COMMISSION des LOIS CONSTITUTIONNELLES,
de la LÉGISLATION et de l'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
de la RÉPUBLIQUE

COMPTE RENDU N° 15

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 11 décembre 2002
(Séance de 16 heures 30)

Présidence de M. Pascal Clément, président,
puis de M. Jean-Christophe Lagarde, secrétaire

SOMMAIRE

Audition de M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, et discussion générale du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, pour la sécurité intérieure (n° 381) (M. Christian Estrosi, rapporteur).

La Commission a procédé à l'audition de M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, et à la discussion générale du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, pour la sécurité intérieure et discussion générale (n° 381) (M. Christian Estrosi, rapporteur).

Après avoir rappelé que le projet de loi sur la sécurité intérieure avait été adopté par le Sénat le 19 novembre dernier, à l'issue de trois jours de débats qu'il a qualifié d'éclairés et de passionnés, M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur et des libertés locales, a souhaité que son examen par l'Assemblée nationale se déroule dans le même esprit, au-delà de clivages politiques qui ont du mal à endiguer les réactions d'humanisme et de bon sens, et ce malgré la multiplication des critiques médiatiques portées, en méconnaissance de l'évolution de la politique dans notre pays depuis le 21 avril dernier, contre un texte accusé trop rapidement de limiter les libertés. Il a rappelé que certaines déclarations récentes de plusieurs élus de l'opposition de premier plan, au-delà d'une position dogmatique, irréaliste et immobiliste, avaient marqué une approbation de principe de la politique de sécurité menée par le Gouvernement, parce qu'elle vise à résoudre des problèmes biens réels, vécus tous les jours par les citoyens. Il a rendu hommage au travail de concertation effectué par le rapporteur, au nom de la commission des Lois et sous l'autorité du président Pascal Clément.

Puis, il a fait observer que le projet de loi constituait la traduction des dispositions de la loi d'orientation, adoptée en juillet dernier à une très large majorité, loi qui a trouvé, par ailleurs, son prolongement budgétaire dans le projet de loi de finances pour 2003, qui garantit l'engagement de plus de 40 % des moyens programmés sur cinq ans. Rappelant que les chiffres de la délinquance, publiés désormais chaque mois, selon les normes d'un système statistique créé en 1972, révélait, après une hausse de 5,5 % entre janvier et avril 2002, une baisse de la délinquance de 1,22 % depuis le mois de mai, résultat obtenu grâce à la mobilisation des forces de police et de gendarmerie, il a jugé qu'il convenait d'inscrire cette évolution dans la longue durée.

Estimant que le projet de loi se tenait éloigné de toute idéologie et répondait précisément et de manière lisible à des questions aiguës, dans un souci d'équilibre et de respect scrupuleux des droits de l'homme, le ministre a indiqué que la première ambition de ce texte était de lutter contre la délinquance qui a augmenté dans des proportions considérables ces dernières années, au point de bouleverser et de briser de plus en plus de vies, des vies de victimes souvent modestes et démunies, qui n'ont pour seul recours que la protection d'un État qui s'est montré, dans le passé, parfois défaillant. Il s'est élevé contre l'hypocrisie consistant à dénoncer ce texte comme « anti-pauvre », alors même que les problèmes d'insécurité touchent au premier chef les catégories les plus défavorisées de nos concitoyens et a dénoncé l'attitude qui consiste à assimiler précarité, jeunesse et habitat social dégradé avec la délinquance, attitude révélatrice d'un véritable mépris social. Puis, affirmant qu'il n'était pas question de lutter contre une catégorie sociale particulière, il a réfuté l'amalgame tendant à dénoncer une prétendue lutte contre les mendiants, les prostituées ou les gens du voyage, alors même que l'objet du projet de loi est de lutter contre les comportements délictueux, quels qu'en soient les auteurs, dès lors qu'ils compromettent la sécurité des autres, qu'il s'agisse des menaces accompagnant la mendicité, qui la transforment en racket, des trafics en tous genres, des risques sanitaires graves accompagnant la prostitution de masse, ou encore des dégradations inacceptables opérées sur des propriétés par ceux des gens du voyage qui sont peu scrupuleux. Il s'est élevé contre le fait qu'on lui prête la volonté de confondre jeunesse et délinquance et a déclaré avec force qu'il était anormal de parler de « jeunes » lorsqu'on désigne des bandes de voyous qui s'attaquent délibérément à la police. Enfin, prenant l'exemple des travailleurs sociaux et des éducateurs qui ne peuvent plus exercer dans certains quartiers gangrenés par les trafics et par une forme de « caïdat », il a souhaité que cesse tout débat « théologique » entre prévention et répression, le rétablissement de l'ordre et la définition d'une base juridique incontestable et équilibrée à l'action de nos forces de l'ordre étant la première condition d'établissement d'une politique de prévention, construite autour de l'action des maires, et le premier des moyens pour redonner de l'espoir aux citoyens fragilisés par la peur.

Faisant remarquer que le texte était divisé en cinquante-sept articles regroupés dans six titres formant des blocs cohérents, le ministre a précisé que le Sénat avait ajouté une vingtaine d'articles additionnels qui, tout en apportant des améliorations sensibles, n'ont pas modifié l'équilibre, ni l'organisation du projet de loi. Il a indiqué que le titre premier répondait au souci d'améliorer l'efficacité des services de sécurité intérieure, le deuxième permettait d'éviter que des armes ne soient détenues par des déséquilibrés, le troisième donnait aux polices municipales les pouvoirs correspondant aux compétences des maires, le quatrième encadrait et assainissait le monde des activités de sécurité privée, le cinquième organisait la lutte contre la progression constante des agressions à l'encontre des représentants de l'État et de leurs familles, tandis que le dernier prévoyait les conditions d'application du projet de loi à l'outre-mer.

S'agissant des premiers articles, il a relevé qu'ils confiaient aux préfets la direction des actions de sécurité intérieure dans les départements, prolongement logique de la réorganisation nationale qui place policiers et gendarmes sous l'autorité opérationnelle du ministre chargé de la sécurité intérieure et les intègre dans un schéma stratégique opérationnel, et permettaient d'élargir la zone de compétence des officiers de police judiciaire, qui pourront intervenir au moins sur le territoire du département, voire sur celui de la zone de défense. Il a précisé que les pouvoirs des policiers municipaux seraient étendus pour que, lorsqu'ils dressent des contraventions, ils aient le droit de consulter le fichier des véhicules volés et ne soient plus contraints de requérir le concours d'un policier national s'ils souhaitent que le véhicule soit mis en fourrière.

Puis, il a exposé les moyens d'actions supplémentaires que le texte apporterait aux policiers et aux gendarmes, évoquant d'abord la facilitation des visites de véhicules. Il a précisé qu'il s'agissait de revenir sur la jurisprudence considérant que la voiture est un espace privé, totalement protégé, alors même qu'un coffre de voiture ne saurait constituer un domicile. Il a observé que l'ouverture des coffres ne pourrait porter atteinte aux droits de l'homme puisqu'elle aurait lieu sur décision du procureur de la République ou avec l'accord du propriétaire, ajoutant qu'elle permettrait de lutter contre les transports de drogue ou des produits d'un cambriolage, les cas de visites de véhicules déjà prévus par la loi relative à la sécurité quotidienne étant étendus à la recherche d'infractions de vol et de recel, ainsi qu'aux cas de flagrant délit ou pour prévenir une atteinte à l'ordre public. Il a estimé que personne ne devait craindre d'être intempestivement arrêté de ce fait.

