COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 19

(Application de l'article 46 du Règlement)

Jeudi 28 octobre 2004
(Séance de 10 heures)

Présidence M. Michel Bouvard, Vice-Président
puis de M. Pierre Méhaignerie, Président

SOMMAIRE

 

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- Suite de l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005 (n° 1800)

Vote sur les crédits :

 

· du Tourisme (M. Agustin Bonrepaux, Rapporteur spécial)

2

· des Collectivités territoriales (M. Marc Laffineur, Rapporteur spécial)

5

· de l'Industrie (M. Hervé Novelli, Rapporteur spécial)

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· de la Formation professionnelle et de l'article 75, rattaché (M. Jean-Michel Fourgous, Rapporteur spécial)

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Information relative à la Commission

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La Commission des finances a poursuivi l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005. Elle a tout d'abord examiné, sur le rapport de M. Augustin Bonrepaux, Rapporteur spécial, les crédits du Tourisme. Soulignant la faiblesse de ces crédits, le Rapporteur spécial indiqué qu'ils étaient fixés à 72,58 millions d'euros pour 2005, ce qui représente, par rapport à 2004, une progression de 2,9 %. Cette hausse de 2 millions d'euros s'explique principalement par l'augmentation des crédits de fonctionnement de l'administration centrale et par une progression des dépenses de personnel. Le Gouvernement a, par ailleurs, annoncé l'ouverture de 2 millions d'euros en loi de finances rectificative. Dans la présentation de son projet de budget pour 2005, le ministre délégué au tourisme tient généralement compte de ces crédits. On remarquera, toutefois, que cette ouverture annoncée fait suite à l'annulation, de 2,07 millions de crédits du budget 2004. Les dotations du budget sont d'une grande stabilité et la seule réelle augmentation concerne le fonctionnement de l'administration centrale. Il s'agit de 2 millions d'euros qui seront entièrement consacrés à la hausse du loyer que devra assumer la Direction du tourisme pour ses nouveaux locaux. Elle doit, en effet, quitter à la fin de l'année, ceux qu'elle occupait avec l'AFIT sur le front de Seine. Avec 38,29 millions d'euros, les moyens d'intervention sont globalement stables par rapport à 2004, la subvention à Maison de la France s'accroît, en effet d'1 million d'euros, mais une baisse équivalente s'exerce sur les autres postes et frappe, tout particulièrement, les crédits destinés aux contrats de plan qui passent de 3,21 à 2,47 millions d'euros. Quant à l'augmentation des moyens de promotion du tourisme français, qui passent de 29,3 à 30,3 millions d'euros, elle fait suite à l'annulation de la même somme sur le budget 2004. Dans ces conditions, elle ne constitue que le report de crédits gelés.

Le Gouvernement a réaffirmé l'importance de la promotion lors de la deuxième réunion du comité interministériel du tourisme, qui s'est tenu le 23 juillet dernier, la stratégie marketing de Maison de la France a été redéfinie, mais il n'a pas été fait mention d'un renforcement des moyens budgétaires.

S'agissant des moyens d'investissement, les crédits de paiement subissent une réduction de 10,8 %. Les crédits consacrés aux contrats de plan sont portés à 8,41 millions d'euros, mais cette hausse de 5,52 % reste insuffisante. En effet, cette année, les crédits de paiement, 11,169 millions d'euros, ont été consommés à 97,76 % dès la fin juillet. Quant aux crédits d'investissement destinés au programme de consolidation des hébergements du tourisme social, ils sont fixés à 1 million d'euros en crédits de paiement, en baisse de 61,2 % par rapport à l'exercice précédent, et le projet de loi ne prévoit pas de dotation en autorisations de programme.

S'agissant des dotations destinées à soutenir la politique d'accès aux vacances, elles sont réduites de 44,08 %. Les 2,34 millions d'euros annoncés pour ces actions par le ministère correspondent, pour une part, aux crédits d'investissement destinés aux hébergements et, pour l'autre part, aux crédits d'intervention du chapitre 44-01 dont le montant pour 2005 est fixé à 1,34 millions d'euros, en baisse de 18,7 %. Compte tenu de l'affaiblissement des crédits disponibles pour ces actions, leur financement est, de plus en plus souvent, assuré par les collectivités locales ou par l'Agence nationale du chèque-vacances. C'est, notamment, grâce aux 800.000 euros mobilisés par cet organisme que pourra être menée une expérimentation visant à mettre en place une aide au départ des seniors. Toutefois, les excédents de gestion de l'agence ne progressent pas suffisamment pour se substituer aux crédits budgétaires qui doivent être consacrés au tourisme social. À cet égard, il est regrettable que le Gouvernement se soit opposé à l'amendement de M. Michel Bouvard visant à améliorer la diffusion des chèque-vacances dans les petites et moyennes entreprises. Enfin, pour la mise en œuvre de la LOLF, le Gouvernement a, concernant les crédits du Tourisme, modifié son projet initial et introduit, dans la nouvelle version de sa maquette, une mission interministérielle dédiée à la « Politique des territoires » dont le tourisme constitue l'un des cinq programmes. Ce programme est décliné en trois actions, qui correspondent aux trois priorités affirmées par le Gouvernement : « Promotion de l'image touristique de la France et de ses savoir-faire », « Économie du tourisme » et « Accès aux vacances ».

Pour conclure, le Rapporteur spécial a rappelé que la France connaît, depuis deux ans, une importante baisse de sa fréquentation touristique qui nécessiterait une véritable mobilisation. Évoquant les importants efforts déployés par l'Espagne, non seulement en faveur de la promotion mais aussi de la qualité de son offre touristique, il a souligné la faiblesse des moyens consacrés par le ministère à cet axe d'intervention, en particulier, et, malgré l'urgence de la situation, à la politique touristique, en général.

M. Pierre Hériaud a interrogé le Rapporteur spécial sur la création du pôle « conjoncture » au sein de la Direction du tourisme.

M. Nicolas Perruchot a demandé si des moyens de promotion supplémentaires avaient été mobilisés en direction de la Chine et a souligné que cette nouvelle clientèle commençait à être importante dans les sites architecturaux italiens, ce qu'on n'observe pas pour les châteaux de la Loire.

M. Michel Bouvard, Président, s'est demandé s'il avait été tiré avantage du niveau de change de l'euro pour amplifier les campagnes menées sur les marchés concernés. Il a également posé des questions sur la diminution des crédits consacrés à la réhabilitation des hébergements du tourisme social et sur la capacité de l'agence du chèque vacances à assurer ce financement, sans une montée en puissance de ses résultats, et sur le déménagement du ministère. Concernant le regroupement du Service d'étude et d'aménagement touristique de la montagne (SEATM) avec l'Observatoire national du tourisme et l'AFIT, il a signalé qu'un problème de personnel risquait de se poser à la future structure. Ces organismes, et particulièrement le SEATM, bénéficient de la collaboration d'agents mis à disposition par différents ministères. Ces apports, qui assurent le nécessaire caractère pluraliste des compétences réunies, risquent d'être remis en cause avec l'application des plafonds d'emplois, lors de l'entrée en vigueur de la LOLF. Il a également souhaité que soient clarifiées les conditions dans lesquelles les collectivités publiques auront accès aux services du nouvel organisme, et insisté sur la nécessité de régler ces problèmes avant le 1er janvier 2006.

M. Edouard Landrain s'est ensuite interrogé sur le mode d'évaluation du nombre de touristes entrant sur notre territoire : une nuitée est comptabilisée comme un séjour.

M. Jean-Jacques Descamps s'est félicité de la fusion des structures d'étude et s'est demandé si les délégations régionales au tourisme conserveraient une utilité dans la nouvelle organisation des services déconcentrés de l'État. Considérant comme archaïque le rattachement du tourisme au ministère de l'Équipement, il a souhaité que ces compétences soient intégrées à un grand ministère, dont la vocation serait économique.

M. Didier Migaud a fait observer que, dans la nouvelle nomenclature budgétaire, le ministère du tourisme ne recouvrait qu'un seul programme. Soulignant le caractère incongru d'une configuration qui, extrapolée, aboutirait à l'existence de 150 ministères, il a souhaité que des regroupements soient opérés et qu'une réflexion soit menée, sur ce point, dans le cadre de la réforme de l'État.

