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Deuxième séance du mercredi 21 juillet 2004

42e séance de la session extraordinaire 2003-2004


PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT,

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

    1

AUTONOMIE FINANCIÈRE
DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Suite de la discussion, en deuxième lecture,
d'un projet de loi organique

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi organique pris en application de l'article 72-2 de la Constitution, relatif à l'autonomie financière des collectivités territoriales (nos 1638, 1674).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Ce matin, l'Assemblée nationale a commencé l'examen des articles et s'est arrêtée à l'amendement n° 6 à l'article 1er.

Article 1er (suite)

M. le président. La parole est à M. René Dosière, pour soutenir l'amendement n° 6.

M. René Dosière. Cet amendement a pour objet de substituer, à l'indice unique envisagé pour l'ensemble des communes françaises, un double indice permettant de mieux saisir la réalité et la diversité des communes.

Comme je l'ai fait remarquer brièvement ce matin, le ratio d'autonomie financière - dont je ne garantis d'ailleurs pas le mode de calcul - présente de grands écarts : ainsi, dans les communes de moins de 250 habitants, il est de 28 %, contre 53 % pour la ville de Paris. Il peut donc aller du simple au double.

En instituant un ratio unique, on gomme ces différences. Cela signifie que l'indice moyen auquel on aboutira n'aura aucune signification. Je ne pense pas que le Gouvernement veuille faire un texte inutile. Voilà pourquoi, soucieux d'améliorer ce projet, nous avons déposé cet amendement.

Pour faire simple, nous nous sommes contentés de proposer une distinction entre les communes de plus et de moins de 10 000 habitants. N'oublions pas qu'il y a en France 36 679 communes, dont 114 dans les départements d'outre-mer. Ce qui m'amène à dire : « ratio unique, ratio inique » !

M. Michel Bouvard. Oh ! Belle formule !

M. René Dosière. A titre informatif, le ratio, tel que je l'ai calculé, serait, pour les communes de moins de 10 000 habitants, de 38 % et, pour les communes de plus de 10 000 habitants, de 44 %. Ces pourcentages, sans être parfaitement exacts, se rapprochent en tout cas de la moyenne de chacune des catégories. C'est la raison pour laquelle nous proposons qu'il y ait, au moins pour les communes, deux ratios d'autonomie financière.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 6.

M. Guy Geoffroy, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. M. Dosière nous a rappelé fort opportunément ce matin l'article 72 de la Constitution. Et pour fonder son opposition à ce que nous proposions à l'article 1er, il nous a précisé que selon l'article 72, il y avait cinq catégories de collectivités. J'en ai déduit qu'il n'était pas question d'aller au-delà. Or il nous suggère maintenant de créer une sixième catégorie ! Ce n'est pas très cohérent.

Plus généralement, l'objectif de la loi n'est pas, collectivité par collectivité, de mesurer, puis éventuellement de rétablir le ratio d'autonomie financière.

Un exemple : personne n'a mis en doute que devaient figurer, dans la définition des ressources propres, les produits tirés du domaine, notamment de son aliénation. Si une collectivité, une année particulière, était amenée à aliéner une partie de son domaine, son ratio d'autonomie financière augmenterait considérablement. L'État, dans sa grande folie, pourrait alors envisager de réduire certains concours, par voie d'impôts transférés pour partie ; le ratio ne serait pas diminué, puisque la collectivité aurait réussi à s'assurer des ressources propres supplémentaires grâce à cette aliénation. Mais l'objectif de la loi ne serait pas atteint parce que, par définition, ce qui est en cause, c'est l'institution d'une relation de confiance entre l'État et les collectivités territoriales. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la situation ne peut s'apprécier qu'à partir de grandes masses.

J'ai commencé à développer ce matin un argument sur l'égalité de traitement qui nous semblait nécessaire entre les collectivités de métropole et celles d'outre-mer.

M. René Dosière. On y reviendra !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Partant de la liste dont vous avez rappelé l'existence à l'article 72, le projet de loi se contente, dans une volonté de clarté et de simplification, de retenir trois catégories de collectivités pour l'établissement des principes de l'autonomie financière. N'allons pas au-delà. Même si vos explications, monsieur Dosière, peuvent sembler pertinentes, elles ne le sont pas au regard de l'objectif poursuivi, qui est de constater un certain ratio, puis de le rétablir s'il lui arrivait de se dégrader. C'est sur la base de grandes masses comparables les unes aux autres que nous pourrons mesurer l'exactitude des constats que nous ferons.

Voilà pourquoi cet amendement n'a pas été retenu par la commission des lois.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'intérieur, porte-parole du Gouvernement, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 6.

M. Jean-François Copé, ministre délégué à l'intérieur, porte-parole du Gouvernement. Je voudrais exprimer à mon tour un avis défavorable sur cet amendement.

Encore une fois, tous les choix sont possibles. Mais nous avons tiré les conclusions de l'observation du terrain, ce qui nous a amenés, tout naturellement, à opter pour la simplicité. L'idée consistait à choisir et à identifier clairement, conformément à la lettre de la Constitution, trois catégories de collectivités. Après arbitrage, nous avons en effet regroupé les communes et les EPCI. A partir de là, il n'était pas possible d'aller dans le sens que vous proposez, à savoir un découpage entre les communes de plus ou de moins de 10 000 habitants ; en effet, comment faire avec les EPCI ?

Il me semble que le choix que nous avons retenu est à la fois conforme aux prescriptions de la Constitution et cohérent avec notre souci de construire une véritable autonomie financière, sur la base des critères qui fondent l'essentiel de cette loi organique.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau. Je soutiens l'amendement de M. Dosière qui me semble fondé sur le bon sens et l'observation. Mais le seuil de 10 000 habitants devrait être exprimé en « population DGF ». Je pense, en particulier, aux communes touristiques.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Monsieur le rapporteur, n'essayez pas de me mettre en contradiction avec mes propos ou je vous prendrai à votre propre jeu.

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Loin de moi cette intention !

M. René Dosière. À la référence que je faisais ce matin à l'article 72 de la Constitution, vous opposez mon amendement, qui propose une autre liste des collectivités territoriales en scindant les communes en deux catégories. C'est naturellement un amendement de repli, que je retirerai si vous acceptez, par cohérence, de retenir la liste des collectivités territoriales énumérées par la Constitution. Mais vous avez beau clamer sans cesse « La Constitution ! La Constitution ! », vous n'y êtes manifestement pas prêt.

Faire simple n'oblige pas à être simpliste. Et je considère que prévoir un indice unique pour 36 679 communes très diverses, c'est un peu simpliste.

Je suis d'accord sur la nécessité de rétablir la confiance entre l'État et les collectivités territoriales. Mais croyez-vous que votre attitude et celle de vos collègues de la majorité s'y prête ? Dans les associations d'élus auxquelles vous adhérez, vous avez tous voté des motions définissant les ressources propres comme des ressources que les collectivités maîtrisent. Mais une fois dans cet hémicycle, vous votez le contraire ! Ce comportement est-il de nature à rétablir la confiance entre les élus municipaux et l'État ? Je ne le pense pas. Je vous mets face à vos responsabilités. Croyez que nous saurons, lors des congrès qui se tiendront à l'automne, en particulier celui des maires, expliquer comment la position de l'AMF a été mise à bas par les députés de la majorité, que l'on n'entend pas beaucoup mais qui s'expriment à travers leur vote. Si politiquement vous avez la majorité, vous n'avez pas nécessairement juridiquement raison. (Rires sur de nombreux bancs.)

M. Jean-Pierre Balligand. Cela rappelle de vieux souvenirs !

M. le président. Et rajeunit bon nombre d'entre nous ! (Sourires.)

Je mets aux voix l'amendement n° 6.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 5.

La parole est à M. Jean-Pierre Balligand, pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Balligand. Cet amendement a trait aux EPCI, que la majorité a refusé, lors de la réforme constitutionnelle, d'élever au rang de collectivités locales, en dépit de nos demandes. Pourtant, que ce soit dans ce texte ou celui que nous étudierons ensuite sur les responsabilités locales, nous ne pouvons pas faire l'économie de la prise en compte de l'intercommunalité à fiscalité propre, très importante pour les élus ruraux.

Monsieur le ministre, vous prétendez que les socialistes, lorsqu'ils étaient au pouvoir, n'ont rien fait. Or la loi Joxe de 1992 et celle de 1999 sont, en la matière, les deux textes les plus importants depuis les lois Defferre. L'intercommunalité était la solution pour éviter la disparition de la commune et assurer son développement. Elle est arrivée en milieu urbain depuis dix ans, sauf peut-être en région parisienne, grâce à nous, socialistes, et malgré vous, gens de droite, qui n'avez pas voulu voter la loi Joxe mais qui vous êtes empressés ensuite de l'appliquer. La communauté d'agglomération permet aujourd'hui de mettre en oeuvre une vraie dynamique de développement. Toutefois, cette structure lève l'impôt direct sans être sanctionnée par le suffrage universel. C'est l'erreur fondamentale de la loi relative aux responsabilités locales. M. Daubresse, rapporteur qui « assumait », avait reconnu qu'il faudrait rapidement un « acte III » de la décentralisation qui aille dans ce sens.

Mais c'est la question financière qui est fondamentale. Plusieurs membres du groupe socialiste vous ont interrogé sur les fameux 120 millions d'euros du plan Borloo qui vont être prélevés sur la DSU. À qui seront-ils pris ? Sur quoi seront-ils mis ? À quelle vitesse ? Touchera-t-on aux dotations forfaitaires ? Est-il bien indiqué de prendre aux communes pour donner à l'intercommunalité alors que celle-ci n'a pas achevé sa montée en puissance ? Je vous rappelle que plus de 50 millions de Français sont concernés par ces structures à fiscalité propre. Vous annoncez la suppression de la taxe professionnelle alors que la TPU est le seul impôt pour un grand nombre de ces intercommunalités. Si vous n'y voyez pas un motif d'insécurité financière, je n'y comprends plus rien !

L'ADCF, dont je suis vice-président et dont M. Marc Censi est le président, n'est pas une organisation politique. Elle rassemble des sensibilités différentes, mais nous sommes tous solidaires pour demander, depuis plusieurs mois maintenant, que l'on nous dise clairement comment pourra s'organiser la montée en puissance financière de l'intercommunalité à fiscalité propre. Cela n'a rien de polémique. Nous avons vraiment besoin d'une réponse. Nous discutons de la garantie financière et vous devez nous éclairer sur le sort des structures intercommunales, du développement économique et de l'aménagement du territoire. Encore une fois, 50 millions de Français sont concernés. Il n'y a guère que les habitants de la région parisienne qui ne le soient pas totalement. Nous avons besoin, au moins dans le débat parlementaire, d'un engagement de la part du Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Cet amendement a été rejeté par la commission puisque la Constitution n'a pas prévu de faire des EPCI des collectivités territoriales à part entière. Néanmoins, on ne peut pas ignorer cet aspect de la question. La loi organique fait référence aux EPCI en considérant que ces établissements publics sont bien des prolongements de l'action communale et qu'à ce titre, ils entrent parfaitement en ligne de compte dans l'établissement des ratios sur l'autonomie financière de la catégorie des communes.

M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 5, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Avis défavorable. Le débat sur l'opportunité de considérer les EPCI comme une catégorie spécifique de collectivités territoriales a été tranché. Le temps est maintenant venu d'en tirer les enseignements. Il est inutile d'y revenir, même si la question est passionnante, tous les participants ayant eu largement l'occasion de s'exprimer.

Il faut tenir compte du choix de la fameuse taxe professionnelle unique qui a été fait dans le mouvement de l'intercommunalité, dont je reconnais sans états d'âme que l'initiative revient au gouvernement précédent.

M. René Dosière. C'est bien !

M. le ministre délégué à l'intérieur. Du coup, il devient compliqué de séparer les EPCI des communes. Ce seul élément montre qu'il n'est pas possible de les identifier.

S'agissant de la DSU, je ne peux pas encore entrer dans le détail, chaque débat devant être mené dans sa plénitude. Nous aurons deux autres rendez-vous importants sur le sujet avec la réforme des dotations et le plan de cohésion sociale que défendra Jean-Louis Borloo. Pour l'heure, la DSU fait l'objet d'une réflexion sur la manière d'améliorer son efficacité en termes d'équité territoriale. Elle pourrait déboucher sur l'éventuelle utilisation des surplus - des surplus seulement - dans la progression de la DGF. Mais nous n'en sommes qu'au début de la réflexion et nous aurons d'autres occasions de l'approfondir.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Monsieur le ministre, je vous remercie de reconnaître que c'est la gauche qui a engagé résolument notre pays dans l'intercommunalité. Tout le monde ne s'y résout pas au sein de la majorité qui vous soutient. N'a-t-on pas entendu, ce matin et hier, des interrogations persistantes sur ce que la gauche avait fait quand elle était au pouvoir ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Cela vous encouragera peut-être à reconnaître l'action de notre gouvernement en faveur de la décentralisation.

M. René Dosière. Chaque chose en son temps ! (Sourires.) Pour l'instant, je rappelle que c'est à notre initiative qu'a été engagée cette révolution tranquille dans le fonctionnement de notre système administratif.

Vous n'avez pas voulu en tirer toutes les conséquences lors de la réforme constitutionnelle, en refusant aux EPCI le statut de collectivité territoriale. Vous ne voulez pas que leurs responsables soient élus au suffrage universel, en dépit du montant des impôts qu'ils votent sans rendre aucun compte à la population. C'est d'ailleurs ce qui facilite l'augmentation de ces impôts de 12 % à 15 % par an.

Aujourd'hui, pour définir l'autonomie financière des communes, vous êtes bien obligés de prendre en compte les EPCI parce qu'ils représentent une part importante des finances communales. La fiscalité des établissements publics intercommunaux s'élève à un tiers de celle des communes et les deux tiers environ du produit de la taxe professionnelle sont maintenant perçus par des EPCI à taxe professionnelle unique. Mais ce n'est pas parce que les EPCI ont une taxe professionnelle unique qu'on ne peut pas séparer leur fiscalité de celle des communes, monsieur le ministre.

J'insiste sur une autre difficulté qu'a évoquée Jean-Pierre Balligand. Alors que les intercommunalités ont été engagées à unifier leurs taux de taxe professionnelle pour ne plus en avoir qu'un seul, alors qu'aujourd'hui un tiers d'entre elles envisagent de passer à la TPU, le Président de la République, en décidant tout seul, comme un grand (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), de supprimer la taxe professionnelle, les plonge dans une véritable insécurité financière.

Il est quelque peu paradoxal que nous n'ayons aucun élément de réponse sur ce point. Comment voulez-vous que les inrtercommunalités passent à la taxe professionnelle unique alors qu'elles ne savent même pas quelles seront leurs ressources au cours des deux prochaines années ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Très juste !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau. Je suis frappé par l'attitude du Gouvernement et, plus largement, de la droite, qui, en matière d'organisation des collectivités territoriales, semble toujours en retard d'un programme.

Je ne reviens pas à la triste histoire de la fusion des communes. Elles sont toujours plus de 36 000 et elles seules sont concernées par le projet de loi organique, à l'exclusion de leurs groupements.

Les départements ont déjà été le théâtre d'une décentralisation grâce aux lois de Gaston Defferre et sont, eux aussi, concernés par le projet de loi organique. Il en est de même des régions, même si certaines dispositions économiques les concernant sont une effroyable aberration.

Ne pas inclure dans cette liste les EPCI serait incompréhensible pour le citoyen. Ces établissements sont, sur le territoire national, le moyen d'assurer le développement économique, de mobiliser les financements et de mener à bien les projets. En les maintenant dans l'insécurité financière, le Gouvernement ne tient pas compte de ce qui se passe sur le terrain. Une fois de plus il a une vision de la réalité que je qualifierai de « hors sol ».

Inclure les EPCI dans le projet de loi organique relève du bon sens et témoigne d'une vision d'avenir pour le développement des territoires.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Le débat sur la catégorie EPCI a été tranché par la réforme constitutionnelle. Ces établissements ne sont pas reconnus comme des collectivités territoriales mais comme des émanations des communes qui en sont membres - et, comme chacun le sait, une loi organique se doit d'être parfaitement conforme à la Constitution. Il n'y a donc pas à revenir sur le sujet.

Cela étant, je voudrais rassurer nos collègues socialistes, en particulier MM. Dosière et Balligand, quant à l'évolution de la DGF au profit de l'intercommunalité. Au cours des dernières années, nous avons réussi, grâce à l'accroissement annuel de cette dotation, à dégager chaque année entre 300 et 400 millions de francs au profit de l'intercommunalité, ce qui a permis de satisfaire ses besoins et de conserver un reliquat suffisant pour la DSU et la DSR. Les perspectives pour les prochaines années sont tout à fait encourageantes : du fait d'un certain ralentissement des besoins de l'intercommunalité, nous serons parfaitement en mesure, après son financement prioritaire, de dégager des sommes suffisantes pour la DSU et la DSR. La réforme des dotations qui sera proposée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2005 permettra de bâtir une architecture du même type qui confortera encore cette évolution. Selon nos prévisions, il serait possible de dégager au moins une centaine de millions d'euros supplémentaires au profit de la DSU. Il n'y a donc pas lieu de s'alarmer.

Vous vous êtes plaints, par ailleurs, de ce que vous considérez comme des incohérences du Gouvernement en matière de finances locales. Permettez-moi d'évoquer un souvenir. Il y a six ans, jour pour jour, j'assistais, en tant que représentant de l'AMF, à une réunion interministérielle où siégeaient, à un bout de la table, Dominique Strauss-Kahn et, à l'autre, Jean-Pierre Chevènement.

M. Michel Bouvard. Intéressante situation !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Au cours de cette réunion, M. Strauss-Kahn nous a annoncé que, du jour au lendemain, la part salaires de la taxe professionnelle allait disparaître pour être remplacée par une dotation d'État. Et M. Chevènement, ministre de l'intérieur, qui au même moment défendait la relance de l'intercommunalité par le biais de la taxe professionnelle unique, a appris en même temps que nous que le tiers de la TP allait être supprimé.

Voilà la concertation socialiste telle que je l'ai vue il y a six ans ! Il est bon de rappeler certains souvenirs à nos collègues de gauche. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. René Dosière. Faites mieux, vous !

M. Augustin Bonrepaux. N'oubliez pas de dire que la dotation de compensation était évolutive !

M. le président. Je vous remercie, monsieur Carrez, et vous félicite pour votre mémoire.

La parole est à M. Michel Bouvard, pour une courte intervention.

M. Michel Bouvard. Je ne veux pas accabler davantage nos collègues de l'opposition mais il est bon de leur rappeler de temps en temps que leur vision manichéenne de la vie politique avec, d'un côté, les progressistes et, de l'autre, les conservateurs, est bien loin de la réalité. (« Et pourtant ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Nous n'avons jamais été opposés à l'intercommunalité.

M. Jean-Pierre Balligand. Vous avez voté contre !

M. Michel Bouvard. Mais, comme l'a rappelé fort justement M. Carrez, le débat sur les EPCI a été tranché lors de la révision constitutionnelle. Et une loi organique ne peut pas créer une catégorie de collectivités territoriales si la Constitution ne l'a pas reconnue.

M. Augustin Bonrepaux. Il ne fallait pas oublier cette catégorie dans la Constitution !

M. Michel Bouvard. Par ailleurs, ceux qui suivent depuis longtemps les questions relatives aux collectivités territoriales savent que la loi Chevènement a repris point par point le projet de loi Perben qui avait été approuvé en conseil des ministres avant la dissolution.

M. René Dosière. Ce texte n'a pas été examiné par le Parlement !

M. Jean-Pierre Balligand. Ce n'est pas nous qui avons dissous !

M. Michel Bouvard. Il n'y a donc aucune hostilité de notre part envers la coopération intercommunale et l'octroi des moyens nécessaires à son fonctionnement.

Cela étant, il n'est pas question pour la majorité de créer un niveau territorial supplémentaire. Nos concitoyens - et c'est un point auquel nous devons être de plus en plus attentifs - s'inquiètent déjà de la superposition des niveaux de responsabilité et de décision. Si l'intercommunalité devenait demain un nouveau type de collectivité territoriale, générateur de complexités et de dépenses supplémentaires, beaucoup d'entre eux y deviendraient hostiles. Et nous n'aurions pas rempli notre engagement de simplifier les procédures et de rendre la gestion de l'argent public plus efficace. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je donne encore la parole à M. Augustin Bonrepaux, puis nous procéderons au scrutin.

M. Augustin Bonrepaux. Je vais, moi aussi, rafraîchir la mémoire de M. le rapporteur. Il ne faut pas oublier de rappeler que, lorsque la part salaires de la taxe professionnelle a été remplacée par une dotation, cette dernière était évolutive, et a effectivement évolué en fonction de la DGF. Aujourd'hui, au contraire, les transferts de charges sont compensés par des ressources qui ne sont pas évolutives. C'est toute la différence ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Michel Bouvard. Mais ce n'étaient pas des ressources propres !

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été précédemment annoncé.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 5.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants .. 93

                    Nombre de suffrages exprimés . 93

                    Majorité absolue . 47

        Pour l'adoption . 22

        Contre . 71

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

M. le président. Je suis saisi de trois amendements de M. Lurel, nos 8, 9 et 7, qui peuvent faire l'objet d'une présentation commune.

La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Ces trois amendements concernent les collectivités d'outre-mer. Là encore, il convient de respecter la spécificité de ces collectivités territoriales et de ne pas mélanger leurs comptes financiers avec ceux des collectivités de métropole.

J'ai cité ce matin l'exemple de la Polynésie française, qui est chère à beaucoup d'entre nous, notamment sur la gauche de cet hémicyle, depuis que son nouveau président est M. Temaru, que j'ai accueilli hier.

S'il est une collectivité qui dispose d'une autonomie financière extraordinaire, c'est bien la Polynésie française : 83 % de ses recettes budgétaires sont d'origine fiscale, soit 81 milliards de francs Pacifique - 680 millions d'euros -, sur un budget de 98 milliards de francs Pacifique : 820 millions d'euros. Pourquoi ? Tout simplement parce que les élus polynésiens définissent eux-mêmes, sans l'intervention du Parlement, leurs assiettes fiscales et le taux de leurs impôts. C'est ainsi que récemment - du temps de M. Flosse - ils ont porté le taux normal de TVA à 16 %, le taux réduit à 6 % et celui sur les prestations de service à 10 %, qu'ils ont créé un impôt sur les bénéfices des sociétés, d'ailleurs modéré, et qu'ils persistent à ne pas vouloir créer un impôt sur le revenu. Mais cela figure dans le programme du nouveau président !

Voilà pourquoi écrire dans le projet que l'on va essayer de préserver l'autonomie financière d'une collectivité d'outre-mer comme la Polynésie n'a aucun sens. Je ne vois vraiment pas quels pouvoirs supplémentaires on pourrait lui donner en matière fiscale.

Nous demandons, dans les amendements nos 8, 9 et 7, de tenir compte de cette spécificité et de ne pas perturber la vie des collectivités d'outre-mer en les englobant dans la liste des collectivités auxquelles s'applique le projet. Elles seraient noyées dans les chiffres de la métropole.

