COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES, DE L'ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE

COMPTE RENDU N° 13

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 8 novembre 2005
(Séance de 17 heures 30)

Présidence de M. Patrick Ollier, Président

SOMMAIRE

 

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- Avis sur les crédits de la mission agriculture, pêche, forêt et affaires rurales (MM. Antoine HERTH et Aimé KERGUÉRIS, rapporteurs pour avis) : :


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- Examen de la proposition de résolution de M. Jean-Marie Sermier (n° 2603) sur la réforme de l'organisation commune des marchés dans le secteur du sucre [COM (2005) 263 final / E2916] (M. Jean-Louis CHRIST, rapporteur)



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La Commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire a examiné pour avis les crédits de la mission « agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » pour 2006, sur le rapport de MM. Antoine HERTH et Aimé KERGUÉRIS, rapporteurs pour avis.

L'un des deux rapporteurs pour avis, M. Antoine Herth, a rappelé que le budget pour 2006 était marqué par l'application pleine et entière de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001, ce qui se traduisait par une modification profonde de la présentation des crédits du Ministère de l'agriculture.

Le ministère gère en effet les crédits de la mission agriculture, pêche, forêt et affaires rurales, mais aussi des crédits inscrits à des missions interministérielles : ceux du programme « sécurité et qualité sanitaire de l'alimentation », qui relève de la mission « sécurité sanitaire », ceux du programme « enseignement supérieur et recherche agricole », inscrit à la mission « recherche et enseignement supérieur », et ceux du programme enseignement technique agricole, compris dans la mission « enseignement scolaire ».

Il a précisé que la part des crédits de la mission agriculture, pêche, forêt et affaires rurales représentait 60 % du total des moyens du ministère en 2006.

Il a ensuite souligné la relative stabilité des crédits de cette mission, les crédits en faveur de l'enseignement supérieur et de la recherche agricole augmentant de 10,5 %, tandis que ceux du programme « sécurité alimentaire » croissent de 7 %.

Les concours communautaires au titre des premier et deuxième piliers de la PAC s'ajouteront, à hauteur de 10,5 milliards d'euros, à ces crédits ; il convient également de considérer le soutien financier des collectivités locales, qui s'élevait à 897 millions d'euros en 2002.

Il a rappelé la suppression du budget annexe des prestations sociales agricoles et le rattachement à la loi de financement de la sécurité sociale des crédits de la protection sociale agricole.

S'agissant des principales orientations du budget pour 2006, il a tout d'abord salué l'effort de modernisation et de rationalisation de l'organisation du ministère de l'agriculture et de la pêche, en particulier grâce à la réforme des offices agricoles, ainsi que l'effort en faveur de la maîtrise des dépenses de personnel, grâce à la suppression de 681 équivalents temps plein travaillé (EPTP) dont 205 au titre de la mission agriculture, pêche, forêt et affaires rurales.

Le ministère entend également mettre en œuvre un pilotage fin de son action au moyen d'une déconcentration des crédits et d'une responsabilisation des personnels chargés d'assurer l'exécution des programmes dont le ministère assure la gestion. La mise en place de la stratégie ministérielle de réforme s'est en outre traduite par la création d'un secrétariat général au sein du ministère.

La mission agriculture, pêche, forêt et affaires rurales comprend quatre programmes.

Le programme « gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural » est doté de 1,474 milliard d'euros, soit 50 % du total des crédits de cette mission, et comporte sept actions :

- soutien aux territoires et aux acteurs ruraux ;

- politique du cheval ;

- appui au renouvellement des exploitations agricoles ;

- modernisation des exploitations et maîtrise des pollutions ;

- mesures agro-environnementales et territoriales ;

- gestion durable des pêches maritimes et de l'aquaculture ;

- mise en œuvre des politiques de l'agriculture et du développement rural, de valorisation des produits et orientations des marchés et de la forêt.

Il a souligné que les crédits ne connaissaient pas d'évolution sensible, précisant toutefois que la politique de l'installation se renouvelait, en particulier grâce à la mise en œuvre du plan crédit-transmission, dont la création est prévue par le projet de loi d'orientation agricole, et qui mobilisera 20 millions d'euros par an, une fois le dispositif monté en charge. Il a également indiqué à ce sujet qu'il allait proposer à la Commission d'adopter un amendement tendant à augmenter les crédits alloués au Fonds d'incitation et de communication pour l'installation en agriculture.

Les mesures agro-environnementales bénéficieront quant à elles d'une hausse des financements communautaires, dont la part dans le total des moyens qui y sont consacrés devrait passer de 50 à 60 %.

Soulignant que l'objectif de 10 000 contrats d'agriculture durable ne pourra pas être atteint, le rapporteur s'est toutefois réjoui de l'aide de 1 000 euros qui sera versée à chaque exploitation qualifiée au titre de l'agriculture raisonnée, ce qui concourra à la mise en œuvre du principe de l'écoconditionnalité.

Il a relevé que l'objectif affiché en matière d'ICHN (indemnités compensatoires de handicaps naturels) paraissait insuffisant, et qu'un amendement déposé par M. Alain Marleix au nom de la Commission des Finances aurait pour objet d'en augmenter les crédits.

Le programme « valorisation des produits, orientation et régulation des marchés » s'élève à 741 millions d'euros de crédits, soit une hausse de 4,52 % par rapport à 2005, et comporte quatre actions :

- adaptation des filières à l'évolution des marchés ;

- gestion des aléas de production ;

- promotion à l'international des produits et du modèle agroalimentaire français ; 

- gestion des aides nationales et communautaires.

Les crédits de la première de ces actions augmentent de 2 %, effort qui s'inscrit dans la continuité de la démarche engagée dans le cadre du projet de loi d'orientation agricole, qui entend œuvrer à une meilleure compétitivité des filières. Il a souligné la stabilité des crédits de l'Institut national des appellations d'origine (INAO) en dépit des missions supplémentaires qu'il devra assurer en application du PLOA, mais a noté l'augmentation de 3 millions d'euros des crédits finançant la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes (PMTVA).

