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COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES,
DE L'ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE

COMPTE RENDU N° 75

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 29 août 2006
(Séance de 21 heures)

Présidence de M. Patrick Ollier, Président

SOMMAIRE

 

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- Suite de l'examen du projet de loi relatif au secteur de l'énergie (n° 3201)

(M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur)


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La Commission a poursuivi l'examen, sur le rapport de M. Jean-Claude Lenoir, du projet de loi relatif au secteur de l'énergie (n° 3201).

M. Christian Bataille a pris la parole pour une motion d'ordre tendant à souligner le contexte de travail peu favorable créé, au sein des bâtiments de l'Assemblée, par la fermeture de nombreuses portes, rendant difficile l'accès des bureaux personnels des députés, comme s'il n'était tenu aucun compte de la réouverture des travaux législatifs en cette fin du mois d'août.

Le Président Patrick Ollier a déclaré avoir constaté lui aussi ce même embarras créé par la fermeture de nombreuses portes, ainsi que l'indisponibilité de certains services de restauration ; il a demandé qu'une démarche administrative soit effectuée pour rétablir la situation.

La Commission a examiné les amendements identiques n°5601 à 5633 présentés par des membres du groupe socialiste visant à maintenir le droit à l'électricité pour tous au-delà du changement de statut d'EDF et de GDF. Le rapporteur ayant indiqué que l'intervention sociale en matière d'accès à l'énergie était indépendante des conditions de statut des entreprises prestataires, la Commission a rejeté ces amendements.

La Commission a examiné les amendements identiques n°5634 à 5666 présentés par des membres du groupe socialiste tendant à fusionner EDF et GDF. M. Christian Bataille a jugé qu'une telle fusion s'imposait en toute logique, compte tenu de la proximité historique et de la complémentarité des deux entreprises, déjà habituées à travailler ensemble. Il a estimé qu'en vertu du bon sens, un tel rapprochement serait mieux compris par l'opinion publique que celui envisagé entre GDF et Suez. M. François Brottes a observé que la Commission européenne n'avait pas eu l'occasion de manifester la moindre réserve vis-à-vis de ce rapprochement, puisqu'aucun projet de cette nature ne lui avait jamais été transmis. Il a regretté que l'opération n'ait pas été tentée au cours de la législature précédente, puisqu'elle présentait des avantages en termes d'autonomie énergétique nationale, et en termes de baisse des prix, mais a constaté qu'à l'époque, le contexte la rendait moins indispensable qu'aujourd'hui. Il a observé que l'information selon laquelle ce rapprochement ne serait pas possible au regard des règles de la concurrence européenne était présentée par le ministre de l'économie comme émanant de la commission Roulet, qui serait donc pour l'occasion sortie de son domaine de compétence, puisqu'elle n'avait pour mission que d'établir la valeur patrimoniale d'EDF. Il a estimé que le rapprochement entre EDF et GDF serait une hypothèse de travail recevable si une étude d'impact venait à révéler les inconvénients de la libéralisation en cours du marché européen de l'énergie. Il a ajouté que l'expérience avait montré que les deux entreprises pouvaient travailler ensemble, et a invité ses collègues parlementaires à appuyer un projet de fusion entre elles, ne serait-ce que pour connaître les éventuelles objections que la Commission européenne serait contrainte de formaliser dans une lettre de griefs.

Le rapporteur a rappelé que le contrôle exercé par la Commission européenne sur les concentrations était régi par le règlement du 24 janvier 2004, et ne concernait que les opérations de dimension communautaire, c'est-à-dire concernant des entreprises réalisant un chiffre d'affaires total au plan mondial supérieur à 5 milliards d'euros, et dont deux au moins réalisaient individuellement 250 millions d'euros de chiffre d'affaires au sein du marché commun à moins que chacune des entreprises concernées réalise plus des deux tiers de son chiffre d'affaires total européen à l'intérieur d'un seul et même État membre. Il a indiqué qu'à l'évidence une opération de fusion entre EDF et GDF relèverait de ce contrôle, puisque le chiffre d'affaires des deux entreprises atteignait respectivement, au premier semestre 2006, 30 et 15 milliards d'euros, dont respectivement 54 % et 62 % étaient réalisés en France. Il a convenu que l'occasion de la formalisation d'une lettre de griefs ne s'était pas présentée, et a rappelé que l'analyse effectuée dans le cadre de la commission Roulet résultait, en son sein, d'une initiative des représentants des organisations syndicales, qui avaient souhaité que l'hypothèse fût examinée, l'étude de cette hypothèse ayant alors été confiée au cabinet Bredin-Prat ; que cette étude avait conclu à ce que la fusion imposerait d'importantes cessions d'actifs en contrepartie.

Le Président Patrick Ollier a signalé que cette idée de fusion lui avait paru séduisante jusqu'à ce que cette contrepartie en termes de cession d'actifs ne lui fût apparue comme porteuse du risque de dispersion du parc nucléaire français.

M. François Gaubert a observé que cette crainte n'était pas cohérente avec le constat que la législation permettait déjà l'installation de nouvelles centrales nucléaires par des entreprises privées.

Le rapporteur a rappelé que cette possibilité avait été ouverte par la loi n°2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité.

M. Jacques Bobe a souligné la divergence d'attitude des représentants socialistes entre aujourd'hui et la période 1997-2000.

Présentant les amendements identiques nos 5667 à 5699, M. François Brottes a exposé qu'ils étaient motivés par la nécessité de faire preuve de volontarisme face à un contexte énergétique marqué par une hausse des prix pénalisante pour les usagers ; l'énergie n'est pas un bien comme un autre ; la logique libérale qui conduit désormais ce secteur est préjudiciable à la vie économique elle-même.

La Commission a rejeté ces amendements.