En les mettant à part, nous respectons, pour la Polynésie française, le statut que la majorité de cette assemblée a voté en début d'année. Nous l'avions combattu mais il est apparu qu'il n'était pas si mauvais que cela puisqu'il a permis un renversement de majorité et qu'il donne au nouveau gouvernement les moyens de gouverner. L'expérience engagée par la majorité de cette assemblée s'est révélée tout à fait intéressante.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les trois amendements ?

M. Guy Geoffroy, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable, pour les raisons que j'ai déjà énoncées en répondant aux orateurs inscrits sur l'article 1er. Je voudrais néanmoins apporter quelques éléments complémentaires.

Premièrement - il ne saurait être question de le nier - la structure financière des collectivités d'outre-mer est très hétérogène et, dans l'ensemble, très différente de celle des collectivités de métropole. Cependant, il vaut mieux analyser les choses en se fondant sur les compétences exercées plutôt que sur les structures de financement de l'ensemble des collectivités en cause, surtout si l'on se situe dans l'optique de transferts de compétences, ce qui est en grande partie le cas. C'est une des raisons qui ont conduit le Gouvernement à considérer qu'il fallait traiter l'ensemble des collectivités non pas en fonction de leur statut métropolitain ou ultramarin, mais en tenant compte des compétences qu'elles seraient ou qu'elles étaient d'ores et déjà amenées à exercer.

Deuxièmement, la notion de catégorie de collectivités permettra de résoudre - en jouant sur l'effet de nombre - la difficulté qu'implique la prise en compte des différences en vue d'une correction éventuelle. La catégorie de collectivités qui traiterait de l'outre-mer en contiendrait, par définition, un très petit nombre. Les différences qui pourraient survenir pour l'une d'entre elles entraîneraient un impact trop important pour l'ensemble de la catégorie. Cela donnerait lieu à des analyses et à des ajustements, qui, a contrario, seraient probablement injustes à l'égard de l'ensemble des autres collectivités de métropole, lesquelles ne pourraient pas bénéficier de la même spécificité liée à leur nombre.

Pour terminer, je rappellerai un des éléments fondateurs du projet de loi. Nous sommes dans le cadre de l'ensemble du territoire, métropolitain ou ultramarin. Il nous est donc apparu cohérent que les collectivités de ces deux catégories de territoires français soient traitées de la même manière.

M. René Dosière. Vous ne répondez pas sur le cas particulier de la Polynésie !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Le Gouvernement est défavorable à ces trois amendements.

Je rejoins très largement l'analyse du rapporteur. Elle est très cohérente avec les avis exprimés sur les amendements précédents tant par la commission que par le Gouvernement. Nous avons la volonté de ne pas tomber dans le piège qui consisterait à créer des catégories tellement spécifiques, avec un nombre d'acteurs tellement réduit, qu'il ne serait pas possible de mesurer concrètement l'autonomie financière. Ce serait totalement contraire à l'esprit et même à la lettre de la Constitution.

Nous avons fait le choix, je le répète, de la simplicité. Et il ne sera déjà pas simple pour les gouvernements successifs d'assurer une autonomie financière pour chacune des trois catégories de collectivités locales, qu'il s'agisse des communes, des départements ou des régions.

Monsieur Dosière, ne voyez pas dans mon propos d'ironie particulière mais, honnêtement, on ne pourra pas faire pire que ce qu'ont connu, ces dernières années, nos pauvres régions, qui ont vu leur taux d'autonomie financière s'écrouler sur place, passant de 64 % à 35 %, sans comprendre pourquoi. M. Gilles Carrez nous a permis, par un bref rappel historique, de nous rafraîchir la mémoire.

Sur ces sujets, je dirai, pour employer une image sportive, que la balle est depuis longtemps au centre.

M. le président. Sur le vote de l'article 1er, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. J'admets parfaitement que, pour la plupart des collectivités d'outre-mer, on ne veuille pas faire de complications et je veux bien me rendre aux arguments du Gouvernement sur ce point.

En revanche, il convient d'être attentif à la Polynésie. Ne me dites pas, monsieur le ministre, qu'il n'est pas possible d'isoler le budget de la Polynésie et qu'on aura des difficultés à évaluer son autonomie financière. Mettre la Polynésie dans l'ensemble du ratio est un non-sens. Sur ce point, je souhaiterais que vous-même et M. le rapporteur puissiez me fournir un argument valable pour ne pas isoler la Polynésie. Cela ne pose aucun problème statistique.

C'est peut-être un peu gênant de montrer à l'ensemble des autres collectivités françaises que l'une d'entre elles a un taux d'autonomie financière de 84 %. Mais, en procédant ainsi, on respecterait le statut d'autonomie de la Polynésie.

En ce qui concerne les autres collectivités d'outre-mer, on peut s'en tenir à ce qui existe.

Je terminerai mon propos par quelques réflexions sur la réduction de l'autonomie financière de l'ensemble des collectivités. Lorsque des impôts locaux ont été supprimés pour être remplacés par des dotations, cela a été jugé abominable. Mais, à chaque fois, vous avez saisi le Conseil constitutionnel, et ce dernier - dont vous connaissez la composition - a toujours estimé qu'il n'y avait pas atteinte à la libre administration des collectivités locales, parce que la recette fiscale était remplacée par une dotation évolutive.

M. le ministre délégué à l'intérieur. C'est moins évolutif que les impôts.

M. René Dosière. Par conséquent, ce n'était pas aussi abominable que cela ; sinon le Conseil constitutionnel n'aurait pas manqué de le censurer.

Au demeurant, si cette substitution est tellement détestable, pourquoi ne rétablissez-vous pas la vignette dès l'année prochaine ? Il n'y a rien de plus simple. On sait parfaitement la calculer dans les départements ; les éléments statistiques sont toujours disponibles.

M. le ministre délégué à l'intérieur. Pourquoi l'avez-vous supprimée ?

M. René Dosière. Rétablissez-la ! De cette façon, l'autonomie fiscale des collectivités locales sera renforcée.

Rétablissez aussi la taxe d'habitation pour les régions ! Ce n'est pas compliqué : il suffit d'ajouter une colonne.

M. Pascal Terrasse. Mais ils n'oseront pas !

M. Gérard Bapt. C'est comme pour les 35 heures !

M. René Dosière. Bref, si la situation est aussi épouvantable, pourquoi la laissez-vous persister ? Tout simplement parce que vos arguments sont quelque peu politiciens ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Pierre Balligand. Voilà !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été précédemment annoncé.

Je vais donc mettre aux voix l' article 1er.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 88

                    Nombre de suffrages exprimés 88

                    Majorité absolue 45

        Pour l'adoption .............. 65

        Contre .............. 23

L'Assemblée nationale a adopté.

Après l'article 1er

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 10, portant article additionnel après l'article 1er.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour défendre cet amendement.

M. Augustin Bonrepaux. Une autonomie financière accordée à des collectivités privées de moyens n'a aucun sens pour celles-ci. Les moyens transférés ne sont pas à la hauteur des transferts. Aussi doit-on prendre en compte la péréquation pour définir l'autonomie. L'amendement n° 10 vise donc, monsieur le ministre, à préciser que les dispositifs de péréquation participent de l'autonomie financière des collectivités.

Je prendrai l'exemple simple du transfert du RMI aux départements. Vous avez indiqué ce matin que, pour l'Ariège, nous étions à 102 %. Mais vous n'avez pas précisé par rapport à quoi. Vous êtes à 102 % de ce que vous nous deviez. Mais pas à 102 % de ce que nous payons. Il y a une différence entre ce que vous nous versez et ce que nous devons payer.

Depuis le début de l'année, le coût du RMI a augmenté de 1,5 %. Heureusement, les « recalculés » ont eu gain de cause. Sinon, l'augmentation aurait atteint 15 %.

Il reste que, dans l'Ariège, nous payons 7 % de plus que l'État ne nous rembourse. Vous avez donc beau me dire que vous avez versé 102 % de ce que vous nous deviez : le déficit est déjà de plus de 150 000 euros et atteindra presque 450 000 euros à la fin de l'année. Encore heureux que l'allocation pour les chômeurs de longue durée a été maintenue. Sinon, je le répète, on assisterait à une véritable explosion.

On transfère le RMI, mais tous les départements ne sont pas égaux devant ce transfert. Il y a ceux qui ont beaucoup de RMIstes et ceux qui en ont moins ! On situe la moyenne à 3 % environ. Tous les départements du Sud de la France sont au-dessus : l'Ariège à 4,8 %, l'Aude à 4,9 %, etc. Ce n'est certainement pas parce que tous ces départements sont gérés par des élus de gauche. Il y a malheureusement aussi les Bouches-du-Rhône, le Gard, l'Hérault, et même, à un moindre degré, les Alpes-Maritimes. Citons également le Nord, le Pas-de-Calais et quelques départements de la région parisienne. Quels moyens supplémentaires leur sont accordés pour faire face à ce surcroît de charges ? Aucun !

Quand on annonce une loi sur l'autonomie et qu'elle ne traite pas de la péréquation, est-ce vraiment sérieux ? Il est indispensable que ce projet de loi fasse référence à la péréquation et prévoie que cette dernière ne puisse pas être freinée par les transferts effectués. Autrement dit, on ne doit pas nous dire, au nom de l'autonomie, qu'il ne peut pas y avoir de péréquation. C'est pourquoi il importe que notre amendement soit adopté.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Je veux d'abord remercier M. Bonrepaux : grâce à lui, je me sens moins seul... À écouter M. Dosière, j'avais le sentiment de faire une fixation sur l'article 72-2 de la Constitution ; je constate avec plaisir que nous sommes deux, et même davantage, puisque vous êtes plusieurs à avoir cosigné cet amendement.

Reprenons-le : « Au sens du dernier alinéa de l'article 72-2 de la Constitution, la péréquation est un élément constitutif de l'autonomie financière des collectivités territoriales. » Vous avez tout dit...

M. René Dosière. Mais vous êtes contre !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. ...car si je me réfère docilement, tout comme vous, à ce dernier alinéa, je lis : « La loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales. »

M. Augustin Bonrepaux. Cela n'a rien à voir !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Autrement dit, la Constitution a bien pris en compte cette dimension essentielle que représente la péréquation entre les collectivités ; à ceci près que la mise en place de ces dispositifs de péréquation revient à la loi ordinaire et non à la loi organique chargée, aux termes du troisième alinéa du même article 72-2, de fixer les conditions dans lesquelles la règle de l'autonomie financière est mise en œuvre. Ce n'est donc pas pour mésestimer l'importance de la péréquation, dont nous convenons tous, mais tout simplement par respect de la stricte lettre de la commande constitutionnelle que la commission des lois a émis un avis défavorable à l'amendement n° 10.

M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 10, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Monsieur Bonrepaux, je vais à mon tour émettre un avis défavorable à votre amendement...

M. Augustin Bonrepaux. Dommage !

M. le ministre délégué à l'intérieur. ...très exactement pour la même raison, déjà évoquée à maintes reprises et que M. le rapporteur vient de rappeler : il n'appartient pas à la loi organique d'évoquer la question de la péréquation. Le rendez-vous est fixé pour cet automne.

Cela dit, puisque vous-même l'avez souhaité, je vais poursuivre le petit feuilleton de vos 104 %. Je vous ai fait remarquer ce matin que vous aviez bénéficié de 104 % de couverture de vos dépenses liées au RMI.

M. Augustin Bonrepaux. Pas de 104 % des dépenses !

M. le président. Monsieur Bonrepaux, laissez M. le ministre vous répondre.

M. Augustin Bonrepaux. Je lui répondrai moi aussi.

M. le ministre délégué à l'intérieur. Allons, monsieur Bonrepaux ! J'essaie de vous dire les choses gentiment...

Ces 104 % de couverture ne sont pas calculés en fonction de ce que l'État vous doit, mais par rapport à ce que vous avez payé ; à ce titre, vous avez été plus que couverts. Par conséquent, lorsque l'on s'appelle M. Bonrepaux et que l'on est attentif au sort du département de l'Ariège, on ne devrait avoir que deux mots à la bouche en voyant un ministre en face de soi : merci et bravo ! Merci pour avoir fait mieux que 100 % ; bravo pour avoir tenu les engagements pris, ce qui est de formidable augure pour l'avenir de la décentralisation telle que nous la mettons en œuvre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Michel Bouvard. Bravo et merci !

M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse.

M. Pascal Terrasse. Pour brillante qu'elle soit, monsieur le ministre, votre réponse à M. Bonrepaux n'est pas transposable dans tous les départements. Ainsi, dans l'Ardèche, nous nous retrouvons chaque mois à perdre très précisément 150 000 euros. Vous le savez si bien que vous nous avez promis une clause de « revoyure » et assuré que les pendules seraient remises à l'heure en fin d'année : je l'espère en tout cas...

M. le ministre délégué à l'intérieur. C'est prévu dans la loi.

M. Pascal Terrasse. Il n'en demeure pas moins que nous sommes confrontés pour l'instant à un sérieux manque de trésorerie.

Mais revenons à l'amendement n° 10. Bien sûr, la Constitution dit certaines choses, mais cela ne doit pas pour autant empêcher la loi organique de prévoir un dispositif de péréquation. Il n'y a pas lieu d'en renvoyer les modalités aux lois de finances successives. Les départements français connaissent des situations très diverses et des niveaux de richesse fiscale très disparates ; certaines régions sont confrontées à une pression sociale plus forte qu'ailleurs et la faiblesse de l'économie comme des capacités contributives de leurs habitants pèse lourdement sur nombre de collectivités territoriales. Ce qui explique que l'idée, juste et équitable, de péréquation doit forcément être inscrite dans la loi organique. Aussi le groupe socialiste soutient-il activement cet amendement.

Au demeurant, celui-ci ne fait que reprendre pratiquement à la lettre les revendications avancées par la plupart des grandes associations de collectivités territoriales - association des départements de France, avant changement comme après changement, association des maires de France, association des maires ruraux - qui n'ont jamais manqué de rappeler, à chacun de leurs congrès tant départementaux que nationaux, leur volonté de voir s'instaurer une réelle péréquation, tout à la fois plus juste et plus adaptée aux situations particulières.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Il s'agit là d'un sujet important, dont les conséquences peuvent être dramatiques pour les collectivités ; je ne suis du reste pas certain, monsieur le ministre, que vous les ayez toutes bien mesurées.

Nous sommes, vous l'avez dit, dans le cadre de la loi organique. Mais rien ne nous interdit d'y poser le principe selon lequel la péréquation est constitutive de l'autonomie financière. Le détail des modalités de la péréquation, qui relève de la loi ordinaire, n'y a certes pas sa place, mais la loi organique, j'y insiste, peut parfaitement en affirmer le principe.

Pourquoi est-ce indispensable ? Parce que la loi organique sera soumise à la vigilance du Conseil constitutionnel. Dès lors, si un gouvernement, en l'état actuel du texte, s'avisait de faire de la péréquation horizontale entre collectivités, le Conseil ne manquerait pas de relever l'atteinte ainsi portée à l'autonomie financière des collectivités locales et d'annuler les dispositions en question.

M. Michel Piron. Et la péréquation verticale ?

M. René Dosière. J'évoquerai aussi sur la péréquation verticale, qui a votre faveur ; mais d'autres lui préfèrent la péréquation horizontale.

Cette question, monsieur le ministre, vous a déjà été posée au Sénat. Vous avez répondu qu'il ne fallait pas inscrire ce principe dans la loi organique au motif que la péréquation restait l'affaire de l'État et se ferait avec les dotations de l'État. Vous avez raison : c'est ce que l'on appelle la péréquation verticale, qui ne posera à cet égard aucun problème d'interprétation. Mais c'est toute la péréquation horizontale que vous empêchez en refusant d'y inscrire le principe selon lequel la péréquation est un élément constitutif de l'autonomie financière. Or la péréquation horizontale, que nous avons créée, complète utilement la péréquation verticale : on sait que l'État n'a pas les moyens de tout faire tout seul, et l'on sait également qu'à trop compter sur les recettes fiscales des collectivités, on aggrave ipso facto les inégalités territoriales par le fait que la richesse fiscale n'est jamais équitablement répartie. Autrement dit, parler dans la loi organique de l'autonomie financière des collectivités impose de parler en même temps de péréquation, implicitement horizontale. Faute de quoi, tout gouvernement - si c'est le vôtre, vous en subirez les conséquences - qui s'attachera à renforcer par ce biais les mouvements de péréquation se heurtera inévitablement au refus du Conseil constitutionnel.

Nous ne parlons pas des modalités, mais seulement du principe, qu'il faut impérativement afficher. L'amendement n° 10 est loin d'être neutre à cet égard et son rejet marquerait un recul dans le domaine de la péréquation.

M. le président. Monsieur Bonrepaux, vos collègues ont su traduire votre position. Votre amendement a déjà donné lieu à trois interventions du groupe socialiste.

M. Augustin Bonrepaux. Mais j'avais demandé à répondre au ministre !

M. le président. Soit, mais pour une très courte intervention. Faute de quoi, je n'hésiterai pas à vous interrompre.

M. Augustin Bonrepaux. Rassurez-vous, monsieur le président, ce sera très court. Lorsque le ministre nous fait une réponse convenable, je n'hésite pas à le remercier. C'est ce que j'ai fait tout à l'heure lorsqu'il nous a expliqué comment seraient calculés les prélèvements au titre de la DSU. Au moins avons-nous été informés.

Malheureusement, monsieur le ministre, je ne peux vous remercier pour votre réponse sur le RMI, tout simplement parce que vos calculs sont faux. J'ai fait le point la semaine dernière avec la caisse d'allocations familiales : elle me réclame 150 000 euros supplémentaires. Vous nous payez le RMI, certes, mais avec un mois de retard : c'est seulement fin janvier que nous touchons les sommes correspondant aux versements de décembre.

M. le président. Monsieur Bonrepaux...

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, si on ne peut plus parler dans cette assemblée et si c'est le Gouvernement qui a toujours le dernier mot, on ne peut pas tenir de débat démocratique !

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été précédemment annoncé.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 10 de M. Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président...

M. le président. Non, monsieur Bonrepaux !

Mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 83

                    Nombre de suffrages exprimés 83

                    Majorité absolue 42

        Pour l'adoption 23

        Contre 60

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

M. Augustin Bonrepaux. Rappel au règlement !

M. le président. Je vous écoute.

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, notre groupe a besoin de se réunir pour savoir dans quelles conditions il va pouvoir continuer à s'exprimer. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je demande donc une suspension de séance d'une demi-heure.

M. le président. Je vous accorde cinq minutes.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures vingt.)

M. le président. La séance est reprise.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour un rappel au règlement.

M. Augustin Bonrepaux. Mon intervention se fonde sur l'article 58 du règlement et a trait à l'organisation de nos travaux.

Est-il vraiment nécessaire , monsieur le président, que nous poursuivions nos débats ? Selon une dépêche d'agence, M. Accoyer, président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, se déclare en effet, dans une interview au Monde, favorable à l'adoption du projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales, tel que l'a voté le Sénat. Alors que l'examen en seconde lecture de ce texte doit commencer demain, voire ce soir, M. Accoyer affirme qu'il peut être adopté en l'état.

Mais à quoi servons-nous, monsieur le président ? À quoi sert l'Assemblée nationale, dans l'esprit de la majorité UMP ? N'est-il pas nécessaire de réunir la conférence des présidents pour décider s'il y a lieu de continuer à siéger, dans la mesure où M. Accoyer affirme sans ambages qu'il ne sert à rien de débattre ?

M. le président. Était-ce un rappel au règlement ou un rappel à l'AFP ? Je réponds en tout cas que nous poursuivons la discussion.

Article 2

M. le président. Nous abordons l'article 2.

La parole est à M. Nicolas Perruchot, premier orateur inscrit sur l'article.

M. Nicolas Perruchot. L'article 2 a pour objet d'énumérer les catégories de ressources composant les ressources propres des collectivités territoriales. De nombreux débats ont déjà eu lieu sur ce point. Il en ressort que plusieurs problèmes se posent et nous devons tenter de trouver une solution, qui permettra, je l'espère en tout cas, d'aboutir à une réelle autonomie financière des collectivités territoriales.

Parmi ces problèmes, il y a d'abord ceux de la maîtrise du taux et de l'assiette, et de la localisation de l'impôt. Mon collègue Charles de Courson y reviendra ultérieurement.

Il y a ensuite celui de la légitimité des élus, qui doivent maîtriser les recettes. Qui décide ? Si les ressources propres sont celles qui sont décidées par les collectivités et par elles seules, le projet devra être modifié.

Puis se pose le problème de la confiance envers les élus qui gèrent les collectivités, et à qui on veut enlever une part de leurs responsabilités dans la détermination des ressources propres. Qui détiendra le pouvoir de fixer le taux ou l'assiette ?

Vient enfin un problème constitutionnel, puisque le second projet de loi ne pourra être adopté qu'après la promulgation de la loi organique sur l'autonomie financière. L'avis du Conseil constitutionnel sera donc à cet égard déterminant.

Je suis persuadé que le ministre nous prêtera une oreille attentive et j'espère qu'il se ralliera à nos arguments, lui qui, il n'y a pas si longtemps, était le maire d'une ville importante. Je sais tout ce qu'il a fait pour Meaux.

M. le ministre délégué à l'intérieur. Et je reste très attentif à son devenir.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. L'article 2 est au cœur du dispositif, puisqu'il définit ce que sont les ressources propres. Je parlerai même plutôt de ressources fiscales, car elles représentent 82 % des ressources propres pour les communes et 95 % pour les régions. Par conséquent, parler des ressources propres des collectivités, c'est essentiellement parler des ressources fiscales.

Le projet de loi définit les recettes fiscales propres comme des impositions de toutes natures, autrement dit des impôts partagés. Ce débat a largement eu lieu, et vous approuvez cette définition des deux mains, monsieur le rapporteur, de la tête et des pieds, sans la moindre réserve...

M. le ministre délégué à l'intérieur. Il l'approuve comme moi : avec enthousiasme !

M. René Dosière. La lecture des rapports du Sénat conduit à penser, monsieur Geoffroy, que vous êtes bien le seul à partager votre point de vue !

M. Jean-Pierre Balligand. En effet !

M. René Dosière. Le rapporteur de la commission des lois, M. Hoeffel, tout comme M. Mercier, rapporteur de la commission des finances, sont en désaccord avec vous. M. Hoeffel, ancien ministre chargé des collectivités locales et actuel président de l'Association des maires de France a une expérience, une autorité incontestées en la matière. En dépit de toutes vos qualités, monsieur le rapporteur, avouez que, de ce point de vue, M. Hoeffel a quelque avantage sur vous !

En première lecture, j'ai cité un certain nombre d'experts universitaires sur la définition des recettes fiscales. J'ai demandé à M. le ministre de me fournir le nom de spécialistes qui soient de son opinion, et il ne m'en a donné aucun, pour la bonne raison qu'il aurait eu bien du mal à en trouver.

Autrement dit, puisque vous êtes les seuls à maintenir votre point de vue, vous mettez en application cette phrase fameuse : « Nous avons juridiquement raison parce que nous sommes politiquement majoritaires » !

M. Charles de Courson. Quelle phrase affreuse !

M. René Dosière. M. Hoeffel et M. Mercier l'ont finalement reprise à leur compte, ce que je regrette, puisqu'ils se sont finalement résignés à voter un texte qui n'avait manifestement pas leur faveur, par solidarité majoritaire. M. Hoeffel n'en est d'ailleurs guère récompensé, car j'ai cru comprendre qu'il éprouve bien des difficultés au sein de son parti pour obtenir l'investiture aux prochaines élections sénatoriales. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. Ne mélangez pas tout !