Les crédits du programme « forêt » connaissent une diminution de 5,5 %, qui s'explique notamment par la fin des efforts occasionnés par la tempête de 1999, tout particulièrement s'agissant des investissements forestiers et de la charge de bonification des prêts à la forêt.

Le programme « conduite et pilotage des politiques de l'agriculture » constitue le programme support de la mission agriculture, regroupant notamment les crédits en faveur des services centraux et des services déconcentrés du ministère.

Le rapporteur a ensuite ajouté qu'était réaffirmée la priorité du ministère en faveur de la maîtrise des risques de l'activité agricole avec le développement de l'assurance-récolte, ainsi que celle en faveur d'une agriculture durable, grâce au programme de maîtrise des pollutions agricoles et du plan de modernisation des bâtiments d'élevage.

Il a également salué l'augmentation des aides en faveur du redressement des exploitations en difficultés (AGRIDIFF), alors que ces aides étaient quasi nulles l'année précédente.

La mise en œuvre du plan national de développement des industries agroalimentaires s'inscrit par ailleurs dans la même dynamique que les dispositions du projet de loi d'orientation agricole visant à renforcer la compétitivité et la démarche d'entreprise, l'industrie agroalimentaire constituant le fer de lance de l'agriculture.

Il a également souligné la suppression de l'Agence de développement agricole et rural (ADAR), à laquelle est substitué un compte d'affectation spécial.

Enfin, il a conclu en invitant la Commission à émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission.

Le Président Patrick Ollier s'est réjoui que l'absence du ministre permît aux rapporteurs d'effectuer un véritable travail d'analyse, et à la Commission d'avoir un vrai débat approfondi. Puis il a cédé la parole à M. Aimé Kergueris, rapporteur pour avis sur les crédits de la pêche.

M. Aimé Kergueris a souligné que le montant de la dotation prévue pour la politique de la pêche en 2006 traduisait la volonté du Gouvernement de poursuivre les actions en faveur du secteur de la pêche et de l'aquaculture, et notamment de répondre aux priorités fixées dans le budget opérationnel du programme pêche : l'adaptation de la filière, l'orientation de la production et des marchés et le suivi du milieu et la gestion durable des ressources halieutiques.

A cet égard, il a indiqué qu'une approche de long terme était réclamée depuis longtemps par la profession pour la gestion des ressources halieutiques, et a précisé que, s'agissant des aides communautaires, seules celles qui concernaient la sécurité et les conditions de travail étaient maintenues.

Evoquant ensuite la poursuite des efforts de modernisation du secteur et de connaissance du marché, ainsi que l'intensification de la politique de gestion durable de la ressource, il a souligné qu'en crédits de paiement, le montant total du projet de budget pour 2006 était stable par rapport à la loi de finances pour 2005, avec une baisse de 1,13 %.

S'agissant de l'adaptation de la filière, il a précisé que 10 500 000 euros devraient être affectés à l'adaptation de la filière en 2006, ce qui équivaut à une baisse de près de 4 millions d'euros par rapport à 2005. Il a noté que la diminution constatée résultait notamment de l'application des dispositions communautaires imposant la suppression des aides prévues pour la construction de navires de pêche.

Eu égard à l'orientation de la production et des marchés, il a indiqué que 14 360 000 euros devraient abonder les crédits en faveur de l'orientation de la production et des marchés en 2006, contre 15 343 000 en 2005. Il a précisé que cette diminution était due à l'ajustement de la dotation allouée à l'Office national interprofessionnel des produits de la mer et de l'aquaculture (OFIMER) et qu'elle tenait également compte, selon lui, de la plus forte mobilisation des fonds européens (IFOP) au profit des organisations de producteurs.

En ce qui concerne le suivi des milieux et la gestion durable des ressources, il a souligné que 7 120 000 euros devraient enfin être consacrés au suivi du milieu et à la gestion durable des ressources halieutiques en augmentation de 182 % par rapport à 2005. Il a signalé que la hausse des crédits irait abonder :

- les actions de suivi sanitaire des coquillages ;

- l'ajustement de l'effort de pêche grâce à un budget de 3 millions d'euros en 2006, alors qu'il n'y avait pas de dotation prévue à cet effet en 2005. Il a précisé que ces crédits permettraient de financer les aides à la sortie de flotte et a rappelé à cet égard les obligations qui pesaient sur la France en termes de limitation de l'accès aux pêcheries et de réductions ciblées de l'effort de pêche dans le cadre notamment des plans de restauration ;

- l'intensification du contrôle des pêches grâce aux 1 450 000 d'euros prévus pour 2006 contre 520 227 euros pour 2005. Le rapporteur s'est félicité de cette mesure prise dans le cadre de la politique commune de la pêche (PCP), les professionnels français se plaignant d'être plus contrôlés que d'autres dans l'Union européenne. Il a ensuite précisé que celle-ci se traduirait par l'embarquement d'observateurs à bord de navires qui exploitent des stocks faisant l'objet de mesures techniques spécifiques.

Evoquant le lancement du plan d'avenir pour la pêche, lors de la table ronde qui s'est tenue à Nantes le 14 octobre 2005 entre le ministre de l'agriculture et de la pêche et les représentants du secteur, le rapporteur pour avis a souhaité tout d'abord revenir sur la question de la gestion de la ressource, rappelant que dans le cadre du sommet de Johannesburg en 2002, la France s'était engagée à atteindre en 2015 un niveau optimal de ressources nécessitant une diminution de l'effort de pêche dans la plupart des pêcheries. Dans ce cadre, devrait être mis en œuvre un plan de sortie de flotte doté de 30 millions d'euros cofinancés par l'Union européenne et affectés dès 2006.

En outre, le rapporteur pour avis a rappelé que le Gouvernement envisageait sur le long terme d'améliorer la gestion nationale des quotas pour mieux répartir la pêche sur l'année et prendre des mesures de gestion suffisamment en amont. A cet égard, il a noté que ce projet rejoignait les propositions formulées par le Conseil économique et sociale dans le cadre de son avis « La pêche, acteur de la vie du littoral métropolitain : l'heure des choix » en faveur de l'attribution de quotas de pêche sur une base pluriannuelle.

