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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mardi 20 février 2007

144e séance de la session ordinaire 2006-2007

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1. Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire étrangère (p.

2. Questions au Gouvernement (p.

politique industrielle (p.

Mme Marie-George Buffet, M. Thierry Breton, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

accès à une mutuelle (p.

MM. Alain Gest, Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités.

logement social (p.

Mme Sylvie Andrieux, M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement.

airbus (p.

MM. Stéphane Demilly, Thierry Breton, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

retraites agricoles (p.

MM. Marc Le Fur, Dominique Bussereau, ministre de l’agriculture et de la pêche.

fonction publique et promotion sociale (p.

MM. Bruno Gilles, Christian Jacob, ministre de la fonction publique.

eads (p.

MM. Pierre Cohen, Thierry Breton, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

bilan de la politique culturelle (p.

MM. Alain Moyne-Bressand, Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication.

mesures en faveur de l’hôtellerie-restauration (p.

MM. Thierry Mariani, Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

chiffres du chômage (p.

MM. Didier Migaud, Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement.

situation des personnes handicapées (p.

MM. Richard Mallié, Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

accès des pme à la commande publique (p.

M. Jean Proriol, Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur.

Suspension et reprise de la séance (p.

PRÉSIDENCE DE M. RENÉ DOSIÈRE

3. Droit au logement opposable. – Suite de la discussion d'un projet de loi adopté par le Sénat après déclaration d’urgence (nos 3656, 3671)

Rappel au règlement

MM. Jean-Yves Le Bouillonnec, le président.

Suspension et reprise de la séance (p.

Rappel au règlement

Mme Annick Lepetit.

discussion des articles (suite)

Article 2 (suite)

Amendements nos 317 et 376 rectifié : MM. Jean-Yves Le Bouillonnec, Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement ; Mme Christine Boutin, rapporteure de la commission des affaires culturelles ; MM. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Daniel Paul, François Brottes, le président, Jean-Louis Dumont, Michel Piron.

Sous-amendement n° 379 à l’amendement n° 376 rectifié : MM. le président, le ministre, Mme la rapporteure, MM. Daniel Paul, Jean-Yves Le Bouillonnec, François Brottes.

Rejet de l’amendement n° 317 ; rejet du sous-amendement n° 379 ; adoption de l’amendement n° 376 rectifié.

Amendements nos 35 rectifié, 232, 113 rectifié et 202 rectifié : M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme la rapporteure, MM. le ministre, Francis Vercamer.

Rappel au règlement

MM. François Brottes, le président.

Reprise de la discussion

Mmes Martine Billard, la rapporteure, M. le ministre. – Adoption de l’amendement n° 35 rectifié.

Amendements identiques nos 4 et 233 : M. François Brottes, Mme la rapporteure, MM. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. – Adoption des amendements nos 4 rectifié et 233 rectifié.

Amendement n° 234 : M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme la rapporteure, M. le ministre. – Rejet.

Amendement n° 235 : Mmes Annick Lepetit, la rapporteure, M. le ministre. – Retrait.

Amendement n° 282 : M. Patrick Braouezec, Mme la rapporteure, M. le ministre, Mme Martine Billard. – Rejet.

Amendement n° 189. – Rejet.

Amendements identiques nos 5, 36 et 82 : M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Annick Lepetit, MM. Michel Piron, Georges Fenech, rapporteur pour avis de la commission des lois ; le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, Mme la rapporteure, M. le ministre. – Adoption.

Amendements nos 6 rectifié et 37 rectifié : Mme la rapporteure, M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. – Retrait de l’amendement n° 37 rectifié.

MM. le ministre, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Martine Billard, MM. François Brottes, Michel Piron, Mme la rapporteure. – Adoption de l’amendement n° 6 deuxième rectification.

Amendements nos 200 et 236 : Mme Martine Billard, M. Jean-Louis Dumont, le rapporteur pour avis de la commission des lois, Mme la rapporteure, M. le ministre. – Retraits.

Amendement n° 201 : Mme Martine Billard, M. le rapporteur pour avis de la commission des lois, Mme la rapporteure, M. le ministre. – Retrait.

Amendements n° 114 et 239 rectifié : MM. Francis Vercamer, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme la rapporteure, MM. le ministre, Frédéric Dutoit. – Rejets

Amendement n° 237 : M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme la rapporteure, MM. le ministre, Michel Piron, Jean-Louis Dumont, Mme Martine Billard. – Rejet.

Amendement n° 159 : Mme Martine Billard. – Rejet.

Amendements identiques nos 7 et 38 avec le sous-amendement n° 238 : Mme la rapporteure, MM. Jean-Yves Le Bouillonnec, le ministre, Jean-Louis Dumont. – Rejet du sous-amendement n° 238 ; adoption des amendements identiques.

Amendement n° 250 : Mmes Annick Lepetit, la rapporteure, MM. le ministre, Jean-Louis Dumont. – Rejet.

Amendements identiques nos 8, 39 et 83 : Mmes la rapporteure, Annick Lepetit, MM. le rapporteur pour avis de la commission des lois, le ministre. – Adoption.

Amendements identiques nos 9 et 84 : Mme la rapporteure, MM. le rapporteur pour avis de la commission des lois, le ministre, Jean-Louis Dumont. – Adoption.

Les amendements nos 309 rectifié et 112 seront examinés après l’article 2.

Amendements identiques nos 10 et 40. – Adoption.

Amendements identiques nos 11 et 41 : Mme la rapporteure, M. le ministre. – Adoption.

Amendements identiques nos 12 et 42. – Adoption

Adoption de l’article 2 modifié.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

4. Ordre du jour de la prochaine séance

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire étrangère

M. le président. Mes chers collègues, je suis heureux de souhaiter en votre nom la bienvenue à une délégation de l’Assemblée populaire nationale de la République algérienne démocratique et populaire, conduite par son président, M. Amar Saadani. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

Bienvenue à l’Assemblée nationale ! Vous savez combien nous sommes attentifs aux relations entre la France et l’Algérie.

2

Questions au gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par une question du groupe des député-e-s communistes et républicains.

Politique industrielle

M. le président. La parole est à Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

EADS est en pleine crise : 10 000 emplois sont menacés. Pourtant, les carnets de commandes sont pleins pour les six prochaines années. La semaine dernière, Alcatel, premier de la classe des financiers, supprimait plus de 1 500 emplois en France, alors même qu’il a touché 38 millions d’euros de l’Agence de l’innovation industrielle.

M. Patrick Roy. C’est scandaleux !

Mme Marie-George Buffet. LVMH a augmenté ses profits de 30 %, mais retire ses commandes à l’entreprise ECCE, dans le Nord, qui annonce sa fermeture.

Saint Louis Sucre, Cycleurope, Aubade, Well, Nief Plastic, JDC, les équipementiers de l’automobile comme Thomé Génot : la liste serait trop longue des entreprises fermées, délocalisées, et des emplois cassés.

Les prédateurs se nomment fonds de pension, fonds d’investissement, donneurs d’ordres. Leur mobile est toujours le même : la rentabilité la plus haute et la plus immédiate.

Ce n’est pas un slogan ; c’est la réalité. Les comptes de la nation montrent que, sur les 567 milliards d’euros de ressources nouvelles dont ont disposé les entreprises en 2005, 70 % se sont volatilisés dans la finance, les dividendes ou les OPA. Dans ces conditions, comment s’étonner de toutes ces suppressions d’emploi ?

Et où vont passer les 74 milliards d’euros de profits des entreprises du CAC 40, si ce n’est dans la seule poche des actionnaires ?

Monsieur le Premier ministre, qu’attendez-vous pour définir une véritable politique industrielle qui soit capable, par la création d’un pôle financier public, de mobiliser tous ces formidables moyens financiers pour la recherche, l’investissement, l’emploi et les salaires ?

Qu’attendez-vous pour donner aux salariés et à leurs élus territoriaux de nouveaux droits dans la gestion des entreprises ?

Qu’attendez-vous pour contrôler l’utilisation des aides publiques aux entreprises, ces 65 milliards d’euros donnés chaque année sans le moindre contrôle ?

Qu’attendez-vous enfin pour agir contre le dumping social et fiscal au sein de l’Union européenne ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

M. Thierry Breton, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Madame la députée, votre discours n’a guère évolué depuis plusieurs années, depuis plusieurs décennies et même, si l’on songe à l’idéologie que vous défendez, depuis plusieurs siècles. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. − Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.) En réalité, il faut voir les choses telles qu’elles sont. Vous le savez, la politique industrielle du Gouvernement, menée par le Premier ministre, Dominique de Villepin, a conduit à la création de l’Agence pour l’innovation industrielle, dotée de plus de 2 milliards d’euros et destinée − c’est une première en Europe − à accompagner le redéploiement industriel, la recherche, l’innovation de nos entreprises nationales.

Par ailleurs, vous paraissez opposée aux profits − cela ne me surprend pas. (Vives protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.) Mais les profits d’aujourd’hui, ce sont les emplois de demain. Il faudrait peut-être que vous commenciez à vous faire à cette idée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. − Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jacques Desallangre. Scandaleux !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Certains, à côté de vous, appellent les Français à se réconcilier avec l’entreprise. C’est ce que nous faisons avec le Premier ministre, c’est ce que nous avons fait avec Jean-Pierre Raffarin, au cours des années 2002-2005, pour que les entreprises françaises soient plus compétitives et investissent. Oui, madame Buffet, les profits sont nécessaires à une entreprise. D’une part, ils sont réinvestis et, d’autre part, grâce à la loi sur la participation que nous avons fait voter, ils peuvent être redistribués à 10 millions de salariés qui, désormais, sont directement ou indirectement intéressés.

Voilà toute la politique industrielle que mène le Gouvernement. Madame Buffet, il est temps de regarder le monde tel qu’il est. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. − Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

ACCÈS À UNE MUTUELLE

M. le président. La parole est à M. Alain Gest, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Alain Gest. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. le ministre de la santé et des solidarités.

Monsieur le ministre, parmi les réformes courageuses qu’ont menées les gouvernements de Jean-Pierre Raffarin et de Dominique de Villepin figure, à l’évidence, celle de l’assurance maladie.

M. Jean-Marie Le Guen. Quel échec !

M. Alain Gest. Ses résultats commencent progressivement à se faire sentir, comme j’ai pu le vérifier moi-même auprès de la caisse primaire de mon département. L’objectif de la réforme était de mettre en place un plan de redressement financier, mais c’était aussi l’occasion de faire en sorte que les Français soient mieux soignés, notamment en diminuant le nombre de personnes ne disposant pas d’une couverture sociale. C’est pourquoi nous avons d’abord réparé l’injustice créée par la loi de 1999 instaurant la CMU, qui interdisait aux personnes touchant le minimum vieillesse ou l’allocation aux adultes handicapés de bénéficier du dispositif.

Mais nous avons également décidé de la création d’une aide à l’acquisition d’une couverture complémentaire santé, destinée aux personnes dont les revenus dépassaient de 15 % le plafond de la CMU, pourcentage que nous avons porté, dans le budget de 2007, à 20 %. Cette couverture concernait a priori 2 millions de nos compatriotes, et pas uniquement les jeunes de moins de seize ans, comme semble le penser l’une des candidates à l’élection présidentielle. (Sourires sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) C’est la raison pour laquelle nous avons considéré qu’elle devait bénéficier aux familles et aux étudiants, comme l’a récemment rappelé dans un rapport notre collègue Laurent Wauquiez.

Monsieur le ministre, pouvez-vous préciser comment s’est faite la mise en œuvre de cette mesure et quelles sont les évolutions qu’il est aujourd’hui possible d’envisager ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et des solidarités.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, comme le Premier ministre me le rappelait à l’instant, vous pouvez être fiers de notre bilan en matière de santé. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) En effet, vous avez su réduire les déficits de l’assurance maladie, les diviser par quatre et donc sauver notre système de sécurité sociale, en même temps que vous avez amélioré l’accès aux soins et renforcé notre système de santé.

Vous l’avez rappelé, monsieur le député, pendant longtemps, quelque 5 millions de Français ont été privés de complémentaire santé. Les mesures que vous avez prises − notamment l’aide à l’acquisition d’une couverture complémentaire − permettent aujourd’hui à plus de 3 millions d’entre eux d’en bénéficier. C’étaient les oubliés du système, ceux qui dépassaient de quelques euros le plafond de la CMU et de la CMU complémentaire et qui n’avaient droit à aucune aide.

M. Gérard Bapt. Ce n’est pas vrai !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Je pense en particulier aux personnes touchant le minimum vieillesse. Entre le 1er janvier 2006 et le 1er janvier 2007, nous avons enregistré 57 % de demandes supplémentaires : la mesure que vous avez votée correspondait à un réel besoin et 3 millions de personnes peuvent aujourd’hui bénéficier de cette aide, qui peut représenter jusqu’à 400 euros par an.

En même temps, vous avez décidé de prendre en charge de nouveaux actes de santé : l’ostéodensitométrie profite à plus de 1 million de personnes. Comme chaque année, 1 milliard d’euros de médicaments innovants sont pris en charge. Ainsi, un médicament qui permet de réduire de moitié la mortalité chez les femmes atteintes de cancers du sein et qui coûte 1 500 euros par mois, est remboursé à 100 %. Dans le même temps, vous avez su mener à bien 932 opérations de restructuration dans les hôpitaux, vous avez prévu des mesures pour mieux prendre en charge les diabétiques, vous avez su réduire les déficits, préserver notre système, mais surtout le renforcer : oui, vous pouvez être fiers de ce bilan. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

LOGEMENT social

M. le président. La parole est à Mme Sylvie Andrieux, pour le groupe socialiste.

Mme Sylvie Andrieux. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement.

M. Patrick Roy. Et de la montée du RMI !

Mme Sylvie Andrieux. Depuis le début de la législature, la majorité n’a cessé de remettre en cause l’obligation faite aux communes de proposer 20 % de logements sociaux. Il a fallu que l’abbé Pierre vienne dans notre hémicycle pour que vous renonciez à cette funeste aventure.

Aujourd’hui, l’abbé Pierre est mort, nous sortons de l’hiver, la compassion envers les sans-abri et les mal logés s’estompe. Et c’est ce moment que les amis de M. Sarkozy choisissent pour revenir à la charge. M. Jego a en effet déposé un amendement au projet de loi de loi instituant le droit au logement opposable qui détruit cette obligation.

Nous en sommes à l’heure de vérité devant les Français. La proposition de détruire cette obligation figure bien dans le programme de M. Sarkozy. Monsieur le ministre, partagez-vous cette volonté du ministre candidat ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Madame Andrieux-Bouisse, j’aurais préféré que vous soyez beaucoup plus allante lors de l’élaboration du schéma d’aménagement rural de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, quand il a fallu que Jean-Claude Gaudin intervienne avec force pour que les logements sociaux soient prévus dans toutes les communes de la région. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. − Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Dois-je vous rappeler, madame, que, de 1981, date de l’élection de François Mitterrand, à 2002, date du départ de M. Jospin, la France a construit en moyenne moins de 280 000 logements par an, alors qu’il en fallait plus de 450 000. La crise du logement dont l’opposition actuelle est responsable a considérablement entamé le pouvoir d’achat des Français. Les économistes ont calculé que si, à l’époque, nous avions offert des logements au rythme qu’a adopté le présent gouvernement, les loyers n’auraient pas explosé comme ils l’ont fait et nos compatriotes auraient 28 % de pouvoir d’achat en plus. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Madame Andrieux, comment osez-vous évoquer ce sujet, quand les années noires du logement social sont vos années : vous construisiez 40 000 logements sociaux, alors que nous sommes à plus de 100 000 cette année, et que le texte dont l’examen reprendra tout à l’heure nous permettra de passer à 150 000. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Pour répondre plus précisément à votre question, je rappelle que, comme nombre de députés, M. Jego souhaite développer l’accession sociale à la propriété. Il a déposé deux amendements, dont l’un proposant que toute opération d’accession sociale à la propriété bénéficie d’un taux de TVA réduit à 5,5 % : il a raison.

Pour le reste, madame, nous avons suffisamment débattu. Vous avez essayé de faire croire que nous ne souhaitions pas construire des logements sociaux, alors que nous en faisons trois fois plus que vous. (« C’est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste.) L’amendement de M. Jego est un amendement d’appel destiné à dire aux Français qu’il faut et du locatif social et de l’accession sociale à la propriété. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. − Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

AIRBUS

M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Stéphane Demilly. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, il y a deux semaines, je vous avais interrogé sur la position du Gouvernement face au plan de réorganisation d’Airbus. Nous étions alors dans l’attente des annonces que le président Gallois devait faire aujourd’hui à l’occasion du comité central européen d’EADS. Or, chacun le sait, ces annonces ont été reportées sine die.

Cette décision, vous vous en doutez, ne fait que renforcer l’anxiété des salariés d’Airbus et des entreprises sous-traitantes. Ce report est dû au refus des co-dirigeants allemands d’EADS d’entériner la répartition des fabrications et des compétences. Nos partenaires d’outre-Rhin, nous le sentons bien depuis quelques semaines, sont en train d’amener ce dossier industriel sur le terrain politique et diplomatique.

La France – ai-je besoin de le rappeler ? – est à l’origine de cette grande aventure aéronautique européenne. Le Président de la République le sait d’ailleurs mieux que quiconque.

Dans ce contexte difficile, il doit justement rencontrer vendredi la chancelière Angela Merkel. Ma question, monsieur le Premier ministre, est donc simple, directe et emplie de gravité : quelles initiatives le Président et le Gouvernement entendent-ils prendre pour sortir Airbus de cette impasse, tout en soutenant l'industrie française et en préservant les intérêts légitimes des sites et des salariés français qui veulent rester au sein de la famille Airbus ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

M. Thierry Breton, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Permettez-moi tout d’abord, monsieur le député, de rendre hommage à l’action des élus français qui, comme vous, sont directement concernés par le dossier Airbus.

M. Michel Dasseux. Mais encore ?

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Quels que soient, en particulier, les bancs sur lesquels vous siégez au sein de cet hémicycle, c’est avec beaucoup de courage que vous faites face aux responsabilités qui sont les vôtres en la matière, tout en sachant ne pas franchir certaines limites. Le Gouvernement, pour sa part, continuera, sur ce dossier comme sur beaucoup d’autres, à prendre également toutes ses responsabilités. (« À d’autres ! » sur quelques bancs du groupe socialiste.)

Le problème de l’A380 a été identifié depuis maintenant plusieurs mois, et il est désormais en passe d’être réglé. À la suite de ce problème, un plan a été élaboré : le fameux plan « Power 8 », auquel vous faites allusion. Tout le monde le sait depuis des mois et des mois, et ce n’est donc pas une surprise : ce plan, qui a été conçu dans la concertation tant en France que dans les autres pays européens grâce à l’action de Louis Gallois, est nécessaire et il devra être mis en œuvre. À cet égard, c’est le conseil d’administration, dont une réunion a eu lieu dimanche, qui, il faut le rappeler, prendra la décision et personne d’autre. Il est temps d’ailleurs de rappeler tout le monde à ses responsabilités, mais à ses seules responsabilités sur ce dossier.

