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DÉLÉGATION POUR L'UNION EUROPÉENNE

COMPTE RENDU N° 71

Réunion du mercredi 14 janvier 2004 à 16 heures 15

Présidence de M. Pierre Lequiller, Président

Audition (ouverte à la presse) de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable, sur l'environnement et le droit communautaire

Le Président Pierre Lequiller a remercié Mme Roselyne Bachelot-Narquin d'avoir accepté de venir évoquer devant la Délégation les problèmes de l'environnement, qui, au niveau européen, relèvent d'une compétence partagée et suscitent de fortes attentes chez nos concitoyens. Il a rappelé, qu'au sein de la Délégation, M. Bernard Deflesselles était plus spécialement en charge de ce dossier, et il a souhaité aborder deux débats en cours, celui de la Charte de l'environnement, qui devrait faire de la France un modèle en Europe, et celui de la chasse, sur lequel la ministre est intervenue l'an dernier auprès de la Commission européenne.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable, a indiqué que lors de son premier Conseil des ministres « Environnement », en mai 2002 à Palma de Majorque, elle avait été accueillie par un collègue européen soulignant que les ministres français de l'environnement étaient toujours les derniers arrivés et les premiers partis. Cette boutade lui a fait percevoir que les difficultés de compréhension entre la France et ses autres partenaires européens sur les questions environnementales étaient largement imputables à une insuffisance d'attention de notre part. Elle en a tiré la leçon qu'il fallait mettre trois principes au cœur de son action : en premier lieu, la connaissance, seule capable de dénouer des questions passionnelles ; ensuite, la participation, car la démarche environnementale ne peut aboutir sans une prise de conscience collective ; enfin, la nécessité de mener une activité intense sur la scène européenne et au niveau international, en entretenant des relations privilégiées avec les différents acteurs. Cette politique est souvent ingrate, peu médiatisée, et « chronophage », mais elle est indispensable.

Il convient de rappeler, en effet, qu'environ 80 % de notre législation nationale touchant à l'environnement est d'origine communautaire. Cela ne constitue pas une contrainte, mais au contraire une chance, à condition de se donner les moyens de peser sur la prise des décisions, car, si l'environnement concerne les individus dans leur vie quotidienne et au niveau local, les principaux problèmes ne peuvent être résolus que par une approche internationale.

L'Europe se doit d'être exemplaire pour tenir sa place dans les enceintes internationales. La croissance ne peut être que durable, puisque de nombreux exemples, MetalEurope en particulier, prouvent qu'une action visant à privilégier, soit-disant, l'emploi conduit à l'échec. L'Europe a déjà prouvé qu'elle savait montrer la voie dans le cas des négociations sur les changements climatiques.

Le bilan européen pour l'année 2003 en matière d'environnement peut être établi en s'intéressant à la fois aux travaux de la Convention sur l'avenir de l'Europe, du Conseil européen de printemps et des divers Conseils des ministres « Environnement ».

La Convention sur l'avenir de l'Europe a permis de consacrer le développement durable au plus haut niveau juridique des normes communautaires, puisque l'article 3 du projet de traité instituant une Constitution pour l'Europe inscrit le développement durable parmi les objectifs de l'Union européenne et rappelle également l'exigence d'intégration des considérations environnementales dans les autres politiques. A l'instar du projet de Charte de l'environnement au niveau national, ce projet de Constitution européenne permettra à terme d'influer sur les modes de consommation et de production. Cette action sera confortée par la mise en œuvre de la stratégie européenne de développement durable, qui complète une stratégie similaire initiée en France.

Le Conseil européen de printemps a appelé les Etats membres à respecter les objectifs du protocole de Kyoto concernant l'émission de gaz à effet de serre, à promouvoir des sources d'énergie respectueuses de l'environnement, à revoir les modalités d'attribution des subventions pour tenir compte des considérations écologiques et à gérer de façon responsable les ressources naturelles.

