a examiné la situation dans un certain nombre de régions. Cette situation apparaît très dégradée, dans la région Midi-Pyrénées comme dans d'autres : souvent, des fonds européens sont utilisés en déduction de la part de financement à laquelle l'État s'est engagé, ce qui aboutit à un détournement des fonds de l'Union européenne et à la diminution des crédits nationaux appelés à intervenir. Une telle situation suscite une grande inquiétude quant à la réalisation des projets prévus. Les questions posées à M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la Fonction publique, de la réforme de l'État et de l'aménagement du territoire restent sans réponse. Les collectivités locales ont été incitées à souscrire des contrats de pays ; mais quelle en sera l'effectivité si la politique d'aménagement du territoire est remise en cause par de tels détournements ? En conséquence, la création d'une mission d'information devrait intervenir le plus rapidement possible.

Par ailleurs, la loi organique qui doit être prise en application de l'article 72-2 de la Constitution devra être examinée par la Commission. Cependant, ainsi que l'a relevé le Rapporteur pour avis Laurent Hénart, l'harmonisation des dispositions de la Constitution et celles de la loi organique n'est pas totale. Le Président peut-il obtenir que la commission des Finances examine au fond cette question ? A défaut, une commission spéciale devrait être constituée.

Le Président Pierre Méhaignerie a souhaité que M. Jean-Louis Dumont présente un rapport d'information sur la mise en œuvre des fonds structurels européens en France avant que soit envisagée la création d'une éventuelle mission d'information.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a précisé que la commission des Lois est, en vertu du Règlement, saisie au fond de l'examen de la loi organique. Le délai permettant la création d'une commission spéciale ayant expiré aujourd'hui, les modalités d'un examen par les deux commissions ont été évoquées avec le Président Pascal Clément. La commission des Finances devra se saisir de la totalité du projet de loi organique, lequel ne comporte que peu d'articles. La réforme de la Constitution intervenue en 2003 est explicite sur le principe, et il eût été préférable que l'opposition fasse preuve de la même sollicitude envers les finances locales lorsque, pendant la précédente législature, elle a supprimé la part salaires de la taxe professionnelle, la part régionale de la taxe d'habitation, une bonne partie des droits de mutation ainsi que la vignette, pour les remplacer par des dotations, sans qu'aucune concertation n'ait alors lieu. Les collectivités locales ont alors été placées dans une dépendance accrue vis-à-vis de l'État. Aussi la polémique est-elle ici déplacée. Le principe constitutionnel a été voté, et la loi organique le déclinera, le cadre constitutionnel de l'autonomie financière étant tout à fait précis. L'examen du projet de loi organique est prévu pour la deuxième semaine d'avril.

M. Didier Migaud a souhaité qu'une mission d'information se mette en place sans tarder s'agissant des contrats de plan. Deux questions se posent en effet. La première est l'utilisation, non conforme à la destination initiale, des fonds européens, la deuxième est le non-respect par l'État de ses engagements dans le cadre des contrats de plan. Au-delà des travaux des rapporteurs spéciaux, la mise en place d'une mission d'information ne doit pas être à nouveau reportée. Le contenu du rapport de M.  Jean-Louis Dumont est d'ailleurs largement connu d'avance, car les défauts de la mise en œuvre de cette politique sont régulièrement dénoncés sur le terrain, y compris par les élus de l'actuelle majorité.

Il est effectivement dommage de devoir examiner la loi ordinaire avant d'avoir procédé à l'examen de la loi organique, contrairement à ce qui avait été dit auparavant. C'est ainsi que l'on abordera la question de la responsabilité avant celle des ressources et des garanties de ressources. Il eût été préférable d'examiner conjointement compétences et ressources.

Malgré le retard pris au départ, la commission des Finances doit être pleinement associée à l'examen de la loi organique. Elle aurait dû être saisie au fond. Dans ce texte, l'aspect financier l'emporte sur l'aspect relatif aux collectivités locales, ce dont atteste d'ailleurs le dépôt du projet à l'Assemblée nationale en première lecture, et non au Sénat. La constitution d'une commission spéciale aurait été une bonne solution ; à présent, il importe que la commission des Finances soit particulièrement active, à même d'exprimer son avis sur l'ensemble des articles, et il lui appartiendra de piloter ce débat.

