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le 15 octobre 2002

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N° 245

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 8 octobre 2002

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION (n° 155) de M. CHRISTIAN ESTROSI ET PLUSIEURS DE SES COLLÈGUES tendant à la création d'une commission d'enquête visant à établir les conditions de la présence du loup en France et à évaluer le coût, l'efficacité et les conséquences des dispositifs engagés par les pouvoirs publics en faveur du loup,

PAR M. PATRICK OLLIER

Député.

--

Animaux.

MESDAMES, MESSIEURS,

L'Assemblée nationale est saisie aujourd'hui de la proposition de résolution n° 155, déposée le 29 juillet 2002 « tendant à la création d'une commission d'enquête visant à établir les conditions de la présence du loup en France et à évaluer le coût, l'efficacité et les conséquences des dispositifs engagés par les pouvoirs publics en faveur du loup ».

Cette proposition de résolution est présentée par M. Christian Estrosi, Mmes Henriette Martinez et Michèle Tabarot, MM. Bernard Accoyer, Michel Bouvard, Gabriel Biancheri, Jean-Claude Guibal, Lionnel Luca, Hervé Mariton, Vincent Rolland et Daniel Spagnou.

L'application conjointe de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des Assemblées parlementaires et des articles 140 et 141 du Règlement de l'Assemblée nationale conduit à examiner la recevabilité de cette proposition de résolution puis à se prononcer sur son opportunité.

La proposition de résolution n° 155 semble en premier lieu recevable, les faits susceptibles de donner lieu à enquête paraissant déterminés avec une précision suffisante. Ces mêmes faits ne font, par ailleurs, pas l'objet actuellement de procédures judiciaires, comme l'a confirmé le Garde des Sceaux dans une lettre adressée au Président de l'Assemblée nationale en date du 17 septembre 2002.

Sur le plan de l'opportunité, votre rapporteur vous suggère de considérer que la création d'une telle commission d'enquête est justifiée. Il paraît souhaitable de rappeler d'abord les faits à l'origine de nos problèmes actuels, de présenter ensuite les conclusions auxquelles était parvenue, en octobre 1999, la mission d'information « sur la présence du loup en France » constituée au sein de la commission de la production et des échanges, d'indiquer enfin les raisons pour lesquelles la formule de la commission d'enquête parlementaire doit être aujourd'hui envisagée, pour tenter de répondre à un problème particulièrement complexe et humainement douloureux.

En toutes choses, il faut partir des faits ; trois questions successives doivent être posées : quelle est d'abord l'origine du retour du loup dans les Alpes françaises ? Comment la situation a-t-elle évolué au cours des dernières années ? Comment singulariser la situation actuelle ?

L'origine du retour du loup dans l'arc alpin français est désormais bien connue : il apparaît ainsi, que c'est le 5 novembre 1992, qu'un agent du parc national du Mercantour notait, à l'occasion d'une opération de comptage d'animaux sauvages (mouflons, chamois), la présence d'un couple de loups dans le vallon de Mollières situé sur la commune de Valdeblore au cœur même de la zone centrale du parc national. A la même époque, du reste, la découverte dans le parc de cadavres de mouflons donnait à penser à des carnages opérés par des loups, les prédations dépassant celles qu'accomplissent ordinairement des chiens errants.

Il apparaît aussi que la présence du loup dans le Mercantour n'a été annoncée officiellement qu'au printemps 1993, plusieurs mois après les premières observations du prédateur.

Comment la situation a-t-elle évolué après 1992 ? Il est évidemment très difficile de mesurer la présence exacte de loups dans nos massifs alpins, s'agissant d'un animal farouche qui semble redouter le contact avec l'homme. Mais les prédations observées au cours des dernières années dans plusieurs départements ont permis d'affirmer que les loups réapparus au début des années 90 dans les Alpes-Maritimes se sont propagés ensuite dans les autres départements des Alpes-du-Sud, avant de gagner, sans doute en 1997, ceux du Nord.

