COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 13

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 19 octobre 2004
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Michel Bouvard, Vice-Président

SOMMAIRE

 

pages

-  Examen, en application de l'article 88, des amendements au projet de loi de finances pour 2005 (n° 1800) (M. Gilles Carrez, Rapporteur général).

2

 

pages

   

- Après l'article 2

2

- Article 13

5

- Après l'article 6

3

- Article 20

6

- Après l'article 8

3

- Après l'article 26

6

- Après l'article 9

4

- Après l'article 28

6

- Après l'article 11

4

- Article 44

7

- Article 12

5

   

-  Examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005 (n° 1800) :

Vote sur les crédits de l'enseignement scolaire (M. Jean-Yves Chamard, Rapporteur spécial)

10

-  Informations relatives à la Commission

16

Statuant en application de l'article 88 du Règlement, sur le rapport de M. Gilles Carrez, Rapporteur général, la Commission des finances, de l'économie générale et du Plan a examiné les amendements au projet de loi de finances pour 2005 (1800).

Après l'article 2 :

La Commission a repoussé l'amendement n° 47 présenté par M. Michel Raison, tendant à porter de 15.000 à 25.000 euros le plafond en dessous duquel est applicable le régime du micro-foncier, le Rapporteur général ayant fait valoir que ce plafond avait déjà été relevé de 60.000 francs à 15.000 euros pour l'imposition des revenus perçus en 2001.

La Commission a également repoussé l'amendement n° 48 présenté par M. Michel Raison, tendant à porter de 40% à 45% l'abattement applicable au revenu, représentatif des charges dans le régime du micro-foncier.

La Commission a examiné l'amendement n° 101 présenté par M. Hervé Mariton, tendant à préciser que l'exonération d'impôt sur le revenu applicable aux revenus tirés de la location en meublé d'une ou plusieurs pièces de son habitation principale, prévue par l'article 35 bis du code général des impôts, lorsque le locataire y réside à titre principal et lorsque le loyer est fixé dans des limites raisonnables, peut être applicable dans le cas où la location est consentie au profit d'un étudiant, que cette location constitue ou non sa résidence principale.

M. Hervé Mariton a indiqué qu'actuellement la franchise d'impôt prévue par l'article 35 bis du code général des impôts est applicable, si le loyer est fixé dans des limites raisonnables, aux revenus tirés des locations consenties à titre de résidence principale. Ceci exclut les locations à des étudiants qui sont rattachés au foyer fiscal de leurs parents.

Le Rapporteur général a rappelé que la notion de résidence principale est différente de celle de foyer fiscal. Un étudiant peut, à la fois, être rattaché au foyer fiscal de ses parents (dans les conditions habituelles, c'est-à-dire sous réserve d'avoir moins de 25 ans et d'en faire la demande) et habiter sa chambre d'étudiant comme résidence principale. Le bailleur peut donc bénéficier de la franchise d'impôt prévue par l'article 35 bis du code général des impôts.

La Commission a repoussé l'amendement n° 101.

La Commission a successivement repoussé :

- l'amendement n° 54 présenté par M. Alain Marleix, tendant à porter de 30% à 50% et de 30.000 euros à 50.000 euros les plafonds des revenus accessoires relevant de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et des bénéfices non commerciaux au-dessous desquels il est permis de comptabiliser ces revenus au sein des bénéfices agricoles ;

- l'amendement n° 30 présenté par M. Sébastien Huyghe, tendant à exclure de l'assiette de l'impôt sur le revenu les rémunérations perçues avant leur arrivée en France par les salariés et dirigeants détachés en France par leur entreprise, après que le Rapporteur général eut émis un avis défavorable et indiqué que des mesures avaient été prises en faveur des cadres « impatriés » par la loi de finances pour 2004 (loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003) ;

- l'amendement n° 31 présenté par M. Sébastien Huyghe, tendant à appliquer aux rémunérations perçues avant leur arrivée en France par les salariés et dirigeants détachés en France par leur entreprise le taux de l'impôt auquel ces rémunérations auraient été soumises dans le pays d'origine des personnes détachées.

La Commission a également repoussé :

- l'amendement n° 80 présenté par M. Thierry Mariani, tendant à instaurer un abattement de 10% sur les plus-values de cession de valeurs mobilières, applicable pour chaque année de détention des titres cédés au-delà de la cinquième ;

- l'amendement n° 79 présenté par M. Thierry Mariani, tendant à porter à 36 fois le SMIC mensuel le plafond de déduction du bénéfice imposable dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux du salaire du conjoint participant effectivement à l'exercice de la profession lorsque que l'exploitant n'adhère pas à un centre de gestion agréé.

La Commission a examiné l'amendement n° 132 présenté par M. Michel Bouvard, tendant à clarifier l'exonération d'impôt sur le revenu applicable à l'avantage financier tiré des chèques-vacances distribués par des organismes à caractère social.

Le Rapporteur général a relevé que, par instruction fiscale, les versements des comités d'entreprise au titre des chèques-vacances sont exonérés dans la même limite que les abondements de l'employeur lorsque le comité intervient en complément de l'employeur. En revanche, lorsqu'un comité d'entreprise ou un autre organisme à caractère social intervient de façon autonome, et sans être soumis à la règle du plafond de ressources, l'exonération ne s'applique pas. Il est normal que le régime fiscal soit plus favorable lorsque des conditions de ressources doivent être respectées. Il n'y a donc pas lieu d'introduire dans le code général des impôts la précision souhaitée par cet amendement.