Le Président Pierre Méhaignerie a estimé que la Commission devrait entendre les rapports de MM. Jean-Louis Dumont et Louis Giscard d'Estaing sur les fonds européens et les contrats de plan avant de déterminer des modalités ultérieures de travail. Sur la question de la loi organique, il a souligné que les garanties de ressources sont prévues dans le projet actuellement débattu. Les deux commissions ayant une vocation identique à intervenir sur la loi organique, la commission des Finances remplira sa mission et c'est la qualité de son rapport qui importera. Le Président de la commission des Lois s'est engagé à accorder la même importance aux conclusions du rapport pour avis de la commission des Finances qu'au rapport au fond de la commission des Lois.

Le Président Pierre Méhaignerie a ensuite proposé à la Commission d'auditionner M. Gilles de Robien, ministre de l'Équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, sur les crédits de son ministère, considérant que des efforts de gestion ont été faits, dont le Parlement ne doit pas se désintéresser. Devrait être également auditionné le directeur de l'Agence française des participations qui vient d'être mise en place afin de gérer l'ensemble des participations de l'État actionnaire. Enfin, l'audition de M. Alain Lambert est reportée, peut-être à la suite de la présentation des propositions sur la maquette budgétaire.

Puis conformément à la position prise lors de sa séance du 20 janvier 2004, la Commission a poursuivi, sur le rapport de M. François Goulard, Rapporteur, l'examen de la proposition de résolution (n° 1102) de M.  Gilbert Gantier, tendant à la création d'une commission d'enquête sur le fonctionnement du Consortium de réalisation (CDR), société anonyme constituée en vue de céder les actifs du Crédit lyonnais après sa défaisance, et sur les « risques » nouveaux et importants que cet organisme aurait transférés à l'Établissement public de financement et de restructuration (EPFR) et de la proposition de résolution (n° 1281) de MM.  Éric Besson et plusieurs de ses collègues, tendant à la création d'une commission d'enquête visant à analyser les conditions des négociations menées par le Gouvernement dans le cadre de l'affaire dite « Executive Life » et à apprécier les risques, notamment financiers, pris dans ce cadre par le Gouvernement.

Le Président Pierre Méhaignerie a rappelé que la Commission, lors de la précédente réunion consacrée à ces propositions, avait oscillé entre deux positions : l'exigence absolue de transparence d'un côté, et, de l'autre côté, le souci d'éviter de soulever des difficultés supplémentaires dans ce dossier.

M. François Goulard, Rapporteur, a brièvement rappelé les développements de l'affaire « Executive Life ». La justice américaine a considéré qu'un dispositif de portage frauduleux avait été mis en place. Ce dispositif aurait permis le rachat tant de la compagnie d'assurance que de son portefeuille de « junk bonds ». D'intenses négociations se sont déroulées avec les parties françaises en 2003. L'accord négocié le 2 septembre dernier par le Gouvernement français pour le compte du CDR n'a pas abouti dans la mesure où il n'apparaissait pas de nature à garantir la sécurité juridique et la protection des intérêts de l'État. En définitive, une transaction sur le volet pénal de cette affaire a pu être obtenue début décembre 2003. Cet accord a été entériné fin janvier par un juge fédéral, ce qui permet de revêtir la transaction de l'autorité de la chose jugée. Par cet accord, qui met un terme aux poursuites pénales, les parties françaises acceptent de payer 770 millions de dollars sous forme d'amendes et de provisions pour le civil, dont 475 millions de dollars à la charge de l'État et une amende de 100 millions de dollars pour le Crédit lyonnais. Sur les 475 millions de dollars, 100 millions de dollars sont versés au titre de l'amende de la Federal Reserve et 375 millions de dollars constituent un à-valoir sur l'issue des procédures civiles. Les auditions sur le volet civil de l'affaire viennent de débuter et se poursuivront jusqu'au 28 juin 2004. En juillet, sera procédé à l'échange des rapports d'experts. Le procès civil lui-même devrait se dérouler vers le 15 février 2005, si aucun incident de procédure ne perturbe ce calendrier prévisionnel. En parallèle, une procédure de médiation a été confiée à M. Green, l'exposé des différentes parties étant prévu les 31 mars et 1er avril 2004.

