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DÉLÉGATION POUR L'UNION EUROPÉENNE

COMPTE RENDU N° 42

Réunion du mardi 13 mai 2003 à 16 heures 15

Présidence de M. Pierre Lequiller, Président

I. Examen du rapport d'information de M. Daniel Garrigue sur les conditions d'application de la directive « oiseaux » du 2 avril 1979 en Europe

M. Daniel Garrigue, rapporteur, a préalablement rappelé que, compte tenu des polémiques auxquelles la directive du 2 avril 1979, dite directive « oiseaux », a donné lieu et du sentiment de nombreux chasseurs français de ne pas être traités de la même façon que les autres chasseurs européens, il avait tout d'abord proposé la constitution d'une commission d'enquête. Après quelques hésitations, il est finalement apparu que la Délégation pour l'Union européenne constituait le cadre le plus opportun pour suivre ce dossier.

Le rapport a été réalisé dans des délais relativement courts, car il lui avait été demandé de le présenter avant l'examen du projet de loi sur la chasse, qui, finalement, ne comporte pas de dispositions sur le calendrier de la chasse.

Du fait des délais accordés, des missions n'ont pu avoir lieu que dans les quatre pays du Sud de l'Europe (Portugal, Espagne, Italie Grèce) et en Belgique, pour rencontrer les services de la Commission européenne. Les contacts ont été noués avec les ministères en charge de la chasse, les organisations de chasseurs, ainsi que les organismes d'observation scientifique des oiseaux. Dans un second temps, il serait probablement intéressant d'organiser des rencontres avec les associations de protection de la nature, pour examiner, pays par pays, si des compromis ont pu être trouvés.

Etudiant, dans un premier temps, le contexte communautaire de ce dossier, le rapporteur a souligné que la directive de 1979 avait été adoptée selon une procédure dérogatoire et qu'elle se situait dans une perspective de conservation des espèces, admettant la pratique de la chasse, définie comme une « exploitation admissible », et que d'ailleurs son annexe II définissait les espèces chassables.

Il a tenu à observer que, contrairement aux idées reçues, la Commission européenne avait souvent adopté une position mesurée et que les difficultés sont venues de l'interprétation de la directive par la Cour de justice des Communautés européennes, à l'instigation du juge administratif français.

Effectivement, trois décisions de la Cour de justice seulement concernent le problème des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse et la plus importante, celle du 19 janvier 1994, est intervenue à la suite d'une question préjudicielle du tribunal administratif de Nantes. Cet arrêt a introduit la notion de « protection complète » des oiseaux sauvages, alors qu'auparavant, le juge administratif se référait au critère du « maximum d'activité migratoire ». L'interprétation innovante de la Cour de justice aboutit à une protection systématique des individus, ne prenant pas en compte l'état de conservation des espèces.

Le juge communautaire a également introduit deux autres notions : le risque de confusion et le risque de dérangement. Cette dernière notion n'a pas encore été totalement exploitée par la jurisprudence, mais elle pourrait se révéler périlleuse pour la chasse.

Il importe d'observer que deux des trois décisions de la Cour de justice concernaient la France (la troisième visait l'Italie), ce qui montre bien que, dans les autres pays membres, la Commission européenne a plutôt cherché à développer le dialogue.

Le rapporteur a ensuite fait un rapide bilan des pratiques observées dans les autres Etats membres. Il apparaît que des difficultés peuvent être consta tées partout et se traduisent à la fois par des contentieux au niveau national, en particulier en Grèce, et par des procédures en manquement initiées par la Commission européenne.

Mais on peut noter également de nombreuses souplesses dans l'application de la directive. Ainsi, le Portugal a des dates précoces d'ouverture de la chasse et autorise la chasse aux oiseaux de passage jusqu'à la fin février. En Espagne, la compétence appartient aux dix-sept communautés autonomes, qui appliquent également de façon souple la directive. Ainsi, dans la région de Murcie, la chasse de certains oiseaux de passage est autorisée jusqu'au début du mois de mars. La Grèce, quant à elle, admet fréquemment des dates de fermeture allant jusqu'à la fin du mois de février. La situation italienne est spécifique, car, de par la loi nationale, la chasse doit impérativement se terminer au 31 janvier. Mais selon les indications recueillies lors de la mission en Italie, cette loi devrait être prochainement modifiée.