La Commission a repoussé l'amendement n° 132.

Après l'article 6 :

La Commission a repoussé l'amendement n° 55 présenté par M. Alain Marleix, tendant à exonérer d'impôt sur le revenu les rentes d'incapacité permanente servies en application des articles L. 752-6 et L. 752-9 du code rural.

Après l'article 8 :

La Commission a examiné l'amendement n° 133 présenté par M. Michel Bouvard, tendant à étendre, pour les entreprises de moins de 50 salariés dépourvues de comité d'entreprise et ne relevant pas d'un organisme paritaire mentionné au dernier alinéa de l'article 6 de l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création des chèques-vacances, le bénéfice des chèques-vacances à tous les salariés, sans condition de ressources.

M. Michel Bouvard a indiqué que cet amendement s'inscrit dans la perspective de l'amendement n° 132 et qu'il vise à établir une plus grande équité entre les salariés des grandes entreprises et ceux des PME, en ouvrant les chèques-vacances à l'ensemble des salariés des PME sans condition de ressources.

Le Rapporteur général a fait valoir que les salariés des autres entreprises sont soumis à une condition de ressources. Cependant, il est vrai que les versements effectués par le comité d'entreprise seul (sans abondement de l'employeur) ne sont pas soumis à ce plafond de ressources. Pour autant, les chèques-vacances sont un dispositif à caractère social et les abondements des employeurs doivent demeurer soumis à plafond de ressources.

La Commission a repoussé l'amendement n° 132.

Après l'article 9 :

La Commission a repoussé l'amendement n° 26 présenté par M. François Guillaume, tendant à supprimer l'impôt de solidarité sur la fortune et, en contrepartie, à relever le taux des quatre tranches les plus élevées du barème de l'impôt sur le revenu, le Rapporteur général ayant fait valoir que la simplicité apparente de cet amendement ne devait pas masquer sa portée effective.

La Commission a repoussé les amendements nos 108 et 109 présentés par M. Jean-Louis Christ, tendant à appliquer le taux réduit de TVA respectivement à l'abonnement et à la livraison d'énergie s'agissant des réseaux de chaleur alimentés en bois, le Rapporteur général ayant fait valoir que ces mesures sont incompatibles avec le droit communautaire.

La Commission a repoussé l'amendement n°28 présenté par M. Jacques Myard, tendant à supprimer les droits de succession.

La Commission a repoussé l'amendement n°45 présenté par M. Michel Raison, tendant à porter de 46.000 euros à 80.000 euros l'abattement applicable, pour le calcul des droits de succession, à la part revenant à chacun des ascendants et aux enfants.

La Commission a repoussé les amendements n°58 et 99 présentés par M. Hervé Mariton, tendant à instituer une exonération des droits de mutation à titre gratuit pour les terrains plantés en arbres truffier, le Rapporteur général ayant indiqué que si un tel amendement était adopté, d'autres activités seraient alors susceptibles de demander une exonération identique.

La Commission a repoussé l'amendement n°51 présenté par Mme Marie-Hélène des Esgaulx, tendant à offrir la possibilité d'une évaluation forfaitaire par application d'un coefficient d'érosion monétaire pour déterminer la valeur des biens au titre des droits de succession.

Après l'article 11

La Commission a examiné l'amendement n°105 présenté par M. Philippe Auberger, tendant à ce que les seuils de recettes annuelles en deçà desquels le professionnel libéral exerçant en société civile professionnelle bénéficie d'une exonération totale ou partielle de l'impôt sur les plus-values soient appréciés en proportion des droits de l'associé dans la société.

M. Philippe Auberger a fait valoir que la loi n°2003-721 du 1er août 2001 pour l'initiative économique ne prend pas en compte la spécificité de ces sociétés. Leur chiffre d'affaires est égal à la somme des chiffres d'affaires réalisés par chacun des associés. En conséquence, il conviendrait de retenir comme seuil d'exonération des plus-values réalisées par un associé la part du chiffre d'affaires correspondant à ses droits dans la société.

Le Rapporteur général a rappelé que cette question a été discutée lors de l'examen de la loi précitée et il est apparu nécessaire de fixer une limite de chiffre d'affaires global afin de limiter le bénéfice de la mesure aux petites entreprises. Or, s'il était possible d'additionner indéfiniment les parts, même les associés des plus grandes sociétés ou groupements pourraient en bénéficier.

La Commission a repoussé l'amendement n°105.

Article 12 : Allégements fiscaux pour les entreprises participant à un projet de recherche et de développement dans les pôles de compétitivité :

La Commission a examiné trois amendements nos 112, 111 et 113 présentés par M. Christian Blanc, tendant à élargir le champ des pôles de compétitivité aux activités de recherche dans des domaines non industriels.

Le Rapporteur général a indiqué que le caractère structurant de l'industrie française et son effet d'entraînement sur les autres secteurs ont justifié la spécialisation industrielle des pôles de compétitivité.

M. Jean-Jacques Descamps a précisé que l'extension du dispositif permettrait que les entreprises qui, ayant une activité similaire mais situées en dehors du pôle de compétitivité, ne soient fragilisées par celui-ci. L'intérêt majeur des pôles de compétitivité réside dans le regroupement sur une même zone géographique d'entreprises disposant d'une forte activité de recherche, quel que soit leur domaine d'activité.