L'impact de la création éventuelle d'une commission d'enquête sur l'instruction des différentes procédures judiciaires est une question fondamentale. Sur le plan pénal, si la transaction définitive revêt bien l'autorité de la chose jugée, le parquet américain n'a pas renoncé à l'exercice de toute action publique pour l'avenir, au cas où des informations, des documents ou des témoignages nouveaux, c'est-à-dire postérieurs au 1er décembre 2003, devaient être connus. Ainsi, un témoignage devant une commission d'enquête pourrait parfaitement être considéré comme un fait « nouveau » permettant l'ouverture d'une nouvelle action pénale. Ce risque, qui devrait s'estomper avec le temps, reste très fort aujourd'hui. De nombreuses personnes sont encore à l'affût de toute information. S'agissant du volet civil de l'affaire, il ne faut pas écarter l'hypothèse que ces mêmes éléments « nouveaux » soient utilisés dans la procédure. Certes, les travaux d'une commission d'enquête peuvent conserver une grande confidentialité, mais des fuites sont toujours possibles. Le fait même d'entendre tel ou tel protagoniste serait impossible à tenir secret. Surtout, un rapport parlementaire comporterait nécessairement des éléments précis sur cette affaire et il ne saurait être question de prendre des risques inconsidérés. Le principe de précaution doit prévaloir.

Enfin, l'existence de procédures judiciaires en France sur la question centrale du portage ne doit pas être oubliée. Si l'obstacle que constituent ces procédures sur la possibilité de créer une commission d'enquête pourrait être contourné, le vrai problème demeure celui de la répercussion possible sur les procédures américaines. Afin d'avoir une vision d'ensemble sur cette affaire complexe, il est préférable d'attendre son dénouement judiciaire civil afin que toutes les conséquences financières en soient précisément connues. Bien que le sujet soit difficile et d'une grande complexité technique, il y a suffisamment de zones d'ombre dans ce dossier pour justifier pleinement la création d'une commission d'enquête, dans quelques mois, et faire toute la lumière sur l'affaire, y compris sur les conditions initiales et les faits remontant au début des années 1990. A ce titre, il est symptomatique que la proposition de résolution de M. Éric Besson et de ses collègues du groupe socialiste porte sur les conditions de négociations du Gouvernement actuel et ne remonte pas aux origines de l'affaire, c'est-à-dire à la gestion plus que critiquable du Crédit lyonnais à cette époque.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a approuvé totalement les conclusions du Rapporteur. Il a indiqué qu'il s'est reporté l'audition de M. Jean-François Hénin, effectuée dans le cadre de la commission d'enquête sur le Crédit lyonnais, le 15 juin 1994. Ce dernier a alors expliqué qu'il avait procédé en 1991 au rachat, conformément à la position du président de la banque, M. Jean-Yves Haberer, d'un portefeuille de mauvaises obligations détenues par la compagnie Executive Life. La banque est alors une banque publique, avec un conseil d'administration, et elle engage cette opération américaine appuyée par le ministre des Finances de l'époque. Cette opération sur le portefeuille d'obligations proprement dit est même couronnée en 1991 « meilleure opération financière de l'année » par un jury américain. Selon M. Hénin, il y avait de très gros risques s'agissant du portefeuille d'obligations : si ces obligations devaient être transformées en participations à la faveur de la réussite de l'opération, il aurait convenu de faire très attention à la législation américaine limitant strictement les possibilités de détention de parts par des banques dans des entreprises commerciales et industrielles. Cependant, M. Hénin n'évoque pas l'autre aspect du problème : le rachat de la « coquille », c'est-à-dire la compagnie Executive Life elle-même. Pour lui, le portage, d'ailleurs mis en place à la demande et avec l'accord du Commissaire des assurances de Californie, ne posait pas de problème.

Par la suite, le dossier a évolué en une véritable « guérilla franco-française » au lieu d'adopter des positions communes, les différentes parties prenantes françaises se sont présentées en ordre dispersé, n'hésitant pas à s'accuser les unes les autres pour se disculper, fournissant des documents qui se sont retournés contre la France.

C'est pourquoi le travail de la commission d'enquête sera nécessaire, et devra remonter jusqu'à l'origine des faits, en 1991. Les précédents ministres de Finances n'ont pas pris, à cet égard, la pleine mesure de la difficulté. Aujourd'hui, il convient de ne plus courir aucun risque. La transaction intervenue, aux Etats-Unis, au pénal ne garantit pas une sécurité absolue : le Parquet pourrait parfaitement ouvrir une procédure sur la base d'éventuelles nouvelles informations. En ce qui concerne le volet civil de l'affaire, les commissions d'enquête fonctionnent sur la base de la collecte de documents et d'auditions : or à travers ceux-ci, on risque de fournir ainsi de nouveaux documents aux plaignants qui pourraient alourdir le procès civil. Le moment n'est donc pas opportun : il faut attendre que la commission d'enquête puisse se dérouler sans créer aucun risque d'aggravation de la situation, tant au regard de la procédure pénale qu'au regard de la procédure civile.