Dans les Etats autres que ceux de l'Europe du Sud, il convient de signaler que la Belgique autorise la chasse au pigeon ramier jusqu'au 28 février, et qu'en Allemagne et en Autriche, la bécasse des bois et la tourterelle turque sont chassées très tardivement. Des pratiques similaires ont manifestement cours également en Pologne et en Hongrie. On peut enfin indiquer qu'au Royaume-Uni, le pigeon ramier est considéré comme nuisible.

Les déplacements dans les pays de l'Europe du Sud ont aussi permis de noter que l'Espagne et l'Italie avaient recours à un nombre de dérogations, en application de l'article 9 de la directive, sensiblement supérieur à celui constaté en France. Il n'a pas été possible d'apprécier exactement la portée exacte de ces dérogations, mais, en tout état de cause, elles demeurent dans le cadre de la directive qui n'autorise que le prélèvement de quantités limitées.

M. Daniel Garrigue a alors estimé que la situation française pouvait être mise en perspective. On constate ainsi, premièrement, que les dates de chasse applicables sont souvent en retrait par rapport aux autres Etats européens et, deuxièmement, que le juge administratif français développe une jurisprudence très stricte. Ce dernier point apparaît particulièrement dans la jurisprudence récente, qui fait droit au risque de confusion avec les espèces non chassables, alors que la Cour de justice des Communautés européennes n'évoque ce risque qu'entre espèces chassables, et qui opère un tri incompréhensible dans les documents scientifiques disponibles. Le Conseil d'Etat a ainsi accepté de prendre en compte le rapport de M. Jean-Claude Lefeuvre et a, en revanche, écarté le rapport de M. Georges Dutruc-Rosset, plus récent et s'appuyant pourtant sur les documents du comité ORNIS.

La principale porte de sortie est manifestement liée à la production de nouvelles données scientifiques et il faut donc se féliciter de la création récente de l'Observatoire national de la faune sauvage et de ses habitats.

Au terme de cet exposé, le rapporteur a souhaité formuler trois propositions.

En premier lieu, les données scientifiques apparaissent manifestement insuffisantes, du fait du caractère non systématique de la collecte, d'un confinement dans un cadre national trop restreint, de méthodologies variables et de l'utilisation de méthodes traditionnelles, se limitant bien souvent à l'observation et au baguage.

Ces limites sont d'autant plus regrettables que l'impératif de nouvelles données scientifiques est accru par les conséquences de l'évolution climatique et de la désertification rurale. Il apparaît, en effet, que certaines espèces - le pigeon ramier, le canard colvert, la grive (dans le sud de l'Espagne) - commencent à se sédentariser. De ce fait, les dispositions de la directive les concernant semblent de plus en plus inadaptées, d'autant que la sédentarisation a pour corollaire une croissance démographique de ces espèces.

Il serait donc utile de dépasser le cadre national de l'Observatoire de la faune sauvage et de constituer un réseau d'observation à l'échelle européenne, mettant en œuvre une méthodologie unifiée, qui pourrait s'inspirer des techniques nord-américaines, fondées sur l'évolution énergétique des oiseaux.

Un problème fondamental serait le financement de ce réseau et l'on peut rappeler, à cet égard, que l'Observatoire français ne dispose pas d'un véritable budget, d'autant que le timbre « gibier d'eau » a été supprimé en 2000. Il serait peut être opportun de demander une contribution à l'ensemble des chasseurs et il pourrait être intéressant d'envisager un financement dans le cadre du sixième programme-cadre européen pour des actions de recherche (le sixième PCRD), dont l'un des volets prioritaires est le développement durable.

En deuxième lieu, les nouvelles données scientifiques pourraient conforter la demande de révision des nouveaux concepts introduits par la jurisprudence. Cet effort a déjà été engagé par le « guide interprétatif » de la directive, que la Commission européenne s'apprête à publier prochainement, et qui devrait permettre d'atténuer les conséquences de la notion de protection complète, grâce à l'autorisation du chevauchement sur une décade des périodes de vulnérabilité et des périodes de chasse. La notion de décade permettrait ainsi de prendre en compte la variabilité des données biologiques.