Le conseil d’administration a décidé de repousser sa décision, ce qui peut être compréhensible compte tenu de la nature de ce plan, qui est un plan difficile, mais, je le répète, nécessaire. Il sera mis en œuvre, ainsi que l’a rappelé Louis Gallois au Premier ministre, dans l’équité, et cela sur tous les sites. C’est ce qui ressort d’ailleurs des conversations qu’ont pu avoir le Premier ministre et Mme Merkel, avec, pour seule ambition, de faire en sorte qu’Airbus redevienne très vite la première entreprise aéronautique mondiale. Toutes les compétences sont réunies pour y parvenir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

retraites agricoles

M. le président. La parole est à le M. Marc Le Fur, pour le groupe de l’ UMP.

M. Marc Le Fur. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche.

Monsieur le ministre, vous avez su être, dans vos responsabilités, le ministre des agriculteurs, mais également celui des anciens agriculteurs (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), car vous avez pris à bras-le-corps le dossier des retraites. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

En la matière, certains – je devrais plutôt dire « certaine » ! – en parlent (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et d’autres agissent !

Plusieurs députés UMP. Elle est où, Ségolène ?

M. Marc Le Fur. Il fallait agir, en effet. À cet égard, qu’a fait notre assemblée pour les deux millions d’anciens agriculteurs, ces personnes qui ont travaillé dur tout au long de leur existence ? (« Rien ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Elle a financé leur retraite complémentaire – car il fallait la financer ! – et obtenu la mensualisation des pensions – je rappelle qu’avant le 1er janvier 2004, les retraités étaient payés chaque trimestre, à terme échu. Un retraité de l’agriculture a ainsi pu me dire : « Désormais, nous sommes comme les autres ! »

M. Albert Facon. La question !

M. Marc Le Fur. Restait un dernier sujet, celui des « laissés-pour-compte », c’est-à-dire le problème des toutes petites retraites, celles que touchent en particulier les femmes, qui, souvent, n’ont pas toutes les années requises pour bénéficier d’une retraite à taux plein. Ce problème, nous l’avons abordé de front, mes collègues Daniel Garrigue, Yves Censi et moi-même, après avoir été mandatés par vous-même, monsieur le ministre, et par Pierre Méhaignerie, et nous avons progressé, avec les organisations agricoles.

En décembre dernier, l’Assemblée a décidé de voter 205 millions d’euros en faveur des anciens agriculteurs et des plus petites retraites. Cette décision, chacun le notera, s’est appliquée dès le début de l’année, puisque les versements au titre du mois de janvier sont intervenus au début de février.

M. Maxime Gremetz. C’est bien : vous répondez vous-même à la question !

M. Marc Le Fur. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dresser un état de ces versements et nous indiquer quels effets concrets ont eu ces mesures sur les plus petites retraites agricoles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche.

M. Dominique Bussereau, ministre de l’agriculture et de la pêche. Mesdames et messieurs les députés, c’est un sujet qui ne mérite pas de polémiques. En effet, si la majorité a excellemment travaillé en la matière, j’ai déjà eu l’occasion de souligner, objectivement, qu’un important travail avait été réalisé pendant la période précédente, et nous l’avions ensemble reconnu. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)

Ainsi que vous l’avez rappelé, monsieur Le Fur, la majorité a institué une retraite complémentaire obligatoire pour les agriculteurs en 2003, ce qui représente 1 000 euros par an pour plus de 435 000 retraités, et mensualisé les retraites, ce qui est une mesure de trésorerie importante pour des femmes et des hommes qui en ont bien besoin.

Avec la loi d’orientation agricole, nous avons également mis en place le nouveau système d’assurance vieillesse du parent au foyer, qui concerne 150 000 retraités et qui représente pour certains jusqu’à 1 300 euros supplémentaires par an.

Avec le président Méhaignerie, nous vous avions demandé ainsi qu’à MM. Garrigue et Yves Censi, de proposer des mesures en faveur des retraités. C’est sur elles que le Président de la République a pu s’appuyer. C’est ainsi que le 8 février, voilà donc quelques jours seulement, les bulletins de MSA qui sont parvenus dans les foyers ont pu afficher une forte revalorisation. Les bénéficiaires sont nombreux puisque 300 000 personnes sont concernées, pour un coût de 162 millions d’euros en 2007 et de 205 millions d’euros en 2008. Pour un chef d’exploitation, la mesure représente plus de 600 euros par an et, pour un conjoint collaborateur ou un aide familial, plus de 900 euros.

Les retraites agricoles ont toujours été dramatiquement faibles dans notre pays. Nous devons pourtant à toutes ces femmes et à tous ces hommes qui ont beaucoup travaillé pour la nation, solidarité, générosité et reconnaissance. C’est en ce sens que nous avons agi à leur égard. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

fonction publique et promotion sociale

M. le président. La parole est à M. Bruno Gilles, pour le groupe de l’ UMP.

M. Bruno Gilles. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le Ministre de la fonction publique.

Monsieur le ministre, la fonction publique a longtemps permis aux Français de toutes origines d'accéder à des carrières motivantes et variées, fournissant ainsi à l'État un très grand nombre de serviteurs compétents et motivés. Aujourd'hui, on s’interroge pourtant sur la capacité de l'administration à poursuivre dans cette voie.

Après le succès du PACTE, vous avez présenté la semaine dernière le projet « Parrainage pour la fonction publique » qui tend à aider les jeunes issus de milieux défavorisés à préparer les concours. Destinée à valoriser la voie des études, cette initiative vise aussi à montrer que l'administration reste la voie de promotion sociale qu'elle a été par le passé.

Monsieur le ministre, quelles sont les actions entreprises par le Gouvernement pour que la fonction publique représente la nation dans toutes ses composantes et que les jeunes issus de milieux défavorisés puissent bénéficier d'une véritable égalité des chances ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la fonction publique.

M. Christian Jacob, ministre de la fonction publique. Je sais, monsieur le député, combien vous êtes attaché à résoudre le problème que pose la situation actuelle. En effet, alors que toute une partie des jeunes intégrait traditionnellement la fonction publique, les jeunes rencontrent aujourd’hui des difficultés pour y parvenir puisque l’on compte à peu près 70 % de surdiplômés aux concours de catégorie C. Le résultat est qu’il faudrait, d’un côté, assurer à ces jeunes un salaire qui corresponde à leur niveau de compétences, et, de l’autre, trouver une solution pour ceux qui auraient pu intégrer la fonction publique et qui, dans ces conditions, ne peuvent plus y parvenir.

Pour résoudre cette dernière difficulté, nous avons institué le PACTE, qui est un équivalent de l’apprentissage dans la fonction publique. Aujourd’hui, 20 % des jeunes recrutés en catégorie C le sont par cette voie. Par ailleurs, nous mettons en place un système de parrainage : j’ai ainsi demandé la semaine dernière aux trente-cinq directeurs des écoles de service public de s’engager à parrainer mille jeunes issus de quartiers difficiles pour la préparation des concours de la fonction publique, afin d’assurer une carrière à ces jeunes.

Alors que depuis dix ans, aucun accord n’avait été signé dans la fonction publique, nous en avons conclu deux en moins d’un an, l’un sur le pouvoir d’achat, l’autre sur la formation, en même temps que nous recrutions des jeunes grâce au système d’apprentissage et mettions en place un parrainage pour les jeunes issus de quartiers difficiles. Notre majorité peut en être fière et elle n’a pas à se préoccuper de ceux qui glosent sur un tel résultat ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

EADS

M. le président. La parole est à M. Pierre Cohen, pour le groupe socialiste.

M. Pierre Cohen. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question ne s'adresse ni à M. le ministre délégué à l'industrie ni à M. Breton…

M. Michel Ferrand. Dites plutôt à qui elle s’adresse !

M. Pierre Cohen. …qui, depuis plusieurs semaines, au nom du Gouvernement, s'acharnent à ne pas répondre aux différentes questions qui leur sont posées sur l'avenir d'Airbus.

Le conseil d'administration d'EADS, prenant acte du désaccord entre les partenaires européens, a reporté sine die les annonces qui devaient être faites sur le fameux plan de restructuration « Puissance 8 », prévu depuis plusieurs mois.

Monsieur le Premier ministre, vous avez vous-même annoncé 10 000 suppressions d'emploi. Tout nous indique qu'il est dores et déjà envisagé de vendre des sites en France et en Allemagne.

Après les années de gouvernance catastrophiques de M. Forgeard, nous constatons chaque jour davantage qu'une logique financière l’a emporté dans la gestion de la crise d'Airbus. Cette logique se traduit par des compressions d’effectifs, ce qui, au delà au-delà des drames humains qu'elle provoque, nous privera de compétences et de savoir-faire. Elle vous conduit à brader des sites, ce qui affaiblira la capacité stratégique de l’entreprise en termes tant de connaissances que de production. Elle mise, enfin, sur le renforcement de la sous-traitance, avec des stratégies de délocalisation et une pression sur la productivité, ce qui aura des conséquences inévitables en matière de qualité et de pérennité.

Par sa réaction ce matin, M. Fillon, éminence grise de M. Sarkozy, confirme les options libérales de la future politique de ce dernier. Il a en effet annoncé que les politiques ne devaient pas intervenir dans ce dossier, ce que M. Breton vient de confirmer. C’est exactement ce que nous vous reprochons depuis le début de la crise.

Dans ce contexte difficile, nous vous demandons de faire face au désengagement des acteurs privés.

M. Jean-Marc Roubaud. La question !

M. Pierre Cohen. Avec les Allemands, nous devons symboliser la puissance publique européenne et œuvrer dans l'intérêt stratégique de notre industrie aéronautique, tout en soutenant les salariés et en veillant à préserver la pérennité de l'entreprise.

M. Jean-Michel Ferrand. Quelle est la question ?

M. Pierre Cohen. Monsieur le Premier ministre, qu'envisagez-vous de faire pour redonner du souffle à l'entreprise plutôt que d’y ajouter une crise à la crise ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Thierry Breton, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Monsieur le député, j’ai déjà apporté des éléments de réponse sur le sujet, mais je vais vous répondre à nouveau, car je sais que vous êtes directement concerné dans votre circonscription.

M. Paul Giacobbi. C’est la France qui est concernée !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. D’ailleurs, lorsque j’ai tout à l’heure rendu hommage à toutes celles et à tous ceux qui sont concernés, cet hommage s’adressait aussi à vous, monsieur Cohen, même si, en posant votre question, vous vous êtes quelque peu éloigné de la réalité.

Je le répète, Airbus a été confronté à un problème industriel et technique qu’il lui a fallu régler – et il est en passe de le faire. Cela, il faut le dire, car à s’exprimer comme vous le faites, on ne sert pas cette très belle entreprise.

Louis Gallois, nommé à la tête de l’entreprise par le conseil d’administration d’EADS – nomination dont s’est félicité le Gouvernement –, a travaillé pendant plusieurs mois à un plan qui a été abondamment discuté avec l’ensemble des parties prenantes.

M. Maxime Gremetz. Allons !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Je tiens d’ailleurs, devant la représentation nationale, à rendre hommage aux organisations syndicales, en particulier françaises, qui y ont été largement associées.

M. Maxime Gremetz. Mais non ! Elles ne savent rien !

M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Ce plan doit maintenant être mis en œuvre, monsieur Cohen, par le conseil d’administration et par personne d’autre. Ce conseil s’est réuni dimanche et il se réunira de nouveau dans les prochains jours. J’ai bon espoir qu’il accepte le plan proposé par Louis Gallois, car ce plan est équilibré, respectueux des salariés, des sites et des savoir-faire de l’entreprise.

Grâce à lui, Airbus pourra continuer d’être la très grande entreprise dont nous sommes, à juste titre, fiers ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

bilan de la politique culturelle

M. le président. La parole est à M. Alain Moyne-Bressand, pour le groupe de l’UMP.

M. Alain Moyne-Bressand. Monsieur le ministre de la culture et de la communication, à l'occasion de mes travaux et de mes déplacements liés à ma participation au groupe d'études de l'Assemblée sur le patrimoine, j'ai pu mesurer concrètement le désir de culture exprimé par nos concitoyens, quels que soient leur classe sociale et leur lieu de résidence. Et je veux rendre hommage, en mon nom et au nom de l'ensemble de mes collègues, au travail des hommes et des femmes, parfois bénévoles, toujours passionnés, pour maintenir nos lieux de mémoire et leur enracinement dans nos territoires.

Il y a maintenant trois ans, nous avons dû prendre conscience des enjeux liés à l'emploi des artistes et des techniciens.

Gérée dans sa globalité, la crise a eu le mérite de susciter en elle-même deux effets positifs : une mobilisation de l'ensemble de la représentation nationale autour des enjeux liés à l'apport du spectacle vivant et de la culture et une prise de conscience, grâce à vous, de la nécessité d’élargir la question et de dépasser la simple question du statut social. Concrètement, vous avez su nous mobiliser autour de la nécessité de générer de l'activité culturelle et de placer celle-ci au cœur de nos stratégies territoriales.

En tant que président du groupe d'études sur le patrimoine, je veux exprimer une double satisfaction au regard de notre action commune : d’une part, un engagement fort de l'État et de notre majorité, qui a su créer de nouvelles ressources pour le patrimoine monumental ; d’autre part, une nouvelle approche du patrimoine, qui ne s'inscrit plus dans la nostalgie.

À l'heure où notre pays s'est réconcilié avec les acteurs du monde culturel, à l'heure où nous retournons devant nos concitoyens, ma question sera double : comment pouvons-nous incarner ces acquis au bénéfice de nos concitoyens pour que la culture soit accessible à chacun ? Que peut représenter la culture du XXIe siècle pour notre nation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, comme vous, je suis fier et mobilisé. Notre pays est un grand pays, qui dispose d’un patrimoine et d’une capacité de création exceptionnels. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Nous sommes tous fiers, non seulement de votre chère cité médiévale de Crémieu, mais également de l’abbaye de Cluny, des cathédrales de France. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous sommes tous fiers d’accueillir le département des Arts de l’islam au Louvre.

Mesdames et messieurs les députés de l’UMP, ce sont vos décisions, votre courage, votre détermination, mais également les arbitrages du Premier ministre, Dominique de Villepin, qui ont rendu possible la relocalisation des tournages dans notre pays, à Versailles, au Louvre comme à Pierrefonds, ainsi que l’accueil de la création contemporaine, qu’il s’agisse de La force de l’art au Grand Palais ou du projet de Boulogne-Billancourt.

La France est riche de sa diversité. C’est cette majorité, ce Président de la République et ce Premier ministre qui ont permis la signature de la convention de l’UNESCO sur la diversité culturelle.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Très bien !

M. le ministre de la culture et de la communication. Mesdames et messieurs les députés, soyez fiers de la main que vous tendez à chacune et à chacun dans notre pays.

M. Philippe Briand. Oui !

M. le ministre de la culture et de la communication. Du plus précaire des artistes au monument le plus flamboyant de notre pays, nous considérons tous ensemble que la culture n’est pas marginale, mais qu’elle est synonyme et facteur d’attractivité.

M. Philippe Briand. Oui !

M. le ministre de la culture et de la communication. Pensez à ce milliard de téléspectateurs qui ont assisté en direct à un concert donné dans l’enceinte de la Cité interdite, en Chine.

Mesdames et messieurs les députés, jeudi, par votre vote, vous allez multiplier par trois l’offre gratuite de télévision pour 100 % des Français sur 100 % du territoire national. Le dire, ce n’est pas faire preuve d’autosatisfaction. (« Surtout pas ! » et rires sur les bancs du groupe socialiste.) C’est tout simplement montrer que la majorité présidentielle et la droite républicaine, décomplexées, ont tenté, j’ose le dire, une réconciliation en profondeur avec le monde de la culture, ce qui n’était pas facile et qui nous rend fiers. Merci. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

mesures en faveur
de l’hôtellerie-restauration

M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani, pour le groupe de l’UMP.

M. Thierry Mariani. Monsieur le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, c’est en tant que président du groupe d’études de l’Assemblée nationale sur les métiers de l’hôtellerie et de la restauration que je vous interpelle aujourd'hui. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Monsieur le ministre, notre majorité n’a pas été inactive en cinq ans. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Augustin Bonrepaux. Elle n’a rien fait !

M. Thierry Mariani. Depuis cinq ans, nous avons, avec mes collègues de l’UMP, voté deux dispositions : une réforme des fermetures administratives plus juste dans la loi présentée par Nicolas Sarkozy en 2003 et la mise en place d'un permis d'exploitation, réclamé par les organisations professionnelles, notamment l'Union des métiers et des industries de l’hôtellerie et son président, André Daguin. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Depuis cinq ans aussi, nous attendons le feu vert de l’Europe pour baisser enfin la TVA à 5,5 %.

M. Jacques Desallangre. Échec !

M. Thierry Mariani. Là aussi, les députés de la majorité ont agi. Suite à nos interpellations, à nos amendements, à nos longs débats dans l'hémicycle, Nicolas Sarkozy et Jean-Pierre Raffarin puis Renaud Dutreil et vous-même, monsieur Copé, avez mis en place des plans d'aide efficaces et sans précédents pour la profession.

M. Philippe Briand. Oui !

M. Augustin Bonrepaux. Sans résultat !

M. Thierry Mariani. Cela en attendant la baisse effective de la TVA.

M. Albert Facon. Jospin a obtenu les 5,5 % pour le bâtiment !

M. Thierry Mariani. Monsieur le ministre, vous le savez, les restaurateurs ne demandent pas l'aumône, ils veulent une TVA à 5,5 % sur une prestation non-délocalisable et créatrice de nombreux emplois.

Monsieur le ministre, bientôt, nous ne siégerons plus : pouvez-vous nous dire où en est ce dossier et nous rassurer sur votre détermination ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, le secteur de l’hôtellerie-restauration, voilà certainement l’un de ces grands secteurs économiques français à la fois créateurs d’investissements, de croissance et d’emplois sur lesquels nous nous sommes très fortement mobilisés les uns et les autres depuis 2002.

Mme Martine David. Résultat : zéro !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Il est vrai que cela était nécessaire, vous en avez fait la démonstration avec le groupe parlementaire que vous avez animé et qui a permis en particulier d’adopter un dispositif permettant une formation juridique spécifique pour les exploitants.

Mais il est également vrai que nous avons eu à cœur de préserver – et c’était tout l’intérêt du travail d’écoute qui a été mené – les 39 heures dans la profession après la décision du Conseil d’État – et je veux remercier ici la majorité parlementaire pour sa mobilisation.

Reste la question de la TVA (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), sujet important sur lequel nous sommes très mobilisés, ainsi que Thierry Breton a eu l’occasion de le rappeler à de nombreuses reprises à nos partenaires européens.

La prochaine étape, c’est juillet 2007. Un rapport doit être remis par la Commission européenne démontrant, comme nous l’avions souhaité, la forte intensité de travail de ce secteur et la justification pleine et entière de la baisse de la TVA.

D’ici là, les plans d’accompagnement auront été au rendez-vous, que ce soit celui de 2004 sur le SMIC hôtelier et la sixième semaine, ou celui qui vient d’être adopté à l’initiative de Jean-Louis Borloo et de Renaud Dutreil, qui baisse fortement les charges. Dans le même temps, la loi de finances a prévu un crédit d’impôt et un amortissement spécifique.

M. Christian Bataille. Bonimenteur !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Bref, c’est un secteur qui mobilise toute notre attention.