Usant de la faculté que l'article 38 du Règlement de l'Assemblée nationale confère aux députés d'assister aux réunions des commissions dont ils ne sont pas membres, M.  Gilbert Gantier a rappelé que l'objet du dépôt de sa proposition de résolution consistait à appréhender les responsabilités de l'État, dans le but de déterminer les raisons qui conduisent le contribuable à payer. Le Rapporteur a souligné que toute la lumière n'a pas été faite sur cette question et le Rapporteur général a convenu de la nécessité d'une commission d'enquête. La condamnation pénale a atteint 475 millions d'euros. Il s'agit donc de savoir quelle faute a été commise au nom de l'État. Rechercher des éclaircissements en la matière ne correspond pas à une demande nouvelle. Par ailleurs, un procès civil ne pourrait aboutir que si des dommages civils existent. Une commission d'enquête permettrait de faire toute la lumière sur cette affaire. En outre, ses travaux pourraient, si elle le décidait, être secrets.

Après avoir rappelé qu'il avait précédemment souhaité que la création d'une commission d'enquête soit reportée après le règlement de l'affaire au civil, M.  Philippe Auberger a souligné que ce point de vue était renforcé par les propos tenus par le Rapporteur et le Rapporteur général. Les spécialistes de la justice américaine soulignent qu'en dépit d'un accord de « plaider coupable », le dossier peut être réouvert si des éléments nouveaux apparaissent. Par ailleurs, la commission d'enquête devrait examiner non seulement les responsabilités ministérielles de l'époque, mais aussi le fonctionnement du CDR, dont la direction a changé en 1998, à l'initiative de M. Dominique Strauss-Kahn. Dès cette époque, des discussions ont eu lieu entre le CDR et la justice américaine, mais les projets d'accords ont été rejetés par le CDR. Il convient de savoir pourquoi. Pour autant, il faut attendre que les affaires civiles et pénales soient achevées pour créer une commission d'enquête.

M.  Alain Madelin a souligné que les différents intervenants ne parlaient pas du même sujet. L'enquête doit porter sur le fonctionnement du CDR et sur les modalités de cessions d'actifs du Crédit lyonnais dans le cadre d'opérations de défaisance. Elle devra se focaliser, exclusivement, sur les risques liés à l'affaire Executive Life. Il ne s'agit en aucun cas de refaire l'enquête américaine, la seule question qui doit trouver une réponse est la suivante : comment une affaire très profitable devient-elle une catastrophe pour le contribuable ? Il n'y a pas de risque d'interférence avec la justice américaine puisque la commission ne s'intéresserait qu'aux décisions prises au sein du CDR, afin de déterminer pourquoi le contribuable doit payer. Si la création de la commission d'enquête était reportée, le Parlement faillirait à sa mission, si par exemple la presse faisait la lumière sur cette affaire dans l'intervalle.

Après avoir rappelé que la précédente réunion de commission s'était conclue sur la nécessité de s'assurer que la création d'une commission d'enquête ne risquait pas d'affaiblir la position de notre pays, M.  Didier Migaud a indiqué que les éléments fournis par le Rapporteur montraient que le risque, en l'état, existait. Il ne faut cependant pas avoir peur de la vérité, qui doit être établie. Il est paradoxal que de nombreuses autorités procèdent à des investigations et que l'Assemblée nationale ne le fasse pas. Il n'est donc pas acceptable que la création d'une commission d'enquête soit remise aux calendes grecques. La position de fond de la Commission a progressé puisque le Président, le Rapporteur général et le Rapporteur sont désormais favorables au principe d'une commission d'enquête, défendu par le groupe socialiste. Il convient, simplement, de connaître les délais de sa mise en place. S'il s'agissait d'un renvoi sine die, le groupe socialiste ne serait pas d'accord. Le principe de la création d'une commission d'enquête est donc acté. Il faut étudier les possibilités permettant à quelques membres de la commission des Finances de travailler sur ce dossier dès maintenant afin de ne pas donner le sentiment que la commission d'enquête est enterrée. D'ici à sa mise en place, il conviendra donc de trouver une formule de travail qui permette de ne pas fragiliser la position de la France, tout en assurant le contrôle du Parlement.