Il a fait remarquer que, dans le même esprit, les moyens techniques au service des enquêteurs seraient modernisés et leur consultation facilitée, notamment les fichiers. Considérant que la protection de la vie privée n'était pas incompatible avec celle de la vie d'autrui, il a souligné que le texte précisait les données personnelles susceptibles d'être contenues dans les fichiers des services de police et de gendarmerie, l'objectif n'étant pas de « ficher » 60 millions de Français, seuls les noms des personnes interdites de séjour ou soumises à des mesures particulières dans le cadre du contrôle judiciaire devaient être ajoutés dans le fichier des personnes recherchées existant. Il a regretté, à cet égard, le pathétique de la situation actuelle qui permet, par exemple, à une personne interdite de stade à la suite d'une condamnation par la justice d'y retourner parce que la police ne peut avoir connaissance de la décision qui a été prise. Il a ajouté qu'il était également proposé que certains services administratifs aient accès à une partie des informations figurant dans les fichiers de police judiciaire, notamment pour les enquêtes les plus sensibles concernant l'accès aux installations prioritaires de la défense, aux emplois relevant de la sécurité ou de la défense, la délivrance d'un titre de séjour ou l'octroi de la nationalité française. Il a, en effet, jugé absurde que les grands principes empêchent de vérifier qu'un candidat au poste d'agent de sécurité d'une centrale nucléaire ne soit soupçonné d'avoir participé à des attentats ou que l'octroi de la nationalité française ou d'un titre de séjour ne soit accordé à une personne impliquée dans un trafic de drogue. Il a considéré que c'était sans doute moins le contenu de ces dispositions, plus pratiques qu'idéologiques, que leur absence jusqu'à présent qui pouvait être critiquée.

Il a jugé nécessaire d'étendre les informations contenues dans le fichier national automatisé des empreintes génétiques (fnaeg) pour y inclure les personnes condamnées ou objectivement soupçonnées des actes les plus graves, tels que les délits de violence contre les personnes ou ceux mettant en danger l'ordre public, ces dispositions n'étant pas l'annonce d'un État policier, mais la fin d'un État aveugle, le fnaeg était au XXIe siècle ce que le fichier des empreintes digitales était au siècle précédent. Il a cité l'exemple du Royaume-Uni, berceau des libertés individuelles, qui détient un fichier contenant plus de 1,6 million d'empreintes, alors que le fichier français n'en comprend qu'un millier. Il a confirmé que le développement d'un tel fichier permettrait notamment d'identifier rapidement et de manière sûre les personnes soupçonnées de viols, évoquant à cet égard la détresse des parents des jeunes filles tuées dans la Somme, auxquels il a fallu expliquer qu'il serait difficile de retrouver l'assassin faute de disposer d'un fichier adapté, à l'heure où 60 000 affaires sont résolues grâce aux empreintes génétiques outre-Manche.

Il a souligné que les dispositions proposées répondaient au principe de finalité essentiel en matière de droit des fichiers, les enregistrements n'étant autorisés que dans le but d'améliorer l'efficacité des services de sécurité intérieure, tandis que le contrôle par l'autorité judiciaire et les conditions d'accès étaient clairement organisés. À ce sujet, il a indiqué qu'un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (cnil), fixerait les conditions dans lesquelles les informations pourraient être communiquées, ainsi que les conditions dans lesquelles une victime pourrait s'opposer à ce que les informations la concernant soient conservées, les informations inscrites dans le fnaeg étant celles données au procureur, qui disposerait ainsi d'un droit de contrôle sur son contenu, tandis que le juge des libertés et de la détention pourrait ordonner l'effacement des données à la demande des personnes. Il a donné l'assurance qu'il n'y aurait pas de risque d'arbitraire ou d'anarchie, les conditions d'utilisation des fichiers de police étant précisées, et a observé que la cnil - que le Gouvernement n'a pas consulté préalablement parce qu'il n'y était pas tenu et parce que le Parlement a tout autant qualité qu'une autorité indépendante pour se prononcer sur ces sujets - n'avait pas relevé d'atteintes aux libertés individuelles.

Dans un même objectif d'efficacité, il a indiqué que l'autorisation serait donnée aux services de police et de gendarmerie d'utiliser certains biens saisis, car il n'y avait aucune raison que les grosses cylindrées si utiles aux délinquants ne puissent servir également aux représentants de la loi, sur décision judiciaire.

Le ministre a ensuite souligné que le projet de loi devait combler certaines lacunes du droit trop propices au développement de nouveaux risques et de nouvelles formes de délinquance, au premier rang desquels se trouve le terrorisme, justifiant ainsi la prorogation jusqu'en décembre 2005 de certaines dispositions de la loi du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne. Observant que le deuxième risque, malheureusement bien connu, était constitué par les armes, il a insisté sur la nécessité de dispositions nouvelles qui n'imposent pas, pour autant, des contraintes inutiles aux chasseurs et tireurs sportifs. Soulignant le danger que représente le fait que certains acquéreurs d'armes n'aient pas un état mental compatible avec leur détention, il a considéré que l'exigence d'un certificat médical semblait de bon sens, une telle mesure étant déjà pratiquée en Espagne, en Grèce, au Portugal et bientôt en Belgique. Il a également jugé logique qu'un professionnel de la santé soit autorisé à passer outre le secret professionnel pour signaler qu'un de ses patients n'est pas sain d'esprit alors même qu'il possède une arme. Précisant que le nouveau régime administratif institué par la loi visait à mieux contrôler la diffusion de certaines armes, comme les carabines 22 long rifle, et à donner plus de moyens aux préfets pour engager les procédures utiles afin qu'une personne notoirement déséquilibrée ou dangereuse soit dessaisie de son arme, il a indiqué qu'il n'avait pas cependant pour ambition de corriger les innombrables défauts de la classification actuelle, une telle réforme supposant une concertation qui devrait être prochainement engagée.

Le ministre a indiqué qu'il était également proposé de mieux encadrer juridiquement le développement des activités privées de sécurité, les enjeux liés à ce secteur ne pouvant être ignorés, dès lors qu'il existe en France autant d'agents de sécurité privés chargés de prévenir des actes de malveillance que de policiers. Il a souligné que le projet de loi définissait précisément les tâches des sociétés privées de sécurité et renforçait leur professionnalisation ainsi que les conditions d'agrément ou d'autorisation, l'objectif étant d'éviter, par exemple, qu'un agent de sécurité ne soit un malfaiteur ou un terroriste.

Il s'est réjoui de l'obligation faite aux opérateurs de bloquer les téléphones portables volés, qui comble une lacune du droit dont beaucoup de Français ont déjà fait les frais, le nombre de vols à l'arraché, dont les conséquences psychologiques et parfois physiques sont très lourdes pour les victimes, étant très élevé alors que les solutions techniques existent qui permettraient de les limiter.