M. René Dosière. Cela étant, vous êtes majoritaires, vous pouvez donc décider ce que vous voulez. Mais cela ne change pas ma position concernant les ressources propres.

S'agissant de l'effort financier de l'État en direction des collectivités locales, quand je vois à quel point l'action des gouvernements précédents est caricaturée, le mot n'est pas trop fort, je suis bien obligé de faire une mise au point à laquelle je vous demande d'être attentifs.

M. le ministre délégué à l'intérieur. Je ne peux l'être davantage !

M. René Dosière. J'ai recherché le montant global de l'effort financier de l'État en faveur des collectivités, toutes dotations confondues, à l'exception des compensations fiscales et des dégrèvements fiscaux. Par conséquent, toute la partie substitutive qui a connu le développement que vous savez avec le remplacement d'impôts locaux par des dotations n'est pas prise en compte.

Permettez-moi de vous livrer ces quelques chiffres. Vos services et la direction générale des collectivités locales, dont on connaît la compétence, pourront les corriger, le cas échéant, mais je les crois exacts.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Dosière.

M. René Dosière. Entre 1989 et 1993, les dotations de l'État aux collectivités sont passées de 137,949 milliards à 164,680 milliards de francs ; elles ont augmenté de 26,731 milliards de francs, soit 19,3 %. Entre 1993 et 1997, ces dotations ont augmenté de 9,379 milliards de francs, soit 5,7 %. De 1997 à 2002, elles ont progressé de 26,344 milliards de francs, soit 15,1 %.

La conclusion est claire : quand la gauche était au pouvoir, les dotations aux collectivités locales ont augmenté respectivement de 19 % et 15 % ; quand la droite est au pouvoir, elles n'augmentent que de 5,7 %.

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. C'est malhonnête !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Et fallacieux !

M. René Dosière. Pas du tout !

M. Jean-Pierre Dufau. La vérité n'est pas malhonnête !

M. Jean-Pierre Balligand. Elle est seulement révolutionnaire !

M. René Dosière. Ces montants, établis à législation constante, sont parfaitement justes.

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. Bien sûr que non !

M. René Dosière. J'en ai même ôté les droits de mutation au profit des départements, qui ont été intégrés dans la DGD.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.

M. Jean-Pierre Balligand. L'article 2 est au cœur d'un sujet difficile. Ce que l'on entend par « ressources propres » des collectivités est bien entendu déterminant pour leur autonomie financière. C'est pourquoi, par notre amendement n° 13, nous nous efforçons d'en donner une meilleure définition.

J'espère qu'un grand nombre de nos collègues ont lu les deux rapports du Sénat, signés par des membres de la majorité, et que vous vous souvenez du débat qui a eu lieu au Sénat et, en première lecture, à l'Assemblée.

M. Michel Piron. Bien entendu !

M. Jean-Pierre Balligand. À défaut d'écouter l'opposition...

M. Michel Piron. Nous l'écoutons !

M. Jean-Pierre Balligand. ...vous feriez bien, mes chers collègues, d'écouter l'UDF, petite composante de la majorité.

M. Charles de Courson. Le tiers, tout de même !

M. Jean-Pierre Balligand. M. Mercier l'a fait au Sénat, comme rapporteur de la commission des finances.

M. le ministre délégué à l'intérieur. Vous êtes un excellent avocat du Sénat !

M. Jean-Pierre Balligand. Monsieur le ministre, je ne suis pas réputé pour être sectaire, surtout en matière de collectivités locales...

M. le ministre délégué à l'intérieur. C'est une attitude que nous partageons.

M. Jean-Pierre Balligand. ...et je crois qu'en l'espèce, nous serions tous bien inspirés de nous écouter les uns les autres. Je n'ai pas besoin, en effet, de rappeler comment ce compromis a été obtenu. Pour connaître des spécialistes des finances, en particulier Jacques Blanc, administrateur au Sénat, qui a joué un rôle non négligeable dans ce dossier, je considère que ce dispositif risque d'avoir un effet boomerang d'ici à deux ans.

M. le ministre délégué à l'intérieur. Qui vivra verra !

M. Jean-Pierre Balligand. C'est la raison pour laquelle vous devriez prêter attention à nos amendements. Pour nous, une ressource propre des collectivités ne peut être qu'une recette sur le produit de laquelle elles ont quelque marge de manœuvre quant à la détermination de son montant, c'est-à-dire dont elles peuvent moduler le taux et/ou l'assiette. Ce débat majeur, en apparence technique, a de lourdes implications politiques pour les collectivités locales.

L'article 2 mérite qu'on y consacre un peu de temps, mes chers collègues, car il vous sera difficile de soutenir, dans les associations d'élus locaux, des positions inverses de celles que vous aurez prises ici. Je ne pense pas seulement à l'Association des régions de France ou à l'Association des départements de France, mais aussi à l'Association des maires de France et à l'Association des communautés de France, structures de coopération intercommunale dont bon nombre sont présidées par vos amis.

La question est de savoir si nous pouvons vraiment discuter ou si vous êtes pieds et poings liés, parce que le Gouvernement a pris sa décision. Rassurez-vous, ce n'est pas parce que nous aurons défini plus correctement les ressources propres des collectivités que le Gouvernement va tomber !

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le ministre, la décentralisation a déjà fait une victime. Nous apprenons par Le Monde de cet après-midi que la ville d'Avignon ne peut plus payer le conservateur d'un musée : « La ville ne peut assumer la charge d'un salaire de conservateur général du patrimoine. (...) C'est trop cher pour les indices d'une ville de 87 000 habitants. » Voilà le résultat de transferts de compétences insuffisamment compensés. De tels cas vont se multiplier dans de nombreuses villes et de nombreux départements, puisque l'évaluation des charges transférées se fait toujours a minima.

Pour ce qui est du RMI, je vous ai repris ce matin, monsieur le ministre.

M. le ministre délégué à l'intérieur. Non, c'est moi qui vous ai repris !

M. Augustin Bonrepaux. Vous avez prétendu que son transfert était couvert à 104 % dans mon département. Ce n'est pas vrai car il manque d'ores et déjà 150 000 euros. Puisque c'est ainsi, je ne verserai à la CAF que ce que vous nous attribuerez et je lui demanderai de s'adresser à vous pour le paiement des intérêts de retard.

Il en ira de même avec le transfert des TOS. Comment les établissements pourront-ils fonctionner à compter du 1er janvier prochain avec 60 % d'effectifs en moins, puisque aujourd'hui 60 % des emplois TOS sont occupés par des personnels qui ne seront pas transférés ? Belle pagaille en perspective ! Vous voulez que les associations de parents d'élèves et les syndicats se retournent contre les collectivités locales, mais nous saurons vous les renvoyer.

Le jeu est donc faussé, même vis-à-vis de vos amis. En votant la réforme constitutionnelle, nul dans cet hémicycle ne pouvait envisager que puisse être considérée comme ressource propre d'une collectivité une recette qui ne lui appartient pas et qu'elle ne peut pas faire évoluer. Or, pour les TOS, la charge salariale augmentera chaque année d'environ 3,5 %. Vous y êtes d'ailleurs pour quelque chose, puisque vous avez relevé la taxe Raffarin de 0,3 % et la contribution à la CNRACL de 0,5 %.

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Et le SMIC !

M. Augustin Bonrepaux. Non ! Vous n'avez pas augmenté le salaire des fonctionnaires. Vous êtes donc déjà responsables d'une augmentation de la charge salariale de 0,8 % et elle se poursuivra au rythme que j'ai dit. Mais rien ne garantit que la compensation sera augmentée dans les mêmes proportions. Il en résultera donc une charge supplémentaire pour les contribuables locaux.

L'article 2 est au cœur de la décentralisation. Or votre définition des ressources propres est bien loin de celles que souhaitaient les associations d'élus et le Sénat. Certes, celui-ci a adopté un amendement tendant à retenir les impositions dont la loi autorise les collectivités territoriales à fixer l'assiette, le taux ou le tarif, lequel a été complété par le sous-amendement de M. Fréville, précisant : « ou dont elle détermine, par collectivité, la localisation de l'assiette ou du taux ». Mais j'aimerais que l'on nous en explique le sens exact.

M. le ministre délégué à l'intérieur. C'est très clair !

M. Augustin Bonrepaux. Ah bon ? On voit mal ce que cela apporte en termes de responsabilités locales et d'autonomie. Que la loi fixe le taux ou détermine l'assiette locale d'une ressource ne donnera pas de moyens supplémentaires aux collectivités locales.

Monsieur le ministre, avec cet article, vous dévoilez toute la duplicité de votre projet de décentralisation...

M. Michel Piron. Oh !

M. le ministre délégué à l'intérieur. Quel mot affreux !

M. Augustin Bonrepaux. ...préparé par une réforme constitutionnelle que vous avez fait voter à vos amis en leur promettant des garanties sur l'autonomie financière. Ils vous ont cru, mais vous invoquez maintenant la Constitution pour interdire toute évolution du concept de ressources propres. Même vos amis sont piégés, car ils ne pourront pas expliquer pourquoi les moyens des collectivités locales seront réduits.

C'est grave car, lorsque les élus locaux n'ont plus la responsabilité de voter l'impôt, c'est-à-dire lorsqu'est rompu le lien entre l'élu et le contribuable, ils ne sont plus respectables et il ne faut pas s'étonner que la citoyenneté dépérisse et que l'abstention progresse. Il s'agit d'une faute lourde, à l'encontre de la démocratie elle-même.

M. René Dosière. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Mes chers collègues, comme plusieurs intervenants l'ont déjà souligné, nous voici au cœur du problème.

Tout le monde sait que le Gouvernement va vouloir faire adopter l'amendement Geoffroy qui a été voté en commission. Si chacun peut s'accorder sur la première partie de l'article 2, qui dispose que les impôts dont l'assiette et/ou le taux sont modulables par les organes délibérants des collectivités territoriales et leurs groupements sont des ressources propres, en revanche, les points de vue divergent sur l'amendement Geoffroy, qui n'est qu'un avatar du sous-amendement Fréville, en pire.

M. Jean-Pierre Balligand. Geoffroy, c'est Fréville en pire !

M. Charles de Courson. Selon le rapport, cet amendement ajoute aux recettes modulables par les collectivités elles-mêmes, celles dont la loi détermine soit « la part locale d'assiette », soit le taux lorsque l'assiette est localisée.

Ainsi, pour notre collègue, une part d'assiette d'impôt national, sans assiette localisable, est une ressource propre pouvant figurer au numérateur du ratio d'autonomie financière.

M. René Dosière. Il fallait le faire !

M. Charles de Courson. Et il l'a fait. C'est proprement fou !

J'ai dit et répété au rapporteur, au rapporteur général et au ministre qu'ils allaient tout droit dans le mur, en klaxonnant ! Pourquoi ? Parce que si l'amendement Geoffroy est adopté en l'état, il suffira de supprimer tous les impôts locaux existants et de les remplacer par une part d'un impôt national - par exemple la TVA - dont on décidera de verser tant de millièmes à la Bretagne ou encore à la Corse, puisque, pour M. Geoffroy, si l'on procède ainsi, et il l'a confirmé en commission, c'est bien d'une ressource fiscale qu'il s'agira. En effet, et il n'aime pas que je le lui rappelle, le troisième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution ne parle pas d'impositions de toutes natures mais de recettes fiscales...

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Et autres ressources propres des collectivités territoriales !

M. Charles de Courson. On y reviendra.

Autrement dit, le rapporteur considère que l'on peut vider de tout contenu la notion d'autonomie financière des collectivités territoriales. C'est ce que nous ferons si nous adoptons le « sinistre » amendement, au sens romain du terme, de M. Geoffroy. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Guy Geoffroy, rapporteur. En latin, sinister signifie la gauche !

M. Éric Raoult. Et en italien la gauche se dit sinistra !

M. Charles de Courson. Pour les Romains, la gauche était synonyme de malheur !

L'amendement Geoffroy, dans sa première partie, est donc bien pire que le sous-amendement Fréville et il serait inconcevable que le Conseil constitutionnel ne l'annule pas.

La deuxième partie porte sur les taux. Là, on peut discuter. Je pense que le rapporteur a tort ; il pense qu'il a raison. Le Conseil constitutionnel tranchera.

M. Geoffroy nous explique, à la page 15 de son rapport, dans une terminologie qui lui est propre : « En revanche, lorsque l'assiette locale sera "visualisable" - vous apprécierez le caractère juridique de ce terme - comme c'est par exemple le cas en matière de droits de mutation, le taux [sera] fixé par l'État. » Il s'agit, nous dit-il plus loin, des droits de mutation à titre gratuit, dont l'assiette est bien localisée - et pas localisable - et dont le Parlement, hélas ! a bloqué le taux. Les collectivités territoriales ne peuvent moduler le taux ni l'assiette. Elles touchent le produit d'un droit dont l'assiette est bien locale.

Dans ces conditions, peut-on parler d'autonomie financière ? Je pense que non. Pour que les droits de mutation à titre onéreux deviennent des ressources propres au sens du troisième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution, il suffirait de dire que les collectivités locales peuvent baisser le taux. C'était d'ailleurs la thèse de la commission des finances et de la commission des lois du Sénat avant que n'interviennent des tractations au sein de l'UMP sur le sous-amendement Fréville. Mais, je le répète, monsieur Geoffroy, on peut discuter de ce second point.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur de Courson.

M. Charles de Courson. La situation étant clairement décrite, je me tourne vers ceux de mes collègues de l'UMP qui ont une bonne connaissance des problèmes de fiscalité locale pour leur rappeler que M. Pélissard et M. Pinte avaient déclaré, lors de la première lecture, que ce qu'on voulait nous faire voter était inacceptable. Ils ne pourront pas dire qu'ils n'étaient pas au courant car, pour la quatrième fois au moins, j'appelle l'attention de ceux qui s'apprêtent à voter l'amendement Geoffroy, puisqu'on leur en a donné l'ordre (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), sur le fait qu'ils scient totalement la branche de l'autonomie financière des collectivités territoriales. Pire, ils risquent de mettre le Gouvernement dans une situation épouvantable car, si le Conseil constitutionnel censure cette disposition, nous ne pourrons pas discuter d'une éventuelle loi organique rectificative avant le mois d'octobre ou de novembre. Et si, allant encore plus loin, il ne se contentait pas d'annuler le sinistre amendement Geoffroy en tout ou partie mais constatait qu'on ne peut pas publier la loi organique puisqu'elle n'est plus applicable, alors on se trouverait dans une situation très difficile.

M. le président. Concluez, monsieur de Courson ! Vous avez droit à cinq minutes, pas dix !

M. Augustin Bonrepaux. Ce que dit M. de Courson est intéressant !

M. Charles de Courson. Mes chers collègues, si vous avez encore un peu de bon sens, un peu de respect pour la Constitution que nous avons révisée, justement, pour constitutionnaliser l'autonomie financière, surtout ne votez pas l'amendement Geoffroy ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Monsieur le président, mon intervention aura une tonalité fort différente de la précédente.

M. René Dosière. Mais complémentaire !

M. André Chassaigne. J'ai le sentiment que le Gouvernement est en train de gagner la partie en agitant la muleta. Beaucoup foncent, tête baissée, sur le chiffon rouge en oubliant l'essentiel : que derrière des considérations techniques relatives au calcul des ressources propres, on va établir ce que je dénonçais hier, à savoir un véritable apartheid social. En effet, les ressources propres étant basées essentiellement sur l'impôt, certaines communes auront suffisamment de revenus pour pouvoir assumer leur autonomie de gestion, tandis que d'autres, et c'est la grande majorité, sous l'artifice d'une soi-disant autonomie financière, pour reprendre les propos du sénateur Mercier, n'auront aucune marge de manœuvre.

M. Émile Zuccarelli. Très bien !

M. André Chassaigne. Autrement dit, on aura une France à multiples vitesses. Si l'on s'enferme dans un simple débat technique, je suis persuadé qu'on oublie l'essentiel.

On me répondra qu'il y a une solution : si la péréquation horizontale n'est plus licite, il reste la dotation de péréquation. Mais, comme elle est intégrée à la DGF, toute augmentation de cette dotation aura pour conséquence mécanique de faire baisser le taux de ressources propres, du moins dans la définition que vous donnez de ces dernières, si bien qu'elle se trouvera, par là même, interdite. Le résultat final, c'est que vous bloquerez la péréquation.

Quant aux impôts que vous allez transférer - la TIPP, la taxe sur les pylônes - ils seront variables selon que les collectivités territoriales seront riches ou non. Puisque ce sont des ressources fiscales, elles seront plus élevées dans les communes riches. Une fois de plus, vous pénaliserez les collectivités les plus pauvres, et notamment les territoires ruraux, qui ne pourront que mourir.

M. Émile Zuccarelli. Hélas !

M. le président. La parole est à M. Gilles Cocquempot.

M. Gilles Cocquempot. Monsieur le président, comme l'a dit très justement mon ami Jean-Pierre Balligand, plus on s'écoute et mieux on peut se comprendre. Encore faut-il essayer.

Quelle philosophie politique se cache derrière ce débat extrêmement technique ? Peut-être est-ce la forêt qui cache l'arbre et non l'inverse.

On nous dit que les EPCI ne faisant pas partie des catégories figurant dans la Constitution, ils ne concernent pas notre débat d'aujourd'hui. Mais, tout à l'heure, on nous a rappelé que ce sont les EPCI qui lèvent la taxe professionnelle unique, le nerf de la guerre ! Il y a, dans cette dialectique, une philosophie cachée qui est simple : on ne parle pas des EPCI, qui pourtant structurent et structureront encore plus demain notre paysage administratif, il n'est question que des communes. Et on leur dit qu'on va renforcer la péréquation verticale.

Ainsi, mes chers collègues, derrière tous ces discours techniques tendant à prouver que nous défendons la décentralisation alors que certains exemples nous montrent qu'on pourrait même parler d'un démantèlement de l'État, nous sommes en train d'entrer, je ne sais pour quelle raison, dans un système bonapartiste qui mettra les collectivités locales en coupe réglée. Ceux qui, aujourd'hui, du haut de l'État, se prévalent de tous les pouvoirs, pourront décider de la péréquation que telle région devra recevoir.

M. Michel Piron. C'est contradictoire !

M. Gilles Cocquempot. Il nous faut donc engager ensemble un vrai débat philosophique sur la nécessité, pour les collectivités, d'exercer la plénitude des responsabilités qu'elles tiennent du suffrage universel. Je suis indigné, à ce propos, par les déclarations de M. Accoyer, telles que les relate l'AFP. Il explique que le Sénat a modifié à bon escient ce que les députés n'avaient pas su voir, et donc que la discussion est close. Cela veut dire qu'on donne raison, encore une fois, à la seconde chambre, celle qui n'est pas issue du suffrage universel. Voilà pourquoi je confirme que nous entrons dans un système bonapartiste.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau. L'essentiel, à propos de cet article 2, c'est d'essayer de s'entendre, c'est que chacun puisse développer, de bonne foi, ses arguments mais aussi écouter ceux des autres.

L'analyse romaine de Charles de Courson était de mauvais augure - je n'ai pas osé parler d'oiseau de mauvais augure, car cela aurait pu être mal interprété.

M. Michel Bouvard. Nous passons de Bonaparte à César !

M. Jean-Pierre Dufau. Au-delà de ses aspects techniques, l'article 2 aura des conséquences politiques pour les collectivités.

Et elles seront insupportables : au lieu d'arriver à davantage d'égalité entre les communes, on va une fois de plus, en bannissant le principe fondamental de la péréquation, accroître les inégalités entre elles alors qu'elles sont déjà trop fortes.

Au-delà de l'aspect technique, comment faire comprendre à l'administré de base que, finalement, la loi sur l'autonomie financière des collectivités ne permettra pas aux communes d'établir en toute autonomie les bases de leurs ressources ? Le bon sens ne s'y retrouve pas ! Si on vous dit que vous êtes autonome et que d'autres décident à votre place du taux et de l'assiette de vos recettes, avouez que vous serez perplexe. Et si le bon sens ne suffisait pas, j'espère que le Conseil constitutionnel, comme d'autres orateurs en ont émis l'hypothèse, « retoquera » cette disposition de l'article 2, qui est inacceptable.

Pour en revenir à la péréquation, qui constitue, à mon avis, le fin mot de l'histoire, toutes les communes vont recevoir des transferts de compétences, elles verront donc leurs charges augmenter. Mais, selon leur situation en termes de richesses potentielles et de bases d'imposition, elles n'auront pas les mêmes moyens d'y faire face, et sachant qu'elles n'auront pas la possibilité de déterminer librement leur imposition, les inégalités s'aggraveront.

Très paradoxalement, sous couvert de décentralisation, on centralise les décisions ! C'est le monde à l'envers ! Il faudrait réintroduire dans ce texte un peu de bon sens et de simplicité pour que les communes puissent déterminer librement les taux et les assiettes. Sinon, on arrivera à un système ubuesque, comme celui qu'on nous propose.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Mes chers collègues, je n'ai ni l'intention ni la prétention de répondre point par point à chacun d'entre vous. Beaucoup de nos collègues ont d'ailleurs fait des variations sur un thème commun et on retrouve un même corpus d'arguments. Je ferai seulement quelques remarques avant de revenir à ce que notre collègue de Courson nous a asséné comme une vérité absolue.

M. Pierre Albertini. Il faut des certitudes dans la vie !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Hors de son interprétation, il n'y aurait point d'autre jugement, d'autre analyse à formuler.

M. René Dosière. C'est bien votre manière !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Je voudrais d'abord vous dire, et je ne suis certainement pas le seul dans ce cas, combien est grande mon émotion d'avoir entendu, venant des travées de gauche, l'hommage d'un amour tout neuf que certains semblent éprouver pour le Sénat.

M. Augustin Bonrepaux. Mais non ! Il n'a rien fait.

M. Guy Geoffroy, rapporteur. L'approche de certaines échéances n'y est certainement pas pour rien... Pourtant, dans un passé encore récent, certains n'avaient pas de mots trop durs pour condamner le conservatisme du Sénat et son incapacité à formuler des jugements d'une quelconque valeur politique et juridique. Je ne peux donc que m'étonner de ce revirement.

M. André Chassaigne. Ce n'est pas une réponse !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Non, une simple observation.

M. Jean-Pierre Balligand. Quelle agressivité !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Pas du tout.

Deuxième remarque : il faut replacer le débat au niveau qui doit être le sien et le remettre en perspective. Depuis vingt ans, et plus encore dans les cinq années qui ont précédé 2002, l'autonomie financière des collectivités, pour autant qu'on ait pu en apprécier la valeur et le niveau, n'a pas cessé de se dégrader.

Je prendrai un exemple que je connais bien et dont j'ai déjà parlé dans la discussion générale au cours de la première lecture. Cela me permettra au passage de relativiser quelque peu votre affirmation sur l'intercommunalité.

M. André Chassaigne. C'est l'autonomie de gestion qui compte !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Je veux parler de l'intercommunalité des villes nouvelles. Les villes nouvelles ont été créées bien avant que vous ne soyez au pouvoir et elles ont été un des premiers laboratoires de l'intercommunalité. J'y vis depuis plus de trente ans et j'y exerce des fonctions électives depuis plus de quinze ans. Je sais donc de quoi je parle.