Mme Martine David et M. Jean-Jack Queyranne. Pour un résultat nul !

M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l’État. Il s’agit d’un des secteurs majeurs pour l’activité économique de notre pays. Notre méthode consiste à instaurer un dialogue permanent entre nous et la profession, bien loin de la vision rigide, pour ne pas dire psychorigide, qui aurait imposé les 35 heures à tout le monde. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous avons privilégié le dialogue avec une seule idée en tête : l’efficacité économique et la création d’emplois. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

chiffres du chômage

M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, pour le groupe socialiste.

M. Didier Migaud. Monsieur le Premier ministre, comme pour la croissance ou pour les impôts, la réalité en matière de chômage est loin de correspondre à ce qu'annoncent les membres de votre gouvernement.

M. Jacques Le Guen. Et qu’en pense M. Besson ? (Rires.)

M. Didier Migaud. Pour la croissance, pendant des mois, M. Breton a parlé d’un taux de 2,5 %. Le résultat vient de tomber : 2 % pour 2006, et la France se place au dixième rang des douze pays de la zone euro.

Plusieurs députés du groupe socialiste. Eh oui !

M. Didier Migaud. Pour les impôts, vous nous dites qu'ils baissent. Mais le taux des prélèvements obligatoires en 2006 est supérieur d'un point à celui de 2005, soit 18 milliards d’euros de prélèvements supplémentaires.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. La faute aux régions !

M. Jean-Pierre Soisson. Ça vous gêne, mesdames, messieurs les socialistes !

M. Didier Migaud. Et les bénéficiaires de votre politique fiscale se trouvent essentiellement au-delà de quatorze à quinze SMIC.

En matière de chômage, c'est la même chose.

Monsieur le Premier ministre, vous avez fait de la lutte pour l'emploi une grande cause nationale, et vous avez raison. Mais, là aussi, les résultats ne sont pas du tout à la hauteur du discours. Le nombre de radiations effectuées par l'ANPE a augmenté fortement. De plus en plus de personnes basculent sur le RMI : le nombre de celles-ci a explosé de 20 % depuis 2002 ! Le temps partiel augmente dans des proportions importantes et la précarité est de plus en plus la règle pour nombre de nos concitoyens qui sont sortis des statistiques officielles.

Plusieurs députés du groupe socialiste. Eh oui !

M. Lucien Degauchy. La précarité, c’est vous qui l’avez créée.

M. Didier Migaud. Selon l'Observatoire français de la conjoncture économique, dont l’autorité est peu contestable, le taux de chômage pour 2006 devrait être révisé à la hausse : près de 9 % au lieu des 8,6 % annoncés.

M. Jean-Marc Roubaud. La question !

M. Didier Migaud. Est-ce pour cette raison que l'INSEE a refusé la publication de ces chiffres ?

Nous avons demandé l'audition du directeur général de l'INSEE devant la commission des finances. Autoriserez-vous sa venue ? L'enquête emploi sera-t-elle publiée avant les élections présidentielle et législatives ?

Ce sont des questions simples, auxquelles j’attends des réponses simples. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le député, décidément, quand les choses ne vont pas dans votre sens, vous n’avez qu’une envie, c’est de casser les thermomètres. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Blazy. Nous voulons des réponses !

M. Augustin Bonrepaux. Répondez à la question !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Ce débat sur les chiffres de l’emploi et du chômage me paraît assez stupéfiant. Permettez-moi d’y revenir.

Depuis un an, il y a 235 000 chômeurs de moins. Depuis un an, il y a 250 000 cotisants de plus à la sécurité sociale.

M. Patrick Lemasle. C’est faux !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur Migaud, vous qui êtes un expert, vous avez sûrement noté qu’il y a quinze jours, l’UNEDIC indiquait qu’elle avait 200 000 cotisants de plus cette année, qu’à ce titre, elle baissait ses taux de cotisations de 0,08 %, et qu’elle avait un excédent de 350 millions, alors que vous nous aviez laissé l’UNEDIC avec des déficits. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Pierre Blazy. Répondez à la question !

M. Patrick Lemasle. Et le nombre de RMIstes ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Si l’UNEDIC a un excédent, c’est probablement qu’il y a davantage de cotisants.

Si, maintenant, nous regardons sur une période plus longue, allant de février 2005 à aujourd’hui, nous constatons qu’il y a 400 000 cotisants de plus à la sécurité sociale et 350 000 cotisants de plus à l’UNEDIC.

M. Augustin Bonrepaux. Et les RMIstes ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Quand d’un côté, il y a moins de chômage et, de l’autre côté, plus de cotisants, c’est probablement la preuve qu’une politique économique de croissance et de l’emploi est effectivement installée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

situation des personnes handicapées

M. le président. La parole est à M. Richard Mallié, pour le groupe de l’UMP.

M. Richard Mallié. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. (Plusieurs députés du groupe socialiste quittent l’hémicycle.)

Ne partez pas, mes chers collègues, ma question porte sur les handicapés, je pense que cela vous intéresse.

« Les cinq sens des handicapés sont touchés mais c'est un sixième sens qui les délivre

« Bien au-delà de la volonté, plus fort que tout, sans restriction

« Ce sixième sens qui apparaît, c'est simplement l'envie de vivre. »

Cette citation d'un jeune artiste contemporain, Grand Corps Malade, est criante de vérité.

Mais j'irai plus loin encore, en parlant d'envie de vivre « comme tout le monde ». Car ce n'est pas parce qu'on se déplace en fauteuil roulant que l'on n'a pas le droit de vivre comme tout le monde, et que l'on n'a pas une vraie plus value à apporter à la société.

Il faut pourtant le reconnaître, le quotidien des personnes handicapées reste semé d’embûches : difficulté à se déplacer ; difficulté à trouver un travail ; difficulté à exister, tout simplement. Notre société porte encore trop souvent un regard pesant sur le handicap.

Toutefois, comme l’a indiqué hier Bernard, l’un des invités au débat télévisé d’une grande chaîne nationale : « Si on arrive à faire en sorte que l’accessibilité soit accordée aux personnes handicapées, tout le monde pourra en profiter ».

M. Julien Dray. Pour une fois que regarder la télévision sert à quelque chose !

M. Richard Mallié. De nombreuses associations, comme Étincelle 2 000 dans ma circonscription, oeuvrent en ce sens par la mise en place d’une aide à la mobilité, ou encore un important travail sur l’accessibilité. Mais si ces structures remplissent formidablement leur mission, c’est d’abord et avant tout aux pouvoirs publics qu’il revient d’agir en la matière. Et cette nécessité, vous l’avez bien comprise, monsieur le ministre.

A l’heure où la Xllème législature s’achève, il me semble important de rappeler à nos concitoyens que le choix que nous avons fait en faveur du handicap est résolument celui de l’intégration, et non de la compassion. Et vous, vous avez fait le choix de l’action en coulisses. J’aimerais donc que vous dressiez les grandes lignes de la politique qui a été la vôtre en faveur du handicap, et que vous nous fassiez part des principaux chantiers en cours. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je regrette de constater que, dès qu’il s’agit de politique du handicap, la gauche déserte cette assemblée. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) C’était déjà le cas au moment du vote de cette grande loi de la République qu’est la loi du 11 février 2005 (De nombreux députés du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains se lèvent et quittent l’hémicycle en protestant. – Huées sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) sur l’égalité des droits et des chances, la citoyenneté et la participation des personnes handicapées. Cette loi, voulue par le Président de la République, est soutenue par l’ensemble des associations représentant les personnes handicapées de notre pays. Grâce à elle, chaque département a désormais sa maison des personnes handicapées, une prestation de compensation du handicap a été créée, les ressources des personnes que le handicap empêche de travailler ont été portées à 80 % du SMIC, un plan national pour l’emploi des personnes handicapées a été lancé, de même qu’un programme pour rendre accessibles tous les établissements recevant du public. En outre, un décret permettra de rendre l’ensemble des bureaux de vote et des isoloirs accessibles, pour que les personnes handicapées puissent prendre toute leur part à notre démocratie. (Brouhaha permanent.)

M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Toujours grâce à cette loi du 11 février 2005, contre laquelle la gauche a voté, nous avons réussi à porter à 160 000 le nombre d’enfants handicapés accueillis dans les établissements scolaires de la République, alors que ce nombre n’était que de 80 000, pas un de plus, lorsque Mme Royal était ministre de l’enseignement scolaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Zéro ! Minable !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Voilà ce que nous avons pu faire grâce au vote de cette grande loi de la République qui restera, j’en suis sûr, une référence en la matière, à l’instar des lois de Jules Ferry pour l’instruction publique. (Mmes et MM. les députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire se lèvent et applaudissent vivement.)

accès des PME à la commande publique

M. le président. La parole est à M. Jean Proriol, pour le groupe UMP.

M. Jean Proriol. Ma question s’adresse à Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur.

Madame la ministre, avec 2,6 millions d’entreprises employant quelque 8 millions de personnes, salariées ou non, les PME sont un atout majeur pour notre économie. Mais si la création de PME se porte bien en France – plus 30 % d’entreprises nouvelles créées depuis 2002 –, leur croissance reste en revanche un problème. Les performances françaises, comme européennes, ne sont pas satisfaisantes. De plus, dans un monde globalisé, les petites entreprises n’ont pas accès aux marchés dynamiques des pays émergents. Elles sont souvent trop fragiles pour obtenir les financements qui sont nécessaires à leur développement.

La plupart de nos partenaires étrangers, dont Les États-Unis avec le small business act, le Canada ou le Japon, ont mis en place des systèmes assurant un large accès des PME à la commande publique. Il est temps que nous nous dotions d’un dispositif équivalent en France et au niveau européen ! Pour cela, il faudrait d’abord lever une interdiction à l’OMC en obtenant, comme l’ont déjà fait les États-Unis ou le Japon, une dérogation à l’accord sur les marchés publics. Des initiatives ont été prises par notre assemblée pour vous soutenir dans cette démarche, madame la ministre, notamment avec l’adoption de la proposition de résolution de notre collègue Daniel Garrigue.

Le 12 février dernier, grâce à votre diplomatie active, vous avez obtenu que soit adoptée par les ministres des affaires étrangères réunis à Bruxelles une résolution affirmant le souhait de l’Union européenne d' « examiner tous les moyens susceptibles d’améliorer l’accès des PME aux marchés publics au sein de l’Union européenne et dans le reste du monde ».

Il semblerait que la Commission européenne soit réticente à tout dispositif favorisant cette ouverture. Pouvez-vous nous préciser la portée de cette résolution ? Madame la ministre, vous qui connaissez par cœur les États-Unis, pouvez-vous aider les PME françaises à profiter de la stratégie utilisée avec art et avec force par ce pays ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée au commerce extérieur.

Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Monsieur le député Proriol, je me réjouis que l’on parle des entreprises. Aujourd’hui, les petites et moyennes entreprises se trouvent dans une situation de concurrence inéquitable face à la commande publique. Cela n’est pas moi qui le dis, c’est l’Observatoire des marchés publics. Que l’on en juge plutôt en regardant les chiffres ! Aujourd’hui, si les PME sont à l’origine de la moitié de notre produit intérieur brut, elles n’ont accès qu’à 21 % des commandes publiques de l’État, et à 11 % seulement quand il s’agit de logiciels.

Il est vrai qu’avec l’aide de votre assemblée et du Parlement européen, nous avons marqué un but, mais nous n’avons certainement pas gagné le match pour autant. Nous avons mobilisé l’ensemble des États membres, ce qui a conduit à l’adoption de quatre résolutions lors du conseil des affaires générales. C’est un signal très fort donné à la Commission pour lui dire que l’on ne peut perpétuellement nager à contre-courant et imaginer convaincre les États-Unis, le Canada, la Corée ou Israël de renoncer à leurs privilèges si nous ne nous mettons pas à leur niveau.

M. Jacques Myard. Très juste !

Mme la ministre déléguée au commerce extérieur. Nous avons donc exigé trois choses de la Commission. Nous lui avons demandé de renforcer la position des PME face à la commande publique, de nous mettre en position au moins d’égalité dans le cadre de la négociation de l’accord sur les marchés publics à l’OMC et d’informer les États membres qu’il y va de l’avenir de toutes les entreprises européennes.

Nous défendons ainsi les intérêts des PME françaises et européennes. Surtout, nous ne contentons pas de dire que les PME contribuent à l’emploi et à l’innovation : nous essayons de leur donner les moyens de construire le socle de l’économie de la connaissance qui seule nous permettra, dans une économie mondialisée et maîtrisée, de triompher grâce à nos talents, nos compétences et nos technologies. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. René Dosière.)

PRÉSIDENCE DE M. RENÉ DOSIÈRE,
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

3

Droit au logement opposable

Suite de la discussion d’un projet de loi
adopté par le Sénat après déclaration d’urgence

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale (nos 3656, 3671).

Jeudi soir, l’Assemblée a commencé l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement n° 317 à l’article 2.

Rappel au règlement

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je demande la parole pour un rappel au règlement fondé sur l’article 58-1 du règlement de l’Assemblée.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le président, outre ce rappel au règlement, je désire interroger, au nom de mon groupe, M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement.

Tout à l’heure, lors de la séance des questions au Gouvernement, un ministre a cru devoir porter un jugement de valeur sur le fait que certains députés – je tiens à le rappeler ici – quittaient l’hémicycle au moment où il intervenait sur la question du handicap. À cette occasion, il a prétendu de manière inacceptable que, lorsqu’on abordait ce problème, les élus de gauche quittaient l’Assemblée.

Mme Martine David. La « désertaient » !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. « Désertaient » est en effet le mot juste.

Mes chers collègues, chacun a le droit d’exercer ici sa liberté de parole. Elle est respectable et représente même notre patrimoine commun. Mais, en l’occurrence, les propos tenus par le ministre Bas comportent une triple insulte et une triple injure.

Mme Martine David. C’est vrai !

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Oh !

M. Yves Bur. N’exagérons rien !

Mme Claude Greff. Disons que le mot était peut-être excessif !

M. Paul-Henri Cugnenc. Les sketchs de clowns sont terminés !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Oui, une insulte et une injure aux députés que nous sommes tous, élus de la nation et soumis, de ce fait, à certaines obligations. Une telle manière d’apprécier notre fonction et notre qualité est insultante lorsqu’elle émane d’un membre du Gouvernement.

Mme Claude Greff. L’incident est clos !

M. Yves Bur. Quand on est faible sur le fond, on l’est également sur la forme !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Peut-être pouvons-nous éclairer ces propos par le fait que M. Bas ignore ce qu’est un électeur.

M. Yves Bur. Pas de jugement de valeur !

M. Paul-Henri Cugnenc. Qui est le clown de service ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Mais nous tous, qui portons cette réalité, avons le sentiment qu’elle autorise une autre attitude que le mépris, et nous espérons bien que, le moment venu, des citoyens et des électeurs le lui rappelleront.

En deuxième lieu, il s’agit d’une insulte et d’une injure aux obligations que nous assumons dans cet hémicycle, que nous soyons députés ou membres du Gouvernement. Je rappelle qu’au moment où cette interpellation extrêmement désagréable a été lancée, des députés de la majorité, comme des membres du Gouvernement, avaient quitté l’hémicycle, comme certains députés de l’opposition. Le jugement de valeur qui a été formulé n’était cependant adressé qu’à ceux-ci, ce qui est encore moins acceptable de la part d’un ministre de la République.

M. Patrick Roy. Eh oui !

M. Paul-Henri Cugnenc. Quand on n’a rien à dire, mieux vaut se taire !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Enfin, le ministre Bas ignore la réalité de notre vie personnelle.

Mme Claude Greff. Et si nous parlions du droit au logement ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Imaginer notre situation personnelle et familiale vis-à-vis du handicap, simplement par le fait que, les uns et les autres, nous ne l’affichons pas sur notre front, procède manifestement d’une vraie méconnaissance de la réalité de chacun et du respect dû, en définitive, à cette situation.

Mme Martine David. Eh oui !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous l’affirmons, parce que, chers collègues de la majorité, si un membre d’un Gouvernement de gauche avait tenu ces propos, nous les aurions – je les aurais – considérés comme inacceptables. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Paul-Henri Cugnenc. Après le sketch comique, le ridicule !

Mme Claude Greff. Quel cinéma !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le président, nous demandons au ministre qui représente le Gouvernement d’exprimer son sentiment sur les propos qui ont été tenus par M. Bas. Nous souhaitons en effet que le Gouvernement ne reste pas dans l’hémicycle porteur d’une telle insulte à l’encontre de l’opposition.

En outre, si nous considérons que la réponse de M. le ministre ne nous satisfait pas, nous demanderons une suspension de séance, afin de rencontrer le président de l’Assemblée nationale, qui ne peut pas accepter que de tels propos soient tenus ici même.

J’ai essayé d’être le moins véhément et le moins passionné possible…

M. Michel Piron. C’est vrai !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. …pour exprimer notre indignation sincère et profonde. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Yves Bur. Nous ne sommes pas là pour connaître de sentiments, mais pour parler du droit au logement opposable !

M. le président. Monsieur Le Bouillonnec, je prends acte de votre rappel au règlement.

Nous allons maintenant passer à la discussion des amendements.

Mme Martine David. M. Le Bouillonnec a demandé une suspension de séance dans le cas où le Gouvernement ne répondrait pas !

M. le président. Ce n’est pas à des parlementaires aussi expérimentés que vous que je rappellerai que le ministre peut prendre la parole quand il la demande. Encore faut-il qu’il le fasse ! Il est en droit de ne parler que chaque fois qu’il l’estime nécessaire.

M. Pierre-Louis Fagniez et Mme Claude Greff. Très bien, monsieur le président !

M. le président. Nous allons en venir à la discussion des amendements, au cours de laquelle le ministre aura naturellement la possibilité de s’exprimer.

Mme Claude Greff. En effet. Il ne faudrait pas oublier le droit au logement !

M. le président. Vous avez la parole, monsieur Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le président, nous avons commencé le texte la semaine dernière et nous avons essayé de construire un débat législatif à la hauteur des enjeux du droit au logement – alors même que nous ne sommes pas d’accord avec bien des aspects du dispositif proposé – dans le respect du travail parlementaire et de l’action du Gouvernement.

M. Michel Piron. Continuons à les respecter !

Mme Annick Lepetit. Ce n’est pas nous qui avons cessé de le faire !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le président, puisque nous n’obtenons pas de réponse de M. Borloo, je vous demande une suspension de séance.

J’ai besoin de trois quarts d’heure pour que la vice-présidente de notre groupe puisse évoquer cette difficulté avec le président de l’Assemblée nationale. Nous ne voulons pas laisser passer de tels propos sans réagir.

M. Yves Bur. Cela devient ridicule !

Mme Chantal Bourragué. C’est du chantage !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je le répète : nous voulons construire ce débat jusqu’au bout, comme j’en avais exprimé le désir en défendant l’exception d’irrecevabilité, et comme Annick Lepetit l’avait fait en s’inscrivant dans le dispositif législatif.

Si nous n’obtenons pas du Gouvernement qu’il s’exprime sur cet incident, nous lui rappellerons en permanence la responsabilité qu’il doit assumer à l’égard du mandat des élus de la nation.