Puis le ministre a souligné que le projet de loi répondait à l'exaspération des Français qui ne supportent plus l'impuissance de la puissance publique, face à l'insécurité quotidienne. Il a jugé, en effet, que sans sombrer dans une exagération sécuritaire, il convenait de traiter et non de mépriser la peur de nos concitoyens. A cet égard, il a proposé des solutions républicaines et réalistes, les cibles n'ayant rien à voir avec les caricatures habituelles issues d'une intelligentsia qui parle beaucoup d'une France qu'elle connaît mal et qui lui est si différente qu'elle finit par lui être étrangère.

Abordant la question du développement de la prostitution, il a précisé qu'au Sénat, la discussion sur ce sujet avait duré plusieurs heures et avait révélé, s'il en était besoin, la difficulté de cette question, infiniment sensible. Il a estimé qu'il serait inacceptable de ne rien faire, à l'heure où les risques sanitaires d'épidémie de sida sont considérables, et jugé qu'il serait criminel de fermer les yeux sur le développement de la prostitution nourrie par des réseaux étrangers. Il a affirmé que la prostitution, de nos jours, était assimilable à une forme d'esclavagisme, puisqu'elle constituait une activité très lucrative pour le proxénète, alors que la ou le prostitué n'avait d'autre perspective que de rester sur le trottoir. Il a dénoncé, à ce titre, l'hypocrisie consistant, d'une part, à dénoncer le proxénétisme, et, d'autre part, à laisser les prostituées sur le trottoir, au mépris des craintes et du malaise des riverains des zones touchées par cette activité. Il a constaté qu'il était très difficile d'expliquer concrètement la différence entre le racolage actif interdit et le racolage passif autorisé, jugeant la situation actuelle intenable, sauf à légaliser la prostitution, à autoriser le racolage actif ou à rouvrir les maisons closes, ce qu'il a récusé. Il a expliqué que, pour sortir de ces ambiguïtés, il apparaissait nécessaire d'interdire tout racolage, actif ou passif, de le transformer en délit et de réhabiliter le délit d'exhibition, précisant que l'objectif était de sanctionner les vrais coupables, c'est-à-dire les proxénètes. Il a insisté sur le fait que les prostituées en situation irrégulière qui dénonceraient leur proxénète pourraient se voir attribuer un titre de séjour, tandis que les effectifs des services de police spécialisés contre les filières de prostitution seraient doublés. Il a ajouté que l'éradication de l'esclavagisme des prostituées étrangères impliquait le retour systématique de la plupart d'entre elles dans leur pays d'origine, le travail avec les associations de réinsertion des prostituées et des organisations non gouvernementales devant être poursuivi et développé. Il a jugé que les dispositions introduites par le Sénat relatives au délit de traite des êtres humains correspondaient bien aux situations réelles d'exploitation de la personne vulnérable sous toutes les formes possibles.

S'agissant de la question des gens du voyage, le ministre a déploré la situation d'intolérance existante, observant que rares étaient les maires prêts à les accueillir faute de bénéficier de la garantie de l'État d'une restitution des terrains, et soulignant qu'aujourd'hui, il était impossible de faire respecter le droit de propriété puisque le propriétaire d'un terrain occupé contre sa volonté était contraint, pour le récupérer, d'engager une procédure civile très longue, dont l'issue était incertaine. Réaffirmant sa volonté de ne pas stigmatiser les gens du voyage qui, dans leur grande majorité, sont honnêtes - comme l'a montré le rassemblement qui s'est déroulé sans incident à Damblain cet été - et qui ont choisi un mode de vie qu'il convient de respecter et même de protéger, il a souligné la nécessité de punir ceux qui enfreignent la loi, rendant la vie impossible à d'autres. Il a donc proposé de créer un nouveau délit afin de donner un cadre juridique permettant à la police et à la gendarmerie d'intervenir immédiatement, et si nécessaire de suspendre le permis de conduire et de saisir les véhicules des personnes violant la loi, observant qu'une telle mesure permettrait de conforter les plus honnêtes et d'accélérer la mise en place d'aires d'accueil dans les communes, ce que M. Louis Besson lui-même a reconnu. Il a précisé que le nouveau délit protégerait toutes les propriétés privées, ainsi que les territoires communaux dans les communes qui ont effectivement respecté leurs obligations vis-à-vis de la « loi Besson ».

S'agissant des regroupements hostiles des personnes dans les espaces communs des immeubles d'habitation, il a insisté sur le fait que le texte ne visait en aucun cas les « jeunes », qui ne sont pas délinquants par construction, mais tous ceux qui rendent la vie impossible aux travailleurs honnêtes qui souhaitaient pouvoir rentrer chez eux sans risquer quolibets ou violences. Il a fait remarquer que la loi sur la sécurité quotidienne avait prévu l'intervention possible des forces de l'ordre, sans y associer de sanction, ce qui entamait de facto la crédibilité des policiers et des gendarmes, mais également celle des policiers municipaux, face à des rassemblements menaçant ou hostiles qui seront désormais constitutifs de délits. Il a indiqué que l'État appuierait les collectivités locales dans le financement de « salles communes » dans les quartiers où il n'y en a pas, afin de permettre à ceux qui occupent habituellement, de manière pacifique, les halls d'immeubles de se réunir dans un endroit idoine.

Enfin, en ce qui concerne l'exploitation de la mendicité, après avoir rappelé que des personnes démunies, parfois handicapées, étaient exploitées comme des marchandises pour fournir des rentes de situation à des délinquants sans scrupules, le ministre a affirmé sa volonté de s'attaquer aux exploitants en permettant que les personnes qui encadrent, transportent, utilisent et récupèrent les ressources des mendiants, soient déférées devant la justice, les dispositions introduites au Sénat sur la traite des êtres humains complétant utilement, dans ce domaine aussi, le projet de loi. Dans la même logique, il a insisté sur la nécessité de prendre en compte une nouvelle forme de mendicité, qui s'apparente à l'extorsion de fonds et que le projet appelle la demande de fonds sous contrainte, consistant, en groupe, de façon agressive, et éventuellement avec des chiens démuselés, à se rassembler autour d'une personne pour lui demander de l'argent avec une instance telle que la victime a le sentiment de ne pouvoir résister à cette pression. Il a fait observer que les mendiants ne seraient pas les cibles mais les bénéficiaires de ce texte, seul le racket déguisé en mendicité étant constitutif d'un délit.

En conclusion, il a assuré que le respect de la loi constituait, en tout état de cause, un préalable à toute discussion ou négociation. Il a considéré que, pour l'hôte d'un pays étranger, le premier devoir était d'en respecter les lois, sauf à refuser manifestement d'en admettre les valeurs. C'est pourquoi il a jugé que la commission d'infractions aussi graves que le racolage, le proxénétisme ou l'exploitation de la mendicité, devait pouvoir conduire à l'expulsion des personnes étrangères titulaires d'une carte ou d'un titre de séjour inférieur à un an. En outre, il a confirmé sa volonté de lutter de manière déterminée contre les agressions de policiers, de gendarmes, de sapeurs-pompiers ou de leurs familles, phénomène qui a crû de plus de 135 % en vingt ans. Il a jugé nécessaire d'étendre cette protection aux conducteurs de bus et aux gardiens d'immeubles. Enfin, il a rappelé que le premier objectif du Gouvernement n'était pas d'établir un ordre moral, mais de garantir l'ordre public et d'imposer le respect des valeurs républicaines.