En troisième lieu, M. Daniel Garrigue a estimé qu'il serait préférable de substituer à la directive communautaire une convention internationale permettant de couvrir l'ensemble des zones de migration concernées, comme c'est le cas en Amérique du Nord. Cette convention fixerait un certain nombre d'objectifs - au premier rang desquels la conservation des espèces - et des contraintes. Il est en effet paradoxal que les oiseaux soient protégés tant qu'ils sont dans l'espace de l'Union européenne et qu'ils cessent de l'être dès qu'ils en sortent. La convention AEWA (african-eurasian migratory water bird agreement), résultant de l'accord de La Haye du 16 juin 1995, portant sur le gibier d'eau migrateur - non ratifiée par la France et par l'Union européenne - constitue à cet égard une première pierre.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

Le Président Pierre Lequiller a demandé au rapporteur si la directive permettait de modifier les dates de chasse et a souhaité des précisions sur les causes des contentieux français.

Le rapporteur a indiqué que la directive ne comportait pas de date fixe. Il a ajouté que la principale difficulté reposait sur l'application très stricte de la notion de « protection complète », élaborée par la Cour de justice des Communautés européennes à la suite d'une question préjudicielle posée par le tribunal administratif de Nantes et dont l'application a été rendue encore plus rigoureuse par la jurisprudence française. Par différence, les gouvernements des autres Etats membres ont préféré, dans l'ensemble, à la voie contentieuse ouverte par des questions préjudicielles, la recherche de compromis avec la Commission - dont la position est plus mesurée que celle de la Cour de justice. On observe, en outre, que les associations de protection de la nature sont en France plus actives, et que le juge y exerce un contrôle plus attentif et plus approfondi. Quant aux pays de l'Europe du Nord, ils ont une réglementation traditionnellement plus contraignante.

M. Jacques Myard a demandé sur quels fondements juridiques le juge français a établi sa jurisprudence et si la directive de 1979 n'était pas trop floue et n'intervenait pas en fait dans un domaine relevant davantage de la compétence nationale.

M. Daniel Garrigue a rappelé que les trois critères principaux retenus par le juge sont « la protection complète », « le risque de confusion » et « le risque de dérangement ». Il a ajouté que la directive se bornait à interdire la chasse pendant les périodes de reproduction et de migration. Il a également souligné sa préférence pour l'élaboration d'une convention internationale couvrant l'ensemble de l'aire de migration des oiseaux.

M. Jérôme Lambert a observé que les difficultés posées par les limites territoriales de la réglementation communautaire n'existaient pas seulement pour les oiseaux, mais dans tous les domaines. Il s'est demandé si les problèmes soulevés en France ne reposaient pas principalement sur la difficulté à prendre des décisions politiques découlant d'une approche scientifique approfondie de la question. En effet, la détermination des périodes de vulnérabilité varie selon les époques et les endroits et exige des études scientifiques rigoureuses. Cela étant, la conduite de telles études n'empêcherait sans doute pas que le débat sur la fixation des dates de chasse en France perdure.

Le rapporteur a précisé que le comité ORNIS, placé auprès de la Commission, était chargé de la collecte des données scientifiques à partir notamment, mais pas exclusivement, de données nationales. Il a indiqué que le Conseil d'Etat a choisi d'écarter certaines données du comité ORNIS au profit de données, plus strictes, contenues dans le rapport Lefeuvre. Il a estimé qu'en réalité, le Conseil d'Etat n'avait pas de véritable doctrine en la matière. Il a souligné qu'au niveau communautaire, il convenait à la fois de poursuivre le développement de données scientifiques et de faire aboutir l'élaboration d'un « guide interprétatif ». Il a jugé nécessaire, plus largement, de promouvoir la conclusion d'une convention internationale sur la conservation des oiseaux migrateurs, couvrant tout le territoire de migration.