L'on compterait ainsi 30 à 40 loups dans l'arc alpin français, vivant en meutes, principalement dans les Alpes-Maritimes ou seuls. Et ce sont plusieurs départements, plusieurs massifs qui sont aujourd'hui touchés : les Alpes-de-Haute-Provence, les Hautes-Alpes, les Alpes-Maritimes, la Drôme, l'Isère, la Savoie, la Haute-Savoie et le Var.

Comment caractériser maintenant la situation actuelle ?

Le loup a disparu du territoire français au début des années 30, alors que sa présence s'est maintenue et même développée dans les dernières décennies en Europe du sud, en Europe centrale, en Scandinavie et alors que, par comparaison, l'ours semble n'avoir jamais vraiment disparu des Pyrénées. Le « retour » à la fin du XXème siècle du loup, comme d'ailleurs celui des autres grands prédateurs (les lynx, les ours) s'explique largement par la protection accrue des animaux sauvages organisée par la communauté internationale, sans doute aussi par les progrès récents de la forêt et de la friche.

Quoi qu'il en soit, ce retour du loup a entraîné des préjudices considérables, totalement inacceptables pour les hommes et les femmes vivant dans nos montagnes. Le retour du loup ne s'est pas effectué, en effet, dans un espace vide d'hommes et d'activités, mais dans un monde lui-même très organisé, celui du pastoralisme, de l'élevage ovin extensif.

Comme l'indique l'exposé des motifs de la proposition de résolution qui nous est soumise, ce sont ainsi près de 7 000 ovins et caprins qui ont été tués depuis 1993. Il faut d'ailleurs ajouter à ces pertes en bétail très nombreuses, les préjudices indirects subis par les éleveurs, tels que les avortements de brebis ou l'amaigrissement des animaux qui entraînent d'importants « manques à gagner ».

Comme l'indique là encore l'exposé des motifs de la proposition de résolution, le retour du loup s'est soldé également par d'importantes prédations sur les animaux sauvages (mouflons, chamois, cervidés), alors que ces animaux présentent un grand attrait touristique pour le massif alpin.

L'on fait remarquer parfois que les accidents, les maladies (en premier lieu, la brucellose ovine), la foudre et surtout les chiens errants seraient responsables d'un nombre bien plus important de disparitions d'ovins. Il n'empêche que les prédations du loup risquent d'inciter à l'abandon du pastoralisme, de l'élevage ovin extensif, qui fait vivre encore nos montagnes. Parce que cet élevage assure un entretien des alpages, ainsi valorisés au plan touristique. Parce qu'il protège l'environnement, en réduisant les risques d'avalanches. Parce qu'il donne l'exemple d'une production naturelle et de qualité.

Votre rapporteur souhaite rappeler maintenant les travaux de la mission d'information « sur la présence du loup en France » qui, constituée au sein de la commission de la production et des échanges, a rendu son rapport en octobre 1999. Composée de dix députés représentant plusieurs de nos régions, cette mission d'information qui était présidée par M. Robert Honde et dont le Rapporteur était M. Daniel Chevallier a bien relevé la dimension humaine des problèmes ; elle s'est livrée à un examen très utile de l'efficacité des dispositifs existants pour indemniser les éleveurs et prévenir les attaques de loups ; elle a posé très clairement le principe de l'incompatibilité du loup et du pastoralisme durable.

La mission d'information, il faut y insister, a bien perçu tout d'abord les problèmes humains très concrets rencontrés par les éleveurs et les bergers, notant que beaucoup d'entre eux étaient gagnés par le découragement et le sentiment d'être abandonnés. Elle a observé que leur souffrance était d'autant plus forte, qu'ils pensent être confrontés déjà à des difficultés considérables, économiques (c'est dans ce secteur agricole que sont observés les revenus les plus faibles), mais aussi sanitaires (l'élevage ovin est traditionnellement confronté à de nombreuses maladies, telles que la brucellose, les salmonelloses ou la tremblante). Elle a observé aussi que l'incompréhension des éleveurs et bergers était d'autant plus aiguë, qu'ils ont la conviction d'assumer un rôle d'aménagement du territoire et de préservation de l'environnement largement réclamé par la société.