M. Christian Estrosi, rapporteur, a remercié le ministre de l'intérieur de donner aux députés la possibilité de respecter les engagements pris vis-à-vis de leurs électeurs, qui ressentent un fort sentiment de détresse face à la montée de l'insécurité. Il a jugé les premiers résultats obtenus d'autant plus méritoires qu'ils ne sont dus qu'à la seule volonté politique du ministre, qui a dû se contenter, au cours des derniers mois, des moyens modestes qui lui avaient été alloués par la loi de finances pour 2002. Puis il s'est réjoui que soit prévu dans ce texte l'ensemble des mesures correspondant aux objectifs définis par la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure du 29 août 2002 (LOPSI). Expliquant qu'il avait souhaité montrer l'esprit d'ouverture dans lequel la commission des Lois de l'Assemblée nationale abordait l'examen de ce texte, il a souligné qu'il avait auditionné sur ce projet de loi une cinquantaine de syndicats, d'associations et d'acteurs de la sécurité au quotidien, y compris parmi ceux qui ont publiquement critiqué le projet. Il s'est félicité de constater qu'un réel dialogue avait pu s'engager, même avec la plupart de ceux qui prétendent aujourd'hui encore que l'insécurité n'a pas augmenté dans notre pays, ou qui jugent que la réforme proposée revient à instituer des délits de pauvreté.

Revenant au débat de fond suscité par le projet de loi, il a estimé que l'insécurité avait bel et bien augmenté et qu'aucun remède n'avait été apporté à ce phénomène depuis vingt ans, ni par ceux qui lui attribuent des causes économiques - alors que la décrue du chômage et la croissance concomitante de l'insécurité au cours des années récentes montrent que cette explication n'en est pas une - ni par ceux qui prétendent ériger la prévention en substitut de la répression. À cet égard, tout en soulignant l'utilité de la politique de la ville, M. Christian Estrosi a observé que, bien souvent, les investissements réalisés dans les quartiers au titre de l'action sociale, de l'animation sportive ou de la lutte contre l'illettrisme n'avaient pas contribué au recul de l'insécurité, mais s'étaient parfois, au contraire, accompagnés d'une augmentation de celle-ci. Il a expliqué que, pour cette raison même, policiers, magistrats, gendarmes ou policiers municipaux se réjouissaient de voir le Gouvernement mettre un terme à cette approche quelque peu angélique.

Soulignant ensuite que le projet de loi s'appuyait sur des moyens accrus ouverts dans le projet de loi de finances pour 2003, qui assure d'ores et déjà l'engagement de 40 % des crédits prévus par la loi de programmation, le rapporteur s'est réjoui de l'approche globale des problèmes qu'il traduisait, qui contraste avec la politique du coup par coup mise en œuvre dans ce domaine pendant les cinq années passées, au cours desquelles pas moins de dix textes sur la sécurité ont été adoptés. Il s'est également félicité de ce que la politique de la sécurité s'accompagne d'une sécurité de la politique, l'arsenal pénal s'enrichissant d'outils inscrits dans la durée. Constatant que le projet de loi conjuguait détermination et équilibre entre lutte contre la délinquance et la criminalité d'une part et respect des droits des personnes d'autre part, le rapporteur a fait valoir qu'il aurait à cœur de préserver cette économie générale du texte au travers des amendements qu'il proposerait à la Commission pour le renforcer.

Évoquant ensuite les dispositions relatives aux investigations judiciaires, et notamment celles qui prévoient une extension du cadre territorial de la compétence des OPJ, M. Christian Estrosi a souhaité connaître le degré d'avancement du regroupement des services régionaux de la police judicaire en directions interrégionales.

S'agissant du volet de la réforme relatif aux fichiers, qu'il a jugé déterminant, il a rappelé que le projet de loi encadrait leur constitution et leur utilisation de garanties nombreuses, afin que soit assuré le respect des libertés individuelles. Il a expliqué qu'il ressortait de l'audition des représentants de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), que celle-ci n'émettait aucune réserve substantielle sur les dispositions du projet de loi relatives aux fichiers. Il a ensuite souhaité avoir des précisions sur les modalités d'accès aux fichiers définis à l'article 9 du projet de loi, l'exemple des chefs d'entreprise recrutant des agents de sécurité montrant qu'ils pouvaient encourir le risque d'être condamnés pour avoir embauché une personne figurant sur ces fichiers sans qu'ils puissent en avoir eu connaissance au préalable. Il s'est par ailleurs demandé s'il ne serait pas souhaitable d'étendre le fichier des empreintes génétiques à des infractions supplémentaires. Évoquant la démonstration qui lui avait été faite, au laboratoire de la police technique et scientifique d'Écully, du caractère protecteur de ce fichier pour les libertés individuelles, il a fait observer, en effet, que les quelque 1 700 noms qui y figuraient aujourd'hui ne serviraient probablement plus dans les années à venir, puisqu'ils appartenaient à des criminels lourdement condamnés. Il a également établi un parallèle avec le fichier des empreintes digitales, dont le fichier des empreintes génétiques ne constitue en définitive que la version moderne, et rappelé à ce sujet que, si Khaled Kelkal avait pu être identifié comme l'auteur de la tentative avortée d'attentat sur la ligne de TGV Paris-Lyon en 1995, c'était grâce aux empreintes digitales retrouvées sur la bombe que la police détenait à la suite d'un vol de véhicule commis par le même individu trois ans auparavant.

Évoquant, par ailleurs, la lutte contre les réseaux de prostitution, que le projet de loi aborde de front en sanctionnant ceux qui abusent de la faiblesse d'autrui et que le Sénat a renforcée en définissant l'infraction de traite des êtres humains, il a estimé nécessaire de la compléter par une amélioration de la prise en charge sociale des victimes. Se réjouissant de ce que la réforme proposée permette enfin aux forces de l'ordre de contrôler l'identité des personnes prostituées, en majorité d'origine étrangère, il s'est demandé s'il ne serait pas utile de garantir à celles qui accepteraient de collaborer avec les forces de sécurité pour démanteler les réseaux, outre un titre de séjour, de réelles possibilités d'insertion professionnelle.

S'agissant des mesures relatives aux gens du voyage, il a souhaité connaître le sentiment du ministre de l'intérieur sur la pertinence qu'il y aurait à prévoir, outre les procédures de confiscation des véhicules d'ores et déjà envisagées, un dispositif de vérification de l'origine des moyens utilisés pour leur acquisition.

Pour ce qui concerne les dispositions du projet de loi relatives aux attroupements dans les parties communes des immeubles, il s'est demandé s'il ne serait pas pertinent de moduler la sanction des nuisances occasionnées de ce fait en fonction de l'existence ou non d'équipements publics destinés à l'accueil de ces jeunes. Il a ainsi plaidé pour une application stricte de la sanction, lorsqu'en raison de l'existence d'infrastructures d'accueil, les attroupements dans les parties communes d'immeubles d'habitation n'auraient aucune raison d'être. Il a estimé qu'une telle approche présenterait l'avantage d'inciter les collectivités locales à adopter une politique active d'équipement en ce domaine, dans la mesure où elles seraient assurées, en contrepartie, d'une intervention sans concession des forces de l'ordre. À cet égard, après avoir fait observer que la loi sur la sécurité quotidienne du 15 juin 2001 permettait aux policiers nationaux, aux gendarmes et aux policiers municipaux d'accéder aux immeubles d'habitation, il s'est demandé s'il ne serait pas souhaitable que, à l'instar de leurs collègues, les policiers municipaux soient également dotés de pouvoirs de sanction dont ils sont dépourvus dans l'état actuel du droit.