M. Jacques Myard a évoqué l'idée de réformer la directive dans le sens d'une plus grande précision. Il a estimé que le traitement de la question des oiseaux migrateurs constituait une claire illustration d'une dérive plus générale conduisant au « gouvernement des juges ».

Le Président Pierre Lequiller s'est déclaré favorable à l'idée d'une convention internationale portant sur les oiseaux migrateurs. Il a estimé néanmoins qu'un texte européen restait nécessaire, et que l'on pourrait par conséquent envisager de préciser le texte de la directive.

Le rapporteur a indiqué que de précédentes tentatives de révision de la directive avaient échoué, compte tenu des positions assez divergentes des Etats membres à ce sujet. Il a précisé que les Etats du Nord de l'Union étaient souvent peu favorables à la chasse.

II. Communication de M. Christian Philip sur la XXIXe COSAC à Athènes (4-6 mai 2003)

M. Christian Philip a rendu compte des travaux de la COSAC, qui s'est déroulée les 5 et 6 mai à Athènes et où il représentait l'Assemblée nationale avec M. Marc Laffineur.

La COSAC a entendu M. Costantinos Simitis, Premier ministre, M. George Papandreou, ministre des affaires étrangères ainsi que M. Michalis Chyssochoidis, ministre de l'ordre public, sur les perspectives de la présidence hellénique, les travaux de la Convention, et la politique d'asile et d'immigration.

Mais la majeure partie des travaux a porté sur la COSAC elle-même.

Tout d'abord, un nouveau règlement de la COSAC a enfin été adopté. A l'avenir, la COSAC adoptera ses contributions à la majorité qualifiée des trois quarts, représentant 50 % des droits de vote, si un consensus n'a pu être trouvé au préalable. A l'initiative de la délégation danoise, un accord s'est dégagé sur l'établissement d'un code de conduite non contraignant définissant des standards minima en vue d'un contrôle parlementaire national efficace des gouvernements en matière européenne.

La COSAC a également décidé la création d'un secrétariat permanent. Dans la perspective d'un compromis entre différentes conceptions de son rôle, la présidence grecque avait proposé la formule d'un secrétariat composé de personnels permanents (deux membres) et de personnels tournants (trois fonctionnaires représentant la troïka et un ou deux fonctionnaires du Parlement européen). La délégation française a proposé que le secrétariat se compose de trois fonctionnaires de la troïka, d'un fonctionnaire du Parlement européen, et d'un fonctionnaire émanant d'un parlement national et désigné pour une durée plus longue.

Dans la décision finale adoptée par la COSAC, le secrétariat sera effectivement composé de cinq membres, quatre membres détachés par les pays membres de la troïka et le Parlement européen pendant une période de dix-huit mois, et un cinquième, permanent, détaché par un des parlements nationaux.

Toutefois, malgré cet accord, plusieurs points demeurent à éclaircir, notamment la localisation et la coordination du secrétariat.

M. Christian Philip a souhaité que ce soit le représentant permanent, détaché par l'un des parlements nationaux, qui assure la coordination du secrétariat, afin d'éviter un changement de responsable tous les six mois.

En conclusion, il a jugé que la COSAC était une institution utile, dont l'efficacité demeure toutefois trop limitée. Les débats organisés à Athènes avaient un caractère très général. Il a souhaité que la COSAC soit une instance d'échange, d'information, de concertation entre les parlements nationaux sur des sujets précis. Il s'est prononcé pour une coopération renforcée entre les parlements nationaux, et pour le développement parallèle de relations bilatérales plus étroites.

Le Président Pierre Lequiller a estimé qu'il faut conserver la COSAC pour le cas où le Congrès européen ne serait pas institué. Par ailleurs, il a fait part aux membres de la Délégation de son souhait de renforcer la coopération entre les parlements nationaux, afin que la Délégation se prononce sur les principaux textes européens en connaissant la position de ces derniers. Ce travail pourrait se faire en réseau par voie électronique.

M. Jacques Myard a considéré que le Parlement européen n'avait pas sa place dans la COSAC, car celui-ci fonctionne selon une optique institutionnelle européenne, qui n'est évidemment pas celle des parlements nationaux. Il a exprimé son accord avec la proposition du Président Pierre Lequiller sur le renforcement des relations entre les parlements nationaux, puis s'est élevé contre la volonté du Parlement européen de se reconnaître seul dépositaire de la légitimité démocratique au sein de l'Union.