Présentant alors les amendements identiques nos 298 à 330, M. François Brottes a exposé qu'ils avaient parfaitement leur place au sein du projet de loi, dans la mesure où il est établi que ce sont les prix du pétrole qui déterminent ceux du gaz. Il a fait valoir que la restauration de la TIPP flottante était une mesure plus juste et plus universelle que l'instauration d'un chèque-transport.

Après avoir exposé son désaccord avec cette opinion, le rapporteur a émis un avis défavorable aux amendements nos 298 à 330 que la Commission a alors rejetés ainsi que les amendements identiques nos 365 à 397.

M. François Brottes a exposé que les amendements nos 530 à 562 avaient pour objet de favoriser le développement des transports collectifs ; à cette fin, il est nécessaire de prévoir des dispositifs fiscaux d'une certaine envergure.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur, a répondu que les usagers des transports collectifs bénéficiaient déjà largement de l'aide publique, dont l'intervention permettait aux tarifs payés par les usagers d'être inférieurs aux coûts de revient. En revanche, les personnes qui sont contraintes d'utiliser leur véhicule personnel pour se déplacer, comme c'est le cas dans le monde rural, ne bénéficient d'aucun soutien face au renchérissement des tarifs de l'énergie ; il convient donc de leur apporter également une aide.

Le Président Patrick Ollier a ajouté que le mécanisme du chèque-transport serait beaucoup plus efficace.

La Commission a rejeté les amendements identiques nos 530 à 562.

M. François Brottes après avoir souligné que la hausse du prix du pétrole était, pour les sociétés du secteur, à l'origine de bénéfices aussi considérables qu'injustifiés, chaque hausse du cours étant immédiatement répercutée à la pompe, alors que l'essence ainsi vendue a été extraite plus tôt, à des tarifs plus bas, a indiqué que les amendements nos 331 à 363 ont pour objet de taxer spécifiquement ces bénéfices injustifiés.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur, s'est déclaré défavorable à ces amendements : chaque année cette proposition revient, et chaque année, elle est rejetée.

La Commission a alors rejeté les amendements identiques nos 331 à 363.

M. François Brottes a ensuite exposé que les amendements nos 431 à 463 avaient pour objet, en instaurant une taxation spécifique sur les véhicules les plus polluants, d'encourager les comportements favorables à la réduction de l'émission des gaz à effet de serre.

Après que le rapporteur eut fait valoir que ces amendements n'avaient pas de rapport avec le projet de loi, la Commission a rejeté les amendements identiques nos 431 à 463.

M. François Brottes a ensuite exposé que les amendements nos 1464 à 1613, en affirmant clairement le caractère public d'EDF, étaient cohérents avec les principes qui guidaient le groupe socialiste.

Faisant valoir leur caractère superfétatoire, le rapporteur a émis un avis défavorable.

La Commission a alors rejeté ces amendements ainsi que les amendements identiques n°s 1647 à 1796.

M. Christian Bataille a alors souligné qu'il relevait du devoir et des prérogatives de l'État de travailler à la maîtrise de la demande d'énergie. Pour cela, il faut que le secteur comporte des sociétés publiques, comme EDF et GDF. Les amendements présentés ont pour objet de fixer cette nécessité dans la loi.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur, s'est déclaré défavorable à ces amendements.

La Commission a alors successivement rejeté :

- les amendements identiques nos 2061 à 2210,

- les amendements identiques nos 2376 à 2525,

- les amendements identiques nos 2526 à 2675,

- les amendements identiques nos 2709 à 2858.

Deux amendements de M. Jean Dionis du Séjour, l'un instituant un schéma directeur national énergétique, l'autre prévoyant qu'une loi de politique énergétique est votée chaque année, non défendus, ont été rejetés.

Article 1er : Éligibilité de l'ensemble des consommateurs d'électricité

Présentant les amendements nos 6744 à 6776, M. Christian Bataille a exposé qu'au contraire de la majorité, son groupe considérait que le maintien de sociétés publiques dans l'économie française était nécessaire à l'équilibre de celle-ci.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur, s'est déclaré défavorable aux amendements présentés au motif que ceux-ci ne faisaient que répéter des dispositions figurant déjà dans la loi.

Après que le Président Patrick Ollier a ajouté que la majorité n'avait pas l'intention de mettre fin au caractère public d'EDF, la Commission a rejeté les amendements identiques nos 6744 à 6776.

Deux amendements identiques, l'un de M. Jean Proriol, l'autre de M. Pierre Micaux ont alors été examinés.

M. Jean Proriol a présenté ces amendements visant à préciser que c'est une filiale spécifique d'EDF qui sera chargée de la mise en œuvre des dispositions de la loi du 10 février 2000 relatives à l'électricité tarifée et que ces dispositions ne pourront concerner dans l'avenir que les clients n'ayant pas exercé leur droit à l'éligibilité.

Après que le rapporteur a donné un avis favorable à ces amendements, MM. Christian Bataille, François Brottes et Daniel Paul se sont émus d'une démarche qui, au détour de l'examen d'un projet de loi consacré à la privatisation de GDF, faisait disparaître une référence à EDF et à son statut public ; M. François Brottes a ajouté que l'amendement se plaçait clairement dans l'optique d'une privatisation, voire d'un démantèlement futur d'EDF.

M. Pierre Micaux a répondu qu'il s'agissait au contraire d'une disposition protectrice pour EDF ; EDF, au contraire des collectivités locales, est concédant, et non concessionnaire.

M. François Brottes a suggéré, afin d'apaiser toute crainte, de modifier l'amendement en précisant que la société chargée de la gestion de l'électricité tarifée était publique, et il a déposé un sous-amendement en ce sens.

Après que le rapporteur l'eut accepté, M. Serge Poignant s'est réjoui que le groupe socialiste se prononce ainsi favorablement envers l'amendement ainsi sous-amendé.