Abordant enfin les problèmes relatifs aux trafics d'armes, M. Christian Estrosi a interrogé le ministre sur la pertinence d'une extension des dispositions existant dans le cadre de la lutte contre le trafic de stupéfiants en matière d'infiltration et de surveillance.

Mme Marie-Jo Zimmermann, rapporteure pour la délégation aux droits des femmes, a précisé que la délégation qu'elle préside avait adopté quinze recommandations sur les dispositions du projet de loi relatives à la prostitution. Elle a tout d'abord indiqué que la lutte contre le proxénétisme et les réseaux mafieux devait être, selon la Délégation, la priorité absolue d'une politique globale de lutte contre la prostitution, compte tenu de l'arrivée massive ces dernières années de personnes prostituées venues notamment de l'Est de l'Europe, de l'Afrique et de l'Amérique du Sud. A cet égard, elle a jugé très positive l'introduction par le Sénat, dans le code pénal, d'une nouvelle incrimination de traite des êtres humains permettant de pénaliser lourdement les activités de ces réseaux. Elle a ajouté toutefois que le démantèlement effectif des réseaux de prostitution nécessiterait le renforcement de la coopération policière et judiciaire avec les pays européens, notamment la Roumanie.

Mme Marie-Jo Zimmermann a ensuite souligné que la Délégation, consciente des nuisances engendrées par la prostitution dans certains quartiers des grandes villes, approuvait les mesures dissuasives proposées par le Gouvernement vis-à-vis du racolage sur la voie publique. Regrettant cependant que le seul moyen de protéger les prostituées des violences des réseaux mafieux consiste à prévoir des peines d'emprisonnement permettant leur placement en garde à vue, elle a également insisté sur la nécessité que les fonctionnaires de police observent strictement le code de déontologie dans l'application des mesures incriminant le racolage, afin d'éviter l'arbitraire dans l'appréciation des faits de racolage passif, dont la définition est imprécise.

Puis elle a indiqué que la Délégation se préoccupait particulièrement de la protection, en France ou dans leur pays d'origine, des personnes prostituées qui accepteraient de porter plainte ou de témoigner contre leurs proxénètes. Elle a ainsi estimé qu'il conviendrait de développer en France des centres d'hébergement adaptés, comme en Italie ou en Belgique. Rassurée par les propos du ministre selon lesquels les prostituées d'origine étrangère reconduites dans leur pays d'origine pourraient être confiées à des plateformes gérées par des organisations non gouvernementales, elle a souhaité avoir des précisions sur ce dispositif.

Mme Marie-Jo Zimmermann a ensuite observé que la Délégation se félicitait de la disposition adoptée par le Sénat permettant de délivrer aux personnes prostituées étrangères une carte de résident en cas de condamnation définitive d'un proxénète dénoncé et s'interrogeait sur la possibilité d'élargir l'application de cette disposition au cas où les procédures engagées grâce au témoignage des personnes prostituées n'aboutiraient pas à une condamnation. Elle a, par ailleurs, rappelé que la Délégation insistait sur la nécessité de développer des mesures de prévention, d'accueil et de réinsertion à l'égard des personnes prostituées et recommandait qu'elles fassent l'objet d'un traitement fiscal approprié, passant notamment par un abandon des poursuites lorsqu'elles renonçaient à leurs activités. Elle a ajouté que la Délégation souhaitait également que des actions d'information soient menées sur la réalité de la prostitution par le biais de campagnes de sensibilisation complétées notamment par une information pédagogique dans les établissements scolaires dans le cadre des horaires consacrés à l'éducation sexuelle.

Elle a enfin interrogé le ministre sur les actions envisagées pour renforcer la coopération judiciaire et policière en matière de lutte contre les réseaux de proxénétisme au niveau européen, ainsi que sur les mesures qui seraient prises pour assurer la protection des prostituées en France comme dans leur pays d'origine.

S'attachant en premier lieu à définir les conditions d'une politique publique efficace en matière de sécurité, M. Gérard Léonard a considéré qu'il était nécessaire d'en préciser clairement les objectifs, loin des a priori idéologiques ou dogmatiques, et d'en déterminer les moyens, comme cela a été fait dans la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure et dans le projet de loi de finances pour 2003, puis d'en définir les outils juridiques, comme s'attache à le faire le présent projet de loi. Il a ensuite jugé illusoire de ne raisonner, pour la lutte contre l'insécurité, qu'en terme de territoire national et a souhaité, en conséquence, interroger le ministre sur les projets en matière de coopération internationale judiciaire, dans le cadre d'Europol, des accords de Schengen et dans la perspective d'un élargissement de l'Union européenne.

M. Bruno Le Roux a fait part de ses inquiétudes sur les conditions d'examen du texte, la date de distribution du rapport de la commission des Lois pendant l'interruption des travaux nécessitant, selon lui, des aménagements en terme de délais de dépôt d'amendements. Récusant ensuite les propos polémiques que l'on aurait prêtés à l'opposition sur le texte, s'agissant notamment de certaines dispositions qui auraient été qualifiées de « liberticides », il a souhaité qu'une réelle réflexion puisse s'engager sur le fond, afin de répondre aux attentes légitimes des Français en matière de sécurité. Il a déploré néanmoins que le garde des Sceaux ne puisse être entendu sur ce texte, en particulier pour des dispositions telles que la coopération judiciaire, évoquée notamment par Mme Marie-Jo Zimmermann. Il a rappelé que les socialistes ne pouvaient concevoir de politique de sécurité qui ne s'inscrive dans le cadre d'un respect scrupuleux des libertés publiques et ajouté que c'était la raison pour laquelle, sur un sujet tel que la fouille des véhicules, autorisée à titre transitoire sous la précédente législature dans un contexte précis lié à la lutte contre le terrorisme, les parlementaires socialistes proposeraient des amendements visant à encadrer la procédure afin d'en renforcer les garanties. S'agissant de l'utilisation des armes à feu, il a rappelé qu'il était l'auteur d'une proposition de loi déposée en 1998 dont le dispositif, s'il avait été retenu, aurait permis d'être en avance par rapport aux autres pays européens ; estimant, dans le contexte de violence actuel, qu'il était nécessaire d'aller plus loin, afin que la possession et l'usage d'une arme à feu ne soient pas banalisés, il a annoncé qu'il soutiendrait, en conséquence, les dispositions prévues à cet effet dans le texte. Il a, en revanche, exprimé son scepticisme sur les dispositions élargissant les compétences territoriales des officiers de police judiciaire, s'interrogeant notamment sur l'affaiblissement du contrôle du pouvoir judiciaire sur les activités de police qu'un tel élargissement pourrait induire. De façon plus générale, il s'est élevé contre l'idée que la police puisse être considérée comme un remède à tous les maux dont souffre la société ; il a jugé, au contraire, souhaitable de privilégier le plus possible la négociation et la démarche partenariale.

Faisant état des derniers chiffres de la délinquance connus et des instructions qui avaient été très vraisemblablement données pour privilégier les infractions dont le taux d'élucidation est élevé, il a proposé que puisse être mis en place un indice d'évaluation objectif de la sécurité intérieure. Évoquant à ce sujet les travaux de MM. Robert Pandraud et Christophe Caresche, il a souhaité que des propositions en ce sens soient examinées dans le cadre du présent projet.