En attendant, je demande une suspension de séance de trois quarts d’heure. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Monsieur Le Bouillonnec, j’ai bien compris que vous souhaitiez réunir votre groupe et que vous aviez pour cela demandé une suspension de séance. Celle-ci est de droit.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures trente, est reprise à seize heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Rappel au règlement

Mme Annick Lepetit. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. Sur le fondement de quel article ?

Mme Annick Lepetit. L’article 58, alinéa 1, monsieur le président.

M. le président. Vous avez la parole, pour un rappel au règlement, madame Lepetit.

Mme Annick Lepetit. Lorsque nous avons débuté l’examen de ce texte, jeudi dernier, nos débats ont été sereins et constructifs, et le groupe socialiste souhaite qu’ils se poursuivent dans ce que j’appellerais ce climat de confiance, afin que nous puissions améliorer le contenu du texte. Malheureusement, comme les questions au Gouvernement viennent de le démontrer, cette préoccupation n’est pas partagée sur tous les bancs, certains membres de la majorité ayant manifestement la volonté d’en découdre. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Pas nous !

Mme Annick Lepetit. Par ailleurs, nous avons récemment appris que M. Yves Jego avait déposé un amendement remettant en cause l’article 55 de la loi SRU. Interrogé sur ce point lors des questions au Gouvernement, monsieur le ministre de l’emploi,vous n’avez pas répondu sur le fond. Je peux le comprendre, compte tenu du peu de temps dont députés et Gouvernement disposent pour s’exprimer dans ce cadre. Mais, pour que nous puissions travailler de façon constructive, il conviendrait que le Gouvernement nous dise, à ce stade du débat, quelles sont ses intentions concernant l’amendement de M. Jego. Vous connaissez notre position sur le sujet, et nous connaissons la vôtre. Mais de tels amendements suscitent notre inquiétude et nous souhaiterions que vous nous rassuriez.

M. le président. L’amendement auquel vous avez fait allusion viendra en discussion tout à l’heure, madame Lepetit, vraisemblablement dans la soirée. Plus les rappels au règlement seront nombreux, plus il sera examiné tardivement. Or j’ai cru comprendre que vous souhaitiez qu’il le soit rapidement. Je vous propose donc que nous en venions maintenant à la discussion des articles.

Discussion des articles (Suite)

Article 2 (suite)

M. le président. Sur l’article 2, je suis saisi de deux amendements, nos 317 et 376 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir l’amendement n° 317.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous souhaitons obtenir des réponses, monsieur le président. Nous ne resterons pas dans l’expectative, à trois jours de la fin des travaux de l’Assemblée, et nous réitérerons nos questions tant que le Gouvernement ne nous aura pas apporté de réponses claires et précises.

M. Jean-Louis Dumont. Très bien !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. La semaine dernière, nous avons entamé l’examen des amendements à l’alinéa 10 de l’article 2, article dont je rappelle qu’il concerne la procédure de médiation dans le cadre de la mise en œuvre du droit au logement opposable. Sur cet alinéa 10, qui précise les cas dans lesquels la commission de médiation peut être saisie sans délai, nous avions déposé un amendement visant à supprimer la condition de bonne foi. Cet amendement a été rejeté, mais nous persistons à penser que, si cet élément peut être pris en compte pour la saisine prioritaire de la commission, il ne doit pas être une condition pour saisir la commission.

Notre amendement n° 317 vise, après les mots : « insalubre et dangereux », à rédiger ainsi la fin de l’alinéa 10 : « Elle peut également être saisie sans condition de délai lorsque le demandeur a au moins un enfant à charge, lorsqu’il est logé dans des locaux manifestement suroccupés ou ne présentant pas le caractère d’un logement décent. Elle peut être saisie dans les mêmes conditions lorsque vit sous le toit du demandeur un ascendant bénéficiaire de l’assurance vieillesse, toute personne majeure âgée de moins de vingt et un ans, ou de moins de vingt-cinq ans lorsqu’elle poursuit ses études ou, quel que soit son âge, lorsqu’elle est atteinte d’une infirmité, d’une maladie entraînant une invalidité ou une incapacité de travail, présentant un handicap physique ou mental ou une perte d’autonomie d’une particulière gravité ».

La rédaction de cet amendement s’inspire en réalité des articles 196 et 196 A bis du code général des impôts pour les personnes reconnues à charge et de l’article 6-3 du même code pour les personnes rattachées au foyer fiscal. Elle vise également à inclure les ayants droit vivant avec le demandeur tels qu’ils sont définis par le code de la sécurité sociale pour le bénéfice des prestations.

L’objectif de cet amendement est de définir le plus parfaitement possible les modalités selon lesquelles la commission peut être saisie sans délai.

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, pour soutenir l’amendement n° 376 rectifié.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Cet amendement a été élaboré à partir d’un amendement présenté par M. Bignon et après un long débat avec Mme la rapporteure, dont vous connaissez l’engagement sur les sujets qui touchent au handicap. Il s’agit en effet de tenir compte, dans certaines conditions, du handicap dans la définition de la liste des catégories de demandeurs prioritaires. L’amendement n° 376 rectifié tend, après les mots « ou dangereux », à rédiger ainsi la fin de l’alinéa 10 de l’article 2 : « Elle peut également être saisie sans condition de délai, lorsque le demandeur est logé dans des locaux manifestement suroccupés ou ne présentant pas le caractère d’un logement décent, s’il a au moins un enfant mineur, ou s’il présente un handicap au sens de l’article L. 114 du code de l’action sociale et des familles, ou s’il a au moins une personne à charge présentant un tel handicap. »

M. Bignon et Mme la rapporteure souhaitaient qu’un dispositif de ce type soit introduit dans le texte. Cet amendement est aussi une façon pour nous de tendre la main au groupe socialiste sur le sujet qui est à l’origine de sa demande de suspension de séance.

Enfin, je tiens à préciser, pour éviter tout malentendu, que la position du Gouvernement n’a pas changé sur la question évoquée par Mme Lepetit. J’ai eu l’occasion de dire tout à l’heure que l’amendement de M. Jego n’est qu’un amendement d’appel, qui vise à rappeler l’importance de l’accession sociale à la propriété, et qu’il entend le retirer après s’être exprimé.

M. le président. Vous êtes donc défavorable à l’amendement n° 317, monsieur le ministre ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Tout à fait.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Mme Christine Boutin, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. La commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 317, même si nous sommes sensibles à la préoccupation de M. le Bouillonnec. Ce n’est pas par principe que nous avons rejeté son amendement, mais parce que son champ d’application immédiat nous a semblé si large qu’il risquerait de mettre en péril la création d’un droit au logement opposable effectif, que nous voulons tous.

Quant à l’amendement n° 376 rectifié du Gouvernement, il n’a pas été examiné par la commission, mais nous y sommes naturellement favorables. Je vous remercie, monsieur le ministre, d’avoir pris en considération le handicap, en reprenant une proposition de M. Bignon. Pour ma part, j’avais renoncé à faire une proposition de ce genre, craignant les fourches caudines de l’article 40.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.

M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Il me semble indispensable qu’un texte de cette importance soit applicable. Il s’agit d’une première étape et, une fois que ce droit sera entré dans la pratique, nous pourrons élargir son champ d’application afin que tous ceux qui doivent en bénéficier puissent y avoir accès.

L’amendement que j’avais déposé, et dont j’avais débattu avec Mme Boutin, avait pour objectif d’envoyer un signal au monde du handicap. Il s’agissait de montrer que l’on ne légifère pas pour le handicap, d’un côté, et pour le logement, de l’autre, mais que l’on peut aussi légiférer pour les handicapés et leur logement. Le Gouvernement l’a bien compris et je le remercie d’avoir pris en compte cette proposition, qui me paraît fidèle à l’esprit du texte et qui contribue à sa mise en application progressive.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Comme beaucoup d’autres, j’ai déposé un amendement concernant l’accessibilité du logement. Je tiens à préciser à cet égard qu’il convient de parler, non pas de personnes handicapées, notion trop vague et générale, mais de personnes à mobilité réduite, qu’elles souffrent de cécité ou qu’elles soient obligées de se déplacer en fauteuil roulant par exemple. Je propose donc un sous-amendement à l’amendement du Gouvernement, afin de bien préciser ce point.

Les personnes à mobilité réduite doivent elles aussi être prioritaires pour la saisine de la commission de médiation – que leurs difficultés proviennent d’un handicap ou simplement de leur âge. Il convient en effet de ne pas négliger cette nouvelle donnée que constitue le vieillissement de la population. Notre société compte de plus en plus de personnes âgées, contraintes, lorsque leur mobilité se trouve réduite, de quitter un logement qui leur est devenu inaccessible. Une personne qui en a les moyens peut se payer un logement aménagé dans un immeuble disposant d’un ascenseur et respectant toutes les normes d’accessibilité, mais lorsqu’on cumule difficultés financières et difficultés physiques à se déplacer, il n’y a aucune solution si le parc social ne comporte pas assez de logements accessibles.

Dans le cadre des opérations de rénovation urbaine conduites par l’ANRU, on a démoli des immeubles qui disposaient d’ascenseurs et parfois de logements accessibles – cela a été le cas dans ma circonscription du Havre – pour les remplacer par de petits bâtiments de trois étages, hélas sans ascenseur. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Nous regrettons vivement de n’avoir pu obtenir que tous les logements ainsi reconstruits soient accessibles. Mesure-t-on bien les problèmes concrets qui peuvent résulter de la non-accessibilité d’un logement ? A-t-on pensé à la famille que la naissance d’un enfant handicapé peut contraindre à déménager et à quitter donc les voisins, les amis, tout le réseau de soutien dont elle dispose sur place ? A-t-on songé à la personne âgée qui habite depuis des décennies un logement dans lequel elle souhaiterait rester, mais qu’elle va devoir quitter parce qu’avec les années, sa mobilité s’est réduite ?

Ces deux exemples m’amènent à affirmer, monsieur le ministre, que tous les logements – je dis bien tous – devraient être accessibles de façon à ce que les personnes à mobilité réduite ne subissent pas une « double peine » résultant de l’obligation de déménager.

Mme Claude Greff. Il faudrait que tous les logements fassent 200 mètres carrés ? C’est ingérable !

M. Daniel Paul. Nous n’avons malheureusement pas obtenu d’engagement du Gouvernement sur ce point lors de l’examen, il y a quelques mois, de la loi sur le handicap. Aujourd’hui, je suis disposé à retirer l’amendement que j’ai moi-même déposé sur l’accessibilité du logement si le Gouvernement accepte mon sous-amendement et si vous vous engagez, monsieur le ministre, à ce que l’ANRU modifie sa politique dans ce domaine. À défaut, les dizaines de milliers de logements que vous avez fait construire seront toujours aussi inaccessibles dans vingt ou trente ans.

M. Lilian Zanchi et M. Frédéric Dutoit. Très juste !

M. le président. Il conviendra que vous fassiez parvenir votre sous-amendement à la présidence, monsieur Paul.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je ne doute pas un instant que les rapporteurs de ce texte soient animés d’une volonté extrêmement constructive à l’égard de ceux qui se trouvent dans une situation de nécessité en matière de logement. Cela étant, les aspects très techniques de ce débat ne doivent pas nous faire oublier de quoi il est réellement question. Ainsi, je regrette l’avis défavorable donné à l’amendement n° 317 : si l’amendement du Gouvernement représente une avancée, il a tout de même pour conséquence pratique d’instaurer une espèce de « tri sélectif » préalable en interdisant à des personnes qui, sans être handicapées à vie, peuvent connaître de graves difficultés, de saisir la commission de médiation.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Mais si, elles le peuvent !

M. François Brottes. Il ne s’agit pas d’instaurer un droit automatique à pouvoir bénéficier d’un logement d’urgence, mais simplement d’élargir le champ de ceux qui peuvent faire appel à la commission. Je pense notamment aux personnes dont la mobilité diminue en raison de leur âge ou ne se trouve altérée que de façon ponctuelle – car il est évidemment exclu, pour ces dernières, de rester à l’hôpital durant toute la période où leur mobilité se trouvera réduite.

Je le répète, le traitement de l’urgence ne doit pas débuter par une opération de tri préalable. La rédaction de notre amendement me paraissait constituer un compromis acceptable en retenant des critères assez larges, mais dans le cadre de limites bien définies.

M. le président. Je rappelle qu’en plus des orateurs ayant présenté un amendement, seuls deux autres orateurs peuvent prendre la parole sur cet amendement, pour répondre soit à la commission, soit au Gouvernement. Compte tenu du nombre d’amendements dont nous aurons à débattre, je souhaite que nous nous en tenions à cette règle. À défaut, nous risquons de prolonger nos débats indéfiniment.

À titre tout à fait exceptionnel, et en attendant que le texte du sous-amendement de M. Paul soit communiqué à notre assemblée, je vous donne la parole, monsieur Dumont.

M. Jean-Louis Dumont. Monsieur le ministre, les élus socialistes ont pris acte avec satisfaction de vos propos à la suite des rappels au règlement qui ont été faits par nos collègues. Nous souhaitions être rassurés sur le fait que le dérapage qui s’est produit tout à l’heure n’était pas le fruit d’une volonté politique collective, mais le fait d’une seule personne.

Pour en revenir au texte dont nous débattons, nous regrettons que l’amendement n° 317 ait été écarté, fût-ce au profit de l’amendement n° 376 rectifié du Gouvernement. Le terme « handicap », qui renvoie à des notions de taux de handicap, de reconnaissance par la COTOREP, et caetera, est en effet plus restrictif que l’expression « mobilité réduite » qui, comme viennent de le démontrer nos collègues, peut désigner des situations très variées – aussi bien celle d’une personne âgée ayant des difficultés à se déplacer que celle d’une personne souffrant d’une surcharge pondérale.

Les commissions d’attribution de logements se réfèrent à des critères très strictement définis dont il n’est pas question de sortir, sous peine d’avoir affaire à votre « police du logement ». Il faut bien mesurer quelles seront les implications pratiques, sur le terrain, du texte que nous allons voter.

Comme chacun le sait, on manque de logements adaptés aux personnes à mobilité réduite et il faudra du temps pour construire tous ceux qui seraient nécessaires, étant donné les contraintes de la réglementation des marchés publics et les difficultés rencontrées lors des appels d’offres. Pour ne pas rendre l’application de ce texte encore plus difficile, veillons à ce qu’il soit parfaitement lisible et aisément applicable sur l’ensemble du territoire, et à ce que les moyens nécessaires suivent pour impulser cette nouvelle politique de solidarité.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Deux types de questions se posent à nous. Pour ce qui est de l’aspect pratique, il me semble que nous devrions tous nous féliciter de la requalification massive de quartiers en difficulté conduite par l’ANRU. J’ai entendu M. Paul regretter que l’on ait construit des immeubles de trois étages, mais il suffirait de faire preuve d’un peu de bon sens et de réserver, dans ces immeubles, les logements du rez-de-chaussée aux personnes à mobilité réduite pour que le problème soit réglé ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

En ce qui concerne les principes, cinq publics prioritaires en raison de l’urgence de leur situation ont été retenus, auxquels va s’ajouter une sixième catégorie, celle des personnes confrontées à un handicap. L’idéal serait, évidemment, de pouvoir élargir encore le champ de ces priorités. Mais dans la mesure où nous manquons de logements…

Plusieurs députés du groupe socialiste. Ah !

M. Michel Piron. Personne n’a jamais songé à le nier ! Et on ne va pas rouvrir le débat sur les causes de ce manque de logements… 

Plusieurs députés du groupe socialiste. Pourquoi pas ?

M. Michel Piron…. et sur la situation dont nous avons héritée en la matière !

Il faut être réaliste : lorsque tout est prioritaire, il n’y a plus de priorités ! Nous avons fixé des priorités parce que nous sommes à la fois responsables et solidaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Le sous-amendement n° 379 de M. Paul est ainsi rédigé :

« Après les mots : « enfant mineur », rédiger ainsi la fin de l’alinéa 2 de l’amendement n° 376 rectifié du Gouvernement : « ou s’il est atteint de mobilité réduite au sens de l’article L. 114 du code de l’action sociale et des familles, ou s’il a au moins une personne à charge présentant une telle difficulté. »

Quel est l'avis du Gouvernement sur ce sous-amendement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Le Gouvernement est défavorable à ce sous-amendement. En effet, la définition légale du handicap inclut la mobilité réduite et, dieu merci, s’étend au handicap sensoriel et mental. Notre rédaction est donc plus large et plus complète. Monsieur Paul, votre préoccupation est pleinement satisfaite. Votre sous-amendement était du reste inutile car l’amendement n° 295 de M. Braouezec avait déjà le même objet.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Même avis que le Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Monsieur le ministre, madame la rapporteure, je m’attendais à cette réponse. En choisissant l’acception la plus large, vous vous donnez en fait les moyens de ne pas appliquer la mesure. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme Christine Boutin, rapporteure. Ce n’est vraiment pas bien de dire cela !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Ce n’est pas correct, monsieur Paul !

M. Daniel Paul. J’ai le souci de l’efficacité pour les milliers de familles qui ne trouvent pas de logements accessibles, alors qu’elles ont chez elles une personne en fauteuil roulant ou dont la mobilité est si réduite qu’elle ne peut quasiment plus sortir. Un logement accessible est nécessairement plus vaste qu’un appartement ordinaire. Je le sais pour avoir habité pendant des années un logement réputé accessible. Or, si vous ouvrez le dispositif à tous les handicaps, des demandeurs dont le handicap n’implique pas une mobilité réduite risquent de s’engouffrer dans la brèche. Mon sous-amendement vise précisément à réduire le champ de la demande afin qu’en attendant le jour où tous les logements seront accessibles – nous en sommes loin ! –, la mesure que nous prenons soit réservée aux personnes à mobilité réduite ou victimes de cécité.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Notre amendement n° 306, qui est d’ailleurs identique à l’amendement n° 34 de M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, prévoit que lorsque le demandeur est une personne en situation de handicap ou appartenant à une famille ayant à sa charge une personne en situation de handicap, il appartient à la catégorie particulièrement prioritaire.

M. le président. Monsieur Le Bouillonnec, si l’amendement n° 376 rectifié du Gouvernement est adopté, ces amendements n’auront plus d’objet.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est bien pour cela que j’ai demandé la parole, monsieur le président. L’amendement n° 306 est en quelque sorte un amendement de repli par rapport à l’amendement n° 317 qui inclut aussi dans le dispositif les personnes bénéficiant de l’assurance vieillesse. Il est très intéressant à ce titre. Le dispositif doit-il être le plus large possible ? Non, bien entendu. Mais il faut veiller à ce qu’il profite à ceux dont il importe de répondre immédiatement à la demande de logement d’urgence. Je rappelle qu’il s’agit ici de déterminer les cas prioritaires où la commission peut être saisie sans condition de délai. N’oublions pas notre intention initiale !