En réponse aux intervenants, M. Augustin Bonrepaux, Rapporteur spécial, après s'être félicité de l'intérêt porté au tourisme par les commissaires, a précisé que les statistiques officielles ne comptabilisaient que les touristes ayant passé au moins une nuit sur le territoire. Une nouvelle enquête statistique, utilisant les données fournies par la téléphonie mobile est, par ailleurs, en cours d'élaboration. Elle permettra d'obtenir des informations très précises sur les habitudes touristiques des clientèles étrangères. Concernant le pôle conjoncture, 100.000 euros seront consacrés au renforcement de la collaboration du monde universitaire aux études sur le secteur touristique conduites par le ministère. L'émergence de nouveaux marchés, comme la Chine, n'a pas donné lieu à l'identification de financements spécifiques. Cette promotion est confiée, comme l'ensemble des activités de promotion, à Maison de la France, qui déploie ses moyens selon les besoins de sa stratégie. On peut se demander si le souci d'économie qui a présidé au regroupement de la direction du tourisme et des organismes qui lui sont associés n'aurait pas trouvé une meilleure réponse dans des locaux appartenant à l'État. Quant à la création, par fusion, de la structure d'étude et de conseil, il s'agit d'une bonne idée, mais ce nouvel organisme devra travailler avec des moyens insuffisants. C'est notamment le cas du SEATM qui est installé dans des locaux particulièrement vétustes.

L'agence nationale du chèque vacances fournit une contribution croissante à la réhabilitation des hébergements du tourisme social. Cette aide de 5,7 millions d'euros en 2002 et 8 millions d'euros en 2003, a bénéficié à 115, puis 172 équipements pour les années considérées. La croissance de ses résultats est cependant insuffisante pour pourvoir au financement des actions de solidarité et compenser la baisse des crédits d'investissement fournis par l'État. Il n'a pas encore été pris de décision sur l'organisation des missions des DRT. La suggestion de M. Jean-Jacques Descamps consistant à replacer le tourisme au sein d'un département ministériel à vocation économique est très intéressante et répond au souci de revaloriser le statut de ce secteur. Elle n'est pas contradictoire avec l'existence d'un secrétariat d'État ou d'un ministère délégué. En conséquence, M. Augustin Bonrepaux, Rapporteur spécial, s'est déclaré favorable à l'adoption, par la Commission, d'une observation formulant cette recommandation.

M. Didier Migaud ayant fait observer que la vocation économique d'un ministère n'exclut pas la prise en compte d'impératifs d'aménagement du territoire, la Commission a adopté une observation exprimant ses réserves sur l'adéquation entre un ministère et un seul programme ainsi que sur le rattachement du ministère du Tourisme à la politique d'aménagement du territoire et appelant à l'inclusion de ses compétences au sein d'une structure axée sur la politique économique, prenant également en compte les préoccupations d'aménagement du territoire.

La Commission a, ensuite, contre l'avis du Rapporteur spécial, adopté les crédits du Tourisme.

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La Commission a ensuite examiné les crédits des collectivités territoriales.

M. Marc Laffineur, Rapporteur spécial, a indiqué que les concours de l'État aux collectivités territoriales devraient s'élever, en 2005, à 61,4 milliards d'euros, en hausse de 3 % par rapport à 2004 où ils étaient de 59,6 milliards d'euros.

La réforme de la dotation forfaitaire des communes vise à rendre plus lisible la répartition de cette dotation, par l'introduction de deux critères objectifs de répartition : la population et la superficie. À compter de 2005, la dotation forfaitaire de chaque commune comprendrait 3 composantes principales : une dotation de base calculée en fonction de l'importance de la population, une dotation proportionnelle à la superficie, égale à 3 euros par hectare en 2005 et, le cas échéant, un complément de garantie, destiné à assurer que chaque commune perçoive en 2005 un montant au moins égal à sa dotation forfaitaire 2004. Pour 2005, le projet de loi de finances proposait que la dotation de base soit égale, pour chaque commune, au produit de sa population par un montant variant linéairement de 50 à 125 euros par habitant en fonction croissante de sa population. L'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à resserrer cet écart de 60 à 120 euros par habitant.

La réforme propose par ailleurs de nouvelles règles de répartition des dotations de péréquation communale : dotation nationale de péréquation, dotation de solidarité rurale, dotation de solidarité urbaine. Il s'agirait pour ces trois dotations de substituer au potentiel fiscal un indicateur plus complet prenant en compte, outre le potentiel fiscal, la dotation forfaitaire compte tenu, d'une part, de ses modes de calcul et d'attribution, parfaitement prévisibles et automatiques et, d'autre part, de l'importance des masses concernées. Les modifications proposées, s'agissant de la dotation nationale de péréquation, consistent à atténuer les effets de la substitution du potentiel financier au potentiel fiscal.

Le Gouvernement propose de cibler la croissance de la DSR « bourgs-centres » sur les communes situées en zone de revitalisation rurale (ZRR) en multipliant leur attribution par un coefficient de majoration égal à 1,5. L'Assemblée nationale a abaissé ce coefficient à 1,15 afin de permettre une répartition de la croissance de la DSR « Bourgs-centres » plus équitable entre tous les bourgs-centres. Pour la DSU, le projet de loi pour la cohésion sociale prévoit d'accroître les montants destinés aux communes comprenant des zones urbaines sensibles (ZUS) et des zones franches urbaines (ZFU). Cet objectif s'accompagnerait d'une croissance de la DSU de 120 millions d'euros par an pendant cinq ans.

L'article 29 du projet de loi de finances proposait pour 2005 le gel de la dotation forfaitaire à son niveau 2004, afin de dégager les meilleures marges possibles pour la péréquation. L'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à fixer le taux de croissance de la dotation forfaitaire à 1%.

Comme pour la DGF des communes, la réforme de la dotation forfaitaire des départements vise à mieux prendre en compte la population. Elle aboutirait à distinguer deux composantes au sein de la dotation forfaitaire des départements : une dotation de base égale à 70 euros par habitant et un complément de garantie destiné à compenser la perte subie, par certains départements, du fait de ce nouveau mode de calcul.

Il est proposé d'améliorer la péréquation départementale à travers deux mesures principales : la substitution au potentiel fiscal d'un critère de potentiel financier qui prend en compte, outre le potentiel fiscal élargi aux droits de mutation à titre onéreux, la dotation forfaitaire et la dotation de compensation et la réorganisation de l'architecture des dotations de péréquation départementale autour d'une composante urbaine, la « dotation de péréquation urbaine », et d'une composante rurale, l'actuelle dotation de fonctionnement minimale, sous une forme élargie.

Seraient considérés comme « urbains » les départements dont le taux d'urbanisation est supérieur à 65 % et la densité supérieure à 100 habitants par kilomètre carré. L'éligibilité des départements urbains à la dotation de péréquation urbaine serait déterminée en fonction du potentiel financier. Le montant de dotation attribué à chaque département serait ensuite déterminé en fonction de sa population et d'un indice synthétique de ressources et de charges. Les 32 départements retenus comme urbains seraient éligibles.

La dotation de fonctionnement minimale serait réservée aux départements non urbains. L'éligibilité à la DFM serait ensuite déterminée en fonction d'un critère souple de potentiel financier permettant de rendre éligibles en 2005 tous les départements non urbains : les 24 bénéficiaires actuels, auxquels viendraient s'ajouter 40 nouveaux départements éligibles. Le projet de loi de finances propose d'instaurer une garantie de progression minimale de 6% des attributions perçues au titre de la DFM, assortie d'un mécanisme d'écrêtement des attributions enregistrant parallèlement les plus fortes progressions, supérieures à 30%, la première ayant vocation à être financée par le second. L'Assemblée nationale a adopté un amendement à l'article 31 visant à ramener ce plafond à 20%.

S'agissant de la DGF des groupements de communes, le projet de loi de finances prévoit des mesures favorables aux communautés de communes. Le taux de croissance de la dotation par habitant des communautés de communes serait désormais compris entre 120% et 140% du taux retenu pour les communautés d'agglomération, dont il faut rappeler qu'il doit lui-même évoluer au moins comme l'inflation. En outre, l'écrêtement subi par les communautés de communes à fiscalité additionnelle lorsque leur dotation d'intercommunalité augmente de plus de 20% serait supprimé. Enfin, il est prévu de supprimer la notion de dépenses de transfert dans le calcul du coefficient d'intégration fiscale (CIF) des communautés de communes à fiscalité additionnelle.

La réforme proposée permettrait par ailleurs de renforcer la prévisibilité de la dotation d'intercommunalité à travers trois mesures : la simplification du CIF, l'augmentation du poids de la dotation de base et l'aménagement des règles d'éligibilité à la garantie liée au fait d'atteindre un certain niveau de CIF en valeur relative. Il est prévu d'attribuer désormais cette garantie aux EPCI qui atteignent un certain niveau de CIF en valeur absolue.