La mission s'est penchée, par ailleurs, de manière très utile sur les dispositifs retenus par les pouvoirs publics. Elle a fait remarquer que les programmes communautaires « Life loup » mis en place à partir de 1997 pour répondre aux problèmes posés présentaient de nombreuses limites : les indemnisations accordées aux professionnels se sont révélées très imparfaites, les éleveurs se trouvant, par exemple, mieux indemnisés pour les prédations d'un lynx que pour celles d'un loup ; quant aux mesures de prévention, elles ont semblé très insuffisantes, qu'il s'agisse du recours aux chiens de protection des troupeaux, du rassemblement des ovins la nuit dans des parcs de contention proches de la cabane du berger ou encore de la formule des aides pastoraux visant à renforcer le gardiennage des troupeaux en alpage.

La mission d'information a d'ailleurs remarqué que les programmes européens « Life », qui ont regroupé l'essentiel des actions menées par les pouvoirs publics étaient avant tout des programmes environnementaux, ayant en définitive largement pour objet de faciliter l'acceptation du loup.

Enfin, et c'est son mérite principal, la mission d'information « sur la présence du loup en France » a su poser très clairement le principe de « l'incompatibilité du loup et du maintien d'un pastoralisme durable ». Affirmant qu'on ne pouvait envisager un recul ou une disparition du pastoralisme dans nos montagnes, elle en a déduit qu'il n'y avait pas d'autre solution que l'exclusion du loup des zones de pastoralisme. Nos engagements internationaux, la Convention de Berne du 19 septembre 1979, « relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe » signée et ratifiée par la France et les règles européennes, en l'espèce la directive communautaire du 21 mai 1992, dite « directive habitats » assurent une protection spécifique aux animaux sauvages, dont la destruction, la capture ou l'enlèvement sont ainsi interdits, ce que l'on doit prendre en compte au nom du respect de la biodiversité. Mais ces deux textes organisent aussi des dispositifs dérogatoires auxquels la mission d'information suggérait de recourir pour les zones de pastoralisme. La mission, enfin, n'excluait pas la présence de loups, mais proposait de la limiter à des zones de « parcs à loups ».

Retenons, pour conclure sur les travaux de la mission d'information, que celle-ci a su dire, cela figure dans le rapport de M. Daniel Chevallier, qu'« aujourd'hui, ce n'est plus le loup, mais l'homme lui-même, qui constitue en montagne, l'espèce en voie de disparition ».

Depuis lors et votre rapporteur en vient à la proposition de résolution n° 155, la situation ne s'est pas améliorée dans l'arc alpin français, ce qui justifie l'adoption de la proposition de résolution de M. Christian Estrosi, créant une commission d'enquête parlementaire, dont il paraît souhaitable de présenter l'esprit.

Depuis la publication du rapport de la mission d'information à la fin de l'année 1999, la situation de nos régions alpines semble s'être aggravée : il suffit de rappeler l'attaque de loups survenue dans le parc du Mercantour sur la commune du Moulinet le 18 juillet 2002, qui s'est soldée par la disparition de plus de 400 moutons. Il semble, par ailleurs, que le nombre des attaques ait connu une augmentation au cours des dernières années, notamment dans les Alpes-Maritimes. Il est logique ainsi que 250 éleveurs venus de cinq pays (Espagne, France, Italie, Norvège et Suisse) aient pu exprimer le 8 septembre 2001 leur détermination face aux problèmes que pose le retour des grands prédateurs, allant même jusqu'à demander la renégociation de la Convention de Berne.

Les mesures prises par les pouvoirs publics au cours des deux dernières années n'auront pas suffi, du reste, à assurer une vraie préservation du pastoralisme. L'on pense en particulier au plan d'action gouvernemental pour 2000-2002 arrêté au printemps 2000, qui suggérait de recourir à un zonage pour faire coexister le loup et le pastoralisme montagnard, et prévoyait que, sur certains territoires, dits « de gestion », le loup serait préventivement exclu.