M. François Brottes ayant répondu que cet accord ne pouvait concerner que l'alinéa premier, sur lequel portait le sous-amendement, et non l'ensemble de l'amendement, M Serge Poignant a exposé que, dans ces conditions, le groupe UMP rejetterait le sous-amendement.

Après avoir rejeté le sous-amendement de M. François Brottes, la Commission a adopté les amendements identiques de MM. Proriol et Micaux.

Le Président Patrick Ollier a alors considéré qu'avec les amendements nos 10770 à 19301, la Commission abordait une nouvelle série de dispositions, relatives au tarif social de l'électricité.

M. François Brottes a indiqué que ces amendements avaient pour objet d'instituer un encadrement solide de la vente d'énergie. L'énergie est désormais un produit de première nécessité. Or, l'entrée de la fourniture d'énergie dans la sphère de l'économie privée comporte de forts risques d'arbitrages en faveur de la solidité des dividendes au détriment de la qualité des tarifs sociaux. Pour écarter ce risque, et protéger ceux qui en ont le plus besoin, un encadrement législatif est nécessaire. Un dispositif contractuel entre l'État et l'entreprise n'est en effet pas suffisant. Tout contrat, on l'a déjà vu, comporte des clauses de sortie, et ce hors de tout contrôle du Parlement.

M. Christian Bataille a ajouté que les dispositions proposées avaient pour objet de conforter le dispositif de tarifs sociaux institué par la loi de 2000. En effet, on ne peut plus désormais exclure une privatisation d'EDF.

Or, dans la limite certes de la satisfaction de certains besoins, l'électricité est devenue un produit de première nécessité dont on ne peut, au même titre que l'air ou l'eau, être exclu pour des raisons économiques.

C'est cette démarche qui a fondé les séries d'amendements présentées. Chacune d'elle propose un encadrement du tarif des ressources électriques fondé sur le revenu, calculé par rapport au SMIC. La série d'amendements la plus exigeante prévoit que cet encadrement s'applique aux foyers disposant de revenus inférieurs à deux fois le SMIC. La plus modeste limite cet avantage aux foyers ne disposant que moins de la moitié du SMIC.

Le groupe socialiste propose ainsi à la majorité un éventail de choix pour déterminer le niveau de revenus à partir duquel elle souhaitera ouvrir l'accès à un prix garanti d'accès à l'électricité.

M. Jean Gaubert a précisé qu'il s'agissait de faire face aux transformations des conditions de fixation des tarifs de l'électricité. Dans la logique ancienne, les tarifs étaient fixés en fonction du prix de revient de l'électricité. Aujourd'hui, nous entrons dans une logique de prix de marché. L'écart entre l'offre et l'ampleur de la demande a entraîné en 2003 une hausse de 45 % des prix. Pour y faire face, il y a bien la solution de conserver des prix administrés ; cependant, la CRE a proposé un rapprochement progressif du prix administré et du prix de marché. Cette solution n'est donc pas satisfaisante. C'est pourquoi l'idée du groupe socialiste est d'utiliser le dispositif du tarif de première nécessité, en l'élargissant au-delà de ses limites actuelles.

Mme Geneviève Gaillard a rappelé les difficultés rencontrées par des ménages dont les revenus d'activités ne leur permettent pas de s'acquitter des factures d'électricité et de gaz. Considérant que l'énergie était un produit de première nécessité, elle a souligné que bien souvent les collectivités locales se trouvaient dans l'obligation de trouver des solutions d'urgence pour garantir à ces familles leur droit fondamental à un minimum de bien-être et de confort, tel qu'affirmé par le préambule de 1946.

M. Pierre Micaux s'est associé au constat dressé par M. Jean Gaubert d'une orientation libérale de l'action et des avis de la CRE.

M. Jean Proriol a regretté que la Commission des affaires économiques n'ait pas procédé à l'audition de la CRE et de sa nouvelle direction, qui aurait pu s'expliquer sur ses prévisions concernant un alignement progressif du tarif réglementé sur le prix de marché, qui conduirait ainsi à une disparition de fait de celui-là. Précisant que la précédente direction de la CRE aboutissait également à pareilles conclusions, il a estimé que le tarif social avait vocation à demeurer l'unique instrument d'une politique sociale en matière d'électricité.

Le Président Patrick Ollier a indiqué que parmi les conditions posées par le groupe UMP à son soutien au présent projet de loi, figurait l'instauration d'un tarif social en matière de gaz ; il s'est félicité de ce que cette novation figure dans le texte présenté par le gouvernement.

M. Jean Dionis du Séjour a déploré le manque de lisibilité du tarif social en matière d'électricité, et a regretté que l'éligibilité à ce tarif soit liée au bénéfice d'un revenu d'assistance, c'est-à-dire la CMU. Estimant que les amendements déposés par le groupe socialiste soulevaient une question intéressante, il s'est néanmoins interrogé sur le coût des solutions proposées.

En réponse aux différents intervenants, M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur, a indiqué que les menaces qui pèsent sur les bénéficiaires du tarif social, évoquées en particulier par M. Jean Gaubert, sont liées à l'ouverture complète des marchés de l'énergie à la concurrence dès le 1er juillet 2007. Rappelant la distinction entre tarif réglementé et prix de marché, il a indiqué avoir obtenu du gouvernement que ce tarif soit maintenu pour les consommateurs qui choisissent de ne pas exercer leur éligibilité. S'agissant du tarif social, il a indiqué qu'il avait été créé par la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, celle-ci renvoyant, pour son application, à un décret que les gouvernements soutenus par l'opposition d'aujourd'hui, alors majoritaire, n'avaient jamais pris. Il a ajouté qu'il avait fallu attendre que le gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin s `acquitte de cette obligation en 2004 pour que le tarif social trouve une application concrète. Dénonçant le caractère démagogique des propositions actuelles du groupe socialiste, qui envisage d'élever le plafond d'éligibilité au tarif social actuellement fixé au niveau de revenus ouvrant droit au bénéfice de la CMU, soit 5500 euros pas an, à 1.5 voire 2 fois le SMIC, il a souligné par ailleurs que la majorité souhaitait encore améliorer le tarif social à l'occasion de ce projet de loi en obtenant une modification du décret.