Le Gouvernement propose de reconduire le contrat de croissance et de solidarité selon des modalités d'indexation identiques à celles appliquées en 2004, à savoir le taux d'inflation de l'année à venir et 33% du taux de croissance de l'année en cours. Le taux d'indexation du contrat de croissance et de solidarité s'établirait en 2005 à 2,625 %. La reconduction du contrat de croissance et de solidarité se traduirait ainsi par une progression de 1.223 millions d'euros de l'enveloppe normée dont le montant total s'établirait à 43.903 millions d'euros.

Compte tenu des mécanismes d'indexation des dotations composant l'enveloppe normée, le respect en 2005 de la norme de progression du contrat implique une baisse de la DCTP de 10,64%.

S'agissant des dotations sous enveloppe, le taux de progression de la DGF résulte du taux d'évolution des prix prévu pour 2005, estimé à 1,8% et de la moitié du taux d'évolution du PIB en volume de l'année 2004, estimé à 2,5%. Il est appliqué au montant de la DGF 2004 « recalée ». Le montant prévisionnel de la DGF pour 2005 s'établit dès lors à 37.948,877 millions d'euros, en hausse de 3,29 % par rapport au montant ouvert en loi de finances initiale pour 2004. Plusieurs dotations de l'Etat aux collectivités territoriales sont indexées sur le taux d'évolution de la DGF. Tel est le cas de la dotation spéciale instituteurs, de la dotation élu local, de la DGD, de la DGD « Corse », de la DGD « taxe professionnelle » et du nouveau prélèvement sur recettes, destiné à compenser aux fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP) la suppression de la part « salaires » de la taxe professionnelle. La dotation globale d'équipement des départements et des communes est indexée sur la formation brute de capital fixe (FBCF) des administrations publiques dont le taux de croissance est évalué à 3 % en 2005. La dotation régionale d'équipement scolaire et la dotation départementale d'équipement des collèges sont également indexées sur la formation brute de capital fixe des APU.

S'agissant des dotations hors enveloppe en 2005, la dotation inscrite au FCTVA est fixée à 3.791 millions d'euros, en hausse de 2,18 %. Le prélèvement au titre des amendes forfaitaires de la police de la circulation s'élèverait à 560 millions d'euros, en hausse de 30,23 %, par rapport au montant des crédits ouverts en loi de finances pour 2004. La dotation de développement rural s'élèverait à 120 millions d'euros, en hausse de 3 %. Les subventions de fonctionnement des différents ministères s'inscrivent en légère hausse (+ 1,5 %), pour s'établir à 902 millions d'euros. Les subventions d'équipement des différents ministères seraient également en hausse (+ 1,4 %) et s'élèveraient à 1.006 millions d'euros. Les compensations de diverses exonérations relatives à la fiscalité locale versées par l'État s'établiraient, en hausse de 14,1 % par rapport à 2004, à 2.485 millions d'euros. Les compensations de dégrèvements législatifs, essentiellement imputables à la compensation des dégrèvements de taxe professionnelle, atteindraient 8.625 millions d'euros en hausse de 13,4 %. Enfin, la compensation au titre de la réduction pour embauche et investissement de la DCTP et la compensation des pertes de bases de taxe professionnelle s'élèveraient respectivement à 78 et 138 millions d'euros.

Le financement des transferts de compétences prévus par la loi relative aux libertés et aux responsabilités locales sera assuré par le transfert aux collectivités territoriales de ressources fiscales dynamiques, constituant des ressources propres au sens de la loi organique relative à l'autonomie financière des collectivités territoriales. Dès 2005, les régions bénéficieront de l'affectation d'une part de la TIPP pour un montant de près de 400 millions d'euros. Ce montant sera augmenté dans les prochaines lois de finances au rythme de l'entrée en vigueur effective des transferts de compétences et de charges entre l'État et les régions. À compter de 2006, le produit de TIPP perçu par chaque région devrait être calculé sur une assiette régionale. À compter de 2007, sous réserve de l'accord définitif de nos partenaires européens, les régions pourraient être autorisées à en moduler le taux, à la hausse comme à la baisse, à l'intérieur d'une certaine limite. Par ailleurs, les départements bénéficieront dès 2005 du transfert d'une part de la taxe sur les conventions d'assurance contre les risques relatifs aux véhicules terrestres à moteur, pour un montant de 126 millions d'euros. Comme pour les régions, le montant de ce transfert d'impôt progressera significativement dans les années ultérieures en fonction de l'entrée en vigueur des transferts. Une assiette départementale de cette taxe devrait être définie et les départements devraient être autorisés à en moduler le taux à l'horizon 2007.

S'agissant de la mise en œuvre de la loi organique du 1er août 2001, les crédits inscrits au budget du ministère de l'intérieur au titre des collectivités locales seraient regroupés au sein de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Cette mission regroupe les crédits de l'agrégat 21 ainsi que les crédits afférant aux coûts de fonctionnement de la politique de l'État envers les collectivités territoriales, retracés dans l'agrégat 31. Conformément aux souhaits exprimés par la Représentation nationale cette mission comportera 4 programmes : « Concours financiers aux communes et groupements de communes », « Concours financiers aux départements », « Concours financiers aux régions » et « Concours spécifiques et administration ». Chacun de ces programmes aura le même responsable : le directeur général des collectivités locales. Cette nomenclature permettra au Parlement d'exercer un contrôle détaillé de l'emploi des crédits qu'il aura votés pour chaque niveau de collectivité. Leur regroupement au sein d'une même mission autorisera le Parlement à exercer son droit d'amendement.

Les trois premiers programmes comportent deux actions principales : aide à l'équipement et dotation générale de décentralisation. Deux indicateurs sont associés à l'action « aide à l'équipement » pour les départements et les communes : l'évolution du volume de leurs investissements réalisés grâce aux subventions accordées (DGE et DDR pour les communes, DGE pour les départements), et le taux moyen de subvention. Aucun indicateur n'est fixé pour les régions. On peut regretter que ces indicateurs ne puissent être améliorés que par un accroissement des moyens budgétaires. Or, selon la loi organique, ces indicateurs ont davantage vocation à permettre d'évaluer la capacité des gestionnaires à mieux utiliser les moyens dont ils disposent.

Le programme « concours spécifiques et administration » regroupe les aides exceptionnelles dont les modalités d'attribution diffèrent sensiblement de celles des autres dotations ainsi que les moyens affectés à la DGCL pour assurer ses missions. Il comprendra deux actions : aides exceptionnelles aux collectivités territoriales et administration des relations avec les collectivités territoriales. Dans cette action, les objectifs de la DGCL sont les suivants : réduire les délais d'élaboration des textes d'application relevant de sa responsabilité, améliorer l'élaboration de la norme avec les organismes consultatifs, améliorer l'information sur la décentralisation par un accroissement du taux de réponse aux questions des élus locaux et des pouvoirs publics ainsi qu'une augmentation du volume des informations mises en ligne et des visites des sites internet de la DGCL.

Il aurait été regrettable de ne pas fixer des objectifs et des indicateurs de performance aux prélèvements sur recettes qui représentent environ les trois quarts des concours de l'État aux collectivités territoriales. Ils feront donc l'objet de fiches « objectifs » et « indicateurs » distinctes mais complémentaires des projets annuels de performance. Les concours financiers aux communes, aux départements et régions seront évalués au regard de l'objectif de péréquation. Les trois indicateurs retenus sont les volumes financiers relatifs consacrés explicitement à la péréquation ; le rapport entre le niveau de dotations par habitant versées par l'État aux communes les plus pauvres et le niveau de dotations par habitant servi en moyenne par l'État  et une étude quinquennale évaluant l'efficacité des dotations en termes de réduction des inégalités.

M. Jean-Pierre Gorges a déploré l'actuel enchevêtrement des compétences entre niveaux de collectivités, auxquels se superposent des financements croisés. Il n'est pas rare, par exemple, que la fiscalité départementale augmente afin de financer des compétences qui sont normalement du ressort des communes, telles que le sport ou la culture. Dans le même temps, les communes, qui se retrouvent parfois en concurrence sur ces actions avec les départements, ne bénéficient que de très peu de redistribution départementale. Il faut mettre un terme à cette situation, qui déroute tous les contribuables locaux.