La mise en place, que votre rapporteur avait lui-même proposée en 1998 avec MM. Christian Estrosi et Michel Bouvard, d'une commission d'enquête apparaît dès lors aujourd'hui comme tout à fait nécessaire. Parce qu'elle permettrait de faire enfin la lumière sur les conditions réelles du retour du loup en France, la thèse officielle d'un « retour naturel » d'animaux venant des Apennins ou des Abruzzes semblant tout à fait sujette à caution. Seule une commission d'enquête parlementaire disposerait des moyens d'investigation nécessaires ; il faut rappeler que les travaux menés il y a maintenant plusieurs années par la Chambre d'agriculture des Alpes-Maritimes avaient donné à penser que de multiples irrégularités et disparitions de documents étaient tout à fait vraisemblables.

Les travaux d'une commission d'enquête permettraient également de mesurer le coût et l'efficacité des dispositifs mis en place par les pouvoirs publics face au retour du loup depuis maintenant dix ans. Ils rendraient possible ainsi, comme l'indique l'exposé des motifs de la proposition de résolution, un bilan coût-avantage tout à fait habituel en matière d'environnement.

La future commission devrait, pour répondre aux attentes fortes qui sont exprimées, travailler dans l'esprit suivant : la France doit respecter ses engagements internationaux et notamment ceux qui concernent le maintien de la biodiversité ; mais elle doit aussi impérativement sauver son économie montagnarde et ceux qui en vivent.

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du 8 octobre 2002, la commission de la production et des échanges a examiné la proposition de résolution n° 155 de M. Christian Estrosi et plusieurs de ses collègues, tendant à la création d'une commission d'enquête visant à établir les conditions de la présence du loup en France et à évaluer le coût, l'efficacité et les conséquences des dispositifs engagés par les pouvoirs publics en faveur du loup.

Après que M. Patrick Ollier, rapporteur, a présenté les grandes lignes du présent rapport, M. Christian Estrosi, usant de la faculté offerte par l'article 38 du Règlement, a tout d'abord salué la présentation faite par M. Patrick Ollier. Puis, il a souligné que la présence du loup en France posait un véritable problème humain, mais aussi économique ; ainsi, a-t-il indiqué, la présence d'un loup sur le territoire national coûte à la collectivité plus cher que la présence d'un instituteur ou le maintien d'une cabine téléphonique en zone rurale. Il a déploré cette situation, paradoxale à ses yeux à une période où des efforts doivent sans cesse être consentis pour maintenir les populations dans ces zones rurales. Il a estimé qu'on ne pouvait, en conséquence, accepter un maintien de la présence du loup sans justification et continuer à jouer aux « apprentis sorciers » sur cette question.

Ayant rappelé que la Convention de Berne permettait d'éliminer les loups introduits de manière artificielle sur le territoire national, il a déploré qu'il ait été décidé de maintenir près de 50 loups dans le massif alpin sur la seule déclaration de fonctionnaires du ministère chargé de l'environnement, qui avaient estimé au vu d'empreintes génétiques, que les loups viendraient des Abruzzes.

Il s'est déclaré conscient des sourires que cette question pouvait susciter à Paris, mais a insisté sur l'implication des élus sur le terrain, qui se battent depuis des années pour le maintien du pastoralisme. Il a fait observer que de nombreux éleveurs avaient dû mettre un terme à leur activité depuis 1992 et a relevé que les offres de locations annuelles de terrains pour le pâturage des transhumants étaient de plus en plus souvent refusées dans les massifs concernés.

Il a estimé qu'il convenait désormais de faire toute la vérité sur la présence du loup en France, sans tomber dans l'outrance.