Il s'est donc déclaré défavorables aux amendements n° 10770 à 11297, aux amendements n°11430 à 11891, aux amendements n°11892 à 12221, aux amendements n°18327 à 18821, ainsi qu'aux amendements n°18822 à 19301.

M. François Brottes a estimé que le contexte était très différent en 2000 de ce qu'il est aujourd'hui, puisque l'ouverture à la concurrence envisagée à l'époque était limitée et ne concernait pas les ménages. La question du tarif social ne se posait donc pas avec la même acuité qu'aujourd'hui, alors que le présent projet de loi prévoit une ouverture totale à la concurrence au 1er juillet 2007.

Il a ajouté que la disparition programmée du tarif réglementé commandait de sécuriser et d'élargir rapidement le dispositif du tarif social, d'autant que si le contrat de service public liant l'Etat à EDF imposait en 2000 une baisse des tarifs pratiqués, en 2006 ce contrat ménage la possibilité d'une hausse dans la limite de l'inflation.

Il a également regretté que la CRE n'ait pas été auditionnée par la Commission, puis, soulignant le consensus des commissaires au sujet de la nécessité d'une réforme du tarif social, il a invités ces derniers à considérer avec attention les 72 propositions concrètes formulées par le groupe socialiste.

Après que M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur, a objecté qu'il n'y avait pas de rapport entre l'ouverture à la concurrence des marchés de l'énergie aux clients éligibles et la volonté de prendre en compte la situation des ménages économiquement fragiles par l'instauration d'un tarif social, M. Jean Gaubert a insisté sur la spécificité du contexte de la loi de 2000 par rapport à celui du présent projet de loi. La perspective de l'ouverture à la concurrence des marchés de l'énergie pour les ménages était encore lointaine, et le tarif administré atteignait un niveau proche de celui du prix de revient. Estimant que la CRE s'employait à accélérer la disparition du tarif réglementé, il a jugé que la question du tarif social revêtait aujourd'hui un incontestable caractère d'urgence. Il a par ailleurs insisté sur la nécessité de protéger les consommateurs les plus faibles qui sont aussi les plus susceptibles de céder aux sollicitations commerciales tendant à leur faire accepter un autre tarif que le tarif administré.

Constatant lui aussi le consensus se dégageant sur la nécessité de sécuriser le dispositif du tarif social, M. Léonce Deprez a appelé à une clarification du dispositif actuel qu'il a jugé par trop bureaucratique.

M. Jean Dionis du Séjour a regretté que l'éligibilité au tarif social soit lié au bénéfice d'un revenu d'assistance, et a également dénoncé l'existence d'un effet de seuil lié au critère retenu.

M. Serge Poignant a rappelé qu'au cours de l'examen de la loi d'orientation sur l'énergie, la question du tarif social avait été soulevée, et que les discussions en cours avec le gouvernement devaient permettre d'aboutir aux simplifications jugées nécessaires par tous.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur, a salué les dispositions du présent projet de loi qui prévoient la création d'un tarif social en matière de gaz, puis a précisé que l'aide apportée aux ménages ne se limitait pas au tarif social financé par la contribution au service public de l'électricité, mais comprenait également l'interdiction des coupures en hiver, ainsi que les actions menées par les collectivités locales, par exemple à travers le Fonds de solidarité pour le logement. Il a conclu en estimant que le tarif social n'aurait jamais eu d'existence concrète sans l'action du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin.

M. Christian Bataille rappelant qu'il avait été le rapporteur de la loi du 10 février 2000, a affirmé qu'il ne s'agissait nullement alors de privatiser ce qui était encore considéré alors comme un service public de l'électricité. Il a jugé que la question était de savoir qui, des consommateurs ou des collectivités locales, devaient financer la solidarité avec les ménages en difficulté.

La Commission a alors rejeté :

- les amendements nos 10770 à 11297 présentés par des membres du groupe socialiste ;

- les amendements nos 11430 à 11891 présentés par des membres du groupe socialiste ;

- les amendements nos 11892 à 12221 présentés par des membres du groupe socialiste ;

- les amendements nos 18327 à 18821 présentés par des membres du groupe socialiste ;

- les amendements nos 18822 à 19301 présentés par des membres du groupe socialiste.

Puis la Commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur visant à déplacer la disposition concernant le maintien du bénéfice du tarif réglementé pour les consommateurs n'exerçant pas leur droit d'option pour le prix de marché.

Les amendements nos 2958 à 3107, présentés par des membres du groupe socialiste, sont alors devenus sans objet.

M. François Brottes a déploré qu'ait été présenté comme un simple amendement rédactionnel du rapporteur un amendement qui privait le groupe socialiste de débat sur plus de 150 amendements.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur, a contesté cette analyse et a précisé que son amendement avait pour objet de rassembler avant l'article 4 l'ensemble des dispositions relatives au maintien et au retour au tarif.

Deux amendements de M. Jean Dionis du Séjour, deux amendements de M. Daniel Paul, les amendements n°s 3141 à 3290 du groupe socialiste concernant l'application des tarifs ont été réservés jusqu'avant l'article 4.

Puis la Commission a examiné trois amendements de M. Daniel Paul tendant à supprimer les consultations obligatoires de la CRE prévues par la loi du 10 février 2000, et à créer un observatoire national du service public de l'électricité et du gaz.

