Document mis en distribution le 8 octobre 2003 N° 1084 ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 DOUZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 24 septembre 2003 PROPOSITION DE LOI visant à créer un temps citoyen, engagement civique au service de la collectivité, pour tous les jeunes atteignant l'âge de la majorité. (Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.) PRÉSENTÉE par Mme Claude GREFF,
Additions de signatures :
MM. René André,
Jean Auclair, Mme Martine Aurillac, MM. Jean-Claude Beaulieu, Jacques-Alain
Bénisti, Jean-Louis Bernard, Marc Bernier, André Berthol, Jean-Michel
Bertrand, Xavier Bertrand, Jean-Yves Besselat, Jean-Marie Binetruy,
Étienne Blanc, Mmes Chantal Bourragué, Christine Boutin, MM. Loïc Bouvard,
Ghislain Bray, Philippe Briand, Mme Maryvonne Briot, MM. François Calvet,
Jean-François Chossy, Jean-Louis Christ, Philippe Cochet, Georges
Colombier, François Cornut-Gentille, Louis Cosyns, Edouard Courtial, Alain
Cousin, Jean-Yves Cousin, Henri Cuq, Marc-Philippe Daubresse, Jean-Pierre
Decool, Léonce Deprez, Jean-Pierre Door, Philippe Dubourg, Pierre-Louis
Fagniez, Daniel Fidelin, Jean-Claude Flory, Marc Francina, Mme Arlette
Franco, M. Claude Gaillard, Mme Cécile Gallez, MM. Claude Gatignol, Guy
Geoffroy, Alain Gest, Bruno Gilles, Maurice Giro, François Grosdidier, Mme
Arlette Grosskost, MM. Louis Guédon, Jean- Claude Guibal, Lucien Guichon,
Jean-Jacques Guillet, Emmanuel Hamelin, Michel Heinrich, Laurent Hénart,
Michel Herbillon, Francis Hillmeyer, Jean-Yves Hugon, Sébastien Huyghe,
Aimé Kergueris, Patrick Labaune, Jean-Christophe Lagarde, Mme Marguerite
Lamour, MM. Pierre Lang, Marc Le Fur, Jean-Pierre Le Ridant, Jean-Marc
Lefranc, Pierre Lellouche, Gérard Léonard, Jean-Louis Léonard, Arnaud
Lepercq, Mmes Céleste Lett, Geneviève Levy, M. Gérard Lorgeoux, Mme
Gabrielle Louis-Carabin, MM. Lionnel Luca, Thierry Mariani, Alain Marleix,
Philippe-Armand Martin, Patrice Martin-Lalande, Alain Marty, Christian
Ménard, Denis Merville, Damien Meslot, Gilbert Meyer, Pierre Micaux,
Pierre Morange, Pierre Morel-A-L’Huissier, Robert Pandraud, Mme Valérie
Pecresse, MM. Bernard Perrut, Daniel Prévost, Didier Quentin, Michel
Raison, Mme Marcelle Ramonet, MM. Eric Raoult, Frédéric Reiss, Jacques
Remiller, Mme Juliana Rimane, MM. Jean-Marie Rolland, Vincent Rolland,
Serge Roques, Michel Roumegoux, Bernard Schreiner, Mme Hélène Tanguy, MM.
Guy Teissier, Alfred Trassy-Paillogues, Jean Ueberschlag, Léon Vachet,
Christian Vanneste, Mme Catherine Vautrin, MM. René-Paul Victoria, Philippe
Vitel, Michel Voisin, Eric Woerth
et
Mme Marie-Jo
Zimmermann M. Hervé Mariton et Mme
Françoise de Panafieu Députés. Éducation - Recherche - Jeunesse - Sport. EXPOSÉ DES MOTIFS Mesdames, Messieurs, La canicule de l'été 2003 a tragiquement mis au jour des faiblesses structurelles mais surtout une évolution profonde de notre société. En quelques semaines, la France a découvert que ses anciens pouvaient trouver la mort dans la solitude et l'indifférence. Au-delà de ces faits dramatiques, de multiples exemples illustrent l'évolution de la société française vers l'individualisme et le repli sur soi : crise du bénévolat et du volontariat, isolement des plus faibles, recours systématique à la solidarité institutionnelle de l'Etat providence. L'esprit de la République inscrit dans la devise nationale « Liberté, Égalité, Fraternité », connue de chaque citoyen, figurant partout, aurait-il perdu de son sens ? La liberté étant aujourd'hui préférée à la fraternité et à l'amitié. La contestation de la notion d'autorité, en général, et de toutes les formes de contrainte, en particulier, a peu à peu émietté les sociabilités, démonétisé les valeurs familiales et dilué le lien social. L'incivisme ronge la République. Les quarante dernières années ont d'ailleurs été marquantes. Les repères sont aujourd'hui moins prégnants, parfois discrédités, et ne remportent plus l'adhésion de tous, au point de mettre en péril la communauté nationale. Les institutions historiques de socialisation, comme par exemple l'Etat ou l'école, ont perdu la confiance que les Français avaient longtemps placée en elles. Le manque de solidarité organique mine l'un des fondements de la République pourtant proclamé par l'article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 : « La République est une et indivisible ». Certes, le respect de la différence constitue une richesse inestimable de la France. Mais à trop s'exacerber, particularisme et communautarisme divisent et opposent les Français. L'antagonisme sclérose toute vision d'avenir et toute ambition nationale. « L'être-ensemble » de la cité d'Aristote doit donc demeurer une valeur naturelle. Le rituel républicain est tombé en désuétude. Les symboles ont été délocalisés. La rhétorique a laissé la place aux mots. Pourtant, les Français n'ont pas renié les valeurs de la République. La société n'est pas totalement déstructurée. Cependant, l'urgence à procéder à un aggiornamento est une réalité impérieuse. Il en va de l'avenir de la République. Les valeurs fondatrices du pacte républicain ont permis la genèse de notre conscience nationale. Elles sont