Après que le Président Pierre Lequiller ait observé que le comportement des députés européens se caractérise souvent par leur réticence à l'égard de certaines initiatives sur le rôle des parlements nationaux, M. Christian Philip a estimé nécessaire que les parlementaires nationaux puissent aussi se réunir entre eux. La présence du Parlement européen à la COSAC est d'autant plus ambiguë que ses représentants se font relayer par certains parlementaires nationaux. Cependant, la suppression de la présence des députés européens au sein de la COSAC, actuellement prévue par un protocole annexé au traité, ne pourrait se faire que par le biais d'une disposition de la future Constitution de l'Europe.

III. Examen des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

Sur le rapport du Président Pierre Lequiller, la Délégation a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

Point A

Aucune observation n'ayant été formulée, la Délégation a approuvé les cinq textes suivants :

¬ Pêche

- proposition de décision du Conseil relative à la conclusion, entre la Communauté européenne et la Roumanie, d'un accord concernant les produits de la pêche sous la forme d'un protocole additionnel à l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la Roumanie, d'autre part (document E 2254).

¬ Politique générale

- proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1260/1999 portant dispositions générales sur les Fonds structurels (document E 2255).

¬ Questions financières et fiscales

- communication de la Commission au Conseil relative à une demande d'autorisation introduite par l'Italie conformément à la procédure prévue par l'article 8, paragraphe 4 de la directive 92/81/CEE, en vue d'appliquer un taux différencié de droits d'accises en faveur du gazole utilisé par des véhicules commerciaux (document E 2242) ;

- proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur l'harmonisation des obligations de transparence concernant l'information au sujet des émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé et modifiant la directive 2001/34/CE (document E 2257).

¬ Transports

- proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux exigences en matière d'assurance applicables aux transporteurs aériens et aux exploitants d'aéronefs (document E 2114).

Point B

¬ Commerce extérieur

Sur le rapport de M. François Guillaume, la Délégation a examiné les deux textes suivants :

- proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CEE) nº 2454/93 de la Commission fixant certaines dispositions d'application du règlement (CEE) nº 2913/92 du Conseil établissant le code des douanes communautaires (document E 2246) ;

M. François Guillaume a indiqué que ce texte a pour objet de relever de 50 000 à 500 000 euros le seuil des droits de douane à partir duquel la Commission européenne resterait compétente pour décider du remboursement ou d'une remise des droits de douane trop perçus à la suite à d'une erreur commise par les autorités douanières. Le nouveau règlement confie donc aux Etats membres le soin d'exercer à titre principal cette compétence, une évolution contestée par la France car elle risque de ne pas garantir l'uniformité nécessaire à la bonne application du droit communautaire. En conséquence, après les observations de M. Daniel Garrigue, du Président Pierre Lequiller et du rapporteur, la Délégation s'est opposée à l'adoption de ce texte.

- proposition de règlement du Conseil portant ouverture et mode de gestion d'un contingent tarifaire pour les importations de conserves de thon relevant des codes NC 1604 14 11, 1604 14 18 et 1604 20 70 (document E 2249).

M. François Guillaume a indiqué que ce texte a pour objet de transcrire dans le droit communautaire un accord intervenu entre les Philippines et la Thaïlande, d'une part, et l'Union européenne, d'autre part, sur la base d'un arbitrage rendu dans le cadre de l'OMC, relatif aux importations de conserves de thon. Les deux pays asiatiques ont contesté lors de la dernière Conférence ministérielle de l'OMC le régime d'accès à droits nuls dont bénéficient ces importations lorsqu'elles proviennent des Etats ACP. L'arbitrage rendu en décembre 2002 préconise l'ouverture par l'Union d'un contingent tarifaire annuel avec un droit réduit de 12 % pour ces importations, que la proposition de règlement vise à instituer pour une durée de cinq ans en réservant 52 % du quota à la Thaïlande et 36 % aux Philippines. Conformément à la proposition du rapporteur, la Délégation a approuvé ce texte.

