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DÉLÉGATION POUR L'UNION EUROPÉENNE

COMPTE RENDU N° 52

Réunion du mardi 1er juillet 2003 à 14 heures 30

Présidence de M. Pierre Lequiller, Président

I. Communication sur la fin des travaux de la Convention sur l'avenir de l'Europe

Le Président Pierre Lequiller a informé les membres de la Délégation que la Convention européenne se réunira les 4, 9 et 10 juillet prochain s pour achever ses travaux, en examinant la partie III relative aux politiques de l'Union, du projet de traité instituant une Constitution pour l'Europe. Le Président Valéry Giscard d'Estaing devrait solennellement remettre à Rome, à la Présidence de l'Union, le projet de Constitution européenne le 18 juillet.

Il a ensuite fait part de son souhait de déposer un rapport d'information sur les travaux de la Convention européenne, dans le cadre de la mission générale d'information de la Délégation. Ce rapport comprendrait deux parties :

- l'une, présentant les grandes lignes du projet de traité constitutionnel avec des annexes reprenant les travaux des deux conventionnels représentant l'Assemblée nationale, ainsi que ceux de la Délégation sur le suivi des travaux de la Convention ;

- l'autre, comprenant le texte intégral du projet de traité instituant une Constitution pour l'Europe.

Ce document permettra ainsi à l'ensemble des députés de disposer, dans un document unique, des principales innovations résultant de la Convention et du projet de traité constitutionnel qui servira de base aux travaux de la Conférence intergouvernementale.

La Délégation a décidé la publication de ce rapport d'information.

II. Examen des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

Point A

Sur le rapport du Président Pierre Lequiller, la Délégation a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

Aucune observation n'ayant été formulée, la Délégation a approuvé les cinq textes suivants :

¬ Agriculture

- proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil fixant les règles spécifiques d'organisation des contrôles officiels concernant les produits d'origine animale destinés à la consommation humaine (document E 2067) ;

- proposition de règlement du Conseil portant organisation commune de marché dans le secteur du tabac brut (version codifiée) (document E 2299).

¬ Industrie

- proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives au matériel électrique destiné à être employé dans certaines limites de tension (version codifiée) (document E 2300).

¬ PESC et relations extérieures

- proposition de décision du Conseil concernant la conclusion d'un accord visant à renouveler l'accord de coopération scientifique et technologique entre la Communauté européenne et l'Ukraine (document E 2298).

¬ Questions fiscales

- proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne les règles relatives au lieu de livraison du gaz et de l'électricité (document E 2165).

Point B

¬ Justice et affaires intérieures

Sur le rapport de M. Thierry Mariani, la Délégation a examiné une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la prévention du blanchiment des capitaux par la coopération douanière (document E 2052). Le rapporteur a mentionné la participation des services douaniers de tous les Etats membres, du 1er septembre 1999 au 29 février 2000, à une opération de surveillance conjointe destinée à repérer les flux transfrontaliers d'argent liquide. Cette opération, baptisée « Moneypenny », a permis d'identifier un nombre considérable de mouvements transfrontaliers d'espèces, ainsi que d'autres actifs liquides. Elle a fait l'objet d'un rapport concluant à la nécessité d'adopter une approche communautaire des contrôles sur les mouvements transfrontaliers d'argent liquide, en vue de rendre plus efficace la lutte contre le crime organisé et le terrorisme international.

M. Thierry Mariani ensuite précisé l'objet de la proposition de règlement, qui pose le principe de l'obligation de déclaration, dans un formulaire uniforme, des mouvements d'argent liquide aux frontières extérieures, lorsque leur montant est égal ou supérieur à 15 000 euros. La vérification du respect de cette obligation est confiée aux autorités douanières, qui auraient le pouvoir de soumettre à des mesures de contrôle les personnes et leurs bagages, d'interroger les personnes sur l'origine des sommes d'argent liquide découvertes à cette occasion et de décider de la retenue, par voie administrative, desdites sommes d'argent dans la limite de trois jours ouvrables (délai au-delà duquel elle pourrait être prorogée en application du droit national).

M. Thierry Mariani a également précisé que la proposition de règlement prévoit la transmission de plein droit des informations recueillies lors du contrôle aux services douaniers de l'Etat membre de résidence, d'origine et de destination de la personne concernée, aux autorités anti-blanchiment des mêmes Etats membres ainsi que, le cas échéant, à la Commission. La transmission à des pays tiers serait également possible si les mouvements d'argent liquide concernés sont présumés servir à des groupes terroristes.

Puis il a indiqué que plusieurs Etats membres, la France en particulier, tout en souhaitant que soient mis en place de tels contrôles, ont contesté la base juridique retenue par la Commission. Les obligations prévues par ce texte dépassent en effet le cadre du traité instituant la Communauté européenne et ne pourraient être fixées que par un texte du troisième pilier, fondé sur l'article 29 TUE. Cette analyse a été confirmée par un avis rendu par le service juridique du Conseil le 18 juillet 2002, qui conclut que la proposition dans son ensemble, tant pour ce qui concerne le système de contrôle que pour ce qui concerne l'échange d'informations, n'entrent pas dans le champ d'application du traité CE. La France est, en outre, favorable à un abaissement du seuil à 10 000 euros, montant correspondant à la moyenne des seuils dans les Etats membres et au seuil existant aux Etats-Unis (10 000 dollars).