Après que le rapporteur a estimé que, dans un contexte de marché, la présence d'un régulateur s'avérait indispensable, et précisé que les avis de la CRE ne liaient pas le ministre qui demeurait seul compétent, la Commission a rejeté ces trois amendements.

La Commission a ensuite examiné un amendement présenté par M. Jean Dionis du Séjour visant à ce que tous les fournisseurs d'électricité puissent bénéficier de la compensation du surcoût né de l'exécution des obligations d'achat, dans les mêmes conditions qu'Électricité de France.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur, a demandé le retrait de cet amendement, afin de travailler sur cette question intéressante. M. Jean Dionis du Séjour a donc retiré cet amendement.

La Commission a ensuite rejeté un amendement déposé par M. Daniel Spagnou, visant à renforcer les pouvoirs de la commission de régulation de l'énergie.

Puis, la Commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

Après l'article 1er

La Commission a ensuite examiné les amendements nos 5352 à 5384 rect., et nos 5535 à 5567 rect. présentés par des membres du groupe socialiste.

M. François Brottes a indiqué que le Consortium Exeltium était un groupement de grandes entreprises fortement consommatrices en électricité, dont l'efficacité et la compatibilité avec la réglementation communautaire font débat. Il a rappelé que la France enregistrait une perte de compétitivité dans le domaine de l'énergie, dans la mesure où elle est maintenant située derrière le Japon ou l'Afrique du Sud, alors que le prix de l'énergie devient un poids important pour nos entreprises. Ces amendements proposent donc, a-t-il indiqué, d'élargir le Consortium Exeltium à des industries qui en sont aujourd'hui exclues, ce qui permettrait également d'éviter des contentieux futurs.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur, a indiqué que les industries électro-intensives adhérentes au consortium achètent leur électricité au terme d'un appel d'offre actuellement en cours, que cet amendement risque de remettre en cause. En outre, il a indiqué que cet amendement représentait un risque pour le Consortium, la demande étant déjà supérieure à l'offre ; il a en outre rappelé que les entreprises qui ne font pas partie de cette instance pourront bénéficier du tarif transitoire d'ajustement du marché, prévu par un amendement du rapporteur.

M. François Brottes, rappelant que les relations contractuelles entre les gros consommateurs d'électricité et Électricité de France prévoyaient la possibilité de coupures en cas de forte demande contre un tarif préférentiel, dit EJP (effacement jours de pointe) s'est interrogé sur la probable disparition de cette disposition, la jugeant très favorable à une bonne gestion de l'offre et de la demande d'électricité.

Le rapporteur a indiqué que ce tarif existait encore mais qu'il n'était de toute façon pas du domaine du législateur.

M. Jean Gaubert, soulignant que EDF ne voulait plus proposer le tarif EJP, a estimé que le marché de l'énergie n'étant pas un marché normal, il serait dangereux de le libéraliser et de supprimer dans le même temps les relations contractuelles qui permettent de le stabiliser. Il a en outre indiqué que la commission de régulation de l'énergie avait plus pour objectif de promouvoir une conception libérale du marché de l'énergie que de maintenir des prix bas.

La Commission a ensuite rejeté ces amendements.

La Commission a ensuite rejeté deux amendements identiques présentés par MM. Martial Saddier et Antoine Herth précisant les conditions dans lesquelles un responsable d'équilibre défaillant après mise en demeure par le gestionnaire du réseau de transport voit son contrat avec ce dernier dénoncé.

La Commission a ensuite examiné les amendements nos 398 à 430 présentés par des membres du groupe socialiste. Après que M. François Brottes eut indiqué que ces amendements visaient à ce que le gouvernement réalise un document de politique transversale dans le cadre de chaque loi de finances, le rapporteur a rappelé que ces amendements étaient satisfaits. La Commission a donc rejeté ces amendements.

Les amendements nos 3141 à 3290 présentés par des membres du groupe socialiste ont ensuite été réservés pour être discutés à l'article 4, ainsi qu'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour visant à préciser les conditions de retour au tarif par les clients ayant fait jouer leur éligibilité.

Article 2 : Éligibilité de l'ensemble des consommateurs de gaz naturel

La Commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur visant à rassembler au sein de l'article 4 les dispositions relatives à l'accès au tarif réglementé, rendant ainsi sans objet les amendements nos 3456 à 3605 présentés par des membres du groupe socialiste, un amendement de M. Daniel Paul visant à permettre un retour aux tarifs aux clients ayant fait jouer leur éligibilité et un amendement du même auteur visant à permettre à tout consommateur un retour aux tarifs réglementés en cas de différence de plus de 5 % avec le prix de marché.

La Commission a ensuite adopté un amendement rédactionnel du rapporteur, puis elle a rejeté trois amendements de M. Daniel Paul visant à limiter les pouvoirs de la commission de régulation de l'énergie au profit de l'observatoire national du service public de l'électricité.

Puis, la Commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.

Après l'article 2

La Commission a rejeté deux amendements identiques de MM. Martial Saddier et Antoine Herth visant à harmoniser les règles actuelles d'exercice de l'éligibilité par les clients éligibles entre l'électricité et le gaz naturel.

Article 3 : Tarification de solidarité pour le gaz naturel et compensation des charges en résultant

La Commission a ensuite examiné un amendement présenté par le rapporteur visant à simplifier le dispositif relatif au tarif de solidarité du gaz naturel, en ouvrant le bénéfice de ce tarif aux consommateurs pouvant bénéficier de la tarification spéciale de l'électricité.

M. François Brottes s'est étonné que cette simplification conduise à renvoyer au décret les précisions nécessaires à la compréhension du tarif social du gaz, par le biais de l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000.

M. Jean Gaubert a fait remarquer que ce mécanisme avantageait les foyers utilisant du gaz et de l'électricité et a regretté que ce dispositif instaure une inégalité entre les ménages qui peuvent avoir recours au gaz et les autres.