Le Rapporteur général a évoqué les risques d'une définition trop extensive des pôles de compétitivité. Il a pris l'exemple de zones franches qui, alimentées par des transferts d'entreprises, finissent par vider de leur substance les régions avoisinantes. Parallèlement, il a souligné que certaines zones comme le plateau de Saclay ou Sofia Antipolis n'ont pas besoin d'avantages fiscaux pour être pleinement attractives.

La Commission a repoussé les amendements nos 112, 111 et 113.

Article 13 : Réduction à 1,5% du taux de la contribution de l'impôt sur les sociétés avant sa suppression complète :

La Commission a examiné l'amendement n°78 présenté par M. Thierry Mariani, tendant à supprimer la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés dès 2005.

Le Rapporteur général a exprimé son intérêt pour cet amendement qui vise à supprimer définitivement dès 2005 la surtaxe appliquée depuis le 1er janvier 1996 à l'impôt sur les sociétés. Les marges budgétaires disponibles ne permettent cependant pas de s'y rallier.

Article 20 : Mesures relatives au développement et au financement de l'apprentissage :

La Commission a accepté l'amendement rédactionnel n° 211 présenté par M. Gilles Carrez.

La Commission a ensuite repoussé l'amendement n° 210 présenté par M. Jean-Michel Fourgous, tendant à fixer le taux de la contribution au développement de l'apprentissage à 0,06% sans prévoir les taux applicables après 2005.

La Commission a ensuite accepté l'amendement n° 188 présenté par M. Gilles Carrez, tendant à inscrire dans le projet de loi - sans qu'il soit nécessaire d'insérer cette disposition au sein même du code général des collectivités territoriales - l'engagement pris par le Gouvernement de présenter au Parlement chaque année jusqu'en 2007 un rapport relatif aux ajustements éventuellement nécessaires en cas d'écart entre le rendement effectif de la contribution au développement de l'apprentissage et le montant des dotations de décentralisation relatives à la formation professionnelle et à l'apprentissage.

Après l'article 26 :

La Commission a ensuite repoussé l'amendement n° 22 présenté par M. Jean-Pierre Decool, tendant à réduire la quantité de tabac autorisée en circulation sans titre de mouvement entre les pays après leur vente au détail.

Après l'article 28 :

La Commission a successivement repoussé :

- l'amendement n° 32 présenté par M. Etienne Mourrut, tendant à ce que les entreprises agricoles à responsabilité limitée puissent être assujetties à l'impôt sur le revenu quelle que soit leur composition ;

- les amendements nos 52 et 53 présentés par Mme Marie-Jo Zimmermann, tendant à ce que la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé certains véhicules de petite taille soit désormais déductible ;

- l'amendement n° 82 présenté par M. Thierry Mariani, tendant à soumettre au taux réduit de la TVA tous les produits alimentaires qui en sont encore exclus.

La Commission a ensuite examiné l'amendement n° 91 présenté par M. Thierry Mariani, tendant à ce que la TVA grevant les dépenses d'hébergement ou de logement exposées par les entreprises au profit de leurs dirigeants ou de leurs salariés soit désormais déductible.

M. Jean-Jacques Descamps s'est étonné que la TVA grevant les dépenses de restaurant, de réception et de spectacle que supportent les entreprises soient déductibles et non les dépenses de logement ou d'hébergement.

Le Rapporteur Général a remarqué que, de la même manière que ce droit à déduction a été ouvert par un décret, il relève du pouvoir réglementaire d'étendre celui-ci aux dépenses de logement et d'hébergement.

M. Louis Giscard d'Estaing a rappelé que le décret avait été pris suite à un arrêt du Conseil d'Etat ayant jugé l'exclusion de la déductibilité de ces dépenses non compatible avec le droit communautaire. Si les dépenses de restaurant, de réception et de spectacle que supportées par les entreprises sont désormais déductibles, la déductibilité des dépenses de logement ou d'hébergement n'est admise qu'au bénéfice de tiers à l'entreprise, c'est-à-dire concrètement à ses invités. Toutes les conséquences de l'arrêt du Conseil d'Etat n'ont donc pas été tirées.

Le Rapporteur général a rappelé que la discussion de cet amendement en séance sera l'occasion d'obtenir une clarification de la position du Gouvernement sur ce sujet.

M. Richard Mallié a estimé insatisfaisant l'état actuel de la réglementation pour les entreprises qui, très souvent, exposent des dépenses de logement pour leurs salariés en déplacement.

M. Philippe Auberger a jugé que le Parlement ne doit pas se dessaisir au profit du Gouvernement et le suivre dans sa distinction entre les invités et les salariés.

Le Rapporteur général a estimé que la disposition en cause relève bien du domaine réglementaire, le Parlement pouvant demander au Gouvernement de modifier ce qui relève du domaine règlementaire.

Après que le Président Michel Bouvard eut remarqué qu'il s'agissait d'un réel problème, l'amendement n° 91 a été repoussé.

Article 44 : Équilibre général du budget :

La Commission a examiné l'amendement n° 209 présenté par M. Pierre Méhaignerie, tendant à majorer de 300 millions d'euros la ligne « Produit de la cession d'éléments du patrimoine immobilier de l'État » de l'état A annexé au projet de loi de finances et à modifier en conséquence le tableau d'équilibre de l'article 44 dudit projet.