A l'issue de l'examen de ce texte, la Délégation a adopté les conclusions suivantes :

La Délégation pour l'Union européenne,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la prévention du blanchiment des capitaux par la coopération douanière [COM (2002) 328 final, E 2052],

1. Appelle à un renforcement des dispositifs de contrôle des mouvements d'argent liquide, afin de renforcer la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme ;

2. S'oppose à cette proposition d'acte communautaire compte tenu de la base juridique choisie pour ce texte, les obligations posées dépassant le cadre du traité instituant la Communauté européenne ;

3. Invite la Commission européenne à déposer une proposition de décision-cadre reprenant le dispositif prévu, sur le fondement du titre VI du traité sur l'Union européenne ;

4. Souhaite que le seuil déclaratif retenu soit fixé à 10 000 euros, montant correspondant à la moyenne des seuils des Etats membres.

¬ Pêche

- proposition de règlement du Conseil relatif à la gestion des flottes de pêche enregistrées dans les régions ultrapériphériques (document E 2296).

Le Président Pierre Lequiller a rappelé que la réforme de la politique commune de la pêche (PCP), adoptée par le Conseil « Pêche » en décembre 2002 s'est traduite par un nouveau régime de gestion des capacités de la flotte communautaire. Toutefois, le Conseil et la Commission ont considéré que les flottes de pêche des régions ultrapériphériques méritaient un traitement plus favorable qu'en métropole en raison de leur situation économique et sociale. Dans cette perspective, la proposition de règlement du Conseil vise à permettre un développement mesuré des flottes des régions ultrapériphériques grâce à des aides publiques accordées dans le cadre des fonds structurels.

La France est cependant réservée sur cette proposition de règlement qui met en œuvre des mesures dérogatoires en matière d'aides publiques à la construction et à la modernisation des navires de pêche. Elle souhaiterait en effet que la date limite du 31 décembre 2006, mentionnée dans la proposition de règlement, concerne les décisions administratives d'octroi des aides, et non pas leur paiement. Elle propose que le règlement soit complété par une clause de rendez-vous en 2006, ne préjugeant pas de la suppression des aides à cette date, et demande à la Commission un rapport sur l'application de ces mesures. La France souhaiterait globalement entériner pour les DOM le statu quo par rapport à la situation qui prévalait avant le 1er janvier 2003.

M. Jérôme Lambert a approuvé cette position, considérant que les difficultés spécifiques des DOM ne seraient pas définitivement réglées au 31 décembre 2006.

En conclusion, la Délégation s'est opposée à la proposition d'acte communautaire en l'état des informations dont elle dispose.

¬ PESC et relations extérieures

Sur le rapport du Président Pierre Lequiller, la Délégation a approuvé les trois textes suivants :

- proposition de règlement du Conseil concernant le commerce de certains équipements et produits susceptibles d'être utilisés à des fins de torture ou pour infliger la peine capitale ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (document E 2185).

Le régime commercial spécifique proposé pose d'abord une interdiction de tout commerce d'équipements n'ayant aucune ou quasiment aucune utilisation pratique autre que pour la peine capitale ou à des fins de torture ou pour infliger d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. L'exercice d'activités de courtage et de services similaires visant à faciliter ou à promouvoir toute opération d'exportation concernant ces équipements est également interdit.

Le régime permet ensuite aux autorités compétentes de contrôler le commerce des équipements et des produits énumérés, qui pourraient être utilisés pour la peine capitale ou à des fins de torture ou pour infliger d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, mais qui sont destinés aux forces de l'ordre pour faire respecter la loi. Une autorisation est exigée pour toute opération d'exportation concernant ces équipements et produits.

- proposition de décision du Conseil relative au respect des conditions fixées à l'article 3 de la décision n° 3/2002 du Conseil d'association UE-Pologne du 23 octobre 2002 prorogeant la période prévue à l'article 8, paragraphe 4, du protocole n° 2 relatif aux produits CECA de l'accord européen (document E 2301). Ce texte a pour objet d'approuver l'évaluation par la Commission du programme de restructuration de la sidérurgie présenté par la Pologne et de proroger la période d'octroi des aides publiques à la restructuration de la sidérurgie en Pologne pour la période allant du 1er janvier 1997 jusqu'à la date de son adhésion ;

- proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1081/2000 du Conseil concernant l'interdiction de la vente, de la fourniture et de l'exportation à la Birmanie/au Myanmar de matériel susceptible d'être utilisé à des fins de répression interne ou de terrorisme, et le gel des fonds appartenant à certaines personnes ayant un lien avec d'importantes fonctions gouvernementales dans ce pays (COM (03) 382).

L'arrestation récente de la Présidente de la Ligue nationale pour la démocratie, Mme Aung San Sun Kyi, et d'autres membres ainsi que la fermeture des bureaux de cette organisation conduisent l'Union européenne à mettre en œuvre immédiatement les nouvelles sanctions qu'elle avait adoptées le 28 avril 2003, mais dont elle avait suspendu l'application, au plus tard jusqu'au 29 octobre 2003, pour favoriser la réalisation de progrès substantiels sur la voie de la réconciliation nationale, du rétablissement de la démocratie et d'un plus grand respect des droits de l'homme en Birmanie.

Enfin, la Délégation a pris acte de l'approbation, selon la procédure d'examen en urgence, des trois textes suivants :

- proposition de règlement du Conseil concernant certaines restrictions spécifiques applicables aux relations économiques et financières avec l'Iraq et abrogeant le règlement (CE) n° 2465/1996 du Conseil (document E 2310) ;

- projet de position commune du Conseil sur le courtage des armements (document E 2313) ;

- projet d'action commune du Conseil .../2003/PESC sur la poursuite du programme de coopération de l'Union européenne en faveur de la non-prolifération et du désarmement dans la Fédération de Russie (document E 2314).

M. Jérôme Lambert a souligné le recours excessif à la procédure d'examen en urgence pour les textes relatifs à la politique étrangère et de sécurité commune. Il a souhaité que la Délégation soit plus vigilante sur la mise en œuvre de cette procédure qui doit demeurer exceptionnelle.