Lorsque votre gouvernement a décidé de supprimer progressivement la part salaires de la taxe professionnelle, il a annoncé qu'il y aurait une compensation.

M. Augustin Bonrepaux. Une compensation évolutive !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Résultat, et les chiffres sont incontestables et incontestés, ils sont d'ailleurs fournis par vos amis qui président l'agglomération à laquelle appartient la commune dont je suis l'élu : si vous n'aviez pas pris cette décision, notre agglomération serait parvenue à l'équilibre financier et ne serait pas obligée de quémander, comme elle le fait tous les ans, auprès du Secrétariat général des grandes opérations d'urbanisme, le SGGOU, le moyen d'équilibrer ses finances. Car la compensation a été calculée à partir des entreprises existantes, et sans tenir compte de celles qui ont concouru au développement économique ultérieur.

Cet exemple concret montre que les évidences que vous assénez ne sont pas aussi avérées que vous le prétendez. L'intercommunalité dont vous vous faites les hérauts avait déjà été expérimentée bien avant vous, de façon assez poussée. Et la situation financière des collectivités territoriales que nous avons trouvée s'était aggravée du fait de votre politique récurrente de transformation d'impôts en dotations de l'État. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) M. le ministre a rappelé que vous avez fait basculer en dotations 15 milliards d'euros d'impôts maîtrisés par les collectivités. (Mêmes mouvements.)

M. Augustin Bonrepaux. Vous, vous voulez supprimer la taxe professionnelle !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Et je ne parle pas des parts d'impôts transférées aux collectivités territoriales. Si on ne se rappelle pas la chronologie, tout ce que vous dites contre le projet de loi organique peut paraître crédible, mais ce n'est pas tout à fait le cas.

Monsieur de Courson, votre analyse se fonde sur un état de la question qui n'est pas le dernier en date. En effet, vous n'avez pas mentionné un élément nouveau, et vous ne le pouviez d'ailleurs pas puisque ce que je vais rapporter s'est produit à la commission des lois dont vous ne faites pas partie. L'amendement, dont vous m'attribuez une paternité que j'accepte parce que je n'en ai nullement honte,...

M. Charles de Courson. ...a été rectifié : on a supprimé la référence aux catégories.

M. Guy Geoffroy, rapporteur. ...a été effectivement rectifié. Le but est de donner corps au deuxième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution. Je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites à ce sujet, même si vous êtes libre d'exprimer votre pensée.

M. Charles de Courson. Heureusement !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Et je ne suis pas le seul à faire cette analyse. Les trois premiers alinéas de l'article 72-2, quoi que vous en disiez, sont intimement liés et s'enchaînent les uns aux autres. Ils confirment - malheureusement ou pas, c'est à vous d'en juger - que, parmi les ressources propres des collectivités territoriales,...

M. Charles de Courson. ...il y a les recettes fiscales !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. ...il y a les impositions de toutes natures. Certaines d'entre elles sont traditionnelles, mais elles comprennent également des impositions nationales transférées, pour tout ou partie, aux collectivités, que « la loi peut [...] autoriser à en fixer l'assiette et le taux, dans les limites qu'elle détermine ».

Nous en avons parlé en première lecture. Et rappelez-vous, puisque vous êtes sincère et de bonne foi, que nous n'avons eu de cesse de dire, qu'il s'agisse du rapporteur pour avis, de votre serviteur ou du ministre, que ce point constituait un nœud de difficultés qu'il fallait traiter de la manière la plus ouverte possible, en privilégiant toutes les pistes qui permettraient d'aboutir à un résultat loyal susceptible de rétablir la confiance. Mais convenez que la loi organique ne saurait aller contre la lettre de l'article 72-2 de la Constitution - le risque d'inconstitutionnalité serait alors beaucoup plus grand que celui que vous dénoncez dans la rédaction actuelle -, même si cela rendait les choses beaucoup plus faciles pour tout le monde et si cela permettait de faire un très grand pas en avant.

C'est sur la lancée de nos débats qu'au Sénat, M. Hoeffel et M. Mercier ont proposé une solution. Mais comme vous n'avez pas manqué de lire les débats du Sénat, qui ont été intéressants et riches, vous savez que nombre de sénateurs, le président Fourcade en tête et Yves Fréville également, se sont rendu compte que le chemin proposé par leurs deux rapporteurs était dangereux, s'agissant de la constitutionnalité du texte. D'où le sous-amendement d'Yves Fréville qui reconnaît lui-même qu'il devait être retravaillé.

Et c'est ce que nous avons fait. La commission des lois a pris acte de la volonté conjointe du Gouvernement et du Sénat, que nous partagions, d'aller le plus loin possible, dans le respect de la Constitution, pour garantir ce que nous souhaitons unanimement, à savoir l'autonomie financière des collectivités. En conséquence, nous sommes partis de la rédaction retenue par le Sénat et qui est, de l'avis même de nos collègues sénateurs, imparfaite sur le plan juridique et constitutionnel. Il a donc été proposé de remplacer la formule « dont la loi détermine la localisation du taux ou de l'assiette » par « dont la loi détermine le taux ou une part locale d'assiette ».

Nous nous sommes inspirés des droits de mutation, dont personne sur ces bancs n'a dit qu'ils n'entraient pas dans la catégorie des ressources propres. C'est un impôt perçu par les communes, dont elles ne fixent pas le taux et dont la localisation de l'assiette est clairement établie - les droits de mutation frappent les biens immobiliers situés sur le territoire de la commune. Il s'agit donc d'un bon exemple de ce que pourrait être demain une part substantielle des ressources fiscales propres des collectivités, outre les « quatre vieilles » dont nous avons parlé et dont chacun s'accorde à reconnaître qu'elles sont bien poussiéreuses et qu'elles devraient être revues.

Ce sera très difficile, mais c'est dans cette optique que nous travaillons : si, comme pour la TIPP, nous ne sommes pas autorisés à laisser les départements fixer le taux de la part d'impôt national transféré, il faudra au moins que la loi détermine ce taux pour chaque collectivité, ou alors la part locale de l'assiette. C'est de cela qu'il s'agit. Vous pouvez trouver que c'est insuffisant, et nous aurions aimé aller beaucoup plus loin. Mais en conclure que le travail que nous avons fait, qui s'inscrit dans la suite logique de la démarche engagée ici même puis poursuivie par le Sénat, et qui est en phase avec la Constitution, conduit à dégrader l'autonomie financière des collectivités,...

M. Charles de Courson. C'est vrai !

M. Guy Geoffroy, rapporteur.... ce serait erroné et injuste, car cela irait bien au-delà de la vérité.

Tels sont les points que je tenais à aborder. Je souhaite ne pas avoir à reprendre mon argumentation lors de l'examen de chaque amendement à l'article 2 - ils traitent tous de ces questions. L'optique, qui nous réunit tous, est de tourner définitivement le dos à la période où l'État reprenait la main en transformant en dotations les impôts sur lesquels les collectivités avaient prise. Même si certaines de ces dotations avaient une évolution garantie, cette dernière restait liée à la politique de l'État et les collectivités n'avaient pas la garantie de pouvoir maîtriser une partie de leur destin.

Telles sont les informations, les analyses et les rectifications que je souhaitais vous proposer afin que l'examen des amendements auquel nous allons procéder s'opère dans la bonne foi. Celle-ci est partagée sur tous les bancs et elle seule permettra au texte issu de nos travaux d'être conforme à l'intérêt de nos collectivités.

M. le président. Monsieur le ministre, vous souhaitez naturellement intervenir. Acceptez-vous que je donne auparavant la parole à M. de Courson ainsi qu'à un membre du groupe socialiste pour répondre à la commission ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Bien sûr, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Monsieur le rapporteur, j'ai durement attaqué la partie de votre amendement concernant « une part locale d'assiette ». Certes, vous l'avez rectifié. Le texte initialement adopté était en effet totalement inapplicable puisque la disposition s'appliquait par catégorie. Maintenant, c'est par collectivité. Cela signifie que les communes et les intercommunalités sont exclues de ce que vous appelez la « part locale d'assiette ».

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Non !

M. Charles de Courson. Si ! Vous ne pourrez pas inscrire dans un texte de loi 36 000 taux, monsieur le rapporteur ! Faites preuve d'un peu de sagesse ! Sinon le Journal officiel ne pourra plus suffire. Reconnaissez que cette « part locale d'assiette » ne peut s'appliquer ni aux communes ni aux intercommunalités. Telle est ma première observation et je vous mets au défi de me prouver le contraire.

Deuxième remarque : si le dispositif s'adresse uniquement aux départements et aux régions, quel est son objectif ? Je prendrai l'exemple des régions. Il n'est pas difficile d'inscrire vingt-six taux dans un texte de loi. Ce ne sont d'ailleurs pas des taux, mais des parts de l'impôt national, dont vous aurez déterminé un pourcentage ou un millième. Il peut s'agir de n'importe quel impôt national - la TVA ou l'IS - cela n'a aucune importance, exception faite de l'évolution annuelle, puisque vous reconnaissez vous-même qu'il n'y a plus besoin d'assiette locale. Votre amendement permet ainsi de supprimer la totalité de la fiscalité locale et de la remplacer par « une part locale d'assiette », pour reprendre votre expression, tout en respectant, selon votre interprétation, le taux d'autonomie financière. Par conséquent, si ce texte est voté par le Parlement et qu'il entre en vigueur, faute d'avoir été annulé par le Conseil constitutionnel, vous aurez totalement vidé l'autonomie financière de sa substance.

Je ne fais aucun procès d'intention au Gouvernement, monsieur le rapporteur. Je rappelle simplement que les gouvernements passent. Plusieurs se succéderont dans les dix ou quinze ans à venir. Eux pourront le faire ! Je vous prie donc de répondre à cette question précise : un gouvernement pourrait-il, en s'appuyant sur votre amendement, supprimer totalement la fiscalité des régions - pour revenir à mon exemple - et la remplacer, à l'euro près au moment du transfert, par un pourcentage de la TVA ou de tout autre impôt national, sans avoir recours à aucune assiette locale ? Est-ce conforme à votre amendement ? Avant que je n'en vienne à la question du taux, pouvez-vous, préalablement au vote, éclairer sur ce point la représentation nationale ?

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Je ne suis pas aux ordres !

M. le président. Monsieur de Courson, ce n'est pas une séance de questions au rapporteur.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le rapporteur, je vous demanderai, en premier lieu, de faire preuve d'objectivité lorsque vous évoquez la réforme précédente supprimant la part salaires de la taxe professionnelle. Vous n'allez pas contester une telle suppression à l'heure où vous souhaitez la totale disparition de la taxe professionnelle.

Vous affirmez avoir été pénalisé parce que votre agglomération aurait dû connaître, sans cela, une progression plus forte de ses recettes. Elle a connu une progression de la part salaires égale - et non pas supérieure - à celle de la DGF, je vous l'accorde. Vous regrettez qu'elle n'ait pas pu augmenter davantage. C'est que votre agglomération est en expansion et il est vrai que les agglomérations qui se développent ont été freinées. Mais, a contrario, les communes en difficulté, qui ont perdu des entreprises et des emplois, ont conservé leur part salaires. Monsieur le rapporteur, cela s'appelle de la péréquation.

M. Pierre Albertini. Due au hasard !

M. Augustin Bonrepaux. Je connais une commune qui vient de perdre une entreprise de 500 emplois : elle est bien contente de conserver sa part salaires. Elle perd la taxe professionnelle, mais elle en conserve cette fraction - j'ignore il est vrai jusqu'à quand, puisqu'elle vient d'être affectée à la DGF. Monsieur le rapporteur, il ne convient pas d'avoir recours à des explications aussi simplistes. Vous êtes à l'Assemblée nationale, vous devez connaître l'ensemble du problème.

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Je le connais parfaitement !

M. Augustin Bonrepaux. Ce qui est inquiétant, c'est que vous prétendez par ailleurs faire de la péréquation ! Vous ne savez pas ce qu'est la péréquation ! Elle consiste à freiner un petit peu ceux qui progressent beaucoup pour donner un petit peu à ceux qui perdent...

M. René Dosière. ...beaucoup !

M. Augustin Bonrepaux. Vous êtes de ceux qui progressent et vous vous plaignez parce que vous avez été pénalisé - un peu seulement, puisque votre dotation a augmenté, chaque année, au rythme de la DGF.

M. le président. Je vous remercie, monsieur Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Je tiens à souligner, en second lieu, que vous venez de faire l'excellente démonstration que les élus de la majorité, et particulièrement de l'UDF, se sont fait gruger lors du vote de la réforme constitutionnelle...(Exclamations sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Dino Cinieri. M. de Courson n'a jamais affirmé une chose pareille !

M. Augustin Bonrepaux. ...puisque, aujourd'hui, le Gouvernement leur explique qu'il ne peut rien faire, car la Constitution s'y oppose. Vous avez été trompés !

M. le président. Monsieur Bonrepaux, veuillez conclure !

M. Augustin Bonrepaux. Trompés, c'est le mot, et vous devriez être contents !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l'intérieur. En assistant à ce remake d'un débat qui s'est déroulé à l'identique lors de la première lecture je me suis demandé si nous ne marchions pas sur la tête.

M. René Dosière. Et les nouvelles dispositions ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Je dirai un mot de la nouvelle disposition, monsieur Dosière, qui est issue des débats sénatoriaux. Mais, en vous écoutant, les uns et les autres, je me suis demandé si, dans ces conditions, cela valait vraiment la peine pour le Gouvernement d'avoir instauré l'autonomie financière, dont l'objectif reste l'établissement de relations saines et transparentes entre l'État et les collectivités locales.

M. Augustin Bonrepaux. Dans ces conditions, non !

M. le ministre délégué à l'intérieur. Vous vous acharnez sur un thermomètre. J'ai écouté avec une grande attention le torrent des critiques qui se sont abattues sur le texte, sans oublier les contradictions, y compris au sein d'un même groupe, qui ont éclaté dans l'enthousiasme le plus complet. Messieurs les députés, vous vous exprimez sur le sujet depuis le début de l'après-midi. J'ai le regret de vous dire que vous êtes en train de vous tromper de débat. L'autonomie financière inscrit dans le marbre des relations qui doivent désormais être placées sous le sceau de la confiance et de la transparence. Le Gouvernement vous propose - c'est un des éléments majeurs du chantier de la décentralisation - de rendre désormais impossible la pratique à laquelle on a assisté ces dernières années, consistant à transformer des recettes fiscales en dotations, puisque le gouvernement précédent se fichait totalement de la nature propre des ressources financières des collectivités locales ! Nous désirons en finir avec de telles pratiques et instaurer un système - qui n'est pas simple, je le reconnais volontiers - définissant, dans la transparence, les ressources propres des collectivités territoriales en vue d'établir une véritable autonomie financière. Si vous n'étiez pas dans l'opposition, vous seriez les premiers à reconnaître qu'il était grand temps d'en finir avec toutes ces ambiguïtés !

M. Dino Cinieri. Bien sûr !

M. le ministre délégué à l'intérieur. L'exercice consiste à lever les ambiguïtés. Vient ensuite le temps du choix et de la décision. Il convient, à un moment donné, d'assumer une politique. Le Gouvernement propose un dispositif qui n'est ni pur ni parfait,- rien ne l'est jamais - mais qui permet d'apporter une réponse concrète.

Or, j'entends sur les bancs, notamment de la gauche, mais pas seulement...

Mme Anne-Marie Comparini et M. Charles de Courson. Eh oui !

M. le ministre délégué à l'intérieur. ...des discours qui, loin de s'en féliciter, décortiquent le texte dans tous les sens ! Certes, il est normal que nous consacrions un peu plus de temps à cet article qu'aux autres, puisque c'est celui qui est le plus important à ce stade de la discussion.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Vous le reconnaissez !

M. le ministre délégué à l'intérieur. Il a, en effet, donné lieu à une modification substantielle d'écriture. Cette modification permet de préciser les choses. C'est la raison pour laquelle je l'ai, pour ma part, approuvée lorsqu'elle a été proposée au Sénat.

Monsieur Chassaigne, je dois vous l'avouer, c'est en vous écoutant que je me suis demandé pour la première fois si c'était une bonne idée que d'avoir voulu l'autonomie financière !

M. Émile Zuccarelli. Une fort mauvaise idée, en vérité ! Nous l'avons dit dès le début.

M. le ministre délégué à l'intérieur. Ce n'est pas une mauvaise idée, monsieur Zuccarelli, et vous le savez très bien.

Comme un grand nombre d'élus parlementaires et locaux, monsieur Chassaigne,vous êtes très attentif à l'autonomie des collectivités locales,...

M. André Chassaigne. À leur autonomie de gestion !

M. le ministre délégué à l'intérieur. ...à leur autonomie de gestion, évidemment, et à leur libre administration.

M. André Chassaigne. L'autonomie financière, cela ne signifie rien !

M. Émile Zuccarelli. C'est même une très mauvaise idée.

M. le ministre délégué à l'intérieur. Vous en êtes aujourd'hui à formuler des regrets sur ce point ! Voilà qui est tout à fait regrettable.

Monsieur Cocquempot, vous avez parlé de bonapartisme. J'ignore vraiment pourquoi. Je n'ai pas le souvenir que Napoléon Bonaparte ait été si attentif en son temps à développer la libre administration des collectivités locales ou leur autonomie financière.

M. Jean Le Garrec. C'est une question de style.

M. le ministre délégué à l'intérieur. Il m'a semblé vraiment que, sur ce point, vous vous êtes laissé entraîner par votre enthousiasme. C'était sans doute une façon d'apporter une pierre à notre réflexion. Nous avons, depuis le début de la décentralisation, fait la part des choses entre l'œuvre de Napoléon Bonaparte il y a deux cents ans et ce que nous pouvons faire aujourd'hui.

M. Dino Cinieri. Très bien !

M. le ministre délégué à l'intérieur. Je ferai la même remarque en ce qui concerne les propos tenus par M. Dufau. Non, nous n'œuvrons pas dans le pur et le parfait ! Nous nous efforçons de faire preuve de pragmatisme en tenant compte de la réalité du terrain.

Monsieur Balligand, le débat au Sénat - je peux en témoigner puisque j'étais aux premières loges - a été absolument passionnant et d'une densité comparable à celui qui a eu lieu en première lecture à l'Assemblée. Les thèses, qui se sont opposées, ont donné lieu à de longs échanges, notamment lorsque M. Gélard et M. Marini ont répondu à la proposition de M. Hoeffel. C'est ce débat qui a conduit au dispositif qui revient aujourd'hui devant l'Assemblée nationale : l'amendement de M. Hoeffel sous-amendé par M. Fréville. Cet amendement ainsi complété a, me semble-t-il, de très nombreuses vertus. Les débats sénatoriaux sont venus très utilement compléter ceux qui se sont déroulés ici.

Il est d'autant plus important de le reconnaître que M. Perruchot a évoqué le niveau d'autonomie. À l'époque précédente, le Conseil constitutionnel n'aurait eu aucune raison particulière de mesurer le niveau d'autonomie financière, puisque rien alors ne permettait d'en obtenir la mesure précise.

Monsieur Dosière, non sans une certaine dureté à l'égard de M. le rapporteur, qui fournit un travail considérable,...

M. René Dosière. Je n'ai jamais prétendu le contraire.

M. le ministre délégué à l'intérieur. ...vous avez affirmé qu'il était le seul à avoir la même lecture que le Gouvernement.

M. René Dosière. C'est vrai !

M. le ministre délégué à l'intérieur. Non ! J'ai le sentiment qu'une majorité très importante de députés rejoint la lecture de M. le rapporteur.

M. René Dosière. Cette majorité-là garde le silence !

M. Jean-Marie Geveaux. Non ! Nous sommes d'accord !

M. le ministre délégué à l'intérieur. De plus, le Conseil d'État, lorsqu'il a rendu son avis, a fait la même lecture. Inutile de vous dire que l'avis du Conseil d'État, en la matière, est particulièrement précieux au Gouvernement.

Nous reviendrons sur le débat qui vient d'avoir lieu entre M. le rapporteur et M. de Courson à l'occasion de l'examen de l'amendement de la commission. Aussi me contenterai-je de rappeler l'esprit de cet amendement qui vient améliorer la rédaction de l'amendement Hoeffel-Fréville, lequel a pour principale vertu, je le répète, de préciser le contenu de la notion de ressources propres.

L'idée est double : premièrement, la loi autorise la collectivité locale à voter le taux ou l'assiette de l'impôt, comme pour les fameuses « quatre vieilles », par exemple ; deuxièmement, la loi détermine, selon les collectivités, la localisation de l'assiette - exemple : les pylônes électriques - ou la localisation du taux : c'est ce qui nous permet de réaliser le transfert de la TIPP pour les départements.

L'amendement du rapporteur améliore la rédaction dans la mesure où il précise, pour ce deuxième cas de figure, que la loi détermine, par collectivité, soit le taux, soit une part locale d'assiette. Pour ce qui concerne le taux, je précise à M. de Courson que la loi fixera la formule de calcul. Il n'y aura pas 36 000 calculs différents ! Le taux se déduira de la définition donnée par la loi.

Il convient donc de souligner que l'amendement de la commission correspond avant tout à une volonté de précision, afin d'apporter une réponse à l'interrogation légitime sur la localisation de l'impôt par rapport au territoire.

J'ai eu à cœur, mesdames, messieurs les députés, de répondre en détail à chacune de vos interventions sur l'article. Nous devons maintenant en venir à l'essentiel : l'examen des amendements. L'adoption de celui qu'a proposé la commission des lois nous permettra d'apporter une vraie lisibilité sur ce que doit être l'autonomie financière, en cohérence avec les prescriptions qui nous sont désormais données par la Constitution. C'est un élément majeur pour réussir cette nouvelle étape de la décentralisation. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Pierre Balligand. Monsieur le président, je souhaiterais répondre à M. le ministre.

M. le président. Une douzaine d'orateurs sont déjà intervenus et il n'y a pas lieu de répondre au rapporteur ou au ministre sur un article : la discussion se poursuit donc avec l'examen des amendements.

Sur le vote des amendements identiques nos 2 et 11, je suis saisi par le groupe Union pour la démocratie française d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Avant que nous n'en venions à la discussion de ces amendements, je suis saisi d'un amendement n° 13.

La parole est à M. Jean-Pierre Balligand, pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Balligand. Je répondrai tout de même à M. le ministre, monsieur le président, car il y a depuis le début une confusion entre autonomie fiscale et autonomie financière. Nous sommes en plein quiproquo et le débat n'avance pas.

Quelques mots, auparavant, sur cet amendement. Nous considérons que seules les recettes fiscales dont les collectivités locales ont la possibilité de moduler l'assiette et le taux, ou l'assiette ou le taux, peuvent être qualifiées de ressources propres. Bien entendu - et nous rejoignons ici les remarques de M. de Courson -, cette définition exclut le produit issu du transfert ou du partage d'impôts d'État non modulables. De telles recettes seraient en effet assimilables à des dotations d'État, lesquelles sont d'ores et déjà clairement exclues des ressources propres.

Depuis le début, pourquoi êtes-vous si mal, à l'UMP, sur ces questions ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Nous ne sommes pas mal du tout !

M. Jérôme Bignon. Nous nous sentons même très bien !

M. Jean-Pierre Balligand. Allons donc ! Certains collègues ont même préféré quitter l'hémicycle pour ne pas avoir à voter l'amendement de M. Geoffroy !