Après avoir salué la qualité du rapport précité de la mission d'information, il a regretté que celui-ci n'ait pas été suivi d'effets. Il s'est notamment étonné du refus de mettre en œuvre la proposition d'un recours à l'article 9 de la Convention de Berne qui permet de déroger aux dispositions de cette dernière relatives à la conservation de la vie sauvage, en cas d'atteinte aux activités d'élevage. Il a en outre rappelé que, si de nombreuses municipalités avaient adopté des délibérations afin de mettre en œuvre des battues administratives, délibérations d'ailleurs reconnues comme régulières par le Conseil d'Etat, Mme Dominique Voynet, alors ministre chargée de l'environnement, avait fait échec à ces initiatives en publiant, in extremis, une circulaire. Il a regretté que les conclusions de la mission d'information conduite par MM. Robert Honde et Daniel Chevallier aient ainsi été ignorées et a émis l'espoir qu'une commission d'enquête permette de faire la lumière sur les conditions d'introduction du loup dans le parc du Mercantour en 1992. Il a également souhaité que cette commission puisse faire le point sur les dysfonctionnements existant entre les actions entreprises respectivement par le ministère chargé de l'agriculture et le ministère chargé de l'environnement.

Après avoir noté qu'il conviendrait également de s'interroger sur le devenir du programme européen « Life loup », qui doit prendre fin en mars 2003, il a exprimé le souhait que les membres de la commission de la production et des échanges adoptent la proposition de résolution.

M. Patrick Ollier, président, a alors indiqué que M. Augustin Bonrepaux lui avait fait part de son souhait de voir élargir l'objet de la commission d'enquête à l'ensemble des prédateurs.

M. François Brottes a souligné l'attachement de son groupe à la biodiversité, d'ailleurs récemment défendue par le Président de la République, mais aussi à l'équilibre sylvo-cynégétique auquel les prédateurs sont nécessaires.

Puis, il a souligné que la vraie question était celle de la survie du pastoralisme en montagne. Aussi, il a jugé que, s'il était légitime qu'une commission d'enquête détermine l'origine de la présence du loup dans les Alpes françaises, son travail ne devait pas constituer un alibi pour retarder la mise en œuvre des mesures nécessaires pour gérer la crise et notamment de celles recommandées par la mission d'information sur la présence du loup en France. Il a également jugé que, même s'il devait être établi que le retour du loup est d'origine naturelle, le problème de l'incompatibilité de sa présence avec le pastoralisme demeurerait entier.

En conséquence, il a indiqué que le groupe socialiste était favorable à la création d'une commission d'enquête et à l'examen par celle-ci des problèmes posés par d'autres prédateurs que le loup, mais qu'il appartiendrait aux membres de celle-ci de veiller à ce que le Gouvernement prenne aussi rapidement que possible les mesures propres à soulager le désespoir des éleveurs. Il a, à cet égard, regretté que de nombreux instruments restent inutilisés, qu'il s'agisse des possibilités offertes par l'article 9 de la Convention de Berne du 19 septembre 1979 « relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe » ou de celles prévues par circulaire du ministre chargé de l'environnement. Enfin, il a souligné l'intérêt des travaux de la mission d'information sur la présence du loup en France, dont il serait souhaitable que la commission d'enquête s'inspire.

M. Patrick Ollier, président, a exprimé son accord avec l'analyse de M. François Brottes.

M. Daniel Spagnou a, tout d'abord, signalé l'importance des problèmes liés à la présence du loup pour les éleveurs et les montagnards. Il a admis que la présence d'autres prédateurs, tel le lynx, soulevait également des difficultés et qu'elle pouvait justifier une réflexion. Il a toutefois jugé que l'urgence n'était pas la même pour les autres prédateurs que dans le cas de la présence du loup.

M. Patrick Ollier, président, a souligné que la rédaction actuelle de la proposition de résolution avait le mérite de la clarté et qu'un élargissement inconsidéré du champ des investigations pouvait créer des difficultés.