M. Didier Migaud a indiqué que le groupe socialiste voterait contre les crédits des collectivités territoriales, non pas tant au regard de l'évolution des dotations que de la politique générale menée par le Gouvernement et sa majorité. De grandes politiques publiques sont remises en cause, comme le montre l'exemple des contrats de Plan État-régions ; il est souhaitable que la mission d'information qui sera créée sur ce thème apporte tous les éclaircissements nécessaires. Quant à la récente loi relative aux responsabilités locales, elle aura de lourdes conséquences sur les budgets locaux. Elle a apporté de la complexité au lieu de démêler l'enchevêtrement des compétences. L'autonomie financière soi-disant garantie par la Constitution est un leurre. La révision constitutionnelle, sur ce point, n'avait d'ailleurs d'autre objectif que celui de mettre un terme à une jurisprudence du Conseil constitutionnel protectrice de l'autonomie des collectivités territoriales ; l'actuel Premier ministre ne disait pas autre chose lorsqu'il était sénateur. L'habillage proposé aujourd'hui avec la réforme des dotations offre d'intéressantes hypothèses de croissance. Mais qu'en sera-t-il en réalité si l'inflation et le PIB n'évoluent pas selon le rythme prévu ? 2005 sera une année difficile pour les collectivités territoriales, même lorsque celles-ci s'efforcent de maîtriser leurs dépenses. La hausse de la fiscalité destinée à financer les contraintes nouvelles qui pèsent sur la collecte des ordures ménagères est un exemple parmi d'autres, et l'externalisation n'y change rien. Les dépenses des collectivités croissent plus vite que leurs recettes et les récents transferts de compétence n'ont fait qu'aggraver cette situation.

M. Nicolas Perruchot a estimé que la gestion des communes devenait de plus en plus difficile : il n'y a pas de prime à l'effort. Un maire soucieux de bonne gestion n'est pas récompensé. En outre, le poids de la masse salariale dans le budget communal de fonctionnement, qui atteint 55 % à Blois, par exemple, limite les marges de manœuvre. Le développement de l'intercommunalité a eu pour effet d'accroître les dépenses locales, sans que la population en comprenne la raison. La simplification de la D.G.F. va dans le bon sens, car actuellement cette dotation demeure trop complexe dans son mécanisme, en particulier pour les communes rurales. S'agissant enfin de la réforme de la taxe sur le foncier non bâti récemment annoncée par voie de presse, n'aurait-elle pas dû, à tout le moins, faire l'objet d'une consultation préalable de la commission des Finances ?

Le Président Pierre Méhaignerie a souhaité savoir ce que le budget des collectivités territoriales prévoyait pour encourager une gestion locale vertueuse. Il ne s'agit pas d'accuser les élus locaux d'une gestion dispendieuse ; la question cruciale est de savoir à quel rythme il convient de faire face aux besoins. La tentation est grande d'accroître trop rapidement la dépense. Du côté des recettes, il faut noter que certaines évoluent plus vite que la croissance : les droits de mutation et la taxe professionnelle, du fait de son mode de prélèvement qui conduit à une hausse de 2 points supérieure à l'inflation. Le Rapporteur spécial est-il satisfait du mode de calcul du coefficient d'intégration fiscale, qui modifie substantiellement les dotations d'intercommunalité ? Le transfert de dotations de solidarité aux communes est au moins aussi important que l'intégration fiscale.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, s'est félicité des modifications apportées par l'Assemblée, en première lecture de la première partie du projet de loi de finances, aux dispositions relatives aux collectivités territoriales, dans la ligne des préconisations du Comité des finances locales. Actuellement, la dotation de base représente 15 % de la dotation d'intercommunalité de chaque catégorie de groupement, et la dotation de péréquation 85 %. Le rééquilibrage souhaité par le Comité des finances locales serait opéré : la dotation de base, dont le calcul fait intervenir la population et le CIF représenterait désormais 30 % de la dotation d'intercommunalité, la dotation de péréquation, dont le calcul fait intervenir en outre le potentiel fiscal, 70 %.

Citant l'exemple de sa propre communauté d'agglomération, M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a indiqué que la D.G.F. qu'elle percevrait serait l'an prochain en baisse de 15 % car elle dispose aujourd'hui d'une importante dotation de solidarité et d'un faible potentiel fiscal. En second lieu, le numérateur du coefficient d'intégration fiscale est corrigé des dépenses de transfert. Cette correction vise à prévenir les « intercommunalités d'aubaine ». La prise en compte parmi les dépenses de transfert de l'attribution de compensation ne pose pas de problème. En revanche, la prise en compte de l'intégralité de la dotation de solidarité communautaire mérite d'être réexaminée. Les simulations actuellement disponibles, qui ne l'étaient pas lors du débat de la première partie, font apparaître des variations critiquables du CIF. La réflexion doit donc se poursuivre, même si, s'agissant d'une enveloppe globale constante, il est inévitable que certains gagnent et que d'autres perdent.

M. Jean-Pierre Balligand a plaidé pour une stabilisation juridique et financière de l'intercommunalité. Un effort de stabilisation des modalités de calcul de la dotation d'intercommunalité, et donc du CIF, est nécessaire. La montée en puissance de l'intercommunalité conduit à transférer aux EPCI d'importantes compétences, par exemple dans le domaine de l'assainissement, ce qui entraîne des variations importantes du CIF. Il est primordial, en cette matière, d'éviter les à-coups trop importants, sous peine de déstabiliser les EPCI qui poursuivent des investissements de long terme. Le risque de mécontentement local est fort. La majorité, comme l'opposition, a tout intérêt à résoudre les contradictions existantes entre communes et EPCI au sujet de leurs champs de compétence respectifs.

M. Marc Laffineur, Rapporteur spécial, a apporté, en réponse, les précisions suivantes :

- la réforme du coefficient d'intégration fiscale paraît satisfaisante, même si les simulations de son application ne sont pas toutes disponibles. Il y aura donc forcément des gagnants et des perdants ;

- une certaine stabilité des règles de calcul de la dotation d'intercommunalité est, certes, souhaitable. Cependant, la réforme proposée a fait l'objet d'un consensus au sein du Comité des finances locales ;

- il ne faut pas récompenser la dépense locale. À cet égard, il s'agit de se montrer vigilants quant à l'impact potentiel du projet de loi de cohésion sociale sur la dotation de solidarité urbaine. Cela dit, les collectivités territoriales doivent assumer les choix effectués ;

- la réduction des dépenses de personnel dans une commune est possible. Citant la commune dont il est maire, M. Marc Laffineur, Rapporteur spécial, l'a même jugée indispensable ;

- l'opposition n'est pas fondée à critiquer les actuels transferts de compétences financés à l'euro près, alors que les réformes de l'allocation personnalisée d'autonomie, des 35 heures et des services départementaux d'incendie et de secours ont durablement grevé les budgets locaux ;

- l'enchevêtrement des compétences est un problème patent qui obère la transparence de la gestion locale pour les contribuables.

M. Jean-Pierre Gorges a fait valoir que l'outil de la fiscalité propre était notoirement sous-employé. La culture, les routes, le sport devraient être financés par ce biais. L'évolution à la baisse de la fiscalité locale est possible. M. Jean-Pierre Gorges a cité l'exemple de la commune dont il est maire à l'appui de cette affirmation. Le financement de la collecte des ordures ménagères, qui repose sur de la fiscalité affectée, ne pose pas de difficultés. En revanche, une réforme du « versement transport » est souhaitable. En effet, son taux est plafonné à 0,6 % pour les communautés d'agglomération comprenant entre 10.000 et 100.000 habitants, mais cette fourchette de population est beaucoup trop large. Le versement transport devrait pouvoir être modulé à l'intérieur de cette fourchette. Par ailleurs, il existe une erreur de construction en matière de fiscalité intercommunale, du fait de l'absence d'actualisation de l'attribution de compensation, qui oblige les communes à augmenter le taux de leurs propres impôts.

M. Didier Migaud a donné acte à M. Jean-Pierre Gorges, concernant la question des ordures ménagères, du fait qu'il ne contestait pas l'accroissement des charges. Les simulations de la réforme du coefficient d'intégration fiscale aujourd'hui disponibles sont inquiétantes puisqu'elles font apparaître ici une baisse de 10 %, là une hausse de 100 %. Il serait souhaitable d'obtenir des simulations plus complètes que celles dont dispose déjà la Commission.