M. Jean Proriol. Des noms !

M. Jérôme Bignon. Fantasme !

M. Jean-Pierre Balligand. Ayant participé au débat depuis hier, je puis vous assurer que tel est bien le cas ! Et les députés de l'UMP actuellement présents sont ceux qui ne se sont pas exprimés : c'est une façon de régler le problème !

MM. Poncelet, Raffarin et consorts nous ont fait l'article en déposant au Sénat, en juin 2000, une proposition de loi aux termes de laquelle l'autonomie financière équivalait à l'autonomie fiscale. L'argument pouvait se défendre, mais aujourd'hui vous ne pouvez vous en tenir à l'autonomie fiscale et, comme vous ne voulez pas manger votre chapeau, vous procédez par voie d'amendements à l'habillage d'un système de dotations. Ainsi, pour l'amendement Hoeffel-Fréville, on a fait travailler quelques-uns de mes amis experts en fiscalité locale. Mais la contradiction majeure entre autonomie fiscale et autonomie financière demeure.

Certain élus, pourtant, n'en font pas une maladie. Ils considèrent que l'on peut avoir de l'autonomie financière, et partant de l'autonomie de gestion, dès lors que l'on dispose de garanties de ressources. C'est dans cette perspective que plusieurs d'entre nous - il y a dix-huit ans, si ma mémoire est bonne - avions fait traduire, à des fins d'explication, la loi fondamentale allemande. Il s'agit certes d'un État fédéral - qu'en est-il, d'ailleurs, de la nature du régime français après les dernières modifications constitutionnelles ? -, mais aucun gouvernement ne peut revenir sur le système de péréquation, qui est garanti par la loi fondamentale. Nous avions à l'époque effectué ce travail de façon transpolitique afin d'éclairer le débat.

C'est vraiment faire preuve de mauvaise foi que de nous accuser de n'avoir rien fait pendant cinq ans alors que les dotations de l'État n'ont cessé de croître ! L'autonomie fiscale était moindre, certes, mais le niveau des dotations accordées aux collectivités territoriales était assez satisfaisant.

Si vous êtes maintenant en pleine contradiction, c'est que vous aviez alors intenté un procès au gouvernement socialiste en avançant que l'autonomie financière ne comptait pour rien et que seule valait l'autonomie fiscale. C'est pour cette raison que vous essayez de masquer le fait que vous aller procéder à des dotations : comme l'a expliqué pertinemment notre collègue de Courson, le fait de bénéficier d'une part d'un impôt national non modulable ne saurait constituer une ressource propre.

C'est donc à une opération d'habillage que nous assistons, et vous, mes chers collègues de l'UMP, vous mangez votre chapeau. Mais vous devrez vous expliquer devant les élus locaux, non seulement à l'occasion des prochains congrès, mais également dans les trois ans à venir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Défavorable, pour les raisons qui ont déjà été largement évoquées lors de la discussion sur l'article.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Défavorable également. Cette définition des ressources propres vide de son sens la liste qui lui fait suite, et a fortiori le projet de loi organique dans son ensemble. La question a déjà été amplement débattue.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Je me suis sans doute fait mal comprendre tout à l'heure, monsieur le rapporteur. Permettez-moi de vous rappeler que les dotations distribuées aux collectivités locales s'élevaient à 138 milliards de francs en 1989, à 165 milliards en 1993, à 174 milliards en 1997 et à 200 milliards en 2002, soit une progression de 19 % pour la première période, de 6 % pour la deuxième et de 15 % pour la troisième. Ainsi, lorsque la gauche est au pouvoir, l'ensemble des dotations aux collectivités hors fiscalité, hors dégrèvements et hors compensations, augmente de 19 puis de 15 % ; lorsque vos amis sont au pouvoir, cette augmentation est ramenée à 6 %. Vous ne pouvez pas dire que nous n'avons rien fait !

Par ailleurs, j'ai vainement essayé de comprendre votre raisonnement sur la localisation de l'assiette, du taux, etc. En revanche, j'ai bien compris que vous ne parliez pas du fonds de compensation de la TVA, ou seulement pour dire qu'il ne s'agit pas d'une ressource propre. Or, selon la définition des ressources propres que vous venez de nous donner, c'en est une : premièrement, ce fonds n'est pas constitué de subventions mais de prélèvements sur recettes ; deuxièmement, son assiette est pour le moins localisable, puisqu'il ne peut s'agir que du territoire de la collectivité qui en bénéficie ; troisièmement, son assiette est fixée par la collectivité, puisqu'elle dépend de la nature des investissements effectués ; seul le taux, qui est national, n'est pas fixé par la collectivité.

Voilà donc une recette qui correspond fort bien aux critères que vous venez de définir. J'aimerais que vous m'expliquiez pourquoi vous ne la considérez pas comme une ressource propre, alors que vous le faites pour d'autres impôts.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. L'amendement n° 14 pose également la question de la nature des ressources propres.

Si vous êtes opposé à ce que les collectivités locales puissent faire évoluer les taux ou fixer les bases des impôts, monsieur le ministre, c'est tout simplement parce que cette réforme s'est faite dans la précipitation, sans préparation. Son seul objectif est d'alléger les charges de l'État et de réduire les déficits en les transférant vers les collectivités locales. Vous n'avez fait que chercher des artifices pour habiller cette opération.

C'est ainsi que vous avez modifié la Constitution. Quand vous avez parlé d'autonomie, tous les élus de la majorité vous ont suivi, même ceux de l'UDF, qui maintenant commencent à le regretter, s'apercevant qu'ils se sont fait piéger.

Mme Anne-Marie Comparini et M. Charles de Courson. Mais non !

M. Augustin Bonrepaux. Ils se sont rendu compte qu'il n'y avait plus de ressources transférables,...

M. Charles de Courson. Mais si ! Je l'ai l'expliqué !

M. Augustin Bonrepaux. ...de ressources évolutives propres à compenser les transferts. Voilà pourquoi le Gouvernement en est réduit à manipuler la Constitution en expliquant que les ressources propres sont une part d'impôt, même lorsqu'on ne peut faire évoluer cet impôt. De tels artifices ne visent qu'à réaliser ces transferts au détriment des collectivités locales, et ce de votre propre aveu, monsieur le rapporteur, puisque vous avez dit qu'il n'y a plus de ressources transférables. Si tel est bien le cas, il ne fallait pas toucher à la Constitution ! Il ne fallait pas entretenir l'illusion que vous alliez assurer l'autonomie fiscale des collectivités locales ! Nous allons tous subir les conséquences de cette réforme, d'autant que vous laissez en fait au Conseil constitutionnel le soin d'apprécier si la part de ressources propres est déterminante ou ne l'est pas.

Cet amendement est donc parfaitement justifié. Il indique que les ressources propres sont constituées du produit des impositions de toutes natures dont les collectivités votent le taux ou déterminent le tarif, des redevances pour services rendus, des produits du domaine, des participations d'urbanisme, des produits financiers et des dons et legs. Voilà ce que souhaitent les collectivités territoriales. Comme le disait très bien Jean-Pierre Balligand, il vous faudra vous expliquer non seulement devant les élus, mais aussi devant la population, lorsque celle-ci verra flamber les impôts locaux, seul recours des élus face aux charges que vous leur transférez.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Défavorable, pour les mêmes raisons que pour l'amendement précédent.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Même avis.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. M. le rapporteur n'ayant pas répondu à ma question concernant le FCTVA, je la repose : ce fonds n'est pas une subvention, puisqu'il s'agit d'un prélèvement sur recettes ; son assiette est localisable, dans la mesure où les investissements qui ne sont pas réalisés sur un territoire déterminé ne sont pas remboursés ; enfin, l'assiette est définie par la collectivité, puisqu'elle dépend de la nature des investissements. Il est vrai que le taux de remboursement est, lui, défini au plan national, mais pour le reste, le FCTVA remplit tous les critères. S'agit-il d'une ressource propre ?

M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 14, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Veuillez m'excuser, monsieur Dosière, de ne pas avoir répondu à votre question lors de l'examen du précédent amendement.

Comme vous ne l'ignorez pas, le fonds de compensation de la TVA est une recette d'investissement...

M. René Dosière. Qui peut aussi servir au fonctionnement !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Seulement en basculant les recettes d'investissement dans le budget de fonctionnement, ce qui me semble peu orthodoxe, car contraire aux principes élémentaires de bonne gestion des collectivités.

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. C'est de la cavalerie !

M. René Dosière. C'est explicitement prévu en ce qui concerne le FCTVA !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Oui, mais dans le cadre de certains transferts dont il convient, en bon gestionnaire, de limiter les excès - par exemple s'agissant des travaux en régie. C'est seulement à ce titre qu'une part des recettes d'investissement peut basculer dans le budget de fonctionnement.

Il reste que le FCTVA, en tant que recette d'investissement, n'est pas considéré comme une ressource propre, et n'est donc pas concerné par la loi organique.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Vous affirmez que le FCTVA est une recette d'investissement, ...

M. Guy Geoffroy, rapporteur. C'est un fait !

M. René Dosière. ...mais c'est justement la seule qu'une collectivité peut librement transférer, dans certaines conditions, dans le budget de fonctionnement. En outre, comment considérez-vous les cessions d'immobilisations ? Ne sont-elles pas aussi des recettes d'investissement ? Vous les incluez pourtant dans les ressources propres, au contraire du fonds de compensation de la TVA. Il y a quelque chose qui ne va pas !

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais mettre aux voix l'amendement n° 14.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 83

                    Nombre de suffrages exprimés 75

                    Majorité absolue 38

        Pour l'adoption 17

        Contre 58

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 38.

La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Le deuxième alinéa de l'article 2 peut être interprété de multiples façons, comme l'a bien montré notre collègue René Dosière à propos du fonds de compensation de la TVA. Il convient, pour le clarifier, d'exclure systématiquement du champ des ressources propres le produit des impôts nationaux transférés aux collectivités territoriales. C'est le sens de cet amendement.

Certes, en le présentant, j'entre dans une discussion à laquelle je me refusais de participer. Mais je tiens à dénoncer la prise en compte des impôts nationaux transférés parmi les ressources propres. Il s'agit en effet d'une opération d'habillage, destinée à masquer l'essentiel.

L'essentiel, c'est quoi ? Vous allez donner aux collectivités territoriales de nouvelles compétences. Et pour le faire accepter, vous prétendez accompagner ce transfert de compétences d'un transfert de moyens, et en particulier d'un transfert d'impositions nationales telles que la TIPP. Mais - et la démonstration en a été faite - le produit de cette taxe ne suffira pas à compenser les nouvelles dépenses. Depuis dix ans, elle n'a augmenté, en moyenne, que de 1 % par an, et on sait qu'elle va plutôt régresser à l'avenir. En outre, elle est inégalement répartie sur le territoire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 38.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 2 et 11.

Je rappelle que, sur le vote de ces amendements, le groupe UDF a demandé un scrutin public.

La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement n° 2.

M. Charles de Courson. Cet amendement consiste à revenir au texte de la commission des lois du Sénat, tel qu'il se présentait avant l'adoption du sous-amendement Fréville.

M. Fréville a en effet fait ajouter à la définition des ressources propres les impositions « dont la loi détermine, par collectivité, la localisation de l'assiette ou du taux ». Que signifie « localisation du taux » ? D'après le compte rendu des débats, c'est la TIPP qui était visée. Cet impôt n'a en effet pas plus d'assiette départementale que régionale puisqu'il est payé au niveau des raffineries. Le but était donc de réintégrer le versement représentatif de TIPP, effectif depuis cette année pour les départements, et que les lois de décentralisation vont attribuer également aux régions.

L'expression « ou du taux » est incompréhensible. Il vaut mieux parler, comme le fait notre rapporteur, d'une « part locale d'assiette ». J'ajoute que le mot « ou » la rend plus incompréhensible encore : cela veut dire que, même sans assiette locale, il suffirait, pour que l'on considère que l'on a affaire à une ressource propre, que la loi fixe telle proportion pour telle région. Nous ne parlons pas, en effet, d'un principal fictif, mais du versement représentatif d'une partie d'un impôt national. Du point de vue constitutionnel, ce « ou du taux » est donc monstrueux.

Venons-en à la « localisation de l'assiette ». Ce premier membre de la phrase visait les quelques cas dans lesquels l'assiette est localisable mais le taux fixé par la loi, les collectivités s'étant vu supprimer la liberté de le fixer. Il s'agit, par exemple, des droits de mutation à titre onéreux, les DMTO, ou de la taxe sur les pylônes, sur laquelle les collectivités ne disposent d'aucune marge de manœuvre : si le hasard fait qu'une commune a tant de pylônes sur son territoire, elle touche tant. Dans de tels cas, il me semble - même si cela peut se discuter - que la logique doit nous conduire à écarter la recette fiscale de l'ensemble des ressources propres, puisque ni l'assiette, ni le taux ne sont librement fixés par la collectivité.

De l'aveu de son auteur lui-même, le sous-amendement s'intéressait d'abord à la localisation de l'assiette, et avait surtout pour intention de résoudre le problème posé par les DMTO. Selon nous, il suffirait que le Gouvernement autorise les départements, voire les communes, à réduire le taux de l'imposition pour que ces recettes fiscales puissent être considérées comme ressources propres.

Il reste que j'attends toujours une réponse à ma question. Si un jour, un gouvernement - pas celui-ci, bien entendu, monsieur le ministre délégué, mais un des suivants - décide qu'un certain pourcentage d'une imposition nationale sera affecté à chacune des vingt-six régions - une certaine part pour la Bretagne, une autre pour Rhône-Alpes, etc. -, considérera-t-on qu'il s'agit d'une ressource propre, au sens du numérateur du ratio d'autonomie financière ? Ni le rapporteur ni le Gouvernement n'ont encore répondu à cette question.

M. le président. La parole est à M. René Dosière, pour soutenir l'amendement n° 11.

M. René Dosière. Nous nous retrouvons avec le groupe UDF sur cet amendement, mais aussi avec les sénateurs Hoeffel, Mercier, et la plupart des responsables de groupes du Sénat. Nous savons en effet que des personnes remarquables siègent sur tous les bancs du Sénat. Il est inutile, monsieur le rapporteur, de nous faire un faux procès à ce sujet. Le rapport de M. Hoeffel et ses déclarations sont satisfaisants ; ce qui pose problème, c'est l'adoption de l'article 2 dans sa rédaction actuelle. Je le répète à nouveau : le Gouvernement impose son point de vue. La discipline de vote joue pleinement, les députés de la majorité font nombre et ne disent pas un mot, sinon d'approbation. Bref, quelqu'un décide, les autres exécutent, en conformité avec la nouvelle doctrine définie par le Président de la République.

En parlant de M. Hoeffel, je me référais avant tout au président de l'Association des maires de France. Comme toutes les associations d'élus, celle-ci a en effet pris une position claire sur ce sujet. M. Pélissard, que je ne vois pas aujourd'hui sur ces bancs, l'avait d'ailleurs approuvée. C'est pour cette raison qu'il avait fait part de ses réserves en première lecture et ne s'était pas présenté au moment du vote.

J'ai dit, monsieur le rapporteur, que vous étiez le seul à défendre votre position. C'est bien naturel : on ne vous aurait pas choisi comme rapporteur si vous n'étiez pas d'accord avec le Gouvernement. Il reste que vous n'êtes pas crédible.

Je sais bien qu'on peut avoir raison contre tout le monde mais, lorsque des gens aussi différents que ceux que j'ai nommés ont une position commune, c'est peut-être eux qui ont raison.

Monsieur le rapporteur, M. de Courson vous a posé une question précise sur la localisation de l'impôt à laquelle vous n'avez pas répondu. J'ai cru comprendre que vous étiez un peu surpris. Ce serait bien que vous puissiez y répondre explicitement pour qu'on y comprenne quelque chose. J'ai lu attentivement le compte rendu des débats du Sénat sur la proposition de M. Fréville, j'avoue que je n'ai pas compris. Ça me dépasse, c'est l'âge sans doute. Donnez-nous donc un exemple. Par ailleurs, maintenez-vous votre point de vue sur le fonds de compensation de TVA comme ressource propre ?

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 2 et 11 ?

M. Guy Geoffroy, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable à ces amendements, pour toutes les raisons que nous avons déjà largement évoquées.

Je vous remercie, monsieur de Courson, d'avoir saisi combien il était important pour nous de modifier la formulation de l'amendement du Sénat pour la rendre plus acceptable. J'espère que nous nous retrouverons sur cette nouvelle formulation à l'occasion de la présentation de l'amendement de la commission des lois.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.

Oui, monsieur de Courson, lorsqu'un impôt est transféré à une collectivité dans le cadre que j'ai évoqué tout à l'heure, il s'agit bien d'une ressource propre. Compte tenu de la situation qui est la nôtre, des contraintes européennes sur l'harmonisation fiscale, de la marge de manœuvre dont on doit disposer pour l'avenir, je ne voudrais pas qu'une définition comme celle que vous proposez soit retenue car cela gênerait considérablement les gouvernements futurs s'ils souhaitaient éventuellement poursuivre le mouvement de décentralisation. C'est un point essentiel, qui en appelle à la responsabilité des uns et des autres.

Voilà pourquoi la première rédaction de l'amendement Hoeffel nous a semblé trop restrictive. L'apport du sous-amendement de M. Fréville a été déterminant, parce qu'il donne une véritable cohérence à la notion d'autonomie financière des collectivités locales. Si l'on transfère des ressources fiscales à des collectivités locales, elles pourront évoluer de façon dynamique, sans dépendre de décisions administratives comme c'est le cas pour les innombrables dotations que le gouvernement de M. Jospin avait choisi de substituer à des impôts locaux.

Il y a donc là une avancée considérable, elle est gravée dans le marbre de la Constitution et de la loi organique. Ce point me paraît de nature à répondre à votre question, monsieur de Courson, à défaut de susciter votre adhésion.

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le rapporteur, M. Hoeffel, devant le Sénat, a défendu l'amendement de l'association des maires, des élus.

Il ne faut tout de même pas se moquer de nous, monsieur le ministre. Soyez sérieux ! Nous sommes des élus et nous savons ce que veut dire autonomie.

M. Hoeffel avait proposé que les ressources propres des collectivités soient « constituées du produit des impositions de toutes natures dont la loi les autorise à fixer l'assiette, le taux ou le tarif ». C'était très clair. Il avait donné plusieurs arguments pour soutenir son amendement.

D'abord, une telle disposition est conforme à la Constitution, ce que ne contestera pas M. de Courson. Et vous essayez de triturer la Constitution pour montrer que ce n'est pas vrai.

Elle est conforme, ensuite, aux travaux préparatoires à la révision constitutionnelle. M. Hoeffel a cité M. Clément, mais M. Clément, depuis, a changé d'avis...

M. René Dosière. Ça lui arrive souvent !

M. Augustin Bonrepaux. Enfin, M. Hoeffel a affirmé qu'il y avait une distinction claire entre les ressources fiscales propres et le produit des impositions de toutes natures, distinction qui figure également à l'article 9 de la charte de l'autonomie locale.

Pourtant, l'amendement de M. Hoeffel a été émasculé puisque le sous-amendement déposé par M. Fréville dit l'inverse en parlant d'impositions dont la loi détermine, par collectivité, la localisation de l'assiette ou du taux. Nous aurons l'occasion de discuter tout à l'heure de l'amendement du rapporteur, qui, paraît-il, précise les choses, mais vous aurez beau faire, monsieur le rapporteur, vous ne pourrez pas nous convaincre qu'une telle disposition assure l'autonomie des collectivités locales.

L'amendement que nous proposons est donc fondamental. Nous demandons la suppression du sous-amendement de M. Fréville, qui dénature totalement ce texte, et qui, de plus, comme l'a expliqué tout à l'heure M. de Courson, est impossible à appliquer. Expliquez-nous en effet comment localiser une partie de l'assiette. Il ne faut pas se moquer du monde ! Vous ne pouvez pas non plus affirmer que, parce que vous aurez fixé le taux nationalement, les collectivités locales seront autonomes. Comme vous allez réduire le plus possible leur marge de manœuvre en leur transférant des charges de plus en plus lourdes, vous diminuerez leur capacité d'initiative, c'est-à-dire que vous allez les asphyxier, et, comme le disait tout à l'heure Jean-Pierre Balligand, cela va se traduire par une explosion des impôts locaux. Il faudra que vous vous en expliquiez et que vous en supportiez les conséquences.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Permettez-moi de vous citer, monsieur le président de la commission des lois, peut-être reconnaîtrez-vous votre style...

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. Il est inimitable !

M. René Dosière. J'aimerais savoir, monsieur le rapporteur, comment vous interprétez ces lignes du président Clément, qui, dans son rapport n° 376, page 105, définissait les ressources propres des collectivités territoriales comme des ressources libres d'emploi, définitivement acquises et dont l'initiative, quant au principe et au montant, relève d'une décision de la collectivité territoriale. Telle était votre position, monsieur le président de la commission des lois, au moment de la révision constitutionnelle. Aujourd'hui, votre majorité et sans doute vous-même allez voter un dispositif totalement contraire.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Je crois qu'on a clarifié les choses, et je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir, vous au moins, répondu clairement.

Si l'on vote le texte proposé par M. Fréville ou l'amendement Geoffroy, cela signifie qu'une part d'un impôt national affectée à telle ou telle collectivité, une région par exemple, sera considérée comme une ressource propre alors que ce n'est absolument pas le cas, naturellement, puisque cette collectivité n'a aucune liberté pour fixer l'assiette et le taux. Une ressource qui a une assiette locale mais dont le taux est fixé par la loi sera également considérée comme une ressource propre. C'est très clair.

Ceux qui voteront pour l'amendement du groupe UDF affirmeront que ce ne sont pas des ressources propres, les autres affirmeront le contraire.

Je ne pense pas que le gouvernement actuel ait de mauvaises intentions...

M. Augustin Bonrepaux. Il en est bien capable !

M. Charles de Courson. ...mais un gouvernement futur pourra en avoir. Depuis quinze ans, aucun gouvernement n'a voulu réformer la fiscalité locale.

M. René Dosière. Si !

M. Charles de Courson. Cette nuit, j'ai présenté les propositions du groupe UDF sur les transferts d'impôts. Je vous ai expliqué, mes chers collègues, que, à part la CSG, les impôts nationaux ne pouvaient pas être transférés, et je pense que vous avez eu tort tout à l'heure, monsieur le ministre, de dire qu'aucun impôt n'était transférable. On peut être pour ou contre, mais il y a la CSG. Si vous baissez son taux de 7,5 à 7 % et que les départements peuvent voter entre 0 et 0,5 %, vous avez une assiette localisable et un taux qui peut être fixé par l'assemblée départementale. Vous avez raison pour la TVA, l'IS et l'IR, mais pas pour la CSG. Il y a donc des solutions techniques.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais mettre aux voix les amendements identiques nos 2 et 11.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 84

                    Nombre de suffrages exprimés 82

                    Majorité absolue 42

        Pour l'adoption 30

        Contre 52

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 12.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Par cet amendement, nous proposons de supprimer, dans le premier alinéa, les mots : « par collectivité ».

Selon le dispositif adopté par le Sénat, la localisation des ressources prévue par la loi doit s'effectuer « par collectivité ». Cela rend quasiment impossible l'application du dispositif aux communes, puisque cela conduirait à voter dans la loi les règles applicables à chacune de nos 36 000 communes.