En ce qui concerne les Conseils des ministres « Environnement », quatre points méritent d'être mis en évidence : l'adoption de conclusions sur une stratégie marine européenne ; l'obtention d'un accord politique sur la directive relative à la responsabilité environnementale, fondée sur le principe pollueur-payeur ; l'adoption d'une directive établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre, permettant de constituer le premier marché régional de cette nature et, enfin, la proposition de règlement concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques (REACH). Ces Conseils ont permis à la ministre d'alerter ses collègues sur le dossier des inondations, en vue d'obtenir un réseau européen d'échanges, sur les effets de la canicule, et sur la sécurité maritime, afin de mettre en place notamment une plus forte pénalisation des dégazages en mer, ainsi qu'un accroissement des ressources et des indemnisations du FIPOL. Elle est également intervenue pour souligner les difficultés de mise en œuvre rencontrées par Natura 2000, spécialement en ce qui concerne la directive de 1979 sur les oiseaux sauvages.

L'année 2004 sera d'abord marquée par l'élargissement à dix nouveaux Etats membres. Ces pays ont transposé l'essentiel de l'acquis communautaire dans le secteur environnemental, mais il importe de les accompagner pour que l'Europe de l'environnement soit tirée vers le haut. La France peut jouer un grand rôle en la matière en participant à des jumelages concernant particulièrement les questions de l'eau et des déchets. La ministre a indiqué qu'elle s'attachait à nouer des liens avec ses nouveaux collègues et qu'elle s'était récemment rendue en Hongrie. Il paraît indispensable, en outre, d'établir un dialogue renouvelé avec les nouveaux voisins de l'Union européenne élargie.

L'élargissement impose également de mener une réflexion sur la gouvernance européenne. Une réunion de juillet 2003 entre les vingt-cinq ministres de l'environnement a effectivement démontré qu'il n'était pas facile de discuter en aussi grand nombre. En tout état de cause, il est souhaitable que le Conseil « Environnement » demeure une formation à part entière et ne soit pas transformé en une formation spécifique du Conseil « Affaires générales ». Le Conseil européen de printemps devra affirmer la nécessité d'une stratégie de développement durable forte, synthétisant les piliers économique, social et environnemental.

L'année 2004 sera marquée, ensuite, par le renouvellement du Parlement européen et de la Commission européenne. Dans cette période, il est donc indispensable de se concentrer sur les dossiers essentiels : le plan d'action sur les technologies environnementales, visant à promouvoir celles émettant peu ou pas de gaz à effet de serre ; le règlement REACH, sur lequel la Commission européenne devra apporter des précisions en termes économiques, sanitaires et environnementaux ; la révision de la directive relative aux eaux de baignade, qui doit permettre de rehausser les exigences sanitaires en demeurant dans des limites financières raisonnables ; la mise en œuvre de dispositifs d'application du protocole de Kyoto et, enfin, la prise en compte des exigences environnementales dans les réformes de la politique agricole commune, des fonds structurels et dans l'application de l'«éco-conditionnalité ».

La ministre a ensuite abordé la question de la transposition des directives relatives à l'environnement, en soulignant que vingt-six directives étaient actuellement en cours de transposition, dont quatorze en retard de transposition et six depuis plus de deux ans. Elle a précisé que, parmi les directives en cours de transposition, six nécessitaient des mesures législatives. Elle a noté que les retards sont parfois davantage liés à l'engorgement du calendrier parlementaire qu'à un manque d'engagement du ministère de l'écologie dans ce domaine.

La ministre a, par ailleurs, indiqué que, s'agissant de l'environnement, neuf procédures concernant la France étaient actuellement en cours devant la Cour de justice, dont trois pour retard de transposition. La France a fait l'objet de quatre avis motivés pouvant aboutir à des astreintes financières, en application de l'article 228 du Traité.

Pour remédier à cette situation, il convient à la fois d'améliorer l'organisation du travail ministériel et interministériel et de sensibiliser plus efficacement l'ensemble des acteurs. Les efforts engagés dans ce domaine devraient permettre la transposition de onze directives en 2004. Par ailleurs, deux procédures d'avis motivés ont pu être récemment classées.