Le Président Pierre Méhaignerie a indiqué que l'objectif de cet amendement est de permettre un débat, nécessaire, sur la gestion du patrimoine immobilier de l'État. Il s'est dit convaincu de la possibilité d'obtenir des recettes supplémentaires à ce titre, qui permettront de provisionner certaines dépenses.

M. Philippe Auberger s'est montré tout à fait favorable à ce débat, mais sceptique sur la possibilité de dégager effectivement 300 millions de recettes supplémentaires. Il a rappelé la divergence de vues existant entre le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et le ministère de la défense à propos de la possible cession de logements de la Gendarmerie, au bénéfice de la Société nationale immobilière (SNI). Il faut rappeler que la majorité du capital de la Société nationale immobilière a été rachetée à l'État par la Caisse des dépôts et consignations pour un montant d'environ 500 millions d'euros. En contrepartie, l'État s'est engagé à compenser une partie du paiement des loyers. Mais le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie remet aujourd'hui en cause le principe de cette compensation, ce qui aboutira à diminuer d'autant le prix de la cession. Sur la question du logement des gendarmes, la Société nationale immobilière a proposé au Gouvernement de prendre en charge ce patrimoine immobilier au moyen d'une autorisation d'occupation temporaire sur une période de 33 années, moyennant le versement de 500 millions d'euros. Une expertise juridique diligentée auprès d'un professeur de droit a établi que le recours à l'appel d'offres n'était pas nécessaire dans une telle hypothèse. Or, en dépit de ces éléments, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie demande aujourd'hui la constitution d'une mission interministérielle et prône le recours à un appel d'offres européen. Ceci retardera considérablement la réalisation de l'opération.

Sur cette question de l'externalisation du patrimoine immobilier de l'État, le Rapporteur général a fustigé la tendance à faire, non pas du « sur place », mais véritablement « marche arrière ». Il a indiqué que sur les 500 millions d'euros de produits immobiliers inscrits dans la loi de finances pour 2004, le niveau de réalisation est aujourd'hui de 50 millions d'euros environ. Les deux ministères mis en cause peuvent être renvoyés dos-à-dos quant à la responsabilité de leur inaction. Les ministres se montrent véritablement « prisonniers » de leur administration. Du côté du ministère de la défense, on constate une hostilité des gendarmes à l'idée de ne plus gérer leurs logements eux-mêmes. Du côté du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, la volonté de garder l'autorité sur ces questions conduit à l'inertie actuelle.

Dans ces conditions, il est du devoir des parlementaires de prendre des décisions « à la hache » et de mettre le Gouvernement face à ses responsabilités. C'est pourquoi le Rapporteur général souscrit à l'amendement du Président Pierre Méhaignerie : cette majoration de 300 millions d'euros contraindra le Gouvernement à présenter ses orientations sur la gestion du patrimoine immobilier de l'État. Avec cet amendement, le produit attendu pour 2005 de la cession d'éléments du patrimoine immobilier de l'État passerait de 700 millions à 1 milliard d'euros.

Des recettes supplémentaires ne seront d'ailleurs pas superflues, car certaines dépenses ne sont pas provisionnées. Par exemple, la dernière revalorisation du point d'indice de la fonction publique de 0,5 % date du 1er janvier 2004 et il semble peu vraisemblable qu'il n'y ait aucun changement de ce point d'indice d'ici la fin de l'année 2005.

M. Jean-Jacques Descamps a condamné le manque d'autorité du Gouvernement dans sa gestion du patrimoine immobilier étatique. S'interrogeant sur les moyens de contrôle existants sur les ministères, il s'est demandé s'il ne serait pas nécessaire de faire appel à la Cour des comptes.

Le Président Pierre Méhaignerie a souligné la nécessité d'une initiative du Gouvernement. Le Parlement, avec les pouvoirs renforcés que lui confère la loi organique relative aux lois de finances, doit se saisir de la question de la mauvaise gestion par l'Etat de son parc immobilier.

M. Michel Bouvard, Président, a estimé qu'il serait opportun d'organiser une mission d'évaluation et de contrôle sur ce sujet.

M. Jean-Louis Dumont a souligné l'intérêt de l'amendement. Il importe en effet d'enclencher un vaste débat sur la question de la valorisation par l'Etat de ses biens immobiliers. Il convient de rappeler que la loi n° 2003-73 du 27 janvier 2003 relative à la programmation militaire pour les années 2003 à 2008 prévoit que chaque arme doit récupérer à son profit le produit de cession de ses biens immobiliers. Les maires ont dû entrer dans la négociation. Cependant, la vente de certains biens doit être réalisée par enchères publiques, parfois européennes, ce qui, dans certaines régions particulièrement stratégiques, notamment frontalières, a pu entraîner une forte pression à la hausse sur le prix des biens mis en vente. Par ailleurs, il s'avère que la Société Nationale Immobilière (SNI) loge de plus en plus de civils et de moins en moins de militaires, ce qui, selon le directeur de la Caisse des dépôts et consignations, tend à banaliser cet organisme de gestion immobilière.