Il a souligné que le Gouvernement envisageait également la création d'un fonds de financement de la recherche stratégique en matière de pêche, fonds qui pourrait bénéficier d'un cofinancement communautaire afin de déterminer les espèces à pêcher à l'avenir ainsi que les nouvelles techniques à mettre en œuvre. Selon le rapporteur, une somme de 4 millions d'euros pourrait d'ores et déjà lui être affectée en 2006.

Revenant dans un second temps sur la rentabilité du secteur, il a rappelé que les réflexions menées dans le cadre du projet de loi d'orientation agricole sur la forme sociétale en agriculture et le nécessaire renforcement de l'organisation de l'offre devaient trouver leur prolongement en matière de pêche et d'aquaculture. Il a signalé qu'était ainsi envisagée la création d'un fonds support à l'activité de l'entreprise de pêche, sur le modèle du fonds agricole. Enfin, il a indiqué que le Gouvernement se fixait pour objectif d'améliorer les conditions de mise en marché par le décloisonnement des marchés et une meilleure mise en réseau des criées.

Enfin, s'agissant de l'attractivité du métier, le rapporteur a observé que le secteur souffrait d'une image négative et qu'il traversait une crise des vocations. Il a souligné que le plan d'avenir proposait à cet égard de rénover les formations en créant des baccalauréats professionnels et en instaurant des passerelles avec les autres filières. Il s'est également félicité de la proposition du Gouvernement de renforcer la sécurité afin de réduire la dangerosité du métier de marin-pêcheur, estimant que c'était le secteur qui dénombrait le plus d'accidents au travail.

Néanmoins le rapporteur pour avis, tout en approuvant ces orientations, a estimé qu'elles ne remplaceraient pas une véritable politique visant à assurer un revenu correct aux professionnels en échange de leur travail. Il a, à cet égard, formulé le souhait que les annonces faites par le ministre de l'agriculture et de la pêche relatives à la rénovation du Fonds de prévention des aléas pêche fussent rapidement précisées afin que l'on connût au plus tôt le cadre dans lequel s'inscriraient désormais ses interventions.

Enfin, rappelant que le revenu des pêcheurs était fortement soumis aux aléas de la conjoncture et notamment des cours de l'énergie, il a suggéré que le projet de loi d'orientation agricole prévoie une exception à la non commercialisation des huiles végétales pures produites par les exploitations agricoles au profit des marins pêcheurs pour leur propre consommation.

Puis, il a rendu un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à la pêche au sein de la mission « agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ».

S'exprimant au nom du groupe socialiste, M. Jean Gaubert a rappelé que le rapporteur, M. Antoine Herth, avait fait un certain nombre de promesses concernant la traduction budgétaire des mesures discutées dans le cadre de l'examen par l'Assemblée nationale en première lecture du projet de loi d'orientation agricole. Or, il a estimé que le budget de l'agriculture pour 2006 manquait d'ambition. Tout en saluant, à l'instar du Président Patrick Ollier, la clarté de la présentation du rapporteur, M. Jean Gaubert a néanmoins regretté que celle-ci ne se fût pas accompagnée de recommandations fortes à l'attention du Gouvernement. Il a en effet considéré qu'avec un simple budget de reconduction, les dispositions de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux et du projet de loi d'orientation agricole, actuellement en discussion au Sénat, ne pourraient pas être appliquées.

S'agissant du programme « Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et du développement rural », M. Jean Gaubert a souligné sa baisse en dépit des ambitions affichées par le Gouvernement en termes d'aménagement rural. Quant à la politique du cheval, il a également constaté la diminution des crédits qui lui sont alloués alors qu'elle avait donné lieu à un grand débat dans l'hémicycle qui devait être suivi d'une montée en puissance de ses dispositifs. Eu égard à l'appui au renouvellement des générations en agriculture, M. Jean Gaubert s'est estimé peu surpris que cela ne constituât plus une priorité, comme l'avaient montré les débats du projet de loi d'orientation agricole. Il a concédé que M. Antoine Herth avait eu l'honnêteté de dire que les 10 000 contrats d'agriculture durable annoncés n'étaient pas au rendez-vous mais a considéré qu'en tout état de cause les objectifs du Gouvernement en la matière étaient insuffisants et a qualifié les CAD de « morts-nés ».

Revenant sur la modernisation des exploitations, M. Jean Gaubert a rappelé que si M. Hervé Gaymard avait mené une action en ce sens, alors qu'il était ministre de l'agriculture, les crédits consacrés à cette politique ne montaient nullement en puissance, avec notamment une différence importante entre autorisations d'engagement et crédits de paiement. Il a ajouté qu'en tant que rapporteur pour avis sur les crédits consacrés du programme sécurité et qualité sanitaires des aliments, il avait noté, en particulier sur l'équarrissage, des phénomènes similaires de « cavalerie budgétaire » consistant en l'inscription de crédits correspondant à des engagements anciens, phénomènes qu'il s'emploierait à dénoncer lors de la réunion de Commission élargie sur la mission sécurité sanitaire.

Eu égard au programme « Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés », M. Jean Gaubert a noté que les autorisations d'engagement augmentaient, à l'inverse des crédits de paiement qui diminuaient, alors même que, selon lui, les petites et moyennes entreprises (PME), et en particulier les très petites entreprises, avaient besoin de soutiens, et que le décalage entre autorisations d'engagement et crédits de paiement aurait pour conséquence un report de la charge sur les années suivantes.

S'agissant de l'Institut national des appellations d'origine (INAO), il a appuyé les propos de M. Antoine Herth, rappelant que les missions de l'institut avaient été pleinement réaffirmées par tous les députés lors du débat sur le projet de loi d'orientation agricole. Eu égard aux crédits consacrés à la forêt, l'orateur a précisé que si M. Antoine Herth en avait relevé la baisse, elle n'était pas selon lui exclusivement due à l'essoufflement du plan mis en œuvre à la suite de la tempête de 1999.