M. Jean-Pierre Balligand a souhaité que personne ne se départe de son honnêteté intellectuelle. Il est un fait que l'État se désengage des contrats de plan et il faut bien que les collectivités l'assument. L'exemple du patrimoine classé est lui aussi éclairant : ne disposant plus de fonds européens pour faire face à ses engagements, l'État se tourne aujourd'hui vers les départements. De même, la décentralisation du RMI et la création du RMA ont-elles induit un manque à gagner de l'ordre de 200 millions d'euros pour les départements. Au-delà, il serait malhonnête de prétendre que les transferts d'aujourd'hui alourdissent la fiscalité de demain. Le cycle électoral joue un rôle majeur et funeste à cet égard. La majorité actuelle a fait une erreur en ne revenant pas sur la décision de renouveler les conseils généraux par moitié tous les trois ans, car cette situation incite les départements à alourdir leur budget dès 2005, et non pas en 2006, pour ne pas compromettre les échéances électorales de 2007.

M. Marc Laffineur, Rapporteur spécial, a jugé que la cause profonde de l'augmentation des budgets locaux résidait dans un accroissement des dépenses non accompagné de la suppression d'une quelconque charge. Une gestion attentive permet de baisser les taux des impôts locaux.

Le Président Pierre Méhaignerie a prédit que le combat politique local serait âpre car les élus n'ont pas oublié la mise en place de l'allocation personnalisée d'autonomie, des 35 heures et des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS). Par ailleurs, il faut prendre conscience des conséquences néfastes de l'alourdissement des budgets locaux en termes d'attractivité du territoire, mais aussi de surcroît d'inquiétude pour l'électeur et pour le consommateur. Puis il a interrogé le Rapporteur spécial sur un thème d'enquête éventuel à soumettre à la Cour des comptes.

M. Marc Laffineur, Rapporteur spécial a évoqué la question des normes imposées aux collectivités territoriales, notamment en matière d'installations sportives.

La Commission a ensuite adopté, sur la proposition du Rapporteur spécial, les crédits des collectivités territoriales.

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La Commission ensuite examiné, sur le rapport de M.  Hervé Novelli, Rapporteur spécial, les crédits de l'industrie.

M. Hervé Novelli, Rapporteur spécial, a indiqué que le budget de l'industrie se caractérise par une relative stabilité par rapport à 2004, la dotation augmentant de 2,5 %. Tel qu'il apparaît dans le projet de loi de finances, il s'élève à 2,2 milliards d'euros en crédits de paiement. Ce budget privilégie les actions en faveur de l'innovation et de la compétitivité des entreprises. Toutefois, les crédits consacrés aux restructurations industrielles y conservent une place importante.

La stabilité d'ensemble des crédits de l'industrie cache des évolutions contrastées. Trois grandes orientations ressortent du budget pour 2005.

Les crédits consacrés à la politique de l'énergie et des matières premières sont stables. Ils s'élèvent à 706 millions d'euros.

Dans ce contexte, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME)  bénéficie d'une augmentation des crédits en provenance du budget de l'industrie de 3 % en 2005. Il s'agit d'un rattrapage : la dotation de fonctionnement a très faiblement évolué en cinq ans, alors que l'activité de l'établissement a fortement crû. Ainsi, la subvention de fonctionnement passe de 15 à 16 millions d'euros, et la subvention d'investissement est maintenue à hauteur de 31 millions d'euros.

Le rapporteur spécial a tenu à insister sur la situation de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), dont les moyens sont renforcés pour la troisième année consécutive, dans le contexte de l'accélération de l'ouverture à la concurrence des marchés de l'électricité et du gaz. Le budget de la CRE progresse de 12 %, soit une dotation de 15 millions d'euros. Mais cette subvention demeure inférieure aux besoins. En effet, les missions de la CRE s'élargissent avec le mouvement de libéralisation des marchés de l'électricité et du gaz, car cette libéralisation entraîne un besoin accru d'encadrement du secteur. La CRE doit disposer de moyens suffisants pour assurer sa mission. Or, la comparaison entre les organismes européens équivalents montre que ceux des pays autres que la France disposent de moyens plus importants. Le président de la CRE demande donc davantage de ressources. Une discussion devrait être engagée sur l'opportunité d'attribuer à la CRE une taxe affectée, comme il en existe dans beaucoup de pays européens.

En ce qui concerne le secteur de l'électricité, la situation d'EDF est préoccupante. Une commission nommée par le ministre des Finances, dirigée par M. Marcel Roulet, doit remettre un rapport le 15 novembre sur le projet industriel et financier d'EDF. Il est regrettable et paradoxal que cette commission, qui doit évaluer les besoins financiers d'EDF, et qui compte quelques parlementaires, ne compte aucun membre de la Commission des finances.

Quant à la subvention à l'Institut français du pétrole (IFP), elle diminue de 4 %, et, surtout, elle est inférieure au montant que l'État s'est engagé à verser en signant le contrat d'objectifs avec l'Institut. Jusqu'en 2002, l'IFP était financé par une taxe parafiscale. Depuis l'exercice 2003, il bénéficie d'une dotation budgétaire. Le contrat prévoit que celle-ci sera de 200 millions chaque année de 2003 à 2005. Or, seulement 192 millions d'euros sont inscrits pour 2005. C'est un point important, car il s'agit là de la parole de l'État. Le Gouvernement doit faire en sorte, notamment par le biais de restructurations dans les filiales de l'IFP, de trouver des ressources supplémentaires pour cet organisme.

Enfin, les moyens affectés au Commissariat à l'énergie atomique (CEA) sont maintenus, à hauteur de 419 millions d'euros, sachant que la subvention de l'État représente 55 % des ressources du CEA, dont un peu moins de la moitié en provenance du budget de l'industrie.

Les crédits consacrés au soutien à l'innovation et à la compétitivité des entreprises seront renforcés, ce qui est important, car l'innovation est un facteur clé de la croissance, et la position technologique de la France, depuis quelques années, est en retrait. Un budget global de 648 millions d'euros est prévu pour financer les actions de soutien au développement des entreprises.

La position de l'agence nationale pour la valorisation de la recherche (ANVAR), au centre des dispositifs de soutien à l'innovation, est renforcée. Depuis cette année, elle gère l'ensemble de ces aides. En 2005, elle va recevoir les aides du réseau de recherche sur les technologies pétrolières et gazières.

Dans le cadre de la simplification des dispositifs d'aide aux PME, l'ANVAR et la Banque de développement des PME (BDPME) vont être regroupées dans une Agence des PME. Le Rapporteur spécial a souligné qu'il est favorable aux initiatives qui permettent de rationaliser l'organisation administrative et économique, et de simplifier la vie des entreprises. Pourtant cette rationalisation reste inachevée. En effet, il aurait été plus judicieux de fusionner les délégations régionales de l'ANVAR avec le réseau des DRIRE, ce que le Rapporteur spécial a déjà proposé l'an dernier. Ainsi, l'ANVAR pourrait s'appuyer sur le solide réseau des DRIRE, lesquelles gèrent déjà de nombreux dispositifs de soutien au développement des PMI. Le Rapporteur spécial poursuivra le dialogue avec le ministre de l'industrie à ce sujet.

La dotation d'intervention de l'ANVAR en faveur de l'innovation augmente de 10 %, et atteint 90 millions d'euros. Les crédits budgétaires destinés au soutien direct de l'innovation progressent globalement de 9 %. Ils s'établiront à 171 millions d'euros, dont 158 millions pour le seul fonds de compétitivité des entreprises.

Les crédits destinés à la compensation de l'allégement des cotisations sociales patronales des jeunes entreprises innovantes augmenteront de 10 millions d'euros et seront portés, en 2005, à 35 millions d'euros. Cette aide, créée en 2004, s'intégrera désormais dans le nouveau dispositif des pôles de compétitivité. Quant aux autres formes d'aides aux PMI, qui sont gérées par les DRIRE, elles diminuent de 15 % en 2005. La dotation aux écoles des mines est maintenue à 107 millions d'euros.

La forte baisse de la dotation aux centres techniques industriels, de l'ordre de 40 %, est la conséquence de la débudgétisation progressive des subventions allouées aux CTI et aux centres professionnels de développement économique (CPDE). Ces organismes sont désormais financés par des taxes affectées. Il faut se féliciter qu'une solution pérenne à leur financement ait été trouvée, car se sont des organismes très utiles aux entreprises. Dans la loi du 9 août 2004 pour le soutien à la consommation et à l'investissement a été retenu l'amendement selon lequel les CPDE exercent une mission de service public : elles peuvent désormais percevoir une taxe affectée, comme les CTI. Il était important de trouver une solution, faute de quoi les CPDE étaient menacés de disparition.

Enfin, la poursuite de l'accompagnement des restructurations industrielles constitue la troisième orientation importante de ce budget. Les crédits sont en augmentation de 9 %.