Cet amendement permet donc d'ouvrir avec le Gouvernement un débat essentiel. Pour autant, fixer dans son dispositif des objectifs financiers précis (300 millions d'euros) ne constitue peut-être pas une démarche optimale. Les auditions de présidents d'entreprises publiques conduites ces derniers mois par la Commission ont bien montré les réticences qui subsistent lorsqu'il est question d'aliéner une partie du patrimoine foncier et immobilier : chacun veut garder son patrimoine ou le vendre le plus cher possible.

M. Alain Joyandet a relevé que les obstacles ne résultent pas seulement de la complexité alléguée des opérations projetées. Dans les environs de Vesoul, il existe un aérodrome désaffecté de la Défense pour lequel les collectivités territoriales se sont portées acquéreurs. Or la vente n'est toujours pas conclue malgré l'absence apparente de difficultés techniques, financières ou juridiques.

M. Richard Mallié s'est dit en accord avec le fait que les ministères, non seulement ne peuvent pas, mais surtout ne veulent pas s'engager dans une démarche dynamique en ce domaine. Le patrimoine immobilier concerné n'est d'ailleurs pas constitué que de terrains et de friches. Il y a aussi des immeubles entiers, peu ou pas du tout utilisés, notamment par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Édouard Landrain a regretté que, trop souvent, l'État ne vende pas ses biens immobiliers, ne les utilise pas et ne les entretienne pas non plus. On connaît le cas d'une caserne de gendarmerie mobile, désaffectée, qui n'a pas été entretenue pendant une dizaine d'années. La collectivité territoriale qui l'a acquise par la suite a dû non seulement payer le prix exorbitant qui en était demandé mais aussi prendre à sa charge le coût des travaux de remise en état.

M. Michel Bouvard, Président, a souligné que les exemples de mauvaise gestion de son patrimoine immobilier par l'État ne manquent pas. Chacun a en mémoire les avatars de la vente des locaux parisiens de l'ENA. Ceux-ci devraient finalement être acquis par la Fondation nationale des sciences politiques, dont la Cour des comptes a récemment dénoncé la fragilité financière. De même, le ministère du Tourisme a prévu d'emménager dans des immeubles nouveaux, mais les loyers seraient plus élevés que ce que permet son budget et celui-ci ne permet pas non plus de prendre en charge le coût des opérations de déménagement.

M. Richard Mallié a indiqué que des immeubles entiers du ministère de l'industrie sont actuellement vides. Il convient de ne pas attendre plus longtemps pour vendre ces biens.

M. Edouard Landrain a estimé que certains biens n'étaient pas suffisamment utilisés et entretenus.

La Commission a accepté l'amendement n° 209.

*

* *

La Commission a ensuite poursuivi l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005 (n° 1800) en examinant, sur le rapport de M. Jean-Yves Chamard, Rapporteur spécial, les crédits de l'enseignement scolaire.

M. Jean-Yves Chamard, Rapporteur spécial, a indiqué que le budget de l'enseignement scolaire en 2005 s'élève à 56,6 milliards d'euros contre 55,4 en 2004 (+ 2,55 %), si l'on neutralise le transfert des prestations familiales aux caisses d'allocations familiales. Cette dotation est, par exemple, supérieure au produit de l'impôt sur le revenu, qui s'établit à 55 milliards d'euros.

95 % des crédits sont constitués de dépenses de personnel. Elles se répartissent entre 19 % pour l'enseignement primaire public, 42 % pour le secondaire, 12 % pour les établissements d'enseignement privés et 27 % pour l'administration et les fonctions support.

Ce projet de budget donne lieu à plusieurs créations et suppressions d'emplois dans le secteur public : 1.000 postes sont ainsi créés dans le premier degré, afin d'accueillir les 51.000 élèves supplémentaires prévus ; 3.400 postes sont supprimés dans le second degré, pour tenir compte de la baisse du nombre d'élèves, qui devrait être inférieur de 44.700 élèves à la prochaine rentrée scolaire ; 2.100 postes de maîtres auxiliaires et professeurs contractuels du second degré sont également supprimés, afin notamment de tenir compte de l'emploi des « surnombres disciplinaires » et de l'amélioration du remplacement. S'agissant des ATOS (personnel administratif, technique, ouvrier, de service et de santé), 800 suppressions de postes sont prévues, dont 600 emplois de personnels administratifs et 216 emplois pour tenir compte du transfert aux caisses d'allocations familiales de la gestion de l'ensemble des prestations familiales dues aux agents de l'État. Parallèlement, 800 postes d'assistants d'éducation sont créés, afin de favoriser l'insertion des élèves handicapés. Dans les établissements privés, sont créés 138 postes dans le premier degré et supprimés 670 emplois dans le second degré, en vue de respecter la parité avec l'enseignement public.

Ces mesures sont prolongées par la volonté d'instaurer une véritable gestion prévisionnelle des effectifs. Pour la première fois depuis plusieurs années, le nombre d'emplois mis aux concours à venir est connu en même temps que le projet de loi de finances. Ainsi, est-il prévu, dans le premier degré - où la décroissance du nombre de départs à la retraite devrait commencer en 2006 - 500 postes de moins, et, dans le second degré - où l'année 2006 devrait se traduire par un accroissement des départs à la retraite - 1.500 postes de plus. Cela étant, on continue à recruter des enseignants dans des disciplines en sureffectifs. C'est le cas notamment en éducation physique et sportive ou en allemand. Quant aux assistants d'éducation, ils devraient passer de 33.000 en 2004 à 42.800 en 2005, soit une création de plus de 9.000 postes, en remplacement des départs prévus des maîtres d'internat et surveillants d'externat.