En ce qui concerne le FFIPSA, M. Jean Gaubert a rappelé la situation difficile dans laquelle se trouvait la mutualité sociale agricole (MSA), et a indiqué que l'on se trouvait bien en deçà des aspirations de la profession et de ses besoins. Il a à cet égard rappelé qu'en dépit de la situation des retraités agricoles, les promesses électorales que la majorité actuelle avait formulées en 2002 n'avaient pas été tenues.

S'agissant du budget de la pêche, M. Jean Gaubert a précisé que les crédits du secteur s'élevaient à 1,34 % des crédits de la mission. Il s'est étonné que M. Aimé Kerguéris qualifie ces crédits de stables alors même qu'ils baissent de 1,13 %, baisse à laquelle il convient d'ajouter les 2 % d'inflation des prix. Or, M. Jean Gaubert a rappelé qu'il s'agissait d'un secteur en difficulté, notamment en raison de la hausse des prix du carburant. Il a à cet égard précisé que 40 % des charges pesant sur un bateau, en dehors des frais d'amortissement, étaient constituées par le prix du carburant. Rappelant que ce coût était détaxé, il a souligné l'étroitesse des marges de manœuvre du Gouvernement pour alléger ces charges, ajoutant que ce dernier ne pouvait intervenir que sur les prix, ce qui devait, de surcroît, être justifié auprès de la Commission européenne, vigilante à cet égard.

S'agissant de l'adaptation du secteur, l'orateur a noté une baisse de 35 % des crédits, désapprouvant la qualification de « petite baisse » utilisée par le rapporteur pour avis à ce sujet. Il a ajouté que l'adaptation de ce secteur ne concernait pas seulement les activités maritimes mais également les activités terrestres - notamment les criées.

Enfin, eu égard au plan pêche annoncé le 14 octobre 2005 par le ministre de l'agriculture et de la pêche, M. Jean Gaubert s'est interrogé sur la capacité du Gouvernement à le financer, étant donné les 3 millions d'euros pour l'ajustement de l'effort de pêche prévus par le projet de loi de finances et évoqués le rapporteur. Il a estimé que les crédits n'étaient donc pas à la hauteur des défis auxquels sont confrontés les patrons pêcheurs - défis dont le principal tient à la conjoncture économique.

En conclusion, il a indiqué que le groupe socialiste était défavorable au vote des crédits de la mission.

M. Michel Raison, s'exprimant au nom du groupe UMP, après avoir rappelé que la hausse du prix du fuel pesait aussi sur les finances publiques, a estimé que, dans ce contexte, la présentation d'un budget en hausse de 2,5 % était une prouesse. Il a ajouté qu'il ne fallait pas mesurer un budget seulement à l'évolution de ses crédits, mais aussi à la qualité des choix effectués.

Parmi les principaux motifs de satisfaction, M. Michel Raison a cité des mesures fiscales importantes ; ainsi de la baisse de 20 % de la taxe sur le foncier non bâti, pour un montant de 140 millions d'euros, de la défiscalisation des biocarburants, ou de l'abattement sur les donations entre frères et sœurs.

Il a également évoqué la réforme du service public de l'équarrissage, la jugeant responsabilisante pour l'ensemble des acteurs du secteur de la viande, auxquels l'Etat continue par ailleurs d'attribuer 44 millions d'euros.

Il a ensuite mentionné les mesures prises en faveur de la déduction pour investissement et de la déduction pour aléa par le projet de loi d'orientation agricole.

Parmi les véritables priorités de ce budget, il a avancé le soutien au secteur de la pêche. Soulignant par ailleurs la contribution du ministère de l'agriculture et de la pêche à l'effort commun pour la réduction des déficits, il a cité la suppression d'un nombre important d'emplois équivalents temps plein (ETP).

Il a estimé que les sommes prévues en 2006 pour la prime au maintien des vaches allaitantes contribueraient à la poursuite du financement de cette mesure importante pour certains de nos territoires.

Il a ensuite abordé la question de l'aide aux agriculteurs en difficulté, pour se féliciter du doublement des montants prévus pour les allègements de charges, à dix millions d'euros.

Il a salué les 37 millions d'euros prévus pour le plan bâtiment, la dotation de 39 millions d'euros pour le programme de maîtrise des pollutions agricoles (PMPOA), et le doublement des crédits de l'assurance récolte, qui atteignent vingt millions d'euros.

En matière de sécurité sanitaire, il s'est réjoui d'une hausse de 6 % des crédits, et a rappelé les mesures prévues par le projet de loi d'orientation agricole.

Quant à la transmission des exploitations, l'orateur a indiqué que 236 millions d'euros étaient prévus pour les mesures d'aide au renouvellement des générations, et souligné que le projet de loi d'orientation apportait, là encore, des solutions attendues.

Puis il a commenté le budget de la forêt, qui se monte à 303 millions d'euros, en légère baisse. Il a souligné que les crédits de l'Office national des forêts (ONF) continuaient pourtant d'augmenter, et a regretté que la forêt privée, qui souffre de son morcellement, ne bénéficie pas de plus de soutien.

Il a ensuite rappelé que l'enseignement agricole, qui représente 25 % du budget du ministère de l'agriculture et de la pêche, ne profitait pas seulement aux agriculteurs, estimant que c'était une bonne chose. Là encore, il a souligné un déséquilibre entre l'enseignement public, déjà bien doté, dont les crédits augmentent de 7 %, et l'enseignement privé, dont le financement est notoirement insuffisant, mais dont les crédits n'augmentent que de 3 %. Il a donc annoncé que le groupe UMP soutiendrait un amendement de MM. Pierre Hériaud et Jean-Yves Chamard, destiné à atténuer cet écart. Il a précisé qu'il ne s'agissait pas là d'idéologie, mais de soutien à l'œuvre accomplie par les maisons familiales rurales.