Le rapporteur a indiqué étudier les modifications à apporter à ce dispositif.

M. Jean Proriol a indiqué qu'un opuscule édité par Électricité de France en 2005 affirme que le tarif de première nécessité s'applique aux foyers dont les ressources sont inférieures à 460 euros, conduisant à une réduction annuelle de 30, 40 ou 50 % en fonction de la composition familiale. Il a par ailleurs indiqué que 370 000 familles bénéficiaient de ce tarif au 1er juillet 2005, et que 250 000 familles bénéficient du fonds de solidarité pour le logement (FSL).

La Commission a ensuite adopté cet amendement, rendant sans objet les amendements nos 497 à 529, les amendements nos 4188 à 4337 et les amendements nos 10374 à 10604 présentés par des membres du groupe socialiste

La Commission a ensuite examiné les amendements nos 7272 à 7568 présentés par des membres du groupe socialiste. Après que M. François Brottes eut indiqué qu'ils avaient pour objet d'élargir les critères d'éligibilité au tarif social du gaz, et que le rapporteur eut répondu que ces précisions relevaient du domaine réglementaire, la Commission a rejeté ces amendements.

La Commission a ensuite examiné les amendements nos 7569 à 7997 présentés par des membres du groupe socialiste. M. François Brottes a indiqué que ces amendements avaient pour objet de préciser dans la loi les critères d'éligibilité au tarif social du gaz. M. Jean Dionis du Séjour s'est dit opposé à ce qu'un tarif social soit lié non pas à un niveau de ressource mais à un statut, ce qui relève d'une vision archaïque de la politique sociale. Le rapporteur a jugé que ces précisions relevaient du domaine réglementaire, en critiquant le fait que, au terme du dispositif prévu, le chômage d'une personne du foyer pendant plus de 6 mois suffise à faire bénéficier le foyer du tarif social. Puis, la Commission a rejeté ces amendements.

La Commission a ensuite examiné les amendements nos 8691 à 9152 présentés par des membres du groupe socialiste. M. François Brottes a précisé que ces amendements visaient à faire des propositions à la majorité actuelle, afin que certaines idées puissent être reprises.

Le rapporteur a indiqué qu'en dépit de son ouverture, les propositions rédigées par le groupe socialiste étaient impossible à mettre en œuvre. La Commission a alors rejeté ces amendements.

La Commission a ensuite rejeté les amendements nos 9153 à 9680 présentés par des membres du groupe socialiste. Elle a ensuite adopté trois amendements rédactionnels du rapporteur.

Puis, la Commission a examiné un amendement de M. Jean Dionis du Séjour, visant à harmoniser les bases de calcul de la contribution aux charges de services public, en optant pour le tarif réglementé de vente du kilowattheure.

M. François Brottes s'est dit totalement opposé à cet amendement, dans la mesure où il conduirait à diminuer le montant global de la contribution, mais aussi à pénaliser les tarifs du gaz au profit des prix fixés par le marché.

M. Jean Dionis du Séjour a alors retiré cet amendement.

La Commission a ensuite adopté un amendement de précision du rapporteur.

Puis la Commission a examiné un amendement présenté par M. Jean Dionis du Séjour visant à soumettre à l'avis préalable du Conseil de la Concurrence l'envoi par la Commission de régulation de l'énergie d'une lettre de rappel assortie de pénalités de retard en cas de défaut de paiement de la contribution aux charges de service public. Après que M. Jean Dionis du Séjour a expliqué que ces litiges étaient souvent dus à des problèmes de concurrence, M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur, s'est déclaré défavorable à l'adoption de cet amendement, de nature à alourdir les procédures. Suivant son rapporteur, la Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a ensuite adopté deux amendements de précision du rapporteur puis l'article 3 ainsi modifié.

Après l'article 3

La Commission a examiné les amendements nos 4338 à 4487 présentés par des membres du groupe socialiste, ainsi que les amendements nos 4488 à 4637 présentés par des membres du même groupe.

M. Jean Gaubert a considéré que le tarif réglementé ne devait pas s'aligner sur le prix de marché mais s'approcher du prix de revient, majoré d'une petite marge pour permettre des investissements. En conséquence, il lui a semblé souhaitable d'interdire à la Commission de régulation de l'énergie de dénaturer le tarif réglementé en le rapprochant du prix du marché et de supprimer toute référence à ce dernier.

M. Daniel Paul a souligné les difficultés actuelles pour avoir connaissance des éléments de fixation du tarif. Il a rappelé que le législateur de 1946 avait fait en sorte que le tarif de l'électricité corresponde au seul coût réel de production et qu'il convenait de ne pas s'éloigner de cette conception, sauf à faire de l'énergie une marchandise comme une autre.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur, a considéré que ces amendements étaient satisfaits par les dispositions de la loi de 2000. S'agissant du débat sur le juste prix, il a observé que le niveau de certains des tarifs réglementés actuels était sans doute insuffisant.

M. Jean Gaubert a dénoncé l'interprétation non littérale de la loi de 2000 par la Commission de régulation de l'énergie tendant à rendre inopérante la notion de tarif réglementé et la volonté des opérateurs historiques de la voir disparaître. Il a estimé qu'EDF, comme toute entreprise, connaissait son prix de revient par unité de production et que la seule interrogation qui restait était le niveau de la provision pour démantèlement.

Suivant l'avis défavorable de son rapporteur, la Commission a rejeté les amendements nos 4338 à 4487 et nos 4488 à 4637 présentés par des membres du groupe socialiste.