Diverses mesures sont par ailleurs prévues en faveur des personnels, pour un montant de 255 millions d'euros. Elles concernent notamment le programme d'intégration des instituteurs dans le corps des professeurs des écoles, des « repyramidages » permettant d'améliorer les déroulements de carrière, une revalorisation indemnitaire en faveur des personnels non enseignants, de même que l'achèvement du plan de revalorisation de la carrière des personnels infirmiers. Dans le secteur privé, est prévue la contractualisation de 500 instituteurs suppléants et 1.720 maîtres auxiliaires délégués. Enfin, est intégrée une mesure récurrente d'ajustement des crédits de pension, d'un montant de 1,152 milliard d'euros.

Les autres crédits représentent un peu moins de 5 % de l'ensemble du budget, et permettront la consolidation des actions pédagogiques en faveur des élèves handicapés ou en difficulté scolaire, le remboursement des frais de déplacement des personnels (7,4 millions d'euros), le financement des dépenses locatives et de réhabilitation des locaux et l'adaptation des systèmes d'information financière et de gestion des ressources humaines, en vue de la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances. En matière d'investissements, les crédits de paiement devraient augmenter de 20 %, passant de 59 à 70 millions d'euros, afin d'accélérer la rénovation du parc immobilier. Les bourses devraient faire l'objet d'une augmentation de 1,7 % au 1er septembre 2005. Le forfait privé d'externat sera majoré (4 millions d'euros) et le fonds social lycéen sera étendu aux établissements d'enseignement privés sous contrat (1,35 million d'euros).

Les comparaisons internationales font apparaître que si la France dépense par élève 25 % de plus que la moyenne de l'OCDE dans l'enseignement du second degré, soit un surcoût d'environ 7 milliards d'euros, ses résultats scolaires sont, eux, selon l'enquête PISA, dans la moyenne de ces pays. Force est de constater que notre système ne progresse plus depuis une dizaine d'années et que l'injection de moyens supplémentaires ne permet pas de résoudre les problèmes. Ceux-ci ne pourront être surmontés que par des redéploiements de crédits et des réformes structurelles, telles que, comme le propose le rapport de la commission du débat national sur l'avenir de l'école, dirigée par M. Claude Thélot, un meilleur enseignement des savoirs fondamentaux. Cela repose sur l'apprentissage de l'expression, de la lecture, de l'écriture, au travers des trois moyens de communication indispensables que sont le français, l'anglais, en tant que langue internationale, et les nouvelles technologies de communication informatique. À ces savoirs, doit s'ajouter la capacité de compter, mais aussi d'apprendre à raisonner avec logique.

Concernant la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances, l'élaboration de l'avant-projet annuel de performance traduit de nets progrès dans la présentation et la lisibilité des crédits. Ceux-ci seront regroupés dans la mission enseignement scolaire, elle-même divisée en six programmes : l'enseignement public du premier degré (25 % des crédits), l'enseignement public du second degré (45 %), la vie de l'élève (11,5 %), l'enseignement privé (12,5 %), le soutien de la politique de l'Éducation nationale et l'enseignement technique agricole. La mise en œuvre de la loi organique a donné lieu à une expérimentation en 2004 dans les académies de Rennes et de Bordeaux pour les programmes de l'enseignement public des premier et second degrés et le programme soutien. En 2005, cette expérimentation sera étendue à toutes les académies, tandis que celles de Bordeaux et de Rennes élargiront l'opération à la quasi-totalité des moyens mis à leur disposition.

Si les indicateurs contenus dans l'avant-projet annuel de performances sont intéressants, ils méritent cependant d'être complétés. Il est en effet nécessaire de disposer du pourcentage d'élèves ne maîtrisant pas les savoirs fondamentaux à la fin du primaire. De même, si de nombreux indicateurs de résultats sont prévus, peu d'entre eux portent sur les moyens mis en œuvre pour y parvenir, tel que le coût de formation par élève et par établissement selon le type de formation. Il serait donc souhaitable d'élaborer un indice synthétique d'activité, tel qu'il existe pour les hôpitaux, afin de différencier le coût des divers types de formation. Les résultats obtenus pourraient être publiés par académie, par département et par établissement. Il conviendrait d'élaborer également un indice synthétique de qualité, permettant de comparer les résultats scolaires attendus et ceux constatés par établissement.

D'autres indicateurs seraient utiles, tel que le nombre de postes mis au concours par discipline, en comparaison avec les sur ou sous-effectifs, et le nombre prévisible des départs en retraite. De même, serait-il souhaitable de disposer du taux de rendement brut des remplacements, et non seulement du taux net qui ne rend compte que d'une partie de la réalité. Il pourrait être envisagé d'annualiser la quotité disponible des enseignants. On devrait aussi pouvoir connaître le nombre d'emplois équivalents temps plein disponibles correspondant aux heures de travail dues non effectuées, par discipline et par académie, ainsi que l'indicateur mesurant l'application de la réglementation permettant de demander à un enseignant n'effectuant pas l'intégralité de son service d'enseigner également une discipline connexe. Il serait enfin utile de disposer du pourcentage d'élèves répartis dans les classes à faibles effectifs dans le primaire, par académie, et dans le secondaire, par discipline et académie.