Prévoir que les allocataires de l’assurance vieillesse peuvent être reconnues comme prioritaires ne me paraît pas un crime. Avec l’amendement n° 317, il s’agit également de viser les personnes atteintes d’une infirmité, d’une maladie entraînant une invalidité ou une incapacité de travail, présentant un handicap physique ou mental ou une perte d’autonomie d’une particulière gravité. Mes chers collègues, je pense que nous considérons tous que ces situations relèvent de la priorité. J’insiste donc sur l’intérêt de l’amendement n° 317. En outre, je déplore le sort qui sera réservé aux amendements nos 34 et 306 car la formulation « personne en situation de handicap » est aujourd’hui familièrement utilisée, même par les ministres avec lesquels on se fâche.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Monsieur Paul, je connais votre engagement s’agissant du handicap et des personnes à mobilité réduite. Je ne mettrai donc pas en doute la sincérité de vos propos. Mais je vous demande en retour de ne pas mettre en doute ma propre volonté. Il est de l’intérêt de tous que nous parvenions à nous mettre d’accord sur la mise en place de ce droit au logement opposable. Je soutiens l’amendement du Gouvernement car son champ d’application est plus large que celui de votre sous-amendement. La préoccupation qui vous anime depuis fort longtemps sera ainsi satisfaite. Il est injuste de nous accuser de prendre cette position pour ne pas avoir à appliquer la mesure. Ce n’est pas correct de votre part. Je vous le dis, monsieur Paul, avec tout le respect que je vous dois.

Plus concrètement, le texte distingue deux catégories de personnes : celles qui pourront saisir tout de suite la commission de médiation et celles qui le feront avec délai. L’application de la loi par étapes garantira précisément sa réussite. Je remercie donc le Gouvernement d’avoir, par son amendement, répondu à ma préoccupation, qui était la même que la vôtre, monsieur Paul. Ceux qui ne seront pas satisfaits pourront toujours saisir la commission de médiation. En tout cas, et je vous le demande en toute cordialité : ne mettez pas en doute ma volonté de voir cette loi appliquée dans les meilleurs délais.

M. Michel Piron. Très bien !

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Madame la rapporteure, j’aurais souhaité que vous répondiez à mes remarques. Nous ne pouvons pas nous substituer à la commission. Nous faisons la loi et nous mettons en place un cadre visant à définir qui est éligible à la demande de gestion de l’urgence en matière de logement. Certes, notre amendement tend à élargir le champ initial du texte. Mais il appartiendra à la commission de médiation d’établir les priorités. On peut entendre que la commission doive procéder par étapes. En revanche, le législateur qui fait œuvre législative sur un texte dit fondamental – pourquoi pas d’ailleurs, relevons-en le défi ! –, n’a pas à faire de sélection à l’entrée. Chacun doit faire son travail. Ainsi, la commission établira des critères à partir d’une liste, certes un peu large. Mais qui contestera que des personnes à mobilité réduite ou des personnes âgées en situation de dépendance évolutive ne bénéficient pas d’un traitement d’urgence ? Même pas vous, madame la rapporteure ! Ne faisons pas ici ce travail par étapes qui revient à la commission. La loi doit fixer un cadre qui doit être juste pour ceux qui pourraient être concernés. En l’occurrence, le texte en oublie trop. C’est la raison pour laquelle je souhaite avoir votre sentiment – généreux, j’imagine – sur notre amendement n° 317.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Monsieur le ministre, madame la rapporteure, je suis satisfait que la notion de handicap soit intégrée dans ce texte.

M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. C’est une bonne nouvelle !

M. Daniel Paul. Je ne vous ai pas attendu pour évoquer ici ces questions, mon cher collègue !

Avec mon sous-amendement, je souhaitais simplement introduire une précision dans le texte afin d’endiguer le flot des demandes que vous aurez du mal à retenir. Je voterai l’amendement du Gouvernement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n°317.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 379.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 376 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 34, 306, 231, 295 tombent.

Je suis saisi de quatre amendements, nos 35 rectifié, 232, 113 rectifié et 202 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour soutenir l’amendement n° 35 rectifié.

M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Je laisse le soin à M. Le Bouillonnec de présenter cet amendement du groupe socialiste qui a été repris par la commission des affaires économiques.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous avons communément soulevé dans les différentes commissions le problème de la complexité des démarches pour les demandeurs. Il faut d’abord engager et formuler la demande auprès de la commission. Puis, en cas de rejet du caractère prioritaire, il faut saisir la juridiction administrative.

Les auditions auxquelles nous avons tous procédé ont fait apparaître la pertinence du rôle des associations en la matière. Elles pourront aider les demandeurs à constituer leur dossier et à saisir la commission, puis, éventuellement, à exercer un recours. Notre amendement n° 35 vise donc à ce que le demandeur puisse être assisté par une association dont l’un des objets est l’insertion ou le logement des personnes défavorisées ou par une association de défense des personnes en situation d’exclusion et agréée par le représentant de l’État dans le département. 

Je précise que la définition des associations habilitées à intervenir s’inspire de celle figurant dans la loi ENL, votée en juillet 2006.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Cet amendement, qui a déjà été débattu au Sénat, répond à une forte préoccupation des associations. Il tend à ouvrir aux associations de défense des personnes en situation d’exclusion la possibilité d’assister les demandeurs de logement, dans la phase de médiation comme dans la phase juridictionnelle. Il clarifie ainsi le droit applicable en la matière et, de ce point de vue, mérite d’être salué.

Néanmoins, la représentation des demandeurs par des associations agréées poserait problème car elle priverait la commission de médiation de contact direct avec le demandeur. Or ce contact est fondamental pour la commission de médiation qui doit fonder son appréciation.

Quoi qu’il en soit, la commission a accepté l’amendement n° 35 rectifié de la commission des affaires économiques et rejeté les trois autres amendements.

M. le président. Que l’adoption de l’amendement n° 35 rectifié fera tomber !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le président, nous ne disposons pas de l’amendement n° 35 rectifié !

M. le président. Vous venez de défendre le 35 !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. J’ai défendu l’amendement n° 35 de Mme Lepetit, adopté par la commission des affaires économiques, cosigné par son rapporteur et dont l’adoption ferait tomber mon amendement n° 232.

M. le président. J’ai annoncé que cet amendement avait été accepté par la commission. Mme Lepetit étant momentanément absente de l’hémicycle, c’est vous qui l’avez défendu. La différence entre l’amendement n° 35 et sa version rectifiée est purement formelle. Sur le fond, vous avez donc satisfaction. Son adoption, c’est vrai, ferait tomber l’amendement n° 232.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l’amendement n° 35 rectifié ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. La différence, en effet, est rédactionnelle : dans l’amendement n° 35 rectifié a été ajouté le fait que, en conséquence, au début de l’alinéa 11 , le pronom « elle » devait être remplacé par « la commission ».

Quoi qu’il en soit, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée.

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement n° 113 rectifié.

M. Francis Vercamer. On ne peut pas prôner le droit opposable au logement tout en refusant une assistance compétente à ceux qui, le plus souvent, sont en grande difficulté. Certains demandeurs auront du mal à se défendre seuls devant la commission. Je propose donc que les associations puissent les assister et les représenter pour exercer le recours.

Rappel au règlement

M. François Brottes. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour un rappel au règlement.

M. François Brottes. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 58 alinéa 1.

Monsieur le président, nous ne pouvons débattre d’amendements dont nous n’avons pas connaissance. Faites en sorte que nous disposions des amendements que nous examinons. M. le ministre a eu la courtoisie de nous expliquer la différence entre les amendements nos 35 et 35 rectifié, mais reconnaissez que le débat se déroule dans de mauvaises conditions.

M. le président. Monsieur Brottes, j’ai donné la parole à M. Le Bouillonnec pour qu’il défende l’amendement n° 35 rectifié, ce qu’il a fait dans un premier temps sans contester. Je vous répète que la modification en cause est de pure forme. Sans doute aurait-il été préférable que l’amendement rectifié soit distribué, mais il ne s’agit que d’une simple erreur technique qui ne remet pas en cause le fond de la discussion.

Reprise de la discussion

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l’amendement n° 202 rectifié.

Mme Martine Billard. Cet amendement tend à autoriser les associations à assister les demandeurs, mais aussi à les représenter pour exercer le recours. Mme la rapporteure nous oppose que cela empêcherait tout contact direct entre le demandeur et la commission. Pourtant, la loi doit tenir compte du cas des demandeurs qui ont des difficultés pour se déplacer et doivent donc être représentés. Les conditions précises de cette représentation pourraient faire l’objet d’un décret. Si nous ne le prévoyons pas dans la loi, un certain nombre de demandeurs ne seront pas défendus devant la commission, faute de pouvoir être présents.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 113 rectifié et 202 rectifié ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Comme je l’ai déjà indiqué, les amendements nos 232, 113 rectifié et 202 rectifié ont été repoussés par la commission. J’ai déjà souligné pourquoi la représentation posait problème.

M. le président. Le Gouvernement ne peut qu’être défavorable à ces amendements puisqu’il a accepté le 35 rectifié.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Je veux néanmoins apporter une précision.

L’accompagnement des personnes se justifie, mais la notion de représentation est dangereuse, car elle engagerait la responsabilité juridique de l’association. De grâce, ne touchons pas à la relation directe entre demandeur et commission de médiation. Lorsqu’elle aura à traiter de cas particuliers, la commission, dans sa sagesse, trouvera le moyen adapté pour que chacun puisse être entendu.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 35 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 232, 113 rectifié et 202 rectifié tombent.

J’en viens donc à deux amendements identiques, nos 4 et 233.

La parole est à M. François Brottes, pour soutenir l’amendement n° 233.

M. François Brottes. Monsieur le président, pour la bonne organisation de nos débats, à laquelle nous sommes tous attachés, il nous faut reporter dans ces amendements la modification qui vient d’avoir lieu, et donc remplacer le pronom « elle » par « la commission ».

M. le président. Tout à fait ! Ces amendements deviennent donc les amendements nos 4 rectifié et 233 rectifié.

Je vous indique, mes chers collègues, qu’entre la clôture du Congrès, hier, et aujourd’hui, quarante-quatre rectifications d’amendement ont été déposées ; ces légères confusions sont donc excusables.

Mme Annick Lepetit. Dans ce cas, ne soyez pas procédurier avec nous !

M. le président. Madame, nous parlons d’un amendement socialiste qui a été accepté par la commission : cela devrait vous faire plaisir !

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement n° 4.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Monsieur le président, la précision apportée par l’amendement n° 4 n’est pas simplement de pure forme : en insérant l’adverbe « notamment » après les mots « La commission reçoit », on étend les sources possibles d’information des commissions de médiation lors de l’examen des demandes de logements sociaux. Si nous adoptons cet amendement, initialement proposé par M. Le Bouillonnec, elles pourront faire appel non seulement aux bailleurs sociaux, mais aussi aux associations d’assistance aux demandeurs, pour obtenir des éléments relatifs aux demandeurs et connaître leurs motivations dans le cas d’absence de proposition.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Mme Boutin ne répond pas aux questions qu’on lui pose, mais elle est très claire quand on ne lui en pose pas !

M. Michel Piron. C’est élégant !

M. François Brottes. En l’occurrence, nous sommes parfaitement d’accord sur le fond et sur l’importance du mot « notamment ». Je la remercie d’avoir apporté cet indispensable éclairage !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Je comprends que l’on veuille diversifier les sources d’information sur la qualité du demandeur, mais le mot « notamment » vaudra aussi pour la deuxième partie de la phrase. Or là, il ne convient pas.

En commission, j’avais émis des réserves sur ce point et le groupe socialiste avait décidé de proposer une autre rédaction. Comment la commission pourrait-elle recevoir « notamment » les motifs invoqués pour expliquer l’absence de proposition que seul le bailleur peut justifier ?

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 4 rectifié et 233 rectifié.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour défendre l’amendement n° 234.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Cet amendement vise à préciser que la commission de médiation est informée par l’ANRU ou son délégataire local des logements loués, dans le cadre d’une convention, sur le territoire du département ou de la délégation de compétence. Il s’agit de diversifier le plus possible les éléments d’information portés à la connaissance de la commission, afin qu’elle soit parfaitement en mesure de répondre à la demande.

S’agissant de l’ANRU, nos critiques portent non pas sur son rôle de rénovation urbaine, mais sur son instrumentalisation. Elle devrait, selon certains, permettre d’augmenter l’offre de logement. C’est plus qu’une nuance ! Savez-vous que les opérations de démolition engagées dans le cadre de l’ANRU ne sont pas entièrement couvertes par des offres ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. C’est faux !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ce n’est pas contestable, monsieur le ministre !

Les données actuelles montrent qu’il n’y a pas une démolition pour une offre nouvelle de logement, mais que le taux de couverture s’établit à 0,6 pour l’année 2006, et que l’on devrait passer à 0,8. Il est d’ailleurs logique qu’un décalage se produise entre démolition et reconstruction.

Ce que nous contestons, c’est l’assimilation entre renouvellement urbain et offre nouvelle de logements, qui sont deux choses différentes. Si nous demandons que l’ANRU informe la commission de médiation de la réalité des logements loués dans le cadre d’une convention, c’est que les opérations qu’elle conduit accentuent la tension sur l’offre de logements. Les listes de demandeurs de logements augmentent par l’effet obligé de l’opération de renouvellement urbain qui, au mieux, place les gens concernés comme accédants aux logements disponibles, ce qui retarde du même coup la solution pour ceux qui ne sont pas situés dans les zones de renouvellement urbain et qui sont demandeurs de logements. Au pire, cela peut entraîner un dualisme de la cellule familiale à l’occasion des opérations de renouvellement urbain.

Je prends l’exemple du relogement d’un couple avec deux enfants, dont l’un est majeur. Le couple relogé demandera simplement un trois pièces, et l’enfant majeur qui vit avec ses parents demandera un logement autonome. Sera-t-il considéré comme prioritaire ? On est dans la pratique de l’ANRU, dans ce qui est vécu actuellement sur le territoire.

À notre avis il faut que ce travail de renouvellement urbain, qui n’est pas contesté, soit bien ciblé comme étant porteur d’une dynamique de renouvellement de quartier que nous validons, mais aussi d’une tension s’agissant de l’offre de logements. Cette tension doit être connue de la commission, d’où notre amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Tout en comprenant votre souci, monsieur Le Bouillonnec, la commission a repoussé l’amendement. D’une part, il tend à informer la commission de médiation, alors que la logique du droit au logement opposable veut que ce soit le préfet qui soit informé. D’autre part, s’agissant de la problématique que vous avez exposée, la commission a adopté un dispositif très proche du vôtre avec l’amendement n° 8 qui semble mieux adapté.

M. Michel Piron. L’amendement n° 234 est finalement satisfait !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. L’amendement est, en effet, largement satisfait. Cependant, je souhaite répondre à M. Le Bouillonnec car il nous a parlé d’un sujet intéressant – l’Agence nationale de rénovation urbaine, qu’il chérit, et il a raison – sans aucun rapport avec l’amendement qui traite des informations fournies par l’ANAH. (Sourires.)

Cela me donne l’occasion de souligner que le programme de rénovation urbaine n’a pas spécifiquement vocation à augmenter l’offre. Il vise surtout à traiter au fond la ségrégation urbaine que connaissent 500 quartiers, dans une dimension non seulement d’habitat, mais aussi de voirie, d’espaces publics, d’équipements publics. Il s’agit également de requalifier et de réhabiliter 650 000 logements.

Monsieur Le Bouillonnec, de grâce, admettez que les programmes prévoient bel et bien un logement nouveau pour un logement ancien. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Il y a beaucoup moins de déconstructions ! Vous avez une vision totalement « télévisuelle » de la rénovation urbaine, comme si vous la conceviez au travers de ce que montrent les journaux du « vingt heures » ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Annick Lepetit. Oh non, pas vous, monsieur le ministre !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Vous dérapez !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur Le Bouillonnec, vous avez parlé pendant dix minutes d’un sujet qui n’avait aucun rapport avec votre amendement ; autorisez-moi donc à vous répondre sur le fond ! (Sourires.)

Premièrement, cette idée que la rénovation urbaine est d’abord un problème de déconstruction est fausse : les financements de la déconstruction-reconstruction représentent moins de 10 % des programmes.

Deuxièmement, ce dont il s’agit, c’est de rendre habitables des logements qui avaient perdu toute capacité d’habitabilité. À Vaulx-en-Velin, ou dans n’importe quel site de ce type, sauf en zone très particulière, de très proche périphérie, le taux de vacance étant aujourd’hui de 30 %, quand on reconstruit un pour un, ce sont 30 % de logements en plus, sans compter l’amélioration des conditions de vie de nos concitoyens.

Troisièmement, l’Agence nationale de rénovation urbaine n’est qu’un instrument de mutualisation de moyens encadrés au profit des collectivités locales qui pilotent les programmes. Cela signifie que 65 % des programmes sont pilotés par vos amis, monsieur Le Bouillonnec, ce qui prouve que le dispositif fonctionne de manière parfaitement républicaine. Bref, ne mélangeons pas les sujets.

En conclusion, l’amendement n° 234 étant satisfait, le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 234.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Annick Lepetit, pour soutenir l’amendement n° 235.

Mme Annick Lepetit. L’alinéa 12 de l’article indique que « dans un délai fixé par décret, la commission de médiation désigne les demandeurs qu’elle reconnaît prioritaires et auxquels un logement doit être attribué en urgence. » Notre amendement tend à contraindre les commissions à se prononcer dans un délai maximal de trois mois.

S’en remettre à un décret une fois que la loi sera votée ne saurait nous satisfaire car on ne peut pas dire à des personnes qu’il faut leur attribuer un logement en urgence, qu’elles sont donc très prioritaires, sans connaître le délai qui doit contraindre les commissions à se prononcer. Un délai de trois mois nous paraît convenable pour les personnes qui attendent une réponse.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. La préoccupation exprimée est pleinement justifiée, mais cette précision relève du décret. C’est pourquoi la commission a rejeté l’amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Madame Lepetit, je partage votre sentiment. Je vous informe que le décret qui sera publié fixera un délai de trois mois. Par ailleurs, le haut comité pourra peut-être – dans le cadre de la prochaine majorité et du prochain gouvernement – proposer une modification pour plus ou moins quinze jours ; c’est le principe du décret par rapport à la loi.

M. le président. Madame Lepetit, retirez-vous l’amendement ?

Mme Annick Lepetit. Compte tenu des précisions apportées, je le retire.

M. le président. L’amendement n° 235 est retiré.

La parole est à M. Patrick Braouezec, pour défendre l’amendement n° 282.

M. Patrick Braouezec. Cet amendement remet en question le pouvoir d’appréciation de la commission de médiation. En effet, tel qu’il est rédigé – « dans un délai fixé par décret, la commission de médiation désigne les demandeurs qu’elle reconnaît prioritaires et auxquels un logement doit être attribué en urgence » –, l’alinéa 12 est ambigu. Sa rédaction peut en effet laisser penser que la décision de relogement ou d’orientation vers un hébergement, ou celle de rejet par la commission, pourrait être laissée à la libre appréciation de celle-ci, au moins au stade de la désignation des ayants droit.

On peut donc craindre que cela signifie que la commission disposera de pouvoirs d’appréciation sur les publics prioritaires, alors que c’est l’article 2 qui définit ces derniers. D’où cet amendement qui propose une rédaction sans ambiguïté sur le rôle de la commission.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Monsieur Braouezec, la commission a repoussé cet amendement car il propose la suppression de la référence à l’urgence, ce qui dénaturerait complètement le dispositif sans changer grand-chose à la pratique. L’appréciation par la commission de médiation est au cœur du dispositif, préoccupation qui prévalait également dans la loi ENL.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Patrick Braouezec. Le Gouvernement est sceptique, dubitatif !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Sur de tels sujets, un peu d’humilité n’est pas forcément mauvaise conseillère !