S'agissant des conditions d'examen du projet de loi, le président Pascal Clément a observé que le rapport de la commission des Lois serait distribué quinze jours avant l'examen du texte en séance, ce qui représente une situation très favorable par rapport à ce qui est pratiqué habituellement.

Mme Ségolène Royal a émis le vœu qu'à la différence du projet de loi constitutionnelle sur la décentralisation, ce texte puisse donner lieu à un réel débat à l'Assemblée nationale, se traduisant par le vote de certains amendements de l'opposition. Elle s'est ensuite interrogée sur l'articulation du projet de loi avec les dispositions du futur texte présenté par le ministre de la justice, jugeant incohérent le calendrier d'examen proposé pour ces deux projets, qui auraient dû faire l'objet d'une discussion commune. Évoquant les dispositions relatives à la prostitution, elle a estimé préférable d'éviter de recourir à certaines expressions, comme celle de « plus vieux métier du monde », qui contribuent à banaliser ce phénomène. Observant qu'une très large part de la prostitution relevait en fait de l'esclavage, elle a jugé nécessaire de réfléchir à une éventuelle pénalisation du client, comme cela a été fait lors de la précédente législature pour les clients de mineurs prostitués, malgré les réserves émises par certains sénateurs, et a insisté sur l'importance de l'éducation dans ce domaine. Après avoir exprimé, à nouveau, le souhait que le Gouvernement soit ouvert aux amendements de l'opposition, elle a annoncé que son groupe ferait des propositions sur la délinquance des mineurs, afin de renforcer les mesures de prévention, notamment celles d'assistance éducative, et d'améliorer l'exécution des travaux d'intérêt général qui participent, par leur caractère pédagogique, de cette prévention. Elle a également évoqué les modifications proposées aux dispositions relatives au fichier d'empreintes génétiques, destinées à améliorer la lutte contre la pédophilie et les atteintes sexuelles contre les mineurs.

Après s'être félicité de la clarté des propos du ministre sur la finalité des fichiers informatiques, M. Patrick Delnatte a souhaité connaître les raisons justifiant les différences observées dans les modalités d'effacement des données du FNAEG et du fichier de police judiciaire.

Après avoir relevé que le projet de loi, en donnant des moyens supplémentaires à la police, permettrait de mettre fin à l'impunité actuelle des délinquants, M. Christian Vanneste a souligné l'importance d'une bonne articulation entre le travail de la police et celui de la justice, rappelant que de nombreuses peines n'étaient pas exécutées. Il s'est notamment inquiété du manque de moyens de l'institution judiciaire et de la mauvaise volonté manifestée par certains syndicats de magistrats à l'égard des réformes proposées. Rappelant que le projet de loi initial ne permettait pas l'effacement des données figurant dans les fichiers de police et de gendarmerie après un classement sans suite, il s'est interrogé sur l'opportunité de maintenir cette possibilité, introduite par le Sénat, exprimant la crainte qu'une telle mesure ne constitue une prime au manque d'efficacité de la justice.

Après s'être félicité de la volonté du ministre d'aborder le débat sur la sécurité dans la sérénité, M. Jean-Pierre Blazy a également estimé qu'il était nécessaire de traduire dans les faits les propositions formulées par MM. Christophe Caresche et Robert Pandraud dans leur rapport, soulignant que des statistiques fiables sur la délinquance contribueraient à cette sérénité. Rappelant que les socialistes avaient déjà largement travaillé, sous la précédente législature, sur les questions de sécurité, notamment à travers la loi sur la sécurité quotidienne, il a évoqué plus précisément les dispositions relatives aux rassemblements dans les halls d'immeuble, qui avaient déjà été introduites dans cette loi par un amendement parlementaire. Il a observé que la voie civile était peu utilisée pour lutter contre ces phénomènes, les bailleurs n'engageant pas de contentieux et les locataires ayant peur de le faire. Après avoir rappelé que le précédent Gouvernement s'était interrogé sur l'opportunité de pénaliser de tels comportements, il a indiqué que cette mesure, jugée inefficace, avait été écartée au profit d'une disposition permettant de donner une base juridique à l'intervention des forces de police. Soulignant que les effectifs policiers n'étaient pas suffisamment nombreux ni motivés pour disperser les regroupements dans les halls d'immeuble, il s'est interrogé sur l'application concrète de cette nouvelle infraction, doutant de son efficacité réelle.

M. André Gerin a rappelé qu'il avait toujours été favorable à la mise en œuvre d'une lutte effective contre la délinquance et la violence, refusant que la prise en compte des facteurs sociaux qui en seraient la cause ne constitue un prétexte à l'inaction en la matière. Précisant que son groupe proposerait d'amender le projet de loi, il s'est toutefois déclaré profondément opposé à sa logique même. Il a jugé nécessaire de défendre les valeurs républicaines contre le populisme et a considéré que le constat fait par le ministre ne reflétait qu'une partie de la délinquance puisqu'elle ne prenait pas en compte les actes de délinquance commis par les Français les plus aisés. Après avoir déploré la faiblesse des moyens accordés à la police d'investigation, il a souligné la nécessité d'apporter une réponse à la délinquance des mineurs, notamment celle des plus jeunes d'entre eux, qu'il a jugée particulièrement inquiétante, et souhaité la mise en place d'une politique de prévention adaptée à ces derniers. Plus généralement, stigmatisant l'« américanisation » de la société française, il a jugé que l'insécurité devait conduire à s'interroger sur le mode de fonctionnement de la société ainsi que sur le rôle de l'État pour éviter que ne s'accentue cette dérive.

M. Jean-Christophe Lagarde a, tout d'abord, relevé avec satisfaction que le ton du débat engagé aujourd'hui tranchait avec certaines appréciations outrancières portées sur le projet de loi, dont les médias se sont fait l'écho, et pouvait laisser espérer une discussion constructive. Saluant la qualité du travail préparatoire accompli par le rapporteur et soulignant que le projet de loi tendait à apporter une réponse pragmatique à l'insécurité, il a regretté que le texte ne prévoie pas d'extension des pouvoirs de police des maires, qu'il a jugé nécessaire, par exemple, pour obtenir la fermeture d'un commerce dont l'activité cause des troubles nocturnes ; il a indiqué que son groupe ferait des propositions en ce sens. Soulignant les nuisances résultant pour les habitants de l'occupation des halls d'immeubles, il a approuvé le principe de l'intervention de la police, ainsi que l'édiction de sanctions destinées à lui donner une réelle efficacité ; il a toutefois jugé souhaitable de ne donner, dans un premier temps, qu'un caractère contraventionnel à ces agissements, leur réitération permettant, dans un second temps, aux bailleurs de poursuivre les responsables. Il a également jugé nécessaire que ceux-ci puissent être expulsés dans des délais rapprochés et a, par ailleurs, insisté sur la nécessité de prendre des dispositions pour empêcher l'occupation des toits d'immeubles destinés à l'évacuation en cas d'incendie, qui sont parfois utilisés pour faire le guet afin de protéger une activité illicite. Il a ensuite regretté que le projet de loi ne prévoie pas l'aggravation des sanctions en cas de « squat » ; tout en admettant qu'il convenait de ne pas sanctionner la pauvreté, il a estimé inacceptable que, face à des avocats jouant des dates auxquelles il peut être procédé aux expulsions, des particuliers se trouvent spoliés de leur bien immobilier durant plusieurs années et le récupèrent très détérioré. Évoquant ensuite la question des gens du voyage, il s'est dit choqué par la violence extrême des réactions suscitées par les interventions de la police et a approuvé les dispositions du projet de loi en la matière, soulignant cependant que toutes les communes ne pouvaient réaliser des terrains d'accueil et jugeant qu'il revenait donc au préfet d'imposer la réalisation du schéma départemental. Après avoir souhaité qu'une réflexion soit engagée sur le « carnet de circulation » sous le couvert duquel les gens du voyage sont autorisés à se déplacer sur le territoire français et s'être interrogé sur le fait qu'ils ne puissent obtenir la délivrance d'une carte d'identité, il a souligné la nécessité de prévoir la saisie des véhicules ayant servi à commettre un délit. Enfin, il a souhaité que soit examinée la possibilité de porter plainte sous X afin de préserver l'anonymat des personnes victimes de délinquants dangereux ou de criminels, de telle sorte que le texte ne reste pas lettre morte, avant de préciser, s'agissant de l'accès au fichier de police judiciaire, que le problème était moins de savoir quelles personnes y auraient accès que de définir la nature des informations dont elles pourraient avoir connaissance.