Les crédits consacrés à la revitalisation des bassins industriels sinistrés sont en légère baisse, et les aides à la construction navale passent de 70 millions d'euros en 2004, à 21 millions en 2005 : cette baisse résulte de l'arrêt des aides à la commande. Les crédits restants permettent d'honorer les engagements pris.

En revanche, les moyens consacrés à la gestion de « l'après-mines » augmentent de 24 %, passant de 527 millions d'euros à 654 millions d'euros. C'est la prise en charge par l'agence nationale pour la garantie des droits des mineurs, nouvellement créée, qui explique l'augmentation des crédits. L'État garantira, à travers cet établissement public, l'ensemble des droits sociaux des mineurs, après la disparition des entreprises minières et ardoisières, à l'exception de ceux qui relèvent du régime spécial de sécurité sociale. Les ressources de la nouvelle agence seront principalement constituées d'une subvention de l'État, de 546 millions d'euros. Cette dotation provient, à hauteur de 422 millions d'euros, d'un transfert de la dotation aux Charbonnages de France. Le reste de la dotation (122 millions d'euros) est une mesure nouvelle, par laquelle l'État prend en charge les pensions de retraites anticipées des mineurs, qui auparavant étaient assumées par les Charbonnages. Toutefois, sachant que Charbonnages est une entreprise en déficit structurel dont l'État accompagne la cessation de l'exploitation, il ne s'agit pas réellement d'une nouvelle charge pour le budget de l'État.

Concernant les crédits consacrés aux restructurations industrielles, le Rapporteur spécial a rappelé que la Cour des comptes avait critiqué le faible taux de consommation des crédits. Ces crédits n'ont d'ailleurs pas vraiment leur place au sein du budget du ministère de l'Industrie : ils seraient davantage à leur place au ministère des Affaires sociales.

Les grandes lignes du budget font néanmoins apparaître une politique volontariste de recentrage des crédits sur les dépenses en faveur de l'innovation et de la compétitivité.

Toutefois la gestion budgétaire doit suive les priorités affichées dans le projet de loi de finances. Or, on remarque que ce sont les organismes qui concourent à la recherche et à l'innovation qui font chaque année l'objet des mesures de régulation les plus importantes. On arrive à ce paradoxe, faute de souplesse dans les règles de gestion budgétaire. Il est souhaitable que la loi organique relative aux lois de finances mette un terme à ces contradictions. Le CEA et l'IFP voient chaque année une part significative de leurs dotations gelées ou annulées ; en 2004, 21 millions d'euros sont gelés sur le budget de l'IFP, et 34 millions sur celui du CEA. La CRE fait aussi partie des organismes victimes des gels.

En revanche, chaque année, les crédits des restructurations industrielles (chapitre 64-96) sont mal consommés (entre 50 et 70 % selon les années).

Le montant de la soulte que les industries électriques et gazières doivent verser à la caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) a été réévalué afin de satisfaire les demandes de la CNAV, pour que le régime général ne soit pas lésé. Cependant, cette soulte va être en partie financée par une taxe sur le transport et la distribution de l'électricité : c'est donc l'usager qui va payer les avantages de retraite des salariés des IEG. L'équité implique que l'on engage la réforme des régimes spéciaux qui n'a pas encore été menée. Le mode de financement de la soulte est d'autant plus important qu'il crée un précédent pour les autres régimes spéciaux de retraite du secteur public.

La présentation des crédits de l'industrie selon l'architecture prévue par la LOLF se décline en six programmes. Quatre programmes se trouvent dans la mission « Développement des entreprises », qui dépend entièrement du ministère de l'économie. Deux programmes appartiennent à la mission « Recherche et enseignement supérieur ». Les crédits du CEA, de l'IFP et une partie des crédits de l'ANVAR et de l'école des mines se retrouvent dans cette mission Recherche. Le programme « Passifs financiers miniers » fonctionnera dès 2005, puisqu'il fera l'objet d'une expérimentation.

L'ensemble des crédits de fonctionnement des DRIRE, ainsi que leurs crédits d'intervention, sont regroupés dans le même programme : « Contrôle et prévention des risques technologiques et développement industriel », ce qui constitue un progrès.

Les opérateurs du secteur, ou leur tutelle, sont placés dans des programmes séparés des régulateurs : par exemple, la CRE se trouve dans le programme « Régulation et sécurisation des échanges », alors que la tutelle d'EDF et GDF se trouve dans le programme « développement des entreprises ». Cette séparation est compréhensible, puisqu'elle vise à distinguer des fonctions et des intérêts divergents - la séparation juridique des opérateurs et des régulateurs correspond à la réglementation communautaire. Toutefois, il va falloir rester vigilants quant aux modalités du contrôle parlementaire, notamment au sujet de la répartition des programmes entre les rapports spéciaux.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général a remercié le Rapporteur spécial, pour sa présentation des crédits de l'industrie en rappelant leur caractère essentiel. Il s'est interrogé sur la pertinence du rapprochement opéré entre l'Agence nationale de valorisation de la recherche (ANVAR) et la Banque de développement des petites et moyennes entreprises (BDPME) au sein d'une Agence des PME. La volonté de simplification constitue la plupart du temps un objectif louable, cependant toutes les PME ne sont pas confrontées de la même façon à la problématique de l'innovation et des nouvelles technologies. De nombreuses PME se développent dans des métiers traditionnels et ne méritent pas moins l'attention des pouvoirs publics que les PME dites « innovantes ». Par ailleurs, il avait été envisagé d'associer à ce regroupement l'Agence pour la création d'entreprise.

M. Hervé Novelli, Rapporteur spécial, a précisé que cette idée avait été abandonnée. Il a exprimé des réserves s'agissant du concept d'entreprise « innovante ». En effet, une entreprise est, par définition, innovante, faute de quoi elle disparaît. La distinction entre les entreprises dites « innovantes » et les autres, qui fonde l'existence de dispositifs spécifiques dérogatoires en faveur des premières, a donc peu de sens du point de vue économique. S'agissant de la question du rapprochement opéré entre l'ANVAR et la BDPME, les interrogations du Rapporteur général sont tout à fait fondées. Cependant, il convient de noter que ce rapprochement ne s'apparente pas à une fusion, les deux organismes restant distincts au sein de l'Agence des PME qui prendra la forme d'une holding dotée d'un statut d'établissement public industriel et commercial. Un rapprochement entre les DRIRE et l'ANVAR aurait sans doute été plus pertinent, dans la mesure notamment où l'agence, comme les DRIRE, déploie ses activités essentiellement sur une base régionale. Il conviendra donc d'interroger le ministre des Finances sur cette question. L'objectif de simplification est compréhensible. Il ne doit cependant pas conduire à regrouper des organismes entre lesquels n'existe pas de véritable synergie. La proposition, déjà formulée, de rapprochement entre les DRIRE et l'ANVAR, n'a pas été suivie d'effet.

M. Jean-Pierre Gorges, après avoir souligné l'importance de ce budget, s'est interrogé sur la contribution de ses crédits à l'écart de croissance constaté entre la France et la zone euro.

M. Hervé Novelli, Rapporteur spécial, a indiqué qu'en matière de soutien à la croissance, les dispositifs destinés à la recherche et à l'innovation ont un rôle particulièrement essentiel à jouer. À cet égard, on estime qu'aux États-Unis, les dépenses de recherche et d'innovation contribuent à la moitié de la croissance enregistrée.

Le Président Pierre Méhaignerie a souhaité que les crédits consacrés aux restructurations industrielles fassent l'objet d'une meilleure utilisation. Il serait opportun de les regrouper avec les crédits destinés à lutter contre les délocalisations et les crédits que le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale propose d'affecter à la formation professionnelle. L'ensemble de ces crédits, groupés, devrait permettre de financer un projet plus cohérent, plus ambitieux, qui favorise la flexibilité tout en répondant plus efficacement aux inquiétudes des salariés concernés par les restructurations et délocalisations, notamment au travers de dispositifs de sécurisation de leur parcours professionnel. Les crédits devraient être gérés de façon déconcentrée, par exemple par le trésorier payeur général.

M. Hervé Novelli, Rapporteur spécial a rappelé qu'il avait lui-même émis des observations dans ce sens, en s'interrogeant notamment sur la gestion des crédits affectés aux restructurations industrielles, compte tenu de la modicité de leur montant, et de la sous-utilisation qui les caractérise. Dans l'état actuel, ces crédits ne sont pas en mesure d'impulser une politique suffisamment ambitieuse et efficace. Il serait dès lors opportun de les regrouper avec certains crédits gérés par le ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale ayant un objectif proche. Une telle mesure impliquerait d'identifier un responsable pour ces crédits. Une gestion de ces crédits sur une base plus décentralisée et, partant, plus proche des réalités locales serait souhaitable.