M. Patrick Braouezec. Ce n’était pas péjoratif, monsieur le ministre !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Selon moi, les deux rédactions se valent.

La commission a, par nature, un pouvoir d’interprétation dans le cadre des critères définis par la loi. Lui retirer cette capacité ne reviendrait à le lui retirer qu’en théorie. De surcroît, cette commission de médiation peut avoir un rôle qui dépasse la simple « critérisation ».

La rédaction issue du Sénat nous convient ; je ne vois donc pas l’intérêt d’adopter cet amendement.

Mme Martine Billard. Puis-je défendre mon amendement n° 189, monsieur le président, il a le même objet ?

M. le président. Madame Billard, votre amendement n’est pas présenté en discussion commune avec l’amendement n° 282, mais si vous préférez le défendre maintenant, faites-le.

Mme Martine Billard. L’objet de l’amendement n° 189 étant strictement le même que celui de l’amendement n° 282, ne pas en traiter maintenant rendrait la discussion plus compliquée.

M. le président. Permettez à la présidence d’en juger !

Mme Martine Billard. Oui, monsieur le président.

Je veux ajouter des arguments à ceux présentées par notre collègue Patrick Braouezec.

Mme la rapporteure a parlé de deux catégories : ceux qui peuvent saisir la commission sans délai et les autres. En fait, il y a plus de deux catégories puisque, parmi ceux qui peuvent saisir la commission sans délai, on introduit une sous-catégorie comprenant ceux qui sont reconnus prioritaires, puis on introduit une autre sous-catégorie parmi ceux qui sont reconnus prioritaires : ceux qui ont le droit de se voir attribuer un logement en urgence ! Quelle usine à gaz !

Mon amendement propose donc de supprimer la fin de la première phrase de l’alinéa 12 après le mot « prioritaires », à savoir les mots « auxquels un logement doit être attribué en urgence. » En effet, dire que les demandeurs sont prioritaires laisse supposer qu’ils doivent bénéficier d’une attribution en urgence ; sinon, ce n’est pas la peine de reconnaître des priorités.

Dans à peu près toutes les communes où les EPCI attribuent des logements, il y a déjà aujourd’hui des catégories de demandeurs de logements reconnues prioritaires et d’autres qui le sont moins. Or multiplier les sous-catégories rendra le dispositif ingérable et incompréhensible pour nos concitoyens. Ces derniers viennent nous voir en se disant prioritaires, et on leur répond qu’il y a six catégories de prioritaires et qu’ils ne sont donc pas forcément les plus prioritaires des prioritaires ! Maintenant, on leur dira qu’ils sont prioritaires en tant que demandeurs de logements, mais que, devant la commission, ils sont moins prioritaires que les autres prioritaires et que, de plus, parmi ces derniers, certains ont droit à un logement en urgence !

Il faut donc simplifier la rédaction et s’en tenir – si je puis dire, car cela fait déjà pas mal de sous-catégories ! – au fait que la commission de médiation désigne le demandeur qu’elle reconnaît comme prioritaire. Par définition, si une personne est prioritaire, c’est pour qu’on lui attribue un logement en urgence. Sinon, une telle reconnaissance est inutile.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l’amendement n° 189 ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. La belle démonstration symphonique de Mme Billard sur les priorités force l’admiration, mais ma position n’a pas changé. (Sourires.)

M. le président. L’avis du Gouvernement est-il également défavorable, monsieur le ministre ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Oui, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Patrick Braouezec.

M. Patrick Braouezec. Vous avez eu raison de considérer que ces deux amendements n’étaient pas les mêmes, monsieur le président, car ils n’ont pas exactement le même sens. Mme Billard propose que l’on arrête la phrase au mot : « prioritaires », alors que mon amendement, en parlant de « demandeurs prioritaires lorsqu’ils répondent aux critères définis dans le présent article », tend à éviter qu’il soit reconnu à la commission un rôle prépondérant vis-à-vis des attibutaires.

Cela étant je ne puis me satisfaire de la réponse de Mme la rapporteure. Ma rédaction ne retire en rien le caractère urgent de l’attribution.

J’entends bien par ailleurs, monsieur le ministre, que la commission peut avoir un rôle médiateur, mais ne lui laissons pas pour autant une possibilité d’interprétation. Il faut s’en tenir aux personnes que le texte de l’article 12 reconnaît comme prioritaires.

Pour répondre à ma préoccupation sur le rôle de la commission et à celle de Mme Boutin concernant l’urgence, nous pourrions retenir la rédaction : « demandeurs prioritaires lorsqu’ils répondent aux critères définis dans le présent article et auxquels un logement doit être attribué en urgence ».

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 282.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 189.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 5, de la commission des affaires culturelles, 36, de la commission des affaires économiques, et 82, de la commission des lois.

Ces amendements ont été cosignés respectivement par M. Le Bouillonnec, Mme Lepetit et M. Piron, qui les défendront tour à tour.

Vous avez donc la parole pour soutenir l’amendement n° 5, monsieur Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Cet amendement tend à réparer ce qui ne peut être qu’un oubli, dans le cas contraire, ce serait grave ! Il convient en effet que la commission de médiation fasse connaître sa décision au demandeur par écrit, et que cette décision soit motivée. En l’absence de notification par écrit, on imagine mal comment l’on pourra ouvrir les délais, notamment ceux qui encadrent l’intervention du préfet et la saisine du juge administratif.

La notification est également nécessaire, non seulement parce qu’il faut que l’on puisse observer comment la commission s’intègre dans le dispositif de définition de la priorité, mais aussi parce que – indépendamment de la procédure de saisine du juge administratif, que nous examinerons plus loin – la personne faisant l’objet de la décision a la possibilité d’engager une procédure de recours dans les conditions du droit commun. Or ce recours ne peut être exercé que sur une décision notifiée au requérant et comportant les motifs de la décision de la commission.

C’est pourquoi nous proposons, par cet amendement, d’insérer après la deuxième phrase de l’alinéa 12 la phrase suivante : « Elle notifie par écrit au demandeur sa décision, qui doit être motivée. »

M. le président. La parole est à Mme Annick Lepetit, pour soutenir l’amendement n° 36.

Mme Annick Lepetit. M. Le Bouillonnec a dit l’essentiel et le nombre d’amendements déposés prouve, s’il en était besoin, l’importance de cette question. Il est évident que le demandeur doit être informé du sort réservé à sa requête et que la décision de la commission doit être motivée par écrit, sans quoi elle n’aurait plus aucun caractère pédagogique. C’est un poids très lourd que de prendre ces décisions : aussi insistons-nous sur la composition des commissions, qui se doivent d’être totalement transparentes vis-à-vis du demandeur.

M. le président. La parole est à M. Michel Piron, pour soutenir l’amendement n° 82.

M. Michel Piron. J’éviterai d’être itératif à l’excès : il s’agit tout simplement de rendre des comptes et, plutôt que transparent, d’être explicite.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

M. Georges Fenech, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Si cet amendement a été adopté par la commission des lois, c’est que les commissions de médiation vont créer du droit. Ces « recours périphériques », comme on les appelle, nous font certes sortir du domaine du droit opposable, mais, comme l’a relevé M. Le Bouillonnec, des litiges vont naître du fait de ces décisions de droit commun. Il est donc nécessaire de prévoir une notification écrite et motivée, pour que la juridiction administrative devant laquelle le recours sera déposé puisse apprécier en connaissance de cause le refus du caractère prioritaire.

M. le président. Avez-vous quelque chose à ajouter, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ?

M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Même position, monsieur le président.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Si la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a accepté quelques amendements déposés par M. Le Bouillonnec et les membres du groupe socialiste, l’amendement n° 5, lui, a été adopté à l’initiative de la rapporteure, qui a eu le plaisir de le voir cosigné par M. Le Bouillonnec et Mme Mignon. (Sourires.)

Quoi qu’il en soit, je suis ravie que tout le monde soit d’accord sur cet amendement très important. L’obligation de notifier et de motiver par écrit la décision auprès des demandeurs répond à une demande forte qui s’est exprimée dans toutes les auditions que j’ai menées. Je suis heureuse de constater que l’ensemble de l’Assemblée nationale s’y est ralliée.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements identiques ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Évidemment très favorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 5, 36 et 82.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.

M. Michel Piron. C’est rare !

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 6 rectifié et 37 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

Je précise que l’adoption de l’un ou l’autre de ces amendements ferait tomber les amendements suivants jusqu’au n° 284 inclus.

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement n° 6 rectifié.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Bien qu’il ne s’agisse, en apparence, que d’une question de forme, cet amendement est très important. Tous ceux qui s’intéressent à la question du droit au logement opposable souhaitent qu’une distinction très ferme soit opérée entre logement et hébergement. Le Sénat avait commencé le travail, mais nous avons voulu améliorer encore ce texte en consacrant véritablement cette distinction.

Tel est l’objet de notre amendement. Il sera suivi par plusieurs autres, formels en apparence mais qui visent le même objectif.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour soutenir l’amendement n° 37 rectifié.

M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Je retire cet amendement. Je ne suis pas totalement convaincu par la rédaction de Mme Boutin, mais elle est tout de même meilleure que la nôtre. (Sourires.)

M. le président. L'amendement n° 37 rectifié est retiré.

Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 6 rectifié ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous allons voter l’amendement n° 6 rectifié, qui illustre bien l’évolution que l’Assemblée nationale est en train d’imprimer au texte. En effet, nous renforçons le dispositif en posant le principe que le logement n’est pas l’hébergement et que les solutions d’hébergement ne sauraient constituer des réponses à la demande de logement. Toute hypothèse d’hébergement, quelle qu’en soit la nature – dispositif d’accompagnement social, de soins, etc. –, ne peut être que temporaire.

Un amendement présenté par notre groupe et que l’Assemblée a adopté jeudi dernier prévoit que toute personne accueillie à sa demande dans un site d’hébergement doit se voir proposer une solution de sortie. En d’autres termes, celui qui le souhaite ne sort de l’accueil d’hébergement que s’il a une autre solution. Nous répondons ainsi au problème initial, celui qui a été posé en décembre dernier sur les bords du canal Saint-Martin ainsi que dans plusieurs communes de banlieue, dont certaines sont chères à mon cœur, et, plus généralement, au problème qui se pose chaque année au sortir de l’hiver, lorsque les personnes qui ont bénéficié de l’accueil d’hiver se retrouvent sans aucune solution.

Ceux qui ont conduit ces actions ont bien distingué le problème du logement, qui se posait à certaines des personnes concernées, et celui de l’hébergement, qui se posait à d’autres. Le dispositif de l’opposabilité du droit au logement, introduit dans des conditions sur lesquelles je ne reviendrai pas, constitue certes un progrès, mais c’est une réponse législative décalée par rapport au problème des personnes sans domicile fixe. L’actualité de ces dernières heures, sur le canal Saint-Martin, met d’ailleurs en lumière la complexité de ces situations et la difficulté des réponses à y apporter.

Selon nous, le processus législatif doit s’accompagner d’un effort très important des pouvoirs publics, notamment en matière d’hébergement d’urgence et d’hébergement adapté. Ce texte prévoit certes un certain nombre de dispositifs, mais ceux-ci restent insuffisants. Contraindre les villes à réaliser un site d’hébergement par unité de mille ou deux mille habitants et leur consentir en échange, comme il est proposé dans un amendement de M. Piron, des allégements fiscaux est une bonne chose, d’autant que l’amendement insiste également sur la distinction entre logement et hébergement.

Il reste que nous ne sommes qu’au début de notre démarche : il faudra combler l’attente en matière d’hébergement d’urgence, pérenniser la situation des bénéficiaires et les accompagner ensuite dans les diverses offres de logement qui pourront leur être faites.

Nous voyons un grand intérêt à la dualisation et à son inscription dans la loi. Il ne faut pas confondre logement et hébergement, ces deux dispositifs devant monter en charge parallèlement, tant il est vrai que la crise du logement provoque, à un moment, la crise de l’hébergement. Un bon hébergement est un hébergement dont on sort lorsqu’on y est prêt, pas celui où l’on reste faute d’offre de sortie. Nous voterons donc cet amendement.

M. Michel Piron. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Moi, je ne le voterai pas, car il me semble que nous sommes insensiblement en train d’opérer un glissement.

Aujourd’hui, sauf volonté contraire expressément exprimée, l’État a la responsabilité d’héberger toute personne résidant sur le territoire national. Introduire dans la loi sur le droit au logement opposable l’obligation de proposer un hébergement à toute personne qui demande un logement serait, par rapport au droit actuel, soit redondant, soit régressif.

Nous avons adopté un amendement interdisant la remise à la rue à l’article 1er. Faut-il pour autant obliger les personnes à la rue à rejoindre un centre d’hébergement ? Ce débat a occupé l’ensemble des associations et des milieux qui travaillent sur ces questions. Nous avons toujours affirmé qu’il ne fallait pas aller contre la volonté des personnes, qu’il convenait plutôt d’engager à leurs côtés un long travail de conviction, tant il est vrai que la démarche de quitter la rue ne se fait pas du jour au lendemain quand on y est depuis très longtemps.

Or, ici, la commission va examiner des demandes de personnes qui sont déjà dans une démarche de logement, pas de personnes qui sont dans le refus de quitter la rue. Pour diverses raisons, certaines d’entre elles auront peut-être besoin d’un accompagnement sous forme de place en résidence sociale ou d’aide psychiatrique. Cependant si l’on envisage de répondre à la demande en termes d’hébergement et pas de logement, on sort déjà de l’objectif de la loi.

M. Michel Piron. C’est tout le contraire !

Mme Martine Billard. En outre, la commission pouvant faire toute proposition de réorientation des demandes, que se passera-t-il en cas de refus du demandeur ? Si une personne demande un logement, elle a le droit de ne pas vouloir retourner dans une structure d’hébergement !

Mme Annick Lepetit. Ce sont toutes les limites de cette loi !

Mme Martine Billard. Considérera-t-on qu’on n’a plus à s’en occuper puisqu’elle aura refusé une proposition ?

Je ne voterai donc pas cet amendement, même si la commission est de bonne foi. Il est trop ambigu et peut déboucher sur des situations qui ne correspondent pas à ce que l’on attend d’une loi sur le droit au logement opposable.

M. Michel Piron. Procès d’intention !

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je partage l’argumentation que vient de développer Martine Billard. Il ne faudrait pas que cette clarification, que nous appelons de nos vœux, entre hébergement et logement soit l’occasion de se débarrasser des cas les plus difficiles.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Mais non !

M. François Brottes. C’est pourquoi je suggère de substituer au mot « prévu » le mot « proposé ». Plutôt que de se contenter d’une prévision, les services chargés de la question de l’hébergement seraient ainsi tenus de trouver une solution pour tous les cas. On travaille là sur le logement d’urgence au risque d’éliminer les situations de super urgence. Ce n’est pas acceptable et nous devons faire montre d’une volonté plus forte. Le mot « proposé » induit l’engagement de déboucher sur une solution à l’issue du traitement du dossier.

M. le président. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Un peu de prudence dans l’exégèse : ne privilégions pas la lettre au détriment de l’esprit ! Or l’esprit du texte est sans ambiguïté : il s’agit de consacrer le droit au logement opposable. Comme l’a très bien expliqué M. Le Bouillonnec, les personnes sont malheureusement parfois dans une telle situation de dépendance, liée à quantité de problèmes, qu’elles ne sont pas en état de se retrouver directement dans un logement. Elles ont besoin d’un accompagnement très fort, qu’il soit médical, paramédical ou social.

C’est seulement pour de tels cas, dans lesquels une offre de logement ne serait pas une réponse adaptée, que la commission transmettra une demande d’hébergement sous diverses formes. Sur le fond, nous sommes tous d’accord et personne ne veut détourner le droit au logement. Néanmoins force est d’admettre que, avant d’accéder au logement de manière autonome, certaines personnes doivent passer par l’hébergement, car elles ont besoin d’un accompagnement.

Apportant une véritable clarification, cet amendement devrait pouvoir faire l’unanimité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur la proposition de rectification de M. Brottes ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. J’entends bien la préoccupation et je la partage. Il me semble qu’un accueil « prévu » est très proche d’un accueil « proposé ».

M. Michel Piron. « Prévu » est même plus fort !

Mme Christine Boutin, rapporteure. Personnellement, je préfère ma rédaction, mais s’il y a unanimité sur le mot « proposé », je n’y vois pas d’opposition. À moins que le Gouvernement ne soit d’un avis contraire.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette modification ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Cela ne me pose pas non plus de difficulté particulière, même si le mot « prévu » me semblait renforcer l’obligation d’avoir préalablement construit. Du point de vue du droit, le mot « proposé » n’est pas gênant. Sagesse, donc, en ce qui concerne la rectification et avis favorable sur l’amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6 deuxième rectification.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 311, 111, 313, 75, 199, 315 et 284 tombent.

Nous en venons dons à deux amendements, nos 200 et 236, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l’amendement n° 200.

Mme Martine Billard. Dans le même ordre d’idée, cet amendement tend à prévoir que les décisions seront motivées par écrit et dans un délai d’un mois. On me répondra, je le sais, qu’une telle précision relève du décret et non pas de la loi. En fait, ce que je souhaite connaître, ce sont les délais que le ministre prévoit d’inscrire dans le décret. S’ils sont trop longs, ils vont contribuer à rétablir un véritable parcours du combattant et à faire perdre aux personnes concernées toute confiance dans les dispositifs mis en place. Si vous vous engagez sur ce point, je suis prête à retirer mon amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont, pour soutenir l’amendement n° 236.

M. Jean-Louis Dumont. Notre amendement a le même objectif que celui de Mme Billard. Dès lors que la demande est soumise à certaines formalités et conditions, il convient que la commission motive sa décision – refus, acceptation ou autre décision – par écrit.

On voit bien, dans les commissions d’attribution des logements sociaux, quel peut être l’apport de la réflexion et de l’analyse de la demande. La motivation d’une décision – ajournement, réorientation ou rejet en raison de l’ancienneté ou d’un reste à vivre insuffisant – est aussi un acte pédagogique à destination du pétitionnaire qui demande le logement.

Une motivation écrite établissant que la commission a bien analysé la situation permettra aussi d’éviter les dérives. Ainsi, le pétitionnaire qui verra sa demande rejetée par manque d’information ou interprétation erronée, pourra relancer ou approfondir sa démarche. Il est donc indispensable, pour donner une force et un caractère nouveaux à cette démarche aux yeux des demandeurs de logement en grande difficulté, que la motivation soit systématique et qu’elle soit également adressée aux associations, travailleurs sociaux ou intervenants qui accompagnent la demande.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des lois.

M. Georges Fenech, rapporteur pour avis de la commission des lois. J’indique à M. Dumont que son amendement est déjà satisfait par les amendements identiques nos 5, 36 et 82, que l’Assemblée a déjà adoptés.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements 200 et 236 ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Il est exact que l’amendement défendu brillamment par M. Dumont est satisfait. Quant à celui de Mme Billard, le sujet relève en effet du pouvoir réglementaire, mais je comprends sa préoccupation. Les amendements ont cependant été repoussés par la commission.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. L’amendement de M. Dumont est effectivement satisfait et celui de Mme Billard est de nature réglementaire.