De plus, on peut s'interroger sur la constitutionnalité du dispositif, dans la mesure où il autoriserait des règles de compensation variables pour chaque collectivité.

Au dispositif d'application générale mais insatisfaisante, adopté à l'Assemblée nationale - à savoir l'attribution du produit d'impositions dont les collectivités ne peuvent aucunement moduler le taux - est ainsi substitué un dispositif permettant à l'État d'opérer une discrimination entre les collectivités.

L'amendement n° 1 rectifié, que va nous présenter, M. Geoffroy, est à peu près du même ordre. Les localisations seront différentes selon les collectivités et la discrimination sera la même.

M. le président. J'annonce d'ores et déjà que, sur le vote de l'amendement n° 1 rectifié, je suis saisi par le groupe Union pour la démocratie française d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Quel est l'avis de la commission sur amendement n° 12 ?

M. Guy Geoffroy, rapporteur. La commission a donné un avis défavorable à cet amendement qui va très au-delà de l'amendement Hoeffel-Fréville. Or l'amendement Hoeffel-Fréville, pour des raisons qu'un certain nombre de sénateurs ont notées, est très loin de l'épure constitutionnelle.

En ne faisant même plus référence à la notion de collectivité,...

M. Augustin Bonrepaux. C'est impossible !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. ...- ce qui ne nous étonne pas venant de M. Bonrepaux - on se retrouve dans la logique que vous avez longtemps privilégiée : l'octroi des dotations. Une somme rigoureusement identique sera proposée, quelle que soit la nature ou le type de collectivité. On ne peut pas aller plus loin que l'amendement Hoeffel-Fréville, que nous avons modifié.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Avis défavorable. Renoncer à toute référence territoriale irait à l'encontre même de la démarche dans laquelle nous nous sommes inscrits pour répondre aux attentes des parlementaires.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Les explications que le rapporteur vient de nous donner me satisfont pleinement. Elles démontrent l'absurdité de cet amendement, qui a d'ailleurs été déposé à cet effet. Vous venez de nous en donner acte et nous ne pouvons que nous en réjouir.

C'est la raison pour laquelle M. le ministre, qui n'avait pas saisi la subtilité de cet amendement, était un peu étonné.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 1 rectifié.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Je serai bref puisque cet amendement a été évoqué à de nombreuses reprises. Il a pour objet de reprendre la formulation de la première lecture du Sénat, pour la rendre claire et effective.

L'amendement Hoeffel-Fréville précisait que pour être considéré comme ressource propre d'une collectivité, un impôt d'État transféré devait pouvoir bénéficier « d'une localisation de l'assiette ou du taux. »

Si la formulation « localisation de l'assiette » n'est pas très heureuse, elle reste cependant compréhensible, mais « la localisation du taux » est une formulation obscure, ce que l'auteur de l'amendement a lui-même reconnu.

La commission des lois a toutefois considéré qu'il s'agissait d'une avancée tout à fait acceptable, qui faisait suite à nos débats en première lecture, traduisant la volonté conjointe du Gouvernement et du Parlement de considérer cette loi organique comme une étape essentielle dans le changement radical des relations financières entre l'État et les collectivités territoriales.

Partant de ce constat, et de cette volonté qui était la nôtre de ne pas nuire à la volonté exprimée dans l'amendement Hoeffel-Fréville, nous avons proposé une rédaction qui en respecte l'esprit mais lève toutes les ambiguïtés.

C'est pourquoi, plutôt que de parler de « localisation de l'assiette et du taux », il est proposé d'indiquer d'une part que la loi peut fixer le taux et d'autre part qu'il doit exister une part locale d'assiette. Voilà qui est beaucoup plus facilement compréhensible.

Cet amendement se situe dans le droit fil du travail engagé ici et poursuivi au Sénat. Il nous revient afin que le texte définitif soit non seulement conforme à l'esprit et à la lettre de la Constitution, mais de surcroît parfaitement clair et applicable.

M. le président. Eu égard à la complexité du sujet, la parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ayant été rapporteur pour avis de ce texte en première lecture, je me permets d'intervenir sur cette question importante.

Je voudrais vous convaincre du travail qui a été accompli depuis la première lecture devant l'Assemblée et vous montrer combien le texte a été substantiellement amélioré par nos collègues sénateurs et par la commission des lois.

Le texte proposé par le Gouvernement, en première lecture, était parfaitement conforme à Constitution. C'est un point absolument essentiel. Les impositions de toutes natures, classées dans la catégorie des ressources propres telles qu'elles sont définies par ce projet de loi organique, découlent directement de la réforme constitutionnelle de l'année dernière. Il n'y a aucun doute juridique sur ce point. Nous avons seulement voulu, en première lecture, préciser les choses, en faisant référence à l'article 72-2 de la Constitution. Sur cette base s'est engagé au Sénat un débat extrêmement intéressant et constructif.

Pour le reste, monsieur Dosière, ce que vous dites est tout à fait injuste. Il y a, certes, les rapports parlementaires, mais ce ne sont que des rapports. Ils font l'objet d'un débat et de ce débat peuvent naître des conclusions différentes des propositions des rapporteurs. C'est très exactement ce qui s'est passé au Sénat.

Celui-ci a souhaité apporter une définition plus précise que la nôtre, en identifiant deux catégories parmi les impositions de toutes natures : celle dont la loi autorise les collectivités locales à fixer l'assiette, le taux ou le tarif - la vraie catégorie, selon l'expression de M. de Courson - et celle dont la loi « détermine, par collectivité, la localisation de l'assiette ou du taux. »

Votre rapporteur propose une amélioration rédactionnelle, tendant à rendre plus compréhensible le texte du Sénat. Pour ma part, je trouve tout à fait positive la proposition du Sénat et nous n'aurons aucune difficulté à aller nous en expliquer devant les associations d'élus.

M. René Dosière. Donnez-nous quelques exemples !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. J'y viens. S'agissant de la TIPP, le dispositif adopté dans la loi de finances pour 2004 n'est pas satisfaisant parce que, d'un point de vue juridique, il revient pratiquement à l'octroi de dotations.

M. Augustin Bonrepaux. Quel aveu !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Monsieur Bonrepaux, comme président de la commission des finances, vous avez accepté le remplacement de 15 milliards d'euros d'impôts locaux par des dotations ! Alors, soyez un peu plus discret ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Augustin Bonrepaux. Vous ne faites pas différemment ! Et c'est pour cela qu'il a fallu une modification de la Constitution ! C'est du travail pour rien ! Un scandale !

M. le président. Monsieur Bonrepaux, laissez s'exprimer M. Carrez, vous pourrez intervenir ensuite.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Que seule la loi puisse définir le taux de la TIPP, département par département, représente un progrès considérable.

Je prendrai un deuxième exemple, que nous avons tous à l'esprit : la réforme de la taxe professionnelle. La loi ne pourra pas fixer le taux dans chacune de nos 36 000 communes. Par conséquent, la nouvelle rédaction est également plus protectrice vis-à-vis de la future réforme de la taxe professionnelle.

Comme M. le ministre l'a très bien dit, nous sommes ici pour faire un travail, en nous projetant dans l'avenir. Ensemble, tous ceux qui s'occupent de finances locales essayent de moderniser notre fiscalité locale.

Dans chaque congrès, les associations d'élus ne cessent d'en dénoncer le caractère si archaïque, si irréformable que les dotations se substituent aux impôts locaux. C'est ce qui a été fait sous la précédente législature et un certain nombre d'arguments, je le reconnais, plaidaient en ce sens. Quels sont aujourd'hui les impôts nouveaux qu'on pourrait mettre en place ?

Ouvrons les yeux ! Dans tous les autres pays européens, l'avenir, les impôts modernes, ceux qui épousent l'économie d'aujourd'hui, sont les impôts d'État : je pense à l'impôt sur les sociétés, à la TVA, ou pourquoi pas à l'impôt sur le revenu, à la CSG ou bien sûr à la TIPP. Nous serions irresponsables d'interdire, pour l'avenir, tout partage d'un impôt d'État.

Nous nous souvenons tous que la création de la TVA a entraîné, au milieu des années 1960, la disparition d'une taxe locale, remplacée par la VRTS et par la DGF. Comme l'a rappelé le ministre, nous nous efforçons de travailler d'une façon constructive. Il est évidemment impossible de répondre à toutes les critiques et de rendre une copie absolument parfaite. Mais ce serait une grave erreur de nous arc-bouter sur une vision passéiste qui nous interdirait toute évolution et toute modification de la fiscalité locale.

Nous achèverons, j'espère, aujourd'hui ce débat très fructueux, qui a été engagé à l'Assemblée et s'est poursuivi au Sénat. Il n'y a ni arrière-pensées ni malignité dans ce que nous proposons, mais le souci de bâtir une véritable autonomie financière des collectivités locales. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Si nous avons pris la peine de réformer la Constitution l'année dernière pour y introduire, outre le principe d'autonomie, celui de péréquation, c'était bien pour faire œuvre utile en matière de finances locales. Dans le même esprit, nous pouvons être fiers de cette loi organique, et en particulier de son article 2 ainsi amendé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Les deux exposés de M. Geoffroy et de M. Carrez ont bien fini de planter le décor tel que nous le concevons : avec ce texte, nous venons de poser, pour la première fois dans notre pays, les bases d'une autonomie financière des collectivités locales. Il n'est pas interdit d'émettre des doutes, mais du moins avons-nous construit un thermomètre qui nous permettra d'évaluer la situation et d'assumer nos responsabilités, que nous soyons membres du Gouvernement ou élus locaux. Il s'agit là d'un moment essentiel dans l'histoire des relations institutionnelles entre l'État et les collectivités locales. Ce chemin est d'ailleurs bien distinct de celui que trace la loi relative au transfert de compétences, que nous allons examiner par ailleurs. Certes, c'est le transfert de compétence qui concrétise la décentralisation, mais il n'existe que dans le cadre, désormais clairement fixé, de l'autonomie financière.

Je souscris pleinement à l'amendement proposé par M. Geoffroy au nom de la commission des lois, qui est de nature à améliorer significativement la rédaction originelle présentée par le Gouvernement, et je vous invite à l'adopter. Nous disposerons alors d'un texte parfaitement clair, que les hommes et femmes de bonne volonté qu'évoquait M. Carrez pourront aisément aller présenter dans les congrès d'élus locaux et dont les éléments pourront rassurer nos concitoyens sur la volonté de transparence de l'État à l'égard des collectivités locales. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour répondre à la commission.

M. Charles de Courson. L'amendement n° 1 rectifié comporte deux parties. Le groupe UDF est radicalement opposé à celle qui prévoit qu'une part locale d'assiette d'un impôt national sans assiette territoriale sera considérée comme une ressource correspondant au numérateur, c'est-à-dire traduisant l'autonomie financière des collectivités territoriales. C'est intellectuellement monstrueux !

Vous citez l'exemple de la TIPP, qui n'a pas d'assiette localisable. Vous voudriez faire croire, pour relever le taux d'autonomie financière, que l'affectation de telle proportion à la Bretagne ou de telle autre à la région Rhône-Alpes correspondrait à une autonomie financière. Mais, monsieur le rapporteur, sans assiette territoriale, il ne peut y avoir d'autonomie financière ! Comment calculera-t-on la part d'impôt national destinée aux différentes régions ou aux différents départements, étant entendu que l'exercice est techniquement impossible pour les 36 000 communes ? On aura beau calculer quel pourcentage représentent les sommes affectées à la Bretagne ou à la région Rhône-Alpes, il ne s'agira pas d'autonomie financière !

Ce que vous faites avec la TIPP vaudrait aussi avec d'autres impôts, comme la TVA ; bien malin en effet qui pourrait dire quelle est sa localisation ! Quel que soit l'impôt considéré, ce que vous proposez est un versement représentatif d'un impôt national.

Monsieur le rapporteur, la question de fond sur laquelle le Conseil constitutionnel aura à se prononcer est de savoir si votre conception, que soutient le Gouvernement, est conforme aux trois alinéas de l'article 72-2 de la Constitution. Pour ma part, je pense qu'elle ne l'est pas. Raisonnons par l'absurde : si on considère qu'elle l'est, vous pourriez substituer à la totalité des recettes dont les régions peuvent moduler l'assiette ou le taux un versement représentatif d'un impôt national, correspondant à une part, tout en affirmant que le taux d'autonomie financière est inchangé. Cette analyse est monstrueuse !

Je sais que telle n'est pas l'intention du Gouvernement, mais, en votant cet amendement, vous ouvrirez la possibilité à d'autres gouvernements d'appliquer ce raisonnement dans l'avenir.

J'en viens à la première partie de votre amendement. Vous avez évoqué l'exemple des droits de mutation à titre onéreux, les DMTO, qui s'élèvent à 1,20 % pour les communes et 3,60 % pour les départements. Leur taux étant fixé par la loi, mais leur assiette localisable, vous avez suggéré que ces prélèvements pourraient être considérés comme une ressource propre. Je pense pour ma part que ce n'est pas le cas, car l'assemblée territoriale compétente ne peut opérer aucune modulation. Rien n'empêche au demeurant que le Conseil constitutionnel se prononce sur la question.

En revanche, la rédaction de votre amendement laisse dans l'obscurité la question de savoir si un taux local - fût-il le même pour tous - est possible lorsque l'assiette n'est pas localisable. On ne trouve, à la page 15 de votre rapport, que le cas des DMTO, dont l'assiette est localisable ; vous auriez pu, d'ailleurs, évoquer tout aussi bien la taxe sur les pylônes.

Il est important que vous puissiez éclairer notre assemblée sur la première partie de l'amendement. Si, en effet, vous en limitez la portée aux impôts dont l'assiette est localisable, cela doit être précisé.

Supposons par exemple que le Gouvernement attribue aux départements les 3,2 milliards d'euros de recettes de la taxe sur les conventions d'assurance automobile, la TCA-A, comme il s'est engagé à le faire en deux tranches dans les deux ans. La localisation de cette taxe pose problème. Le domicile du propriétaire est un critère qui ne pourrait s'appliquer, sauf perturbations considérables, qu'aux véhicules des particuliers : la taxe correspondant aux flottes de véhicules de sociétés se verrait alors fixer un taux national et ferait l'objet d'une péréquation. Dans le cas contraire, tous les véhicules des flottes d'entreprises seraient localisés au siège social des entreprises - c'est-à-dire à Paris ou dans les Hauts-de-Seine. Si l'on remplaçait le critère de perception de la TCAA, qui est un impôt national, en prenant en compte par exemple les plaques d'immatriculation - ou, parce que celles-ci vont bientôt disparaître, un autre critère - et en fixant un taux, s'agirait-il d'une recette propre au titre du troisième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution ?

M. le président. Monsieur de Courson, veuillez conclure, je vous prie.

M. Charles de Courson. Pouvez-vous, monsieur le rapporteur, nous éclairer sur les deux parties de la question ?

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, puis-je répondre d'un mot ?

M. le président. M. René Dosière aura seul la parole. M. Bonrepaux, pour être agréable à la présidence, ne demandera pas à intervenir, et M. Albertini comprendra donc, également, que je ne lui donne pas la parole.

M. Pierre Albertini. Non, je ne le comprendrai pas. Nous sommes ici au cœur du débat !

M. le président. Mais vous l'accepterez !

La parole est à M. René Dosière, pour répondre au Gouvernement.

M. René Dosière. Monsieur le ministre, nous avons entendu bien souvent, durant ces débats, votre tirade sur l'autonomie financière mise en place pour la première fois. Après les explications du rapporteur général, ce développement un peu trop polémique était plutôt malvenu.

M. le ministre délégué à l'intérieur. C'est bien à vous de dire ça !

M. René Dosière. Vous confondez l'autonomie financière et l'autonomie fiscale. Il me faut donc répéter, pour la troisième fois, que les moyens financiers mis à la disposition des collectivités par l'État ont augmenté quatre fois plus vite pendant les dix années où la gauche a été au pouvoir - de 1989 à 1993 et de 1997 à 2002 - que durant toutes les années où la droite gouvernait, et où ces moyens n'ont augmenté que de 5 %. Vous ne pouvez donc pas dire que l'autonomie financière des collectivités locales a diminué, alors qu'elle a augmenté avec les moyens financiers mis à leur disposition. Je vous accorde que, durant cette période, leur autonomie fiscale a diminué - je n'ai, d'ailleurs, cessé de le répéter - mais il ne faut pas confondre les deux gestions.

M. de Courson a parfaitement exposé la question des ressources fiscales propres que les collectivités doivent pouvoir maîtriser, et je n'y reviendrai donc pas. Je souhaite en revanche que M. le rapporteur général - à qui je ne veux nullement intenter un procès d'intention - précise sa pensée au sujet de la taxe professionnelle. En effet, j'ai retenu - mais peut-être ai-je mal compris - que vous évoquiez un taux unique pour toutes les collectivités locales.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Non ! Au contraire !

M. René Dosière. Il serait donc utile que vous puissiez le préciser.

Je rappelle qu'il est une assiette qui pourrait donner entière satisfaction, parce qu'elle est facilement localisable et que les taux pourraient être fixés par l'ensemble des collectivités : celle de la CSG, qui repose sur les revenus des individus. Tous les gouvernements s'opposent à ce que les collectivités locales puissent intervenir sur l'assiette de la CSG, au motif que celle-ci est réservée à la sécurité sociale - et le ministre vient de tenir le même raisonnement. Mais, comme je l'ai dit lors de la première lecture, il s'agit d'un raisonnement fallacieux.

Le ministère des finances ne veut pas que les collectivités locales disposent du pouvoir de maîtriser leurs propres impôts. Il ne souhaite qu'une chose : être maître de leur fiscalité. Pour y parvenir, il lui faut remplacer les impôts locaux par des dotations ou par des impôts partagés. Je vous accorde, monsieur le ministre, qu'un impôt partagé n'est pas tout à fait une dotation. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre délégué à l'intérieur. Tout de même !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Un progrès !

M. Michel Bouvard. C'est un louable effort d'objectivité de votre part, monsieur Dosière !

M. René Dosière. Vous dites, monsieur le ministre, qu'une dotation augmente suivant le niveau de l'indexation éventuelle, tandis que l'impôt partagé augmente en fonction de sa base d'évolution. Mais celle-ci peut évoluer dans des sens très différents.

Juridiquement, dotations et impôts partagés sont différents mais, dans les faits, cela revient au même concernant l'autonomie des collectivités locales.

Je termine en soulignant que ce que veut le ministère des finances, c'est maîtriser l'ensemble des sommes qu'il accorde aux collectivités locales. Ainsi, les impôts que celles-ci maîtrisent en votant elles-mêmes les taux sont remplacés par des dotations dont le gouvernement peut facilement être maître, via naturellement le Parlement. Mais quand nous voyons comment se comportent les majorités vis-à-vis de leur gouvernement, il est facile de comprendre que si le Gouvernement veut, la majorité s'incline.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Dosière.

M. René Dosière. Le Gouvernement a procédé de même sur le plan des prélèvements sociaux, ce qui fait qu'aujourd'hui nous sommes un peu bloqués. C'est pourquoi il est impossible de répartir localement l'assiette de la CSG alors que, techniquement, ce serait très faisable.

M. le président. La parole est à M. Pierre Albertini. (« Au vote ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il sera le dernier orateur sur cet amendement.

M. Pierre Albertini. Monsieur le président, je n'ai pas abusé de mon temps de parole puisque je ne me suis pas encore exprimé dans le débat. Vous ne pourrez donc pas m'accuser d'avoir fait durer celui-ci au-delà du raisonnable. Mais nous touchons au cœur du sujet.

M. le président. Vous avez la parole pour une minute, monsieur Albertini.

M. Pierre Albertini. Je reconnais qu'il n'existe pas de dispositif pur et parfait en matière de garantie de l'autonomie financière ou fiscale des collectivités. Je reconnais également que le rapporteur, appuyé par le Gouvernement, fait un effort pour atténuer nos craintes. Mais celles-ci demeurent. Je vais vous expliquer pourquoi dans les trente secondes qui me restent.

Nos craintes seraient largement dissipées si la situation des finances de l'État était satisfaisante ; si la fiscalité locale était modernisée ; si seulement la réforme de la taxe professionnelle était expliquée aux collectivités locales dans une perspective claire ; si, plus modestement, les bases particulièrement injustes et antiéconomiques de notre fiscalité locale, qui datent du début des années 1970, étaient actualisées ; si le projet de loi qui va venir en discussion ne transférait pas des compétences à très forte évolutivité et qui répondent à des attentes sociales considérables des habitants : je pense à l'action sociale, à l'insertion, au logement, à la santé.

Mais comme, en l'état actuel, nos craintes ne sont pas dissipées, nous voterons contre cet amendement.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1 rectifié.

M. Augustin Bonrepaux. Rappel au règlement !

M. le président. Monsieur Bonrepaux, le scrutin public a été demandé il y a plus d'un quart d'heure. Il est engagé.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 97

                    Nombre de suffrages exprimés 95

                    Majorité absolue 48

        Pour l'adoption 77

        Contre 18

L'Assemblée nationale a adopté.

Je suis saisi d'un amendement n° 15.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour le soutenir.

M. Augustin Bonrepaux. Pour un rappel au règlement, monsieur le président. Tout à l'heure, vous avez donné la parole à M. Albertini. Vous avez bien fait, parce qu'il avait effectivement des choses à dire, mais je brandissais le règlement pour vous montrer mon intention. Et ce rappel est particulièrement justifié...

M. le président. Monsieur Bonrepaux, vous êtes intervenu à plus d'une dizaine de reprises au cours de cette séance !

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...

M. Jean Leonetti. Ça suffit, monsieur Bonrepaux !

M. le président. M. Albertini a utilisé le temps de parole que son groupe avait demandé sur l'article 1er, monsieur Bonrepaux !

M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas cela que je mets en cause. Je voulais simplement faire un rappel au règlement.

M. le président. Alors terminez votre rappel au règlement et défendez l'amendement n° 15.

M. Augustin Bonrepaux. Je demande, au nom de mon groupe, une suspension de dix minutes pour examiner les conditions dans lesquelles doit se poursuivre la discussion.

M. le président. Ce n'est pas un rappel au règlement.

Nous allons en finir avec l'article 2, puis je suspendrai la séance cinq minutes.

Je vous demande pour l'instant de défendre l'amendement n° 15.

M. René Dosière. Et la réunion de la commission des lois ?

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, pouvez-vous nous donner des éclaircissements sur la suite de nos travaux ? Nous avons appris, incidemment, qu'il y aurait une réunion de la commission des lois. A-t-elle lieu ou pas ?

M. le président. La réunion de la commission des lois, initialement prévue à dix-neuf heures, a été reportée à vingt heures. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. René Dosière. Je suis heureux de l'apprendre !

M. le président. Monsieur Bonrepaux, je vous demande maintenant de défendre l'amendement n° 15.

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, nous ne pouvons pas défendre cet amendement sans, au préalable, une suspension de séance, parce qu'il faut que notre groupe se concerte. Je demande une suspension de cinq minutes. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Monsieur Bonrepaux, l'organisation d'une séance est basée sur un minimum de confiance entre les orateurs de la majorité et ceux de l'opposition. Depuis le début de cette séance, à quinze heures, M. Dosière et vous-même avez pu intervenir quand vous le souhaitiez,...