Le Rapporteur spécial a rappelé qu'il avait, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2003, proposé des amendements visant à diminuer ces crédits ou à les transférer sur une autre ligne budgétaire. Ces amendements ont été rejetés.

Le Président Pierre Méhaignerie, après s'être déclaré en accord avec une telle analyse, a souhaité connaître les propositions du Rapporteur spécial, s'agissant de pistes de réflexion dont pourraient se saisir la Cour des comptes ou la Mission d'évaluation et de contrôle.

M. Hervé Novelli, Rapporteur spécial a indiqué trois pistes de réflexion. Premièrement, il a rappelé qu'au sein de la direction générale de l'énergie et des matières premières, 80 personnes sont affectées à la direction des hydrocarbures. Cette direction était auparavant chargée de la gestion des autorisations d'importation et des quotas. Ces activités ayant été supprimées à la faveur de la libéralisation du marché des hydrocarbures, il conviendrait d'exiger des précisions sur l'emploi de ces 80 personnes. Interrogé sur cette question, le président de la CRE, M. Jean Syrota, n'a pas été en mesure d'apporter de réponse satisfaisante. L'utilisation des crédits affectés aux restructurations industrielles constitue une deuxième piste de réflexion. Cette question a d'ailleurs déjà fait l'objet d'un rapport de la Cour des comptes. Enfin, il conviendrait que la Commission des finances se consacre à un aspect de l'activité d'EDF, ne serait-ce que pour rappeler qu'elle ne saurait être totalement exclue de ce dossier.

M. Didier Migaud a indiqué qu'il votait contre ce budget.

La Commission a adopté, sur la proposition du Rapporteur spécial, les crédits de l'industrie.

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La Commission a enfin examiné, sur le rapport de M. Jean-Michel Fourgous, Rapporteur spécial, les crédits de la formation professionnelle, ainsi que l'article 75, rattaché.

M. Jean-Michel Fourgous, Rapporteur spécial, a indiqué que le premier capital de tout individu était sa compétence. En effet, notre société évolue sans cesse : des métiers disparaissent, de nouveaux besoins naissent ; l'important dans ce contexte économique n'est plus de conserver coûte que coûte son emploi, mais d'être en capacité d'en trouver un autre rapidement. C'est particulièrement le cas dans notre pays, dont le taux de chômage est le treizième plus élevé de l'Union européenne des Quinze et où la durée moyenne pour trouver un emploi - de l'ordre de neuf à douze mois - est l'une des plus longues. La politique de l'État, en matière de formation, doit donc poursuivre cet objectif d'adaptation, en donnant à chacun la possibilité d'améliorer ses compétences et de progresser. La formation professionnelle constitue, de fait, un triple enjeu stratégique pour l'avenir de notre pays : un enjeu économique, car, dans un contexte de concurrence mondiale, elle devient un élément majeur de la compétitivité des entreprises et de leurs salariés ; un enjeu social, dans la mesure où l'adaptation des compétences demeure le meilleur bouclier contre le chômage ; un enjeu politique, enfin, car le Gouvernement qui parviendra à vaincre la spirale du chômage s'assurera une confiance durable de l'opinion.

Or, la France est, à cet égard, confrontée à de multiples retards. L'inadéquation de la formation avec les perspectives d'emplois est à l'origine de centaines de milliers d'offres non pourvues chaque année. Dans un contexte de chômage affectant 10 % de la population active, cela devient choquant. En France, seuls 30 % des 25 à 64 ans bénéficient, au moins une fois par an, d'une formation continue, contre plus de 40 % en Allemagne, au Royaume-Uni, aux États-Unis et dans les pays d'Europe du Nord. Alors que nos voisins réfléchissent en termes de valorisation des savoir-faire, nous privilégions les dispositifs et les procédures ; lorsqu'ils parlent de compétence, assise sur l'expérience, nous nous référons aux diplômes. L'intelligence requise par le marché n'est pas la capacité d'abstraction et de synthèse, mais l'aptitude à trouver une solution concrète à un problème. Seule l'entreprise développe cette perception de la réalité. Or, l'entreprise demeure ignorée, caricaturée, voire méprisée, dans les programmes scolaires. La voie professionnelle en prise avec la réalité des métiers, qui devrait être celle de l'excellence, est, au contraire, stigmatisée et assimilée à l'échec. Cela contribue à en détourner les meilleurs éléments et explique certainement que près de 70 % des jeunes Français rêvent aujourd'hui de rejoindre la fonction publique.

Il est donc nécessaire de très vite inverser la tendance, pendant qu'il est encore temps. Nous disposons, pour ce faire, de plusieurs outils. C'est le cas, en particulier, de l'accord national interprofessionnel du 20 septembre 2003 et de la loi relative à la formation tout au long de la vie, qui ont créé le droit individuel de formation et le contrat de professionnalisation. C'est aussi le cas des leviers favorisés par la politique de formation conduite depuis 2002 : la validation des acquis de l'expérience, le développement du système de formation continue des salariés, une implication plus forte des régions et l'encouragement de l'apprentissage.

Le budget pour la formation professionnelle proposé pour 2005 poursuit cette politique. Doté de 4.849,9 millions d'euros, il représente 1,7 % du budget de l'État. S'il diminue de 3 % par rapport à 2004, cette baisse doit être relativisée compte tenu de plusieurs changements de périmètre. À périmètre constant, le budget total de la formation professionnelle s'élève à 5.100 millions d'euros, contre 5.003 millions d'euros en 2004, traduisant une augmentation de 97 millions d'euros, soit 1,9 %.

Ce budget poursuit plusieurs priorités. En premier lieu, il poursuit le mouvement de décentralisation. Celle-ci se traduit par deux mesures principales : la création d'une contribution au développement de l'apprentissage au profit des régions et l'accroissement de la dotation de décentralisation (+ 190 millions d'euros).

Deuxièmement, il assure le développement de l'apprentissage. Figurant au cœur du plan de cohésion sociale, il constitue l'action la plus marquante du projet de budget. Il tend à faire passer de 350.000 à 500.000 le nombre d'apprentis par an en cinq ans. Il repose sur trois séries de mesures : rendre l'apprentissage plus attractif pour les jeunes ; le rendre plus intéressant pour les employeurs ; mobiliser des ressources supplémentaires au profit du système de formation. Il se traduit par une augmentation globale des crédits, qui repose sur trois mesures principales : pour les régions, la création de la contribution au développement de l'apprentissage (197 millions d'euros) ; pour les entreprises, celle d'un crédit d'impôt de 1.600 euros par apprenti (472 millions d'euros) ; pour l'État, la suppression de diverses exonérations jugées « injustifiées » de taxe d'apprentissage, permettant une économie évaluée à 123 millions d'euros. Dans l'ensemble, ces mesures devraient permettre de mobiliser environ 600 millions d'euros de crédits supplémentaires au profit de l'apprentissage. Mais si l'on tient compte des nouveaux prélèvements opérés sur les entreprises, notamment du fait de l'article 75 du projet de loi de finances, le gain net pour elles serait d'environ 120 millions d'euros. Par ailleurs, si celles qui embauchent des apprentis pourront être gagnantes, celles qui ne le font pas, ou ne peuvent pas le faire, verront leurs prélèvements augmenter.

Troisièmement, sont encouragées les autres formations par alternance, en particulier le contrat de professionnalisation. Le nombre d'entrées prévu pour ces formations en 2005 s'élève à 180.000, dont 160.000 pour les jeunes, contre 138.000 (dont 125.000 pour les jeunes) en 2004. Les crédits correspondants passent de 386 à 472 millions d'euros.

Quatrièmement, le budget permet de développer l'accompagnement des jeunes sans qualification. Il s'agit d'accompagner, dans les cinq ans à venir, 800.000 jeunes sortis du système scolaire sans qualification vers l'emploi durable. Quatre mesures principales sont prévues à cet effet : la création d'un fonds d'insertion professionnelle des jeunes (75 millions d'euros), le recrutement de « référents » et « coordonnateurs » pour les permanences d'accueil, d'information et d'orientation (66 millions d'euros), le financement de bourses intermédiaires (52 millions d'euros) et les « plates-formes de vocations » (32 millions d'euros). Parallèlement, les crédits consacrés aux emplois jeunes continueront de décroître (996 millions d'euros en 2005, contre 1.590 millions en 2004).

