COMMISSION des LOIS CONSTITUTIONNELLES,
de la LÉGISLATION et de l'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
de la RÉPUBLIQUE

COMPTE RENDU N° 31

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 5 mars 2003
(Séance de 16 heures 30)

Présidence de M. Pascal Clément, président

SOMMAIRE

Audition de M. Dominique Perben, garde des Sceaux, ministre de la justice, et de M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, sur le projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière (n° 638) et discussion générale (M. Richard Dell'Agnola, rapporteur).

La Commission a procédé à l'audition de M. Dominique Perben, garde des Sceaux, ministre de la justice, et de M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, et à la discussion générale du projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière (n° 638) (M. Richard Dell'Agnola, rapporteur).

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer a tout d'abord souligné que les mesures prises, depuis 30 ans, par les pouvoirs publics pour lutter contre l'insécurité routière avaient permis de réduire le nombre annuel de tués sur les routes, qui a été ramené de 17 000 en 1973 à 8 000 depuis quatre ans. Il a ensuite rappelé que le Président de la République avait décidé de faire de l'insécurité routière l'un des trois grands chantiers de son quinquennat et indiqué qu'à la suite de cette décision, des États généraux, auxquels avaient participé le Premier ministre et sept autres ministres, s'étaient tenus le 17 septembre, puis un comité interministériel de la sécurité routière le 18 décembre 2002. Il a indiqué que le projet de loi présenté en Conseil de ministres par le garde des Sceaux et lui-même avait pour objet de mettre en œuvre une partie des décisions arrêtées par le comité interministériel et devrait être accompagné, avant Pâques, d'un certain nombre d'autre textes d'ordre réglementaire portant notamment sur la prévention des accidents grâce à un suivi médical des automobilistes, l'incitation au port de la ceinture et du casque et au non usage du téléphone portable. Il a précisé que le contrôle de l'aptitude à conduire pourrait être effectué dans le cadre des visites médicales accomplies dans le milieu professionnel et que les personnes de plus de 75 ans seraient obligatoirement soumises à une visite tous les deux ans. Il a indiqué par ailleurs que le défaut du port du casque serait sanctionné du retrait de trois points de permis de conduire, l'usage de téléphone portable de deux points et la conduite avec 0,5 à 0,8 g d'alcool dans le sang, de six points.

Présentant les dispositions préventives du projet de loi, il a évoqué l'instauration du permis probatoire, destiné à favoriser une meilleure maîtrise de la conduite par les conducteurs novices : le permis qui leur serait délivré comprendrait six points, les six points complémentaires étant ajoutés après trois années s'ils n'ont pas commis d'infractions ; il en résulte, a-t-il souligné, que la commission d'une infraction assortie d'un retrait de six points, comme la conduite sous l'empire d'un état alcoolique, entraînerait l'invalidation de leur permis. Il a ajouté que le projet tendait également à mettre fin à la commercialisation des détecteurs de radars et des kits de débridage des cyclomoteurs, à favoriser le déplacement des obstacles dangereux placés en bordure de route, notamment par EDF ou France Télécom, à retirer du trafic les véhicules gravement accidentés, à mieux prévenir les risques d'agression des inspecteurs du permis de conduire, à mettre en place des chronotachygraphes électroniques sur les poids lourds conformément aux exigences de la réglementation communautaire, à mieux assurer le respect de la réglementation du travail par les transporteurs routiers de voyageurs et de marchandises, enfin, à obtenir des collectivités territoriales gestionnaires des réseaux de voirie les informations nécessaires à la connaissance de l'accidentologie.

M. Dominique Perben, garde des Sceaux, ministre de la justice, a souligné que la préparation du projet de loi avait été l'occasion d'un dialogue nourri avec de nombreuses associations de victimes et d'usagers de la route et souligné que l'objectif du texte n'était pas de modifier des règles, qui avaient trop souvent changé par le passé, mais de faire en sorte qu'elles soient rigoureusement respectées, ce qui constituait un véritable changement de culture.