¬ Justice et affaires intérieures

Sur le rapport de M. Thierry Mariani, la Délégation a examiné les deux textes suivants :

- proposition de décision-cadre du Conseil relative aux attaques visant les systèmes d'information (document E 2020) ;

M. Thierry Mariani a précisé que ce texte a pour objet d'harmoniser les infractions et les sanctions relatives aux attaques contre les systèmes d'information. La disparité des législations nationales dans ce domaine freine en effet la lutte contre cette « cybercriminalité ».

Il a rappelé que la proposition impose aux Etats membres d'incriminer l'accès illicite à des systèmes d'information, l'atteinte à l'intégrité d'un système et l'atteinte à l'intégrité des données. Le fait que ces actes aient été commis dans le cadre d'une organisation criminelle devra constituer une circonstance aggravante, et les Etats membres devront faire en sorte que les personnes morales puissent être tenues responsables de ces comportements. M. Thierry Mariani a souligné que le texte, dont la portée a été sensiblement réduite au cours des discussions au sein du Conseil, ne soulève pas de difficulté particulière, et a proposé à la Délégation de l'approuver. La Délégation a approuvé ce texte.

- proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux précurseurs de drogues (document E 2113 rect).

M. Thierry Mariani a rappelé que les précurseurs de drogue sont des produits chimiques qui peuvent être utilisés aussi bien dans la production de préparations légales (des médicaments, par exemple) que de drogues illégales, telles que l'héroïne ou la cocaïne. Le commerce de ces substances doit être contrôlé pour éviter qu'elles ne soient utilisées de façon détournée dans la fabrication clandestine de drogues ou de substances psychotropes.

Cette proposition de règlement vise à transformer la directive 92/109/CE du 14 décembre 1992 relative à la fabrication et à la mise sur le marché de certaines substances utilisées pour la fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes en un règlement, et à fusionner cet instrument avec le règlement n° 3677/90 du 13 décembre 1990 relatif aux mesures à prendre afin d'empêcher le détournement de certaines substances pour la fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes. Cette transformation simplifiera la législation existante et permettra une modification simultanée de ces deux textes. Il a indiqué que la proposition comporte également des dispositions sur l'agrément des opérateurs, le marquage de ces substances classifiées et la procédure de surveillance. M. Thierry Mariani a souligné que le texte ne soulève pas de difficultés particulières et a proposé à la Délégation de l'approuver.

Le Président Pierre Lequiller a estimé que cette proposition constituait un exemple concret de l'apport de l'Union européenne dans la lutte contre la criminalité et s'est félicité de son adoption prochaine.

Suivant la proposition du rapporteur, la Délégation a approuvé ce texte.

¬ Droit des sociétés

- proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant les offres publiques d'acquisition (document E 2115).

Le Président Pierre Lequiller a indiqué que les négociations visant à créer un cadre communautaire pour les offres publiques d'achat (OPA) durent depuis quatorze ans. Le 6 juin 2001, grâce aux travaux du comité de conciliation, les trois institutions européennes (Commission, Conseil et Parlement) sont parvenues à un accord reposant sur quatre piliers : une information renforcée des salariés, la clarification des modalités de défense autorisées de l'entreprise visée par l'OPA, un délai de transposition de quatre ans et une déclaration de la Commission sur les travaux d'un groupe d'experts sur l'égalité de traitement des actionnaires, qui a remis ses conclusions en mars 2002.

Lorsqu'il a été saisi de ce compromis, le Parlement européen s'est prononcé, le 4 juillet 2001, par 273 voix pour, 273 voix contre et 22 abstentions, ce qui a entraîné le rejet du texte. L'Allemagne a été le principal artisan de ce rejet, car les milieux industriels et les autorités avaient constaté que les entreprises allemandes étaient vulnérables aux OPA dites hostiles, la législation nationale ne prévoyant plus certains garde-fous existant dans d'autres Etats membres.