M.  François Goulard, Rapporteur, a souligné que les risques présentés par une procédure civile sont bien réels. Il convient donc, pour l'instant, de ne pas alimenter le dossier des parties adverses par les investigations de l'Assemblée nationale. De plus, la possibilité de rouvrir l'affaire au pénal existe bel et bien. En effet, certaines personnes qui ont annoncé leur souhait d'être entendues par une éventuelle commission d'enquête n'ont pas été auditionnées par la justice américaine. Ce simple fait peut être considéré comme un élément nouveau permettant à celle-ci d'ouvrir à nouveau le dossier. S'agissant des profits et des pertes, le bénéfice de l'opération a été réalisé lorsque des actifs ont été vendus à Artémis, avant que la justice ne soit saisie du dossier. On sait donc comment les choses se sont passées.

M.  Alain Madelin a indiqué qu'au contraire, les causes et les motivations ne sont pas connues. Il convient de faire la lumière sur les accords passés par M. Jean-François Hénin. Il s'agit donc d'une affaire franco-française.

Le Président Pierre Méhaignerie a affirmé que la commission d'enquête était absolument nécessaire, car certains éléments sont troublants. Pour autant, beaucoup de maladresses ont déjà été commises devant la justice américaine, il convient donc que le Parlement n'ajoute pas à la confusion. Créer la commission d'enquête aujourd'hui serait désespérer de notre intelligence. Si des éléments nouveaux apparaissent il y aura nécessairement réouverture d'une information judiciaire. M. Charles de Courson tient à la création d'une commission d'enquête, mais il est parfaitement convaincu qu'une création immédiate compliquerait la situation contentieuse.

M. Philippe Auberger s'est étonné du fait que M.  Charles de Courson souhaite la création d'une commission d'enquête alors qu'il siège à l'EPFR, justement chargé de contrôler le CDR. À quoi sert l'EPFR ?

Le Président Pierre Méhaignerie s'est dit convaincu de la nécessité de créer une commission d'enquête mais compte tenu des risques actuels, il a indiqué qu'elle devrait l'être seulement au cours du premier semestre 2005.

M. Gilbert Gantier a rappelé que suite à la procédure pénale, le contribuable français était dans l'obligation de payer 770 millions de dollars. Si il y a sanction, il doit y avoir faute. Or, où est la faute ? La commission d'enquête a pour seul objectif de connaître les causes de cette pénalité.

Le Président Pierre Méhaignerie a proposé de soumettre au vote trois éléments. En premier lieu, la commission des Finances est favorable à la création d'une commission d'enquête. Cependant, il n'est pas pertinent de la créer pour l'instant car elle pourrait interférer avec les contentieux actuels. Par conséquent, il faut réexaminer la question de sa création au début de l'année 2005.

M. François Goulard, Rapporteur, a rappelé que ce vote entraînerait le rejet des propositions de résolution.

M. Alain Madelin a souhaité que la commission des Finances s'engage à réexaminer la question avant la fin de la législature.

M. Gilbert Gantier a fait observer que ce vote donnerait le sentiment à l'opinion publique que la commission des Finances est opposée au principe de la création d'une commission d'enquête.

M. François Goulard, Rapporteur, a rappelé qu'une commission d'enquête serait tenue par un délai de six mois pour rendre ses travaux si les propositions de résolution étaient adoptées. Par conséquent, il faut les rejeter et réexaminer la question au début de l'année 2005.

Le Président Pierre Méhaignerie a rappelé que la commission des Finances était favorable à la création d'une commission d'enquête, mais dans un délai différé. Il est nécessaire que le Parlement fasse toute la lumière sur ce sujet.

M. Didier Migaud a approuvé le principe d'une création différée d'une commission d'enquête, mais a souligné que la question devrait impérativement être réexaminée dans un délai raisonnable et non reportée sine die.

Le Président Pierre Méhaignerie a soumis au vote le principe d'une création différée de la commission d'enquête, le dépôt d'une nouvelle proposition de résolution en 2005 et en conséquence le rejet des propositions de résolution de M. Gilbert Gantier et de M. Éric Besson.

La Commission a émis un vote favorable à la proposition ainsi formulée par le Président et, en conséquence de ce vote, les propositions de résolution ont été rejetées.

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