M. Michel Raison a ensuite annoncé que le groupe UMP soutiendrait un deuxième amendement, de M. Alain Marleix, relatif aux indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN).

Il s'est félicité des déclarations de M. Jean-François Copé, ministre du budget, annonçant que des recettes sur le tabac et une reprise d'emprunt de 1,5 milliard d'euros permettraient de remédier aux difficultés du fonds de financement des prestations sociales agricoles (FFIPSA).

Il a ensuite regretté l'incompréhension de la part de nos concitoyens non agriculteurs vis-à-vis du système de compensation démographique, reposant sur l'idée que les paysans ne paient pas de charges sociales. Il a rappelé que cela était faux, et qu'au contraire, les agriculteurs acquittaient parfois un surplus de charges. Il a estimé que les trois quarts des enfants de paysans cotisaient par ailleurs au régime général, et qu'ils contribuaient ainsi à financer la retraite de leurs parents.

Il a indiqué en conclusion que le groupe UMP se prononçait pour l'adoption des crédits de la mission.

M. François Brottes a remercié le rapporteur pour la présentation claire et synthétique qu'il avait faite des crédits de la mission Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales, facilitant ainsi la compréhension du premier budget entièrement conforme à la LOLF. Centrant son propos sur les questions de la forêt, il a estimé qu'une diminution des crédits de 5,5 % n'était pas une petite baisse, et que cette rigueur budgétaire s'expliquait sans doute par le fait que les arbres ne manifestent pas.

Il a déploré que la balance commerciale restât négative alors qu'il existait une forte demande de bois dans le monde, et regretté que la réponse aux problèmes d'organisation de la filière bois soit une ligne budgétaire en baisse. Il a rappelé que la forêt constituait pourtant un gisement d'emplois et souligné le savoir-faire de notre pays. Il a conclu que l'absence de soutien à ce secteur était donc une mauvaise politique.

Il a ensuite abordé le problème énergétique. Se réjouissant des avancées sur les biocarburants, il a estimé que le secteur bois-énergie devait être soutenu.

Faisant état du désespoir des acteurs du secteur, il a dénoncé la volonté d'opposer le privé au public, expliquant que les crédits inscrits en faveur de l'ONF correspondaient uniquement à la compensation du gardiennage des forêts communales effectuée par ce dernier, dont les ressources provenant de ces activités étaient très dépendantes du prix du bois, actuellement en baisse. Il a par ailleurs estimé que les crédits prévus pour les acteurs privés baissaient dramatiquement.

Constatant que ce ministère était celui de l'agriculture et de la pêche, il s'est demandé si la forêt entrait vraiment dans le champ de ses préoccupations. Il a considéré que l'action n° 4, consacrée à la prévention des risques et à la protection de la forêt, relevait surtout de la sécurité civile, et que devant les menaces récurrentes d'incendies, ses crédits, dont il a par ailleurs dénoncé la baisse, devraient être portés sur une autre mission.

Rappelant que la forêt couvrait 27 % du territoire national, il a estimé que ce budget donnait un mauvais signal, et que l'on aurait pu, dans le contexte actuel, s'en tenir au moins au maintien des crédits.

Enfin, il a regretté l'absence d'évaluation des dépenses fiscales, souhaitant qu'à l'avenir la représentation nationale puisse disposer d'informations sur leur montant et l'efficacité des mesures qu'elles financent.

M. Louis Guédon s'est exprimé sur la politique de la pêche, secteur qui connaît une crise grave, et s'est félicité du budget et du plan d'avenir prévus par le gouvernement, qui soutiennent les réorientations nécessaires. Il a expliqué la baisse des crédits d'investissement par la diminution des subventions communautaires, déclarant qu'elle serait compensée par une augmentation des fonds mobilisés dans le cadre de l'IFOP.

Il a affirmé que la recherche des richesses halieutiques était nécessaire, et estimé que si ce travail important était confié aux scientifiques, son exploitation ne devait pas leur être laissée. Il a donc réclamé la convocation d'une table ronde réunissant l'ensemble des acteurs.

Il a abordé le cas du thon rouge, estimant qu'il fallait reconnaître l'existence d'une pêcherie dans l'Atlantique, que la communauté européenne ne pouvait abandonner au Maroc, ainsi que le cas de l'anchois, qui représente 10 % du tonnage français, mais dont la pêche connaît des difficultés importantes.

Il a salué la réponse donnée à la hausse du prix du carburant, évoquant les 40 millions d'euros débloqués pour y faire face.

Il a ensuite souhaité opérer une distinction entre deux types de sorties de flotte, la première concernant des bateaux trop anciens, et donc dangereux, et la seconde des bateaux encore jeunes, et a estimé que dans ce dernier cas, cela revenait à casser un outil de travail. Il a donc recommandé d'étudier d'autres solutions. Il a souligné que les sorties de flotte devaient permettre de rentabiliser les ports, contraints de réaliser un chiffre d'affaires minimum.

Il s'est félicité de l'accent mis sur la qualité des eaux de la conchyliculture, qui constitue un véritable problème.

Il a souhaité que l'on s'interroge sur les vocations pour les métiers de la pêche, en regain dans sa circonscription, et souhaité que les mesures prises pour la formation des équipages, notamment en matière de sécurité, soient à la hauteur des espoirs.

Enfin, il a rendu hommage aux femmes de marins, dont il a souligné le rôle considérable dans la structure des armements artisanaux.