Le nouveau texte proposé par la Commission n'entrera en vigueur qu'en 2005, avec une transition de trois ans avant que l'accord des actionnaires ne soit obligatoire pour qu'une entreprise puisse prendre des mesures de défense contre une OPA hostile. Une « clause de révision » prévoit un examen des effets de la directive cinq ans après son entrée en vigueur.

Par ailleurs, la directive ne procède qu'à une harmonisation minimale : elle autorise en effet les Etats membres à adopter des « conditions supplémentaires et des dispositions plus strictes » pour réglementer les offres.

Comme la proposition précédente, le nouveau texte dispose que lorsqu'une personne prend le contrôle d'une société à la suite d'une acquisition, elle est tenue de lancer une offre à tous ses détenteurs, pour la totalité de leurs titres, à un prix équitable. Cette disposition permet d'organiser la protection des actionnaires minoritaires.

Enfin, après l'annonce de l'offre, la direction de la société visée par l'OPA ne peut, en période d'offre, prendre des mesures défensives pour contrer l'offre qu'avec l'autorisation préalable de l'assemblée générale.

Les autorités françaises considèrent que ce projet est globalement satisfaisant, car il reprend les acquis du précédent texte, soutenu par notre pays, et l'enrichit de plusieurs recommandations positives formulées par le rapport du groupe d'experts sur le droit des sociétés. En outre, il préserve les droits de vote multiples , élément important du capitalisme à la française, notamment pour les sociétés familiales.

L'Allemagne reste hostile à cette proposition de directive, car elle souhaite toujours que les organes dirigeants de la société puissent prendre des mesures de défense anti-OPA sans avoir à recueillir l'aval de l'assemblée générale.

La présidence grecque a proposé un compromis qui maintient le principe de la suspension des droits de vote multiples pendant la période de l'offre d'achat. Mais ces derniers sont définis comme excluant les droits de vote doubles. Le compromis satisfait la France. Il en est de même de la Commission européenne.

Les négociations sont donc en bonne voie au Conseil, mais une fois encore la position du Parlement européen sera décisive. Le rapporteur, M. Lehne, a présenté un projet de texte favorable au maintien du recours systématique à l'assemblée générale des actionnaires avant toute adoption d'une mesure de défense et reprenant le second compromis de la présidence grecque limitant la suspension aux seuls droits de vote multiples. La position de la France est donc confortée à ce stade de la procédure.

Conformément aux propositions du rapporteur, la Délégation a approuvé ce texte.

¬ Santé

Sur le rapport du Président Pierre Lequiller, la Délégation a examiné les deux textes suivants :

- proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des procédures communautaires pour l'autorisation, la surveillance et la pharmacovigilance en ce qui concerne les médicaments à usage humain et à usage vétérinaire et instituant une agence européenne pour l'évaluation des médicaments. Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2001/83/CE instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain. Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2001/82/CE instituant un code communautaire relatif aux médicaments vétérinaires (document E 1902) ;

Le Président Pierre Lequiller a indiqué que ces textes ont pour objet d'assurer un niveau élevé de protection de la santé des citoyens européens, d'achever le marché intérieur des produits pharmaceutiques, de répondre au défi de l'élargissement et de rationaliser la réglementation applicable en ce domaine.

M. François Guillaume s'est interrogé sur le risque de double emploi de l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments avec certains organes existants.

La Délégation a approuvé ce texte.

- proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l'établissement de normes de qualité et de sécurité pour le don, l'obtention, le contrôle, la transformation, le stockage et la distribution des tissus et cellules humains (document E 2050).

Le Président Pierre Lequiller a indiqué que ce texte, qui accroît la sécurité et la qualité des produits utilisés, se justifiait par l'augmentation des traitements thérapeutiques fondés sur l'utilisation de tissus et de cellules d'origine humaine.

La Délégation a approuvé ce texte.

¬ Transports

Sur le rapport de M. Christian Philip, la Délégation a examiné les deux textes suivants :

- proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant les exigences de sécurité minimales applicables aux tunnels du réseau routier transeuropéen (document E 2189) ;

Ce texte comprend des dispositions concernant le champ des compétences et des responsabilités des organismes chargés de la gestion, de l'exploitation et de l'inspection des tunnels ainsi que des prescriptions en matière de construction et d'exploitation.