Il a estimé que ce but pourrait être atteint grâce à trois séries de mesures : la première tend à aggraver les peines en cas d'homicide et de blessures involontaires, afin de dissuader plus efficacement des comportements qui sont assimilables à d'authentiques formes de violence, l'analyse des accidents les plus graves montrant qu'ils réunissent toujours deux ou trois des circonstances aggravantes que sont, notamment, l'état alcoolique, la conduite après usage de stupéfiants, le délit de fuite, la conduite sans permis ou le grand excès de vitesse ; la deuxième mesure est une modification des règles de récidive, qui seront plus strictes ; enfin, le projet de loi diversifie les peines complémentaires et supprime, dans les cas les plus graves, la possibilité d'aménager la peine de suspension du permis de conduire.

Abordant la question des amendes forfaitaires, aujourd'hui peu efficaces, le ministre a insisté sur la mise en place du contrôle automatisé grâce au recours à des caméras numériques et à l'envoi automatique au propriétaire du véhicule de l'amende correspondante. Donnant l'exemple d'une expérience menée pendant une seule nuit dans un tunnel alpin et qui a donné lieu à un nombre de procès-verbaux équivalent à celui qui était traité en une année par le tribunal compétent, il a fait ressortir les avantages du caractère automatique de la procédure, à défaut duquel les juridictions seraient totalement engorgées.

M. Richard Dell'Agnola, rapporteur, a observé que ce projet de loi constituait l'aboutissement d'un long processus d'évolution des mentalités, qui conduit désormais l'ensemble de la population française à considérer la violence routière comme l'un des principaux fléaux dont souffre notre société et incite les pouvoirs publics à prendre, enfin, les mesures nécessaires pour lutter contre ce phénomène. Rappelant que le texte tendait principalement à améliorer l'application des sanctions prononcées à l'encontre des conducteurs dangereux, il s'est félicité des dispositions interdisant au juge d'aménager la peine de suspension du permis de conduire dans les cas les plus graves, par exemple lorsque le conducteur du véhicule a, par maladresse, imprudence ou négligence, commis un homicide involontaire. Abordant ensuite la disposition du texte faisant du dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h une circonstance aggravante, il s'est interrogé sur les moyens dont peuvent disposent les magistrats pour établir avec certitude, après un accident, la vitesse des véhicules et a exprimé la crainte que son évaluation ne fasse l'objet de nombreuses contestations et ne soit à l'origine d'un important contentieux. Évoquant l'instauration d'un permis probatoire d'une durée de trois ans, il a demandé comment cette nouvelle disposition allait s'articuler avec le développement de la conduite accompagnée, dont les résultats en matière de sécurité routière étaient satisfaisants et qu'il convenait donc d'encourager. Il a ensuite souhaité savoir si des mesures étaient envisagées pour améliorer l'identification des conducteurs de motos en infraction, qui est actuellement largement défaillante. Ayant fait observé que le renforcement de l'application des sanctions prononcées à l'encontre des conducteurs dangereux supposait que leur adresse mentionnée sur la carte grise soit exacte, ce qui n'est pas toujours le cas, il a demandé si des initiatives allaient être prises pour améliorer l'actualisation des informations figurant dans les fichiers de cartes grises gérés par les services des préfectures.

M. Gérard Léonard s'est demandé si l'immatriculation obligatoire de tous les deux roues était désormais envisagée, ajoutant que, compte tenu du nombre des accidents provoqués ou subis par les conducteurs de deux roues, une telle décision serait hautement souhaitable, bien que vraisemblablement coûteuse, et a suggéré que, dans un premier temps, son champ d'application soit limité aux seules acquisitions de cyclomoteurs neufs. Tout en approuvant la volonté du Gouvernement de lutter contre la violence routière, il a souligné l'importance des actions éducatives en ce domaine, y compris au sein des établissements scolaires, et a appelé de ses vœux leur développement. S'agissant des « points noirs routiers », particulièrement dangereux pour la circulation et d'ailleurs identifiés par les pouvoirs publics, il a souhaité savoir si le Gouvernement prendrait les mesures de sécurité qui s'imposent. Ayant observé que de très nombreux accidents de la route étaient provoqués par des conducteurs de poids lourds étrangers, il a exprimé la crainte que les dispositions du projet de loi aggravant les sanctions des délits routiers ne pénalisent davantage, voire exclusivement, les chauffeurs routiers français, la poursuite des chauffeurs étrangers étant extrêmement difficile à défaut d'une coopération européenne appropriée.