Le renforcement du dialogue avec la Commission européenne constitue une autre priorité. La Commission s'écarte actuellement de l'approche juridique qu'elle privilégiait jusqu'à présent pour développer une démarche plus incitative, ce qui va dans le bon sens. La ministre a, à cet égard, évoqué la visite qu'elle a effectuée, en juillet dernier, avec plusieurs parlementaires, auprès de Mme Margot Wallström, Commissaire européen en charge de l'environnement, sur la fixation des périodes de chasse. Le déplacement a démontré l'esprit d'ouverture de la Commission européenne à ce sujet. Le problème des dates de chasse est un problème franco-français, l'Europe servant plutôt dans cette affaire de bouc émissaire.

Sur le plan national, la prise en compte de la dimension européenne du développement durable implique une mobilisation renouvelée. Il faut s'efforcer de renforcer le dialogue citoyen dans ce domaine. Les parlementaires ont un rôle majeur à jouer à cet égard. Il convient également d'associer au maximum les entreprises et le monde de la recherche. Le drame causé par la légionellose survenu dans le Nord de la France illustre cette nécessité.

La France est au cœur de la démarche européenne en matière d'environnement, ce qui implique l'établissement de liens étroits avec les ministres de l'environnement des autres Etats membres. La ministre a évoqué, en particulier, les relations de travail très suivies établies avec ses homologues allemands et britanniques. Elle a précisé qu'elle tiendrait, début février prochain, à Nantes, une réunion de travail avec M. Jürgen Trittin, ministre allemand de l'environnement.

Un débat a suivi l'exposé de la ministre.

M. Bernard Deflesselles, chargé de suivre à la Délégation les questions de l'environnement, a estimé que l'image de la France s'était redressée en Europe dans le domaine de l'environnement. Après avoir rappelé, à titre d'exemple, qu'un pays comme le Danemark n'avait, dans sa Constitution, aucune disposition sur l'environnement, il a considéré que la France, avec l'adoption prochaine de la Charte de l'environnement, deviendrait un modèle en Europe et jugé souhaitable de le faire savoir. Il a ensuite demandé à la ministre des précisions sur la mise en œuvre du protocole de Kyoto.

M. Edouard Landrain a évoqué la perception négative qu'ont les citoyens à la fois de l'Europe et des écologistes, qui peuvent donner l'impression de se mêler de tout sans raisons. La directive « oiseaux » et ses difficultés d'application irritent les chasseurs, et Natura 2000 mécontente les agriculteurs. Il a alors demandé à la ministre si 2004 serait l'année de l'apaisement.

S'agissant de la pollution marine, il a rappelé que la commission d'enquête parlementaire sur le naufrage du Prestige avait souligné les carences européennes en matière d'équipements de remorquage et de dépollution. Au cas où un accident majeur viendrait à se produire dans une mer fermée comme la Méditerranée, les conséquences pour l'environnement seraient irréversibles et dangereuses. Il est encore temps de prendre des mesures, et mieux vaut prévenir que guérir.

M. Guy Lengagne, chargé avec M. Didier Quentin de suivre au sein de la Délégation pour l'Union européenne les questions de sécurité maritime, a fait part de son étonnement face à la faible implication du ministère de l'écologie et du développement durable dans la gestion de ce dossier, traité par des spécialistes du monde maritime et des transports. L'Union européenne, à travers les prises de position de Mme Loyola de Palacio, Commissaire européen en charge des transports et de l'énergie, manifeste sa volonté d'aller plus loin que ne le préconise l'Organisation maritime internationale (OMI) où siègent des pays qui n'ont pas intérêt à l'adoption d'une réglementation plus contraignante. L'idée serait donc de favoriser l'adoption de mesures strictement européennes, à l'instar de ce qu'ont décidé les Etats-Unis en matière de législation sur les navires à double coque. Il est dommage que le Gouvernement français ne souhaite pas s'engager dans cette voie, préférant en rester aux règles fixées dans le cadre de l'OMI. M. Guy Lengagne a ensuite souligné la nécessité d'observer attentivement ce qui se passe en Mer Baltique et qui concerne désormais directement l'Union européenne élargie. Il a enfin plaidé pour que le Gouvernement ne remette pas en cause la « loi littoral » dont il est à l'origine.