En conclusion, l'année 2005 se présente comme une année charnière du fait à la fois de la préparation du projet de loi d'orientation sur l'école et de la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances. La gestion de l'enseignement du second degré traduit une efficience médiocre et une mauvaise utilisation de l'argent des contribuables. Il convient, dans ces conditions, de sensibiliser les enseignants et les parents sur le fait que la solution des problèmes de l'école ne passe pas par davantage de moyens, mais par un réel changement de méthode. Enfin, on n'insistera jamais assez sur l'importance du lien entre le maître et l'élève et sur la nécessité de donner à celui-ci confiance en lui : « notre grande erreur est d'essayer d'obtenir de chacun en particulier les vertus qu'il n'a pas et de négliger de cultiver celles qu'il possède », affirme, justement, Marguerite Yourcenar.

M. Michel Bouvard, Président, a demandé au Rapporteur spécial s'il souhaitait soumettre un thème d'enquête à la Cour des comptes ou proposer un sujet de mission d'évaluation et de contrôle. Les préconisations faites par la Cour des comptes dans le cadre de récents rapports particuliers ont-elles été suivies d'effets ?

M. Jean-Yves Chamard, Rapporteur spécial, a rappelé que la Cour des comptes avait notamment critiqué la mauvaise utilisation des personnels pour assurer les remplacements. Des mesures ont été prises pour rendre le système plus efficient. En particulier, le Gouvernement a demandé que les zones de remplacement soient élargies.

Par ailleurs, plusieurs objectifs et indicateurs retenus par le ministère traduisent des points mis en exergue par la Cour des comptes. Le travail en cours pour compléter les indicateurs va permettre de poursuivre ce processus. En revanche, entre le plafond d'autorisations d'emplois qui sera voté et la répartition concrète des professeurs dans chaque établissement, il existe un profond hiatus que le ministère ne semble pas encore être en mesure de traiter. La mission d'évaluation et de contrôle ou la Cour des comptes pourraient apporter une aide précieuse à cet égard. Comment se concrétisera l'autorisation parlementaire ?

M. Jean-Louis Dumont a abordé la question des surnombres. Il est aberrant de former des étudiants pour l'enseignement d'une matière dans laquelle il n'y a pas de besoins. En ce qui concerne l'enseignement de l'allemand, le fait que cette langue fasse l'objet d'une initiation à l'école primaire induit naturellement des demandes au niveau du collège. Certains parents considèrent qu'ils sont victimes d'une discrimination lorsque cet enseignement n'est pas assuré.

Le problème de l'évolution de la carrière des enseignants doit être sérieusement traité. Les enseignants souffrent souvent d'une « usure prématurée » qui rend nécessaire une évolution de leur carrière, évolution qui ne peut pas être systématiquement administrative. La formation continue des enseignants doit être améliorée ; des objectifs pourraient être fixés dans ce domaine. Certaines mises à disposition ont été remises en cause alors qu'elles seraient nécessaires pour assurer notamment l'éducation à l'environnement. Les organismes qui y contribuent méritent plus d'attention de la part du ministère de l'Éducation nationale et devraient pouvoir bénéficier de la mise à disposition d'enseignants formés. Le renouvellement, année après année, de véritables drames provoqués par l'annonce de fermetures de classes ou de réductions d'effectifs est essentiellement lié à un manque de dialogue.

M. Denis Merville a souligné la lourdeur d'un ministère qui compte environ 350.000 agents non enseignants pour encadrer 850.000 enseignants : malgré la décentralisation, l'administration centrale change peu et ses effectifs ne sont réduits que très lentement. Les efforts en faveur de l'intégration des handicapés donnent de bons résultats. L'éducation à l'environnement doit être renforcée. Alors que la médecine scolaire n'a finalement pas été placée sous la responsabilité des conseils généraux, les sous-effectifs sont toujours aussi sensibles sur le terrain, certains postes à l'extérieur des villes étant particulièrement difficiles à pourvoir.

3 % des dépenses de fonctionnement sont, selon le ministère, destinés au transport scolaire : quel rôle l'État joue-t-il encore dans ce domaine, alors que le transport scolaire est totalement à la charge des conseils généraux ? Pour ce qui est de l'utilisation des remplaçants, le fait que la dernière rentrée scolaire se soit déroulée sans problème témoigne de l'amélioration du système.

M. Philippe Rouault a demandé si le principe d'équité entre les enseignants du public et du privé allait être appliqué, notamment s'ils allaient bénéficier d'une retraite équivalente. S'agissant des effectifs, est-il possible de disposer d'un même ratio enseignants / élèves dans chaque académie ? Enfin, la spécificité de l'enseignement de l'allemand doit être soulignée : la relation franco-allemande constitue le socle de la construction européenne.

M. Michel Bouvard, Président, a reconnu le caractère universel de l'anglais et, par conséquent, la nécessité de l'enseigner. Toutefois, le rayonnement de la langue française dépend de la capacité des élèves à apprendre deux langues, en particulier l'allemand et l'espagnol. Sinon, le français disparaîtra comme langue internationale. Peut-on mesurer le taux d'insertion des élèves handicapés dans le système scolaire ? S'agissant du transfert des personnels techniciens, ouvriers et des services (TOS) aux départements et régions, la compensation financière sera certainement assurée. Toutefois, il convient de souligner qu'aujourd'hui le taux d'encadrement est variable d'une académie à l'autre et d'un établissement à l'autre. Serait-il possible de procéder à des réajustements avant que ce transfert ne soit effectué ? Sinon, comment seront prises en compte ces différences ? Comment, en particulier, seront traités les internats ? Le projet de budget comporte-t-il les mesures permettant d'assurer la nécessaire parité entre les enseignants des secteurs public et privé, qu'il s'agisse des traitements des actifs ou des retraités ?