Faisant référence à l'extension des dispositifs d'automatisation des contrôles des infractions routières, M. René Dosière a souhaité savoir si les problèmes d'homologation et de compatibilité des matériels, observés dans le cadre de l'expérimentation menée dans un nombre limité de départements, avaient été résolus, quand les dispositifs techniques seraient opérationnels et combien d'appareils de ce type seraient installés d'ici à la fin de l'année 2003. Puis, rappelant que le produit des amendes forfaitaires est reversé aux collectivités locales et que celui des amendes majorées revient à l'État, dans des conditions contestables, il s'est interrogé sur la future répartition du produit des amendes entre les collectivités locales et l'État dans le cadre de la généralisation de la forfaitisation prévue par le projet de loi. Il a interrogé le ministre de l'équipement et des transports sur le montant des crédits destinés à l'entretien de la voirie concerné par le gel global de 4,5 milliards d'euros appliqué à l'ensemble des crédits votés dans la loi de finances pour 2003. Il a enfin souhaité connaître le montant du budget de communication affecté à la sécurité routière en 2003.

M. Francis Delattre s'est déclaré dubitatif à l'égard de l'aggravation des peines envisagée, rappelant, d'une part, que tous les textes législatifs analogues avaient montré leurs limites et que, d'autre part, le doublement ou le triplement des peines n'avait guère de sens en l'absence de renforcement des moyens de la police de la route. Il a souligné, en outre, qu'une application stricte du projet de loi se heurterait très rapidement aux limites des capacités pénitentiaires. Il a ensuite souhaité savoir s'il existait une définition juridique claire de la « faute de maladresse », qui est passible d'un emprisonnement de trois ans, avant de s'interroger sur l'efficacité des contrôles de vétusté des véhicules. Évoquant l'accroissement des dangers liés à la conduite automobile en cas de pluie, il a souhaité savoir si les sociétés de construction d'autoroutes pouvaient être mises dans l'obligation de revêtir les chaussées de matériaux réduisant le risque d'accident et de veiller à l'éclairage approprié des tronçons dangereux.

Sur la base du double constat, unanime, selon lequel, d'une part, la lutte contre la violence routière représente un enjeu majeur, et, d'autre part, la vitesse, notamment la très grande vitesse, constitue l'une des causes principales de la mortalité routière, M. Philippe Houillon s'est demandé pour quelle raison aucune disposition n'était prévue pour limiter la vitesse des véhicules. Tout en se déclarant conscient des problèmes d'harmonisation européenne ou internationale que de telles mesures soulèveraient, il a, en effet, jugé paradoxal que la cause majeure de la violence routière, dès lors qu'elle était connue, ne fût pas éradiquée. Dans le même esprit, il a jugé quelque peu hypocrite de ne pas aborder la question de la médiatisation des performances routières des véhicules.

Rejoignant les préoccupations du rapporteur, M. Georges Fenech s'est déclaré sceptique sur l'applicabilité de la notion de très grande vitesse comme circonstance aggravante, s'interrogeant notamment sur la possibilité de mesurer celle-ci à la suite d'un accident. Outre le contentieux que cette notion ne manquerait pas de susciter pour les praticiens du droit, il a estimé qu'elle contribuait à faire naître dans l'esprit des conducteurs l'idée d'une tolérance de 50 km/h au-delà de la vitesse maximale autorisée. Il s'est donc demandé s'il ne conviendrait pas plutôt de définir comme circonstance aggravante la notion de vitesse manifestement excessive, en laissant de la sorte une marge d'appréciation au juge.