M. Jérôme Lambert s'est déclaré en accord avec les préoccupations précédemment formulées quant aux difficultés d'application du protocole de Kyoto. Il s'est en revanche démarqué de la position exprimée par ses collègues sur la directive « oiseaux », et a interrogé la ministre sur une éventuelle modification de ce texte si « brillamment » négocié par le Gouvernement de 1979. De même, il s'est interrogé sur une éventuelle volonté de remettre en cause le réseau Natura 2000. Il a ensuite évoqué les conséquences sur l'environnement de la réforme de la politique agricole commune (PAC), qui devrait mieux prendre en compte les aspects environnementaux, notamment dans les nouveaux pays membres où la modernisation agricole peut présenter des dangers pour l'environnement. M. Jérôme Lambert a également abordé les enjeux du dossier nucléaire et de la problématique de lutte contre l'effet de serre.

M. Jacques Myard a considéré que l'Europe se trouvait aujourd'hui dans une crise profonde qui va nécessiter des réformes. Plus l'Europe s'élargit, plus elle va devoir s'amaigrir. Certes, l'Union reste l'échelon pertinent pour un certain nombre de questions (pollution nucléaire et pollution marine notamment) ; en revanche, il est d'autres domaines où le « détricotage » s'impose. Par exemple, une directive de 1992 fait obligation aux collectivités territoriales de traiter les eaux usées et les eaux pluviales dans des réseaux séparatifs. Or cela est inutile - mais excessivement coûteux - dans la mesure où ces eaux doivent à la sortie être traitées de la même manière. Il a dès lors interrogé la ministre sur les initiatives que le Gouvernement entendait prendre pour faire abroger des textes sans aucun sens, dépassés par la technologie et pourtant toujours en vigueur.

M. Didier Quentin a souhaité connaître l'appréciation de la ministre sur l'intégration de l'acquis communautaire par les nouveaux Etats membres de l'Union européenne en matière de sécurité maritime. Il a estimé que les propositions de la Commission européenne en matière d'eaux de baignade étaient assez contestables. Il s'est déclaré opposé à une remise en cause de la « loi littoral », et favorable à une relance des schémas de mise en valeur de la mer, afin d'assurer un équilibre entre la protection de l'environnement et le développement économique.

Il a, par ailleurs, interrogé la ministre sur la possibilité de prolonger l'utilisation de fonds structurels par la France en matière de protection de l'environnement, après l'élargissement. Il s'est déclaré favorable à une coopération, en matière de protection de l'environnement, entre l'Europe et d'autres Etats, notamment la Chine et le Japon. Enfin, il a demandé si la lutte contre le pesticide « Régent » pouvait revêtir une dimension européenne.

La ministre a apporté les éléments de réponse suivants :

- le protocole de Kyoto a défini un objectif de réduction de 8 % des gaz à effet de serre à échéance de 2012. La France est préparée à cette échéance, grâce aux choix énergétiques effectués par tous les gouvernements successifs. Toutefois, si le secteur industriel a fortement réduit les gaz à effet de serre, le secteur des transports doit encore fournir des efforts. On ne peut que noter avec satisfaction les décisions du dernier comité interministériel de l'aménagement du territoire, qui favorisent le transport ferroviaire au détriment du transport routier ;

- il convient d'envisager avec optimisme la possibilité d'une ratification du protocole de Kyoto par la Russie. La Russie n'a pas signé le protocole, jusqu'à présent, pour des raisons de politique intérieure, mais elle demeure très attentive aux initiatives de l'Union européenne. Il convient donc d'éviter toute maladresse à son égard ;

- la France est favorable à une prise en compte des crédits de projets sur les mécanismes de développement propre, sans attendre l'entrée en vigueur du protocole de Kyoto. La fixation d'un plafond doit demeurer de la responsabilité des Etats membres. La France souhaite que les projets en matière de nucléaire ne soient pas exclus, mais que les projets touchant aux OGM soient écartés ;

- il revient au Conseil « Transports » de se saisir en priorité du dossier de la sécurité maritime. Bien entendu, en France, le ministère de l'écologie et du développement durable est étroitement associé aux travaux du ministère de l'équipement et du secrétariat d'Etat aux transports sur les aspects les plus sensibles, qu'il s'agisse de la prévention des accidents, de la signalisation ou de l'aide à la navigation. Ainsi, si le ministère de l'écologie n'intervient pas directement dans les négociations européennes relatives à la sécurité maritime, il est très présent en amont ;