M. Roland Chassain a mis l'accent sur l'importance de cette question et l'angoisse des éleveurs dans les alpages, en jugeant que les pouvoirs publics ne devaient pas rester plus longtemps otages de lobbys prétendument écologistes, soucieux de remettre en cause les traditions locales. Il a en outre estimé que la profession d'éleveur était suffisamment difficile dans le contexte actuel pour que l'argent dépensé en raison de la présence du loup puisse être mieux utilisé pour soutenir la filière. Enfin, il a estimé préférable que la commission d'enquête concentre ses investigations sur le seul cas du loup.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard a fait part, à titre personnel, de son opposition à la création de cette commission d'enquête, en rappelant qu'une mission d'information avait déjà travaillé sur cette question et en estimant très orienté l'exposé des motifs de la proposition de résolution. Elle a jugé, compte tenu des nombreuses causes contribuant aux difficultés de la filière ovine, qu'il serait plus pertinent que la commission d'enquête étudie les conditions d'exercice du pastoralisme, compte tenu de la présence du loup, en soulignant que l'écologie reposait sur l'équilibre entre les espèces et que les prédateurs jouaient un rôle de régulation des populations indispensable. Puis, elle a exprimé son profond désaccord avec les comparaisons de coût formulées par M. Christian Estrosi, en estimant qu'il n'était pas possible de mettre sur le même plan les animaux et les hommes. Enfin, elle a rappelé que le Président de la République avait, à Johannesburg, estimé que l'effort de la France en faveur de la biodiversité et de la protection des espèces sauvages était insuffisant et que la convention de Berne prévoyait également la mise en œuvre de mesures tout à fait nécessaires de protection des animaux sauvages.

Puis la commission est passée à l'examen de l'article unique.

· Article unique

M. Patrick Ollier, président, a proposé d'élargir le champ des investigations de la commission d'enquête aux conditions d'exercice du pastoralisme en zone de montagne, en indiquant que cette rédaction permettait de prendre en compte les remarques de Mme Geneviève Perrin-Gaillard et qu'elle offrirait également aux membres de la commission d'enquête la possibilité de s'intéresser aux problèmes posés par la présence d'autres prédateurs que le loup, s'ils le souhaitaient.

M. Christian Estrosi a estimé que la situation des différents prédateurs ne présentait pas les mêmes problèmes ; à la différence de celles du loup, les conditions d'implantation d'ours slovènes dans les Pyrénées ne sont pas susceptibles, par exemple, de justifier une enquête. En toute hypothèse, la création d'une commission d'enquête sur la présence du loup en France répond à une demande forte exprimée depuis de nombreuses années ; les membres de la mission d'information eux-mêmes, qui avaient clairement conclu à l'incompatibilité du loup et du maintien d'un pastoralisme durable, ont semblé regretter de ne pas avoir disposé des moyens d'investigation nécessaires. M. Christian Estrosi a estimé que la formule de la commission d'enquête permettrait d'accéder à la vérité et de disposer des moyens de mieux faire face aux problèmes posés. Il a exprimé son accord avec l'amendement proposé par M. Patrick Ollier.

M. Serge Poignant a exprimé à son tour son accord avec l'amendement du rapporteur et estimé que les différents prédateurs posaient des problèmes distincts.

M. François Brottes s'est déclaré très favorable à l'amendement de M. Patrick Ollier, soulignant que la vraie question posée est celle de la survie du pastoralisme en montagne.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard a rappelé à nouveau que le vrai problème selon elle, tenait aux conditions d'exercice du pastoralisme, la question du retour du loup n'en étant qu'un aspect. Elle a fait part néanmoins de son abstention sur l'amendement de M. Patrick Ollier.

La commission a ensuite adopté l'amendement de M. Patrick Ollier ainsi que la proposition de résolution n° 155 ainsi modifiée.

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En conséquence, la commission de la production et des échanges vous demande d'adopter la proposition de résolution, dont le texte suit :

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d'une commission d'enquête

sur les conditions de la présence du loup en France et

l'exercice du pastoralisme dans les zones de montagne

Article unique

Il est créé, en application des articles 140 et suivants du Règlement de l'Assemblée nationale, une commission parlementaire de trente membres chargée d'enquêter sur les conditions de la présence du loup en France et l'exercice du pastoralisme dans les zones de montagne.

Rapport n° 245 de M. Patrick Ollier au nom de la commission des affaires économiques sur la proposition de résolution n° 155 de création d'une commission d'enquête sur le loup en France.


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