M. Jérôme Lambert a reconnu que le projet de loi suscitait un sentiment de crainte chez les automobilistes, qui les amènera peut-être à modifier leur comportement. Il a déploré néanmoins que l'on en arrive aujourd'hui à de telles extrémités, avec des sanctions aussi lourdes que celles prévues dans le projet de loi ; il a estimé que, de ce point de vue, le texte était un constat d'échec des politiques de prévention et d'éducation menées jusqu'à présent. Il a ensuite mis en avant les caractéristiques techniques des véhicules, et notamment des motocyclettes, qui incitent bien souvent au dépassement des limites de vitesse autorisées. Il a également cité le manque d'entretien de certaines routes, qui, conjugué à un trafic routier important, peuvent se révéler particulièrement dangereux en terme de vies humaines. Évoquant le contenu du projet de loi, il a exprimé la crainte que la mise en place d'une consignation préalable à la contestation des amendes constitue une injustice sociale. Il a également émis des réserves sur la suppression des permis blancs en cas d'accident corporel grave ou de décès, estimant qu'il conviendrait de sanctionner la faute en elle-même et non de déterminer la sanction en fonction des conséquences de la faute. Tout en déclarant partager la philosophie du texte, il a regretté que la réflexion n'ait pas été approfondie sur les moyens d'encourager les alternatives à l'automobile, notamment dans les cas des trajets quotidiens pour se rendre au travail, qui sont, d'après les statistiques, les plus meurtriers.

En écho aux propos de M. Philippe Houillon, M. Didier Quentin a appelé de ses vœux une réflexion à l'échelle européenne sur les limitations de vitesse. Il a rappelé que certains pays, tels que les Etats-unis ou le Japon, avaient mis en place des limites de vitesse très strictes, avec de bons résultats en terme de sécurité routière. Tout en exprimant sa satisfaction à l'égard des 54 millions d'euros destinés à résoudre les points noirs en matière de sécurité routière, il a souligné que certains d'entre eux pourraient être aisément traités par une simple modification de signalétique. Il a évoqué par ailleurs le cas des véhicules sans permis, qui peuvent, compte tenu de leur vitesse réduite, se révéler très dangereux en zone rurale. Il a ensuite déploré certains comportements en zone urbaine, notamment des rollers ou des cyclistes sans feu de signalisation, qui sont des causes et des victimes d'accidents.

M. Guy Geoffroy, après s'être félicité des dispositions du projet instituant un permis probatoire, s'est interrogé sur la portée de celui-ci et souhaité savoir si seuls les nouveaux conducteurs seraient soumis à cette obligation, ou si la mesure s'appliquerait également à ceux dont le permis a été retiré.

M. Sébastien Huygue s'est demandé si le projet de loi ne cédait pas trop à la facilité en renvoyant de façon excessive la responsabilité de l'insécurité routière à la vitesse, alors que le problème est d'abord une question de comportement. Il a cité l'exemple de l'Allemagne, pays dans lequel la vitesse n'est pas limitée sur certains axes de circulation et qui obtient pourtant de meilleurs résultats sur le plan de la sécurité routière, grâce au comportement plus responsable des conducteurs ; il a regretté que les contrôles d'alcoolémie soient extrêmement rares, alors qu'ils permettent d'identifier et de réprimer des comportements beaucoup plus graves. Il s'est demandé si la multiplication des cas de retrait et d'annulation de permis de conduire ne risquait pas d'entraîner une certaine forme d'exclusion sociale, contraignant certains conducteurs à perdre leur travail ou à ne pas respecter la sanction dont ils ont fait l'objet. Il a suggéré, par ailleurs, de prévoir, en cas de vente du véhicule, une obligation de transmettre aux préfectures la vignette représentant le certificat d'assurance, afin d'éviter tout risque de fraude.

