COMMISSION des LOIS CONSTITUTIONNELLES,
de la LÉGISLATION et de l'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
de la RÉPUBLIQUE

COMPTE RENDU N° 06

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 16 juillet 2002
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Pascal Clément, président

SOMMAIRE

 

pages

- Projet de loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (n°36) (amendements)

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Statuant en application de l'article 88 du Règlement, la Commission a examiné, sur le rapport de M. Christian Estrosi, les amendements au projet de loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (n° 36).

M. Jean-Pierre Blazy a indiqué, en préambule, que, compte tenu des délais impartis pour l'examen du projet de loi, les amendements du groupe socialiste n'avaient pu encore être déposés et le seraient directement en séance, après la réunion du groupe qui a lieu ce matin.

Article premier et annexe I : Orientations de la politique de sécurité intérieure :

La Commission a adopté un amendement présenté par le rapporteur substituant, dans l'annexe du projet de loi, une référence à la « relative immunité » dont bénéficient les auteurs d'infraction, à celle faite au « sentiment d'impunité », après les remarques de M. Alain Marsaud qui a jugé la formule proposée peu juridique et du Président, qui a rappelé que l'annexe du projet de loi n'avait aucun contenu normatif.

Elle a ensuite procédé à l'examen de l'amendement n° 17 rectifié présenté par M. Rudy Salles visant à associer des parlementaires aux conférences départementales de sécurité. Après que M. Jean-Pierre Blazy eut marqué son approbation à une telle proposition, le rapporteur a observé que les conférences départementales exerçaient un rôle directement opérationnel qui n'entrait pas dans les attributions des parlementaires ; il a estimé, en conséquence, que le débat budgétaire annuel sur les crédits du ministère de l'Intérieur paraissait plus adéquat pour les associer aux questions de sécurité. Déplorant que les parlementaires soient très peu informés sur les questions de sécurité spécifiques à leur circonscription, M. Rudy Salles a exprimé sa vive satisfaction devant l'engagement du gouvernement de publier désormais des statistiques actualisées préalablement à l'engagement du débat budgétaire. Il a néanmoins estimé que le débat budgétaire gardait, par son aspect très général, un caractère trop virtuel. La Commission a accepté cet amendement avant d'accepter également, sur l'avis favorable du rapporteur, l'amendement n° 16 du même auteur prévoyant le dépôt d'un rapport annuel par chaque conférence départementale de sécurité et sa transmission aux parlementaires et aux maires du département.

Elle a, en revanche, repoussé l'amendement n° 25 de Mme Christine Boutin, puis adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur. Un débat s'est ensuite engagé sur l'amendement n° 20 rectifié présenté par M. Rudy Salles, ajoutant, dans la liste des phénomènes transnationaux nécessitant une coopération entre Etats, une référence aux réseaux de prostitution. Après avoir observé que le projet de loi faisait déjà référence aux « filières criminelles », le rapporteur a néanmoins jugé cette précision utile. M. Claude Goasguen a rappelé que le phénomène de la prostitution avait connu un essor sans précédent ces dernières années ; observant que le contenu de l'annexe n'avait pas de caractère normatif, il a jugé souhaitable d'apporter la précision proposée, tout en estimant préférable de faire référence au proxénétisme et non à la prostitution. M. Rudy Salles ayant indiqué qu'il modifierait en conséquence son amendement, la commission l'a accepté ainsi rectifié.

Elle a ensuite examiné l'amendement n° 19 rectifié également présenté par M. Rudy Salles ayant pour objet de préciser, dans l'annexe, que le permis de conduire ne serait plus délivré que pour une période probatoire de deux ans. Observant que les jeunes conducteurs étaient les premiers responsables des accidents de la route les plus graves, l'auteur de l'amendement a indiqué que la France était l'un des seuls pays où l'obtention du permis de conduire avait un caractère définitif. Rappelant que la Grande-Bretagne connaissait deux fois moins de décès sur la route que la France, il a plaidé pour l'adoption de mesures décisives sur le sujet, qui, outre le présent amendement, pourraient également prendre la forme de contrôles de santé réguliers. Le rapporteur a émis la crainte qu'une telle proposition ne soit perçue comme une marque de défiance envers les jeunes, à un moment où l'on cherche à les responsabiliser davantage. Il a rappelé, en outre, que le dispositif en vigueur permettait déjà de retirer à tout moment un permis de conduire. La Commission a repoussé l'amendement n° 19 rectifié.

La Commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur, le premier modifiant le titre IX de la première partie de l'annexe I, le second précisant, dans le II de la deuxième partie de cette annexe, que la délinquance a augmenté de façon inacceptable ces dernières années, M. Alain Marsaud ayant fait observer que le terme « exponentielle » aurait été préférable à l'expression « de manière inacceptable ».