universelles et intemporelles. Les perpétuer est indispensable si l'on veut résorber le malaise sociétal de notre temps. La fraternité a toujours été la matrice des droits sociaux. Elle doit le rester. L'idée que la solidarité envers la communauté nationale est un devoir moral, doit être réaffirmée. La création d'un temps citoyen répond à cet impératif. Il permet, par l'engagement civique, d'insuffler une nouvelle dynamique à la geste républicaine. Cet engagement, véritable devoir pour chaque nouveau citoyen, est à la fois une obligation morale et un apprentissage au milieu sociétal, à la cohésion nationale. Il consiste pour les jeunes à œuvrer bénévolement pour la collectivité et vivre concrètement leur entrée en citoyenneté. A la fois enrichissement personnel et réponse au mal-être de la société, le temps citoyen marque l'entrée des jeunes dans le cursus honorum de la citoyenneté. Il constitue également l'aboutissement des enseignements d'instruction civique prodigués tout au long de la scolarité. Pendant trois semaines, ou l'équivalent de cent heures, les jeunes s'engageront auprès de l'Etat, des collectivités territoriales, des associations pour des actions dans les secteurs suivants : cohésion sociale et solidarité, secteur humanitaire et caritatif, prévention, éducation, environnement et développement durable. S'adressant avant tout aux jeunes à partir de dix-huit ans, le temps citoyen sera aussi ouvert à toute personne souhaitant s'engager pour la collectivité. Avec le temps citoyen, les jeunes pourront officiellement obtenir la reconnaissance de leur engagement solidaire envers autrui et la collectivité. L'occasion leur sera ainsi donnée d'acquérir des savoir-faire qui pourront faire l'objet d'une validation officielle. Ces dispositions sont une réelle incitation à la citoyenneté. La présente proposition de loi prévoit donc la création et la mise en place d'un temps citoyen pour les jeunes, à partir de l'âge de dix-huit ans. C'est pourquoi je vous propose, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter la présente proposition de loi.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er Il est créé un temps citoyen pour tous les jeunes atteignant l'âge de la majorité. Article 2 Le temps citoyen vise à apporter un concours personnel à la communauté nationale, dans le cadre d'une mission d'intérêt général d'une durée de trois semaines, ou d'une durée fractionnée en cent heures de travail effectif. Cette mission est destinée à répondre aux besoins sociétaux pour conforter et renouveler les liens de fraternité et de solidarité. Elle vise également à promouvoir l'esprit d'appartenance à la Nation et renforcer la cohésion nationale. Article 3 Le temps citoyen s'effectue dans les domaines suivants : - Cohésion sociale et solidarité ; - Action humanitaire et caritative ; - Prévention ; - Éducation ; - Environnement et développement durable. Article 4 Le temps citoyen s'adresse d'abord à tous les jeunes, de sexe masculin et féminin, atteignant l'âge de dix-huit ans. Il s'agit d'un engagement actif dans l'un des domaines précités à l'article 3, à accomplir à partir de dix-huit ans. Le temps citoyen est aussi ouvert à toute personne qui souhaite s'engager dans le cadre d'un volontariat civique. Les détenus pourront effectuer le temps citoyen selon des dispositions particulières fixées par l'administration pénitentiaire. Article 5 Le temps citoyen est accompli pour la communauté nationale auprès de l'Etat, des collectivités locales et territoriales, des personnes morales, agréées par l'administration, dans les secteurs d'activités cités à l'article 3. La priorité est donnée aux besoins locaux, puis nationaux, et aux catastrophes ou nécessités nationales. Il est conclu une convention d'engagement entre le jeune et l'organisme d'accueil, précisant la nature des activités, les obligations, les conditions de prise en charge, les modalités d'affectation durant la période du temps citoyen. Celui-ci est soumis aux règles du travail en vigueur dans l'organisme auprès duquel il est effectué en ce qui concerne l'organisation du travail et les conditions de sécurité. Article 6 Pour avoir accompli leur temps citoyen, les jeunes, et les personnes qui l'auront effectué dans le cadre d'un engagement civique volontaire, reçoivent un brevet d'honneur de citoyenneté, qu'ils peuvent faire valoir dans un curriculum vitae. Les formations reçues et les savoir-faire acquis lors de l'accomplissement du temps citoyen et ayant fait l'objet d'une validation ont valeur de qualification. Article 7 Le temps citoyen n'est pas une activité rémunérée. Si les conditions d'accomplissement de son engagement l'exigent, le jeune est pris en charge par l'administration. Les prestations de l'assurance maladie restent liées aux droits du jeune. Il peut bénéficier d'une couverture complémentaire adaptée aux conditions et aux risques d'accomplissement de son temps citoyen. N° 1084 - Proposition de loi de Mme Claude Greff visant à créer un temps citoyen, engagement civique au service de la collectivité, pour tous les jeunes atteignant l'âge de la majorité
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