Le président Pascal Clément a jugé opportun que le législateur affirme clairement sa volonté de réprimer l'insécurité routière. Il s'est demandé, néanmoins, si cette action ne pourrait également s'appuyer sur des mesures « rédemptrices » : infliger de très fortes amendes à l'auteur d'un délit routier non intentionnel pourrait être à la fois plus juste et plus efficace qu'une longue peine de prison, sanction qui, lorsqu'elle est disproportionnée, ne répare pas le mal mais détruit durablement l'existence du fautif, dont on peut penser qu'il est déjà traumatisé par les conséquences irrémédiables de son acte. Il a suggéré qu'à côté d'une répression reposant sur des peines d'emprisonnement, puisse exister une autre forme de répression, composée de sanctions financières, ces dernières ne compromettant pas le droit à une « deuxième chance ».

M. Jean Tibéri a jugé cette réflexion intéressante et a souhaité que le législateur s'interroge sur le sens de la peine en général, et de la prison en particulier.

En réponse aux intervenants, le garde des Sceaux a apporté les précisions suivantes :

- Le Gouvernement ne propose pas de changer les règles, mais simplement de les faire appliquer grâce à un certain nombre de mesures nouvelles.

- La circonstance aggravante liée à la vitesse pour les homicides et les blessures involontaires concerne la contravention et le délit de grand excès de vitesse. S'il n'est pas possible de constater ces infractions, ce qui risque d'être le cas jusqu'à ce que les véhicules soient équipés de boîtes noires, la circonstance aggravante ne pourra pas être établie. Le Gouvernement a choisi de ne retenir que les dépassements de vitesse supérieurs à 50 km/h. La rédaction suggérée par M. Georges Fenech est trop floue et laisserait une marge d'appréciation excessive aux tribunaux.

- La référence à la faute de maladresse est une transposition de l'article 221-6 du code pénal sur l'homicide involontaire.

- Les peines d'homicide et de blessures involontaires résultant de l'imprudence d'un conducteur sont respectivement portées de 3 à 5 ans d'emprisonnement et de 2 à 3 ans d'emprisonnement par le projet de loi. Lorsque les faits sont commis avec une circonstance aggravante, les peines passent à 5 et 7 ans d'emprisonnement et à 7 et 10 ans d'emprisonnement lorsque deux ou plus de ces circonstances sont réunies. La peine maximale de 10 ans d'emprisonnement peut déjà être appliquée en cas d'homicide aggravé en état alcoolique ou après usage de stupéfiants.

- En 2001, la peine la plus lourde d'emprisonnement prononcée pour homicide involontaire est une peine de 7 ans fermes, mais la plupart des peines d'emprisonnement prononcées pour les homicides ou les blessures involontaires le sont avec sursis. Le projet prévoit par ailleurs toute une série de peines complémentaires, parmi lesquelles figure la suspension ou le retrait du permis de conduire, qui pourront être appliquées à ces infractions.

- Le problème n'est pas la malhonnêteté de l'auteur de l'infraction au code de la route, mais son éventuelle irresponsabilité, chaque citoyen se devant d'être responsable de son véhicule ; à partir du moment où l'on accepte que l'irresponsabilité soit sanctionnée pénalement, on peut s'interroger sur le niveau de la sanction. La dérive que l'on constate actuellement en matière de violence routière, ave la multiplication de faits divers qui bouleversent l'opinion publique, appelle, du point de vue du Gouvernement, des sanctions au moins aussi importantes que celles prévues pour un vol avec effraction.

- L'application de la procédure de l'amende forfaitaire aux véhicules étrangers ne sera possible que si ceux-ci sont effectivement arrêtés ; dans le cas contraire, le paiement de l'amende relèvera des règles de droit commun du contentieux international.

- Une mission interministérielle a été créée pour mettre en œuvre le système de contrôle automatisé, notamment pour homologuer le matériel qui sera utilisé.