M. Christian Philip a précisé qu'au Conseil, les Etats membres approuvaient le principe de la directive. Cependant, la France considère que la Commission n'a pas pris en compte les spécificités de chaque tunnel en termes techniques et de type de trafics et que seuls deux acteurs majeurs devraient être identifiés en matière de sécurité : le maître de l'ouvrage et l'autorité administrative.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la Délégation a approuvé ce texte, sous réserve que les observations formulées par la France soient prises en compte.

- Communication de la Commission concernant les relations entre la Communauté et les pays tiers dans le domaine de l'aviation. Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la négociation et la mise en œuvre d'accords relatifs à des services aériens entre les Etats membres et les pays tiers (document E 2235).

M. Christian Philip a souligné que ce texte vise à fixer le cadre des relations juridiques entre Etats membres et Union européenne dans le domaine de l'aviation civile.

La Cour de justice des Communautés européennes considère que les relations avec les pays tiers relèvent de la compétence exclusive de l'Union européenne. Aussi, la Commission a-t-elle demandé au Conseil un mandat de négociations pour conclure avec les Etats tiers un accord général sur l'aviation civile.

La proposition de règlement pose cependant un problème juridique, parce qu'elle paraît reconnaître aux Etats membres une capacité de négociations avec les pays tiers. Elle évoque en effet la notification à la Commission d'accords qui pourraient être passés par les Etats membres dans le domaine de l'aviation civile. A suivre la jurisprudence de la Cour, les Etats membres ne sauraient pourtant continuer à négocier des accords bilatéraux, fussent-ils notifiés à la Commission et dussent-ils s'inscrire dans le cadre de l'accord global qu'elle aurait passé.

La question de la légalité même du règlement en préparation mérite donc d'être approfondie. Son adoption n'étant prévue qu'au Conseil « Transports » des 5 et 6 juin, un délai de réflexion subsiste.

En conséquence, la Délégation a différé sa position dans l'attente d'un complément d'information.

Par ailleurs, la Délégation a pris acte, selon la procédure d'examen en urgence, de l'approbation du texte suivant :

- proposition de décision du Conseil relative à la signature de l'accord de coopération scientifique et technique entre la Communauté européenne et l'Etat d'Israël (document E 2259).

Le Président Pierre Lequiller a indiqué que ce texte a pour objet de renouveler l'accord qui associait Israël au cinquième programme-cadre de recherche adopté par la Communauté européenne, pour la période 2002-2006. Il a jugé anormal que la Délégation ne puisse examiner ce texte de manière approfondie, parce que la Commission ne l'a transmis au Conseil que le 30 mars 2003, alors que l'accord a été paraphé le 17 décembre 2002, qu'il a été reçu à l'Assemblée nationale le 30 avril 2003 et inscrit au Conseil « Compétitivité » du 13 mai 2003. Les institutions communautaires devraient être rappelées, à ce sujet, au respect du délai de six semaines fixé par le protocole d'Amsterdam sur le rôle des parlements nationaux dans l'Union européenne.

M. Daniel Garrigue a approuvé ces remarques relatives à la procédure, et exprimé son désaccord, sur le fond, avec ce texte. Il a rappelé que l'Etat d'Israël ne respecte pas certaines résolutions des Nations unies depuis de nombreuses années, pas plus que les accords d'Oslo. L'Union européenne devrait jouer un rôle plus important dans la résolution du conflit israélo-palestinien et s'engager plus fortement, comme elle avait commencé à le faire lors de la déclaration de Venise du 13 juin 1980. Cet accord aurait dû fournir l'occasion de rappeler cette position et de peser davantage sur cette situation.

Enfin, la Délégation a pris acte de l'accord tacite de l'Assemblée nationale, en vertu d'une procédure mise en œuvre en 2000, du texte suivant :

- lettre de la Commission européenne du 4 février 2003 relative à une demande de dérogation fiscale présentée par l'Allemagne conformément à l'article 30 de la sixième directive du Conseil, du 17 mai 1977, en matière de TVA (JO L 145 du 13 juin 1977, p. 1) (document E 2211).