Dans l’état actuel de notre réflexion, nous commencerons probablement par fixer, par décret, le délai à deux mois pour éviter qu’il ne soit dépassé. Dans le cadre du suivi avec le haut comité, il devrait être ramené à un mois, ce qui devrait devenir le droit commun assez vite. En tout état de cause, il faudra procéder en deux temps.

M. le président. Monsieur Dumont, votre amendement étant satisfait, le maintenez-vous ?

M. Jean-Louis Dumont. Je le retire.

M. le président. L'amendement n° 236 est retiré.

Madame Billard, compte tenu des engagements du Gouvernement, retirez-vous également votre amendement ?

Mme Martine Billard. Oui, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 200 est retiré.

J’appelle donc l’amendement n° 201.

La parole est à Mme Martine Billard, pour le soutenir.

Mme Martine Billard. L’amendement prévoit la possibilité d’un recours contre la décision de la commission dans des conditions définies par décret.

Par principe, à partir du moment où il y a une décision, on doit avoir une possibilité de recours. Que se passera-t-il si la commission prend une décision que le demandeur n’accepte pas ? Si un recours est possible, il pourra se défendre. Dans le cas contraire, le demandeur ne saura pas que faire. Pourra-t-il réintroduire une nouvelle demande ?

Il faut donc préciser le cheminement exact entre la décision de la commission et les conséquences pour le demandeur, afin d’éviter de se retrouver devant un trou noir.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des lois.

M. Georges Fenech, rapporteur pour avis de la commission des lois. Madame Billard, je ferai les mêmes observations que précédemment.

Nous sommes devant un recours périphérique de droit commun. Il n’est pas utile d’adopter votre amendement puisqu’une décision de rejet de la commission de médiation pourra faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir devant la juridiction administrative.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. La commission a repoussé cet amendement.

Madame Billard, votre amendement sera d’ailleurs satisfait par l’article 3 pour les mêmes raisons que celles développées par M. le rapporteur pour avis.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Il est inutile d’introduire un doute sur le recours de droit commun, en laissant entendre que des conditions particulières seraient définies par décret. Le droit commun s’appliquera automatiquement.

M. le président. Madame Billard, maintenez-vous l’amendement n° 201 ?

Mme Martine Billard. Non ! Je le retire.

M. le président. L'amendement n° 201 est retiré.

Je suis saisi de deux amendements, nos 114 et 239 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement n° 114.

M. Francis Vercamer. L’amendement vise à éviter d’alourdir les difficultés des communes sur les territoires desquelles il y a déjà plus de 50 % de logements sociaux et à faire en sorte que l’opposabilité du droit au logement ne se traduise pas par la recherche prioritaire d’un logement dans les communes où se concentre d’ores et déjà le logement social.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour défendre l’amendement n° 239 rectifié.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Notre amendement s’appuie sur les analyses formulées au fond sur la démarche de la loi d’opposabilité du droit au logement. Il n’est pas envisageable que cette loi ait exclusivement un effet sur les territoires dans lesquels l’offre de logement social est déjà importante.

Si l’on parvenait au résultat aberrant que les communes les plus volontaristes en matière de logement social soient tenues aux contraintes résultant de l’application du droit opposable au logement, ce serait l’inverse du but recherché par l’opposabilité du droit au logement, portée par le haut comité, par la fondation Emmaüs et dans les rapports du Conseil économique et social.

Je rappelle que le dispositif de logement initié par le préfet, sauf si certains de nos amendements sont acceptés, ne sollicitera que le droit de réservation du préfet. Celui-ci n’existera que pour les patrimoines déjà existants, lesquels se trouvent justement sur les territoires dont j’ai évoqué la situation il y a quelques instants.

Il ests nécessaire que le Gouvernement affirme dans la loi qu’il ne s’agit pas de faire peser sur ceux qui ont été les plus actifs ou les plus responsables – chacun choisira le terme qui lui convient ! – dans le domaine du logement social une telle contrainte. Nous considérons donc que lorsque les logements sociaux représentent plus de 50 % du nombre de résidences principales dans une commune, celle-ci doit être exemptée de l’application du dispositif.

Je rappelle d’ailleurs que le pourcentage de 50 % de logements sociaux est un critère de référence ouvrant pour les préfets, dans les discussions avec les villes, les stratégies de redéveloppements patrimoniaux et de tentatives de diversification de l’offre locative au-delà de la seule présence de logements sociaux. Il s’agit de territoires dans lesquels on essaie de restructurer le domaine urbain.

Notre amendement vise donc à insérer après l’alinéa 12 de l’article 2 l’alinéa suivant : « Le logement ne peut être attribué sur le territoire d’une commune qui dispose de plus de 50 % de logements sociaux définis conformément aux dispositions de l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation. »

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 114 et 239 rectifié ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. La commission comprend parfaitement les préoccupations exprimées par nos collègues. Elle a cependant rejeté ces amendements.

Il s’agit d’un mélange des genres entre le droit au logement opposable et la loi SRU. Nous reparlerons de cette dernière lors de l’examen de l’article 5 bis. Nous pensons que ces amendements n’ont pas leur place à l’article 2.

Je rappelle que l’alinéa 14 de l’article 2 prévoit : « Après avis des maires des communes concernées et en tenant compte des objectifs de mixité sociale tels qu’ils sont définis dans l’accord collectif intercommunal ou départemental, le représentant de l’État… » De ce fait, vos préoccupations sont satisfaites.

M. Michel Piron. Exactement !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Je peux être sensible aux arguments développés par M. Vercamer à l’amendement n° 114, mais je ne suis pas favorable à cette exclusion. Il peut y avoir des résidences relais ou des maisons relais très adaptées. Le pourcentage de logement social n’est pas proportionnel aux problèmes.

La ville que j’ai longtemps administrée comprend 50 % de logements sociaux. Pourtant je vous garantis que nous pourrions encore ouvrir nos bras et trouver d’autres capacités d’accueil.

Il faut être très attentif à la logique de mixité et ne pas tomber dans le piège des logements vacants des quartiers en transformation, en rénovation urbaine. C’est sans doute ce point que vous visez. Cela demande un ajustement local, municipal, départemental, et non un texte.

Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 239 rectifié de M. Jean-Yves Le Bouillonnec pour les motifs indiqués précédemment.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Dutoit.

M. Frédéric Dutoit. Monsieur le ministre, vous avez évoqué Marseille, lors des questions au Gouvernement.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. La PACA !

M. Frédéric Dutoit. Vous avez cité le maire de Marseille !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. J’ai cité le schéma d’aménagement urbain.

M. Frédéric Dutoit. Je partage les préoccupations exprimées par ces deux amendements.

Je connais très bien les réalités marseillaises. Toutes les personnes qui voudront obtenir un logement, en utilisant le droit opposable à Marseille, ne pourront quasiment être logées ou relogées que dans les quartiers nord, XV e, XIVe, XIIIe dont je suis le député. Le XV e arrondissement comprend d’ailleurs la seule unité d’hébergement d’urgence de Marseille.

Votre projet de loi me mettra dans une situation difficile. En effet, si je suis tout à fait favorable au droit opposable et à l’hébergement ou au relogement, en même temps, compte tenu de la réalité marseillaise actuelle, je serai contraint – et j’y suis même humainement favorable – de reloger dans mes arrondissements les personnes qui ne sont pas hébergées. On voit la limite de votre exercice.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Exactement !

M. Frédéric Dutoit. Vous avez évoqué cet après-midi la ville de Marseille. Or l’on y construit 5 000 logements PLH par an et le maire de la ville applique les 20 % de logements réservés au social, …

M. Michel Piron. Très bien !

M. Frédéric Dutoit. …toutes catégories confondues, ce qui pourrait apparaître comme très positif. Cependant, sur 5 000 logements, cela ne représente qu’environ 1 000 logements sociaux.

Or, dans les tiroirs des offices d’HLM de Marseille, nous avons 22 000 demandes officielles de logements. À ce rythme, il nous faudra vingt-deux ans pour résoudre le problème de la demande actuelle de logement, sans parler des demandes futures.

Ce projet de loi sera très positif en matière d’urgence pour quelques dizaines de gens non hébergés, ou vivant dans des logements insalubres, mais il ne pourra répondre aux principes de l’égalité de droit et de la mixité sociale que vous énoncez. Il ne correspondra pas à la politique de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine.

Bref, les villes qui ont consenti le plus d’efforts en matière de logement social et d’hébergement d’urgence seront pénalisées, même si je n’apprécie guère ce terme, car je souhaite que tout le monde soit logé de façon digne.

Mme Annick Lepetit. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous adhérons pleinement aux observations de notre collègue M. Vercamer. Il ne s’agit pas d’un débat théorique, et nous sommes, avec ces amendements, au cœur du dispositif du droit au logement opposable mis en œuvre par le Gouvernement eu égard à la réalité de l’offre de logement social.

Cela n’a pas échappé aux associations qui soutenaient ce dispositif. Elles ont bien conscience que la mise en œuvre du droit au logement opposable accentuera les contraintes sur le territoire des collectivités où se concentre l’offre. Vous bloquez la situation, car c’est sur le contingent préfectoral que seront trouvés les logements nécessaires pour satisfaire le droit opposable, et seules les communes déjà en première ligne seront les plus sollicitées.

Comme par ailleurs, il s’agira de loger des personnes en difficulté, les logements sociaux – PLS, PLUS – seront très demandés alors qu’il n’y en a pas suffisamment, même si vous prenez, à l’occasion de ce projet de loi, l’engagement d’en construire davantage, et qu’il s’agit du patrimoine le plus sollicité par la population la plus défavorisée.

C’était l’une des raisons pour lesquelles nous avons considéré que le dispositif que vous proposez de mettre en œuvre accentuera les pressions sur le territoire des communes qui offrent le plus de logements, sans apporter immédiatement les solutions nécessaires aux autres territoires.

Dans les amendements qui suivront, nous vous demanderons d’ouvrir le dispositif du droit opposable au logement aux autres bailleurs sociaux ou même privés, et aux réservataires sur tous les contingents.

Toutefois il est possible dès maintenant de mettre en place ce dispositif avec l’ensemble de ceux qui font l’offre de logement social, en mobilisant l’ensemble des logements sociaux, y compris ceux issus du 1 % logement et ceux du patrimoine privé conventionné.

Si l’on procédait ainsi, notre amendement perdrait sa raison d’être parce que les préfets bénéficieraient d’une marge de manoeuvre beaucoup plus grande et seraient en situation d’offrir des logements sur l’ensemble de leur contingent.

En revanche, cela ne fonctionnera pas si tel n’était pas le cas, et il est fort probable que vous renoncerez à cette solution parce que vous ne pensez pas être en mesure de le faire actuellement, faute d’avoir ouvert les débats avec les autres bailleurs sociaux qui ne sont pas les offices publics, les propriétaires privés, par exemple. Il n’y a pas eu de concertation.

Vous pensez sans doute que le débat aura lieu avec le haut comité pour le logement des personnes défavorisées et nous sommes d’accord sur ce point, monsieur le ministre, car nous savons que ce problème se pose depuis le début. C’est la raison pour laquelle le haut comité comme le Conseil économique et social ont préconisé qu’il fallait procéder à un tour de table en vue de la mise en œuvre du droit opposable.

C’est enfin pourquoi, très modestement, la formation politique à laquelle j’appartiens a repris la l’idée de confier un travail de réflexion au Conseil économique et social.

Les conditions dans lesquelles vous mettez en œuvre un dispositif qui constitue à nos yeux un réel progrès social, risquent d’accentuer la ségrégation urbaine et, plus généralement, la ségrégation sociale.

Cet amendement est pour nous l’occasion de rappeler qu’il y a des problèmes de fond et que celui-ci en particulier n’est pas réglé par votre texte. D’ailleurs, les associations ne disent pas autre chose. Cela donnera lieu à des difficultés liées non au principe lui-même, mais à l’improvisation qui a présidé à sa mise en œuvre, ce que nous avons toujours dénoncé.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 114.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 239 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec pour soutenir l’amendement n° 237.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Dans le texte initial, le Gouvernement avait prévu, pour les délégataires du contingent préfectoral, l’obligation d’assumer la responsabilité de la mise en œuvre du droit au logement. Le Sénat a supprimé ce dispositif en considérant que cela faisait peser une trop lourde responsabilité sur les délégataires, mais en précisant, dans le même temps, que les préfets conservaient, par le biais de conventions ou dans la pratique, la possibilité de proposer sur le contingent de réservation préfectorale des logements dans le cadre de la mise en œuvre du droit opposable.

Dans le fond, le dispositif retenu par le Sénat…

M. Michel Piron. Au profit de l’État !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. … restreint l’offre à la disposition du préfet. C’est un problème technique, cher collègue. Vous savez que c’est évident, monsieur Piron.

M. Michel Piron. Vous savez que ce n’est pas vrai.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Si vous faites assumer au délégataire – le maire ou le président de l’EPCI – l’intégralité du principe de l’opposabilité, il l’exercera sur la totalité des réservations que le préfet lui a concédées alors que le préfet ne disposera plus que de logements « résiduels » sur son contingent. Cela signifie que le dispositif de l’opposabilité du droit au logement sur les territoires où le préfet aura délégué sa réservation sera extrêmement réduit.

Mesdames, messieurs les maires, mesdames, messieurs les présidents d’EPCI, précipitez-vous pour signer les conventions de délégations.

M. Michel Piron. C’est ahurissant !

M. le président. Veuillez conclure.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ce sujet est importantes et il mérite que l’on s’y arrête.

Je considère que le dispositif que vous mettez en place est pousse au crime. Les responsables discuteront leurs conventions ; ils auront la délégation du préfet, et l’opposabilité du droit au logement, sur leur territoire, ne s’appliquera que sur le « résidu » de son contingent conservé par le préfet.

Conclusion : vous restreignez l’application du dispositif sur ces territoires.

M. Michel Piron. Ahurissant !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Le débat est en effet très important.

Le Sénat a disposé du temps nécessaire pour examiner cette question. Je crois pouvoir dire qu’un équilibre a été trouvé, lequel a rendu au texte toute sa cohérence. Tous les élus ont exprimé leur préoccupation sur les modalités du droit au logement opposable. J’insiste sur le fait que c’est le droit au logement opposable et non le contraire. Tous ont souhaité que l’État soit le garant de cette opposabilité.

M. Michel Piron. Exactement !

Mme Christine Boutin, rapporteure. L’article 1er que nous avons voté confirme que l’État est bien le garant de l’opposabilité. Le texte que nous discutons préserve tout à fait ce souhait exprimé par l’ensemble des élus. L’article 1er dispose en effet que l’État est le garant « même s’il y a délégation du contingent préfectoral ».

M. Michel Piron. Tout à fait !

Mme Christine Boutin, rapporteure. Le préfet est garant de l’opposabilité et nous aurons l’occasion de revoir toutes ces questions à l’occasion de la discussion de l’article 5 quinquies qui instaure la possibilité, pour les établissements publics de coopération qui seront volontaires, et sous certaines conditions, d’expérimenter la mise en œuvre du droit opposable. Nous en reparlerons.

La commission a rejeté cet amendement. Toutefois je répète, parce que je sais que c’était une grande interrogation des élus, que le texte qui vous est proposé affirme et confirme que l’État, en toute hypothèse, sauf exception quand les EPCI sont volontaires, est le garant de l’opposabilité.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. La mécanique du dispositif repose sur la mobilisation générale, laquelle passe par la multiplication des délégations de compétences, d’un accord général, d’un suivi et du déblocage de certaines situations.

Le droit au logement opposable ne deviendra effectif que si tous les acteurs, sur l’ensemble du territoire, se l’approprient. La grande question est de savoir si cela ne va pas correspondre, pour les communes et les agglomérations, à un recul sur les délégations des aides à la pierre, en transférant sur leurs charges l’obligation prévue par l’article 1er. .

Le Sénat a été sage de parier sur la mobilisation de tous et de laisser à l’État la charge de l’exercice global de cette solidarité et d’estimer les évolutions avec le haut comité. L’hypothèse que vous évoquez a été écartée après mûre réflexion, et les avis ont évolué sur ce point. Finalement, l’arbitrage qui a été rendu tient compte du fait que le contingent préfectoral n’est que l’un des outils, en aucun cas le seul, pour mettre en œuvre le droit opposable au logement.

M. Jean-Louis Dumont. Actuellement !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. L’obligation peut se remplir par tous moyens. Nous avons introduit une situation intermédiaire qui vous conviendra : seules les agglomérations volontaires pourront se voir transférer, avec le contingent, l’obligation de la mise en œuvre du droit opposable, avec un certain nombre de règles d’urbanisme, de financements d’aide à la pierre, de police de l’insalubrité, bref tous les outils d’une politique du logement.

Transférer au titre du contingent préfectoral la responsabilité aux collectivités ferait qu’il n’y aurait plus de délégation d’aides à la pierre.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Il faut se dépêcher d’en signer alors !

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Néanmoins ces délégations impliquent des obligations. Nous sommes dans un État de droit.

Pour votre information, sachez qu’en moins de dix-huit mois, 70 % des zones urbaines ont été couvertes par les délégations d’aides à la pierre.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Pourriez-vous nous le confirmer ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Je vous en communiquerai la liste.

Cette mobilisation est très spectaculaire. Pour les premiers territoires, pour lesquels on dispose de plus d’un an de visibilité, on constate en effet qu’après trois ou quatre mois de difficultés liées à la mise en route, les objectifs définis pour l’ensemble de la programmation prévue pour le rattrapage commun ont toujours été dépassés. Il ne faut pas casser cette dynamique. Chemin faisant, nous verrons, d’autant qu’une expérimentation est prévue dans un autre article.

M. le président. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. La réponse de M. le ministre est tellement remarquable que je n’ai rien à ajouter !

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.

M. Jean-Louis Dumont. Nous sommes, mes chers collègues, au cœur d’un débat qui comporte plusieurs strates entremêlées.

Sur le terrain, nous observons des résultats un peu étonnants en matière de droit du réservataire. En Île-de-France, il semblerait en effet que l’État agisse et fasse connaître ses objectifs en matière de réservations. Dans d’autres territoires, peut-être plus provinciaux, le droit de réservation, même s’il est respecté, a été délégué en pratique à la commission d’attribution du logement. Dans certains cas même, le conseil général s’est immiscé dans cette structure, par le biais du fonds de solidarité logement dont il a la charge ou encore des services sociaux.

De grands bouleversements sont ainsi intervenus, creusant un écart entre ce qui est écrit dans la loi et l’usage qui en est fait.

En outre, depuis quelque temps, on a vu se réveiller un réservataire qui a des exigences, car il apporte de l’argent. Je veux parler du 1 % logement qui entend atteindre une parfaite maîtrise des attributions, dans le cadre d’une politique de peuplement qui ne dit pas son nom mais qui s’impose, de fait, sur nos territoires. Dès lors, la part qui reste sur le marché libre du logement aux organismes de logements locatifs sociaux est très réduite.