Articles additionnels avant l'article 4 : Tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché

La Commission a examiné un amendement portant article additionnel présenté par le Président Patrick Ollier et le rapporteur instituant un tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché pour la fourniture d'électricité ainsi qu'un autre amendement des mêmes auteurs créant une compensation des fournisseurs supportant une charge du fait de ce tarif. Le Président Patrick Ollier a indiqué que ces amendements proposaient une solution à la hausse insupportable des prix de l'électricité affectant les entreprises qui avaient exercé leur éligibilité, hausse qui a pu atteindre plus de 85 %, et qu'ils permettaient un retour transitoire à un nouveau tarif réglementé. Il a souligné que ces amendements étaient le fruit d'un travail complexe entamé en juillet et salué l'attitude des ministres de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur, a précisé que l'amendement créant le nouveau tarif était indissociable du suivant présenté par les mêmes auteurs instituant une compensation destinée à financer ce dispositif. Il a rappelé la dégradation significative de la situation des entreprises qui avaient fait jouer leur éligibilité dans le cadre de la loi de 2000 : celles-ci avaient d'abord vu leur facture énergétique baisser et au bout de deux ans le prix de marché a atteint puis largement dépassé le tarif réglementé, jusqu'à des niveaux excédant ce tarif de 60 à 80 %. Il a précisé qu'en raison des engagements communautaires de la France, il semblait exclu de revenir au tarif réglementé de droit commun et qu'en conséquence l'idée d'une période transitoire d'ajustement avait été retenue. Il a indiqué que les entreprises qui ont fait jouer leur éligibilité auront jusqu'au 30 juin 2007 pour déclarer leur souhait de bénéficier de la tarification provisoire, qui s'appliquera pendant une durée de deux ans. Rappelant que ces entreprises avaient dans les premiers temps pu bénéficier d'une baisse de leur facture énergétique, il a expliqué que cette tarification de retour s'inscrivait à mi-chemin entre le tarif réglementé et le prix de marché, en ne pouvant excéder 30 % du tarif réglementé de vente. Il a ajouté que le financement du dispositif figurait dans l'amendement suivant, qui prévoit une compensation de la différence entre le coût de revient de la production des fournisseurs et les recettes correspondant à ce nouveau tarif prise en charge par la création d'une contribution due par les producteurs exploitant des installations d'une puissance supérieure à 2 000 mégawatts, assise sur le volume de leur production d'origine nucléaire ou hydraulique, sources d'énergie les moins coûteuses. Il a enfin rappelé que ces deux amendements résultaient d'une négociation approfondie.

M. Jean Gaubert a rappelé que la loi de 2000 ouvrait la faculté d'exercer son droit à l'éligibilité et n'instituait aucune obligation en la matière. Il a estimé que les entreprises concernées avaient cru que le prix du marché serait forcément plus bas que le tarif, sans même regarder ce qui se passait dans d'autres pays, tels la Norvège ou les Etats-Unis. Il a souligné que le fait de se retrouver dans un marché européen et non national avait constitué en outre un facteur aggravant. Rappelant que le prix de vente était constitué par la confrontation de l'offre et de la demande et non fondé sur le coût de revient dans un système de marché, il a jugé la hausse des prix non pas incompréhensible, comme indiqué dans l'exposé des motifs de l'amendement, mais simplement inadmissible. En conséquence, il a estimé que le marché n'allait pas s'assagir en raison de l'instauration de ce nouveau tarif provisoire et que le problème resterait entier dans deux ans. Il s'est par ailleurs déclaré choqué par la création d'une compensation au bénéfice des fournisseurs privés financée par une contribution pesant principalement sur les opérateurs historiques, dont les besoins financiers pour le renouvellement de leurs installations ont pourtant été soulignés par le rapporteur.

M. Daniel Paul a jugé que ces amendements étaient allés au plus simple. Alors que l'élargissement du marché devrait conduire à une pente ascendante des prix, il a estimé que ces amendements reposaient sur une hypothèse inverse à l'issue de la période transitoire de deux ans. Il s'est inquiété de la situation des entreprises électro-intensives au bout des deux années et a critiqué le financement de la compensation par une contribution due par les opérateurs historiques. Il a souligné le risque de faire supporter au bout du compte cette charge par les usagers domestiques ou les PME, si rien n'empêche dans le dispositif de l'amendement une augmentation du tarif réglementé. Il a conclu en rappelant la hausse des dividendes de GDF de 48 % en 2005.

M. Pierre Ducout a observé que l'amendement proposé ouvrait le régime transitoire à tous les clients ayant fait jouer leur éligibilité, et reposait sur l'hypothèse qu'il n'y avait aucune difficulté à calculer le prix de revient. Il s'est interrogé sur l'impact que ce dispositif aurait sur le tarif, sachant que la charge correspondante conduirait à un relèvement du prix de revient. Il a demandé si des engagements avaient été pris par le ministre de l'économie à cet égard.

M. Jean Dionis du Séjour s'est étonné que l'amendement permette un accès au régime provisoire immédiatement après avoir fait jouer l'éligibilité, ce qui ouvre considérablement le dispositif, et le rend très cher, contrairement à la solution qu'il préconisait, limitant le mécanisme de retour aux clients ayant subi des écarts de prix très importants.

M. François Brottes a résumé la proposition en notant qu'elle visait à augmenter les tarifs réglementés pour pouvoir baisser les prix. Il a estimé que tous les clients ayant fait jouer leur éligibilité demanderaient le bénéfice du dispositif, et que celui-ci serait donc effectivement très coûteux. Il a observé que les opérateurs non producteurs, puisqu'ils se verraient compenser des rabais qu'ils devraient consentir dans ce cadre à leurs clients, ne seraient en rien pénalisés par le dispositif, alors même qu'ils ont contribué, à la manière de coucous venant s'établir sur les capacités productrices des autres producteurs, aux difficultés liées à la mise en jeu de l'éligibilité. Il s'est inscrit en faux contre une présentation tendant à faire accroire l'idée que les clients ayant fait jouer leur éligibilité auraient assez gagné dans un premier temps pour que la remontée ultérieure des prix ne les ait finalement pas trop lésés : en réalité, les industriels électro-intensifs n'ont bénéficié dans un premier temps que d'un gain de un pour encourir ensuite une perte de neuf. Il s'est interrogé sur le risque que le dispositif ne conduise finalement à supprimer en pratique le tarif réglementé. Il a demandé si l'écart par rapport au tarif serait constaté en valeur annuelle moyenne ou « au fil de l'eau ». Il a constaté enfin que l'amendement présenté, tel qu'il était conçu, avait pour effet de court-circuiter une partie importante de la discussion parlementaire en faisant tomber un grand nombre d'amendements.