- le Gouvernement français s'est fortement engagé pour renforcer la sécurité maritime. Lors de la rencontre franco-espagnole de Malaga entre MM. Chirac et Aznar, après le naufrage du Prestige, des mesures significatives ont été prises, notamment pour accroître le contrôle des navires et écarter de nos côtes les pétroliers à simple coque. Quatre mesures sont prévues pour 2004 : l'affrètement par la Marine nationale de deux nouveaux remorqueurs d'intervention de très forte puissance, qui vont renforcer le dispositif actuel en permettant des redéploiements vers le Golfe de Gascogne et la Méditerranée ; la mise en service d'un système performant d'information sur le trafic, « Trafic 2000 », qui couvrira l'Atlantique et la Manche ; la généralisation d'un numéro unique d'appel des CROSS (centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage) par téléphone mobile, expérimenté avec succès lors de l'été 2003 ; la réforme du permis de plaisance en mer, pour mettre la formation et la vigilance en mer au niveau d'exigence de celui de la sécurité routière ;

- au sujet de la Méditerranée, les décrets d'application de la loi n° 2003-346 du 15 avril 2003 concernant la zone de protection écologique en Méditerranée viennent d'être publiés. La question écologique ne se pose pas de la même manière en Méditerranée et en Atlantique et un dommage dans cette mer y serait, selon les spécialistes, plus facilement maîtrisable ;

- par ailleurs, une stratégie marine européenne a pour objectifs généraux de promouvoir l'utilisation durable des mers et la conservation des écosystèmes marins - des objectifs très ambitieux, conformes aux engagements de la Commission européenne en matière de développement durable et en phase avec la stratégie du ministère de l'écologie. Cette stratégie repose sur une approche fondée à la fois sur la protection des écosystèmes et sur les concepts d'état de conservation favorable et de bon état écologique - qui se trouvent au cœur de la directive « habitat » et de la directive-cadre sur l'eau ;

- s'agissant des eaux de baignade, la France propose la réalisation d'une étude épidémiologique européenne, dont les résultats permettront d'ici une décennie de fixer les exigences sanitaires pour la période postérieure à 2015, exigences qui devront être conformes aux recommandations de l'Organisation mondiale de la santé. Il convient de rappeler que, depuis la mise en œuvre de la directive de 1975, le pourcentage des eaux de baignade conforme aux normes européennes est passé en France de moins de 70 % en 1976 à 89,7 % en 2002, ce chiffre étant de 87,5 % pour les eaux de mer et de 92,5 % pour les eaux douces. Ces données traduisent une amélioration notable, même si l'effort doit encore être poursuivi, selon un financement proportionné au but recherché ;

- concernant la troisième série de questions, relatives au patrimoine naturel, à la biodiversité, à Natura 2000 et à la directive « oiseaux », la ministre a rappelé que, comme l'a confirmé sa rencontre du 8 juillet dernier avec Mme Margot Wallström, Commissaire européen chargée de l'environnement - rencontre à laquelle furent associés des parlementaires de toutes tendances politiques -, la fixation des dates de chasse relevait de la responsabilité des Etats membres. Par conséquent, ces dates ne sauraient être uniformes, ne serait-ce qu'en raison de la diversité du patrimoine faunistique entre le Sud et le Nord de l'Europe. La ministre a indiqué à la Commissaire son souhait d'aboutir à des solutions partagées pour mettre fin à la longue série de contentieux touchant à l'application des directives « habitat » et « oiseaux ». Ont été abordées, lors de cette rencontre, les questions concernant le guide interprétatif, l'utilisation des dérogations, les disparités entre pays voisins, la mise en réseau des connaissances et les nécessités d'une adaptation de la réglementation communautaire en fonction de l'évolution de ces connaissances. Un programme de travail a été élaboré à la suite de cette réunion et plusieurs points ont été adoptés. En premier lieu, la mise en réseau des observateurs au niveau européen, à partir du modèle français (c'est-à-dire l'Observatoire national de la faune sauvage et de ses habitats, salué par la Commission européenne et ayant permis d'obtenir, pour la première fois, le vote à l'unanimité par le Conseil national de la chasse des dates d'ouverture de la chasse). En deuxième lieu, l'organisation d'une réunion sur le guide interprétatif associant les principaux acteurs. Troisièmement, la préparation de la ratification par l'Union européenne de l'accord AEWA (sur la conservation des oiseaux d'eau migrateurs d'Afrique et d'Eurasie), la réglementation communautaire ne pouvant suffire pour protéger ce type d'espèces. Enfin, l'établissement du bilan d'application de la directive « oiseaux », à l'occasion de son vingt-cinquième anniversaire ;