Certes, dans certains secteurs, les préfets se rendront compte qu’ils disposent d’un certain stock sur lequel ils peuvent agir pour attribuer des logements.

M. Michel Piron. Tant mieux !

M. Jean-Louis Dumont. L’usage veut déjà que certains logements soient destinés aux fonctionnaires de la préfecture, même si aucun n’est précisément dévolu car le parc social est géré de manière dynamique. Le préfet pourra donc être conduit à gérer. Toutefois s’il gère seul, nous irons vers un échec.

Monsieur le ministre, je suis d’accord avec vos premiers propos : il s’agit de mener une politique volontariste sur l’ensemble du patrimoine afin d’attribuer un logement idoine à un individu ou une famille. Nous suivrons alors une vraie politique de peuplement car nous saurons précisément à qui revient tel logement, quels sont les accompagnements et les capacités d’accueil, y compris extérieures : nous ferons dans la dentelle. Cependant manifestement, il sera très difficile de procéder ainsi.

S’agissant des délégations des aides à la pierre, rappelons que M. André Rossinot, maire de Nancy et président de la communauté urbaine, s’est immédiatement porté candidat à la gestion de ces crédits. Cette gestion devient globale mais quelle sera la part du préfet ? Mme la rapporteure a raison de rappeler que l’État est garant, quel que soit le gestionnaire du patrimoine ou le réservataire. On ne demande pas obligatoirement qu’il paie mais qu’il assure partout la bonne application de la loi de la République et de la réglementation édictée. Ce n’est pas le cas aujourd’hui : que les préfets fassent donc leur boulot !

Mme Christine Boutin, rapporteure. Très juste !

M. Jean-Louis Dumont. Je ne suis pas certain qu’ils aient la capacité de gérer un parc de logements, mais on peut exiger d’eux qu’ils aient au moins celle de faire respecter la loi. Le premier article que nous avons voté à l’unanimité s’impose à eux.

M. Michel Piron. Où est le problème ?

M. Jean-Louis Dumont. Nous aurons, nous députés, à contrôler qu’il est bien appliqué partout. Le préfet sera garant de ces dispositions vis-à-vis de tous les réservataires afin de mettre en place une vraie politique de peuplement.

M. le président. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Monsieur le président, je ne peux m’empêcher de prendre la parole après cette brillante démonstration que M. Dumont vient d’opposer à l’argumentaire baroque de M. Le Bouillonnec. J’avoue avoir été très surpris par ses propos car j’avais cru comprendre que tout le monde souhaitait, en matière d’habitat, que l’État reste le garant d’une politique nationale, comme vient de le rappeler avec force M. Dumont. L’article 1er l’établit clairement, je ne vois donc vraiment pas où est le problème.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ce sont les attributions qui posent problème !

M. Michel Piron. Enfin les délégations, comme l’a souligné M. le ministre dans son exposé très complet, attestent que la politique de l’habitat est une politique partagée entre les collectivités territoriales et l’État. Néanmoins déléguer ne signifie pas abandonner. En tout état de cause, le préfet gardera bien ses pouvoirs de garant, en tant que représentant de l’État.

Les termes de « garant » à l’article 1er et de « délégation » disent parfaitement ce qu’ils veulent dire. Je m’en remets à la dernière démonstration de M. Dumont que j’interprète peut-être de manière excessive, mais il me semble qu’on ne peut qu’être d’accord.

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.

Mme Martine Billard. Pour ma part, je ne suis pas convaincue par les démonstrations de M. le ministre et de M. Piron. Dans un monde idéal où toutes les communes de France respecteraient le quota de 20 % de logements sociaux et où l’intérêt général primerait toujours sur l’intérêt particulier, il n’y aurait en effet pas de problème. Malheureusement, nous ne sommes que des êtres humains, avec les faiblesses qui leur sont propres : certaines communes, comme Neuilly, …

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Au hasard ! Ou Saint-Maur dans le Val-de-Marne !

Mme Martine Billard. …n’ont pas de logements sociaux ou tellement peu que les probabilités d’en obtenir un sont infinitésimales. Que feront leurs habitants pour bénéficier du droit au logement opposable si le contingent préfectoral est entièrement délégué aux communes ou aux EPCI, ce qui sera bientôt le cas dans les Hauts-de-Seine, je crois ? La question se pose, car, d’une manière bien humaine, les maires ou les présidents d’EPCI auront tendance à privilégier les habitants de leurs territoires. Et le pauvre habitant de Neuilly qui ne rentrera pas dans le contingent auquel il a droit risque alors d’avoir à attendre très longtemps. C’est la raison pour laquelle nous ne sommes pas prêts à retirer nos amendements.

Enfin, s’agissant des réquisitions, je reconnais que ce sont plutôt les gouvernements de droite que ceux de gauche qui en ont effectué. Cependant il serait temps aujourd’hui d’en faire à nouveau.

Dans Paris, de nombreux bâtiments haussmanniens ont été transformés en bureaux, qui sont aujourd’hui à louer, car ils ne répondent pas aux critères fonctionnels actuels, sauf pour les professions libérales. Les pancartes restent parfois pendant des mois. Ainsi, en face des grands magasins, dans le IXe arrondissement, 12 000 mètres carrés sont à louer. Ne pensez-vous, monsieur le ministre, qu’il faudrait mettre en œuvre la loi de réquisition, au moins pour une fraction de cette surface ? Cela permettrait de régler la situation des personnes qu’on ne parvient pas à reloger et de soulager Mme Vautrin des difficultés auxquelles elle est confrontée avec la gestion des tentes du canal Saint-Martin.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 237.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Martine Billard, pour défendre l’amendement n° 159.

Mme Martine Billard. Amendement de cohérence.

M. le président. La commission et le Gouvernement ont un avis défavorable.

Je le mets aux voix l'amendement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 7, qui fait l’objet d’un sous-amendement n° 238.

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement n° 7, dont l’adoption, je vous le précise, ferait tomber les amendements suivants jusqu’à l’amendement n° 160 inclus.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Cet amendement, adopté par la commission, a pour objectif de clarifier la rédaction de l’alinéa 14, en précisant notamment que c’est le préfet qui délimite le périmètre au sein duquel les logements attribués doivent être situés.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir le sous-amendement n° 238.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ce sous-amendement vise à réintroduire l’obligation, pour les délégataires, d’assumer la responsabilité de la mise en œuvre du droit au logement.

Nous avons repris la même formulation que celle utilisée à l’amendement n° 237 pour l’alinéa 13. Cependant, en l’occurrence, il s’agit non pas de la transmission au préfet et au délégataire de la liste des demandeurs auxquels doit être attribué en urgence un logement, mais de l’organisation de la réponse apportée à la demande de logement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 238 ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Avis défavorable, pour les raisons évoquées précédemment.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Même avis que la commission.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.

M. Jean-Louis Dumont. Si l’on supprime la possibilité de l’exercice de ce pouvoir du préfet par son délégataire des droits à réservation, on risque de manquer des opérations. Les personnes en difficulté seront placées là où les logements libres sont les plus nombreux, mais aussi les plus anciens, puisque déjà amortis. Il est donc nécessaire que le préfet garantisse l’ensemble des droits pour tous les réservataires.

Monsieur le ministre, si vous interrogez la DGUHC, elle vous dira que la notion de réservataire et de réservation commence à se réorganiser, à limiter le champ de manœuvre sur la part du parc ancien ou nouveau libre à la location.

On est en train de vider cette loi de ses objectifs, simplement par le fait qu’il n’y aura plus rien à louer. Le nombre de logements disponibles sur le marché locatif social se restreint par l’organisation faite par l’UESL, par exemple, ou par d’autres collecteurs. Des réservations seront accordées sur la base d’une simple aide à la pierre et sans aucune contrepartie. Il faut que le parc ancien soit organisé, sinon il suffira de dire : comme j’ai aidé à la création de ce logement, je le réserve et je le loue en dehors de toute contrainte.

Si l’on n’ouvre pas le parc, nous irons à l’échec.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 238.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 253, 292, 308 et 160 tombent.

La parole est à Mme Annick Lepetit, pour soutenir l’amendement n° 250.

Mme Annick Lepetit. Cet amendement, plus contraignant que la rédaction issue du Sénat, permet à l’État de proposer aux propriétaires de logements faisant l’objet d’une convention avec l’ANAH de les louer à des personnes disposant de ressources modestes inscrites sur une liste arrêtée par le préfet.

Un tel dispositif permettra au préfet de mobiliser le parc locatif privé conventionné dans le cadre de la mise en œuvre du droit au logement opposable. Il vise également à informer les bailleurs de logements concluant des conventions avec l’ANAH que les logements ainsi aidés pourront être mobilisés pour mettre en œuvre le droit opposable au logement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Boutin, rapporteure. Cet amendement a été repoussé par la commission, bien que nous partagions la préoccupation qu’il exprime. En effet, son adoption risquerait d’avoir un effet contre-productif.

M. Michel Piron. Exactement !

Mme Christine Boutin, rapporteure. Il pourrait décourager les bailleurs privés en les contraignant au moyen d’un dispositif très complexe.

L’amendement n° 8, que nous examinerons immédiatement après, tend à permettre au préfet d’avoir recours aux logements privés. Comme je viens de le rappeler, votre volonté d’associer le parc privé à la grande mobilisation générale à laquelle faisait allusion le ministre tout à l’heure est également la nôtre.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Nous sommes résolument contre cet amendement, tel qu’il est rédigé. L’ANAH a eu suffisamment de difficultés à mobiliser le parc privé conventionné pour ne pas casser la machine, le nombre de logements privés sociaux étant passé de 8 000 à 36 000.

Le présent projet de loi permettra la location d’un logement par le biais d’une association. Par ailleurs, les programmes sociaux thématiques ont permis de créer un parc locatif de logements, l’ANAH accordant des aides majorées aux propriétaires de ces logements : 13 000 cette année. En contrepartie, elle se réserve une capacité de désignation du locataire.

Il faut vraiment s’appuyer sur une base conventionnelle et non sur l’intégralité des programmes locatifs sociaux conventionnés de l’ANAH, ce qui irait à l’encontre de l’objectif recherché.

Voilà pourquoi je vous demande de retirer cet amendement qui me paraît très peu productif.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.

M. Jean-Louis Dumont. Monsieur le ministre, j’ai l’impression que vous faites preuve parfois de frilosité. En effet n’oublions pas que des studios ou de petits logements sont loués aujourd’hui à des associations qui y logent des personnes en voie de réinsertion et faisant l’objet d’un suivi ; tout se passe bien.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Nous réalisons 13 000 logements par an, soit plus que le bilan total de l’ANAH à votre époque !

M. Jean-Louis Dumont. C’est Louis Besson qui a engagé la transformation de l’ANAH ! Pour votre part, monsieur le ministre, comme vous avez vu que le bâtiment pouvait voguer, vous avez donné l’impulsion nécessaire, et c’est très bien.

M. Michel Piron. Nous avons pris la mer !

M. Jean-Louis Dumont. Il y a eu une continuité républicaine dans l’objectif, qui honore Louis Besson et dont vous avez bénéficié.

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. C’est le mot « frilosité » que vous avez employé qui me gêne !

M. Jean-Louis Dumont. J’ai dit que je sentais une frilosité. Parfois, il faut forcer le destin, convaincre des réticences plus culturelles que d’autres.

Je regrette que vous soyez défavorable à cet amendement que nous ne retirerons pas, car nous voulons vous adresser un message politique. Il faut donner une impulsion forte à la politique de solidarité en faveur du logement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 250.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 8 et 39 et 83.

Leur adoption ferait tomber l’amendement n° 76.

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement n° 8.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Cet amendement nous permet de répondre à la préoccupation que M. Dumont nous a excellemment présentée à l’instant.

M. Michel Piron. Disons presque excellemment ! (Sourires.)

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Peut-être avec une certaine frilosité ! (Sourires.)

Mme Christine Boutin, rapporteure. Nous avons réfléchi à la façon de répondre à la préoccupation qui nous est commune.

Le texte issu du Sénat prévoit que le préfet disposera d’un pouvoir très large de proposition au demandeur d’un logement locatif social de tout logement conventionné, qu’il soit intermédiaire ou social, mais sans fournir davantage de précision. Si cette référence va dans le bon sens, nous avons estimé, après réflexion, qu’elle était inapplicable. Elle constituait presque plus un souhait qu’un instrument juridique. Puisque nous voulons, comme vous monsieur Dumont, recourir au logement privé, nous vous proposons une disposition qui constitue une véritable réponse aux enjeux qui nous sont soumis.

Cette réponse tient en deux temps : d’abord, ouvrir la possibilité de recourir aux logements privés conventionnés avec l’ANAH lorsque ceux-ci font l’objet de programmes sociaux thématiques qui correspondent à une offre locative très sociale ; ensuite offrir la possibilité de recourir à des logements donnés en location à des associations qui elles-mêmes pourront procéder à des sous-locations. Dans certains cas particuliers, il n’est en effet pas possible de louer directement à des personnes en très grande difficulté.

M. Michel Piron. Excellent amendement !

Mme Christine Boutin, rapporteure. C’est une solution équilibrée qui rendra donc possible en pratique le recours aux logements privés. Je me réjouis que cet amendement, qui a été adopté par la commission des affaires culturelles, soit cosigné par M. Le Bouillonnec et Mme Mignon.

M. le président. La parole est à Mme Annick Lepetit, pour soutenir l’amendement n° 39 de la commission des affaires économiques.

Mme Annick Lepetit. Cet amendement satisfait en partie notre préoccupation exprimée lors de l’examen de l’amendement précédent.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des lois, pour soutenir l’amendement n° 83.

M. Georges Fenech, rapporteur pour avis de la commission des lois. L’équilibre dont vient de parler Mme Boutin permettra de préserver la liberté contractuelle des bailleurs privés à laquelle nous sommes attachés. Dans la mesure où seront ainsi logées des personnes que le bailleur privé n’aura pas choisies, pour que cette attribution du logement soit possible elle devra être subordonnée à l’accord du bailleur sur les conditions d’attribution de logements.

En outre, afin d’éviter que cette précision ne restreigne à l’excès le parc locatif privé concerné, les trois rapporteurs vous proposent par ces amendements identiques, ainsi que par les amendements portant articles additionnels après l’article 2, de permettre à des organismes publics ou privés de louer les logements du parc locatif privé conventionné en vue de les affecter ensuite à des personnes reconnues prioritaires.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces trois amendements identiques ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Favorable.

Nous disposerons désormais, avec la loi portant engagement national pour le logement et ces nouvelles dispositions, premièrement, d’un conventionnement très large et libre – nous avons besoin en effet de passer des conventions avec le secteur privé – ; deuxièmement, avec une déduction fiscale de 30 % à 45 %, d’un outil qui permettra de soutenir fortement les logements destinés à des publics connaissant de très graves difficultés ; troisièmement, ces amendements ouvriront le dispositif aux associations qui peuvent faire le lien entre le propriétaire et le locataire ; quatrièmement, dans ce cas, le droit de réservation du préfet sera à nouveau établi. Nous aurons ainsi atteint un équilibre nouveau, qui permettra de développer puissamment l’accueil dans le parc privé social.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 8, 39 et 83.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, l’amendement n° 76 tombe.

Nous en venons à deux amendements identiques, nos 9 et 84.

La parole est à Mme la rapporteure, pour défendre l’amendement n° 9.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Cet amendement, qui est véritablement essentiel, répond à une préoccupation que nous partageons sur tous les bancs de l’Assemblée.

Le droit au logement doit aller de pair avec un accompagnement social. Le haut comité pour le logement des personnes défavorisées a montré combien le logement, s’il était nécessaire, était, dans bien des cas, insuffisant. Cet amendement a donc pour objectif d’obliger le préfet, quelle que soit la procédure concernée – hébergement ou logement –, d’informer par écrit les personnes auxquelles une proposition de logement ou d’hébergement a été adressée, sur tous les dispositifs d’accompagnement social qui sont mis en œuvre dans son département.

J’insiste une nouvelle fois sur l’importance de cet amendement qui constitue un apport de l’Assemblée nationale à l’excellent travail du Sénat.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des lois, pour soutenir l’amendement n° 84.

M. Georges Fenech, rapporteur pour avis de la commission des lois. Je n’ai rien à ajouter, monsieur le président, à la défense de cet amendement par Mme la rapporteure.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.

M. Jean-Louis Dumont. Je souhaiterais obtenir une explication complémentaire de votre part, madame la rapporteure.

Vous avez souligné, avec raison, que les personnes attributaires d’un logement devaient être informées des possibilités d’un accompagnement. Pourtant, ce n’est pas l’État qui le mettra en œuvre, mais les services sociaux, lesquels dépendent dorénavant du conseil général. Ne faudrait-il pas que le courrier dans lequel le préfet informe le destinataire sur l’accompagnement social soit cosigné par le président du conseil général ? Imaginons le cas d’un différend entre le préfet et le président du conseil général.

Votre objectif est louable ; il constitue une avancée. Il va d’ailleurs dans le même sens que certains des amendements que nous avons déposés. Néanmoins ne serait-il pas préférable de lier l’action de l’État et celle des collectivités locales ?

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Votre remarque est pertinente. Toutefois, je ne suis pas très favorable à une telle inscription dans la loi. J’ignore ce qui se passe dans votre département, mais nous ne sommes plus en 1982, et les préfets ne sont plus en opposition avec les conseils généraux.

Dans les Yvelines, par exemple, les relations entre le préfet et le président du conseil général sont cordiales et ils sont habitués à travailler ensemble.

Il est bon de nous exprimer sur ce point, ne serait-ce que pour les encourager, les uns et les autres, à resserrer les liens, mais je ne vois pas la nécessité d’en préciser les modalités dans le texte, lesquelles peuvent varier d’un département à l’autre. Il convient de réaffirmer que c’est bien le préfet qui est le garant de l’opposabilité du droit au logement, mais tenons-en nous là. Cela ne veut pas dire que le législateur ne veut pas qu’il y ait des liens entre le préfet et le président du conseil général.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 9 et 84.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je vous informe que les amendements nos 309 rectifié et 112, ainsi que les sous-amendements qui s’y rapportent, seront discutés après l’article 2.

J’en viens donc à deux amendements identiques, nos 10 et 40. Il s’agit d’amendements rédactionnels déposés respectivement par la commission des affaires culturelles et la commission des affaires économiques.

Le Gouvernement est favorable à ces amendements.

Je les mets aux voix par un seul vote.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 11 et 41.

La parole est à Mme la rapporteure, pour défendre l’amendement n° 11.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Cet amendement vise à apporter une précision. En effet, pour lever toute ambiguïté, la commission de médiation devra saisir automatiquement le préfet des cas pour lesquels il devra prévoir l’accueil dans une structure d’hébergement, un établissement ou un logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelier à vocation sociale.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 11 et 41.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Les amendements identiques, nos 12 et 42 sont de clarification L’avis du Gouvernement est favorable.

Je mets aux voix par un seul vote ces deux amendements.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 2, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

4

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Ce soir, à vingt-deux heures, troisième séance publique :

Suite de la discussion du projet de loi, n° 3656, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale :

Rapport, n° 3671, de Mme Christine Boutin, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,

Avis, n° 3675, de M. Jérôme Bignon, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire,

Avis, n° 3685, de M. Georges Fenech, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures quarante.)