- Les infractions concernées par la suppression des permis blancs correspondent aux délits routiers les plus graves : homicide et blessures involontaires, conduite en état d'ivresse ou après usage de stupéfiants, grand excès de vitesse et délit de fuite. Dans les autres cas, les magistrats pourront aménager, si nécessaire, la peine de suspension du permis de conduire, afin de tenir compte des contraintes auxquelles doivent faire face les auteurs d'infractions, notamment en milieu rural.

- Il est possible de réfléchir à une initiative internationale sur la limitation de la vitesse des véhicules, mais il faut garder à l'esprit que la vitesse excessive est une spécificité française, partagée par quelques pays du sud de l'Europe.

Le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer a également apporté les éléments d'information suivants :

- La prise en compte de la conduite accompagnée dans les modalités d'octroi du permis probatoire est une piste de réflexion intéressante, à condition que l'on puisse s'assurer de sa constitutionnalité.

- L'adaptation des jeunes à la conduite est progressive, puisqu'elle comporte une attestation scolaire en 5e et en 3e, puis une formation avec conduite accompagnée à partir de 16 ans.

- Le permis probatoire s'appliquera à l'ensemble des personnes sollicitant un permis de conduire, y compris à celles ayant vu leur précédent permis de conduire annulé.

- Il est exact que beaucoup de personnes conduisent déjà sans permis ; pour éviter une augmentation de ce nombre liée à la probable progression du nombre de retrait de permis, il est nécessaire de réfléchir à l'application de peines complémentaires de confiscation ou d'immobilisation du véhicule en cas de conduite sans permis.

- Le juge conservera une marge d'appréciation même en cas d'interdiction de permis blanc, puisqu'il pourra moduler la durée de la suspension du permis de conduire.

- Le problème de la répartition du produit des amendes entre l'État et les collectivités locales est actuellement à l'étude, même si l'on peut faire observer que les recettes supplémentaires seront obtenues grâce à du matériel financé par l'État.

- Les causes des accidents mortels et corporels se répartissent de la manière suivante : 50 % sont imputables à la vitesse, 30 % à l'alcool et 20 % à l'absence de ceinture de sécurité.

- Afin de responsabiliser le conducteur, le Gouvernement envisage, à titre expérimental, de faire figurer sur le ticket d'autoroute la vitesse moyenne entre deux péages et de pratiquer des éthylotests préventifs.

- Les constructeurs automobiles ont conscience de la puissance excessive des véhicules qu'ils construisent au regard des limitations de vitesse en vigueur ; on s'oriente toutefois vers une banalisation des régulateurs de vitesse, notamment sonores.

- L'obligation d'immatriculation des deux roues se heurte à des problèmes de moyens, la solution consistant sans doute à limiter cette obligation aux nouveaux cyclomoteurs.

- Les crédits consacrés à la résorption des points noirs, soit 54 millions d'euros en 2003, n'ont fait l'objet d'aucune mesure de gel. Par ailleurs, le projet de loi comporte un article destiné à faciliter le déplacement des obstacles latéraux, qui sont à l'origine de nombreuses victimes. Lorsque les lois de décentralisation auront été votées, les collectivités locales prendront le relais de l'État pour l'aménagement des routes nationales. S'agissant des autoroutes, il serait sans doute nécessaire de revoir leurs modalités de concession.

- Les infractions commises par les poids lourds étrangers constituent un vrai problème, qui ne pourra être résolu à terme que par une concertation européenne et une immobilisation des véhicules.

- Si la politique française de lutte contre l'insécurité routière donne de bons résultats, il sera envisageable de partager notre expérience avec des pays européens, comme c'est déjà le cas avec la Belgique.

- 12,5 millions d'euros ont été consacrés en 2002 et 2003 à la communication sur la sécurité routière. Les moyens humains seront fortement augmentés, puisque 1 200 personnes devraient être affectées à la sécurité routière en plus des effectifs dégagés par l'automatisation des relevés d'infractions.


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