M. René Dosière. Nous ne sommes intervenus que sur les amendements, monsieur le président !

M. le président. ...souvent en dépassant largement votre temps de parole.

M. Augustin Bonrepaux. Je ne le conteste pas, monsieur le président.

M. Christophe Caresche. Vous êtes pressé par l'ordre du jour, monsieur le président. C'est ça la vérité !

M. Augustin Bonrepaux. Je ne mets pas en cause la façon dont vous présidez, vous avez donné la parole comme il convenait. Je demande simplement que notre groupe puisse se réunir pour examiner...

M. le président. Après le vote de l'article 2 !

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, nous sommes sur un amendement important et je ne vois pas pourquoi une demande qui est de droit ne serait pas prise en compte !

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante-cinq, est reprise à dix-neuf heures cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. René Dosière, pour un rappel au règlement.

M. René Dosière. Mon intervention se fonde sur l'article 40, alinéa 4, dont je me permets de lire un extrait, parce que nos collègues n'en sont peut-être pas familiers : « En cours de session, les commissions doivent être convoquées quarante-huit heures au moins avant leur réunion ; elles peuvent être exceptionnellement réunies dans un délai plus bref si l'ordre du jour de l'Assemblée l'exige. »

Nous avons reçu hier, monsieur le président, une convocation, qui a d'ailleurs été déposée en séance, du président de la commission des lois. Celle-ci devait se réunir ce soir, à dix-neuf heures, au titre de l'article 88 de notre règlement, afin d'examiner les amendements au texte relatif aux responsabilités locales, et de procéder à la nomination des membres de la future commission mixte paritaire. J'ai cru comprendre que ce texte était important aux yeux du Gouvernement, à défaut de l'être aux yeux de toute sa majorité.

M. Michel Bouvard. Oh !

M. René Dosière. En conséquence, il a été inscrit hier soir à l'ordre du jour. La convocation de la commission a donc dû intervenir après la Conférence des présidents. Et voilà que tout à l'heure, notre collègue Bonrepaux demande une suspension de séance en vous rappelant, monsieur le président, que la commission des lois doit se réunir à dix-neuf heures - cette réunion me concerne d'ailleurs directement, puisque je dois suivre également ce texte. Et c'est alors vous qui, répondant à M. Bonrepaux, nous annoncez que la commission des lois ne se réunit plus à dix-neuf heures mais à vingt heures. Je n'ai reçu aucun papier. Bien entendu, je ne mets pas en cause votre parole, monsieur le président. Si vous me dites que la commission des lois se réunira à vingt heures, c'est que je vais recevoir prochainement une convocation pour vingt heures. Mais il reste que si vous ne l'aviez pas dit, si la question ne vous avait pas été posée, je me serais rendu à dix-neuf heures à la commission des lois où j'aurais appris, comme mon collègue Piron, qui n'était pas plus informé que moi, que la réunion avait lieu à vingt heures.

M. Michel Piron. Mais nous nous en portons bien, non ?

M. René Dosière. En outre, je note que nous sommes en train d'examiner un texte important et que nous ne savons pas à quelle heure nous en aurons achevé l'examen. Et on nous dit qu'à vingt heures, et non plus à dix-neuf heures, la commission se réunira pour examiner un grand nombre d'amendements. Nous allons d'autre part entamer la prochaine séance à vingt et une heures trente pour achever la discussion du présent texte avant d'examiner celui relatif aux responsabilités locales.

Je sais bien que j'ai des réserves et que je peux me passer de manger (Sourires), mais ce ne sont quand même pas des méthodes et des conditions de travail correctes, d'autant qu'il s'agit de textes importants. Ce n'est pas convenable. Ne protestez pas, chers collègues de la majorité. Ce sont des méthodes inadmissibles, et si c'était nous qui les utilisions, vous seriez les premiers à protester.

Cette assemblée a des règles de fonctionnement, il faut quand même qu'elles soient respectées ! Ce n'est pas parce qu'un gouvernement est en sursis et qu'il veut faire voter le maximum de textes avant de disparaître (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) que l'on doit faire travailler les parlementaires à la hache. Ce n'est pas sérieux, je vous le dis, monsieur le président.

N'étant pas président de groupe, je n'ai pas la possibilité de demander le quorum. Mais le président de notre groupe n'est pas absent de Paris. Je souhaite que nous poursuivions nos travaux dans la sérénité, faute de quoi je crains que la séance de ce soir ne se déroule pas dans des conditions satisfaisantes.

M. le président. Pour répondre à votre rappel au règlement fondé sur l'article 40, alinéa 4, je vous confirme, monsieur Dosière, que la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République a été convoquée aujourd'hui à dix-neuf heures afin, d'une part, d'examiner, au titre de l'article 88, les amendements au texte relatif aux libertés et aux responsabilités locales, et, d'autre part, de procéder à la désignation éventuelle des candidats à la CMP. Cette réunion a été reportée à vingt heures en raison du déroulement de nos débats. Il ne s'agit donc pas d'une nouvelle réunion qui appellerait une nouvelle convocation, auquel cas l'article que vous invoquez s'appliquerait, mais d'un report décidé en fonction de ce qui se passe dans l'hémicycle, chose qui arrive assez souvent. Il a fallu tenir compte du sujet qui est abordé dans l'hémicycle et du retard pris dans l'examen du présent texte.

Je pense que les parlementaires de l'opposition ont pu intervenir tout à loisir, sans que leur temps de parole soit limité, comme on le reproche parfois à la présidence sur une partie de ses bancs.

Le président de la commission des lois vient de nous rejoindre. Je vous propose, au-delà de votre rappel au règlement, de poursuivre la discussion de l'article par l'examen des amendements nos 15 et 16, après quoi nous approcherons sans doute de vingt heures. Peut-être la commission des lois pourra-t-elle même se réunir avant, vers dix-neuf heures quarante-cinq.

En tout état de cause, je note que nous étions là à dix-neuf heures. Il y aurait quelque paradoxe à ce que certains collègues demandent beaucoup de temps de parole en séance publique et regrettent ensuite que celle-ci dure trop longtemps et repousse l'heure de la réunion de la commission des lois.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, je veux bien vous donner acte que vous avez été très libéral et que vous nous avez permis de nous exprimer. Nous ne vous reprochons rien à cet égard.

La seule question que nous posons est la suivante. La commission des lois étant convoquée pour vingt heures, à quelle heure débutera la séance du soir ? Pourriez-vous nous informer sur ce point ? Ce serait la moindre des choses pour que chacun de nous puisse prendre ses dispositions. Et le président de la commission des lois peut-il nous dire à quelle heure exactement se réunira la commission des lois ? Il serait bon que nous soyons informés !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. La commission des lois s'est tenue à la disposition de l'Assemblée, puisque j'ai fait savoir qu'elle se réunirait aussitôt après la levée de la séance. Je me suis donc immédiatement rangé au désir de la présidence et de l'Assemblée.

Notre commission, et je parle sous votre appréciation, monsieur le président, doit examiner 4 500 amendements. Même si j'ai cru comprendre qu'un certain nombre de ces amendements pouvaient être qualifiés de répétitifs, il est nécessaire de prévoir un minimum de temps. Je me demande s'il ne serait pas possible de repousser à vingt-deux heures le début de la prochaine séance, le temps que les commissaires puissent légitimement prendre quelques minutes de repos. Voilà ce que je suggère, mais je suis à la disposition de la présidence.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.

M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le président, vous ne pouvez que constater que l'organisation de nos travaux ne convient pas du tout. Nous avions déjà fait observer hier soir qu'au moment où allait commencer la séance de ce matin, une commission mixte paritaire se réunirait. Des commissions mixtes paritaires se tiennent tous azimuts en ce moment, puisque l'ordre du jour de la semaine prochaine prévoit l'adoption finale de plusieurs projets de loi dont les dispositions restant en discussion doivent être examinées. Les choses vont donc continuer ainsi, et nous maintenons qu'il n'est pas sain, qu'il n'est pas raisonnable, pour le texte lui-même mais aussi pour la dignité de l'Assemblée nationale, de continuer à travailler dans ces conditions.

Vous voyez bien que le Gouvernement s'est engagé dans une impasse. Il a voulu à tout prix imposer un ordre du jour forcé alors qu'on sentait bien, à la Conférence des présidents, qu'il y avait unanimité pour que les choses se passent autrement. Le président de l'Assemblée nationale a d'ailleurs fait ce qui était en son pouvoir pour faire comprendre au Gouvernement qu'une autre voie était possible.

Nous avons fait preuve de beaucoup de modération. Nous n'avons pas cherché à faire de l'obstruction.

M. Michel Piron. Si peu !

M. Jean-Marc Ayrault. Nous avons souhaité que les choses se passent autrement. Le texte sur lequel va se réunir la commission des lois, nous pourrions en achever l'examen dès la première semaine du mois d'octobre, après que le Conseil constitutionnel aura définitivement statué sur la loi organique.

Je crois aussi que de telles conditions de travail sont gênantes pour les parlementaires eux-mêmes, puisque le président de la commission des lois, peut-être de bonne foi - je ne veux pas mettre en cause sa sincérité, qui est légendaire -, est obligé de s'organiser différemment pour examiner les amendements au titre de l'article 88.

Et s'il vous plaît, monsieur le président de la commission, ne portez pas de jugement sur le fond. Nos amendements existent, c'est un droit des parlementaires que de les déposer. Que nous en ayons déposé 400 ou 4 000, cela ne change rien : la commission des lois a l'obligation de les examiner au titre de l'article 88.

On voit bien que vous êtes devant une difficulté grave, et que l'Assemblée nationale ne peut pas continuer à travailler dans ces conditions.

Je sais bien que vous pouvez demander que la séance de ce soir débute à vingt-deux heures au lieu de vingt et une heures trente, mais cela ne changera rien de fondamental. Cela permettra aux membres de la commission des lois de disposer d'un peu plus de temps pour se restaurer avant de reprendre les travaux en séance, mais cela ne changera rien quant au fond.

Je vous demande, monsieur le président, de faire savoir que, étant donné l'organisation de nos travaux qui a été constatée par la Conférence des présidents hier à dix-sept heures, l'Assemblée nationale est devant une impasse, une difficulté, et que je demande au Gouvernement de revoir l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Qu'il nous entende enfin. Je ne demande pas qu'il nous écoute - c'est ce qu'il dit toujours -, mais qu'il entende enfin nos arguments, lesquels n'ont rien de spécieux puisque vous voyez bien qu'il y a un problème. Face à un problème, il faut trouver une solution. Trouvez-la ! Que le Gouvernement prenne ses responsabilités !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. M. le président Ayrault considère que nous aurons trop de travail lorsque la commission des lois se réunira au titre de l'article 88.

M. Jean-Marc Ayrault. Vous n'êtes pas de bonne foi ! Vous n'avez pas écouté ce que j'ai dit !

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. Vous dites que l'ordre du jour est contraint.

M. Jean-Marc Ayrault. Oui, par le Gouvernement !

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. Nous allons lever la séance dans quelques instants. La prochaine séance ne reprendra qu'à vingt-deux heures. La commission des lois va se réunir pendant cette pause qui vous semble insuffisante pour examiner l'ensemble des amendements. Je vous propose donc d'alléger l'ordre du jour en retirant 4 000 amendements strictement répétitifs.

M. Christophe Caresche. Ce que vous dites est incroyable !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Qu'est-ce qu'on entend !

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. Et vous nous dites que l'ordre du jour est contraint par le temps !

M. Christophe Caresche. Il ne faut pas trois jours pour examiner le texte, vous le savez !

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. Nous en débattrons certainement avec le président de l'Assemblée nationale.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. On vous voit venir !

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. Car entre le droit d'amender...

M. Augustin Bonrepaux. Nous verrons, quand vous serez dans l'opposition !

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. Je l'ai été plus souvent qu'à mon tour et je connais bien l'opposition, probablement mieux que vous, en termes de temps !

M. Augustin Bonrepaux. Vous vous y retrouverez plus tôt que vous ne le pensez !

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. Laissez-moi terminer ma phrase !

Le droit d'amender ne doit pas être confondu avec le détournement de procédure !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. L'abus de procédure, c'est la session extraordinaire !

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. Monsieur le président Ayrault, vous ne pouvez pas invoquer la mauvaise organisation de nos travaux, alors que vous détournez sciemment et publiquement la procédure parlementaire !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Adoptons le texte conforme, comme cela a été demandé par le président Accoyer !

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. Ce débat a certes traîné en longueur, mais toutes les interventions de nos collègues étaient justifiées. Aucun amendement, monsieur Ayrault, n'a été considéré comme indigne de l'attention du Parlement ! En revanche - et je le dis solennellement -, les amendements déposés sur la loi ordinaire ne relèvent absolument pas d'un travail parlementaire que nous devons être fiers de présenter aux Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ce sont des jugements de valeur inacceptables ! Personne ne peut dire cela !

M. le président. Vous pourrez vous exprimer monsieur Le Bouillonnec, mais calmement, après que le ministre sera intervenu !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C'est la prétention de ceux qui pensent tout savoir ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Un peu de calme, monsieur Le Bouillonnec !

M. Augustin Bonrepaux. M. Clément ne fait pas de politique, vous le savez bien !

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. Non, mes propos sont d'ordre technique !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à l'intérieur. Je rebondirai sur les propos du président Ayrault. Je ne suis pas dupe de la polémique qui s'engage. Je tiens toutefois à rappeler que, si le Gouvernement a jugé utile d'inscrire maintenant l'examen en deuxième lecture du projet de loi sur la décentralisation, ce n'est pas le fait du hasard. Ce chantier a en effet été ouvert voilà dix-huit mois et les dispositions qui seront votées seront applicables à partir du 1er janvier 2005 !

M. Augustin Bonrepaux. C'est ce qui presse !

M. le ministre délégué à l'intérieur. Nous devons dépasser le stade des polémiques politiciennes et partisanes. Ainsi, les fonctionnaires chargés de mettre en œuvre la loi auront besoin de l'automne pour rédiger les décrets d'application et pour veiller à ce que tout se déroule dans les meilleures conditions. Puisque vous évoquez notre responsabilité, monsieur Ayrault, il est de la mienne de vous dire ici très calmement et très courtoisement que, si nous avons souhaité que ce texte sur la décentralisation soit définitivement adopté à l'occasion de la session extraordinaire, c'est parce que nous sommes soucieux des intérêts de la République. Nos institutions doivent fonctionner au mieux à partir du 1er janvier 2005, grâce à des décrets d'application parfaitement préparés. J'en appelle à mon tour à votre responsabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.

M. Jean-Marc Ayrault. J'ai entendu la réponse du Gouvernement. Donc, concernant l'organisation des travaux de l'Assemblée nationale, je m'adresse à vous, monsieur le président, qui êtes soucieux de leur bon déroulement. Je souhaite que vous transmettiez officiellement au président de l'Assemblée la demande du groupe socialiste pour que notre ordre du jour soit réexaminé. Je ne demande pas la réunion d'une Conférence des présidents. Je m'exprime ici gravement, sans esprit de polémique et sans forcer le ton.

De plus, il demeure un point de droit. Vous nous demandez de prendre nos responsabilités. En allant aussi vite, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, vous vous engagez dans une impasse juridique. Selon certains contacts officieux, puisque je ne suis pas habilité à demander une consultation au Conseil constitutionnel, je crois que vous encourez un risque réel d'annulation des dispositions que vous vous apprêtez à faire voter dans la loi ordinaire. J'ai le sentiment que votre interprétation juridique n'est pas la bonne, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois ! Il n'en va pas de même des propos que j'ai tenus hier ! Les interventions, cet après-midi, de députés du groupe socialiste et du groupe UDF - MM de Courson, Dosière et Bonrepaux - sur l'autonomie fiscale des collectivités locales ont à l'évidence démontré qu'il y avait matière à débat. Certains amendements présentés par notre groupe et par nos collègues de l'UDF ont d'ailleurs failli être adoptés. Cela prouve que le problème est réel. Le Conseil constitutionnel, qui se saisira de chacun des articles de la loi organique, peut parfaitement remettre en cause un certain nombre de dispositions contraires à la Constitution. Comment examiner la loi ordinaire sans connaître au préalable la décision du Conseil constitutionnel sur la loi organique ? Il existe un lien qui ne concerne pas uniquement la loi de finances, mais également la loi sur les compétences transférées. Donc nous ne pouvons pas examiner ce sujet à la légère. Votre seul argument, c'est qu'il faut en finir, que cela suffit et que l'on a déjà assez travaillé ! Dans ces conditions, l'Assemblée nationale devient une simple chambre d'enregistrement et la majorité UMP n'a plus pour devoir que de devenir muette (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et d'adopter en l'état la version du Sénat.

M. Michel Bouvard. C'est insupportable !

M. Jean-Marc Ayrault. À quoi sert une assemblée parlementaire qui aurait démissionné de son droit d'amendement ? Ce n'est pas une question de nombre, monsieur le président de la commission des lois. Nous avons déposé à peu près le même nombre d'amendements sur le projet de loi relatif à l'assurance maladie.

M. Bernard Accoyer. C'était déjà répétitif !

M. Jean-Marc Ayrault. Nous avons pris nos responsabilités en défendant ces amendements clés, même s'ils étaient répétitifs. Cela nous a permis de débattre. Nous n'avons pas prolongé cette discussion pour le plaisir ! Chaque député a d'ailleurs reçu du président de l'Assemblée nationale une lettre de félicitations pour la qualité des travaux accomplis pendant ces trois semaines !

Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Ce n'est pas grâce à vous !

M. Jean-Marc Ayrault. Ainsi, la plus haute autorité de l'Assemblée nationale ne nous a pas condamnés pour obstruction, du fait du grand nombre d'amendements déposés, mais a salué un travail parlementaire de qualité ! Nous voulons qu'il en soit de même pour le projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales. Nous verrons si vous prenez vos responsabilités ! Nous avons pris les nôtres ! Il est essentiel que les dispositions qui seront votées le soient dans la clarté et non de façon obscure, en forçant la main de l'Assemblée nationale. Nous n'accepterons jamais de renoncer à notre droit d'amendement !

Le président du groupe UMP, M. Accoyer, a déclaré aujourd'hui dans Le Monde - et M. Bonrepaux y a fait allusion tout à l'heure - que les députés de l'opposition étaient des empêcheurs de tourner en rond avec leurs amendements et qu'une réforme de notre règlement était nécessaire. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ce n'est pas acceptable, monsieur le président du groupe UMP ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Ce sont vos amendements répétitifs qui ne sont pas acceptables !

M. Michel Bouvard. C'est vous qui avez fait reculer les droits de l'opposition en réduisant les temps de présentation des motions de procédure !

M. le président. Monsieur Bouvard !

M. Jean-Marc Ayrault. Quand vous étiez dans l'opposition, vous procédiez de la même manière pour faire valoir votre point de vue et c'était votre droit ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'était la seule façon de faire entendre votre voix dans une assemblée parlementaire ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Laissez M. Ayrault terminer son propos !

M. Jean-Marc Ayrault. Tous les Parlements qui ont vu réduire leur droit d'amendement ont été mis au pas ! Nous vivons dans une République qui ne respire déjà plus beaucoup ! (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Alors que tous les pouvoirs sont concentrés dans les mains d'un seul homme, le Président de la République, nous ne nous résignerons pas ! Vous n'empêcherez pas l'Assemblée nationale d'exister ! Vous ne ferez pas taire notre voix ! Nous sommes là pour cela et nous continuerons avec la même conviction ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Monsieur le président Ayrault, je transmettrai scrupuleusement à la fin de cette séance votre souhait au président Debré, de même que je lui dirai que notre débat s'est très bien déroulé pendant trois heures et demie.

M. Jean-Marc Ayrault. Merci, monsieur le président !

M. le président. Il y a eu une soudaine crispation vers dix-huit heures trente.

Les intervenants de l'opposition ont pu s'exprimer parfois au-delà du temps de parole qui leur était imparti.

M. Augustin Bonrepaux. Tout à fait !

M. le président. Tout s'est plutôt bien passé.

M. René Dosière. Ce n'est pas ce débat qui est en cause, c'est le suivant !

M. le président. Monsieur Dosière, par exemple, il vous est parfois arrivé d'intervenir pendant huit à neuf minutes, alors que vous n'aviez droit qu'à cinq minutes !

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour un rappel au règlement.

M. Bernard Accoyer. Je serai très bref. J'ai été mis en cause à plusieurs reprises. Je ne peux toutefois pas considérer qu'il s'agit d'un fait personnel, qui n'aurait d'ailleurs pas sa place à cet instant de notre débat. Monsieur Ayrault, la pratique qui consiste à utiliser le traitement de texte mis à la disposition des parlementaires pour reproduire à l'identique des milliers d'amendements pose un problème. Vous vous êtes permis d'évoquer l'action qu'un parlementaire de l'opposition doit conduire. Je revendique, quant à moi, de n'avoir jamais déposé systématiquement des amendements identiques à ceux de mes collègues. Quatre mille amendements identiques ont été déposés sur l'assurance maladie ; il en va de même pour le texte sur les libertés et responsabilités locales. Ce fut également le cas, l'année dernière, pour le texte relatif à la réforme des retraites. Il y a là une dérive, dont je sais qu'elle préoccupe M. Ayrault. Il faut avoir le courage de la dénoncer même si je revendique également le droit pour les parlementaires de l'opposition de s'exprimer à travers de nombreux amendements, mais à condition qu'ils soient différents et qu'ils enrichissent le débat.

M. René Dosière. Juste un mot, monsieur le président !

M. le président. Monsieur Dosière, on ne répond pas à un président de groupe et il n'y a pas de réponses à des rappels au règlement.

M. René Dosière. J'aimerais répondre au président de la commission des lois !

M. le président. Non, on répond au président de la commission des lois à l'occasion de la discussion d'un amendement. Or le président de la commission des lois est intervenu pour apporter une précision sur l'heure à laquelle se réunira la commission des lois.

Je vous propose donc, monsieur Dosière, d'intervenir sur l'amendement n° 15. Vous pourrez ainsi enrichir la défense de cet amendement par un certain nombre de considérants que vous vouliez développer dès maintenant.

Reprise de la discussion

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 15.

La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Je défendrai sur le fond l'amendement n° 16, qui est un amendement de repli, et je ne ferai que quelques remarques sur le déroulement de nos travaux en présentant l'amendement n° 15.

Monsieur le président de la commission des lois, on vient de me faire parvenir la convocation rectifiée qui annonce le report de notre réunion de commission à l'issue de la présente séance publique. L'un de nos collègues s'est rendu à dix-neuf heures dans la salle de réunion de la commission des lois pour constater qu'elle n'avait pas lieu.

J'aimerais de plus savoir, monsieur le président de la commission des lois, ce qui va advenir de nos travaux. M. Accoyer s'est en effet déclaré aujourd'hui favorable, au nom du groupe UMP, donc de la majorité politique de cette assemblée, à l'adoption du texte sur les responsabilités locales dans sa version issue de l'examen au Sénat. Or, voici quelques jours, nous avons modifié le texte du Sénat au cours d'une réunion de la commission des lois. Je voudrais donc savoir, avant de me rendre à la prochaine réunion de la commission des lois, si la majorité a décidé d'adopter ce texte en l'état, dans la version du Sénat, selon le vœu de son président, rendant ainsi inutile le travail que nous avons déjà accompli en commission.