M. Serge Poignant a rappelé que le dispositif juridique permettant de protéger les industries électro-intensives contre les très fortes hausses du prix de l'électricité des derniers mois devait avoir un soubassement législatif, faute de quoi il ne pourrait être mis en place. Il a indiqué que ses modalités résultaient de compromis, s'agissant de la période transitoire de deux ans, comme du niveau fixé pour le tarif de retour par rapport au tarif réglementé. Il a signalé que ces modalités permettaient aussi bien de préserver la capacité d'investissement des opérateurs, que de trouver une source de financement pour la charge induite par le retour au tarif. Il s'est félicité de ce qu'un accord ait pu se dégager pour la mise au point de ce dispositif équilibré, qui s'accompagne de l'amendement prévoyant la possibilité du maintien au tarif pour les nouveaux entrants.

M. Léonce Deprez a célébré le rôle moteur du Président Ollier dans l'élaboration de cet amendement, soulignant l'importance de l'énergie dans les coûts supportés par certaines industries, notamment celles du papier. Il s'est étonné de voir figurer dans l'exposé sommaire de l'amendement la mention de la dimension « incompréhensible » de la hausse du prix de l'électricité, cette hausse étant à ses yeux tout à fait prévisible, puisque la libéralisation du marché européen avait conduit logiquement à un effet de moyenne entre les prix pratiqués en Europe et les prix beaucoup plus bas disponibles en France grâce à la production nucléaire. Il a estimé que le caractère transitoire du dispositif mis en place donnait le temps de trouver éventuellement une solution plus durable si nécessaire.

Le rapporteur s'est félicité de l'accord de l'ensemble de la Commission sur le principe d'un dispositif atténuant les difficultés subies par les clients frappés par la hausse des prix. Il a indiqué que, parmi les solutions envisagées, celle d'une prise en charge de la compensation par la contribution au service public de l'énergie avait été rejetée, car non seulement elle aurait dévoyé l'objet initial de celle-ci, mais encore elle aurait conduit à faire supporter la charge par le consommateur final, alors que le dispositif finalement retenu la faisait supporter par des producteurs d'électricité nucléaire et hydraulique. Il a précisé qu'EDF fournissait environ les deux tiers du marchés libre et qu'en conséquence la charge de la compensation du dispositif de retour au tarif pesait sur l'opérateur qui avait été aussi le principal acteur de l'ouverture du marché. S'agissant des conditions du calcul de la compensation, il a expliqué que le niveau des prix considéré serait établi à partir d'une moyenne annuelle et que le ministre de l'économie, qui maîtrise l'évolution du tarif réglementé applicable aux clients n'ayant pas exercé leur éligibilité, avait pris l'engagement que le tarif ne subirait pas le contrecoup de la mise en place de cette compensation, les entreprises mises à contribution étant ainsi contraintes de dégager les montants nécessaires sur leurs résultats. Il s'est montré prudent face à l'idée que les clients passés au régime de prix feraient tous jouer leur droit au retour. Il a observé, en conclusion, que la mise en place d'un régime de compensation au niveau des prix n'était pas nouveau en France, puisqu'avant l'ouverture du marché, les tarifs pratiqués en direction des entreprises étaient inférieurs au prix de revient, et compensés par des tarifs supérieurs au prix de revient en direction des particuliers, dans le cadre d'une stratégie de soutien de l'emploi et d'aménagement du territoire et que la phase actuelle correspondait à un effort d'alignement sur la vérité des prix.

Après que M. François Gaubert a dénoncé « l'usine à gaz » ainsi mise en place, la Commission a adopté les deux amendements présentés par le Président et le rapporteur, les groupes socialistes et communistes votant contre.

La Commission a rejeté deux amendements de M. Jean Dionis du Séjour, et deux amendements de M. Daniel Paul précédemment réservés, car proposant des solutions alternatives de retour au tarif, ainsi que les amendements nos 3141 à 3290 présentés sur le même sujet, après l'article premier, par des membres du groupe socialiste, et qui avaient été également réservés.

Article 4 : Conditions d'accès aux tarifs réglementés

La Commission a ensuite adopté, à l'unanimité, un amendement du Président et du rapporteur, ainsi que deux amendements identiques de MM. Martial Saddier et Antoine Herth, autorisant, de façon pérenne, les nouveaux sites de consommation professionnelle à bénéficier des tarifs réglementés. Elle a aussi adopté un amendement rédactionnel du rapporteur.

La Commission a ensuite rejeté un amendement de M. Martial Saddier et un amendement de M. Jean Dionis du Séjour, proposant des solutions alternatives de retour au tarif, ainsi que les deux séries d'amendements identiques nos 4869 à 5018 et nos 5019 à 5168 présentés par des membres du groupe socialiste redéfinissant les déterminants des tarifs d'électricité et de gaz.

Puis, la Commission a adopté l'article 4 ainsi modifié.

Après l'article 4

La Commission a également rejeté les amendements identiques nos 9681 à 10373, les amendements identiques nos 7998 à 8690, les amendements identiques nos 12222 à 18326, et les amendements identiques nos 19302 à 25373, présentés par des membres du groupe socialiste, et proposant des dispositions alternatives pour le retour au tarif.

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