- s'agissant toujours de la directive « oiseaux », le retard de la France est important pour la désignation des ZPS (zones de protection spéciale). Un effort récent a permis de porter les désignations de 119 à 148 sites, donnant ainsi un signe à la Commission européenne de la volonté de la France de remédier à cette situation et d'exécuter l'arrêt du 26 novembre 2001 la condamnant pour insuffisance de désignation. Une vingtaine d'autres désignations devraient pouvoir être établies dans les prochaines semaines. Par ailleurs, les recommandations du rapport du sénateur M. Jean-François Le Grand ont été mises en application et un groupe de travail a été institué en ce domaine avec les principaux interlocuteurs concernés pour dresser un état qualitatif de la contribution française et préparer les futures désignations ;

- au sujet du Marais poitevin, le dialogue avec les parties concernées (agriculteurs, professionnels du tourisme, collectivités locales ...) a permis de répondre aux griefs formulés par la Commission européenne : au-delà des 1 000 hectares de ZPS prévus par la Commission, ont été désignés 3 000 autres hectares, de même, d'ailleurs, que les outils de protection de cette ZPS. En outre, des consignes ont été données aux préfets pour que soient relancées les procédures de concertation de Natura 2000, qui sont un outil remarquable de protection de l'environnement - à condition de n'exclure personne et de ne pas procéder de façon « fantasmatique » -, même si se pose le problème crucial du financement de ce dispositif ;

- à cet égard, le Gouvernement a salué l'initiative de la Commission, tendant à lancer, à la fin de 2001, un groupe de travail sur la question du financement de Natura 2000. La France a estimé que le rapport d'experts sur cette question n'a pas fourni une évaluation fiable et précise des besoins de financement et demandé qu'une évaluation plus solide soit faite sur le fondement de critères harmonisés et pertinents. Elle soutient l'intégration de Natura 2000 dans les outils financiers existants, qui doivent être combinés avec un dispositif complémentaire, tel que le programme LIFE Nature. A ce titre, les politiques sectorielles directement concernées - que sont la politique agricole commune, la politique structurelle et, à plus long terme, la politique commune de la pêche - devront être améliorées et assouplies pour permettre un financement approprié aux besoins du réseau Natura 2000 et laisser une marge de manœuvre suffisante aux Etats membres, dans le cadre du respect du principe de subsidiarité. Les orientations proposées dans le rapport final de financement de Natura 2000 vont dans le sens déjà retenu par la France pour la mise en œuvre de ce dispositif à travers le plan de développement rural, dans une logique d'intégration des politiques agricole et environnementale. D'ailleurs, la Commission européenne envisage de transmettre, dès 2004, une communication au Conseil et au Parlement européen sur la question du financement de Natura 2000 ;

- le projet de loi sur l'eau regroupait initialement des questions qui sont désormais traitées de manière séparée : la directive-cadre sur l'eau trouve sa transposition dans le texte que le Sénat a approuvé la semaine dernière en première lecture ; la lutte contre les inondations est abordée dans la loi du 30 juillet 2003 sur les risques technologiques et naturels. Pour le reste, les services d'annonce des crues doivent encore se transformer en services de prévision des crues. L'action législative va ainsi de pair avec la réforme de l'Etat. Le dialogue avec les comités de bassin, longtemps ignorés des pouvoirs publics, paraît garantir le succès de la loi sur l'eau en impliquant d'avance ceux qui seront chargés de son application, le bassin hydrographique restant le cadre d'action privilégié de cette coopération décentralisée ;

- il est difficile de remettre en cause une directive et l'expérience a rappelé à ceux qui l'ont tenté que le mieux est parfois l'ennemi du bien.