EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
D'origine religieuse dans une Loi de 1906, puis entrée dans l'usage, l'interdiction de travailler le dimanche posée par le code du travail est aujourd'hui en décalage flagrant avec les besoins de l'économie ainsi qu'avec l'évolution de la société. Un sondage IPSOS d'avril 2006 montre ainsi que 75 % des Franciliens sont favorables à l'ouverture des magasins le dimanche.
Déjà battue en brèche par un maquis de dérogations diverses, l'interdiction de principe posée actuellement par le code du travail paraît en effet aujourd'hui largement dépourvue de justifications solides.
Elle fait tout d'abord fi de la volonté des salariés, traités comme des incapables majeurs n'étant pas en état d'exprimer un choix réel. Il s'agit en effet d'une obligation d'ordre public (Cass. crim. 5/12/1989). Le fondement idéologique de cet état de droit est une vision de « lutte des classes » où l'employeur a pour seul objectif d'exploiter les salariés placés sous son autorité !
Ainsi l'employeur et sa famille peuvent exploiter un commerce le dimanche, mais il leur est interdit d'y faire travailler toute autre personne. De même l'employé qui voudrait travailler pour gagner plus, se voit refuser ce droit pourtant inscrit dans la Déclaration des Droits de l'Homme annexée à notre Constitution.
C'est une interdiction qui repose sur une approche exclusivement « sociale », au détriment de toute perspective économique. Les créations d'emplois induites par l'ouverture le dimanche, notamment pour les jeunes, ne sont donc pas prises en compte dans une période où l'on pourrait pourtant penser qu'il s'agit d'une évidente priorité. De surcroît, nombre de commerces qui réalisent entre 30 à 40 % de leur chiffre d'affaires le dimanche se voient contraints d'arrêter leur activité et de licencier leur personnel. En outre, une ville comme Paris, qui accueille 50 millions de touristes par an se voit pénalisée par rapport à d'autres capitales ou villes touristiques ouvertes au commerce le dimanche.
La réglementation actuelle comporte de nombreuses exceptions, aussi variées que complexes et sujettes à interprétation. Sans prétendre à l'exhaustivité, on relèvera les dérogations dites de plein droit, en fonction des établissements concernés et des travaux qui y sont réalisés. Sont ainsi visés par l'article L. 221-9 du code du travail, les hôpitaux, les hôtels ou les musées. S'y ajoutent les dérogations pour les zones touristiques ou d'animation culturelle, les autorisations préfectorales d'ouverture dominicale ainsi que les autorisations exceptionnelles susceptibles d'être accordées par le maire ou l'inspecteur du travail. Beaucoup de ces dérogations ou ces autorisations ont des justifications aléatoires : ainsi tel quartier à Paris (le Marais) sera déclaré zone touristique, d'autre pas ; telle enseigne de l'avenue des Champs Élysées sera autorisée à ouvrir, d'autre non.
D'autres dérogations sont envisageables en fonction, par exemple, de la nature périssable des denrées ou du caractère exceptionnel du surcroît de travail requis. Les commerces alimentaires de détail peuvent ouvrir le dimanche matin jusqu'à midi.
Enfin, le droit européen est neutre à l'égard de l'ouverture le dimanche. Le souci de santé et de sécurité des travailleurs exige en effet un repos hebdomadaire après six jours de travail, mais la Cour européenne de justice a refusé de confirmer l'obligation d'une interruption exclusive le dimanche. Quant à la Commission européenne, elle a pour sa part considéré que « le choix d'un jour de fermeture des commerces fait intervenir des considérations de nature historique, culturelle, touristique, sociale et religieuse relevant de l'appréciation de chaque État membre ».
La présente proposition de loi, sans remettre en cause l'usage du repos dominical, vise donc à redonner tout son sens au droit au travail reconnu par la Déclaration universelle des droits de l'homme. En conséquence, il vous est proposé de maintenir le principe prévu par l'article L. 221-5 du code du travail selon lequel le repos hebdomadaire doit être donné le dimanche mais en prévoyant expressément la possibilité pour le salarié et l'employeur de déroger à cette règle d'un commun accord dans les activités de service en relation directe avec le public. En revanche, en aucun cas le salarié ne pourra y être contraint. De son côté, le travailleur qui acceptera de travailler le dimanche recevra en contrepartie un supplément de rémunération exonérée de cotisations sociales pouvant aller jusqu'à 100 % de la rémunération effectuée pour une durée équivalente suivant l'horaire normal de l'entreprise.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
L'article L. 221-5 du code du travail est complété par des mots et un alinéa ainsi rédigés : « , sauf accord par le salarié, dès lors que celui-ci travaille dans une entreprise en relation directe avec le public.
« Ce dernier ne peut en aucune manière y être contraint. Il bénéficie alors d'un supplément de rémunération. La majoration est, au maximum, de 100 % par rapport à celle qui serait due pour une durée équivalente effectuée suivant l'horaire normal de l'entreprise. »
Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS
Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-121395-0
ISSN : 1240 - 8468
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