Après avoir estimé que le projet de loi permettrait de régler de nombreux problèmes d'insécurité, M. Jacques-Alain Bénisti a insisté sur les inégalités persistantes entre les citoyens en matière de sécurité selon la collectivité dans laquelle ils résident. Prenant l'exemple de la banlieue parisienne, il a ainsi noté les disparités existant entre les communes en matière d'armement des polices municipales, de même que le déséquilibre en matière de politique de prévention qui, compte tenu des moyens qu'elle requiert, ne peut être mise en œuvre de façon satisfaisante que dans les collectivités les plus aisées. Il a également regretté que toutes les juridictions n'appliquent pas les mêmes sanctions pour réprimer certains actes de délinquance, comme la toxicomanie, la prostitution ou la mendicité. Puis, il a fait état de l'écart considérable des effectifs de la police nationale entre la capitale et les villes limitrophes comptant des quartiers sensibles et a indiqué qu'un groupe de travail avait été constitué au sein du groupe ump sur la question des banlieues sensibles. Il a, enfin, précisé qu'il déposerait des amendements sur ces différents points.

M. Emile Zuccarelli a jugé indispensable de mener une véritable réflexion sur les moyens mis en œuvre pour appliquer efficacement les nouvelles sanctions créées par le projet de loi. Il a estimé notamment que la sanction de confiscation du bien se révélait tout à fait pertinente. S'agissant des dispositions concernant la fouille des véhicules, il a fait part de son entière approbation à l'égard d'une mesure contribuant à « désanctuariser » l'automobile ; il a estimé que le caractère intouchable du véhicule avait très certainement contribué à créer un rapport psychologique particulier à la voiture, responsable des comportements dangereux de très nombreux automobilistes. S'agissant de la lutte contre la prostitution, il a souhaité que les efforts soient portés sur l'aide aux prostituées, qui sont toujours les victimes. Plaidant pour une politique très ferme à l'encontre des proxénètes, il a jugé indispensable de mettre en place, comme le propose le projet de loi, un dispositif de protection renforcée pour les prostitués acceptant de témoigner. Il a également proposé que soient aggravées les peines à l'encontre des personnes ayant empêché le témoignage ou ayant fait acte de violence sur des personnes ayant témoigné.

Rappelant qu'il avait été désigné, avec M. Patrick Delnatte, comme membre de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, M. Francis Delattre a insisté sur la qualité de l'expertise juridique apportée par cette autorité administrative indépendante ; tout en convenant que celle-ci ne pouvait substituer son appréciation à celle du Parlement, il a estimé néanmoins tout à fait indispensable de prendre en compte ses observations. Il a ainsi émis des réserves à l'égard de la disposition permettant à un service administratif de consulter des fichiers de police judiciaire et jugé indispensable d'encadrer ce dispositif en limitant à la fois les autorités susceptibles de les consulter et les finalités de la consultation.

En réponse aux intervenants, M. Nicolas Sarkozy a apporté les précisions suivantes :

-  Le renforcement de la capacité judiciaire de la police nationale passe par un élargissement de la compétence territoriale des OPJ. Le regroupement des services régionaux de police judiciaire (SRPJ) en directions interrégionales, présenté dans la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité intérieure du 29 août 2002 comme une réponse à la mobilité croissante de la délinquance, s'inscrit également dans cette perspective ; la réforme nécessite la publication d'un décret en Conseil d'État, qui devrait être effectuée au début de l'année prochaine.

-  En revanche, aucune disposition du projet de loi n'a pour effet de rendre les officiers de police judiciaire autonomes par rapport à la justice : les OPJ travaillent sous l'autorité du parquet ou du juge d'instruction et cette règle ne saurait être contestée.

-  La possibilité de procéder à des fouilles de véhicules est très attendue par les forces de police et de gendarmerie. Elle est indispensable pour l'efficacité de leur action.

-  La question de l'armement des polices municipales n'est pas abordée : la décision appartient aux maires, qui doivent soumettre aux préfets leurs propositions en la matière. Une circulaire est en cours de rédaction afin d'harmoniser la pratique des préfectures. Un texte devrait être élaboré en la matière dans le courant de l'année 2003.

-  Les personnes figurant dans les fichiers mis en œuvre par la police et la gendarmerie en application des dispositions de l'article 9 du projet de loi bénéficieront d'un droit d'accès aux données les concernant, selon les modalités particulières dites du « droit d'accès indirect » prévues par l'article 39 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. Cette procédure, qui confère à l'un des membres de la CNIL, magistrat ou ancien magistrat, le soin de veiller à l'exactitude des données concernant la personne, assure un équilibre satisfaisant entre les exigences tenant à la protection des libertés individuelles et celles visant à préserver la sûreté publique et garantit le caractère confidentiel de certaines informations figurant dans les fichiers de police judiciaire.

-  Compte tenu du caractère sensible des informations figurant dans les fichiers mis en œuvre par les services de police judiciaire, leur accès doit être strictement encadré et contrôlé. C'est pourquoi l'accès direct de sociétés de transport public intéressées par les informations qui y figurent, notamment pour le recrutement de leurs agents de sécurité, ne saurait être envisagé qu'avec la plus grande prudence.

-  Les articles 9 et 15 du projet de loi ne prévoient pas les mêmes procédures d'effacement des données pour les fichiers de police judiciaire et le fichier national des empreintes génétiques. Cette différence tient à la nature des données concernées ; les modalités de conservation et d'accès aux données à caractère génétique, par essence, plus sensibles, doivent être mieux encadrées et contrôlées que celles applicables aux données figurant dans les fichiers de police judiciaire.