En réponse à ces questions, M. Jean-Yves Chamard, Rapporteur spécial, a apporté les précisions suivantes :

- s'agissant des concours de recrutement, la mise en place d'une gestion prévisionnelle des effectifs est nécessaire pour que les étudiants connaissent à l'avance le nombre de postes ouverts aux concours. Il est important qu'un indicateur prenne en compte le nombre de départs à la retraite prévus, le nombre de sous ou de sur-effectifs et l'évolution du nombre d'élèves, afin de déterminer le nombre de postes qui doivent être offerts à moyen terme. La réponse théoriquement idéale serait l'instauration d'un numerus clausus, mais il n'est pas possible de généraliser un tel dispositif. Par conséquent, il faut au moins informer ceux qui souhaitent s'engager dans la carrière enseignante des postes disponibles prévus ;

- le rapport Thélot souligne l'existence d'une seule langue internationale, l'anglais, qui doit, par conséquent, être apprise dès le primaire. À cet égard, l'expérience qui consiste à employer des Anglais de souche pour qu'ils interviennent auprès d'élèves du primaire, montre que rien n'est plus profitable qu'une immersion précoce dans la langue. Le rapport Thélot précise qu'une seconde langue doit être enseignée à partir du collège. Il peut bien entendu s'agir de l'allemand, mais également de l'espagnol ou de l'italien ;

- la formation continue est beaucoup moins développée dans les carrières de l'enseignement que dans les autres métiers. Un indicateur est toutefois prévu pour la mesurer. La formation continue doit d'abord être axée sur l'amélioration de la pédagogie. S'agissant de la mise à disposition des personnels éducatifs, il paraît normal que les associations reçoivent des subventions pour les rémunérer, mais il n'est pas acceptable que des personnels éducatifs demeurent payés par l'Éducation nationale pour accomplir des missions autres que celles d'enseignement. S'agissant des personnels administratifs et des TOS, il convient de souligner que ces derniers, qui vont être transférés aux départements et aux régions, reçoivent des indemnités plus faibles que les personnels des collectivités locales. Par ailleurs, un départ sur deux au sein du personnel administratif n'est pas remplacé cette année.

M. Michel Bouvard, Président, a demandé si la stratégie ministérielle de réforme était respectée.

M. Jean-Yves Chamard, Rapporteur spécial, a répondu que le ministre avait indiqué que tel était bien le cas. Par ailleurs, une seule mesure catégorielle est inscrite dans le projet de loi de finances en faveur de la médecine scolaire : elle concerne les infirmiers. Il est vraisemblable que si cette compétence avait été décentralisée, on aurait assisté à une amélioration de la santé scolaire.

La meilleure utilisation des remplacements s'explique par le fait que, auparavant, les recteurs d'académie travaillaient sur des flux, alors que, désormais, ils se fondent sur des stocks. Ce changement de politique a eu pour conséquence une rentrée qui s'est passée dans de bonnes conditions, d'autant plus que les enseignants ont joué le jeu. Un certain nombre de mesures figurent dans le budget afin de favoriser l'équité entre les enseignants du public et du privé, notamment la revalorisation du forfait d'externat. En revanche, rien n'est proposé au sujet de deux revendications pourtant justifiées : l'équivalence du montant des retraites et un rééquilibrage des crédits consacrés à chaque catégorie d'établissement. En effet, à chaque fois que l'État consacre 100 euros à l'enseignement public, il n'en verse que 20 à l'enseignement privé. Or, l'enseignement privé fait l'objet d'une forte demande de la part des parents. D'ailleurs, il ressortira certainement des indicateurs proposés que l'enseignement privé a de meilleurs résultats et coûte moins cher que le public. En toute hypothèse, il convient de maintenir le caractère dépassionné de ce débat. S'agissant de la mise en place d'une péréquation préalablement au transfert des TOS, rien n'est prévu : les écarts entre régions devraient donc persister. En revanche, un indicateur concernant le taux d'insertion des élèves handicapés est prévu dans l'avant-projet annuel de performance.

M. Jean-Louis Dumont a précisé que cet indicateur devait prendre en compte, non seulement l'encadrement pédagogique et le soutien des élèves handicapés, mais également l'aménagement immobilier.

M. Jean-Yves Chamard, Rapporteur spécial, a souligné que le soutien à l'insertion des élèves handicapés constituait une priorité depuis plusieurs années. Il convient toutefois de mettre en garde contre une intégration à tout prix, souvent souhaitée par les parents, qui peut parfois avoir plus d'inconvénients que d'avantages.

La Commission a ensuite, sur proposition du Rapporteur spécial, adopté les crédits de l'enseignement scolaire figurant à l'état B, titres III et IV et à l'état C, titres V et VI.

*

* *

Informations relatives à la Commission

La commission des Finances, de l'Économie générale et du Plan a reçu :

· un rapport d'enquête de la Cour des comptes sur les frais de perception des impôts locaux ;

· un projet de décret d'annulation de crédits.

--____--


© Assemblée nationale