S'il faut saluer le développement de l'apprentissage et de l'alternance, il faut toutefois rester lucide. Cet objectif ne pourra être atteint sans l'implication de l'Éducation nationale. Celle-ci doit, en effet, accepter d'orienter une partie de ses effectifs vers l'enseignement professionnel. Elle doit aussi et surtout réformer profondément ses références en termes d'orientation. Notre système est encore trop marqué par une culture de défiance vis-à-vis de l'entreprise et il existe en France un décalage culturel trop important entre les enseignants et le monde économique. Se pose la question d'un personnel d'orientation qui ne connaît pas les métiers et qui est le plus souvent trop déconnecté des réalités de l'entreprise. La France compte deux fois plus de jeunes au chômage que certains de ses voisins : plus qu'ailleurs, l'Éducation nationale doit compenser cet échec. Or, la voie professionnelle est souvent dévalorisée, quand l'entreprise est diabolisée, ou tout simplement ignorée. Il est donc temps de sortir de ces schémas, archaïques.

La mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances laisse entrevoir de multiples voies de progrès, moyennant certaines améliorations. Le programme 3 de la mission travail regroupant les crédits de la formation professionnelle - dénommé « accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques » - pourrait donner lieu à plusieurs modifications. Il pourrait notamment s'intituler, plus clairement, « formation professionnelle » et se cantonner aux crédits correspondant à celle-ci.

S'agissant des indicateurs de performance, il faudrait en prévoir également de plus qualitatifs, comme, notamment, le niveau de satisfaction des entreprises et des salariés à l'égard des formations offertes. L'efficacité et l'efficience de notre système de formation professionnelle n'ayant de sens -  comme le niveau de compétitivité de notre économie - que par rapport à nos principaux partenaires économiques, il est essentiel que ces indicateurs fassent état de comparaisons internationales précises. À cet égard, il convient de tenir compte des critères de mesure, de classement et d'évaluation établis par les grandes organisations européennes et internationales.

En outre, il n'est pas satisfaisant de se fonder sur des évaluations totalement ou quasi exclusivement élaborées par les services publics, a fortiori ceux qui contribuent à l'organisation et au fonctionnement même de la formation professionnelle. Une évaluation juste et objective implique une totale indépendance. Aussi ne peut-on qu'encourager, au-delà des enquêtes que peut conduire la Cour des comptes, le développement d'évaluations par des cabinets d'audit privés.

Enfin, la politique de formation professionnelle étant intimement liée à la politique économique et sociale générale, il est nécessaire de mieux identifier les secteurs d'avenir, à haute valeur ajoutée, dans lesquels il est souhaitable d'inciter notre économie à se spécialiser. En effet, l'efficacité sur le moyen et long terme de la politique de formation professionnelle dépend de l'orientation stratégique des salariés vers les secteurs les plus créateurs d'emplois et de richesses.

M. Jean-Pierre Gorges a souligné que l'objectif essentiel de la formation professionnelle est la diminution du chômage : y a-t-il des objectifs précis fixés en la matière ? Les employeurs se plaignent de ne pas disposer de salariés formés dans certains secteurs.

M. Jean-Michel Fourgous, Rapporteur spécial, a remarqué qu'on touchait là au cœur de la problématique. On entretient des dispositifs d'une complexité extrême, toujours justifiés par des objectifs sociaux. Ces « tuyauteries » ne sont pas efficaces et on emploie des moyens démesurés pour des dépenses d'aide aux demandeurs d'emploi qui relèvent de l'« assistanat » au lieu de les employer à des dépenses « actives ». Il y a tout de même dans ce budget des mesures volontaristes ; cependant, il faudrait adopter une meilleure répartition entre dépenses passives et actives. Si l'on groupait tous les moyens de la politique de l'emploi en une seule masse et si on les employait à des dépenses actives, la France aurait un taux de chômage comparable à celui des États-Unis. Le problème du chômage n'est pas seulement culturel : il vient surtout du fait que l'on dépense trop dans tous ces dispositifs sociaux. Le choc culturel qui sépare l'école de l'entreprise est révélateur de ce malaise français. La politique de l'emploi et de la formation professionnelle doit être davantage axée sur les aspects économiques et moins sur les aspects sociaux. Cela devrait permettre à la France de retrouver le taux d'activité économique qui devrait être le sien.

M. Pierre Méhaignerie, Président, a demandé au Rapporteur spécial s'il suggérait des thèmes d'enquêtes de la Cour des comptes ou des sujets de mission d'évaluation et de contrôle.

M. Jean-Michel Fourgous, Rapporteur spécial, s'est étonné qu'ayant souhaité connaître la liste des principaux organismes publics et parapublics financés par le budget de la formation professionnelle, le ministère lui ait répondu qu'il ne disposait pas de liste centralisée de ces organismes, compte tenu de la multiplicité des financeurs. Voilà un sujet sur lequel la Cour des comptes pourrait utilement se pencher.

M. Pierre Méhaignerie, Président, a souligné que ce problème n'est pas spécifique à la formation professionnelle, mais concerne l'ensemble des établissements publics et parapublics.

M. Hervé Novelli a rappelé, qu'en 1993, a été créée une commission d'enquête sur la formation professionnelle, dont M. Claude Goasguen était le Rapporteur. Rien n'a été entrepris pour tenir compte des critiques qui avaient alors été émises sur le système, car le financement de la formation professionnelle constitue une réelle manne pour les syndicats. Il existe en fait une sorte de conspiration entre les partenaires sociaux, fondée sur la loi du silence, pour ne rien changer au système.

La Commission a adopté, sur la proposition du Rapporteur spécial, les crédits de la formation professionnelle.

Puis la Commission a examiné l'article 75, rattaché à ces crédits.

Article 75 : Révision du dispositif des exonérations de cotisations sociales patronales au titre des salaires versés aux apprentis

La Commission a examiné un amendement présenté par le Rapporteur spécial tendant à supprimer cet article. Cette suppression est justifiée par plusieurs motifs : l'article conduit à accroître les prélèvements sur les entreprises de 32,6 millions d'euros ; il s'apparente à une mesure de redistribution, avec tous les risques d'effets pervers que cela comporte ; il implique une contrainte et un coût administratifs supplémentaires ; il introduit une incertitude de gestion pour l'employeur et constitue une « prime négative » à l'encontre des maîtres d'apprentissage efficaces, capables de conduire rapidement leurs apprentis au succès.

Cette exonération doit, logiquement, durer jusqu'à la fin du contrat d'apprentissage. En effet, si le contrat se termine, par exemple, trois mois après le diplôme, l'employeur perd, dans l'intervalle, le bénéfice de l'exonération. Le maintien de l'exonération pendant la durée totale du contrat serait plus cohérent et de nature à favoriser une relation de confiance entre l'État et l'entreprise.

Le Président Pierre Méhaignerie a demandé si, après le diplôme, le salarié conservait le statut d'apprenti.

M. Jean-Michel Fourgous, Rapporteur spécial, a indiqué qu'il continuait à être régi par le contrat d'apprentissage jusqu'à son terme, le contrat étant, de toute façon, à durée déterminée.

M. Jean-Pierre Gorges a fait remarquer qu'un hiatus entre la durée du contrat d'apprentissage et la période d'exonération ne devrait, en principe, pas exister.

M. Hervé Novelli a souligné qu'il faudrait mettre une limite de durée à l'exonération, sous peine de donner cours à des abus.

Le Président Pierre Méhaignerie a relevé que l'article 75 porte sur un montant de 32,6 millions d'euros, ce qui n'est pas négligeable.

En ce qui concerne la durée d'exonération, M. Jean-Michel Fourgous, Rapporteur spécial, a rappelé que, de toute façon, le contrat d'apprentissage est normalement limité à deux ans. Il s'agit de maintenir la prise en compte de situations intermédiaires. Mais la suppression de l'exonération générerait une réelle gêne pour les entreprises.

La Commission a ensuite adopté cet amendement.

En conséquence, l'article 75 a été supprimé.

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Information relative à la Commission

Le bureau de la Commission a décidé de consacrer deux thèmes de mission d'évaluation et de contrôle en 2005, l'un à la gestion et aux cessions du patrimoine immobilier de l'État et des établissements publics, l'autre aux évolutions des coûts budgétaires des demandes d'asile (AME, hébergement, contentieux, contrôle aux frontières).

Un troisième thème, consacré à un programme d'équipement militaire pourra, le cas échéant, être également traité.

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