-  Sans doute convient-il de veiller de façon scrupuleuse au respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Mais il est également indispensable que les droits des victimes, trop longtemps délaissés, soient davantage pris en considération et protégés qu'ils ne l'ont été par le passé. En effet, les familles des victimes ne peuvent accepter qu'un excès de prudence, voire de pudeur, juridique ne conduise à rendre inefficaces les investigations judiciaires, notamment en raison de conditions d'utilisation trop restrictives des fichiers de police judiciaire. De nombreux faits divers dramatiques, notamment en matière de crimes sexuels, auraient ainsi pu être évités si la police et la gendarmerie françaises avaient pu disposer d'un fichier d'empreintes génétiques comprenant davantage de données. C'est pourquoi les dispositions du projet de loi relatives aux différents fichiers mis en œuvre par la police et la gendarmerie doivent être examinées sans a priori, en écartant toute appréciation fondée sur de grands principes incompris de nos concitoyens. Il convient d'avoir, en la matière, une approche raisonnable et équilibrée qui ne sacrifie ni la protection des libertés individuelles ni le nécessaire renforcement de l'efficacité policière.

-  Le champ d'application du FNAEG est élargi : il peut être envisagé d'aller plus loin encore dans ce sens, sous réserve qu'un certain équilibre soit conservé.

-  Afin de préserver la tranquillité et la sécurité publiques, le projet de loi propose de créer plusieurs délits. Le caractère délictuel des infractions concernées permettra de procéder à des interpellations et à des placements en garde à vue, ce qui n'est pas le cas avec un simple régime contraventionnel. L'incarcération n'est pas nécessairement le but recherché, notamment en ce qui concerne les occupations indues des parties communes des immeubles d'habitation. A cet égard, le Gouvernement ne prétend pas que les solutions qu'il propose parviendront effectivement à rétablir l'ordre dans les halls de tous les immeubles d'habitation : il sait, en revanche, que la situation actuelle n'est pas satisfaisante et qu'il convient d'essayer, puis d'évaluer, de nouvelles mesures.

-  La transformation en délit du racolage passif ou actif répond également à une volonté de soustraire des personnes de la voie publique et, corrélativement, de la violence des proxénètes. La période de garde à vue pourra être utilisée pour recueillir des renseignements sur les réseaux. Le Gouvernement a proposé que les prostituées qui acceptent de collaborer aux enquêtes puissent obtenir un titre de séjour : l'opportunité d'associer à ce titre un droit au travail peut être débattue. La sécurité des prostituées devra également être renforcée, ainsi que le dispositif général d'accompagnement social et le soutien financier aux associations. Le travail de ces dernières est admirable mais ne saurait se substituer aux actions répressives tendant à éradiquer les réseaux. En toute hypothèse, sur cette question, les fonctionnaires de police devront respecter strictement les règles de déontologie : tout manquement à leurs obligations sera sévèrement sanctionné.

-  La création d'établissements spécialisés dans l'accueil et la protection des prostituées victimes des réseaux de proxénétisme constitue une proposition intéressante mais délicate à mettre en oeuvre. En effet, il n'est pas certain que la protection de ces personnes soit mieux assurée dans des structures de cette nature, aisément identifiables par les proxénètes, qu'au sein de centres d'accueil banalisés et disséminés sur l'ensemble du territoire.

-  La pénalisation des clients des prostituées ne semble guère efficace d'après les résultats obtenus en Suède. La mise en œuvre de ce type de mesure se heurte à la difficulté d'apporter la preuve que le délit est constitué. Le projet de loi prévoit néanmoins des sanctions pénales à l'encontre des clients de prostituées particulièrement vulnérables ou souffrant d'un handicap. La loi française sera donc plus répressive en cette matière et le Gouvernement veillera tout particulièrement à son application.

-  La coopération policière constitue, indéniablement, l'un des moyens de renforcer l'efficacité de la lutte contre les réseaux d'exploitation de la prostitution. D'ores et déjà de nombreux fonctionnaires de police ont été envoyés en poste dans les différents pays d'origine des victimes, et notamment en Roumanie. Toutefois, au-delà de cette dimension policière, des progrès dans l'harmonisation des législations pénales doivent également être réalisés, notamment en matière de saisie confiscatoire des biens, afin de s'assurer que ceux que les proxénètes ont acquis grâce à leur activité criminelle puissent être effectivement saisis, quand bien même ils se situeraient en dehors du territoire national.

-  La saisie des véhicules des gens du voyage qui persisteraient à occuper des terrains sans droit est une sanction adaptée. La vérification de la légalité du mode d'acquisition desdits véhicules rentre pleinement dans le cadre des compétences des groupes d'intervention régionaux. L'existence du « carnet de circulation » est parfois critiquée, mais ce document est d'abord destiné à garantir un droit de circuler qui n'est pas reconnu dans tous les pays.

-  L'insertion, dans le projet de loi, d'une disposition relative aux « squats », avait effectivement été envisagée. Il s'agissait d'abord de lutter contre les réseaux qui profitent des difficultés rencontrées par certains pour se loger : cette mesure a finalement été retirée pour éviter tout malentendu ou amalgame. Le problème des réseaux demeure.

-  Le Gouvernement est également ouvert à la discussion sur des sujets tels que la lutte contre la pédophilie ou la délinquance des mineurs. Il est prêt à étudier toute proposition tendant à étendre au trafic d'armes le dispositif d'infiltration et de livraison surveillée qui ne s'applique aujourd'hui qu'aux stupéfiants.

-  Un débat a déjà eu lieu au Sénat sur les qualités et les défauts du système français de comptabilisation des crimes et des délits : ce sujet semblant susciter un large intérêt, il pourra être de nouveau abordé à l'Assemblée nationale. Toute proposition de bonne foi susceptible de faire l'objet d'un large consensus sera examinée avec attention. Le Gouvernement a néanmoins choisi de conserver l'outil existant afin de ne pouvoir être accusé de manipuler les chiffres. Par ailleurs, l'outil statistique français est certainement l'un des plus performants d'Europe.

-  La coordination entre les actions engagées par les ministères de l'intérieur et de la justice ne saurait être mise en doute : deux projets de loi complémentaires sont actuellement en cours d'examen ou d'élaboration. Les magistrats sont, dans leur immense majorité, déterminés à appliquer la loi et à veiller à ce que les investigations menées par les services de la police et de la gendarmerie conduisent au prononcé de sanctions par les juridictions.

-  La coopération européenne en matière de sécurité est essentielle. Le développement des centres communs police-douane (CCPD) a été relancé par le nouveau Gouvernement. S'agissant de l'échange de renseignements, certains propos ont pu effectivement faire douter de l'efficacité de l'action d'Europol.

-  Les mesures proposées par le Gouvernement ne peuvent être accusées de « jeter de l'huile sur le feu » : ceux qui utilisent cette expression reconnaissent d'ailleurs implicitement que le feu existe et qu'il est urgent de l'éteindre. Le projet de loi aborde, tout simplement, des problèmes qui concernent directement les Français, de façon claire afin d'être compris du plus grand nombre. Procéder autrement favorise la montée des extrêmes. Des jugements excessifs ont été portés sur certaines de ses dispositions, mais le temps des outrances semble dépassé. De façon raisonnable, au-delà des clivages politiques, les républicains ont aujourd'hui l'opportunité de débattre, dans la sérénité, des solutions proposées : ceux qui accepteront ce débat, et qui sauront allier le sens de la mesure et de l'efficacité, en sortiront gagnants.

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Après le départ du ministre, la Commission a rejeté l'exception d'irrecevabilité n° 1 déposée par M. Jean-Marc Ayrault et la question préalable n° 1 déposée par M. Alain Bocquet.

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