M. Christophe Caresche. La preuve !

M. le président. Puis-je considérer que les amendements nos 15 et 16 sont défendus ?

M. René Dosière. Seulement l'amendement n° 15. Je reviendrai sur l'amendement n° 16.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Guy Geoffroy, rapporteur. L'amendement n° 15 tend à ce que les dégrèvements ou dotations accordés par l'État ne puissent « en aucun cas être considérés comme des ressources propres » au sens de l'article L.O. 1114-2 du code général des collectivités territoriales.

Il convient, je crois, de rassurer pleinement nos collègues. En ce qui concerne les dotations, les choses sont plus que claires puisqu'il a été dit de manière précise, et cela figure même dans le texte, qu'elles ne sauraient en aucun cas être considérées comme des ressources propres.

M. Bernard Accoyer et M. Jérôme Bignon. Très bien !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Quant aux dégrèvements, n'oublions pas que, pour les collectivités, ils sont totalement neutres, le contribuable national prenant la place du contribuable local pour payer le montant d'imposition fixé par la collectivité. Celle-ci assume donc bien la maîtrise de l'impôt, dont le rendement est identique, même si le versement provient, permettez-moi l'expression, d'une autre caisse.

Voilà qui est évidemment de nature à rassurer totalement nos collègues auteurs de l'amendement n° 15, ainsi que du suivant, auquel je réponds par avance. L'avis défavorable de la commission ne traduit donc pas le refus de prendre en compte une demande légitime. Seulement, l'inquiétude manifestée, bien qu'elle soit légitime, n'a aucun fondement, pour les raisons que j'ai invoquées.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. M. le rapporteur a très bien expliqué les choses. J'émets donc également un avis défavorable sur les amendements nos 15 et 16. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 15.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 16.

La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. N'ayant pas obtenu de réponse sur l'amendement n° 15, je passe au n° 16.

Bien entendu, monsieur le rapporteur, les dégrèvements, une fois compensés, constituent des ressources propres ; formellement, je ne le conteste pas. Ils seront de ce fait protégés, dès lors que le Conseil constitutionnel aura validé la notion d'autonomie financière des collectivités.

Pour la taxe d'habitation, par exemple, le montant des dégrèvements s'élève à 3 milliards d'euros,...

M. Michel Bouvard. C'est beaucoup trop !

M. René Dosière. ...et la politique qui a été suivie en la matière aboutit à la situation suivante, que je crois utile de rappeler.

Pour la moitié des contribuables soumis à la taxe d'habitation, le régime est bien connu : les collectivités votent les taux en fonction de la valeur locative de l'habitation et peuvent accorder des dégrèvements, ce qui ne pose aucun problème.

Par contre, environ un tiers de l'autre moitié des contribuables - laquelle représente tout de même 12 millions de foyers - ne paient absolument pas de taxe d'habitation, et celle acquittée par les deux autres tiers est plafonnée. Le problème, c'est que le plafonnement est calculé par rapport aux revenus : le montant payé est donc indépendant de la valeur locative et de la décision de la collectivité locale.

M. Michel Bouvard. Elles entrent en ligne de compte !

M. René Dosière. Ce sont les revenus des intéressés qui comptent, monsieur Bouvard !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Tous les revenus ne donnent pas droit au plafonnement !

M. René Dosière. Bien entendu ! Tout le monde n'y a pas droit puisque seuls la moitié des contribuables sont concernés !

Et, par ailleurs, pour cette seconde catégorie de contribuables, le taux de la taxe d'habitation est fixé nationalement, à 4,3 % des revenus.

M. Michel Piron. Tout dépend de l'assiette !

M. Michel Bouvard. Absolument !

M. le président. Monsieur Bouvard, je vous en prie !

M. René Dosière. Autrement dit, pour la moitié des contribuables, le principe et le montant des dégrèvements accordés par l'État sont tout à fait indépendants des décisions des collectivités locales.

Or il apparaît que la localisation de ces dégrèvements de taxe d'habitation aboutit, pour des raisons historiques et techniques que je ne développe pas, à une « contre-péréquation » : la politique du Gouvernement en la matière revient à annuler complètement les efforts de péréquation qu'il peut fournir en accordant d'autres dotations.

Ce système ne pourra donc pas rester en l'état ; il faudra, à un moment donné, le réformer. D'où l'intérêt de notre amendement. En effet, si le Gouvernement veut essayer de corriger la distribution des dégrèvements afin de la rendre plus conforme aux principes de péréquation et de justice, il faudra bien qu'il retire des dotations à certaines collectivités pour les redistribuer à d'autres, ce qui sera impossible si les dégrèvements entrent dans la catégorie des ressources propres. Autrement dit, si le Gouvernement veut accomplir une réforme en ce sens, il sera obligé d'y consacrer des ressources supplémentaires. Notre amendement est donc extrêmement responsable puisque la mesure qu'il contient permettra de réutiliser une partie des sommes récupérées et ainsi d'éviter d'y consacrer des moyens supplémentaires ; on sait d'ailleurs bien que, si des moyens supplémentaires sont nécessaires, aucune réforme ne pourra être menée à bien.

Voilà pourquoi le statut des dégrèvements pose un problème. Je reconnais bien volontiers qu'il n'est pas satisfaisant de considérer, comme c'est le cas dans notre amendement, que les dégrèvements ne sont pas des ressources propres. J'avais déjà soulevé le problème en première lecture. M. Fréville, au Sénat, a bien voulu reprendre mon argumentation et, toujours au Sénat, les rapporteurs ont proposé de ne pas intégrer dans les ressources propres la totalité de la fiscalité dès la première année, mais de créer une sorte d'abattement forfaitaire de l'ordre de 20 %, toujours pour donner au Gouvernement les moyens d'agir lorsqu'il voudra effectuer une réforme.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Dosière.

M. René Dosière. Très franchement, je vous le répète, aucune réforme ne sera possible.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. La position de notre collègue n'est pas défendable. Nous recherchons l'autonomie financière. Mais en quoi un dégrèvement compensé à l'euro près sur la base de l'assiette existante et du taux voté constitue-t-il une atteinte à l'autonomie financière ?

Il existe certes un cas particulier assez répandu : on commence par prononcer un dégrèvement, qui, ultérieurement, se dégrade, par exemple lorsque le taux est plafonné. Mais le différentiel s'applique alors toujours. Ainsi, même dans ce cas, aucune dégradation ne se produit réellement, contrairement à ce qu'ont affirmé certains collègues. Il est déjà arrivé qu'un dégrèvement soit gelé ; il cesse alors d'être un dégrèvement et, par conséquent, une ressource propre.

Il serait peut-être intéressant que le Gouvernement s'exprime à ce propos mais je pense, monsieur Dosière, que votre amendement est tout à fait excessif. Le problème se pose quand un dégrèvement devient une dotation - cela peut arriver -, mais il cesse alors d'être une ressource propre, à moins que le Gouvernement soit en désaccord avec mon interprétation.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 16.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié par l'amendement n° 1 rectifié.

(L'article 2, ainsi modifié, est adopté.)

Article 3

M. le président. La parole est à M. René Dosière, inscrit sur l'article.

M. René Dosière. J'avais cru comprendre, monsieur le président, que vous lèveriez la séance après l'adoption de l'article 2.

M. le président. Nous avions évoqué cette éventualité avant la demande de suspension de séance, mais nous avons précisé ensuite que nous travaillerions jusqu'à vingt heures. Mais peut-être voulez-vous renoncer à prendre la parole ?

M. René Dosière. Certainement pas ! J'ai beaucoup de choses à dire sur l'article 3, qui fait référence à la « part déterminante » des ressources. Nous avons eu, vous vous en souvenez, un long débat pour savoir ce que signifiait cette expression, mais il ne s'est pas avéré concluant puisqu'on nous a finalement indiqué que le problème était renvoyé à la loi organique, laquelle, je dois le dire, ne le résout pas de manière plus satisfaisante.

Au fond, quel est le problème ? Jusqu'à la révision constitutionnelle, lorsque vous constatiez une atteinte à l'autonomie financière des collectivités locales - je préfère, pour ma part, limiter le propos aux atteintes à l'autonomie fiscale des collectivités -, vous saisissiez le Conseil constitutionnel. Or celui-ci validait systématiquement la mesure, considérant que l'important était la libre administration des collectivités locales et que, dès lors qu'une ressource fiscale a été remplacée par une dotation, qu'elle est évolutive et que les sommes en question sont relativement limitées, il n'est pas porté atteinte à la libre administration des collectivités locales. Face à ce raisonnement, vous avez estimé que la notion de libre administration des collectivités locales était insuffisante et qu'il convenait d'inscrire dans la Constitution que les ressources propres devaient représenter une « part déterminante de l'ensemble de leurs ressources ».

Mais comment définissez-vous cette « part déterminante » ? Vous la caractérisez ainsi : elle ne remet pas en cause la libre administration des collectivités locales. Vous renvoyez donc au Conseil constitutionnel le soin d'apprécier, comme il le faisait hier, si une atteinte à l'autonomie des collectivités locales constitue une atteinte à leur libre administration !

On note un seul changement par rapport au système ancien : la notion de seuil, c'est-à-dire le ratio défini.

M. le ministre délégué à l'intérieur. C'est capital !

M. René Dosière. Non, ce n'est pas capital, monsieur le ministre. Vous allez comprendre pourquoi.

M. Guy Geoffroy, rapporteur. C'est décisif ! C'est ce qui fait la différence !

M. René Dosière. Je l'ai cru aussi pendant un temps mais, en suivant les travaux du Sénat, je me suis aperçu que ce n'était pas tout à fait le cas. Pourquoi ? Tout simplement, d'abord, parce que c'est seulement dans l'hypothèse où ce seuil ne sera pas respecté qu'on constatera une discordance avec la mesure votée. Et encore : les sénateurs font observer que, même dans cette hypothèse, le Conseil constitutionnel ne serait pas obligé de l'annuler car il pourrait parfaitement considérer que l'autonomie financière n'est pas respectée mais qu'il suffit que le Gouvernement procède à la remise à niveau prévue en l'espèce. Ce serait, disons, une interprétation douce du Conseil constitutionnel, qui peut effectivement être envisagée, même si, en principe, j'étais plutôt enclin à attendre une interprétation stricte, dure.

Quoi qu'il en soit, les cas dans lesquels on descendra au-dessous du seuil risquent d'être plutôt rares. On sera toujours au-dessus de ce seuil et, chaque fois qu'il y aura atteinte à l'autonomie des collectivités locales, le Conseil constitutionnel considérera que le principe de libre administration n'est pas en cause.

L'article 3 n'est donc qu'une tautologie et je ne vois pas où est le progrès.

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 36.

La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Cet amendement concerne un sujet que j'avais abordé au cours d'une précédente intervention : l'effet pervers qui peut résulter de l'intégration, dans le ratio des ressources des collectivités territoriales, des dotations de péréquation qui sont en fait incluses dans la DGF.

En effet, lorsque les ressources propres sont insuffisantes, que la part déterminante n'est pas atteinte, prendre en compte les dotations de péréquation aurait pour effet - puisque la dotation de péréquation dans la DGF serait augmentée - de réduire la part déterminante des ressources propres. C'est exactement l'inverse de ce qui est recherché.

L'objet de cet amendement est donc d'exclure du ratio des ressources des collectivités la part de péréquation qui est comprise dans la DGF.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Guy Geoffroy, rapporteur. L'amendement n° 36 et les suivants relèvent de la même philosophie.

M. René Dosière. Mais les suivants n'ont pas encore été défendus !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. L'auteur de l'amendement propose de soustraire de l'ensemble des ressources - nous nous situons au dénominateur du ratio - celles qui proviennent de dotations de péréquation.

Je ferai d'abord une remarque générale qui me permettra d'évoquer le propos de M. Dosière sur l'article. Contrairement à ce qu'il a prétendu, l'article 3 n'est pas neutre. S'il existe - pardonnez cette réflexion simpliste -, c'est parce que nous avons adopté auparavant l'article 2. Qu'on l'approuve ou non, il existe ! C'est dans cette optique que l'article 3 prend tout son sens.

L'article 2 définit en effet tout ce qui, revenant aux collectivités, constitue le numérateur de la fraction représentative du ratio d'autonomie financière. Que devons-nous trouver au dénominateur ? Tout le reste !

M. le ministre délégué à l'intérieur. Exactement !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Sauf, et l'article 3, dans son premier alinéa, le précise bien, tout ce qui, par nature, ne saurait être considéré comme une ressource régulière ou susceptible de l'être dans le financement de la collectivité territoriale : emprunts, ressources correspondant au financement par l'État de compétences transférées à titre expérimental ou mises en œuvre par délégation, transferts financiers entre collectivités d'une même catégorie. Il s'agit d'éviter là les doubles comptes.

Si nous acceptions la logique du présent amendement - et des autres -, nous aurions une catégorie de sommes entrant dans le financement des activités gérées par les collectivités, qui ne seraient ni des ressources propres au sens de l'article 2, ni un des éléments constitutifs « de l'ensemble des ressources » de la collectivité. Certes, ce n'était pas l'objectif de l'amendement, mais c'est absurde !

Au surplus, l'article tel qu'il est rédigé ne présente aucun danger : il est bien clair que les dotations de péréquation existent, que les collectivités en ont bien besoin et qu'elles font partie de leurs ressources.

L'adoption de l'amendement aurait d'ailleurs une conséquence surprenante : par diminution du dénominateur, le ratio se trouverait augmenté ! Et nous nous trouverions, artificiellement, dans la situation de devoir opérer, par le biais du dispositif de l'article 4, une rectification !

La loi tend à faire en sorte que le ratio soit maintenu et, pourquoi pas - du moins on peut l'espérer -, augmenté du fait que les ressources propres seraient maintenues à leur niveau constaté en 2003 par rapport à un total constaté la même année, voire améliorées.

De surcroît, me référant - une fois de plus - au texte fondateur de nos débats, à savoir l'article 72-2 de la Constitution, je note qu'il évoque, dans son troisième alinéa, l'objet même de la loi organique, c'est-à-dire la part déterminante, et qu'il s'agit bien de la part déterminante « de l'ensemble » de leurs ressources.

Puisque les dotations de péréquation font partie des recettes, donc des ressources des collectivités, elles doivent bien figurer au dénominateur au sein « de l'ensemble des ressources ». Elles ne peuvent pas en être exclues et se trouver en quelque sorte en « apesanteur », dans je ne sais quelle catégorie, et ne jouer par conséquent aucun rôle dans la détermination de la part déterminante et donc du ratio d'autonomie financière.

Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Comme M. Geoffroy, qui a été fort clair, je suis défavorable à l'amendement de M. Chassaigne. Je me souviens d'ailleurs très bien de cette discussion en première lecture.

Je ne vois pas quelles raisons on pourrait invoquer pour réduire le dénominateur - c'est-à-dire la totalité des ressources - relatif au calcul du taux d'autonomie financière. A fortiori, pourquoi exclure les dotations de péréquation plutôt que d'autres ? Cela ne peut que rendre la loi moins lisible. Même si chacune a sa vocation propre, une dotation est une dotation. Je ne comprends pas ce qui justifierait un « sous-ensemble ».

Si votre amendement signifie que vous souhaitez une réflexion globale sur la péréquation, sachez que nous l'aurons de toute façon, mais pas dans le cadre de la discussion sur l'autonomie financière.

Voilà pourquoi j'émets un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Monsieur le rapporteur, je comprends l'effet qu'aurait l'amendement de M. Chassaigne sur le ratio d'une collectivité, dès lors qu'elle bénéficierait de ces dotations de péréquation et que celles-ci seraient ou ne seraient pas comptabilisées. Mais comme le ratio sera calculé non pas collectivité par collectivité, mais par ensemble de collectivités, qu'une commune particulière voie son ratio évoluer dans tel sens ou dans tel autre, à la suite de telle ou telle décision, n'a aucun effet pratique sur l'autonomie financière. Cela ne modifiera pas la moyenne de l'ensemble des collectivités.

En revanche, et c'est pour cela que nous souhaitions tout à l'heure que soit évoquée la notion de péréquation dans le cadre de l'autonomie financière des collectivités, il peut arriver que le mode de distribution de ce type de dotation conduise le Conseil constitutionnel à considérer - puisque cela va modifier les recettes propres des collectivités, sans pour autant d'ailleurs toucher au ratio qui restera de toute façon supérieur à la moyenne nationale - qu'il y a atteinte à l'autonomie des collectivités locales.

L'objet de cet amendement, comme de ceux que nous allons défendre, est bien d'éviter ce travers.

S'agissant des dotations de péréquation, vous parlez de « dotations définitives ». Mais ce n'est pas sûr, car des collectivités peuvent en bénéficier un temps en raison d'une situation financière difficile, puis ne plus en bénéficier : ainsi, toutes les collectivités qui perçoivent la DSU ne la perçoivent pas éternellement ! Il n'est pas de collectivité - heureusement ! - qui soit « abonnée » pour l'éternité à des ressources de péréquation ! Toujours est-il que l'objet de l'amendement est bien de favoriser ce que le Gouvernement souhaite faire en matière de distribution de la péréquation.

Si, dès maintenant, on bloque toutes les possibilités d'évolution, il ne faudra pas s'étonner que le Conseil constitutionnel censure des dispositions relatives à la péréquation dans une loi ordinaire.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je précise que notre amendement s'appuie sur une demande du bureau de l'Association des maires de France, en date du 22 janvier, qui souhaitait neutraliser dans le calcul du ratio les crédits versés au titre de la péréquation. L'AMF considère que, en maintenant les dotations de péréquation, leurs perspectives d'être augmentées seraient limitées dans la mesure où cette augmentation réduirait la part déterminante des ressources propres et donc l'autonomie financière. Il fallait éviter cet effet pervers.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 36.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 17.

La parole est à M. René Dosière, pour le soutenir, ainsi que l'amendement n° 18, s'il veut bien.

M. René Dosière. Volontiers, monsieur le président, car ils visent tous deux à permettre une politique ambitieuse de péréquation. En effet, si nous ne doutons pas de la volonté du Gouvernement de la mener, ne serait-ce que parce que la Constitution lui en fait obligation, nous regrettons qu'il le fasse par le biais d'une loi ordinaire, dont on ne sait pas quand elle sera examinée.

Je tiens à le dire à mes collègues de la majorité, qui se moquent parfois de notre attitude, l'expérience - la nôtre, comme la leur - nous apprend à apprécier la difficulté de certains exercices. Nous en tirons les leçons et, dès lors que nous sommes dans l'opposition, nous pouvons émettre des propositions évitant de retomber dans les mêmes errements.

Or la péréquation, et M. le président de séance est bien placé pour le savoir, consiste à distribuer un peu plus à certaines collectivités et, par conséquent, un peu moins à d'autres. Dans un tel système, toutes les collectivités considèrent qu'elles doivent recevoir plus parce qu'elles ont toutes des charges.

Nous savons tous la difficulté d'opérer une péréquation verticale, chère à nos amis, et particulièrement à M. Piron.

M. Michel Piron. Vous oubliez la péréquation diagonale !

M. René Dosière. Mais la péréquation horizontale, que je préfère personnellement, est encore plus difficile à mettre en œuvre, puisqu'il s'agit de prendre à certaines collectivités pour redistribuer à d'autres.

Monsieur le président, vous avez bénéficié d'une péréquation horizontale. Mais, hormis la ville de Paris qui a « accepté » d'être perdante, contrainte et forcée,...

M. Christophe Caresche. Elle n'avait pas le choix !

M. René Dosière. ...toutes les autres collectivités déclarent ne pas pouvoir supporter de charge supplémentaire et ne pas disposer de la richesse qu'on leur suppose, ce qui fait qu'on ne trouve plus aucune collectivité favorisée.

La péréquation est donc un exercice difficile, bien plus encore dans la majorité puisqu'on dispose du pouvoir politique et qu'il faut trancher.

M. Michel Piron. C'est le principe de responsabilité !

M. René Dosière. Elle est plus facile à exercer dans l'opposition, parce que les idées sont plus simples à exprimer. Voilà pourquoi nous souhaitons vous aider à améliorer le processus de la péréquation...

M. Michel Piron. J'en doute !

M. René Dosière. ...en vous donnant les éléments qui vous aideront à prendre les mesures courageuses qui s'imposent en cette matière.

Tel est l'objet de ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Les amendements nos 17 et 18 sont très proches, le second étant de repli.

La commission émet un avis défavorable à ces deux amendements pour les mêmes raisons que celles évoquées précédemment à propos de l'amendement présenté par M. Chassaigne.

Cela étant, M. Dosière a raison : aucune dotation de péréquation n'est accordée de manière permanente et irréversible.

M. René Dosière. Je vous remercie de le reconnaître, monsieur le rapporteur !

M. Guy Geoffroy, rapporteur. Nous constatons d'ailleurs chaque année que des collectivités glissent d'une catégorie bénéficiaire à une catégorie non bénéficiaire en fonction de l'évolution de leurs ressources.

On connaît les classements des communes en matière de DSU : je pense notamment au fonds de solidarité de la région Ile-de-France où l'on constate des glissements d'une année à l'autre. De la même façon, la commune dont je suis maire est, en fonction d'un certain nombre de critères, plus ou moins bien traitée.

Il n'en reste pas moins que le montant global des dotations de péréquation, notamment celui de la DSU, ne diminue pas. Seule sa répartition est modifiée. On a donc tout intérêt, comme je l'ai déjà dit, à ne pas retirer du dénominateur celles des ressources provenant de la péréquation.

M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 17, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l'intérieur. Si ces deux amendements sont proches l'un de l'autre, ils le sont aussi de l'amendement n° 36 qui a été présenté tout à l'heure par M. Chassaigne...

M. René Dosière. Cela ne devrait pas vous surprendre !

M. le ministre délégué à l'intérieur. Non, mais j'émets des réserves sur l'idée d'exclure du dénominateur les ressources que vous visez.

M. René Dosière. En d'autres termes, vous y êtes opposé !

M. le ministre délégué à l'intérieur. Si vous vous livrez à ce type d'exercice, vous allez fausser complètement la donne. Et ce serait dommage, car l'intérêt est précisément d'avoir une vision globale des ressources des collectivités.

C'est pourquoi nous avons réduit au strict minimum ce qui devait être exclu. Par exemple, pour éviter les doubles comptes, nous avons exclu les transferts financiers entre EPCI et communes. Pour le reste, je préfère que nous respections les termes de notre proposition initiale.

Voilà pourquoi j'émets un avis défavorable à ces deux amendements.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je vais mettre aux voix l'amendement n° 17.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

...............................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 39

                    Nombre de suffrages exprimés 39

                    Majorité absolue 20

        Pour l'adoption 9

        Contre 30

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Puis-je considérer, monsieur Dosière, que vous avez déjà défendu l'amendement n° 18 ?

M. René Dosière. Oui, monsieur le président, bien que je ne sois ni satisfait ni convaincu par la réponse du ministre. Mais puisque vous avez la majorité, je m'incline, même si j'ai le sentiment d'avoir raison sur le plan juridique.

M. Pascal Clément, président de la commission des lois. Vous en avez le droit !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 18.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    2

ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Ce soir, à vingt-deux heures, troisième séance publique :

Suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi organique, n° 1638, pris en application de l'article 72-2 de la Constitution relatif à l'autonomie financière des collectivités territoriales :

Rapport, n° 1674, de M. Guy Geoffroy, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, n° 1711, relatif aux libertés et responsabilités locales :

Rapport, n° 1733, de M. Alain Gest, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures dix.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot