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Deuxième séance du mardi 10 février 2004

156e séance de la session ordinaire 2003-2004



PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par une question du groupe de l'Union pour un mouvement populaire

BAISSE DU TAUX DE LA TVA SUR LA RESTAURATION

M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, chacun sait que la baisse de la TVA appliquée à la restauration est une mesure nécessaire et indispensable pour notre économie. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.)

Les professionnels et les organisations syndicales du secteur sont nombreux à réclamer, depuis longtemps, cette réduction, et ce à juste titre.

M. Albert Facon. Clientélisme !

M. Thierry Mariani. Les mérites d'une telle mesure sont connus. Dans ce secteur, déjà touché par les effets d'une conjoncture économique défavorable, la mise en place des 35 heures est plus que problématique et a un effet néfaste sur les salaires. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Cette baisse de la TVA permettrait de revoir les salaires à la hausse.

Par ailleurs, monsieur le Premier ministre, on peut légitimement s'attendre à ce que cette diminution des charges débouche sur la création de nombreux emplois, confortant ainsi la position du secteur de la restauration, et le plaçant parmi l'un des principaux employeurs de France.

Chacun sait, monsieur le Premier ministre, que depuis votre arrivée au gouvernement en juin 2002, vous ne ménagez pas vos efforts pour faire avancer cette question. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

La baisse de la TVA sur la restauration a été un engagement fort de notre majorité. (Mêmes mouvements.) Elle correspond aujourd'hui, contrairement aux années passées, à une volonté forte du Gouvernement. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Il s'agit, monsieur le Premier ministre, d'une question où la France ne pourra toutefois, nous le savons, être seule à décider. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Il faudra convaincre les Etats européens réticents sur ce sujet. C'est en tout cas ce qu'a montré le rapport récent de la Délégation pour l'Union européenne de notre assemblée.

Monsieur le Premier ministre, où en est le Gouvernement en ce qui concerne la baisse de la TVA dans la restauration ?

Selon quel calendrier notre engagement pourra-t-il être tenu ?

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur Mariani, vous vous battez depuis longtemps sur ce sujet, puisque je me souviens qu'en 1995 - 1996, vous étiez déjà très préoccupé par cette question. Mais durant les cinq ans qui ont suivi, ce sujet n'a pas avancé. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Je tiens à vous apporter des réponses claires et précises.

M. Albert Facon. Ce n'est pas brillant !

M. le Premier ministre. Je suis, monsieur Mariani, déçu et déterminé.

Je suis déçu par l'attitude du gouvernement allemand, qui doit garder une vision équilibrée de notre amitié. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Je le dis avec sympathie et confiance, mais aussi avec fermeté.

Je suis déterminé, parce que la baisse de la TVA est une demande légitime. (« Camelot ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Nous sommes victimes de la règle de la décision à l'unanimité en matière de TVA. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) C'est d'ailleurs pour cela que nous proposons, dans le traité constitutionnel, que cette règle de l'unanimité ne vaille pas en matière fiscale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Nous avons obtenu que la Commission défende notre position. Je pense que nous avons quelques chances d'obtenir satisfaction. (« Ce n'est pas vrai ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Mais comme je l'ai dit - et je tiens mon engagement - nous prenons des mesures franco-françaises pour faire face à cette situation européenne, qui ne nous satisfait pas.

J'ai donc le plaisir de vous annoncer que je débloque, dès aujourd'hui, 1,5 milliard d'euros pour les dix-huit mois qui viennent, afin de mettre en place un plan national d'allégement massif des charges des restaurateurs, dans l'attente d'obtenir la baisse de la TVA, une baisse que nous obtiendrons ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.-Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. François Hollande. Avec quel argent ?

M. le Premier ministre. J'ai téléphoné aux professionnels. J'ai discuté avec M. Daguin que je recevrai, jeudi matin, à l'hôtel Matignon, pour fixer avec lui les modalités d'application de ce plan. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.- Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Je trouve assez significatif que la moitié de l'Assemblée se réjouisse de cet effort en faveur des restaurateurs, c'est-à-dire pour l'emploi et nos territoires, tandis que l'autre moitié, manifeste à nouveau son désintérêt pour ce sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.- Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

INDEPENDANCE DE LA JUSTICE

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Guigou, pour le groupe socialiste.

Mme Élisabeth Guigou. Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux.

Selon le journal Le Monde daté du 10 février, Dominique Perben a indiqué dimanche : que « la Chancellerie analyse le jugement prononcé par le tribunal de Nanterre contre Alain Juppé pour vérifier si le remboursement des sommes dues à la ville de Paris peut modifier la situation judiciaire du président de l'UMP. Une étude est en cours - a affirmé le garde des sceaux - pour voir quelles seraient les conséquences judiciaires de ce remboursement. » (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Vous avez, monsieur le garde des sceaux, démenti les affirmations selon lesquelles une étude serait en cours à la Chancellerie. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mais les deux journalistes du Monde qui vous ont interrogé dimanche maintiennent leur version.

Il est impératif d'y voir clair, car il serait scandaleux que la Chancellerie puisse travailler pour le compte d'un justiciable, quel qu'il soit.

De plus, cette controverse vient après les déclarations de ministres en exercice et même du Premier ministre qui, comme l'a souligné à juste titre notre collègue Roger-Gérard Schwartzenberg, cherche à jeter le discrédit sur le jugement dans des conditions - je cite le code pénal - « de nature à porter atteinte à l'autorité de la justice ou à son indépendance. » (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Enfin, le Conseil supérieur de la magistrature n'a toujours pas été saisi, alors qu'il est, selon notre Constitution, garant de l'indépendance de la justice.

J'ai trois questions à vous poser, monsieur le garde des sceaux.

Premièrement, avez-vous tenu les propos que vous prête le journal Le Monde et qui feraient - si c'était le cas - de la Chancellerie une succursale du cabinet d'avocat de M. Juppé ? (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Deuxièmement, avez-vous donné des instructions au procureur de Nanterre, dans cette affaire, et comptez-vous donner des instructions au procureur général, qui va requérir devant la Cour d'appel, chargée de statuer dans quelques mois ?

Troisièmement, le Président de la République va-t-il saisir le Conseil supérieur de la magistrature, seul organe habilité par la Constitution à statuer sur les atteintes à l'indépendance des juges ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame le ministre, vous souvenez-vous d'une déclaration d'une personnalité politique en 1996 ?

Mme Martine David. On vous demande de répondre à la question !

M. le garde des sceaux. Il est important de se souvenir de tout !

Cette personnalité déclarait en 1996 : « Une telle décision de justice est inique. » Il s'agissait de M. Jospin ! (Exclamations et huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.- Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Je pense qu'il n'est pas inutile de s'en souvenir, puisque vous avez parlé des déclarations de tel ou tel.

Vous m'avez posé trois questions. Je vais y répondre de façon très précise.

Je démens formellement les déclarations qui ont été rapportées par Le Monde hier après-midi.

Mme Martine David. Les journalistes sont-ils des menteurs ?

M. le garde des sceaux. D'ailleurs, cette conversation, rapportée d'une manière totalement erronée, a été entendue par un autre journaliste qui dit le contraire.

M. Patrick Lemasle. Non !

M. le garde des sceaux. Renseignez-vous !

Deuxièmement, madame - et vous le savez - je n'ai bien entendu donné aucune instruction à quelque procureur que ce soit dans cette affaire, conformément à la position que j'ai adoptée constamment, depuis un an et demi.

Quant au Conseil supérieur de la magistrature et à la commission d'enquête administrative, je voudrais que les choses soient tout à fait claires. La situation qui a été créée par une information, publiée le samedi 31 janvier, est d'une extrême gravité, puisqu'elle suppose que des pressions auraient été exercées sur un tribunal. Cette gravité a entraîné deux décisions du Gouvernement. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) S'il vous plaît ! La chose est suffisamment grave pour qu'on en parle sérieusement !

Mme Martine David. Oui !

M. le garde des sceaux. D'une part, dès dix heures du matin le samedi, soit le jour même, j'ai demandé au procureur de la République qu'il fasse en sorte qu'une information soit ouverte, le plus rapidement possible, pour évoquer l'aspect pénal du dossier.

D'autre part, le dimanche, en plein accord avec le Président de la République, le Gouvernement a décidé de confier à trois personnalités incontestables : le vice-président du Conseil d'Etat, le Premier président de la Cour de cassation et le Premier président de la Cour des comptes...

M. François Hollande. Pourquoi pas le Conseil de la magistrature ?

M. le garde des sceaux. ...une enquête administrative pour traiter de l'ensemble des questions susceptibles de se poser...

M. François Hollande. Ce n'est pas la bonne instance !

M. le garde des sceaux. ...tant en matière d'organisation administrative que de fonctionnement des services.

Il a été clairement indiqué que, si cette enquête mettait en cause d'une façon ou d'une autre tel ou tel magistrat ou tel ou tel élément de l'organisation de la magistrature, le Conseil supérieur de la magistrature serait saisi.

Ces trois personnalités incontestables informeront le Conseil supérieur de la magistrature qui sera saisi, si nécessaire.

Mme Martine David. C'est incroyable !

M. le garde des sceaux. Voilà, madame Guigou, une réponse à vos trois questions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.- Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

BAISSE DU TAUX DE LA TVA SUR LA RESTAURATION

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le Premier ministre, je reviens sur la question de la baisse du taux de la TVA appliquée à la restauration. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Le Président de la République l'avait promise. Le Gouvernement s'était engagé à réduire le taux de TVA de 19,6 % à 5,5 % et nos restaurateurs y comptaient.

Le Président de la République a reconnu, hier, que cette décision ne pourrait être mise en œuvre ni à court terme ni à moyen terme. Vous avez dit, monsieur le Premier ministre, que l'on touchait là aux limites de la démocratie européenne, qui exige que les décisions soient prises à l'unanimité.

L'émotion dans les régions de vieille tradition gastronomique, comme l'Aquitaine, est très forte. La déception des restaurateurs est grande.

Les entrepreneurs de ce secteur, confrontés à de réelles difficultés de main-d'œuvre, ainsi qu'à la concurrence de la restauration rapide qui bénéficie, elle, de manière incompréhensible, du taux de TVA réduit attendaient cette décision, pour retrouver une vraie marge de manœuvre, pour investir, embaucher et améliorer les conditions de travail et les salaires de leur personnel.

Aujourd'hui, ces professionnels sont à la fois meurtris, parce que la parole donnée ne pourra pas être tenue, et accablés (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) parce qu'ils voient leur projet d'entreprise réduit.

Malgré le refus de l'Allemagne, le groupe Union pour la démocratie française n'estime pas concevable d'abandonner le secteur de la restauration.

Concrètement, monsieur le Premier ministre, vous venez d'annoncer un plan national de 1,5 milliard d'euros mis en œuvre sur dix-huit mois. Quelle compensation précise proposez-vous aux restaurateurs ? Quelle baisse de charges salariales envisagez-vous ? Quel calendrier allez-vous établir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.


M. Alain Lambert,
ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le député, l'application du taux réduit de TVA à la restauration est une nécessité. C'est une bonne décision.

M. François Hollande. Ce n'est pas une décision : rien n'a été fait !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Nous nous sommes battus et nous battrons encore pour l'obtenir ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.- Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

C'est bon pour l'emploi. C'est bon pour les activités. C'est bon pour nos territoires. Cela permet de réduire les inégalités entre les différents secteurs de la restauration, et plus encore, depuis que vous avez semé la pagaille avec les 35 heures ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.- Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. François Hollande. Si c'est tellement bien, décidez-le !

M. le président. Monsieur Hollande !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Le Premier ministre vient de vous indiquer que l'unanimité n'a pu être réunie sur cette proposition, mais qu'il prendrait des mesures alternatives pour y parvenir...

M. François Hollande. Avec quel argent ?

M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ...et que la concertation s'engagerait, dès jeudi prochain, avec les professionnels du secteur. Ainsi, mesdames et messieurs, nous nous serons, ensemble, battus pour l'emploi, pour nos activités, pour nos territoires et nous aurons réparé les dégâts du passé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.- Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

AIDE AUX MÈRES

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. André Chassaigne. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

J'espère d'abord, monsieur le Premier ministre, que vous rendrez aux laissés-pour-compte de l'allocation spécifique de solidarité les milliards que vous leur volez pour vos annonces électoralistes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur de nombreux bancs du groupe socialiste.- Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Il ne fait pas bon d'être chômeur ou mère de famille sous ce gouvernement. Je ne parle pas, bien entendu, des plus aisées, mais de celles, qui apprennent jour après jour qu'entre la maternité et des conditions de vie décente, il va falloir désormais choisir.

Heureusement, toutes ces femmes résistent. Avec de nombreuses organisations, nous avons relayé leurs revendications - je devrais dire leur révolte - pour infléchir vos positions régressives sur des droits si chèrement acquis.

Certes, le congé de maternité des intermittentes est peut-être sauvé. C'est en tout cas ce qu'a semblé indiquer M. le ministre de la culture dans une lettre adressée au président de l'UNEDIC. Certes, le cumul entre l'allocation de parent isolé et la prestation d'accueil du jeune enfant est peut-être maintenu, si l'on se réfère au décret qui devrait être présenté, aujourd'hui, au conseil d'administration de la CNAF.

Les mères célibataires les plus précaires pourront ainsi se passer des « Restos du cœur » pour nourrir leur bébé et éviter de grossir le million et demi de foyers en situation de surendettement. Mais, ce n'est pas tout : les mères les plus âgées, celles qui auraient dû bénéficier d'un départ anticipé à la retraite ne peuvent même pas faire valoir toute la durée de majoration pour enfants et toutes les périodes passées en congé de maternité.

Les petits-enfants attendront encore un peu plus que mamie quitte l'usine ou le bureau.

M. Lucien Degauchy. Bla bla !

M. André Chassaigne. Si, comme vous l'affirmez, la famille reste une priorité pour votre gouvernement, le droit à une maternité libérée de toutes les contraintes sociales est un acquis que vous avez le devoir de préserver. (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Aussi, monsieur le Premier ministre, pour chacune de ces trois catégories de mères, quelles mesures concrètes, c'est-à-dire réglementaires, votre gouvernement entend-il prendre afin de remédier aux atteintes incessantes au principe fondamental de l'égalité entre les hommes et les femmes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle.

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Si, depuis vingt ans, les femmes avaient bénéficié d'un réel accès au droit, à l'emploi, aux carrières et par là même aux revenus, vous seriez sans doute plus autorisé, monsieur le député, à prendre un ton polémique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Alors que le Gouvernement engage toutes ses forces en faveur de l'égalité professionnelle, sans aucun esprit de polémique, ce ton n'est pas de mise.

Sur la première interrogation intéressant les congés de maternité des femmes salariées intermittentes, oui, Jean-Jacques Aillagon et moi-même avons demandé aux partenaires sociaux de préciser la situation pour répondre aux éventuelles inquiétudes. Vous l'avez dit vous-même, ces femmes verront préserver l'intégralité de leurs droits au titre de l'assurance chômage.

S'agissant de l'allocation parent isolé, et vous l'avez aussi reconnu, le ministre Christian Jacob a procédé devant le conseil d'administration de la CNAF, à la clarification qui s'imposait, dans l'esprit de favoriser le cumul des prestations pour les femmes bénéficiaires de l'allocation de parent isolé avec les autres allocations liées à la PAJE.

Quant au départ en retraite anticipée, merci d'avoir rappelé que c'est notre Gouvernement qui a permis à des centaines de milliers de travailleurs, hommes et femmes, de partir avec une retraite anticipée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.- Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Je tiens aussi à vous dire que les majorations de durée d'assurance seront effectivement prises en compte. Elles permettront aux femmes qui ont élevé des enfants de disposer à soixante ans de trimestres supplémentaires, mais cela ne gomme pas la distinction qui existe entre les périodes validées et les périodes cotisées.

Ce qui est essentiel, monsieur le député, ce sont autant les carrières que les retraites. C'est en effet l'égalité professionnelle qui fera progresser les droits des femmes dans notre pays. C'est ce qu'elles attendent et c'est ce que nous allons leur apporter ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

LUTTE CONTRE L'IMMIGRATION CLANDESTINE

M. le président. La parole est à M. Didier Quentin, pour le groupe de l'UMP.

M. Didier Quentin. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

L'immigration clandestine est sans doute l'un des problèmes les plus graves auxquels notre société est confrontée. Dès sa nomination, le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin s'est engagé à repenser la politique de l'immigration en France en posant clairement, sans hypocrisie et sans laxisme, toutes les questions liées à l'immigration.

Dans cet esprit, il a élaboré une politique globale qui vise à lutter contre l'immigration clandestine et à régler la question des sans-papiers, mais qui s'attache aussi à définir une véritable politique d'intégration.

Monsieur le ministre, nous avons adopté votre projet de loi sur la maîtrise de l'immigration et le séjour des étrangers en France, en octobre dernier, et la loi de votre collègue des affaires étrangères relative au droit d'asile en novembre.

Parallèlement, vous avez, au niveau international, relancé une active politique de coopération avec nos voisins européens. Ainsi, à titre d'exemple, en collaboration avec la Grande-Bretagne, vous avez permis la fermeture du centre de réfugiés de Sangatte.

Par ailleurs, soucieux du devenir des ressortissants étrangers n'ayant pas vocation à rester en France, le Gouvernement a mis en œuvre des accords bilatéraux pour assurer leur retour au pays d'origine dans de bonnes conditions.

Aussi, monsieur le ministre, après plusieurs mois d'application des mesures que nous avons votées, pouvez-vous nous dresser un premier bilan de votre action en matière d'immigration et, en particulier, de lutte contre l'immigration clandestine ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Christian Bataille. Allô Sarko !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La règle est simple, monsieur le député. Quand on a des papiers, on est le bienvenu. Quand on a des faux papiers ou pas de papiers du tout, on est renvoyé chez soi.

Pourquoi le système d'intégration à la française connaît-il toutes ces difficultés ? Parce qu'à partir du moment où la France était le seul pays à ne pas décider de qui entrait sur son territoire et de qui devait en sortir, les premières victimes étaient les étrangers en situation régulière, victimes d'un amalgame.

M. Yves Fromion. En effet !

M. Lucien Degauchy. Merci, la gauche ! Merci, monsieur Vaillant !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. On ne peut pas accueillir et intégrer tout le monde. Et comme plus rien n'était contrôlé, tout le monde souffrait.

M. Yves Fromion. Tout à fait !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Nous avons donc engagé une politique d'intégration pour ceux qui sont en situation régulière et une politique d'éloignement systématique pour ceux qui n'ont pas de papiers.

Nous disposons des chiffres du mois de janvier 2004. Par rapport aux chiffres de janvier 2003, on note 36 % d'éloignement d'étrangers en situation irrégulière de plus. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Cela veut dire que, désormais, la loi est appliquée en France !

Dans le même temps, nous aurons 25 % de places supplémentaires en centres de rétention au mois de mars, et 50 % de places en plus au mois de juin. Car à partir du moment où les clandestins restent plus longtemps dans les centres de rétention, ils doivent y être accueillis avec humanité et dans des conditions de confort dignes de la République française.

Vous le voyez, monsieur Quentin, nous voulons l'efficacité : ceux qui n'ont pas de papiers seront raccompagnés. Nous voulons aussi la générosité : ceux qui ont des papiers seront accueillis dans le respect des droits de l'homme. Telle est la réponse du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur de nombreux bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

ASSURANCE MALADIE

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Rolland, pour le groupe UMP.

M. Jean-Marie Rolland. Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

La modernisation de notre assurance maladie constitue l'un des chantiers prioritaires de l'action gouvernementale dans les prochains mois. Pour y parvenir, le Gouvernement a choisi de procéder en trois étapes, une phase de concertation d'abord, puis une phase de propositions avec la présentation d'un premier texte d'orientation qui servira de base à la troisième phase, celle de la négociation.

Vous avez, monsieur le ministre, hier, lancé la phase de concertation en recevant soixante délégations représentant les partenaires sociaux, les professions de santé, les usagers et les mutuelles.

Pouvez-vous aujourd'hui, monsieur le ministre, faire, devant la représentation nationale, un premier bilan de cette rencontre en précisant la méthode de travail qui a été retenue ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille, et des personnes handicapées.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Lorsque le Premier ministre a installé le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, il a fixé un calendrier précis. La première phase s'est achevée le 23 janvier, avec la remise d'un rapport consensuel, juste et équilibré, fondé sur un diagnostic partagé par l'ensemble des partenaires.

Hier, a commencé la deuxième phase, celle du dialogue, de la concertation et de la négociation. Cela m'a permis, monsieur le député, de rappeler les valeurs fondatrices de notre sécurité sociale, valeurs sur lesquelles le Gouvernement souhaite refonder notre assurance maladie qui en a besoin.

Par là, j'entends une assurance maladie obligatoire et universelle ; une assurance maladie juste et solidaire ; une assurance maladie qui permette l'égalité d'accès aux soins, basée sur la qualité des soins ; une assurance maladie gérée sans étatisation ni privatisation et dont la viabilité financière garantira la pérennité.

Quant à la méthode de travail, elle est simple. Je rencontrerai personnellement chacune des cinquante-sept délégations, une fois, deux fois, voire trois fois selon les besoins. Et, dans le même temps, huit groupes de travail s'attacheront à décliner les deux principaux leviers d'action que sont la réorganisation de notre offre de soins et la modulation des prises en charge.

Monsieur le député, le Gouvernement n'a qu'une obsession : toujours mieux soigner ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

CRISES AGRICOLES

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Drian, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Yves Le Drian. S'agissant du taux réduit de TVA appliquée à la restauration, nous mesurons la difficulté du Premier ministre pour corriger les erreurs de M. Juppé, (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) qui, en 1995, avait fait passer la TVA de 18,6 % à 20,6 %, et plus encore de respecter les promesses de M. Chirac qui avait proposé de l'abaisser à 5,5 %, cela, tout en ne se fâchant pas avec les restaurateurs et en essayant de préserver notre amitié avec l'Allemagne. Je vous souhaite bon courage et beaucoup de plaisir, monsieur le Premier ministre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Quant à ma question, elle s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales

Après la crise des secteurs de la viande porcine et de la volaille, voici maintenant la crise du lait en attendant celle des légumes. De nombreux facteurs conjoncturels expliquent les difficultés qui touchent particulièrement les régions de l'Ouest et la Bretagne en particulier, comme le cours de l'euro, la crise de Parmalat ou le virus de la grippe aviaire. Mais il y a aussi des causes structurelles, en particulier l'insuffisante restructuration des filières agricoles françaises, l'abandon, par vos soins, des contrats territoriaux d'exploitation (« Heureusement ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et l'application très tardive des contrats d'agriculture durable que vous aviez proposés.


Après un nouvel échec des négociations sur le lait, vous avez pris l'initiative d'organiser une table ronde ministérielle. Quelles actions entendez-vous conduire pour opérer le nécessaire rééquilibrage entre producteurs et agro-industriels, afin d'enrayer une baisse des prix d'autant plus anormale qu'elle n'est plus imposée par la politique agricole commune ?

Après les déclarations du commissaire Fischler sur la régionalisation des aides dans le cadre de la réforme de la PAC, avez-vous l'intention de vous engager rapidement dans cette voie, car il y a urgence à trancher ?

Enfin, monsieur le ministre, face à toutes ces crises, vos marges de manœuvre sont faibles, mais elles existent. Est-ce qu'il ne serait pas temps de fixer les grandes lignes de votre future loi de modernisation agricole ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur le ministre Le Drian, il est vrai que, depuis quarante ans, beaucoup des productions de la première région agricole française qu'est la Bretagne ne sont pas concernées par les organisations communes de marché. Il nous faut donc conduire à la fois une politique conjoncturelle et une politique structurelle. C'est ce que nous avons fait depuis vingt mois.

Ainsi, pour le porc, nous avons obtenu, le 23 janvier dernier, des mesures conjoncturelles concernant les restitutions aux exportations et nous avons lancé un plan de modernisation de la filière doté de 15 millions d'euros. De même, pour la volaille nous avons obtenu l'arrêt des importations sauvages de viandes saumurées qui faisaient l'objet d'un détournement de trafic et mis en place un plan de 9 millions d'euros, au bénéfice tant de l'amont que de l'aval de la filière. Pour les légumes, notamment le chou-fleur, nous sommes en discussion avec la Commission pour faire jouer les mécanismes de gestion de crise que nous avons obtenus dans le compromis de Luxembourg du 26 juin dernier.

Reste le lait. Vous le savez, l'accord interprofessionnel sur les prix conclu en 1997 a été dénoncé le 31 décembre 2003 par les transformateurs. J'ai demandé instamment, ce matin, aux producteurs et aux transformateurs de parvenir à une « clause de paix » pour le premier semestre de l'année 2004, les dispositions laitières de la réforme de la PAC, décidées, je le rappelle, à Berlin, en 1999, c'est-à-dire sous votre gouvernement, ne pouvant s'appliquer avant le 1er juillet, afin d'élaborer un nouvel accord sur les prix.

Mais cela ne suffit pas. Un plan d'adaptation et de modernisation de la filière laitière est nécessaire. J'ai réuni ce matin une table ronde avec l'ensemble des partenaires. Sept groupes de travail ont été mis en place qui devront rendre leurs conclusions avant la fin du semestre. Mais j'ai, d'ores et déjà, débloqué une enveloppe de 20 millions d'euros, tant pour la production que pour la transformation, afin de moderniser cette filière à laquelle nous tenons tant, puisque, je le répète, elle concerne 110 000 exploitations sur l'ensemble du territoire français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

PROCÉDURE DE RÉTABLISSEMENT PERSONNEL

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour le groupe de l'UMP.

M. Frédéric Reiss. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine.

La Banque de France a indiqué hier que le nombre de dossiers de surendettement déposés auprès de ses services a augmenté de 16,9 % en 2003...

M. Alain Néri. Eh oui !

M. Frédéric Reiss. ...et que cette tendance semblait malheureusement se confirmer depuis le début de l'année 2004.

M. François Hollande. Quel résultat !

M. Frédéric Reiss. Dans le cadre de sa politique sociale en faveur des personnes qui rencontrent le plus de difficultés, le Gouvernement a, entre autres, souhaité apporter une réponse aux familles en situation de surendettement confrontées à un accident de la vie - chômage, divorce, accident, maladie - qui, trop souvent, les plonge dans une situation de grande détresse.

Ainsi, en juillet 2003, nous avons adopté votre loi d'orientation pour la ville et la rénovation urbaine, qui comprend notamment l'instauration d'une procédure judiciaire de rétablissement personnel, réformant le surendettement des particuliers. Ce dispositif qui permet de repartir de zéro s'inspire de la faillite civile existant déjà en Alsace-Moselle où il a fait ses preuves. La procédure de rétablissement personnel conduit, après liquidation du patrimoine, à la clôture et à l'effacement des dettes.

Monsieur le ministre, l'attente des nombreuses familles concernées est grande. Pouvez-vous nous préciser les modalités de sa mise en œuvre et, surtout, nous dire ce que vous en attendez ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine. Monsieur le député, vous avez appris ce matin par la presse quel est l'état du surendettement dans notre pays.

Qu'est-ce qu'une famille surendettée ?

M. Laurent Fabius. Le Gouvernement !

M. le ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine. C'est, dans 90 % des cas, une famille qui, après un accident de la vie, a contracté une dette relativement modeste, de quelques milliers d'euros, mais qui a été entraînée dans la spirale infernale des procédures d'expulsion, saisies-arrêts, ruptures de contrats, etc. Pendant des années, ces familles ne se retrouvaient qu'avec un « reste à vivre », puisque même l'allocation adulte handicapé pouvait être saisie. Devant les commissions, très peu s'en sortaient. La grande majorité était une population pour laquelle on rejouait en quelque sorte : « Cachez ce sein que je ne saurais voir ». On reportait éternellement la solution du problème. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Votre réaction est déplacée, quand on sait que le nombre de familles ayant soumis un dossier aux commissions de surendettement a été multiplié par trois sous le précédent gouvernement. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Le Gouvernement a pris deux décisions. D'une part, le Premier ministre a annoncé, il y a quelque semaines, qu'en cas d'accident de la vie, les familles pourront obtenir l'étalement du paiement de leurs impôts. D'autre part, dans les cas les plus graves, les familles seront orientées par la commission de surendettement soit vers les commissions de la Banque de France en vue de l'établissement d'un plan, soit vers le tribunal. Celui-ci pourra alors ordonner de mettre un terme à tous ces drames : expulsions, saisies-arrêts, entre autres sur les allocations adultes handicapés, de façon à faire le point de la situation de ces familles en toute sérénité, à payer ce qui peut être payé et à leur permettre de repartir normalement dans la vie.

On ne pouvait pas laisser des familles avec un simple « reste à vivre », voyant leur dette grossir sans aucune possibilité de rétablir leur situation. C'était non seulement une faute morale, mais aussi une erreur économique de laisser ces familles dans le désespoir. Au total, avec les enfants, quatre à cinq millions de personnes sont concernées.

Dans la pratique, le décret sera publié au début de la semaine prochaine. Les premières familles qui ont eu connaissance du texte ont déjà déposé leurs dossiers dans les commissions de surendettement, passage obligé depuis trois mois. Les premiers jugements de suspension des procédures devraient intervenir à la fin du mois.

Au lieu de se voiler la face devant les difficultés d'une famille victime d'un accident de la vie, il faut traiter le problème au fond, c'est-à-dire permettre aux familles d'honorer de nouveaux leurs créances car, dans un pays démocratique, il faut s'acquitter de ses dettes, c'est la condition de la confiance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

PRISE EN CHARGE DES PERSONNES ÂGÉES DÉPENDANTES

M. le président. La parole est à M. Jacques Domergue, pour le groupe de l'UMP.

M. Jacques Domergue. Monsieur le secrétaire d'État aux personnes âgées, six mois ont passé depuis les événements tragique de cet été. Certaines régions comme le Languedoc-Roussillon ont cependant été moins touchées par la catastrophe naturelle. Le drame de la canicule a mis en évidence l'effort que la nation doit consentir pour développer et améliorer la prise en charge de nos aînés.

Le 6 novembre dernier, le Premier ministre a annoncé un plan de solidarité en faveur des personnes âgées dépendantes et des personnes handicapées.

M. Alain Néri. Un mauvais plan !

M. Jacques Domergue. C'est une réforme ambitieuse et de longue haleine qui concerne l'ensemble des aspects de la vie des personnes âgées. Elle prévoit la mise en place dans chaque département d'un plan de veille et d'alerte pour faire face aux situations de crise et crée une branche nouvelle de notre protection sociale pour couvrir le risque dépendance.

Alors que la prise en charge de nos aînés fait plus que jamais, depuis ce drame, l'objet d'une attention inquiète de la part de nos concitoyens, pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous dire quel est l'état d'avancement de cette réforme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État aux personnes âgées.

M. Hubert Falco, secrétaire d'État aux personnes âgées. Monsieur le député, jamais autant de moyens n'ont été mis en place pour accompagner la prise en charge des personnes âgées. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Vous l'avez dit, plus de quatre milliards d'euros y seront consacrés, un plan de veille et d'alerte sera mis en place dans chaque département, en coordination avec l'échelon local. L'APA sera pérennisée et, surtout, financée. Nous allons débloquer 1,7 milliard d'euros à cet effet en 2004.

J'ai demandé à chaque préfet de veiller à ce que toutes les maisons de retraite publiques soient équipées, avant la fin du mois de juin, d'une salle climatisée.

Nous avons également intensifié les contrôles systématiques dans toutes les maisons de retraite.

Mesdames et messieurs les députés, notre retard en matière de prise en charge des personnes âgées était considérable. Nous avons mobilisé des moyens. Nous comptons maintenant sur l'échelon local pour prendre le relais et concrétiser ces moyens. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Messieurs, vu votre bilan, vous n'êtes pas les mieux placés pour nous donner des leçons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

PROJET DE LOI PERBEN

M. le président. La parole est à M. André Vallini, pour le groupe socialiste.

M. André Vallini. Monsieur le garde des sceaux, dans un État démocratique, le droit légitime, que personne ne conteste, de tous à la sécurité doit être concilié avec le droit de chacun à la sûreté, c'est-à-dire le droit de n'être ni poursuivi, ni arrêté, ni détenu, ni condamné arbitrairement. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Guy Teissier. Démago !

M. André Vallini. Cette règle est énoncée dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. C'est pourtant elle, monsieur le garde des sceaux, que votre projet de loi s'apprête à remettre en question. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Depuis des mois, dans cette enceinte comme au Sénat, nous dénonçons votre texte, ses dérives, ses dangers. Aujourd'hui, la mobilisation est d'une ampleur sans précédent.

M. Guy Teissier. Tu parles !

M. André Vallini. Demain, tous les barreaux de France seront en grève et cent quatre-vingt bâtonniers de France seront à midi devant les portes du Palais-Bourbon.

Monsieur le ministre, si les avocats et toutes leurs organisations, si les magistrats et tous leurs syndicats, si les associations de droits de l'homme unanimes sont dressés contre votre projet de loi, c'est que celui-ci va instaurer dans notre pays un état d'exception permanent doublé d'une justice à l'américaine qui sera dure avec les faibles et conciliante avec les puissants. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Guy Teissier. Scandaleux !

M. André Vallini. Il aggravera, de surcroît, la situation dans nos prisons, dont nous devrions tous savoir ici qu'elle est indigne d'un pays civilisé.

Monsieur le ministre, quand les droits de la défense sont attaqués, quand la protection du citoyen contre l'arbitraire est menacée, quand l'égalité de tous devant la justice est bafouée, ce sont les principes mêmes de notre République qui sont remis en cause.


Monsieur le ministre, sans attendre l'annulation éventuelle de votre texte par le Conseil constitutionnel, que nous saisirons, sans attendre la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme, retirez votre texte ! Nous vous le demandons solennellement, au-delà de toute polémique, car il n'est pas trop tard. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Mesdames, messieurs les députés du groupe socialiste, décidément vous ne comprendrez jamais le dossier ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Vous avez tort d'utiliser ce discours grandiloquent, alors qu'il n'est pas adapté. Vous commettez une erreur politique car, vous le savez très bien, mon texte répond à deux nécessités. Premièrement, lutter avec des armes efficaces contre la criminalité organisée internationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Quels sont les crimes et délits visés dans mon texte de loi ?

M. François Hollande. Ça n'a rien à voir !

Mme Martine David. Ce n'est pas la question !

M. le garde des sceaux. Le meurtre en bande organisée, la torture et les actes de barbarie en bande organisée, le trafic de stupéfiants, les enlèvements et séquestrations, la traite des êtres humains, le proxénétisme aggravé, les vols commis en bande organisée, c'est-à-dire avec port d'arme, prise d'otages, blessures ou homicide.

M. Arnaud Montebourg. Vous avez oublié la corruption !

M. le garde des sceaux. Pour lutter contre ces crimes, la justice française doit se donner les moyens d'enquête nécessaires, comme celle de toutes les démocraties européennes. Et pour ce faire, monsieur Vallini, vous qui êtes juriste, vous savez que le texte précise clairement que l'ensemble de ces moyens exceptionnels d'enquête sont sous le contrôle du juge.

Deuxièmement, le texte répond au scandale du non-traitement dans des délais raisonnables du très grand nombre de dossiers pénaux en attente. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Monsieur Vallini, considérez-vous comme acceptables ces après-midi, ces soirées au tribunal correctionnel où, après huit ou douze mois d'attente, un dossier est traité en trois minutes ? C'est ce que j'appelle la justice d'abattage. C'est cela que je veux supprimer. C'est pourquoi je prévois le « plaider-coupable » qui permettra, dans un dialogue équilibré entre l'avocat et le procureur, puis l'avocat et le juge, de traiter, avec humanité, clarté et dans des délais raisonnables, ces nombreux dossiers qui aujourd'hui sont maltraités.

Tels sont les deux objectifs du texte, et vous devriez les partager ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

PERMIS DE CONDUIRE PROBATOIRE

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Lefranc, pour le groupe de l'UMP.

M. Jean-Marc Lefranc. Ma question, à laquelle s'associe mon excellent collègue Jean-Claude Lemoine...

M. le président. Tous vos collègues sont excellents ! (Sourires.)

M. Jean-Marc Lefranc. ...s'adresse à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

Samedi dernier, un jeune homme de dix-neuf ans, titulaire du permis de conduire depuis moins d'un an, roule à contresens et à vive allure sur une route nationale, à bord d'un véhicule automobile qu'il essaie en vue de son acquisition. Au même moment, une jeune femme qui emmène ses trois enfants à leur cours de danse roule tranquillement sur la même route. Le choc est terrible. La jeune femme et l'un des enfants décèdent sur le coup, et mes pensées vont évidemment aux victimes et à leur famille.

Bien qu'il ne faille pas généraliser, cette tragédie pose à l'évidence le problème de l'expérience au volant des jeunes titulaires du permis de conduire. Certains pensent, le papier rose en main, maîtriser parfaitement leur véhicule, ce qui est loin d'être le cas, nous le savons tous.

Aussi, monsieur le ministre, quelles mesures comptez-vous prendre pour responsabiliser les conducteurs ? Je pense en particulier à la mise en place du permis de conduire probatoire qui pourrait être dans ce cadre l'un des instruments. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, l'accident de Saint-Avold résonne comme une sonnette d'alarme, d'autant qu'il s'ajoute aux résultats décevants du mois de janvier. En effet, on compte deux morts de plus par rapport à janvier 2003 et le nombre de blessés a augmenté de 4,9 %. Certes, janvier 2003 avait connu une baisse de 34 % du nombre d'accidents, ce qui est considérable. Pour autant, nous ne pouvons nous satisfaire des résultats de janvier 2004, surtout quand ils sont illustrés par des accidents aussi graves que celui de Saint-Avold.

Dans trois semaines, le 1er mars exactement, sera mis en place le permis de conduire probatoire. Il comportera six points seulement, au lieu de douze, et le conducteur n'aura ses douze points qu'au bout de trois ans, deux ans s'il a pratiqué la conduite accompagnée.

Je rappelle à la représentation nationale que ce permis probatoire ne sera pas réservé aux personnes qui passent le permis pour la première fois. En effet, c'est celui que passeront ceux ont perdu leur permis, par manque de points ou après décision d'un tribunal.

Par ailleurs, l'inadéquation entre la grande puissance de certaines voitures et l'inconscience ou l'inexpérience de certains conducteurs pose un problème. Je vais saisir, dans les jours qui viennent, le Conseil national de la sécurité routière. Au vu de son avis, je ferai aussitôt des propositions au Premier ministre en vue de décisions à prendre lors d'un prochain comité interministériel de la sécurité routière. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

TITRE EMPLOI ENTREPRISE

M. le président. La parole est à M. Gérard Dubrac, pour le groupe de l'UMP.

M. Gérard Dubrac. Monsieur le secrétaire d'État aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, compte tenu de leur rôle essentiel dans la création d'emplois, le Gouvernement a résolument choisi de mener une politique en faveur des entreprises en visant à créer un environnement favorable à l'initiative des entrepreneurs. Dans ce sens, vous avez concentré vos efforts sur l'encouragement à la création d'entreprises à travers la loi pour l'initiative économique et un soutien à l'innovation.

Les derniers chiffres sur les créations d'entreprises nous ont montré l'efficacité des ambitions du Gouvernement en la matière et le dynamisme que suscitent les mesures déjà prises. Mais les entreprises ont aussi de très grandes attentes en matière de simplification des démarches administratives qui, trop souvent, pèsent lourdement sur la gestion et la compétitivité des PME.

A cet égard, le Gouvernement a mis en place le titre emploi entreprise. Monsieur le secrétaire d'État, à partir de quand et comment cette mesure pourra-t-elle être utilisée par les chefs d'entreprise ? Pouvez-vous surtout nous préciser en quoi ce dispositif va libérer les énergies et ainsi permettre réellement les simplifications des démarches administratives qu'attendent les entreprises ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.

M. Renaud Dutreil, secrétaire d'État aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le député, le Gouvernement agit avec détermination pour l'emploi. Nous baissons les charges sociales. Le Premier ministre vient d'annoncer une mesure très importante dans un secteur à forte intensité de main-d'œuvre. Nous agissons pour que le pouvoir d'achat des Français augmente. L'année dernière, il a crû de 1,2 %. Nous agissons pour la création d'entreprises, vous l'avez dit. Ce sont 300 000 à 500 000 emplois qui dépendent directement de la création d'entreprises.

Mais nous voulons également simplifier cet acte élémentaire de la vie économique qu'est l'acte d'embauche. C'est la raison pour laquelle nous avons mis en œuvre le titre emploi entreprise. Le décret est paru aujourd'hui même au Journal officiel. Près de 700 000 emplois permanents pourront bénéficier de ce titre emploi entreprise et près de 2,5 millions contrats occasionnels seront ainsi rendus possibles.

Monsieur le député, il y a des gouvernements qui sèment des obstacles et des embûches devant l'embauche.

M. David Habib. Le vôtre !

M. le secrétaire d'État aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Souvenez-vous d'un gouvernement qui avait inventé jusqu'à six SMIC ! Avec quarante formalités pour embaucher et six SMIC, comment voulez-vous ensuite vous y retrouver ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Merci la gauche !

M. le secrétaire d'État aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Nous, nous aplanissons le chemin de l'emploi par la simplification, permettant ainsi la création de milliers d'emplois. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.


Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.

2

APPLICATION DU PRINCIPE DE LAÏCITÉ DANS LES ÉCOLES, COLLÈGES ET LYCÉES PUBLICS

Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi relatif à l'application du principe de laïcité dans les écoles, collèges et lycées publics (n°s 1378, 1381).

La parole est à M. Pascal Clément, président et rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, rapporteur. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, monsieur le ministre délégué à l'enseignement scolaire, mes chers collègues, ce texte est celui non pas d'une majorité mais de tous les représentants de la République. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Si tel n'avait pas été le cas, il aurait mieux valu ne pas le présenter et ne pas le soumettre à l'Assemblée nationale.

Je le relis parce que certains considèrent qu'il est de portée beaucoup plus large qu'il ne l'est en réalité, et qu'il se lit facilement : « Dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port des signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit. »

Ce texte était indispensable, mes chers collègues, parce que les jurisprudences étaient contradictoires, le juge administratif se fondant non point sur le signe religieux, autorisé, je vous le rappelle, par le Conseil d'Etat, mais sur l'ordre public. Il était aussi indispensable dans la mesure où la convention européenne des droits de l'homme permet à un pays de limiter les libertés publiques à la condition que l'interdiction prononcée par un décret, un arrêté et a fortiori par le règlement intérieur d'un établissement éducatif public, se fonde sur une loi.

Enfin, deux principes devaient être conciliés, et c'était sans doute là la grande difficulté, celui de laïcité et celui de liberté religieuse et de conscience. C'est d'ailleurs pour cela que, dans son discours du mois de décembre, M. le Président de la République avait précisé que serait permis le port de signes discrets. Voilà pourquoi le texte a été rédigé comme il l'est.

Cette loi ne réglera pas tous les problèmes, nous n'avons pas cette ambition. Nous sommes conscients, bien sûr, de la force de la loi mais aussi, dans notre société, de ses limites. C'est pourquoi, grâce au dialogue qui s'est instauré au sein de la commission des lois entre le groupe de l'UMP et le groupe socialiste, nous sommes convenus de faire un bilan dans un an. Nous examinerons ensemble les contentieux et nous en tirerons les conséquences.

Qu'il me soit permis de remercier personnellement le président du groupe socialiste, Jean-Marc Ayrault, et mon collègue René Dosière de la commission des lois, avec lesquels nous avons abouti à un texte commun accepté par la plus grande partie de notre assemblée.

Je soulignerai encore que nous avons voulu, tout particulièrement Gérard Léonard et René Dosière, toujours privilégier le dialogue avant toute menace de sanction, ou même d'exclusion.

Le texte qui vous est proposé, mes chers collègues, est aujourd'hui celui de tous les Républicains...

M. Jean-Claude Lefort. C'est scandaleux de dire ça !

M. Alain Bocquet. Nous sommes des Républicains, nous aussi !

M. Pascal Clément, président de la commission, rapporteur. ... et je souhaite qu'il commande à tous les Républicains le devoir de le voter parce qu'il en va de la reconnaissance du projet que nous voulons : une communauté nationale certes diverse, mais unie, pour défendre les valeurs de la République qui sont celles de la liberté, dans l'égalité, pour la fraternité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Dubernard, président et rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, rapporteur pour avis. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, notre assemblée a vécu un moment politique d'exceptionnelle importance et, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, je remercie le président Jean-Louis Debré d'avoir laissé le débat se dérouler à son rythme. (« Bravo ! » sur de nombreux bancs de l'Union pour un mouvement populaire.)

Lors du débat en commission, j'avais engagé mes collègues à exercer un véritable suivi de la mise en œuvre de la loi et de ses conséquences sur le fonctionnement de l'école publique, et à prendre rendez-vous un an après la mise en vigueur du texte pour en étudier l'impact. Je ne peux donc qu'être satisfait de l'amendement que nous avons voté à l'unanimité.

J'ai à cet instant une pensée particulière pour les Français issus des terres d'Islam. Qu'ils croient ou non, leur silence aura été leur laïcité à eux. Qu'ils en soient infiniment remerciés, d'autant qu'en hésitant sur nos principes, nous avons permis la confusion et exposé cette immense majorité silencieuse à l'amalgame et à la suspicion. Nous n'oublierons pas non plus, mes chers collègues, l'intervention de haute volée de Mansour Kamardine qui nous a si bien montré comment concilier islam et laïcité, islam et valeurs républicaines.

Par-delà les attaches et les croyances, tous les Français qui coexistaient paisiblement autour de ce tronc commun que constitue la laïcité ont découvert qu'elle était une valeur fragile, résultat d'un équilibre de pouvoirs toujours précaire, même s'ils n'avaient plus le cœur à ferrailler avec les religions, pour qu'elles se tiennent à leur place. Après le Président de la République, notre assemblée va donner un signal fort. Ce signal, c'est la sagesse retrouvée d'un vieux peuple qui s'est entre-tué pour des questions de religion, et qui est bien décidé à ne pas recommencer ; un peuple qui, par ces temps de violence à la fois urbaine et mondiale, dans nos villes comme à Jérusalem, sait que l'on ne peut pas jouer sans risque avec les grands principes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Alain Bocquet, pour le groupe des député-e-s communistes et Républicains.

M. Alain Bocquet. Monsieur le président, monsieur le premier ministre, messieurs les ministres, dans ce débat beaucoup plus long, faut-il le souligner, que celui que vous prévoyez en juillet pour démanteler la sécurité sociale par ordonnances, (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) les député-e-s communistes et républicains ont exprimé en conscience leurs convictions personnelles.

Tous se sont retrouvés autour du principe de laïcité, qu'ils ont défendu en dignes héritiers du député du Chemin de l'honneur, Etienne Fajon, qui est à l'origine de l'introduction du concept de laïcité dans notre Constitution. Tous ont lié la laïcité aux principes fondateurs de notre République : liberté, égalité, fraternité. Tous ont dénoncé les coupes opérées dans les budgets sociaux 2004 de l'Etat, au premier chef l'insuffisance des moyens accordés à l'éducation nationale pour assumer ses missions. Tous ont lié la laïcité à la question sociale, en rappelant que l'exclusion est mère de tous les intégrismes. Tous ont réitéré leur détermination à lutter, aujourd'hui comme hier, pour le respect des droits et de la dignité des femmes.

Les député-e-s communistes et Républicains ont dit combien la question en débat est un « sujet difficile et controversé ». Sujet au cœur des interrogations sur l'avenir de notre société à l'heure où l'ascenseur social est en panne, comme celui de l'intégration, tandis que s'élèvent conjointement les chiffres du chômage - notamment celui des jeunes, en hausse de 8 % l'an dernier - et des profits boursiers. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Ils ont dit aussi que la République n'est pas à la hauteur. Chacun a bien senti ici, à preuve les amendements votés, que le dialogue et la concertation devaient primer sur les interdits. Certains de mes amis ont évoqué une loi boomerang pouvant nourrir les racismes, les replis identitaires et les fondamentalismes ; d'autres, les exigences d'un « vivre ensemble républicain », grand oublié de votre projet ; d'autres encore la nécessité d'éradiquer la misère endémique de la jeunesse dans la société du tout-business. Tous s'accordent à rappeler que la laïcité constitue la balise cardinale des valeurs républicaines. Tous sont préoccupés par le désarroi de certains parents d'élèves, des équipes pédagogiques et des chefs d'établissement.

Les député-e-s communistes et Républicains exprimeront des votes différents. Un tiers votera pour, mais les deux tiers, dont je suis, voteront contre. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Christian Vanneste. C'est ce qui s'appelle un cocktail détonnant !

M. Pierre Lellouche. Le PC n'est plus ce qu'il était !

M. Alain Bocquet. Il faudra vous habituer à l'idée que le groupe communiste est le seul qui accorde la liberté de vote. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Laissez M. Bocquet terminer ! Votre agitation ne sert à rien.


M. Alain Bocquet
. L'incapacité de votre logique ultralibérale (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) ...

M. Richard Mallié. Vous venez de reconnaître que vous étiez devenus des libéraux, avec la liberté de vote.

M. Alain Bocquet. ... à résoudre les problèmes économiques, sociaux, éducatifs et citoyens, à l'origine des difficultés réelles auxquelles la France est confrontée, invite à penser que cette « petite loi » ne pourra modifier durablement la situation. Puisqu'elle est inapplicable, n'y a-t-il pas à craindre qu'elle ne mette le feu là où il s'agirait de calmer le jeu ?

M. Francis Delattre. Mais non !

M. Alain Bocquet. De même que vous n'avez pas hésité hier à chasser des milliers d'aides éducateurs, vous ne craignez pas aujourd'hui de fermer la porte des établissements secondaires à des jeunes filles précisément ciblées, avant de vous apprêter bientôt à en exclure les enseignants par la suppression de plusieurs milliers de postes.

II n'est pas sans risques, pour votre gouvernement et votre majorité, d'avoir pensé aux prochaines élections plutôt qu'à l'avenir des futures générations.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Nul !

M. Alain Bocquet. Un tel rapprochement, nombreux sont ceux qui le font, dans le pays comme dans cette assemblée, y compris parmi nos collègues qui voteront le texte. C'est un constat qui, s'il ne modifie pas le fond du débat sur la laïcité, en éclaire utilement les circonstances, alors que le centenaire de la loi de 1905 sur l'école aurait dû être l'occasion d'un grand débat public et d'une grande loi,...

M. Xavier de Roux. Que ne l'avez-vous fait !

M. Alain Bocquet. ... comme nous n'avons cessé de le réclamer.

Un tel débat, d'une tout autre hauteur de vue, aurait alors témoigné d'une véritable ambition pour l'école de la République et pour la citoyenneté des générations à venir.

M. Bernard Carayon. Vous n'y avez pas pensé pendant vingt ans !

M. Alain Bocquet Plutôt que de favoriser l'intégration, votre texte instaure des discriminations. Il stigmatise une partie de notre population. Il ne répond pas à l'extrême diversité des situations et n'offre qu'un faible écho aux travaux de la commission Stasi et de la mission parlementaire. Cela suffit à nous faire redouter que ce projet ne doive être rapidement rangé au nombre des occasions manquées par la République de rassembler l'ensemble des citoyens français qui en créent la richesse par leur travail, et en expriment la diversité.

Le texte qui sera adopté aujourd'hui a comme un goût d'inachevé. Une grande loi laïque, moderne et amarrée aux principes de notre République - liberté, égalité, fraternité - reste à faire, une grande loi qui rassemble le peuple de France plutôt qu'elle ne le divise. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Avant de donner la parole aux orateurs suivants, je vais d'ores et déjà faire annoncer le scrutin public afin de permettre aux députés de regagner l'hémicycle.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Jacques Barrot, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Jacques Barrot. Monsieur le président, ce long débat nous a mobilisés plus de vingt heures durant pour une discussion que vous avez voulue aussi ouverte que possible. Nous tenons à vous en remercier.

Ce débat n'a pas été simplement digne, mes chers collègues. Il a également été à la hauteur des enjeux que sont la liberté de conscience, l'égalité de l'homme et de la femme, la nécessaire séparation des sphères politique et religieuse et, enfin, le refus de dérives inacceptables qui, en instrumentalisant le fait religieux, peuvent conduire à l'antisémitisme, au révisionnisme et au racisme.

Ces valeurs fondent la République. Il convient non seulement de les réaffirmer solennellement mais, plus encore, de les faire partager par la jeune génération, dans un monde qui n'est pas à l'abri des intégrismes ni des fondamentalismes intolérants. Certaines manifestations ont permis de mesurer la menace, s'il en était besoin. (« Très bien! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Certes, d'autres démocraties ont, semble-t-il, pris leur parti d'une juxtaposition des communautés ethniques et religieuses qui, repliées sur elles-mêmes, s'ignorent et se contentent de coexister. Le choix de la France est au contraire de faire vivre ensemble au plein sens du terme tous les citoyens, quelle que soit leur appartenance religieuse ou ethnique. La communauté nationale se doit dès lors d'exiger de chacun le respect de l'autre afin de protéger le droit de tous à la différence. C'est en ce sens que, reprenant les propos d'Alain Juppé au cours du débat, je puis affirmer que pour nous la laïcité n'est pas un combat, elle est d'abord le respect. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Ainsi, notre objectif majeur est clair : émettre un signal d'encouragement envers tous les éducateurs et tous les parents de France, soucieux de former les consciences dans la liberté et la tolérance. Dans le même temps, nous voulons adresser une mise en garde à ceux qui seraient tentés d'empêcher notre école française d'être le creuset de l'intégration, du respect de l'autre et de l'égalité des chances.

Nous sommes parvenus à un texte de loi sobre et concis. Les termes en ont été amplement débattus et les convergences nécessaires permettent un large accord qui dépasse aujourd'hui nos sensibilités respectives. C'est une loi de clarification, comme l'a très bien montré le rapporteur de la commission des lois, Pascal Clément. Nous tournons la page d'une jurisprudence hésitante, qui a nourri au sein de la communauté éducative certains doutes ou certaines indécisions. Les chefs d'établissement hésitaient parfois à engager leur autorité, craignant de se voir rattraper par une jurisprudence qui, en l'absence de loi, ne pouvait pas leur donner raison d'avoir posé une interdiction, elle-même subordonnée à la loi.

Désormais, grâce à la loi, les chefs d'établissement et les enseignants sauront que leurs refus, fondés en droit, ne pourront pas tomber sous la sanction d'un juge. Ils seront ainsi plus efficacement protégés contre les pressions de certaines minorités activistes.

Mais cette loi est également une loi d'apaisement. Elle pose des limites au prosélytisme en permettant par ailleurs l'affirmation discrète de l'appartenance religieuse. Elle ne combat pas les religions, elle les protège en faisant vivre ensemble leurs fidèles. Bien ciblée sur l'espace scolaire, cette loi tend à faire de celui-ci un espace de paix permettant de faire vivre cette valeur essentielle : le respect de l'autre.

Parce qu'elle est une loi d'apaisement, cette loi devra être appliquée avec toutes les ressources pédagogiques et éducatives de l'école. Un amendement est venu rappeler l'obligation, déjà contenue dans le préambule, d'agir avec délicatesse et intelligence face à des mineurs qui sont, le plus souvent, des jeunes filles. La menace de l'exclusion devra être utilisée comme une dissuasion visant à permettre l'ouverture de la médiation et du dialogue.

Nécessaire pour réaffirmer notre idéal républicain, cette loi ne saurait suffire en elle-même. Elle doit prendre valeur d'engagement en faveur de l'intégration et de l'égalité des chances. C'est ainsi qu'elle prendra tout son sens. Le débat a permis de rappeler d'insupportables discriminations au logement, à l'emploi, voire aux loisirs. Des Français, enfants ou petits-enfants d'immigrés, continuent à subir une exclusion sociale qui peut nourrir chez eux le sentiment d'être des laissés-pour-compte.

Devant de telles menaces, il ne suffit pas de réaffirmer les valeurs de la République : encore faut-il les faire vivre, ce qui exige des politiques concrètes en faveur de l'égalité des chances dans la cité comme dans l'entreprise. Vous nous y avez conviés, monsieur le Premier ministre, en nous fixant des rendez-vous au cours de l'année.

Le débat de ce matin, organisé à l'initiative de notre groupe parlementaire, a tracé des pistes et ébauché des propositions. Le Gouvernement a pris des engagements. Ils devront être tenus. C'est la raison pour laquelle, monsieur le Premier ministre, le groupe UMP, dans sa très grande majorité, votera en faveur d'une loi qu'il souhaite de fermeté, certes, mais également d'ouverture. Cette loi, qui réaffirme les valeurs de la République, doit nous mobiliser au service de l'égalité des chances, dans une France tolérante et pluraliste. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean Glavany, pour le groupe socialiste.

M. Jean Glavany. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, au moment de commencer cette explication de vote au nom du groupe socialiste, je souhaite vous rappeler à une certaine modestie et à une part nécessaire de doute. Il n'y a pas, monsieur le président de la commission des lois, les bons républicains qui votent la loi et les mauvais qui ne la votent pas. Si la laïcité, c'est le respect des différences, respectons aussi celle-là. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Quant au doute, il est sûrement un instrument méthodologique incontournable et nous, les politiques, nous honorerions à revendiquer parfois le droit au doute.

Cela étant, pour les socialistes, la loi qui est proposée est devenue une loi nécessaire. Elle est devenue nécessaire parce qu'un problème bien réel se posait dans des établissements d'enseignement, problème auquel l'éducation nationale s'est révélée incapable d'apporter une réponse simple, claire, ferme et sereine.

Elle est devenue nécessaire également parce que la communauté éducative - chefs d'établissement et enseignants - nous ont, dans leur immense majorité, adressé un appel à l'aide très pressant.

Elle est devenue nécessaire enfin, parce qu'une offensive politique, limitée certes, mais bien réelle, de certains milieux intégristes, s'est traduite par un véritable défi à la République devant lequel nous ne pouvions plus fuir.

C'est parce que cette loi était nécessaire que les socialistes ont abordé le débat dans un esprit responsable et constructif, partageant la conviction profonde qu'une loi n'est pas superflue par essence, comme le prétendent les libertaires, mais que les lois de la République sont protectrices et émancipatrices.

Elles sont protectrices pour les jeunes et les enfants dont les consciences doivent être protégées des influences religieuses...

M. Jean Dionis du Séjour. A l'école !

M. Jean Glavany. ... afin qu'ils puissent construire leur conscience par le libre arbitre, la rationalité et l'esprit critique. Les enfants doivent être égaux dans la classe et devant le maître qui n'a pas à connaître leur appartenance religieuse. Souvenons-nous de Jules Ferry dans sa lettre aux instituteurs : « L'instruction religieuse appartient aux familles, l'instruction morale à l'école. [...] Le législateur a voulu distinguer deux domaines : celui des croyances, qui sont personnelles, libres et variables, et celui des connaissances, qui sont communes et indispensables à tous. »

Les lois sont émancipatrices pour les jeunes filles qui doivent accéder à l'égalité des sexes contre une culture religieuse qui, comme toutes les cultures religieuses, a toujours nié et bridé les droits de la femme.

Elles sont émancipatrices pour les jeunes filles qui, dans notre République, ne sauraient avoir à supporter ce qu'a subi Chadort Chavan et ne sauraient rejoindre le combat de ces millions de femmes qui, partout dans le monde, se battent pour ne pas porter le voile.

Les lois sont émancipatrices et protectrices pour toutes ces jeunes filles qui ne portent pas le voile - elles sont les plus nombreuses - et qui nous demandent de les aider, qui nous le crient, même, et que nous devons entendre.

Les lois sont émancipatrices et protectrices pour toutes les femmes, dans leur long combat pour l'égalité, où, malgré le chemin déjà parcouru, nous avons encore beaucoup de progrès à faire.

C'est dans cet esprit responsable et constructif que les socialistes ont déposé trois amendements.

Le premier visait à ce que le titre de la loi ne fasse pas référence présomptueusement à la laïcité. Celle-ci, vieille valeur républicaine, est une valeur complexe : valeur de liberté, elle est également une valeur d'égalité et de fraternité. Elle ne saurait se limiter à un interdit, si nécessaire soit-il. Ce premier amendement a été entendu.

Le deuxième avait pour objectif que le temps du dialogue, préalable à toute sanction, soit inscrit dans la loi. La mission de la République n'est pas d'exclure, mais d'intégrer. L'immense majorité des conflits dans les établissements est déjà réglée par le dialogue. Cette tradition pédagogique doit être encouragée. Cet amendement a également été entendu.

Le troisième portait sur le cœur du débat, c'est-à-dire sur l'adjectif qu'il convenait d'apposer, dans la loi, aux signes religieux. Comme toute la mission parlementaire, sous l'autorité de notre président, nous avons proposé le terme « visible ».

M. Alain Madelin. Inconstitutionnel !

M. Jean Glavany. Vous avez préféré, monsieur le Premier ministre, le terme « ostensible ». Ce débat, chers collègues, n'est pas que sémantique. Il est politique et, accessoirement, juridique.


Nous préférons « visible » car les enseignants, dans leur grande majorité, veulent une règle simple, claire et nette.

Vous préférez « ostensible » car, sans doute après un compromis avec des forces qui ne sont pas officiellement représentées ici et ne sont pas particulièrement laïques, vous voulez explicitement que les signes discrets soient autorisés.

M. Pascal Clément, président de la commission, rapporteur. Là n'est pas le problème !

M. Jean Glavany. Mais qui va juger du caractère discret ? Les chefs d'établissement ? C'est précisément ce qu'ils refusent, parce qu'ils veulent éviter les différences d'appréciation et les applications à géométrie variable.

Voilà pourquoi nous émettons un doute quant à l'efficacité de votre loi, monsieur le Premier ministre, messieurs les ministres, même si nous apprécions le fait que, au cours du débat, vous ayez accepté notre amendement prévoyant une évaluation de l'application de la loi au bout d'un an, afin de constater si le problème est réglé ou s'il est nécessaire d'y revenir.

Les débats ayant permis un échange fructueux et une singulière amélioration du projet de loi, le groupe socialiste votera ce texte.

Mais notre « oui » sera un « oui » vigilant et exigeant.

Un « oui » vigilant et exigeant car nous n'acceptons pas que le débat politique se résume si excessivement à ce problème réel, mais ponctuel. Il est grand temps, en effet, de voter ce texte et de passer à autre chose, si j'ose dire.

Un « oui » vigilant et exigeant car tous ces replis communautaristes, comme les replis individualistes ou corporatistes, ont un fondement bien précis : les inégalités sociales, l'exclusion, les difficultés de notre modèle républicain et laïque d'intégration. Tout cela est lié ! Jaurès disait que « la laïcité, c'est la lutte pour la République sociale ». Ce combat pour la République sociale ne saurait, chacun le comprend, s'arrêter à ce texte.

Un « oui » vigilant et exigeant car, pour lutter contre ces replis, il nous faut amplifier notre combat contre toutes les discriminations, qu'elles soient raciales, sexistes, professionnelles ou territoriales. Ce combat-là non plus ne s'arrête pas aujourd'hui : nous devons au contraire redoubler d'ardeur.

Un « oui » vigilant et exigeant car la laïcité d'aujourd'hui est confrontée au pluralisme religieux. L'islam est devenu la deuxième religion de France et la République doit avoir le courage non seulement de lui imposer les mêmes devoirs, mais aussi de lui octroyer les mêmes droits qu'à toutes les autres religions. Or vous savez bien que nous sommes loin du compte.

Un « oui » vigilant et exigeant car la laïcité, c'est la pédagogie et la concrétisation de cette citoyenneté de droits et de devoirs qui est si malade. Cette pédagogie-là, il faut l'amplifier avec ambition et volontarisme.

Les socialistes ont proposé d'élaborer une charte de la laïcité rappelant nos grandes lois laïques et permettant de mettre en forme un guide pratique et concret pour que cette valeur revienne au premier plan de notre vie républicaine. Nous attendons qu'une suite soit donnée à cette proposition.

Monsieur le Premier ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, si nous nous rejoignons aujourd'hui, sans doute nous séparerons-nous demain dans ces combats pourtant si essentiels pour la laïcité.

Jean Bauberot a écrit que la laïcité c'est « le vivre ensemble dans la République » - vivre ensemble avec nos différences, qui font notre richesse, vivre ensemble dans le respect de ces différences, mais sans que jamais elles ne dictent leur loi.

Ce « vivre ensemble », au-delà de ce texte nécessaire mais ponctuel, demande de notre part un engagement sans faille. Les socialistes s'y attacheront avec vigilance et exigence. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Nicolas Perruchot, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Nicolas Perruchot. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, sur un sujet aussi personnel que la laïcité, il aurait été absurde de décréter une position de groupe imposant à chacun de voter « comme il faut ». Le groupe UDF, comme il a coutume de le faire pour chaque texte, a donc laissé une entière liberté de vote à ses membres, afin de permettre à chacun d'entre eux de voter selon sa conscience. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

Quelques députés du groupe voteront pour ce texte, parce qu'ils veulent avant tout témoigner de leur attachement au principe de laïcité.

Pour nous tous, la laïcité est un des fondements du pacte républicain et un principe consacré par la Constitution. Elle ne constitue pas un instrument idéologique de combat, mais au contraire une philosophie de tolérance, de neutralité et de respect.

Nous affirmons avec fermeté notre refus des signes religieux ostensibles à l'école. Mais une majorité d'entre nous estiment qu'une loi n'était pas indispensable pour cela.

La question principale soulevée par ce texte, celle du voile, aurait mérité une réponse plus globale. En effet, le voile est avant tout le signe d'une discrimination à l'égard des femmes et d'une vision d'infériorité inacceptable pour la France, pour la République et pour notre civilisation.

Face à cela, nous sommes confrontés à la demande des enseignants et des chefs d'établissement, qui se sentent abandonnés, mais aussi à celle des jeunes filles qui refusent de porter le voile.

Certes, il y a dans ce texte de bonnes intentions. Mais la plupart d'entre nous sommes convaincus que la loi ne sera pas applicable et que le nombre de contentieux ne diminuera pas.

Une loi, pour être la loi, doit être appliquée et respectée. En aura-t-on les moyens ? En aura-t-on la possibilité ?

Députés, législateurs, nous n'avons pas été élus pour faire du droit déclamatoire. On sait depuis Montesquieu que les lois superflues affaiblissent les lois nécessaires.

Mais, surtout, ce texte de deux lignes qui ne parle pas de l'intégration ne saurait constituer une réponse au véritable enjeu, à savoir la capacité de la France à intégrer des populations nouvelles et l'acceptation de la loi commune par ces nouveaux Français. Il nous paraît dangereux de bâtir une politique d'intégration sur un interdit, avec une loi qui signifie, pour une part, le rejet, l'exclusion, la stigmatisation.

C'est pourquoi une majorité des députés du groupe UDF s'abstiendront, redoutant les effets négatifs d'une loi qui risque de réveiller de vieux démons sur la place des religions dans un Etat laïque et d'exacerber les tensions entre communautés. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

Vote sur l'ensemble

M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi relatif à l'application du principe de laïcité dans les écoles, collèges et lycées publics.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

          Nombre de votants 561

          Nombre de suffrages exprimés 530

          Majorité absolue 266

      Pour l'adoption 494

      Contre 36

L'Assemblée nationale a adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je salue le dialogue républicain que nous avons vécu à l'occasion de l'examen de ce texte.

Sur ce dossier difficile, chaque vote est tout à fait respectable. Mais je crois sincèrement pouvoir dire qu'après ce débat, après un vote de cette ampleur, la République et la laïcité sortent renforcées aujourd'hui de votre travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)


Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à dix-sept heures dix, sous la présidence de M. François Baroin.)

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN,

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

3

COMMUNAUTÉS AÉROPORTUAIRES

Discussion d'une proposition de loi adoptée
par le Sénat

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant création des communautés aéroportuaires (n°s 1286, 1380).

La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

M. François-Michel Gonnot, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer, mes chers collègues, la proposition de loi dont nous débattons aujourd'hui vise à la création des communautés aéroportuaires.

Ce texte d'initiative parlementaire est le résultat d'un long travail, mené par le sénateur Le Grand qui avait été missionné par le Gouvernement pour réfléchir, entre autres, aux retombées économiques et fiscales de l'activité aéroportuaire sur les communes ou les territoires sous influence des grands aéroports.

Les communautés aéroportuaires qui, espérons-le, verront le jour très prochainement, ne sont qu'une étape dans une politique d'ensemble.

Sur cette question difficile des relations entre les pouvoirs publics et les riverains des grands aéroports, notamment en région Ile-de-France, le Gouvernement a beaucoup réfléchi et il tente de mettre en place depuis plusieurs mois une politique ambitieuse.

Mme Odile Saugues. Avec de bien maigres résultats !

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. A la suite de la mission que m'avait confiée le président Ollier sur l'avenir du transport aérien et des plates-formes aéroportuaires, nous avions, le rapporteur Yannick Favennec et moi-même, constaté qu'en région Ile-de-France, les relations entre les riverains, leurs élus, leurs associations d'un côté, et les pouvoirs publics de l'autre, étaient catastrophiques.

M. Francis Delattre. C'est exact !

M. Jean-Pierre Blazy. Et ça va continuer !

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Pendant de trop longues années, ces relations ont été noyées dans des promesses intenables, dans des illusions maintes fois alimentées. Aujourd'hui, les riverains des grands aéroports, notamment en Ile-de-France, ne croient plus les pouvoirs publics ; ils ne croient plus aux promesses, en particulier à celles qui leur avaient été faites sous la précédente législature.

La mission qui m'avait été confiée, ainsi qu'à Yannick Favennec, et à laquelle ont participé d'autres collègues, comme Mme Odile Saugues, le porte-parole du groupe socialiste dans ce débat, avait abouti au constat qu'il était nécessaire de renouer un véritable contrat de confiance avec les Franciliens.

Nous avions fait des propositions relatives, par exemple, au financement d'une autorité aéroportuaire redevenue responsable, assise sur de nouveaux pouvoirs et dotée d'un nouveau statut.

Nous avions souhaité que l'information à l'égard des riverains soit enfin transparente, suggéré d'« internaliser » les coûts environnementaux en modulant plus finement les taxes aéroportuaires, de mettre en place des procédures de moindre bruit réellement innovantes, de mieux contrôler le respect de ces procédures, d'améliorer le dispositif d'aide à l'insonorisation, de limiter l'urbanisation à proximité des aéroports et, enfin, de mieux répartir les retombées fiscales générées par l'activité aéroportuaire et celle des entreprises de la zone. C'est sur ce dernier point, notamment, que le sénateur Le Grand avait été mandaté.

Tout cela a abouti à la proposition qu'il a déposée devant le Sénat à l'automne dernier, visant à la création d'une nouvelle catégorie d'établissements publics, des établissements publics à caractère administratif qui porteraient, en l'occurrence, le nom de « communautés aéroportuaires ».


Monsieur le secrétaire d'Etat, je tiens tout d'abord à vous remercier de l'attention que vous-même et M. de Robien avez, depuis huit mois, portée aux propositions de notre mission, et d'avoir tenu compte de nos réflexions et de celles menées parallèlement, notamment par le sénateur Le Grand.

Il est bon de rappeler ici le poids économique du transport aérien. En pleine expansion, il a connu, ces trente dernières années, une croissance de 6,5 %. Le nombre mondial de passagers transportés est passé de 460 millions à plus de 3 milliards. Il représente pour l'Ile-de-France un chiffre d'affaires de 35 milliards d'euros, 11 % du PIB régional et engendre une fiscalité locale de 100 millions d'euros. Les Aéroports de Paris emploient environ 100 000 personnes, soit 2 % de l'emploi total de la région. Le nombre d'emplois directs ou indirects induits par chaque millier de passagers avoisine les 4 000. Voilà le côté positif du développement du transport aérien dont la France, notamment la région parisienne, a tout intérêt à maintenir le dynamisme, mais cela dans des conditions acceptables pour les riverains, c'est-à-dire dans le respect du développement durable.

A la suite des différentes missions et rapports, que je laisserai à M. le secrétaire d'Etat le soin de rappeler, le Gouvernement a pris des mesures. La proposition de loi du sénateur Le Grand que nous examinons aujourd'hui s'inscrit dans la volonté de répartir le plus équitablement possible les retombées économiques, fiscales et budgétaires liées aux activités aéroportuaires.

Les communautés aéroportuaires créées par le texte seront de véritables lieux de dialogue et de concertation, réunissant l'ensemble des acteurs aéroportuaires pour une meilleure gouvernance du territoire sous influence de l'aéroport. Ces communautés auront une triple vocation : gérer avec les acteurs concernés les questions d'environnement et de qualité de vie, faire bénéficier les populations riveraines, de façon plus large et plus importante, des incidences économiques et constituer une source d'information crédible pour la population. Ce texte très attendu est important par la nouveauté qu'il introduit dans l'arsenal administratif et juridique français. Il répond à des préoccupations qui sont exprimées depuis de longues années par l'ensemble des riverains.

Plusieurs de nos collègues, tant au Sénat qu'au sein de notre commission des affaires économiques, ont cru voir dans le texte un désengagement de l'Etat. Cette réflexion ne me semble pas justifiée. Bien au contraire, il exprime une volonté de l'Etat : les communautés aéroportuaires seront créées à l'initiative du représentant de l'Etat, dans un cadre juridique voulu par l'Etat et seront dotées de ressources qui s'accroîtront au fil des ans et des décisions budgétaires, tant pour les collectivités que pour les riverains.

M. Jean-Pierre Blazy. On en reparlera !

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Les communautés aéroportuaires représenteront une nouvelle instance de gouvernance des territoires aéroportuaires, qui ne doivent être considérés ni comme l'enfer par les riverains ni comme la panacée du seul point de vue des retombées économiques. Elles peuvent tout à fait répondre au besoin de concertation et de dialogue nouveau à inventer, dont la nécessité est apparue maintes fois et qui doit maintenant trouver rapidement une conclusion. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le sujet dont nous sommes appelés à débattre aujourd'hui revêt pour notre commission une importance toute particulière du fait des retombées économiques et sociales que portent en eux les sites aéroportuaires. Le rapporteur vient, à l'instant, de rappeler des points importants qui, contrairement à ce que certains peuvent penser, témoignent de l'intérêt que notre commission et le Gouvernement accordent à une meilleure gestion et à une plus grande transparence, grâce à un dialogue que les dispositions proposées sont susceptibles d'améliorer. Nous sommes autant soucieux de transparence de gestion et d'efficacité économique et sociale que du cadre environnemental des riverains. Il me semble important aujourd'hui, compte tenu de l'évolution de la situation, qu'ils puissent être mieux associés et intervenir, si possible comme des partenaires, et dans la transparence que nous voulons, dans les décisions et les initiatives qui doivent être prises.

M. Eric Raoult. Très bien !

M. Patrick Ollier, président de la commission. La proposition du sénateur Le Grand répond parfaitement à cette préoccupation. La commission des affaires économiques a, d'ailleurs, confié à M. François-Michel Gonnot une mission sur la gestion des plates-formes aéroportuaires et l'avenir de la politique aéroportuaire en France. Certaines des vingt et une propositions que cette mission a rendues publiques il y a quelques mois ont fait l'objet d'un accord entre notre commission et le Gouvernement et seront prises en compte dans un calendrier de décisions progressivement mises en œuvre et tendant à une plus grande sécurisation des riverains, notamment franciliens.

M. Eric Raoult. Très bien !

M. Patrick Ollier, président de la commission. A cet égard, la transparence dans les initiatives semble tout aussi importante que les initiatives elles-mêmes.

M. Eric Raoult. C'est vrai !

M. Patrick Ollier, président de la commission. La mission, qui a rendu son rapport aujourd'hui, peut être satisfaite car, M. Gonnot vient de le dire également, la proposition de loi qui nous vient du Sénat, entre parfaitement dans le cadre de ses propositions.

En associant les gestionnaires et le monde économique aux représentants des usagers et des riverains, le texte qui nous est proposé aujourd'hui répond à la nécessité de dialogue et de concertation que j'évoquais il y a un instant. Les communautés aéroportuaires permettront, j'en suis convaincu, d'assurer une plus grande transparence des arbitrages rendus et de mieux associer la société civile à la prise de décision en amont. En matière de transparence et d'information, ce dispositif paraît judicieux et de nature à s'intégrer dans le cadre plus large du souci qui anime en permanence notre assemblée : le principe de précaution. M. le Président de la République nous a incités à voter une charte d'environnement adossée à la Constitution, dont l'article 5 est fondé sur le principe de précaution. La proposition de loi que rapporte François-Michel Gonnot aujourd'hui s'inscrit dans ce contexte et est de nature à apporter, grâce aux communautés aéroportuaires, une lisibilité et une transparence nettement supérieures à ce que nous avons pu connaître jusqu'à présent.

En prévoyant que ces communautés auront la charge de soutenir les actions et projets visant à corriger les atteintes à l'environnement et à la qualité de vie, à favoriser l'accès des riverains aux emplois et équipements collectifs de la plate-forme aéroportuaire et à développer l'information sur les impacts d'aéroport, le présent texte relève un triple défi  environnemental, économique et social. Un site aéroportuaire est toujours source de pollution, qu'elle soit sonore ou atmosphérique. Il convient donc de penser et de mesurer les conséquences sur l'environnement, la santé et la qualité de vie des riverains de toute nouvelle implantation, de toute extension future et de toute organisation du présent. Je pense, à cet égard, que le texte répond à ces objectifs.

Souvent, et de façon contradictoire, si l'aéroport est une nuisance pour l'homme, il apparaît aussi comme un poumon économique. Comment concilier ces deux aspects ? Je crois que la communauté aéroportuaire sera le lieu de débat où seront structurées les décisions permettant de mieux lutter contre les nuisances et de favoriser une plus grande efficacité économique. Ces deux exigences ne sont pas contradictoires, mais leur opposition rend la vie extrêmement difficile autour des plates-formes aéroportuaires. Toute mesure susceptible de l'éviter sera la bienvenue.

Mme Odile Saugues. Avec quels moyens ?

M. Patrick Ollier, président de la commission. Je pense aussi que les richesses engendrées par le développement aéroportuaire doivent bénéficier en priorité aux riverains. C'est à cette condition qu'on les réconciliera avec l'aéroport. Les mesures qui nous sont aujourd'hui proposées par notre rapporteur, issues de la proposition de M. le sénateur Le Grand, semblent parfaitement correspondre à cet objectif.

Je rappelle à nos collègues préoccupés par ce problème qu'en région parisienne, dont nous sommes ici plusieurs élus, les nuisances sonores du trafic aérien sont extrêmement - si j'ose dire - bien réparties depuis que des changements de couloirs sont intervenus : elles sont de plus en plus insupportables pour un nombre croissant de Franciliens !

M. Eric Raoult. Eh oui !

M. Patrick Ollier, président de la commission. Force est de constater qu'elles n'ont pas été appréhendées de la meilleure façon dans un passé récent. Il convient aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'Etat, d'entrer dans une logique énergique de réduction prioritaire de ces nuisances supportées par l'ensemble des Franciliens. Contrairement à ce que l'on peut penser, mon département des Hauts-de-Seine, ma ville même de Rueil-Malmaison, et M. Baguet le sait aussi qui est l'un de mes voisins à Boulogne, sont autant frappés par ces nuisances que d'autres communes beaucoup plus proches des aéroports. Je vois que M. Raoult et M. Drut approuvent.

M. Eric Raoult. N'oubliez pas la Seine-et-Marne et la Seine-Saint-Denis !

M. Patrick Ollier, président de la commission. Je pense qu'il faudra voter cette proposition de loi sans « trop charger la barque » car, pour être efficace, le texte doit être opérationnel le plus rapidement possible. Il nous permettra - et c'est là pour les députés que nous sommes des une aspiration essentielle - de bien gérer nos aéroports dans la plus grande transparence, tout en luttant plus efficacement, avec les riverains, contre les nuisances aériennes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Eric Raoult. Excellente intervention !

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Guy Drut.

M. Guy Drut. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, si le développement du trafic aérien a eu des retombées économiques positives considérables, il a aussi, parallèlement, beaucoup accru des nuisances, de plus en plus difficiles à vivre. Conscient de cette contradiction et affichant sa volonté d'en sortir, le Gouvernement veut, par la création des communautés aéroportuaires, apporter une solution à ce dilemme.

Dans le cadre du développement durable de nos territoires, une telle exigence concerne, en premier lieu, la maîtrise des nuisances sonores. C'est pourquoi des mesures concrètes ont été mises en œuvre au cours des derniers mois pour les aéroports franciliens, afin de limiter la gêne globale et tout en garantissant la transparence vis-à-vis des élus et des populations riveraines.

M. Jean-Pierre Blazy. On n'en voit pas beaucoup les effets sur le terrain !

M. Guy Drut. J'y suis aussi sur le terrain !

M. Jean-Pierre Blazy. Pas aussi près que moi !

M. Guy Drut. Mais si !

M. Eric Raoult. Cette question n'est pas politique, monsieur Blazy !

M. Guy Drut. Mais il veut lire sans doute son nom dans le Journal officiel !

M. Eric Raoult. En tout cas, jusqu'à présent, les socialistes n'ont pas brillé par leur efficacité !

M. Guy Drut. Il est inconcevable que les riverains, même lointains, des plates-formes aéroportuaires soient privés de jardin à cause des nuisances sonores. Il faut les réduire quel qu'en soit le coût, car la tranquillité n'a pas de prix. Nul doute que, pour répondre à la demande croissante des usagers de l'avion, l'offre doit être à la hauteur des exigences. S'il est vrai que les riverains, au même titre que l'ensemble des usagers, aiment être dans l'avion, ils n'aiment pas en avoir au-dessus de leur tête. Mais cela ne doit pas conduire à une logique du tout économique où seules les retombées économiques seraient privilégiées au détriment de la qualité de vie.

Assurer la transparence vis-à-vis des élus et des populations doit être une des missions claires et permanentes des communautés aéroportuaires, avec une information précise sur les trajectoires des avions et le bruit généré, une communication des résultats de mesures de bruit autour des aéroports et un suivi des sanctions administratives prises à l'encontre des compagnies aériennes qui ne respectent pas les règles en vigueur. La vertu incontestable de ce texte réside donc dans la mission qu'il assigne aux communautés aéroportuaires d'organiser, par le dialogue et la concertation, une nouvelle forme de gouvernance territoriale avec pour objectifs principaux de corriger les atteintes à l'environnement, de favoriser l'accès aux emplois et aux équipements collectifs des plates-formes aux riverains et d'assurer l'équilibre entre nuisances sonores et contribution au développement économique.


Outre le collège des collectivités territoriales et celui des entreprises bénéficiant de l'activité aéroportuaire, qui, à parité égale, composeront le conseil d'administration des communautés, intéressons-nous aux riverains des zones aéroportuaires qui seront au cœur des préoccupations de ces nouveaux établissements publics. Qui sont-ils ? C'est une question à laquelle il faudra répondre très rapidement. Selon quels critères seront-ils répertoriés ? Doit-on se limiter aux seuls critères géographiques, c'est-à-dire déterminer un rayon kilométrique à partir de l'épicentre - à savoir, l'aéroport lui-même - ou, au contraire, inclure des critères plus subjectifs mais non moins importants tels que, par exemple, le lieu de résidence de populations plus éloignées mais qui travaillent sur la plate-forme ou, encore, les populations qui, sans être riveraines de ces zones, sont tout autant intéressées ? Une chose est sûre : pour que l'objectif de dialogue et de concertation soit pleinement rempli, il faudra veiller à associer de façon permanente aux réflexions toutes les parties prenantes, notamment les associations, de riverains comme d'élus locaux. En Seine-et-Marne, il en est beaucoup, très actives et objectives, comme le CEFNA, ADEVA ou « Touche Pas à mon Ciel ». Et il en est une multitude d'autres qui font très sérieusement leur travail.

Si j'insiste sur la participation, qu'elle soit décisionnelle ou consultative, de toutes les parties prenantes, c'est parce qu'elle me semble essentielle et que, sans elle, la proposition de loi perdrait tout son sens. On pourrait en effet regretter que les riverains et les associations représentatives n'occupent pas une place suffisante dans le dispositif proposé et qu'il ne leur soit offert qu'un poste d'observateur sans voix délibérative au sein du conseil d'administration. Mais ce regret n'a pas lieu d'être si, dans les faits, leur participation est réelle et donc efficace.

Une dernière remarque avant de conclure : si le texte prévoit que toutes les compagnies concernées, notamment les compagnies aériennes comme Air France, mais aussi ADP - Aéroports de Paris - soient représentées au sein des conseils d'administration des communautés aéroportuaires, il aurait peut-être été bon, pour assurer une véritable cohérence, que les conseils d'administration des communautés aéroportuaires soient, eux aussi, représentés au sein des assemblées générales de ces compagnies. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Odile Saugues.

Mme Odile Saugues. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, rien de ce qui touche aux transports aériens ne laisse les citoyens indifférents. Les médias se font l'écho d'accidents spectaculaires et se repaissent de leurs douloureuses manifestations. Au-delà de ces faits, fort heureusement rares, les conséquences de ces transports sur les conditions de vie de nos concitoyens sont de plus en plus au cœur des préoccupations des associations et des élus. Le temps est loin où, sous prétexte de forte croissance économique, que rien ne devait entraver, les considérations environnementales n'étaient pas ou peu évoquées. Les riverains des aéroports sont attentifs à la progression des nuisances et n'acceptent plus le fait accompli. Nous ne pouvons, quant à nous, tolérer ni la surenchère, ni le bradage des droits de chacun.

La proposition de loi dont nous discutons aujourd'hui, issue de l'intéressant rapport du sénateur Le Grand, tente un rééquilibrage entre le transport aérien et ses impacts négatifs et le développement économique et environnemental du site sur lequel il est implanté : répartition des richesses au profit des populations soumises à de très fortes nuisances et valorisation de leur cadre de vie. On ne peut qu'être d'accord avec l'objectif déclaré, sans pour autant accepter ce qui pourrait n'être qu'un droit à polluer. L'ambition est louable, mais les moyens prévus ne sont pas à la hauteur, monsieur le secrétaire d'Etat. Nous nous interrogeons sur l'articulation de ce texte avec le projet de loi sur les responsabilités locales et nous déplorons la précipitation avec laquelle il est présenté, pour ne pas dire expédié. Il est vrai que, pris entre la décision de ne pas faire le troisième aéroport en Ile-de-France,...

M. Francis Delattre. C'est une faute !

Mme Odile Saugues. ...comme cela a été annoncé à la suite de la mission présidée par le rapporteur, au grand mécontentement des riverains de Roissy, et l'échéance proche des élections régionales, le Gouvernement a dû agir vite, supprimant les moyens proposés par le rapport Le Grand, qui en constituaient une excellente conclusion.

M. Eric Raoult. Vous aviez fait la même chose !

M. Jean-Pierre Blazy. Non. Nous avions pris la décision. C'est le picard de Robien qui n'en a pas voulu !

Mme Odile Saugues. Qu'est devenu le FISCA, ce fonds qui aurait donné au nouvel établissement public les moyens d'agir ? Bercy l'a exécuté. Le financement retenu est laissé à la générosité des partenaires puisque, hormis le produit des amendes prononcées par l'ACNUSA, il est assis sur les contributions volontaires des entreprises bénéficiant de l'activité aéroportuaire, des gestionnaires d'aéroports et des collectivités territoriales. Les riverains ne peuvent s'en tenir à de vagues promesses de dons. Ils ont vu les ressources de l'ADEME, dont une part était destinée à leur indemnisation, diminuer de 12,5 % en 2003. Le dernier rapport de l'ACNUSA évalue les besoins à plus d'un milliard d'euros : on ne peut donc que redouter l'impuissance du nouvel établissement public administratif à remplir la tâche qui lui est impartie.

M. Jean-Pierre Blazy. Eh oui !

Mme Odile Saugues. Ce texte, monsieur le secrétaire d'Etat, n'est pas, comme nous aurions pu l'espérer, synonyme de progrès pour l'environnement. De surplus, il fera peser la gestion des nuisances aéroportuaires sur les collectivités locales, alors que la maîtrise de celles-ci devrait incomber à l'Etat et à lui seul. Quel sera le rôle des partenaires de l'établissement public administratif dans les discussions qui ne manqueront pas d'avoir lieu à la demande des low cost ? Quelle politique pourra être définie face à leurs exigences ? Voilà bien des questions.

En conclusion, ce texte, qui crée des communautés aéroportuaires sans périmètre bien défini, sans moyens financiers suffisants et qui se situe à l'articulation du projet de loi relatif aux responsabilités locales, de celui concernant la privatisation d'Aéroports de Paris, et de la modification des règles relatives à la sûreté des vols et à la sécurité de l'exploitation des aérodromes, crée une somme d'incertitudes. D'ailleurs, les hommes de terrain, tels les directeurs régionaux de l'aviation, n'ont pas été consultés. Nous sommes donc loin d'une grande loi aéroportuaire, englobant tous les aspects du problème et tenant compte d'un contexte communautaire en pleine évolution.

M. Eric Raoult. Que ne l'avez-vous fait !

Mme Odile Saugues. La précipitation n'est pas bonne conseillère. Le groupe socialiste regrette qu'un meilleur usage n'ait pas été fait des propositions d'un excellent rapport sénatorial. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les problèmes liés au développement des activités aéroportuaires sont bien connus. Quelques chiffres suffisent à en mesurer 1'ampleur - le rapporteur les a rappelés tout à l'heure : de 1970 à 2000, le transport aérien a connu un taux de croissance annuel de 6,5 %, passant de 460 millions de passagers transportés en 1970 à plus de 3 milliards en 2000. Cette progression est quasiment double de celle du produit intérieur brut français et bien supérieure au taux de la croissance mondiale.

Les retombées économiques sont colossales pour les régions qui accueillent des plates-formes aéroportuaires internationales. Pour la région Ile-de-France, le transport aérien représente un chiffre d'affaires de 35 milliards d'euros, soit 11 % du PIB régional. On imagine ce que ces chiffres peuvent représenter en termes d'emplois, de création de richesses et de retombées indirectes pour l'économie de tout un bassin. Ainsi, Aéroports de Paris emploie à peu près 100 000 personnes, ce qui représente 2 % de l'emploi total en Ile-de-France.

Voilà pour la réalité économique. N'oublions pas non plus les retombées touristiques pour la France.

Mais il y aussi la réalité environnementale. Des milliers de foyers sont exposés à des nuisances sonores insupportables. Les riverains évoquent « un bruit d'orage permanent » au-dessus de leurs têtes, « un sentiment d'étouffement lorsque, en pleine canicule, on ne peut pas ouvrir ses fenêtres à double vitrage à cause du grondement incessant des avions ». Ces témoignages sont brutaux mais bien réels. Le bruit n'est pas un épiphénomène de nos sociétés contemporaines ; il est, quelle que soit son origine, la première préoccupation des Français, avant l'insécurité,...

M. Jean-Pierre Blazy. C'est vrai !

M. Pierre-Christophe Baguet. ...comme l'attestent régulièrement des sondages d'opinion. Reconnaissons-le avec objectivité, les pouvoirs publics n'ont jamais pris la mesure de ce véritable problème de santé, qu'il serait injuste de réduire à une question de confort personnel, voire individualiste. C'est d'autant plus vrai que les élus, qui luttent avec leurs administrés contre le développement du trafic aérien, sont souvent les mêmes qui, par voie législative, essayent d'assouplir les règles de constructibilité dans les plans d'exposition au bruit, comme on l'a vu lors de la première lecture du projet de loi « urbanisme et habitat ».

Aucun gouvernement ne s'est jamais vraiment attaqué à la question et ce n'est pas, malheureusement, le plan national de lutte contre le bruit de Mme la ministre de l'écologie, si méritoire soit-il, qui permettra, avec ses 55 millions d'euros, d'offrir un peu plus de silence à nos concitoyens.

M. Jean-Pierre Blazy. C'est sûr !

M. Pierre-Christophe Baguet. La présente proposition de loi a le mérite d'aborder de front et de façon pragmatique la question des nuisances aéroportuaires. L'établissement public dont elle propose la création permettra en effet de réunir tous les acteurs concernés : les gestionnaires des infrastructures, les entreprises qui bénéficient des retombées économiques et les associations de riverains qui souffrent des nuisances environnementales. Ce texte nous permettra donc d'aller au cœur du problème, dans le concret d'un lieu de concertation où les problèmes, à défaut d'être tous réglés, pourront au moins être débattus. Ce point est d'une importance psychologique capitale car la souffrance liée au bruit se double d'un grand sentiment de solitude et d'impuissance, face à des événements qui sont perçus comme de véritables agressions répétées du monde extérieur.

Faisons le pari que cette nouvelle « communauté » saura traiter les problèmes. Elle donnera la parole aux associations de riverains, même si je regrette qu'elles n'aient qu'une voix consultative. Elles auraient dû former un collège à part entière.

Autre regret sur la forme : pourquoi avoir limité la possibilité de créer ces communautés aéroportuaires aux seuls territoires environnant un aéroport éligible à la TGAP ? Cette condition n'était pas dans le texte initial. C'est un amendement de Gérard Larcher qui l'a introduite. M. André Santini et moi-même avons déposé un amendement pour élargir les communautés aéroportuaires aux héliports à fort trafic situé dans les zones urbaines à forte densité. C'est le cas de 1' héliport de Paris 15, pour ne citer que cet exemple. Il est situé dans une zone urbaine particulièrement dense. Les nuisances engendrées par son exploitation - 12 000 mouvements par an - sont subies par plusieurs dizaines de milliers de riverains des communes alentour, telles que Boulogne-Billancourt, Issy-les-Moulineaux, Sèvres, Meudon, ou encore Rueil-Malmaison, comme peut en témoigner M. le président de la commission des affaires économiques.

M. Charles de Courson, qui a œuvré avec le conseil général de la Marne pour créer l'aéroport de Vatry - qui, je l'espère pour les Franciliens et pour les Champardennais, est destiné à monter en puissance sur le transport du fret - a déposé un amendement tendant à supprimer le deuxième alinéa de l'article ler qui fait référence à l'article 266 septies qui réglemente la TGAP. Pourquoi, en effet, limiter ces communautés aux aéroports dits « pollueurs payeurs » alors que leurs sources de financement, telles qu'elles sont envisagées par l'article 5, seront pour la plupart des cotisations volontaires ?

Un autre amendement de M. de Courson vise à corriger une injustice. En effet, ce sont parfois les départements et non les régions qui sont à l'origine de la création d'un aéroport. C'est le cas, vous l'aurez compris, monsieur le secrétaire d'Etat, dans la Marne. Donnons donc, à l'article 3, la possibilité aux conseils généraux de proposer la création de ces communautés.

Il est d'autres points sur lesquels je souhaite vous interroger à la demande de notre ami Michel Aumas, maire d'Arnouville-lès-Gonesse, commune située dans le plan de gêne sonore de Roissy. Il s'inquiète, en effet, du transfert à ADP des ressources du fonds de compensation des nuisances aéroportuaires - le FCNA -...

M. Jean-Pierre Blazy. Il a raison !

M. Pierre-Christophe Baguet. ...et des dossiers de demande d'indemnisation pour l'isolation phonique des habitations, aujourd'hui traités par l'ADEME. Grâce à la mise en place d'une équipe spécifique, l'agence a parfaitement rempli sa mission jusqu'à ce jour.


Il rappelle opportunément qu'ADP, dans le passé, a pour le moins manqué d'enthousiasme dans la gestion de ces dossiers. Il ne faudrait pas que, au sein des communautés aéroportuaires, il soit à la fois juges et parties dans leur traitement, puisque le rapporteur nous indique que c'est toujours ADP qui collectera et engagera le produit de cette taxe.

M. Jean-Pierre Blazy. C'est vrai !

M. Pierre-Christophe Baguet. Pour conclure, même s'il ne faut pas figer le fonctionnement de ces communautés par des précisions inutiles, il convient qu'elles bénéficient toutes les victimes des nuisances aériennes.

Voilà pourquoi, en espérant que nos amendements seront pris en compte et que nos remarques seront utiles à la rédaction des nombreux décrets prévus par le texte, le groupe UDF votera cette proposition de loi. Nous voulons que les problèmes vécus quotidiennement par les milliers de Français qui vivent à proximité d'un aéroport puissent trouver un début de réponse ou tout au moins appellent l'attention des acteurs économiques du développement aéroportuaire. Nous avons en tout cas le devoir de répondre aux attentes pressantes des milliers de Franciliens qui, qu'un troisième aéroport soit construit ou non, gardent l'espoir légitime de pouvoir ouvrir leur fenêtre durant les canicules à venir, de jour comme de nuit. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. François Asensi.

M. François Asensi. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce projet de création de communautés aéroportuaires est traité avec une diligence peu commune à nos assemblées : déposée au Sénat le 21 novembre 2003, cette proposition de loi fut adoptée le 11 décembre. C'est aujourd'hui aux députés de se prononcer sur ce texte.

Pourtant, en matière législative, la précipitation est rarement bonne conseillère.

Il ne s'agit pas de nier la nécessité d'une véritable coordination des acteurs de la sphère aéroportuaire, des collectivités territoriales aux riverains en passant par les entreprises. Il faut en effet que les attentes de chacun puissent être entendues en termes de souci de maîtrise des nuisances environnementales, de défense du cadre de vie, tout en soutenant l'activité économique.

Etant moi-même maire d'une commune sur laquelle se situe un tiers de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, je suis parmi les premiers concernés et les premiers à appeler de telles mesures.

Je m'interroge par contre sur le bien-fondé de la multiplication de textes sur les aéroports, d'où pourrait aisément naître un flou juridique.

Outre le texte que nous sommes amenés à débattre aujourd'hui, il faut prendre en compte le projet de loi relatif aux responsabilités locales, qui transfère aux collectivités territoriales une centaine d'aéroports, à l'exception des aéroports parisiens.

L'article 16 du projet de loi de finances rectificative pour 2003, quant à lui, vise à remplacer, à compter du 1er janvier 2005, le volet « bruit aérien » de la taxe générale sur les activités polluantes - la TGAP -, destiné au financement des travaux d'insonorisation des logements des riverains des aéroports, par une taxe affectée, gérée non plus par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, mais par les gestionnaires d'aéroports.

La même philosophie sous-tend ces trois textes : toujours moins d'Etat, toujours plus de place à l'initiative privée.

En effet, dans les communautés aéroportuaires que vous envisagez de créer, les entreprises seront représentées à parité avec les collectivités locales, mais les associations de défense de l'environnement et les salariés des plates-formes aéroportuaires seront sous-représentés.

Je note qu'aucune référence n'est faite dans le texte au devenir des commissions consultatives de l'environnement ni aux commissions consultatives d'aide aux riverains, qui sont pourtant aujourd'hui des outils très appréciés. N'octroyer qu'une voix consultative aux associations de riverains ne suffit pas à l'heure où tout le monde se réjouit du renouveau de la société civile.

J'espère enfin que ces nouvelles structures ne seront pas un moyen pour les compagnies low cost de revendiquer des aides déguisées, ce qu'elles font déjà en exigeant des chambres de commerce et d'industrie des contreparties à la promotion des régions dans lesquelles leurs avions atterrissent. Sans crier au loup, il ne faut pas, à mon avis, perdre ces risques de vue.

En outre, la proposition du sénateur Le Grand était sans doute ambitieuse, mais, après avoir été amendée par le Sénat, elle s'est réduite comme peau de chagrin et a été vidée de son sens, car il faut se donner les moyens, notamment financiers, de ses ambitions.

En supprimant le fonds d'investissement et de services de la communauté aéroportuaire - le FISCA -, vous avez sabré les ressources de ces futures communautés en passant de 55 à 70 millions à 5,8 millions d'euros seulement.

Je m'étonne également de l'angélisme de cette proposition de loi qui fait référence à des contributions volontaires, virtuelles donc, si l'on s'arrête aux déclarations de M. Jean-Claude Lambert, président de l'association des concessionnaires d'Aéroports de Paris, qui représente 220 boutiques, 170 points de services et 9 hôtels, et qui repousse l'idée d'une contribution de ces communautés, arguant qu'elles ne sont pas responsables de la pollution.

Les ressources étant taries, les projets se limitent à des exposés de principe, sans portée concrète. Je regrette à ce sujet que vous n'ayez pas dégagé de priorités dans les projets à financer et que ceux-ci ne soient pas plus clairement définis. J'y reviendrai d'ailleurs lors de l'examen de certains de mes amendements. Je déplore que l'on ait enlevé toute leur substance aux communautés aéroportuaires avant même qu'elles ne soient créées, car les besoins sont réels.

En Ile-de-France, c'est autour de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle que l'on a enregistré, depuis dix ans, le plus grand nombre de créations d'emplois et les aéroports parisiens en regroupent 150 000, avec 11 % du PIB de la région.

Pourtant, les riverains des quartiers défavorisés n'ont que peu d'accès aux emplois des plates-formes aéroportuaires parisiennes. Le taux de chômage observé dans les communes riveraines de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle est supérieur à la moyenne nationale.

Les populations riveraines ne sont pas les premières à bénéficier des retombées économiques des plates-formes aéroportuaires ; elles sont, par contre, les premières à en subir les nuisances, notamment environnementales.

Dans son rapport d'activité 2002, l'autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, en se fondant sur les chiffres fournis par l'administration de l'aviation civile, comptabilisait près de 450 000 personnes et 180 000 logements concernés par le bruit des avions.

Vous prétendez, par la création de nouvelles communautés, répondre à des besoins, alors que les crédits d'indemnisation sont en baisse constante depuis bientôt deux ans : moins 12,5 % pour le budget de 2003 par rapport à celui de 2002.

Pour 2003, l'augmentation de 20 millions d'euros annoncée, indispensable pour traiter les dossiers en attente, s'est réduite à 8 millions d'euros, alors même que le dernier rapport de l'ACNUSA chiffrait à 1,1 milliard le montant des besoins en matière d'indemnisation.

Pour 2004, la dotation budgétaire versée à l'ADEME sur le chapitre « isolation phonique » a été réduite, dans le cadre de la loi de finances, à la consommation des autorisations de programme déjà ouvertes et à l'achèvement des opérations en cours. Cet organisme est progressivement dépossédé de ses prérogatives au profit des gestionnaires d'aéroport, qui sont à la fois juges et parties.

Aujourd'hui, les délais d'indemnisation sont d'au moins trois ans. Les riverains qui subissent au quotidien ces nuisances n'ont pourtant pas le loisir d'attendre.

En outre, compte tenu du développement du trafic aérien des aéroports d'Orly et de Roissy, qui devrait doubler d'ici à 2015, ainsi que de l'augmentation du trafic dans de nombreux aéroports de province, les surfaces urbanisées soumises aux nuisances aéroportuaires ne feront que s'étendre.

J'attends aujourd'hui des mesures fortes et concrètes : il faut autoriser explicitement les organismes créés pour compenser les nuisances subies à emprunter afin de réduire les délais d'indemnisation.

Je propose également de mettre en place dans ces zones une fiscalité négative et, en vertu des incidences liées aux modifications du PEB, d'indemniser les collectivités territoriales en fonction des programmes immobiliers - ou plus exactement des programmes de ZAC - qu'elles avaient pu entreprendre dans ces zones.

Car, malgré l'extension du trafic aérien, ces zones restent des lieux de vie qu'on ne peut abandonner à la désertification en termes de services et d'infrastructures. Cela implique que les nuisances soient prises en compte à leur juste prix, mais aussi que l'on en valorise les atouts, comme le propose cette loi, en promouvant notamment la formation et l'information.

Il me semble également important de profiter de ce débat pour mettre fin à une idée reçue : vous prétendez, en Ile-de-France, prendre l'argent là où il est et répartir les richesses générées par l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle. Mais si vous examinez les chiffres - qui intéresseront notre collègue Patrick Ollier -, vous vous rendrez rapidement compte que l'argent est ailleurs.

Dois-je rappeler que, sur le territoire de l'aéroport de Roissy, la moyenne de revenu par habitant est de 8 171 euros, contre 18 512 euros pour le « pentagone d'or » que constituent les villes de Courbevoie, Puteaux, Suresnes, Rueil-Malmaison et Neuilly-sur-Seine ?

M. Jean-Pierre Blazy. C'est vrai !

M. François Asensi. En matière de bases de taxe professionnelle en 2002, si je reprends la comparaison de ces deux zones, elles sont de 622 millions d'euros environ sur celle de Roissy, contre 2,2 milliards pour celle qui comprend les villes que je viens de citer. Par conséquent, la richesse, en Ile-de-France, n'est pas située à proximité de l'aéroport Charles-de-Gaulle, mais à certains endroits, notamment dans les Hauts-de-Seine. Le produit des trois taxes représente 106 millions pour les communes qui sont sur l'aéroport Charles-de-Gaulle, et 260 millions d'euros pour ces mêmes cinq communes des Hauts-de-Seine.

II est aussi intéressant de noter que la moyenne des recettes de fonctionnement par habitant est de 790 euros sur le territoire de Roissy, contre 1 912 euros sur celui de la Défense.

Alors, chers collègues, si vous cherchez de l'argent en Ile-de-France, ne regardez pas hypocritement vers la Seine-Saint-Denis ou vers l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, mais tournez plutôt vos regards vers des lieux plus prospères, tels les Hauts-de-Seine.

Après cette digression nécessaire, j'en reviens à la question des communautés aéroportuaires. Si le texte initial était porteur de sens, il a été complètement dénaturé par les nombreuses amputations qu'il a subies en termes de ressources. Pour cette raison, mon groupe et moi-même ne pouvons apporter notre soutien à un tel texte qui relève désormais plus de l'illusion que de la réalité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Éric Raoult.

M. Eric Raoult. Comme vous le savez, monsieur le secrétaire d'Etat, les gens qui vivent autour d'un aéroport partagent déjà une communauté, celle des nuisances !

M. Jean-Pierre Blazy. Absolument !

M. Eric Raoult. C'est un problème ancien, que nous reconnaissons aujourd'hui. Car, mes chers collègues, il ne date pas de deux ans, mais plutôt de vingt !

Je suis donc très heureux de pouvoir m'exprimer, à l'occasion de l'examen de la proposition de loi de notre collègue sénateur, Jean-François Le Grand, instituant la communauté aéroportuaire.

Il s'agit là d'un texte dont le contenu répond à de nombreuses constatations et que, avec de nombreux élus franciliens, dont Jean-François Copé, nous attendions depuis longtemps.

Cette proposition de loi est issue du rapport que notre collègue sénateur Le Grand a remis au Premier ministre. Elle est également le fruit des travaux de la mission d'information de notre rapporteur, notre excellent collègue François-Michel Gonnot.

En créant un nouvel établissement public administratif, la communauté aéroportuaire, les objectifs de la proposition de loi et de son auteur sont simples : trouver un juste équilibre global en insistant sur les vertus du dialogue, de l'efficacité et de la transparence.

En effet, le dossier de la politique aéroportuaire en France a pris longtemps la forme d'une puissante incompréhension, confrontant les acteurs concernés et ne donnant pas toujours la parole à ceux qui, au quotidien, voient, dans les jardins de leurs pavillons, des avions passer au-dessus de leur tête.

Or, toutes les études le montrent, d'ici à 2020, avec un besoin d'accueil de 80 millions de passagers supplémentaires, le trafic aérien va presque doubler dans notre pays. Il convient donc de prévoir les voies et les conditions de cette évolution en rappelant les exigences que la réalité nous impose.

Pour ma part, constatant la réalité vécue quotidiennement dans un département comme la Seine-Saint-Denis, j'estime que nous devons concilier les quatre exigences suivantes.

D'abord, l'exigence du développement économique des territoires. Inéluctablement, les retombées économiques et fiscales seront extrêmement positives pour nos collectivités territoriales - malheureusement pas pour toutes. La taxe professionnelle, les emplois générés, la création de centres de formation professionnelle autour des aéroports sont autant de points qu'il convient d'accueillir avec enthousiasme.

Puis, l'exigence environnementale. Ne nous voilons pas la face. La multiplication des fréquences aériennes a des effets sur l'environnement : effets du kérosène sur l'atmosphère, sur la pollution et sur la santé des personnes. Cette exigence est bien réelle, comme vient d'ailleurs de le révéler une étude d'Airparif montrant que Roissy pollue autant que le périphérique parisien...

M. Jean-Pierre Blazy. Absolument !

M. Eric Raoult....et que cet impact de pollution touche principalement la Seine-Saint-Denis.

M. Jean-Pierre Blazy. Et le Val-d'Oise !

M. Eric Raoult. Selon le rapport, il s'agit de la Seine-Saint-Denis.

Ensuite, l'exigence de sécurité. Il convient d'assurer la sécurité à l'intérieur, mais également à l'extérieur de nos aéroports, afin que les trafics s'organisent le mieux possible. Je me réjouis d'ailleurs de la mise en place d'une mission d'information sur la sécurité du transport aérien des voyageurs au sein de notre assemblée.

Enfin, l'exigence des riverains. Le problème des nuisances sonores est une question centrale dans la gestion de notre politique aéroportuaire. J'ai à l'oreille, monsieur le secrétaire d'Etat, le bruit des avions qui survolent les communes de ma circonscription de Seine-Saint-Denis. J'ai l'impression que la combativité a été plus forte en Seine-et-Marne, dans le Val-d'Oise et dans les Yvelines, lors de la modification des couloirs aériens. Cette question mérite d'être abordée dans le cadre des communautés aéroportuaires.

En Seine-Saint-Denis, nous connaissons les problèmes que posent ces nuisances : la dépréciation de certains logements, par exemple. Des familles ont aujourd'hui encore dix ans d'emprunt à rembourser pour un logement qui a déjà perdu la moitié de sa valeur d'achat. Une famille peut-elle avoir le sourire quand on l'attaque au cœur même de son patrimoine ?

Par ailleurs, la question de la santé des riverains doit, selon moi, être érigée en véritable question de santé publique.

Se pose également le problème des conditions de vie matérielles et de sécurité des autour des.

Par le passé, il a été impossible d'avoir des réponses concrètes à toutes ces questions.

A titre d'anecdote, monsieur le secrétaire d'Etat, un jour, avec des riverains, nous avions relevé les heures exactes de passage de trois avions. A la maison de l'environnement, on nous a répondu qu'il n'y avait pas eu d'avion ce jour-là ! (Sourires.)

Des réponses, il en existe pourtant : les aides au logement, les mesures de santé publique et une meilleure maîtrise de l'urbanisme dans les périmètres autour des aéroports en ont apporté quelques-unes.

Mettre en pratique ces solutions, c'est aussi donner la parole aux premiers concernés : les riverains.


Ces derniers n'habitent pas nécessairement des communes bénéficiant de la taxe professionnelle des aéroports, mais ils se voient toujours imposer la taxe « auditionnelle ».

Face à ce problème, j'ai créé il y a quelques semaines, avec plusieurs collègues de la Seine-Saint-Denis, dont le maire de Coubron, Raymond Coenne, une association que nous avons intitulée : « Silence, on vit, en bas ! ». Notre objectif est de lutter contre les nuisances aériennes dans le département.

M. Jean-Pierre Blazy. Bon courage !

M. Eric Raoult. Voilà réalité subie par les riverains des aéroports fait en effet apparaître un paradoxe : certaines personnes vivant sous les couloirs aériens, à dix kilomètres de l'aéroport, pâtissent davantage des nuisances que ceux dont la commune est située en lisière de la plate-forme aéroportuaire.

Ainsi, à Dugny, en bout de piste de l'aéroport du Bourget, on endure plus de nuisances que quinze kilomètres plus loin, mais à Garges, dans le Val-d'Oise, on en subit également les conséquences. Mon collègue François Scellier pourrait en parler beaucoup mieux que moi.

L'adoption de la proposition de loi aura pour effet de créer un lieu de compréhension, d'écoute et de dialogue pour les riverains, les collectivités locales et les entreprises concernées.

Ce texte prévoit des solutions simples et de bon sens afin de « faire bénéficier les riverains des situations de nuisances qu'ils subissent », pour reprendre l'expression utilisée en première lecture par notre collègue du Sénat Gérard Larcher.

Il est en effet naturel que la voix des Franciliens riverains des aéroports soit entendue. C'est d'ailleurs, et vous le savez, monsieur le secrétaire d'Etat, une préoccupation particulièrement chère à votre collègue Jean-François Copé.

Mme Odile Saugues. On l'avait deviné, mais merci de le rappeler !

M. Eric Raoult. Voilà donc, posées en termes généraux, les réalités d'un problème qui, comme dans le Val d'Oise, les Yvelines, l'Essonne ou l'Oise, est d'une grande acuité dans mon département.

La mise en cohérence permise par les communautés aéroportuaires aura plusieurs conséquences bénéfiques : régler les litiges en amont plutôt que d'opposer des points de vue ; trouver le consensus plutôt qu'entretenir l'affrontement ; aboutir à des majorités de décision plutôt que multiplier les minorités de blocage.

L'efficacité, la transparence, le dialogue, voilà bien les trois maîtres mots de cette réforme qui vise à trouver une solution adaptée à un débat qui mérite désormais d'être dépassionné.

Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera bien évidemment cette proposition de loi. Ce qui n'a pas été fait auparavant, nous le faisons enfin aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Patrick Ollier, président de la commission. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'idée de communauté aéroportuaire, - communauté dont on nous propose aujourd'hui la création - a été formulée par l'association nationale d'élus « Ville et aéroport », lors de son audition auprès de la mission Le Grand.

La création d'une instance de concertation et de meilleure gouvernance des retombées économiques générées par les aéroports constitue en soi une avancée. On ne peut donc qu'y adhérer. Je me félicite également qu'il soit prévu d'élargir leur application aux grands aéroports régionaux, une initiative qui, si elle n'était pas envisagée dans la lettre de mission, se révèle indispensable pour ne pas limiter à la seule Ile-de-France le débat sur une répartition plus équitable des retombées économiques aéroportuaires.

Pourtant, si l'idée est bonne, les moyens prévus pour la concrétiser sont largement insuffisants. Pourquoi examine-t-on aujourd'hui une proposition de loi dénaturée et vidée de sa substance financière au regard du texte initial proposé par le sénateur Jean-François Le Grand sur la base des conclusions de son rapport ? Quelle est, monsieur le secrétaire d'Etat, du point de vue des moyens engagés, la valeur ajoutée de ce texte par rapport aux dispositifs existants ?

M. Francis Delattre. Malheureusement, il a raison !

M. Jean-Pierre Blazy. Si nous disons plutôt « oui » au rapport de Jean-François Le Grand, nous disons plutôt « non » à la proposition du même, en fait revue et corrigée par Jean-François Copé. S'agissant en effet de la proposition adoptée par le Sénat, un Jean-François peut en cacher un autre ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je n'y vois qu'un texte de circonstance électorale pour M. Copé, candidat aux élections régionales en Ile-de-France. En fait, il ne s'agit que de dédouaner le Gouvernement pour sa mauvaise politique et de continuer à pratiquer auprès des Franciliens un discours en trompe-l'œil !

M. Eric Raoult. Comment osez-vous dire cela ? Vous qui vous êtes contentés du statu quo pendant des années !

M. Jean-Pierre Blazy. Par simple souci d'affichage, le candidat Copé fait des promesses pour mieux faire oublier l'abandon par ce gouvernement, dont il est le porte-parole, du troisième grand aéroport hors de l'Ile-de-France.

M. Eric Raoult. Et Gayssot !

M. Guy Drut. Composez le 36 15 code Jospin !

M. Jean-Pierre Blazy. Je voudrais tout d'abord replacer l'examen de cette proposition de loi dans le contexte global de la politique du Gouvernement en matière de transport aérien.

Le 25 janvier dernier, à Paris, une manifestation régionale a rassemblé des milliers de riverains franciliens et des élus de toutes tendances politiques - j'insiste sur ce point. Ils sont venus crier leur colère face à l'augmentation des nuisances aériennes, sonores et atmosphériques, ...

M. Guy Drut et Mme Geneviève Colot. Merci Gayssot !

M. Jean-Pierre Blazy. ...les vols de nuit et l'abandon du troisième aéroport - et M. Gayssot n'y est pour rien.

Telle est la conséquence de la politique à courte vue, dénuée de courage et de cohérence, qui est menée depuis mai 2002 dans le domaine aéroportuaire.

M. Eric Raoult. Blazy, Gayssot, même combat !

M. Jean-Pierre Blazy. Rappelons la réalité : après un débat public qui avait duré plusieurs mois, le gouvernement Jospin avait décidé, le 15 novembre 2001, d'implanter une nouvelle infrastructure à Chaulnes, en Picardie. Mais Gilles de Robien, quarante-huit heures après son entrée en fonction au ministère, s'est empressé d'annoncer le gel, puis l'annulation des procédures déjà engagées par le préfet de Picardie, ...

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Mais non, il n'avait rien engagé !

M. Jean-Pierre Blazy. ...remettant ainsi en cause la décision de l'Etat.

M. de Robien a ensuite commandé un rapport d'information parlementaire,...

M. Francis Delattre. Il l'a commandé, on ne peut le nier !

M. Jean-Pierre Blazy. ...qui a conclu à la non-opportunité du troisième aéroport dans le grand bassin parisien. Si le constat dressé par ce rapport est juste - la situation en Ile-de-France y est qualifiée, selon vos propres termes, monsieur Gonnot, de « dramatique » et d'« explosive » - la solution proposée est inacceptable : la création de deux nouvelles pistes à Roissy est en effet présentée comme le meilleur choix du point de vue environnemental.

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. J'ai parlé de pistes alternatives.

M. Patrick Ollier, président de la commission. Vous caricaturez, Monsieur Blazy !

M. Jean-Pierre Blazy. Ce n'est donc pas le hasard qui réunit aujourd'hui une nouvelle fois le Gouvernement et notre collègue François-Michel Gonnot. Cependant, vous avez raison sur un point, monsieur le rapporteur : s'il n'y a pas de troisième aéroport, il faudra de nouvelles pistes à Roissy. Mais le Gouvernement dissimule cette vérité d'évidence et jure ses grands dieux : « Il n'y aura jamais de cinquième piste » !

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Le Gouvernement a dit non !

M. Jean-Pierre Blazy. Vous ne serez peut-être plus secrétaire d'Etat, monsieur Bussereau, lorsque l'un de vos successeurs n'aura plus d'autre solution que de choisir l'inacceptable.

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Mais non ! Quelle caricature !

M. Jean-Pierre Blazy. Vous savez qu'il est temps de prévoir l'avenir, monsieur le secrétaire d'Etat, car tous les observateurs annoncent 140 millions de passagers sur les plates-formes parisiennes en 2020, contre 71 millions actuellement. Le trafic atteindrait 990 000 à 1 250 000 mouvements annuels, et 930 000 si l'on parvenait à optimiser l'emport moyen des avions d'ici à 2020.

M. Eric Raoult. Vous aimez vous faire peur !

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. C'est ce qui se passerait si nous ne faisions rien !

M. Jean-Pierre Blazy. La stagnation temporaire due à l'effet 11 septembre, la guerre en Irak et le SRAS n'affaiblira pas la demande structurelle de croissance. La reprise est d'ailleurs effective au dernier trimestre 2003. Elle se poursuit en 2004 avec une croissance attendue autour de 5 %.

Il faut donc très vite repenser le mode de développement du transport aérien en intégrant les contraintes environnementales et de sécurité. Je constate, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous n'avez pas choisi d'appliquer le principe de développement durable voulu par le Président de la République dans la charte de l'environnement, et qui sera bientôt constitutionnel.

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Mais si !

M. Jean-Pierre Blazy. En vérité, c'est la politique du laisser-aller, du laisser-faire que vous choisissez, ...

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Au contraire !

M. Jean-Pierre Blazy. ...le même choix libéral que celui qui vous conduit à privatiser aujourd'hui Air France et demain Aéroports de Paris.

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. C'est exactement l'inverse ! Le laisser-aller, c'était avant !

M. Jean-Pierre Blazy. Les riverains franciliens comme ceux de province, de Lyon ou de Toulouse par exemple, refusent d'être sacrifiés parce que l'Etat et votre gouvernement n'ont pas pris les décisions nécessaires et courageuses qui s'imposaient en matière de développement de l'offre aéroportuaire. Ils n'attendent pas seulement de l'argent et de la compensation, mais surtout moins de bruit et de nuisances ! Le gigantisme aéroportuaire et la centralisation parisienne doivent être corrigés. Envisager le laisser-aller, le laisser-faire, c'est penser que l'on peut encore, au XXIe siècle, développer un aéroport de façon illimitée et hors de toute contrainte environnementale.

M. Eric Raoult. Que ne l'avez-vous fait !

M. Jean-Pierre Blazy. Après avoir annoncé l'existence du troisième aéroport à Amsterdam à l'occasion de la fusion d'Air France et de KLM, ...

M. Francis Delattre. Un grand moment !

M. Jean-Pierre Blazy. ...vous parlez à présent, monsieur le secrétaire d'Etat, de « troisième réseau aéroportuaire ». On a du mal à comprendre.

Ce troisième réseau aéroportuaire « virtuel » n'est qu'une « vraie fausse » solution de plus, qui vient confirmer le refus du troisième aéroport. Il repose sur le développement de plates-formes régionales existantes, en parallèle avec celui des plates-formes parisiennes. Mais en réalité, la logique du hub rend impossible le développement d'un troisième réseau aéroportuaire autour de Beauvais, Vatry et Châteauroux, par exemple. Il faut donc à la fois concevoir un bipôle aéroportuaire francilien - liant Roissy à un site distant de quelques dizaines de kilomètres au nord ou à l'est -, encourager le développement mesuré de quelques plates-formes régionales, parier sur l'intermodalité avec le TGV - nous sommes d'accord là-dessus - et, très vite, utiliser Vatry pour « desserrer » le fret de nuit. L'aéroport de Vatry, dans la Marne, constitue en effet une solution immédiatement opérationnelle. Tout est prêt pour faire venir un intégrateur de type FedEx, hormis la performance des accès terrestres, qui fait défaut.

M. Pierre Micaux. Vous avez raison !

M. Jean-Yves Hugon. A Châteauroux aussi, d'ailleurs !

M. Jean-Pierre Blazy. Hélas, les décisions que vous avez prises à l'occasion du dernier comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire ne permettent pas d'envisager cette dernière solution.

J'en viens au sujet qui nous occupe aujourd'hui, ...

M. Guy Drut. Il est temps !

M. Jean-Pierre Blazy. ...la proposition de loi de Jean-François Le Grand.

Je remarque la rapidité avec laquelle ce texte a été inscrit à l'ordre du jour : à peine déposé, il est adopté au Sénat le 11 décembre, avant même la communication ministérielle en conseil des ministres du 17 décembre, et se trouve déjà à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

M. Patrick Ollier, président de la commission. Merci de rendre ainsi hommage à notre efficacité !

M. Jean-Pierre Blazy. On aurait pu se dire que tant de célérité témoignait d'une volonté certaine de traduire dans la réalité les propositions du rapport Le Grand.

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. En effet !

M. Jean-Pierre Blazy. Au lieu de cela, monsieur le secrétaire d'Etat, sous la pression conjuguée de votre cabinet, de Bercy sans doute, et de M. Copé, ...

M. Eric Raoult. Laissez donc M. Copé tranquille !

M. Jean-Pierre Blazy. ...la version initiale de la proposition de loi, qui prévoyait une ressource suffisante et l'instauration de nouvelles taxes et contributions, a été vidée de l'essentiel de son contenu concret.

Le rapport Le Grand allait pourtant dans le bon sens. Les montants prévisionnels mentionnés dans le rapport étaient estimés, en rythme de croisière, à une somme comprise entre 55 et 70 millions d'euros annuels pour Roissy et entre 25,5 et 37,5 millions d'euros pour Orly.

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Cela concerne la loi de finances !

M. Jean-Pierre Blazy. Les deux nouvelles taxes qui devaient abonder le FISCA permettaient de dégager 30 à 35 millions d'euros pour Roissy et de 15 à 19 millions pour Orly, soit la moitié de la ressource !

L'autre moitié est composée de ressources existantes : le produit des sanctions administratives prononcées par l'ACNUSA à l'encontre des compagnies aériennes et les fonds de compensation des nuisances sonores aéroportuaires de Roissy et d'Orly, que nous avons créés.

Je le rappelle en effet, le gouvernement Jospin, dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 1999, avait créé, pour Roissy et pour Orly, deux fonds de compensation des nuisances sonores aéroportuaires, alimentés à parité par une contribution d'Aéroports de Paris et par l'écrêtement des fonds de péréquation de la taxe professionnelle. Les communes bénéficiaires sont celles concernées par les plans de gêne sonore. Ce dispositif fonctionne depuis 2000. Dans le même temps, l'ACNUSA, autorité indépendante, était créée en février 2000, et le fonctionnement des instances consultatives locales était grandement amélioré.

Les outils sont donc en place. Il ne s'agit que de les améliorer, et la création des communautés aéroportuaires peut en effet y contribuer. Pour cela, il est essentiel de confier à la taxation le rôle, important, de régulation et de compensation. L'externalité négative que représentent la pollution et les nuisances sonores liées au trafic aérien doit en effet être prise en compte dans le calcul de toutes les taxes. Il faut donc aller dans le sens de l'internalisation du coût environnemental.

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Vous voulez donc augmenter l'impôt ?

M. Jean-Pierre Blazy. Même à Bruxelles, on commence à y réfléchir.

Sans forcement aller jusque-là, M. Le Grand avait retenu l'idée d'une taxation additionnelle à la TNSA dans le cadre du FISCA, désormais supprimé au motif qu'il nécessite un examen spécifique dans le cadre des lois de finances. Car soyons clair, c'est bien le sens de la formule « le cas échéant » à l'article 5 ! C'est fort dommage, car le texte qui nous est soumis ne repose plus que sur des ressources « virtuelles », ne permettant pas, à mes yeux, le fonctionnement de la communauté aéroportuaire.

La proposition de taxation des entreprises a été remplacée par des contributions volontaires auxquelles M. Le Grand ne croit même pas, puisqu'il les qualifie d'« idylliques » - je vous renvoie à la page 34 de son rapport. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il avait proposé initialement de véritables taxes.

Les ressources deviennent donc très aléatoires, qu'il s'agisse des versements des gestionnaires d'aéroport ou des contributions des entreprises bénéficiant de l'activité de ces derniers.

Finalement, seules les collectivités locales seront tenues de financer les projets de la communauté aéroportuaire par l'intermédiaire des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle ! Cela est inacceptable !

Comment les élus pourraient-ils accepter de gérer un dispositif sans disposer des ressources suffisantes pour mieux répartir les retombées économiques sur un territoire qui devrait avant tout comprendre les communes incluses dans les plans de gêne sonore - un territoire qui, de surcroît, s'élargira prochainement à l'occasion de la révision indispensable des PGS ? Monsieur le secrétaire d'Etat, saupoudrer des miettes risque de ne pas être très exaltant !

Nous sommes favorables au principe de la communauté aéroportuaire, mais pas si elle est aussi virtuelle que votre « troisième réseau aéroportuaire » ! Nous souhaitons donc améliorer le texte issu du Sénat. Mais, monsieur le rapporteur, j'espère que votre mission ne se bornera pas, aujourd'hui, à refuser les amendements que les uns et les autres, sur tous les bancs, seront susceptibles de vous proposer,...

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Je vous rassure !

M. Jean-Pierre Blazy. ...simplement pour obtenir un vote conforme du texte et hâter sa promulgation à des fins purement électorales. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous aurions alors mal travaillé. Mais j'ose à peine croire à une telle hypothèse. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. N'y croyez pas ! Nous faisons la loi, pas les élections !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État aux transports et à la mer. M. Blazy a vraiment mauvais esprit !

M. le président. La parole est à Mme Geneviève Colot.


Mme Geneviève Colot
. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'avion est pour tous un moyen de transport important. Sa place dans la vie quotidienne de chacun est considérable et son poids économique incontestable. Le développement du transport aérien est constant et, en dépit des crises économiques, il ne s'est jamais démenti. Il atteint aujourd'hui une telle importance que son impact environnemental est considérable. Ses effets sur la vie des habitants, dans un périmètre de plus en plus large, sont incontestables. Ses nuisances sur nos concitoyens ne sont parfois plus acceptables.

II nous faut aujourd'hui assurer au transport aérien des conditions d'existence et de développement compatibles avec les qualités que nos concitoyens sont en droit d'exiger de leur environnement. Le transport aérien doit prendre sa place dans le développement durable, nous devons conjuguer ensemble essor économique et qualité de vie.

Les « communautés aéroportuaires » que cette proposition de loi va créer regrouperont, dans une dynamique commune, l'ensemble des acteurs concernés par la plate-forme aéroportuaire. M. Le Grand les a justement définies. Elles contribueront ainsi, j'en suis sûre, à répondre concrètement et efficacement aux aspirations des populations qui souhaitent bénéficier des retombées positives de l'activité aéroportuaire tout en étant protégées des nuisances.

Il n'en demeure pas moins que ces nuisances sont sensibles. Nous pouvons élaborer des projets à long terme, comme l'excellent rapport de notre collègue François-Michel Gonnot l'a démontré, mais il faut aussi, avec courage, s'efforcer de traiter une réalité qui, quoi qu'il arrive, est incontournable : les avions, autour d'un aéroport, sont bruyants.

Ce volet bruit n'est que peu abordé dans cette proposition de loi.

Trois éléments me semblent en la matière indispensables : la connaissance de la réalité des vols, une véritable politique de minimisation du bruit des avions et la pénalisation des contrevenants à la législation.

Dans ces trois domaines, un gros travail reste à faire.

Il est d'abord indispensable de connaître la réalité des vols.

Aéroports de Paris avait préparé un outil particulièrement performant pour informer objectivement les populations des trajets des avions. Des raisons de sécurité ayant été invoquées, ce projet, promis aux riverains, a été abandonné. Les communautés aéroportuaires sont, j'en suis persuadée, les structures adaptées pour être informées du trafic. Elles doivent recevoir toutes les informations concernant le survol de leur périmètre. Seule une connaissance exacte et objective de la réalité d'un problème peut permettre de le traiter. Dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres, le perçu et le subi ne correspondent pas forcément à la réalité. Une information honnête, exacte, objective, sincère, incontestable, s'impose, et les communautés aéroportuaires sont la structure apte à la gérer.

Il faut ensuite véritablement minimiser les bruits.

Cette politique du moindre bruit nécessite un travail sans a priori sur les avions eux mêmes et spécialement sur les techniques de vol.

Le travail pour rendre les avions moins bruyants est régulier, et je me réjouis du signe fort que le Gouvernement a donné en interdisant les avions les plus sonores. Hélas, de trop nombreuses dérogations discréditent cette politique.

M. Francis Delattre. C'est vrai !

Mme Geneviève Colot. Nous devons tendre dans les meilleurs délais vers la dérogation zéro ainsi que vers le respect absolu du couvre-feu. Le travail sur les techniques de vol est contrarié par de fortes pressions, par des a priori tenaces, par une indifférence de certains acteurs parmi les plus importants. II faut de la volonté politique pour reconsidérer des principes trop souvent acceptés comme définitifs.

Pour le décollage par exemple, une réflexion sur une pente de montée minimale, sur des plafonds avant virage mais aussi des plafonds d'accélération, ou encore sur un cap direct vers la destination doit être menée.

Pour l'atterrissage, nous devons également réfléchir à des routes, à des techniques moins bruyantes, notamment avec une réduction des puissances, donc du bruit, ou encore généraliser des arrivées au-dessus des décollages.

Dans ce domaine, de gros progrès sont à faire. Nous devons dépasser les intérêts catégoriels et, après la sûreté des vols, considérer la sécurité et la tranquillité des populations survolées comme un impératif.

Le respect des altitudes est un aspect primordial. Nous devons tendre vers une élévation substantielle des plafonds actuels.

Enfin, la pénalisation des contrevenants aux règles de navigation doit être affirmée et appliquée.

Les sanctions doivent être dissuasives. Pour cela, leur montant doit être notablement réévalué. Les communautés aéroportuaires pourront alors, comme le prévoit cette proposition de loi en son article 2, soutenir les actions territoriales et les initiatives pour corriger les atteintes à l'environnement et à la qualité de la vie. Il faut que le fruit des amendes bénéficie aux populations qui subissent les nuisances.

Il faut que la loi sur laquelle nous nous accordons soit respectée par tous, dans 1'intérêt de tous.

Les communautés aéroportuaires seront alors un instrument utile. Elles devront aussi permettre aux communes de ne plus se dresser inutilement les unes contre les autres, chacune souhaitant concentrer les avions au-dessus de la tête du voisin. Un travail commun, pour un intérêt commun, doit être la mission des communautés aéroportuaires.

Avec cette proposition de loi, nous montrons la bonne direction, nous fixons le bon objectif. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. François Scellier, dernier orateur inscrit.

M. François Scellier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je suis élu, vous le savez peut-être, d'un département, le Val d'Oise, où tout ce qui concerne la législation ou la réglementation relatives à l'activité aéroportuaire est particulièrement sensible. C'est donc avec une grande attention que nous avons étudié le texte qui nous est soumis aujourd'hui, en concertation avec les élus du département.

Ce texte représente un progrès réel :

D'une part, il inscrit l'exploitation aéroportuaire dans une logique de développement durable, en traitant globalement les aspects de développement économique, de protection de l'environnement, de qualité sociale et de respect des citoyens ;

D'autre part, il concrétise, sur le plan législatif, les réflexions menées depuis plus de dix ans sur cette question, notamment par les élus locaux, que ce soit sur le terrain ou au cours des différentes missions qui se sont succédé : affectation des ressources à des projets structurants, contractualisation avec les collectivités locales, participation des entreprises et des associations au débat public.

Cependant, ce texte reste incomplet, notamment au regard des préconisations du rapport du sénateur Le Grand, qui allaient, sur certains points, sensiblement plus loin que sa proposition de loi.

C'est la raison pour laquelle je suggère quelques amendements, que je défendrai tout à l'heure, dont l'objet est d'améliorer le texte qui nous est soumis pour qu'il soit plus efficace et mieux perçu, notamment par les populations riveraines et les élus concernés.

Il m'apparaît important de saisir l'opportunité qui nous est offerte aujourd'hui, pour assurer une cohérence entre les périmètres qui existent actuellement - plan de gêne sonore, plan d'exposition au bruit, futur périmètre de la communauté aéroportuaire ; pour respecter le principe démocratique selon lequel « qui paie décide », en donnant voix délibérative aux seules entreprises appelées à contribuer obligatoirement au développement des territoires concernés ; pour faciliter ce développement en faisant fixer, en loi de finances, un mode de financement qui dégage au bénéfice de ces territoires des ressources bien supérieures à celles qui existent aujourd'hui, sans accroître pour autant la pression fiscale, mais en améliorant la localisation des retombées économiques du trafic aérien ; enfin, pour garantir l'équilibre financier des opérations engagées par les communes qui bénéficient aujourd'hui du fonds de compensation des nuisances.

M. Jean-Pierre Blazy. Très juste !

M. François Scellier. Nous sommes prêts, monsieur le secrétaire d'Etat, à saisir au bond toute occasion de réconcilier l'économie et l'environnement, les riverains et les gestionnaires des aéroports - et, sur ce point, la loi qui va être votée peut y aider. Il n'en demeure pas moins que, si les dispositifs retenus peuvent permettre d'améliorer la situation, ils nous semblent encore insuffisants pour garantir sur le long terme l'avenir des riverains, qui ne sauraient supporter indéfiniment une aggravation des nuisances. Nous persistons à penser que l'étude et la réalisation d'un troisième aéroport ne sauraient être pour autant sérieusement écartées. (« Très bien ! » et applaudissements sur de nombreux bancs.)

M. le président. La discussion générale est close.

La parole est à M. le secrétaire d'État aux transports et à la mer.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État aux transports et à la mer. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je voudrais d'abord remercier M. le rapporteur de la commission des affaires économiques de l'excellent travail qui a été le sien sur un sujet qu'il connaît bien, remercier le président de cette commission de son intervention, ainsi que tous les orateurs, qui connaissent le sujet : Mme Saugues, qui a fait partie de la mission d'information, M. Baguet, qui est concerné, M. Asensi, qui connaît bien ces questions, M. Raoult également, M. Blazy, qui est un fin connaisseur du secteur aérien, Mme Colot, et M. Scellier, qui s'est souvent exprimé en sa qualité de président du conseil général d'un grand département en première ligne sur les questions aéroportuaires.

Je crois que nous sommes tous d'accord sur le fait que le transport aérien est un atout économique majeur, que son rôle est incontestable - et nous souhaitons son développement -, mais qu'il est également perçu comme une menace pour l'environnement et la qualité de vie par une grande partie des populations riveraines des aéroports. L'exigence de nos concitoyens concernant la réduction des nuisances créées par les activités aéroportuaires aériennes est donc légitime. Ce qui peut menacer le développement du transport aérien à l'échelle mondiale, ce serait qu'on ne prenne pas bien en compte les aspirations des riverains des aéroports. C'est un problème que nous connaissons dans notre pays, en Ile-de-France et ailleurs, et que les grands pays dans le monde connaissent également.

Résoudre la quadrature du cercle n'est jamais simple. Ici, il s'agit d'essayer de concilier les impacts économiques et les impacts environnementaux du transport aérien.

Il y a eu un débat tout à l'heure à propos des retombées économiques. On voit bien que le transport aérien génère des retombées économiques et un nombre considérable d'emplois, par l'activité qui lui est directement liée, mais aussi au titre des conséquences indirectes de l'exploitation des aéroports, ou encore par l'effet catalyseur de ceux-ci. C'est autour du site de Roissy que se sont créés depuis un certain nombre d'années dans la région Ile-de-France le plus grand nombre d'emplois, avec des activités qui sont parfois très éloignées en apparence du transport aérien. Mais les populations riveraines ne sont pas les premières à bénéficier de ces retombées. C'est donc un débat particulièrement important et le sénateur Le Grand a bien voulu y apporter sa contribution avec le rapport qu'il a élaboré et la proposition de loi que votre assemblée examine aujourd'hui.

Dès son arrivée, le Gouvernement s'est placé dans une logique de développement durable des transports. La réduction des nuisances sonores et l'aménagement et la gestion des territoires environnants sont deux volets importants dans la politique aéroportuaire qui est engagée depuis le mois de mai 2002.

En décembre dernier, Gilles de Robien a d'ailleurs fait une communication en conseil de ministres dans laquelle il a rappelé les orientations qu'il avait annoncées dès le mois de juillet 2002 pour promouvoir un développement durable des aéroports franciliens.

Celles-ci étaient articulées autour de quatre objectifs majeurs : limiter la gêne sonore globale ; réduire les nuisances sonores la nuit ; garantir la transparence ; mieux répartir les retombées économiques des aéroports.

Les trois premiers objectifs ont été traduits dans les faits.

Les avions les plus bruyants du « chapitre III » sont progressivement retirés de l'aéroport de Paris-Charles-de- Gaulle. Il s'agit d'une première en Europe où aucun autre aéroport ne fait l'objet d'une restriction de ce type. C'est donc une mesure particulièrement importante.


D'autre part, une réduction du trafic nocturne est engagée sur l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle. (M. Jean-Pierre Blazy proteste.)

M. Francis Delattre. A un avion près !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Air France a supprimé la quasi-totalité de ses vols de nuit et La Poste a réduit les siens de 25 % entre minuit et cinq heures.

M. Francis Delattre. Moins un !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Monsieur Delattre, il n'y a pas que l'Ile-de-France et il est arrivé à certains de vos collègues de recevoir des protestations parce que, dans leur région, le courrier partait à treize ou à quatorze heures au lieu de dix-sept ou de dix-huit heures.

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Tout à fait !

M. Francis Delattre. Et le TGV !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. L'activité des PME, que par ailleurs vous défendez avec beaucoup de talent, en était gênée.

Par mesure de solidarité nationale une partie des régions françaises a accepté une baisse des prestations publiques au service de cette politique.

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Absolument !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Des volumes de protection environnementale ont été définis pour les aéroports de Paris-Charles-de-Gaulle et de Paris-Orly, afin de s'assurer que les trajectoires et les procédures prescrites sont bien respectées, au départ et à l'arrivée de ces aéroports.

Mme Colot a rappelé à juste titre que nous avions stoppé le projet vitrine, qui consiste à connaître, quasiment en temps réel, sur internet, les trajectoires des avions. Nous y avons été conduits pour des raisons de défense nationale, suite aux événements du 11 septembre et de la guerre en Irak.

M. Jean-Pierre Blazy. Et depuis ?

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. J'évoquerai à nouveau ce sujet avec Mme la ministre de la défense pour voir, la conjoncture internationale ayant évolué, s'il est possible de relancer ce projet. Il permet par exemple à un maire qui reçoit un appel téléphonique parce qu'un avion a fait du bruit de donner des éléments de réponse à partir de données pratiques.

En dehors de cette transparence, il faut veiller au respect des trajectoires. Avec Gilles de Robien nous avons rappelé aux contrôleurs aériens leurs missions fondamentales : premièrement, garantir la sécurité -il s'agit d'assurer le trafic dans les meilleures conditions de sécurité pour les avions, leurs passagers et les populations qui sont au-dessous ; deuxièmement, assurer la fluidité du trafic -trop d'entre nous ont souffert de retards ou de problèmes d'organisation du trafic aérien ; troisièmement, s'assurer du respect absolu des trajectoires.

J'ai aussi demandé à la direction de la navigation aérienne d'expérimenter une méthode que je voudrais développer et qui consiste, comme c'est le cas à Londres Heathrow, au Canada ou aux Etats-Unis, à faire des descentes complètes, c'est-à-dire à diminuer les paliers.

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Très bien !

M. Patrick Ollier, président de la commission. Bonne initiative !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Les contrôleurs préfèrent les descentes par paliers, cela se comprend. Les avions étant à la même hauteur et à la même vitesse, c'est plus facile à gérer en termes de sécurité et de fluidité. Mais il existe des aéroports où la descente s'effectue de manière beaucoup plus continue, ce qui évite les longs paliers au-dessus des populations survolées.

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. C'est fondamental !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Nous allons tester cette méthode d'abord sur les vols de nuit ou de soirée parce qu'il y a moins de trafic. Si elle donne des résultats, nous l'étendrons au plus grand nombre de vols possibles autour des aéroports parisiens et dans les régions.

M. Francis Delattre. C'est bien, cela fait dix ans que nous le demandons !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Eh bien c'est parti ! Je tiendrai la représentation nationale informée de l'évolution de ce dossier.

M. Francis Delattre. Nous serons vigilants.

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Madame Colot, vous avez raison, il faut certainement davantage de sanctions - je souhaite que l'ACNUSA soit sévère - et une augmentation des contrôles sur le respect des trajectoires.

J'en viens au quatrième objectif : la meilleure répartition des retombées économiques des aéroports. C'est le cadre de la mission confiée au sénateur Jean-François Le Grand, d'où est issue la proposition de loi examinée aujourd'hui.

Quelques remarques ont été faites sur la rapidité avec laquelle ce texte est venu en discussion. Monsieur Blazy, la différence entre ce gouvernement et le précédent, c'est que lorsqu'il y a urgence, il traite les problèmes. Il ne les laisse pas la majorité suivante. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.) Nous allons vite parce que, comme vous le dites vous-même, il y a urgence.

M. Jean-Pierre Blazy. Surtout lorsque les élections régionales approchent !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Les élections régionales n'ont strictement rien à avoir avec l'urgence ! Allez expliquer à vos électeurs, monsieur Blazy, que vous auriez préféré attendre quelques mois parce que cela convenait mieux à votre propre calendrier politique !

M. Jean-Pierre Blazy. C'est un mauvais texte !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Nous souhaitons d'abord améliorer les retombées socio-économiques des aéroports au profit des communes et des populations riveraines.

Il est vrai que les taux de chômage observés dans les communes riveraines de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle sont supérieurs à ceux de la moyenne nationale, malgré le vivier d'emplois que représente un aéroport.

M. François Asensi. Eh oui !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. De fait, l'accès à ces emplois est souvent plus aisé pour les populations résidant au cœur de Paris que dans les communes riveraines de la plate-forme.

Par ailleurs, les collectivités territoriales ayant engagé des opérations d'urbanisme se trouvent souvent dans l'impossibilité de les mener à bien lorsque l'extension des plans d'exposition au bruit vient compromettre l'équilibre financier de ces programmes avec des limitations du droit à construire. La volonté de révision des plans d'exposition au bruit doit être réaffirmée, afin d'éviter que de nouvelles populations ne viennent s'installer dans les zones exposées. Mais il convient aussi d'éviter que les dispositions prises dans ce cadre ne conduisent à une dégradation des espaces ruraux et urbains concernés.

La proposition de loi vise clairement à remédier à ces situations en ouvrant de nouvelles possibilités d'actions et d'interventions en faveur du développement socio-économique des territoires riverains de l'aéroport. Elle constitue donc une avancée très concrète en matière d'aménagement et de gestion de ces territoires.

Elle répond aussi au besoin, que la majorité approuve, de gouvernance sur les territoires concernés où les problèmes posés relèvent clairement des élus des collectivités locales, mais aussi des acteurs économiques impliqués au premier plan dans l'activité aéroportuaire.

La création d'une structure formalisée, bien identifiée, investie d'une telle mission de gouvernance territoriale me paraît donc apporter une réponse adaptée.

La création de « communautés aéroportuaires » favorisera aussi un dialogue constructif entre toutes les parties prenantes. Ces établissements pourront ainsi devenir - ils montent en régime ; nous verrons peut-être le jour venu à augmenter leurs moyens - le creuset de politiques de développement socio-économique des territoires d'influence des aéroports.

Les riverains et les associations de riverains ont bien entendu leur place dans ce dispositif. Les riverains seront effet au cœur des préoccupations des communautés puisque les actions qui seront menées le seront en leur faveur. Les communautés auront d'ailleurs toute latitude pour les consulter et les associer au travers d'instances de concertation ad hoc.

La mobilisation de moyens financiers par voie contractuelle devrait constituer un gage d'efficacité. Au-delà d'une simple péréquation, c'est par un véritable effet de levier que s'exercera l'action de ces établissements.

La création de ce véritable outil de gouvernance territoriale, pour reprendre une expression à la mode, est de nature à favoriser la recherche de solutions consensuelles. Il a vocation à devenir un lieu d'émergence de solidarités territoriales.

Monsieur Blazy, vous avez évoqué la politique aéroportuaire globale. Je voudrais la rappeler, non pour polémiquer avec vous, mais pour vous dire ce que le Gouvernement souhaite faire.

Nous entendons développer une desserte équilibrée du territoire s'appuyant bien entendu sur les grandes plates-formes franciliennes, mais également sur le réseau des grands aéroports des régions comme Lyon-Saint-Exupéry - ou, dans quelques années, Notre-Dame-des-Landes puisque le CIADT du 18 décembre dernier a confirmé le souhait de tous les élus, y compris du président de votre groupe, de construire l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes - et sur un troisième réseau de plates-formes de taille raisonnable, existantes ou à créer.

M. Delattre, qui a toujours beaucoup d'humour et le sens de la répartie ...

M. Francis Delattre. Je n'ai rien dit !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Je vous ai entendu, je parle le « Delattre » dans le texte depuis de nombreuses années ! (Sourires.) Vous avez évoqué l'aéroport de Schiphol. Vous noterez, monsieur Delattre, que dans les conversations qui sont en cours entre Air France et KLM et la Commission européenne, des suppressions de liaisons redondantes sont actuellement demandées aux deux compagnies et qu'une redistribution du trafic entre les deux plates-formes va intervenir. Mon image vous a peut-être choqué parce qu'elle vous paraissait exagérée.

M. Francis Delattre. Elle ne m'a pas choqué, elle m'a plutôt amusé.

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Mais elle n'était pas aussi coquine que vous avez bien voulu le penser. Je vous rappelle en effet que le Thalys relie les deux aéroports et que la complémentarité est très réelle.

Bien sûr, il y a deux plates-formes auxquelles nous pensons beaucoup. Et c'est un sujet que connaissent bien Charles de Courson, Catherine Vautrin et Pierre Micaux. Ainsi, l'aéroport de Vatry offre des possibilités.

M. Jean-Pierre Blazy. Parlons-en !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Parlons-en effet. Nous travaillons, Gilles de Robien et moi-même, à y faire venir un intégrateur - les contacts sont en cours - et un opérateur.

M. Jean-Pierre Blazy. FedEx !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Vous savez bien qu'il n'y a pas que FedEx ! Ne rêvez pas de FedEx, jour et nuit.

M. Jean-Pierre Blazy. C'est un cauchemar !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Il y en a d'autres. Je ne vais pas faire leur publicité à la tribune de l'Assemblée !

Vérifier tout de même dans votre commune le nombre de gens que FedEx fait vivre avant de supprimer leur emploi !

Bien sûr, le CIADT a validé l'idée qu'il faudrait relier Vatry au réseau ferroviaire. Il ne vous a pas échappé que nous construisions le TGV-Est ; c'est un immense chantier. Il faudra donc en particulier relier Vatry au TGV-Est. C'est un dossier sur lequel travaille actuellement le Gouvernement et le moment venu nous annoncerons nos décisions dans ce domaine.

Autre plate-forme formidable, Châteauroux-Déols. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Pierre Blazy. C'est encore plus loin !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Comme Vatry, c'est une ancienne base aérienne de l'OTAN, d'avant 1967. Elle est remarquablement située par rapport au courant d'échanges transversaux.

M. Jean-Pierre Blazy. C'est plus éloigné !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Je vous signale que l'approvisionnement de nos troupes sur certains théâtres d'opérations est organisé au départ de l'aéroport de Châteauroux, qui joue également un rôle d'aménagement du territoire pour le fret.

Pour le cas particulier de Roissy, le Gouvernement a réaffirmé lors du CIADT - M. Gonnot qui avait émis des hypothèses de travail, le sait, et je le rappelle de manière solennelle à la tribune de cette assemblée - que la création d'une cinquième piste sur la plate-forme est exclue.

M. Gayssot en a fait deux ;...

M. Jean-Pierre Blazy. Décidées par Juppé !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. ...le gouvernement actuel n'en créera aucune. La décision de celui-ci est extrêmement claire.

Pour mieux absorber la croissance du trafic aérien prévisible, il faut aussi penser au développement du réseau TGV.

En dehors de la voiture individuelle, les déplacements entre Paris et Marseille se font aujourd'hui à 80 % sous le mode ferroviaire.

Quand les décisions du CIADT seront suivies d'effet, c'est-à-dire lorsque le réseau TGV français sera achevé, il en ira de même pour Bordeaux - actuellement 60 % des relations s'effectuent par la voie ferrée - qui sera à deux heures de Paris.

Toulouse est l'étape suivante. Actuellement, avec une navette toutes les demi-heures, c'est une des principales destinations aériennes françaises.

Le développement du trafic TGV, c'est également la disparition d'un certain nombre de vols courts courriers. Cette décision politique a été prise par ce gouvernement lors du CIADT. Il fait confiance au ferroviaire et met en place les moyens financiers nécessaires pour créer les infrastructures ferroviaires qui manquent dans notre pays.

Mme Odile Saugues. N'oubliez pas l'Auvergne !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. L'Auvergne, madame Saugues, a un superbe Corail Téoz, et nous faisons des travaux d'amélioration sur la voie ferrée Paris-Clermont pour vous permettre de venir plus souvent et dans les meilleurs délais porter la contestation au Gouvernement. (Sourires.)

Cette proposition de loi se situe dans le cadre d'une politique de solidarité, d'une politique aéroportuaire, d'une politique globale de transport et d'aménagement du territoire. Mesdames et messieurs les députés, je souhaite que votre assemblée puisse l'adopter et que, le plus vite possible, les Franciliens et les riverains des dix aéroports concernés en tirent les bénéfices que nous en attendons. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Discussion des articles

M. le président. J'appelle maintenant les articles de la proposition de loi dans le texte du Sénat.

Article 1er

M. le président. Sur l'article 1er, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Je voudrais au préalable savoir dans quelles conditions nous allons travailler. Est-il prévu que nous puissions amender ce texte ?

Certes, il s'agit d'une proposition de loi de circonstance mais pourtant elle peut être très utile. Au reste, nous sommes d'accord sur le principe de créer ces communautés aéroportuaires, puisque leur objectif est de réconcilier l'exigence économique et l'exigence environnementale, donc d'associer tous les acteurs du transport aérien et en particulier les populations riveraines.


Bref, M. le rapporteur peut-il indiquer clairement s'il nous sera possible de travailler réellement et d'amender ce texte ?

M. le président. La parole est à M. Francis Delattre.

M. Francis Delattre. J'aurais pu m'inscrire sur tous les articles. Je ne l'ai fait que sur l'article 1er. Vous me permettrez donc de m'exprimer à cette occasion sur l'ensemble du texte.

Je ne me suis jamais prononcé publiquement sur le rapport de la mission d'information parlementaire, mais sachez que je n'en suis par fila condition du tout ! En effet, il n'avait pour objet que d'étayla condition la décision, prise dans la précipitation, de renoncla condition à l'implantation du troisième aéroport à Chaulnes. Quand un ministre prend une telle décision en quarante-huit heures, il s'agit clairement d'une décision politique. Heureusement que nous avions au moins pu obtenir du Premila condition ministre - Jean-François Copé était avec nous pour le réclamer -, entre autres choses, la suppression du projet d'une cinquième piste à Roissy.

Quelque progrès que puisse représenter la création de communautés aéroportuaires, la question d'un troisième aéroport francilien reste posée.

En effet, lors de l'enquête publique en faveur du doublement des pistes de Roissy, nous sommes plusieurs élus du Val d'Oise à nous être engagés devant la population, parce qu'il nous semblait qu'une meilleure fluidité sur les plates-formes limiterait le passage d'avions au-dessus de nos têtes, et que nous avions obtenu des garanties, que le Gouvernement actuel semble avoir oubliées. On nous avait assuré que la création d'un troisième aéroport serait étudiée, et que le nombre de mouvements annuels d'avions à Roissy serait limité à 550 000. Or, on en est déjà à 500 000 !

Je n'ai rien contre le développement des aéroports de province, mais reconnaissez que le million et demi de Franciliens directement concernés par le trafic de Roissy, qui sont très informés, ont des raisons d'être très pessimistes.

Peut-être la communauté pourrait-elle être un organe favorisant le dialogue et la décision au sein d'un même établissement. A condition, toutefois, d'en connaître l'aire d'intervention. Or, ce n'est pas le cas, et plusieurs options sont en concurrence. Le partage entre les zones dites « riveraines », que connaît bien notre collègue maire de Gonesse, et les zones survolées est problématique. Si le département des Hauts-de-Seine découvre aujourd'hui les nuisances sonores du trafic aérien, nous les subissons, nous, depuis des années, à vingt kilomètres de Roissy, où nous sommes obligés, même en pleine canicule, de fermer nos fenêtres à cause du bruit, et où nos meubles de jardin sont régulièrement souillés de kérosène, sans parler de notre belle forêt de Montmorency, dont les arbres perdent leurs feuilles dès le mois de juin. Il faut savoir tout cela, monsieur le rapporteur, qui vous targuez d'environnement !

M. François Asensi. Il a la dent dure !

M. Francis Delattre. Nous souhaiterions que puissent être abordés sérieusement les vrais problèmes de pollution et de santé auxquels sont confrontées les populations que nous représentons dans cet hémicycle.

Si deux gouvernements, celui de M. Juppé comme celui de M. Jospin, avaient conclu à la nécessité de limiter les mouvements d'avions - à 250 000 pour Orly et à 550 000 pour Roissy - et de créer un troisième aéroport, il y avait bien une raison. Si rien n'est fait, le nombre de mouvements à Roissy va passer à 600 000, puis à 700 000 et à 800 000 mouvements par an, et ce sont alors quelque deux millions de Franciliens qui subiront des nuisances.

Si on réglait la question de l'aire et des rapports entre zones riveraines et zones survolées, on aurait déjà progressé dans le sens de la crédibilité de la communauté aéroportuaire.

Un autre problème est celui de la représentation au sein de ces communautés. Comment accepter que les représentants des associations, qui ont une véritable expertise de ces problèmes, comme les professionnels de l'aviation, qui peuvent nous expliquer des aspects aussi techniques que l'abordage par paliers et nous éviter de parler dans le vide, n'aient qu'une voix consultative au conseil d'administration des communautés aéroportuaires ?

La composition qu'on nous propose pour ces conseils - une moitié de part et d'autre - me paraît un peu vague. Je ne suis pas hostile à une « nouvelle gouvernance », mais les compétences doivent être clairement définies. C'est l'objet de l'article 6, mais pour rendre vraiment crédible votre nouvel outil, il faudrait pouvoir y aborder des problèmes aussi essentiels que la capacité des aéroports, les types d'avions ou le trafic supportable la nuit. Or, ces problèmes ne font pas partie de la compétence qu'on nous présente aujourd'hui. Ces communautés pourraient être un outil extraordinaire si on allait jusqu'au bout de leur logique. Mais vous n'allez pas jusqu'au bout, parce que - nous l'avons bien vu lorsque nous avons été reçus à Matignon - les pressions sont fortes de la part de la DGAC et d'autres lobbies très puissants.

Mais nous qui, à l'Assemblée nationale, représentons les populations concernées, devons défendre d'abord l'intérêt général. Le problème économique est, bien sûr, une réalité, mais nous savons tous que le troisième aéroport est nécessaire. Si aucune décision n'est prise aujourd'hui, la situation sera demain impossible à gérer. (Applaudissements sur de nombreux bancs.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Monsieur Blazy, je vous rassure : il est bien évident que nous sommes ici pour examiner un texte et, le cas échéant, l'amender. Si la commission n'a pas retenu les amendements que vous lui avez présentés, il faut bien le dire, très tardivement,...

M. Jean-Pierre Blazy. Ils ont été déposés conformément à l'article 88 du règlement !

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. ...cela ne signifie pas qu'elle n'en acceptera aucun, pour autant que les propositions correspondent à ce que souhaite faire le législateur, avec l'accord du Gouvernement.

Ne vous y trompez pas : les intentions du rapporteur ne font que refléter celles de la commission des affaires économiques, et la communauté aéroportuaire ne sera pas un cadre rigide. Cet établissement public à caractère administratif que le texte propose de créer est plutôt une innovation dans le droit français, une sorte d'expérience, qui, comme le ministre a déjà eu l'occasion de le dire, pourra éventuellement être reproduite pour d'autres plates-formes aéroportuaires, voire d'autres infrastructures produisant des nuisances.

Monsieur Blazy, nous avons assez travaillé ensemble, depuis quelques mois, sur les aéroports pour que vous ne puissiez pas mettre en doute ma volonté personnelle de dialogue sur le sujet, ni la volonté de la commission, dans laquelle vous siégez, d'aller jusqu'au fond de cette question.

Monsieur Delattre, je n'adopterai pas le registre polémique qui a été le vôtre, et me contenterai de souligner que si, comme vous l'auriez pu, vous aviez été membre de la mission d'information que j'ai eu l'honneur de présider pendant neuf mois, et qui a entendu des centaines d'acteurs du transport aérien, d'élus et de riverains, je ne doute pas que le rapport eût été meilleur.

M. Francis Delattre. J'ai été auditionné par la commission : pas une ligne dans le rapport !

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Si vous aviez eu la volonté de vous faire entendre, ne doutez pas que nous aurions pu vous écouter avec beaucoup d'attention et, je le répète, le rapport eût sans doute été meilleur.

Alors, de grâce, ne remettez pas en cause ce travail de fond mené par une vingtaine des membres de cette commission, qui représentaient, dans la plus grande pluralité, l'ensemble des groupes de notre assemblée. Les conclusions du rapport, adoptées, je le rappelle, à l'unanimité, ne sont ni celles du rapporteur, ni celles du président, mais celles de la mission.

M. Patrick Ollier, président de la commissiion. Très bien !

M. Francis Delattre. Ou celles de la DGAC ?

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 35 et 11, pouvant être soumis à une discussion commune. L'amendement n° 35 fait l'objet d'un sous-amendement n° 37.

La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet, pour soutenir l'amendement n° 35.

M. Pierre-Christophe Baguet. L'amendement a pour objet d'étendre la création de communautés aéroportuaires aux zones concernées par le trafic d'un héliport.

En effet, nous avons tous la volonté de lutter, entre autres, contre les nuisances aériennes, ou, du moins, de nous doter, comme vient de l'indiquer notre rapporteur, d'une structure administrative innovante, propre à résoudre les problèmes rencontrés par des centaines de milliers de riverains de ces zones soumises à d'importantes nuisances aériennes.

Or, un hélicoptère fait autant de bruit qu'un avion, voire davantage, selon son inclinaison dans l'air. Au décollage et à l'atterrissage notamment, le bruit des pales est une nuisance importante pour tous les riverains. Je pense tout particulièrement à l'héliport d'Issy-les-Moulineaux, et à ses 12 000 mouvements annuels, qui touchent de nombreuses communes de la vallée de la Seine - Issy-les-Moulineaux, certes, mais aussi Boulogne, Sèvres, Saint-Cloud ou Rueil-Malmaison, comme je l'indiquais tout à l'heure au président de la commission des affaires économiques.

Je défendrai en même temps, si vous me le permettez, le sous-amendement n° 37 de M. Rodolphe Thomas, qui précise que les aérodromes concernés par la proposition de loi sont ceux qui sont éligibles à la taxe générale sur les activités polluantes.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy pour soutenir l'amendement n° 11.

M. Jean-Pierre Blazy. Je répondrai à M. le rapporteur, qui m'a reproché de ne pas avoir déposé mes amendements à temps, qu'ils ont été déposés d'une façon tout à fait réglementaire, au titre de l'article 88.

M. Patrick Ollier, président de la commission, et M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Nous ne les avons eus que ce matin !

M. Jean-Pierre Blazy. Dans le délai réglementaire ! La commission s'est réunie ce matin.

Je suis, par ailleurs, surpris du départ du secrétaire d'Etat aux transports, non que je doute de la capacité du secrétaire d'Etat au tourisme à répondre à nos questions, mais j'y vois un certain mépris à l'égard de la représentation nationale.

Cela illustre bien la volonté du Gouvernement d'expédier à la hâte, dût-il en être bâclé, l'examen de ce texte important, et je doute donc de l'intérêt du travail auquel nous allons nous livrer maintenant. (« Merci pour nous ! » sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Revenons, pour être constructifs, à l'amendement n° 11, qui prévoit la création systématique d'une communauté aéroportuaire autour des dix plus grands aéroports français, puis, éventuellement, des autres aéroports régionaux. L'importance de Roissy ne doit pas faire oublier que, dans les aéroports de province aussi, une meilleure gouvernance est nécessaire pour concilier le développement aéroportuaire, c'est-à-dire l'exigence économique du transport aérien, avec la prise en compte des populations riveraines.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 35 et 11 et sur le sous-amendement n° 37 ?

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Les deux amendements portent sur le deuxième alinéa de l'article 1er, qui crée la communauté aéroportuaire, établissement public à caractère administratif. Ces amendements visent à étendre, l'un aux héliports, l'autre à l'ensemble des aérodromes français, la possibilité de créer des communautés aéroportuaires.

Ce point a fait l'objet de nombreux débats. La communauté aéroportuaire, telle que cette proposition de loi vise à la créer, a d'abord pour vocation de distribuer différemment l'aide à l'insonorisation des riverains. C'est pourquoi le Sénat a, dans un premier temps, limité la possibilité de créer des communautés aéroportuaires aux dix aéroports assujettis à cette aide aux riverains par le code des douanes.

Le Gouvernement avait indiqué au Sénat que, si l'expérience se révélait bénéfique, il pourrait être envisagé d'étendre ultérieurement cette possibilité à d'autres aérodromes, voire - mais le secrétaire d'Etat nous éclairera tout à l'heure sur ce point - aux héliports et à d'autres infrastructures auxquelles ces nouveaux établissements publics pourraient sembler adaptés.

La commission a donc décidé de s'en tenir, dans un premier temps, aux dix plus grands aéroports français. Si justifiée que soit, en effet, la question des nuisances générées par cet héliport situé en région parisienne, c'est bien autour des grands aéroports que se posent les vrais problèmes relatifs aux relations entre les riverains et l'ensemble des pouvoirs publics qui concourent à l'activité aéroportuaire.

L'avis de la commission est donc défavorable sur ces deux amendements et sur le sous-amendement n° 37.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat au tourisme pour donner l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 35 et 11 et sur le sous-amendement n° 37.


M. Léon Bertrand
, secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur Baguet, je comprends bien votre préoccupation. Nous savons que les hélicoptères, eux aussi, font énormément de bruit. Des mesures ont déjà été prises. Ainsi, à l'héliport de Paris, situé à Issy-les-Moulineaux, le trafic a été divisé par deux, et les trajectoires évitent le plus possible les zones urbanisées. Bien entendu, des progrès restent à faire. Un relèvement des trajectoires est à l'étude et des contrôles seront effectués pour en vérifier l'application. Cela étant, il faut aller beaucoup plus loin. Le Gouvernement s'engage à renforcer la concertation avec les riverains d'héliport, au sein notamment des commissions consultatives de l'environnement. Cette démarche pragmatique nous semble mieux adaptée que des procédures qui s'avéreraient trop lourdes. Il est préférable d'utiliser au mieux ce qui existe déjà. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable à votre amendement.

Monsieur Blazy, avant de répondre sur le fond, comme vous vous autorisez à dire que c'est une preuve de mépris que je réponde à la place de mon collègue Dominique Bussereau,...

M. Jean-Pierre Blazy. Pas vous !

M. le secrétaire d'Etat au tourisme. ...je vous rappelle que lui et moi appartenons au même gouvernement et que nous appliquons la même politique. Je me crois donc tout à fait fondé à répondre à sa place. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

S'agissant des aéroports d'une importance majeure, la proposition de loi privilégie un acte volontaire de la part du conseil régional pour créer ces établissements. Ce dispositif visant à instaurer un dialogue entre les élus et les acteurs économiques, il est important qu'il relève d'une initiative locale. Au demeurant, l'article 3 prévoit la possibilité pour le représentant de l'Etat dans la région de créer la communauté aéroportuaire s'il le juge indispensable, par exemple s'il constate des problèmes majeurs sur les territoires concernés. Il convient donc de lui laisser apprécier l'opportunité d'une telle initiative, en fonction des spécificités du territoire, plutôt que de la lui imposer légalement. En tout état de cause, la création de communautés aéroportuaires ne se justifiera que si les contraintes induites par l'activité aérienne sur les territoires avoisinants un aéroport pèsent sur des zones fortement urbanisées et nécessitent de conduire dans la durée des projets portant sur les équipements, les accès ou l'emploi. Ce peut être le cas pour les dix plus grands aéroports français. S'agissant des autres, il existe déjà, pour tous ceux qui accueillent du trafic commercial, des structures de concertation et de dialogue entre les professionnels de l'aéronautique, les collectivités locales et les associations de riverains : ce sont les commissions consultatives d'environnement créées par la loi du 11 juillet 1985, et dont le rôle a été renforcé en juillet 1999.

M. Jean-Pierre Blazy. Je le sais ! C'est bien ce que je disais : c'est inexistant !

M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Il convient donc, afin de ne pas alourdir les institutions, d'éviter d'étendre aux autres aéroports la possibilité de créer des communautés aéroportuaires. C'est pourquoi l'avis du Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 11.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Compte tenu des objectifs si ambitieux fixés par ce texte, et longuement soulignés par M. le secrétaire d'Etat aux transports tout à l'heure, j'ai proposé naturellement d'étendre les dispositions de cette proposition de loi aux héliports. Et comme nos collègues sénateurs ont limité à dix aérodromes la phase d'expérimentation, il m'a paru tout à fait normal d'y ajouter, à ce stade, le plus gros héliport français. Cela dit, j'envisageais de retirer mon amendement, mais j'aurais souhaité une réponse un peu plus engagée de votre part, monsieur le secrétaire d'Etat.

Vous avez parlé des commissions consultatives de l'environnement. Il se trouve que je suis membre de celle de l'héliport de Paris, en tant que conseiller général. J'y siège et je peux témoigner que cette commission ne s'est pas réunie pendant plus de deux ans. Certes, deux réunions viennent de se tenir coup sur coup - et c'est tant mieux - mais jusqu'alors elle n'avait eu aucune activité. Je ne suis donc pas sûr que ce type de commission puisse remplacer une prescription législative précise.

Pour autant, si le président de la commission des affaires économiques consent à m'apporter son soutien, en me disant qu'il y aura peut-être une occasion, dans un texte ultérieur, de prendre en compte le problème de cet héliport, je retirerai mon amendement. J'aurais tout de même souhaité, je le répète, un engagement plus ferme de la part du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Patrick Ollier, président de la commission. Le problème que soulève M. Baguet est essentiel pour cette partie de la région parisienne. Nous sommes voisins, je connais donc bien cette question, et il a tout à fait raison d'en souligner l'importance.

Monsieur le secrétaire d'Etat, nous sommes - M. le rapporteur l'a bien dit - dans une période...

M. Jean-Pierre Blazy. Electorale ! (Sourires.)

M. Patrick Ollier, président de la commission. ...de mise en place d'un système expérimental. Il est bien évident qu'il faudra trouver l'occasion - ce qui sera facile, me semble-t-il -, dès lors que ce système apparaîtra fonctionnel et bien équilibré, d'y intégrer notamment l'héliport situé à Issy-les-Moulineaux. Au fur et à mesure des progrès de l'expérimentation, le Gouvernement pourra s'engager dans cette voie. En tout cas, notre commission sera très attentive à ce que votre demande soit, le moment donné, satisfaite.

M. Pierre-Christophe Baguet. Je retire mon amendement.

M. le président. L'amendement n° 35 est retiré.

En conséquence, le sous-amendement n° 37 n'a plus d'objet.

Monsieur Blazy, suivez-vous l'exemple de M. Baguet et retirez-vous également votre amendement ?

M. Jean-Pierre Blazy. Non, monsieur le président. Je le maintiens.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er

(L'article 1er est adopté.)

Article 2

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 12.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Blazy. Chacun parle, de plus en plus, de développement durable. Ce sera bientôt un principe de valeur constitutionnelle. Il faut donc appliquer cette notion au transport aérien, et les communautés aéroportuaires doivent y contribuer. Cet amendement a pour objet de faire figurer l'expression « développement durable » dans les missions énumérées au premier alinéa de l'article 2 de la proposition de loi.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Défavorable. Je rappelle que l'article 7 répond aux préoccupations exprimées par M. Blazy en prévoyant que l'intervention financière de la communauté aéroportuaire sur un projet s'inscrit dans le cadre d'un contrat de développement durable signé avec le maître d'ouvrage et, le cas échéant, les autres contributeurs. 

Au-delà de la référence à un principe, la proposition de loi prévoit la mise en place obligatoire d'un contrat de développement durable dans tout projet financier, ce qui répond tout à fait à l'attente de M. Blazy. De surcroît, cela me paraît beaucoup plus important que l'insertion de cette expression à l'article 2, même si ce serait significatif et que j'en reconnais tout l'intérêt.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Cet amendement ne doit pas permettre que la communauté aéroportuaire interfère avec les institutions déjà existantes. Or il élargit excessivement le champ des missions de cette nouvelle structure. Par conséquent, l'avis du Gouvernement est défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 23 et 13, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. François Asensi, pour soutenir l'amendement n° 23.

M. François Asensi. Cet amendement fait explicitement référence au plan de gêne sonore, qui est absent du libellé de l'article 2. La rédaction de cet article ne prête donc pas l'attention qu'elles méritent aux nuisances sonores aéroportuaires. Quelle visibilité aura cet établissement public si vous ne mentionnez pas, parmi ses missions, cet aspect si important pour des riverains qui ne connaissent de l'aéroport que ses nuisances sonores ?

J'ajoute que, pour répondre à une véritable mission d'intérêt général, il faut non seulement mentionner les nuisances aéroportuaires, mais également prévoir que cet établissement public puisse emprunter pour réduire les délais d'attente en matière d'indemnisation.

Tels sont les deux objectifs de cet amendement de précision.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour soutenir l'amendement n° 13.

M. Jean-Pierre Blazy. Mon amendement va dans le même sens que celui de M. Asensi. En effet, compte tenu de la rédaction actuelle de l'article 2, nous ne comprenons pas, monsieur le rapporteur, quel pourra être le périmètre d'intervention de la communauté aéroportuaire. Il y a un flou certain à ce sujet. Il nous faut donc absolument obtenir des précisions, notamment sur ce que sera l'étendue de ce périmètre par rapport à celui du plan de gêne sonore. Si le périmètre du nouvel établissement public ne peut être calqué sur celui du PGS, il est néanmoins nécessaire qu'il en tienne compte, puisque ce type de plan signifie la reconnaissance des nuisances subies par les riverains. Dès lors que la communauté aéroportuaire a comme objectif de réconcilier l'exigence économique et l'exigence environnementale, il faut une définition claire de son périmètre d'intervention. Cet amendement y contribue.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Défavorable sur les deux amendements. Le souci des auteurs de cette proposition de loi est de laisser de la souplesse dans la définition du périmètre. Certes, les auteurs de ces amendements ont raison de souligner qu'il y a un lien direct entre le périmètre et le plan de gêne sonore. Mais le principe de la communauté aéroportuaire, c'est que son périmètre soit pertinent par rapport à la zone d'impact économique, qui sera génératrice de recettes permettant notamment d'indemniser les riverains.

C'est pourquoi le Gouvernement avait énoncé - ce qui nous sera sans doute confirmé par M. le secrétaire d'Etat - que le périmètre serait à la fois fonction du plan de gêne sonore, comme vous le souhaitez, monsieur Asensi et monsieur Blazy, mais aussi de la zone d'impact économique, susceptible d'être beaucoup plus large et d'apporter aux communautés aéroportuaires les ressources supplémentaires que vous réclamiez tout à l'heure.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Dans la mesure où la communauté aéroportuaire est chargée de soutenir des actions visant à favoriser la correction des atteintes aéroportuaires à l'environnement et à la qualité de la vie, le plan de gêne sonore et le plan d'exposition au bruit, lorsqu'ils existent, serviront sans aucun doute de référence pour déterminer son périmètre d'intervention. Mais il est vraiment préférable de laisser toute latitude aux acteurs concernés pour délimiter le champ d'action de cette communauté au regard de la mission de soutien territorial qu'elle aura à assumer. L'avis du Gouvernement est donc défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. La parole est à M. François Asensi.

M. François Asensi. Je ferai juste un commentaire. J'entends M. le rapporteur parler de grande souplesse, d'expérimentation. C'est vraiment une loi d'opportunité, et je crains que peu d'amendements ne soient retenus au terme de ce débat. On se dirige vers une adoption conforme pour aller vite. Très honnêtement, je ne sais pas quel profit M. Copé espère tirer de cette proposition de loi, dans le cadre des élections régionales. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mais s'il y croit, tant mieux ! En tout cas, nous sommes totalement dans le flou artistique. Il est impossible, dans un débat législatif, de parler d'expérimentation tout en restant dans le flou général. Une loi a besoin d'un cadre rigide, avec un contenu clair et précis.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Le Gouvernement et la commission nous démontrent très clairement leur volonté de refuser aujourd'hui tout amendement. La réponse de M. le secrétaire d'Etat est rassurante sur le fond, puisqu'il reconnaît qu'il faut prendre en compte les plans de gêne sonore et les plans d'exposition au bruit pour déterminer les périmètres d'intervention des futures communautés aéroportuaires, mais lorsque nous proposons de préciser sur ce point la rédaction de l'article 2, il s'y oppose. J'en conclus que, sur cet amendement comme sur nos autres amendements, nous essuierons toujours un refus, pour les raisons que François Asensi vient de rappeler.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 23.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. François Scellier, pour soutenir l'amendement n° 7.

M. François Scellier. Cet amendement a le même objet que les deux amendements précédents : définir plus précisément le périmètre d'intervention de la communauté aéroportuaire. J'ai bien entendu M. le rapporteur et M. le secrétaire d'Etat sur ce point. Je comprends tout à fait qu'il soit tenu compte du plan de gêne sonore et du plan d'exposition au bruit pour la définition de ce périmètre. C'est indispensable, sinon nous nous trouverions dans une incohérence totale, avec trois périmètres différents.

Mon amendement vise aussi à rectifier l'incohérence entre les limites actuelles de la zone C du plan d'exposition au bruit, qui dépend de la valeur retenue pour l'indice Lden située pour Roissy dans une fourchette de 55-57, et celles de la zone III du plan de gêne sonore, qui résulte de la seule valeur 55.


Je comprends tout à fait qu'il faille ménager une certaine souplesse. Ce qui serait peut-être bon, c'est que nous ayons de la part du Gouvernement l'assurance que l'arrêté du préfet de région qui définira le périmètre d'intervention de la communauté aéroportuaire sera pris en concertation avec les collectivités territoriales, notamment le département.

Si le Gouvernement prenait un tel engagement, je pense que je pourrais retirer mon amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Je comprends tout à fait les préoccupations de notre collègue François Scellier, mais le périmètre de la zone d'impact économique peut être beaucoup large que celui du plan de gêne sonore. Ce texte, j'y insiste, entend dépasser la seule préoccupation des nuisances sonores : il s'agit de faire en sorte que soient éligibles au financement de la communauté aéroportuaire des projets dont le but se définit en termes d'emplois, d'attractivité, de transport. Limiter son périmètre d'intervention à celui du plan de gêne sonore serait très réducteur pour l'éligibilité d'un certain nombre de projets,...

M. Jean-Pierre Blazy. Mais personne ne propose cela !

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. ...même s'il est bien évident que les plans de gêne sonore doivent être pleinement pris en compte.

La souplesse n'est pas un défaut. N'oublions pas que ce texte s'appliquera aux dix plus grands aéroports français. Il faut aussi concevoir que la situation n'est pas tout à fait la même à Marseille, à Roissy, à Orly ou à Nantes.

Quant à l'engagement que souhaiterait entendre notre collègue François Scellier, je pense que le Gouvernement va lui répondre.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au tourisme. Le Gouvernement reste sur sa position : il est préférable, pour les raisons que j'ai évoquées tout à l'heure, de laisser toute latitude aux acteurs concernés pour délimiter le champ d'action de la communauté aéroportuaire au regard de la mission de gouvernance territoriale qu'elle a à assumer.

Cela dit, le Gouvernement peut effectivement prendre l'engagement que le préfet, avant de prendre son arrêté, devra s'assurer qu'un consensus se sera dégagé après que les collectivités territoriales auront été consultées.

M. le président. La parole est à M. François Scellier.

M. François Scellier. Dans ces conditions, je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 7 est retiré.

Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Article 3

M. le président. Nous en venons à l'examen de l'article 3.

Je suis saisi d'un amendement n° 25.

La parole est à M. François Asensi pour le soutenir.

M. François Asensi. Si l'on considère que la communauté aéroportuaire est un enjeu d'importance dans la prise en compte des intérêts du secteur en termes d'aménagement, de développement économique, d'atteintes à l'environnement et à la qualité de la vie, la loi se doit de pousser à la création de cet établissement public. Vous voyez, on y croit.

Par conséquent, le représentant de l'Etat doit créer d'autorité cette communauté aéroportuaire dans le cas où, au terme du délai écoulé, le conseil régional se défausserait. Sans cela, cette loi risquerait bien d'être sans effet.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Je suis un peu surpris de cet amendement. Cette loi tend à créer un établissement public à caractère administratif, et non une nouvelle collectivité. L'Etat manifeste ainsi sa volonté de déconcentration, au travers d'un établissement public qui permettra d'associer les collectivités territoriales, mais aussi les partenaires économiques et les riverains, de façon à rendre plus intelligents, plus transparents, plus complexes là où il le faut, plus faciles là où c'est nécessaire, un certain nombre d'aides et de financements pour des projets qui sont jugés importants par les uns et les autres.

Ce que nous dit notre collègue Asensi, c'est que l'Etat devrait être en quelque sorte condamné à créer cet établissement public, même, éventuellement, contre la volonté des collectivités territoriales. Ce n'est pas l'esprit du texte, car il s'agit de faire en sorte que celles-ci soient consultées, ou puissent même demander la création de l'établissement. C'est une façon pour l'Etat de leur tendre la main en leur proposant un schéma qui permette de les associer davantage. Mais une automaticité qui les obligerait à participer à un établissement public dont elles ne voudraient pas - car cela peut arriver - me paraît tout à fait contraire au principe de liberté des collectivités territoriales.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au tourisme. En effet, il s'agit surtout de privilégier une démarche tout à fait volontaire et constructive entre les élus, les acteurs économiques et l'Etat, et donc de laisser au préfet le soin d'apprécier l'opportunité de créer une communauté aéroportuaire lorsque le conseil régional n'en prend pas l'initiative, plutôt que de l'imposer par la loi. Et ce d'autant plus que nous venons, à l'occasion de l'amendement de M. Scellier, de dire que les collectivités territoriales devaient être consultées. Privilégions avant tout la négociation et le dialogue.

M. le président. La parole est à M. François Asensi.

M. François Asensi. J'entends bien vos arguments. Mais aujourd'hui, nous légiférons dans l'urgence. Alors que nous aurions pu prendre notre temps pour discuter de ce texte important, vous avez préféré nous le faire examiner à la hussarde, disons-le. Nous allons vite.

M. Jean-Pierre Blazy. C'est le moins que l'on puisse dire !

M. François Asensi. Et vous justifiez cette urgence par la nécessité de créer ces communautés aéroportuaires. Or, le rôle de l'Etat, c'est aussi d'être porteur de l'intérêt général. Il faut accélérer l'indemnisation des riverains, et si une collectivité territoriale ne ressent pas la nécessité d'aller vite, les riverains seront laissés sans indemnisation. Par conséquent, je crois, moi, que l'Etat se doit de se substituer à une collectivité qui se défausserait en ne voulant pas créer cette communauté aéroportuaire.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 25.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article n° 3.

(L'article 3 est adopté.)

Article 4

M. le président. Nous en venons à l'examen de l'article 4.

Je suis saisi de deux amendements, nos 8, troisième rectification, et 26, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. François Scellier, pour soutenir l'amendement n° 8, troisième rectification.

M. François Scellier. La présence, au sein d'un établissement public à caractère administratif, d'un collège d'entreprises ayant voix délibérative n'a de sens que s'il représente des personnes morales appelées à décider de l'utilisation de contributions foncières obligatoires - c'est le cas, par exemple, pour les chambres de commerce et d'industrie. Or, rien dans la proposition de loi ne va dans ce sens, les contributions dont il est question à l'article 5 n'ayant qu'un caractère volontaire.

Dans ces conditions, il nous semble opportun de modifier l'article 4 pour ne donner voix délibérative qu'aux représentants des entreprises appelées obligatoirement à contribuer au financement des communautés aéroportuaires, et pour constituer un collège représentatif des intérêts économiques et environnementaux ayant une vocation simplement consultative.

M. le président. La parole est à M. François Asensi, pour soutenir l'amendement n° 26.

M. François Asensi. Selon le texte, le conseil d'administration serait composé de deux collèges : celui des entreprises et celui des collectivités territoriales.

Nous considérons pour notre part que la composition du conseil d'administration des futures communautés aéroportuaires ne saurait se réduire aux deux acteurs que sont les entreprises et les collectivités. C'est pourquoi nous proposons par cet amendement d'ajouter un troisième collège, celui des acteurs sociaux. Il serait composé de douze membres : six représentants des associations de riverains ou de protection de l'environnement, et six représentants des salariés, au travers de leurs organisations syndicales représentatives. Ce collège aurait les mêmes droits que les autres membres du conseil d'administration.

Ce troisième collège est essentiel, car il élargit la représentation démocratique et le sens de cet établissement public. Il introduit la représentation des riverains et des salariés de l'activité aéroportuaire. Il serait peu opportun, au moment où on accentue les demandes démocratiques, de n'accorder que des strapontins à des acteurs à part entière, qui travaillent et vivent dans ce secteur. Cet amendement nous paraît donc de bon sens.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. La commission a repoussé ces deux amendements. Nous comprenons bien la démarche de nos collègues. Ils se disent qu'après tout, la communauté aéroportuaire est un lieu de dialogue et de concertation. Donc : ouvrons les portes, et que tout le monde soit autour de la table ! Le problème, c'est que les communautés aéroportuaires ne sont pas seulement des instances de concertation et des lieux de dialogue. Elles ne se substituent pas aux commissions consultatives de l'environnement, pas plus qu'aux commissions consultatives d'aide aux riverains. Ce sont de nouvelles structures, des établissements publics à caractère administratif, qui permettent à l'Etat d'associer, quand elles le veulent, les entreprises et les collectivités territoriales. Les entreprises, parce que ce sont elles qui paient : ce sont elles qui profitent de l'activité aéroportuaire et ce sont elles qui vont payer une partie des ressources. Et les collectivités territoriales, parce qu'elles représentent les riverains.

Le Sénat a ouvert la porte aux représentants des associations de riverains, notamment à ceux qui ont une capacité d'expertise du fait qu'ils siègent dans les commissions consultatives « environnement » des aéroports. Mais il n'a pas souhaité aller plus loin, comme le voudraient nos collègues Scellier et Asensi. C'est qu'en effet, une structure qui a essentiellement pour vocation de distribuer plus intelligemment l'argent des entreprises ou celui de l'Etat n'est pas un lieu de libre discussion et de dialogue. L'esprit du texte, c'est de permettre un usage plus intelligent de l'argent public.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer, pour donner l'avis du Gouvernement sur les amendements nos 8, troisième rectification, et 26.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8, troisième rectification.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 26.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Nous en venons à l'amendement n° 14.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Blazy. Je rappelle que c'est l'adoption par le Sénat d'un amendement socialiste qui a permis d'augmenter le nombre de représentants d'associations de riverains ou de protection de l'environnement au conseil d'administration de la communauté aéroportuaire.

Le présent amendement tend à renforcer leur représentation et leur rôle, en prévoyant que leur nombre soit égal à la moitié des deux autres collèges et en leur donnant une voix délibérative.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. C'est à juste titre que les sénateurs socialistes avaient souhaité renforcer la participation des associations de riverains. C'est pourquoi le Gouvernement en a été d'accord, ainsi que la majorité sénatoriale. Il est évident qu'il fallait que les riverains aient leur place dans le conseil d'administration de la communauté aéroportuaire.

Mais, encore une fois, il s'agit ici de dépenser de l'argent public. Comment peut-on imaginer que ceux qui vont bénéficier de l'argent public puissent délibérer sur la façon dont il doit être distribué ? Cela paraît tout à fait contraire à la déontologie. Une séparation est nécessaire entre ceux qui paient et ceux qui bénéficient des financements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Même avis que celui de la commission. Les représentants des associations seront naturellement consultés dans les instances de concertation, mais cet amendement ne me paraît pas opportun. Il y aurait double emploi avec les commissions consultatives qui existent déjà, et nous risquerions d'aboutir à une mauvaise répartition des rôles entre les élus et les associations.

Même si l'intention en est louable, je pense donc qu'il est préférable de rejeter cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 4.

(L'article 4 est adopté.)

Après l'article 4

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 28 rectifié et 15, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. François Asensi, pour soutenir l'amendement n° 28 rectifié.

M. François Asensi. Cet amendement tend à rétablir la rédaction initiale de la proposition de loi, plus conforme au rôle dévolu à ce nouvel établissement public à caractère administratif qu'est la communauté aéroportuaire.

Au Sénat, et encore aujourd'hui, vous avez complètement vidé le FISCA, le fonds d'investissement et de services de la communauté aéroportuaire, des financements nécessaires à l'indemnisation des riverains. La loi étant vidée de son contenu, je demande, par cet amendement, le rétablissement de la proposition Le Grand, tout simplement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour soutenir l'amendement n° 15.

M. Jean-Pierre Blazy. Je me réjouis, monsieur le président, du retour parmi nous de M. le secrétaire d'Etat aux transports. Nous allons peut-être pouvoir recommencer à discuter sérieusement. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

La création des communautés aéroportuaires ne peut pas être une création virtuelle. Comme je l'ai dit tout à l'heure lors de la discussion générale, le rapport Le Grand préconisait que soient créées des communautés aéroportuaires avec des moyens, avec des ressources, permettant ainsi aux élus - ceux des régions, des départements et des communes - de gérer un fonds au bénéfice des communes, pour favoriser des projets d'investissement ou de fonctionnement sur les territoires situés autour des aéroports. Le but était de favoriser une meilleure répartition des retombées économiques et fiscales.

Or, je constate - et il faut que vous en ayez conscience, mesdames et messieurs de la majorité, vous qui vous apprêtez à voter cette loi - que la rédaction de ce texte vide de tout son sens le rapport Le Grand. Celui-ci prévoyait la création d'un fonds, le FISCA, visant à financer les communautés aéroportuaires. La suppression de ce fonds ne permettra pas un financement suffisant, ni un bon fonctionnement de ces établissements publics, lesquels ne pourront pas remplir leurs missions. Si l'on veut vraiment que le travail que nous faisons ne soit pas virtuel mais qu'il bénéficie très concrètement aux populations riveraines, il nous faut donc revenir au texte du rapport Le Grand. Tel est l'objet de cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?


M. François-Michel Gonnot
, rapporteur. Défavorable. La communauté aéroportuaire bénéficiera d'un certain nombre de recettes. Je ne comprends pas l'idolâtrie soudaine de nos collègues pour le sénateur Le Grand. (Sourires.)

La proposition de loi que nous examinons actuellement affecte un certain nombre de ressources à l'établissement. Il n'est pas, à mes yeux, nécessaire de créer un fonds d'investissement dans un texte que vous nous accusiez tout à l'heure de vouloir faire voter dans la précipitation. Des lois de finances ultérieures examineront, si nécessaire, la possibilité de créer un tel fonds.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Je prie tout d'abord la représentation nationale d'excuser mon absence, qui n'était pas calculée, monsieur Blazy. Je devais décorer un haut fonctionnaire de mon ministère et je n'ai pas eu le cœur de remettre cette cérémonie. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé à M. Bertrand d'avoir la gentillesse de me suppléer.

Ici, seules les ressources comptent. Créer un fonds spécifique constitue une complication administrative et financière inutile. Si on veut que cela marche, il faut que ce soit simple. Donc, je ne vois pas ce qu'apporterait votre fonds, même si l'idée est intéressante.

M. Jean-Pierre Blazy. Ce n'est pas le mien, c'est celui de M. Le Grand ! C'est lui qui a proposé sa création !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. C'est alors un fonds commun ! Pour qu'il ne soit pas un fonds perdu (Sourires), je suis défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 15.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 5

M. le président. Sur l'article 5, je suis saisi de deux amendements, n°s 29 rectifié et 16, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. François Asensi, pour soutenir l'amendement n° 29 rectifié.

M. François Asensi. Pour agir efficacement, la communauté aéroportuaire a besoin de moyens financiers substantiels. A l'origine, le montant des ressources était évalué entre 55 et 70 millions d'euros. Le Sénat les a considérablement revues à la baisse avec une prévision de 5,8 millions d'euros, soit dix fois moins. Ces ressources ne reposeraient plus que sur le produit des sanctions, sur les fonds de compensation des nuisances aéroportuaires et sur des contributions volontaires des entreprises. Je ne crois pas à l'angélisme des entreprises, donc aux subventions qu'elles apporteront à cette communauté aéroportuaire. Tel est l'objet de cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour soutenir l'amendement n° 16.

M. Jean-Pierre Blazy. Cet amendement a le même objet que celui de M. Asensi. Les ressources de la communauté aéroportuaire, telles que vous les prévoyez, seront virtuelles parce que aléatoires. Des contributions volontaires pourraient, le cas échéant, être décidées en lois de finances. Qu'allons-nous, ce soir, mettre en œuvre de concret en créant des communautés aéroportuaires avec seulement quelques recettes de poche telles que le produit des amendes ? C'est négligeable lorsque l'on sait ce qu'a prévu M. Le Grand dans son rapport et que nous approuvons.

M. Francis Delattre. Il y a tout de même les allocations volontaires !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Défavorable pour toute une série de raisons. Nous avions, lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative de 2003, décidé d'affecter la taxe nationale sur les nuisances sonores à ADP. C'était un retour à la normale. Certes, comme l'ont souligné tout à l'heure un certain nombre de collègues, l'ADEME gérait parfaitement cette ressource. Toutefois, la différence de guichets troublait certains usagers. Comme le Gouvernement l'a à juste titre proposé, il convenait de rationaliser l'accès des usagers aux dossiers d'indemnisation.

Ces amendements visent à introduire une taxe additionnelle et à modifier la récente décision d'affecter la taxe nationale sur les nuisances sonores à ADP. Nous y sommes donc défavorables

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Je reprends l'argument de M. Gonnot.

Avec la communauté aéroportuaire, nous créons une nouvelle structure. Quand nous avons mis en place la coopération intercommunale dans nos communes, nous avons commencé avec de petits syndicats, qui sont devenus des syndicats intercommunaux, puis des communautés de communes, enfin des communautés d'agglomération. Si tout se déroule bien, rien n'empêchera le législateur, avec le concours du gouvernement en place, d'affecter plus de moyens. Donc, faisons vivre ces communautés. Si, comme chacun le souhaite dans la majorité, le Gouvernement constate leur bon fonctionnement,...

M. Francis Delattre. Et leurs compétences !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. ...elles pourront obtenir des ressources supplémentaires et pourquoi pas, monsieur Delattre, voir leurs compétences élargies. Créons ces communautés. Donnons-leur du poids et du pouvoir politique. L'avenir nous permettra peut-être de les enrichir.

M. Yves Jego. Très bien !

M. Jean-Pierre Blazy. C'est le mot qui convient !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 16.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 17.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Blazy. Cet amendement de repli vise à supprimer le mot « volontaires », tout en conservant, bien sûr, celui de « contributions » ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. C'est, semble-t-il, une subtilité de vocabulaire ! ADP verse, au titre du fonds de compensation des nuisances aéroportuaires, 4,5 millions d'euros de contributions volontaires. Nous ne doutons pas qu'il s'agit d'une obligation nécessaire au succès de ces structures, ce que, chacun l'aura bien compris, nous espérons.

M. Francis Delattre. C'est un nouveau concept !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Même avis que celui de la commission : défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 27.

La parole est à M. François Asensi pour le soutenir.

M. François Asensi. Cet amendement vise à instaurer une ressource nouvelle et durable pour la communauté aéroportuaire. Ainsi, cela permettra au Gouvernement de trouver des ressources pour faire fonctionner cette communauté aéroportuaire.

Cette proposition d'amendement s'appuie sur le principe qui prévaut en Corse, en vertu de l'article 60 de la loi 91-428 portant statut de la collectivité territoriale de Corse, comme à Amsterdam pour l'aéroport de Schiphol et qui prévoit le paiement d'une taxe à l'arrivée.

Pour Roissy, le montant de la taxe pourrait être environ de 3 euros. Cette taxe s'élevait en 1998, à 12 euros à Schiphol et à 4,57 euros - soit 30 francs - en Corse. Elle pourrait rapporter 90 millions d'euros.

Cette recette vise à alimenter les ressources de la communauté aéroportuaire. Cette taxe par passager entrant et par tonne de fret débarquée mettra à contribution les usagers autant que les autres partenaires de la communauté aéroportuaire. Ainsi, les collectivités, les entreprises et les utilisateurs participeront également aux missions de l'établissement public, notamment à l'indemnisation des nuisances que subissent les riverains.

Tel est le sens de cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Défavorable. Il sera temps, éventuellement, dans le cadre des lois de finances à venir, d'inventer de nouvelles taxes. Il n'a pas semblé nécessaire à la commission des affaires économiques d'évoquer cette contribution et de la fixer dès à présent.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Les compagnies aériennes croulent déjà sous les taxes.

M. Jean-Pierre Blazy. Nous y voilà !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. L'Etat leur a demandé de financer les dépenses de sûreté et les dépense environnementales, à tel point d'ailleurs que, lors d'un dernier conseil supérieur de l'aviation marchande, les compagnies m'ont demandé d'organiser une table ronde sur la compétitivité du transport aérien français. J'ai donc souhaité que l'on me remette une étude sur le sujet. Ainsi, nous ne disposons que de peu de compagnies charters, ce dont nous avons beaucoup parlé après la catastrophe de Charm el-Cheik. De plus, nous ne comptons pas assez de compagnies régionales. Un problème de compétitivité se pose parce que nous sommes très exigeants. Par conséquent, je ne crois pas nécessaire de prévoir des taxes supplémentaires qui pourraient toucher les compagnies aériennes.

M. le président. La parole est à M. François Asensi.

M. François Asensi. Cette taxe de 3 euros est dérisoire au regard du prix d'un billet pour un trajet entre Hongkong et Paris. Est-il impossible de prélever 3 euros pour indemniser les riverains ? Les compagnies aériennes sont des pollueurs et doivent payer.

M. Yves Jego. Et quand elles seront en faillite ?

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 18.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Blazy. Cet amendement de repli tend à supprimer les mots « le cas échéant » au début de l'avant dernier alinéa de l'article 5.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous venez de nous livrer le fond de votre pensée. Il n'y aura justement jamais, dans les futures lois de finances, de « cas échéant » permettant de créer une taxe additionnelle à la TNSA.

M. Le Grand est un fin connaisseur de l'économie aérienne et des difficultés que peuvent rencontrer les compagnies aériennes au cours de certaines périodes. Il est convaincu qu'un niveau de ressources suffisant est nécessaire pour faire vivre ces communautés aéroportuaires. Comme vient de l'indiquer François Asensi, la proposition de M. Le Grand, à laquelle nous adhérons, est modeste par rapport aux autres taxes telles que les taxes de sûreté qui frappent plus durement le transport aérien. Ces dernières sont certes nécessaires pour financer la sûreté à laquelle nous attachons évidemment une importance primordiale, mais si une telle taxe de 3 euros était incluse dans le prix du billet, le voyageur aurait ainsi conscience de contribuer à une meilleure gouvernance des territoires au voisinage des aéroports. Il faut le faire admettre. Cette taxe devra être, un jour ou l'autre, votée dans une loi de finances.

Soyons objectifs, vous n'êtes pas le seul, monsieur Bussereau à avoir tenu le langage que vous avez tenu.

Adopter cet amendement donnerait un sens aux communautés aéroportuaires, qui disposeront ainsi de ressources leur permettant de remplir leurs missions.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Même avis que pour l'amendement n° 27 de M. Asensi : défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Même avis que celui de la commission : défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 18.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 19.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Blazy. Le dernier alinéa de l'article est mal placé. L'article 5 traite des ressources et non des affectations et des missions. Cet alinéa trouverait mieux sa place à l'article 6 qui prévoit les projets éligibles au financement par la communauté aéroportuaire. Tel est l'objet de cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. Défavorable.

M. Jean-Pierre Blazy. Pour quelle raison ?

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 19.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 9 corrigé.

La parole est à M. François Scellier pour le soutenir.

M. François Scellier. Cet amendement vise également à donner des moyens à la communauté aéroportuaire en ne laissant notamment pas jouer le volontariat. On peut espérer que le produit des sanctions administratives prononcées par l'autorité de contrôle des nuisances diminuera puisque l'objectif est de réduire le nombre des contrevenants. J'ai bien entendu les propos de M. le rapporteur et de M. le secrétaire d'Etat. Toutefois, tous les rapports précédents, que ce soit celui de M. Le Grand ou celui de M. Lachenaud en 1997, ont montré la nécessité d'affecter des moyens à la communauté aéroportuaire. Or, en cas de renvoi à la loi de finances, on ne manquera pas d'invoquer l'article 40.

Les intentions sont sûrement excellentes et je les partage. Toutefois, faute de ressources suffisantes, les communautés aéroportuaires risquent de ne pas pouvoir remplir leurs fonctions, ce que je regrette.

M. Francis Delattre. Très bonne intervention !

M. Jean-Pierre Blazy et M. François Asensi. En effet !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?


M. François-Michel Gonnot
, rapporteur. Nous l'avons déjà dit tout à l'heure, nous comprenons parfaitement les préoccupations de notre collègue François Scellier, que d'autres orateurs ont d'ailleurs aussi exprimées. Mais personne n'a prétendu qu'il n'y aurait jamais de ressources nouvelles, qu'il ne faudrait pas un jour assurer la montée en puissance financière des communautés aéroportuaires.

Nous n'en sommes cependant pas encore là. Plusieurs mois seront nécessaires pour mettre en place les communautés aéroportuaires, et c'est du reste la raison pour laquelle nous avons souhaité examiner ce texte rapidement. Il conviendra ensuite de voir comment la situation évoluera dans les dix aéroports concernés - ne cédons pas au tropisme francilien, cette loi s'appliquera à dix grands aéroports français.

Il faut donc laisser les choses se mettre en place, sachant que le Gouvernement, la majorité, le Parlement, le moment venu, seront peut-être effectivement amenés à abonder davantage le budget des communautés aéroportuaires. Toutefois, il est préférable de se donner le temps de la réflexion, le temps de l'évaluation, avant de définir un mode de taxation et de fixer son assiette.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Je comprends parfaitement la position de M. Scellier, qui est très logique, mais l'argumentation de M. le rapporteur me paraît excellente.

Je dirai même à M. Scellier, sans cultiver le goût du paradoxe, que je pencherais plutôt pour une solution inverse, c'est-à-dire la possibilité de réduire la taxe d'habitation des personnes gênées par les nuisances, en garantissant une compensation de la part de l'Etat.

Puisqu'une réflexion globale sur la fiscalité locale sera menée à l'occasion de la mise en œuvre des lois de décentralisation, je propose, monsieur Scellier, que nous retravaillions ensemble dans le détail sur ce point. L'instrument des impôts locaux peut en effet constituer une piste, mais pas forcément de la manière dont vous l'avez proposé ce soir.

M. le président. La parole est à M. François Scellier.

M. François Scellier. Je retire mon amendement, avec regret mais sans amertume. (Sourires.)

M. le président. L'amendement n° 9 corrigé est retiré.

Je mets aux voix l'article 5.

(L'article 5 est adopté.)

Article 5 bis

M. le président. Sur l'article 5 bis, j'ai plusieurs inscrits.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, premier orateur inscrit sur l'article.

M. Jean-Pierre Blazy. Des dotations annuelles viennent actuellement alimenter le budget des communes relevant en tout ou partie d'un plan de gêne sonore. Or il est prévu de supprimer ce mécanisme, puisque les ressources des fonds de compensation des nuisances aéroportuaires des communes riveraines des aéroports de Roissy et d'Orly seront désormais dévolues aux communautés aéroportuaires correspondantes, en vue de financer des projets d'investissement ou de fonctionnement.

Je pense évidemment à ma commune, mais aussi à d'autres, comme celle de Garges-lès-Gonesse, qui a perçu, cette année, une somme substantielle : un peu plus de 600 000 euros. Il vous faudra, monsieur le secrétaire d'Etat, expliquer à Mme Olin, sénatrice-maire de Garges-lès-Gonesse, comment elle pourra s'en passer, et elle n'est pas la seule dans ce cas.

La suppression de ce dispositif en faveur des communes concernées par les plans de gêne sonore, mis en place par le gouvernement précédent, posera une difficulté importante pour les budgets de communes dont le potentiel fiscal est généralement faible, comme cela a été rappelé tout à l'heure.

M. Francis Delattre. C'est un autre tropisme francilien !

M. Jean-Pierre Blazy. Si ces communes sont également éligibles aux contrats de ville et autres mesures de la politique de la ville, c'est bien qu'elles recèlent des réalités sociologiques difficiles. J'appelle votre attention sur ce fait.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Francis Delattre. Ah oui ! Une réponse s'impose.

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. C'est un vrai problème, sur lequel il conviendrait peut-être que le Gouvernement rassure les élus. La solution ne réside néanmoins certainement pas dans un amendement de suppression de l'article 5 bis. La commission s'est donc prononcée défavorablement sur l'amendement n° 36.

M. Jean-Pierre Blazy. Pardonnez-moi, mais je n'ai pas déposé d'amendement !

M. le président. M. Blazy s'est en effet contenté d'intervenir sur l'article.

M. le président. La parole est à M. François Scellier.

M. François Scellier. Je souhaitais soulever exactement le même problème que M. Blazy. Même si cela ne relève peut-être pas de la présente loi, le Gouvernement doit prendre l'engagement de faire en sorte que les communes concernées ne seront pas désavantagées par le nouveau système de répartition. Il est déjà arrivé que le comité des finances locales ait à examiner des problèmes similaires.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Je suis défavorable à l'amendement...

M. Jean-Pierre Blazy. Mais je n'ai pas déposé d'amendement !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Il y a tout de même un amendement de suppression de l'article.

M. le président. Pardonnez-moi, monsieur le secrétaire d'Etat, mais nous n'en sommes pas encore à l'amendement.

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Soit, monsieur le président.

Je suis prêt à donner à M. Scellier les garanties qu'il réclame. Nous allons passer d'un mécanisme automatique à un système de régulation par l'intermédiaire des élus. Si nous nous apercevions qu'il était défavorable aux collectivités,...

M. Jean-Pierre Blazy. Il leur sera forcément défavorable !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. ... nous serions naturellement amenés à le corriger. Je prends donc date par rapport à la remarque de M. Scellier.

M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 36 tendant à supprimer l'article 5 bis, amendement sur lequel le Gouvernement et la commission se sont déjà exprimés.

Monsieur Asensi, souhaitez-vous le soutenir ?

M. François Asensi. Je retire cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 36 est retiré.

Je mets aux voix l'article 5 bis.

(L'article 5 bis est adopté.)

Article 6

M. le président. Sur l'article 6, je suis saisi d'un amendement n° 31.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Blazy. Je souhaiterais défendre, en même temps que cet amendement, les amendements n°s 32, 33 et 34..

M. le président. Je suis en effet saisi des amendements n°s 32, 33 et 34.

Vous avez la parole, mon cher collègue.

M. François Asensi. Les communautés aéroportuaires, telles que les envisageait le sénateur Jean-François Le Grand, répondaient à une demande simple : faire bénéficier les riverains de retombées positives. Mais le débat a démontré que la proposition de loi était vidée de sa substance, les moyens nécessaires à sa mise en œuvre n'étant pas accordés.

Pour que la communauté aéroportuaire, malgré cette restriction drastique des moyens financiers, reste un outil pertinent en devenir, il faut lui conserver des champs de compétence importants et ne pas laisser la définition des missions à sa libre appréciation. Nos quatre amendements ont précisément pour objet de préciser le contenu des compétences de l'établissement public en matière d'environnement, d'emploi, de transport, d'urbanisme et aussi de santé publique, pour aller au-delà d'une simple liste.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces quatre amendements ?

M. François-Michel Gonnot, rapporteur. La commission a une opinion absolument inverse. Nous pensons, pour notre part, qu'il est bon, utile et souhaitable que les communautés aéroportuaires conservent leur imagination, leur esprit d'invention, dans le cadre des compétences définies avec précision à l'article 6.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Il est identique à celui de la commission. J'ajoute seulement que, lorsque j'étais parlementaire, Pierre Mazeaud et d'autres présidents de la commission des lois m'ont appris qu'il fallait se battre contre les « notamment » et autres formules de ce style. J'estime que l'expression « par exemple » n'a rien à faire dans un texte de loi...

M. Francis Delattre. « Le cas échéant », ce n'est pas mieux !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. ...et qu'elle relève vraiment du domaine réglementaire.

M. le président. Je mets aux voix successivement les amendements n°s 31 à 34.

(Ces amendements, mis aux voix successivement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. L'amendement n° 20 de M. Blazy tombe, suite au rejet de l'amendement n° 19.

M. Jean-Pierre Blazy. Et pourquoi donc ? J'aimerais bien que vous me l'expliquiez, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 20 s'inscrit dans la continuité de l'amendement n° 19, qui a été rejeté. Par souci de coordination globale, il n'est pas nécessaire, dans un tel cas, de procéder à un nouveau vote. C'est, en quelque sorte, l'application au droit parlementaire du principe de l'autorité de la chose jugée. (Sourires.)

Je mets aux voix l'article 6.

(L'article 6 est adopté.)

Article 7

M. le président. Je mets aux voix l'article 7.

(L'article 7 est adopté.)

Après l'article 7

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 10.

La parole est à M. François Scellier, pour le soutenir.

M. François Scellier. La loi fixe, comme seule condition à la création d'une autorité aéroportuaire, la publication d'un arrêté du préfet de région. Dans la mesure où la capacité financière réelle de ces nouveaux établissements conditionnera leur réussite, il faut prévoir que la présente loi n'entrera en vigueur qu'après l'institution par loi de finances des ressources obligatoires prévues à l'article 5.

Toutefois, après le rejet de l'amendement n° 9 corrigé, cet amendement ne me semble plus justifié.

M. le président. Dont acte. En ces lieux, ne soyons pas plus royalistes que le roi. (Sourires.)

L'amendement n° 10 tombe.

Explications de vote

M. le président. Dans les explications de vote sur l'ensemble de la proposition de loi, la parole est à M. François Asensi, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. François Asensi. Ce débat était cousu de fil blanc, puisque l'on savait dès le départ qu'aucun amendement ne serait retenu. L'idée initiale, très intéressante et innovante, se trouve complètement vidée de son contenu, puisque les moyens de la mettre en œuvre ne sont pas assurés. Il s'agit finalement d'un texte d'opportunité électorale. Dans ces conditions, je ne peux que voter « contre ».

M. le président. La parole est Mme Odile Saugues, pour le groupe socialiste.

Mme Odile Saugues. Monsieur le président, ce texte sur la création des communautés aéroportuaires, examiné en séance publique à la hussarde, me fait penser, en l'absence de définition des compétences et des moyens, à un self-service mal approvisionné. Ce que vous présentez comme de la souplesse s'apparente plutôt, à mon sens, à de la précipitation, et je ne suis pas sûre que la personne qui était destinée à recevoir ce paquet cadeau électoral en tire un grand profit.

Nous avons entendu, sur tous les bancs de cette assemblée, des élus soucieux de leurs concitoyens mais qui n'ont pas obtenu de réponses à leurs questions, et nous le déplorons. Ce texte visait évidemment à répondre au problème du troisième aéroport et à panser certaines blessures encore vives. Nous regrettons donc de n'avoir pu faire adopter un seul amendement, c'est-à-dire de n'avoir pu apporter les précisions nécessaires afin de le rendre tout à fait profitable pour nos concitoyens.

Tous les intervenants ont salué la qualité du rapport Le Grand, et ils souhaitaient s'appuyer sur ce travail pour écrire une loi intéressante, charnue. En réalité, il ne reste que la portion congrue, et même l'arête - qui, pour tout dire ne passe pas. Si l'idée aléatoire, presque risible, des promesses de dons est conservée, les communautés aéroportuaires seront votre « aérothon ». Nous vous le laissons : les représentants du groupe socialiste ici présents s'abstiendront.

M. le président. La parole est à M. Guy Drut, pour le groupe UMP.

M. Guy Drut. Au terme de ce débat riche et constructif, je souhaite simplement émettre quelques réflexions. Certaines expressions comme « à la hussarde » ou « dans la précipitation » m'ont un peu choqué.

M. Jean-Pierre Blazy. C'est la réalité !

Mme Odile Saugues. Ne soyez pas si sensible !

M. Guy Drut. Pardonnez-moi, mais réfléchir, tergiverser, proposer, est-ce de la précipitation ? Non, c'est de l'action, tout simplement.

M. Jean-Pierre Blazy. C'est plutôt de l'activisme électoral !

Mme Odile Saugues. De l'agitation !

M. Guy Drut. Nous ne légiférons pas dans l'urgence, certainement pas ! Chacun a pu s'exprimer tranquillement, mais il devenait urgent de légiférer, tant les problèmes que nous rencontrons les uns et les autres sont importants, et je crois qu'il est tout à l'honneur du Gouvernement de tenter de leur apporter des solutions.

Je ne trouve pas que l'esprit du rapport de M. Le Grand n'ait pas été respecté, même si on ne retrouve pas la totalité de ses propositions à la lettre près. Le texte, au demeurant, est évolutif, le secrétaire d'Etat et le rapporteur l'ont bien dit : le rapporteur a parlé de « réflexion » et d'« évaluation », et les engagements pris par le Gouvernement, tant par la voix de M. Bertrand que par celle de M. Bussereau, prouvent que des réponses pourront être apportées aux interrogations concernant notamment l'extension des dispositions de ce texte aux aéroports de province ou aux héliports.

Ce texte est positif, il va dans le bon sens, et le groupe UMP le votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet, pour le groupe UDF.

M. Pierre-Christophe Baguet. Je confirme tout d'abord que le groupe UDF votera aussi ce texte, car il suscite beaucoup d'espoirs chez nombre de nos concitoyens. Nous espérons qu'il sera le plus efficace possible, et je crois qu'il est effectivement amendable.

M. Jean-Pierre Blazy. Vous avez bien vu que non !

M. Pierre-Christophe Baguet. Il sera amendé au fil du temps. Je rappelle au passage que, alors que M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer était empêché par des obligations républicaines tout à fait honorables, son collègue chargé du tourisme a justement pris l'engagement devant nous d'adjoindre l'héliport d'Issy-les-Moulineaux aux dix aéroports retenus pour l'expérimentation. Je tenais à vous remercier, monsieur le secrétaire d'Etat, de cet engagement pris au nom du Gouvernement. (Rires.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.


M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer
. Je rends hommage au talent pédagogique - que je connaissais déjà - de M. Baguet. Il a raison, c'est une vraie question, qui devrait être traitée.

A tous les participants à ce débat, en particulier M. Drut qui, en tant qu'administrateur d'Aéroport de Paris, connaît particulièrement bien les problèmes aéroportuaires, je veux préciser que ce texte n'est que le début d'une aventure (Rires sur les bancs du groupe socialiste) : il sera ce que nous en ferons, ce qu'en fera le Gouvernement, et dépendra de la manière dont l'administration l'appliquera. A cet égard, je vais d'ailleurs demander à mes services de faire en sorte que les décrets d'application nécessaires sortent le plus rapidement possible.

M. Jean-Pierre Blazy. Pas avant les régionales, tout de même !

M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Si le Gouvernement est capable de faire un projet de loi avant les régionales, il est capable de publier un décret, c'est beaucoup moins compliqué, monsieur Blazy !

Mais ce texte sera aussi ce qu'en feront les élus locaux.

Cette loi représente donc un espoir et, je le redis à M. Scellier qui a présenté des amendements très intéressants, si nous pouvons, plus tard, encore améliorer les choses, si nous devons créer de nouvelles ressources, si nous avons à tenir compte du vécu de ces communautés, nous le ferons ensemble, dans le même état d'esprit que celui qui a prévalu cet après-midi au cours de ce débat. Et je vous remercie, mesdames et messieurs les députés, ainsi que M. le président pour son extrême qualité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Vote sur l'ensemble

M. le président. Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(L'ensemble de la proposition de loi est adopté.)

4

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 1055, relatif aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle :

M. Alfred Trassy-Paillogues, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (rapport n° 1413) ;

M. Emmanuel Hamelin, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (avis n° 1412).

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures.)

      Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

      jean pinchot