Puis, la Commission a examiné un amendement du rapporteur tendant à préciser, dans le second paragraphe de la deuxième partie de l'annexe I, que l'Etat doit assurer plus efficacement la protection de tous ses personnels, en particulier de ceux qui ont la charge de garder des détenus présentant un caractère particulier de dangerosité. Rappelant qu'un jeune policier avait été grièvement blessé par un homme gardé à vue au service des urgences de l'hôpital Saint-Roch de Nice le dimanche 14 juillet, le rapporteur a précisé que les syndicats de policiers réclamaient une protection renforcée des agents confrontés à des détenus particulièrement dangereux depuis de nombreuses années. M. Jean-Pierre Blazy a estimé que l'amendement du rapporteur n'allait pas assez loin et indiqué qu'il déposerait un amendement sur cette question. Après avoir rappelé que la commission s'était opposée au dépôt de son amendement portant sur la présence de forces de l'ordre dans les établissements scolaires au motif que l'impact de cette mesure en termes d'emplois n'était pas évalué, M. Alain Marsaud, favorable à l'amendement du rapporteur s'est interrogé cependant sur ses incidences en termes d'emplois. Le rapporteur a précisé qu'il ne s'agissait pas d'augmenter le nombre des personnels chargés de suivre des détenus dangereux mais d'améliorer et de sécuriser les services d'accueil d'urgence. Il a fait observer à ce propos que le projet de loi de programmation pour la justice proposerait la création d'unités sécurisées dans les hôpitaux. Soulignant que l'objet du projet de loi était de présenter les grandes orientations de la politique de sécurité intérieure, M. Claude Goasguen a estimé qu'il ne fallait pas trop entrer dans le détail en surchargeant ses annexes. M. Pascal Clément, président, a cependant jugé qu'il était opportun d'expliciter les annexes du projet de loi, qui constituent une sorte de déclaration politique. La Commission a ensuite adopté l'amendement du rapporteur.

Puis elle a repoussé l'amendement n° 26 de M. André Thien Ah Koon, soutenu par M. Bertho Audifax, tendant à rendre obligatoire l'immatriculation des deux-roues motorisés afin de lutter contre la délinquance associée à l'usage de ce type de véhicule, le rapporteur ayant fait observer que cette disposition avait déjà été adoptée à l'initiative de M. Jean Leonetti dans le cadre de la loi du 15 novembre 2000 sur la sécurité quotidienne et précisé qu'il ne restait plus qu'à prendre les décrets d'application.

Après avoir adopté quatre amendements rédactionnels du rapporteur, la Commission a examiné un amendement n° 7 présenté par M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis de la commission des finances saisie pour avis, tendant à prévoir un renforcement des sanctions pour occupation illégale d'une propriété privée par les gens du voyage et à proposer, à titre complémentaire, la confiscation des véhicules ayant servi à commettre l'infraction. M. Christian Estrosi a rappelé que la Commission, à son initiative, avait déjà adopté l'amendement n° 3 tendant à préciser que le Gouvernement devrait s'efforcer de mieux réprimer l'occupation par les gens du voyage des propriétés privées mais également publiques. M. Jérôme Lambert a fait observer qu'il était contradictoire de souhaiter que les gens du voyage quittent les terrains qu'ils occupent de façon irrégulière, tout en confiscant leurs véhicules. M. Guy Geoffroy a souligné, à ce propos, que souvent le nombre de caravanes des gens du voyage dépassait le nombre de véhicules susceptibles des les tracter. M. Jean-Pierre Blazy a estimé que la question du stationnement des gens du voyage devrait être examinée dans le cadre d'une commission d'enquête, soulignant que leurs caravanes pouvaient être assimilées à un domicile et jugeant, en conséquence, qu'il serait contraire à la Constitution de prévoir leur confiscation. M. Richard Dell'Agnola a indiqué qu'il fallait distinguer la caravane du véhicule tracteur et annoncé qu'il avait demandé la création d'une mission d'information sur les gens du voyage. Mme Brigitte Barèges a souligné que l'amendement proposé faisait référence à la propriété d'autrui sans préciser qu'il pouvait s'agir d'une propriété publique ou privée et a donc suggéré que cette précision soit apportée. En conséquence, la Commission a décidé de transformer en sous-amendement l'amendement n° 3 qu'elle avait précédemment adopté et a accepté, sous cette réserve, l'amendement n° 7.

Elle a ensuite été saisie de l'amendement n° 8 présenté par M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis de la commission des finances, invitant le Gouvernement à se fixer pour objectif la prévention des nuisances liées aux « rave-parties ». Le rapporteur ayant souligné que cet amendement était inutile, puisque les « rave-parties » font d'ores et déjà l'objet d'une réglementation adaptée depuis l'adoption, à l'initiative de M. Thierry Mariani, de l'article 53 de la loi du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, la Commission l'a repoussé.

Article 2 et annexe II : Programmation des moyens 2003-2007 :

La Commission a accepté les amendements nos 9, 10 et 11 et 12 de précision et de coordination présentés par M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis de la commission des finances. Puis, elle a adopté quatre amendements rédactionnels du rapporteur.

Article 5 : Évaluation annuelle :

La Commission a accepté, sur l'avis favorable du rapporteur, l'amendement n° 13 présenté par M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis de la commission des finances, invitant le Gouvernement à présenter chaque année au Parlement, à l'occasion de la discussion du projet de loi de finances initiale, les objectifs de performance assignés à la police et à la gendarmerie nationales et précisant que les résultats obtenus au regard de ces objectifs devront être évalués par une instance extérieure aux services concernés et communiqués au Parlement dans le cadre de la discussion de la loi de règlement. En conséquence, la Commission a autorisé le rapporteur à retirer son amendement n° 5 précédemment adopté qui avait le même objet.

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