Mme Hélène Tanguy a souligné que le budget consacré à la pêche, pour être d'un faible montant, n'en avait pas moins un impact très important pour les zones côtières dépendant fortement de cette activité. Elle s'est félicitée de l'accent mis sur les moyens de contrôle des pêches, en rappelant qu'il s'agissait là d'une exigence du droit communautaire, et a souhaité que les contrôles fussent conduits sur la base d'un cahier des charges qui en garantisse l'efficacité. Elle s'est inquiétée des conditions dans lesquelles s'opérerait la réduction programmée de la flotte, en souhaitant que cette réduction reste compatible avec la poursuite de l'entrée des jeunes dans cette activité, et qu'elle n'ait pas pour unique objectif la préservation des ressources halieutiques. La table ronde qui s'est tenue à Nantes en présence du ministre de l'agriculture et de la pêche a en effet mis en évidence, d'une part, la possibilité d'un renouvellement de ces ressources, et, d'autre part, les perspectives de rebond qu'offrait la recherche d'une meilleure rentabilité des entreprises de pêche. Elle s'est réjouie de l'annonce du plan d'avenir pour la pêche, en espérant qu'il serait possible de le mettre en œuvre dès 2006 sur les moyens budgétaires disponibles, sachant que ce plan serait évidemment plus complètement financé par le budget pour 2007. Elle a insisté sur la nécessité de ne plus percevoir la pêche, d'un point de vue économique, comme une activité de cueillette, mais au contraire comme l'activité de base d'une filière complète, ainsi que le proposait Gérard d'Aboville dans son rapport présenté récemment devant le Conseil économique et social : « La pêche, acteur de la vie du littoral métropolitain : l'heure des choix ». Ce rapport met notamment en avant les perspectives de revitalisation de l'activité qui s'offre au travers de la recherche d'une amélioration de la rentabilité des entreprises de pêche, en s'appuyant sur certains atouts comme la relative jeunesse de la flotte, de 22 ans d'âge en moyenne. Elle s'est enfin associée aux propos d'Aimé Kergueris pour indiquer son inquiétude quant à la pérennité du fonds de prévention des aléas de la pêche, et pour souligner la nécessité d'une concertation étroite avec les professionnels dans la conduite de la politique de réforme, qu'elle a souhaitée plus innovante que celles menées jusque-là.

M. Aimé Kergueris, rapporteur, a apporté, en réponse aux différents intervenants, les précisions suivantes :

- les aides versées pour compenser les hausses du prix du gasoil ne sont pas inscrites dans la mission budgétaire examinée, et les crédits consacrés à la pêche ne se trouvent donc pas modifiés par leur augmentation brutale ;

- le plan d'ajustement de l'effort de pêche est doté de 30 millions d'euros, dont 15 millions à la charge de l'Etat, et la réduction de la flotte devra s'effectuer en veillant à ne pas donner prise à des risques d'enrichissement sans cause ;

- le fonds de la recherche stratégique bénéficiera d'un cofinancement communautaire.

M. Antoine Herth, rapporteur, a apporté, en réponse aux différents intervenants, les précisions suivantes :

- l'analyse de l'évolution des crédits consacrés aux contrats d'agriculture durable (CAD) doit être resituée dans une perspective de moyen terme, puisque la dotation pour 2006 d'environ 350 millions d'euros, en incluant le financement communautaire, est très supérieure à la dotation de 100 millions d'euros prévue en 2002 pour les « contrats territoriaux d'exploitation » auxquels ils se sont substitués. Le volant supplémentaire de 64 millions d'euros du budget pour 2006 n'est certes pas en rapport avec les 10 000 nouveaux CAD initialement prévus, mais il faut tenir compte du fait que l'aide est accordée sur la base d'un effort supplémentaire en matière d'environnement, et qu'il n'est pas possible de continuer à faire toujours des efforts, lorsque beaucoup a déjà été accompli ; Il est donc logique qu'à terme, moins d'agriculteurs se montrent intéressés par cette mesure ;

- le programme de développement rural national pour la période 2007-2013 va bientôt devoir être finalisé, avec une validation définitive au second semestre 2006. Dans ce cadre, il importe que la France abandonne la position fixée par la précédente majorité, consistant à concentrer la totalité des aides sur un instrument unique et global, concernant l'exploitation dans son entier, à l'époque les contrats territoriaux d'exploitation (CTE), pour revenir à une stratégie d'outils plus diversifiés, afin de pouvoir traiter des situations « à la parcelle » par exemple, sans engager nécessairement la totalité de l'exploitation agricole ;

- des aides à l'exportation des produits agricoles existent déjà au titre de la prime d'orientation agricole (POA), et il est prévu également de généraliser en 2006 un « kit export » actuellement expérimenté dans trois régions ;

- si les crédits de soutien à la promotion des industries agroalimentaires à l'étranger, par exemple la participation aux foires internationales, sont en diminution depuis plusieurs années déjà, c'est que les dépenses en ce domaine sont de plus en plus réalisées sur la base de marchés, de préférence au versement de subventions aux opérateurs tels la SOPEXA ;

- les crédits dédiés à l'enseignement agricole sont rattachés à la mission interministérielle « Enseignement scolaire », et non pas à la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » ; à ce titre, ils ont déjà été votés par l'Assemblée nationale, et il n'est donc plus possible de les modifier, même s'il est bon de rappeler qu'il serait souhaitable de soutenir d'avantage l'enseignement agricole privé ;

- il est vrai que la filière du bois reste à construire, et particulièrement dans sa partie relative au « bois-énergie ». Cependant, un cofinancement communautaire à hauteur de 40 % est disponible pour les actions engagées en matière forestière dans le cadre du plan de développement rural national (PDRN) ; le Premier ministre a annoncé le lancement d'un appel d'offre pour la production de 300 MW d'électricité à partir de la biomasse forestière ; la loi d'orientation agricole a prévu l'abaissement à 5,5 % de la TVA sur le « bois-énergie », ainsi que la possibilité pour l'Office national des forêts de prendre plus facilement des participations dans les activités de valorisation du bois ; enfin, la nouvelle nomenclature budgétaire permettra le suivi de deux indicateurs attachés à l'objectif de valorisation de la filière du bois : l'un relatif à la valeur ajoutée dégagée par l'exploitation forestière et la première transformation du bois, pour lequel 1 400 millions d'euros sont prévus pour 2006, l'autre relatif au pourcentage de bois récolté par rapport à l'accroissement biologique annuel, qui s'est établi à 58 % en 2004.

Le Président Patrick Ollier s'est réjoui de l'excellente tenue des débats dans le cadre de cet examen budgétaire, et a tout particulièrement félicité les rapporteurs pour la qualité de leur contribution.

La Commission a ensuite adopté un amendement de M. Antoine Herth consolidant les crédits du Fonds d'incitation et de communication pour l'installation en agriculture (FICIA), puis a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission ainsi modifiés, M. Jean Dionis du Séjour expliquant que le groupe UDF s'abstenait pour rester en cohérence avec sa position globale vis-à-vis du projet de loi de finances pour 2006.

M. François Brottes s'étant inquiété des conditions dans lesquelles la Commission pourrait avoir accès au contrat de service public soumis à EDF, le Président Patrick Ollier a indiqué qu'il prendrait contact très rapidement avec le président d'EDF à ce sujet.

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Puis la Commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Louis Christ, la proposition de résolution de M. Jean-Marie Sermier (n° 2603) sur la réforme de l'organisation commune des marchés dans le secteur du sucre [COM (2005) 263 final / E2916].

Le rapporteur a rappelé que la proposition de résolution avait été adoptée par la délégation pour l'Union européenne lors de sa réunion du mercredi 19 octobre et qu'elle portait sur des propositions d'actes communautaires qui ont vocation à être examinées lors du conseil des ministres européens de l'agriculture du 24 novembre prochain. Il a donc indiqué que son adoption était urgente.

Puis, il a rappelé que notre pays était le premier producteur européen de sucre, que celui-ci était essentiellement produit en métropole et à partir de betteraves et que du sucre de canne était également produit dans les DOM pour 5 à 6 % de la production française totale.

Il a ensuite précisé que l'organisation commune des marchés du sucre fonctionnait aujourd'hui selon les principes définis lors de la création en 1968 qui sont :

- un soutien des prix ;

- une régulation quantitative de l'offre par des quotas de production ;

- une protection tarifaire forte sauf pour une quantité prédéfinie de sucre acheté aux pays d'Afrique sub-saharienne, des Caraïbes et du Pacifique dits « pays ACP » ;

- des subventions aux exportations.

Puis, le rapporteur a indiqué que deux éléments conduisaient à remettre en cause ce dispositif :

- la décision du 8 septembre 2004 de l'organe de règlement des différends de l'Organisation mondiale du commerce, confirmée en appel le 28 avril 2005, qui impose de modifier plusieurs points du système européen de soutien aux exportations de sucre ;

- l'initiative « Tout sauf les armes » (TSA) en application de laquelle l'entrée sur le marché communautaire sans restrictions quantitatives et en franchise de droits de douane de sucre en provenance des pays les moins avancés sera possible progressivement puis totalement à partir du 1er juillet 2009.

Il a ensuite estimé qu'il convenait également de prendre en compte le fait qu'il était fortement probable que les négociations commerciales multilatérales en cours aboutissent à un accord prévoyant, d'une part, la disparition progressive des subventions à l'exportation et, d'autre part, une forte réduction des droits de douane.

Le rapporteur a donc jugé nécessaire une réforme de l'organisation commune des marchés du sucre et a rappelé que la Commission européenne proposait de la faire reposer sur quatre éléments principaux :

- en premier lieu, une baisse des prix avec la suppression du prix d'intervention au profit d'un prix de référence, base pour le déclenchement d'une aide au stockage privé, fixé à un niveau inférieur de 39 % au prix d'intervention actuel ;

- en second lieu, la création d'un fonds de restructuration attribuant, d'une part, une aide aux sucreries cessant leur activité à proportion des quantités de quotas auxquelles elles renonceront et, d'autre part, un « paiement supplémentaire compensatoire » en faveur des planteurs contraints d'abandonner leur production en raison de la fermeture de l'établissement dans lequel ils détiennent des droits de livraison de betteraves sucrières ;

- en troisième lieu, l'octroi de paiements directs aux planteurs intégrés dans le paiement unique et financés par des enveloppes nationales correspondant à 60 % de la perte de revenu estimée résultant de la réduction du prix calculée sur la base des quotas détenus au cours de la période de référence 2000-2002 ;

- en quatrième lieu, la fusion des quotas des productions et l'attribution d'un quota supplémentaire d'un million de tonnes (dont 351 000 tonnes pour la France), quota destiné aux entreprises ayant produit du sucre hors quota dit « sucre C », production dont les débouchés à l'exportation vont très fortement se réduire ;

- enfin, en cinquième et dernier lieu, des mesures spécifiques pour tenir compte des handicaps structurels des producteurs des régions ultrapériphériques dont l'attribution d'une aide d'un montant équivalent à l'aide à l'écoulement dont elles ont bénéficié au cours de la période de référence.

Le rapporteur a jugé que si ces principes étaient globalement sains, il était néanmoins nécessaire de modifier la proposition de la Commission sur plusieurs points.

Il a rappelé que la proposition de résolution présentée par M. Jean-Marie Sermier, soulignait ainsi la nécessité :

- de renforcer le fonds de restructuration ;

- de préserver le principe de subsidiarité en laissant aux Etats membres la liberté de gérer, dans le respect de l'enveloppe globale qui leur est attribuée, les aides compensatoires de la perte de revenu ;

- de davantage prendre en compte les handicaps structurels des départements d'outre-mer ;

- de supprimer deux éléments de la réforme qui ne sont pas essentiels (la création d'une taxe à la production et la possibilité d'abaisser le prix institutionnel de la betterave par accord interprofessionnel).

Il a également indiqué qu'outre ces ajustements relativement limités, la proposition de résolution adoptée estimait que c'était sur le volet externe de la réforme que les modifications les plus lourdes étaient nécessaires compte tenu du risque de voir le marché européen saturé d'importations en provenance notamment du Brésil, éventuellement via des réexportations depuis un des pays les moins avancés (PMA).

Il a précisé qu'en conséquence, la proposition de résolution demandait :

- la mise en place de clauses de sauvegarde automatiques permettant de rétablir des droits de douane pour protéger la production communautaire si les exportations en provenance des pays PMA excèdent leur production ou si le prix de marché passe sous le prix de référence ;

- une redéfinition des règles d'origine pour éviter que le simple raffinage du sucre dans un pays PMA conduise à ce que ce sucre soit considéré comme produit dans ce pays ;

- un renforcement des dispositifs de surveillance de la fraude.

Puis, il a noté que trois autres éléments du volet externe de la réforme appelaient également des ajustements selon la proposition de résolution :

- les possibilités d'exportations communautaires pour lesquelles la résolution demande notamment de rétablir la possibilité d'exporter, en sus des quantités actuellement autorisées par les accords commerciaux multilatéraux, une quantité de sucre équivalente à celle importée par l'Union européenne depuis les pays d'Afrique subsaharienne, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) et l'Inde ;

- la nécessité d'apporter une aide suffisante aux pays ACP affectés par la réforme et la nécessité que cette aide bénéficie aux planteurs afin de leur permettre de développer une agriculture vivrière ;

- la nécessité de préserver la préférence communautaire dans la négociation commerciale multilatérale en cours.

Le rapporteur a souligné que ce dernier point prenait une importance accrue depuis la dernière proposition formulée le 28 octobre dans le cadre de la négociation multilatérale par le commissaire Mandelson au nom de l'Union européenne, proposition qui repose sur une forte réduction des droits de douane avec une diminution de 60 % des droits les plus élevés.

Il a rappelé que l'évolution des droits de douane et la réforme de l'OCM du sucre étaient étroitement liées dans la mesure où l'OCM réformée ne peut fonctionner que si le niveau des droits de douane permet de couvrir au moins la différence entre le prix de référence communautaire et le prix mondial.

Il a précisé que la baisse du prix communautaire proposée par la Commission permettrait, toutes choses étant égales par ailleurs, une baisse des droits de douane applicables au sucre et que la réforme était donc, en principe, pleinement compatible avec la négociation multilatérale en cours mais qu'elle ne le serait plus si la réduction des droits de douane était excessive.

M. Michel Raison, intervenant au nom du groupe UMP, a rappelé que l'OCM du sucre avait bien fonctionné en régulant les quantités produites. Il a noté que diverses raisons rendaient nécessaires de la faire évoluer pour la rapprocher de l'OCM des céréales avec un prix communautaire plus proche du cours mondial et la compensation partielle, par une aide découplée, des pertes de revenus pour les producteurs. Il a également rappelé que la réforme proposée satisfaisait globalement les industriels du sucre mais que les organisations représentatives des planteurs étaient nettement plus critiques. Puis, il a indiqué qu'il estimait pertinent certaines des demandes formulées par la proposition de résolution et, en particulier, celle relative à la meilleure prise en compte des handicaps structurels des DOM ainsi que celle soulignant la nécessité de gérer les compensations des pertes de revenu selon le principe de subsidiarité.

Le Président Patrick Ollier a vivement souligné la nécessité de prendre en compte la situation particulière des DOM.

La Commission a ensuite examiné les amendements présentés par le rapporteur.

Après avoir adopté deux amendements rédactionnels puis un amendement de coordination, elle a adopté un amendement qui, outre des modifications d'ordre rédactionnel, précise le délai de mise en œuvre des décisions et des recommandations de l'organe de règlement des différends de l'Organisation mondiale du commerce.

La Commission a ensuite adopté un amendement qui fusionne les alinéas relatifs aux conséquences éventuelles des négociations commerciales multilatérales en cours en les modifiant notamment pour ne pas préjuger du résultat de ces négociations.

Elle a également adopté un amendement précisant que la réforme de l'OCM du sucre s'inscrit dans la logique générale de la réforme de la politique agricole commune décidée en juin 2003.

Après avoir adopté deux amendements rédactionnels et un amendement de précision, la Commission a adopté un amendement simplifiant la rédaction de l'alinéa relatif au rôle du fonds de restructuration vis-à-vis des planteurs afin de mieux mettre en évidence l'objectif général poursuivi sans rentrer dans le détail des mesures possibles.

Puis, elle a adopté un amendement proposant d'affecter au fonds les recettes prélevées à l'occasion de l'allocation du quota supplémentaire de production d'un million de tonnes.

Elle a ensuite adopté un amendement rédactionnel ainsi qu'un amendement supprimant le détail des mesures susceptibles d'être prises par les Etats membres pour la gestion des paiements directs aux planteurs en application du principe de subsidiarité.

Après avoir adopté un amendement rédactionnel et un amendement de précision, elle a adopté un amendement :

- réorganisant les points relatifs au volet externe de la réforme pour rassembler les éléments relatifs à la lutte contre la fraude ;

- soulignant la nécessité de renforcer les contrôles aux frontières de l'Union européenne ;

- prenant en compte les risques d'importations frauduleuses non seulement en provenance d'un PMA mais aussi d'un autre pays lié à l'Union européenne par un accord préférentiel ;

- proposant que la clause de sauvegarde relative aux importations frauduleuses joue pays par pays et non pour l'ensemble des PMA.

Elle a ensuite adopté un amendement de coordination puis elle a examiné un amendement du rapporteur supprimant la demande d'une renégociation au niveau de l'OMC en vue d'accroître les quantités de sucre pouvant être exportées par l'Union européenne d'une quantité équivalente à ses importations en provenance des pays ACP. Le rapporteur a précisé que cette demande ne lui semblait pas réaliste, qu'elle ne pourrait, en tout état de cause, être satisfaite que sous réserve de compensations non définies et qu'elle ne lui semblait, en outre, pas cohérente avec le souci de supprimer les soutiens aux exportations agricoles. La Commission a adopté cet amendement.

Après avoir adopté un amendement de coordination puis un amendement de précision, elle a ensuite adopté un amendement exigeant que les propositions formulées par la Commission européenne dans le cadre des négociations commerciales multilatérales, en particulier en matière de réduction des droits de douane, ne remettent pas en cause la cohérence de la réforme proposée de l'OCM du sucre.

La Commission a ensuite adopté la proposition de résolution n° 2603 ainsi modifiée.

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