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le 15 janvier 2003

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N° 522

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 janvier 2003.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI (n° 337), autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre la République française et la République fédérale d'Allemagne en vue d'éviter les doubles impositions et d'établir des règles d'assistance administrative et juridique réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, ainsi qu'en matière de contributions des patentes et de contributions foncières, du 21 juillet 1959, modifiée par l'avenant du 9 juin 1969 et par l'avenant du 28 septembre 1989, signé à Paris le 20 décembre 2001,

PAR M. GILBERT GANTIER,

Député

--

Traités et conventions.

Mesdames, Messieurs,

L'Assemblée nationale est saisie en première lecture du projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre la République française et la République fédérale d'Allemagne en vue d'éviter les doubles impositions et d'établir des règles d'assistance administrative et juridique réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, ainsi qu'en matière de contributions des patentes et de contributions foncières, du 21 juillet 1959, modifiée par l'avenant du 9 juin 1969 et par l'avenant du 28 septembre 1989, signé à Paris le 20 décembre 2001 (n° 337).

Cet avenant résulte de la réforme fiscale adoptée par les autorités allemandes au cours de l'année 2000 et dont votre Rapporteur présente ici les grandes lignes, avant d'analyser les modifications de la convention fiscale bilatérale qu'elle implique.

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* *

I - PRÉSENTATION DE LA CONVENTION FISCALE FRANCO-ALLEMANDE DU 21 JUILLET 1959

A - Présentation générale de la convention et de ses avenants de 1969 et 1989

La convention fiscale franco-allemande du 21 juillet 1959 vise à éviter les doubles impositions qui pourraient résulter de l'application des législations fiscales allemande et française, pour une même période, à des revenus perçus par une même personne physique ou morale.

La convention qui lie notre pays à l'Allemagne est conforme, en matière de règles d'imposition des bénéfices des personnes morales et des revenus des personnes physiques, au modèle de convention fiscale établi par l'OCDE. Elle permet de résoudre les problèmes qui se posent le plus couramment dans le domaine de la double imposition juridique internationale.

Elle présente toutefois quelques particularités. Elle comprend, par exemple, un régime spécifique pour les travailleurs frontaliers, dispositif dérogatoire d'imposition à la résidence de ces personnes (alors qu'habituellement ces rémunérations sont imposées dans le pays du lieu d'exercice de l'activité). De même, cette convention prévoit un mécanisme original de prélèvement de la retenue à la source sur les dividendes. Par ailleurs, la convention fiscale comprend un système d'échange de renseignement et d'assistance administrative en matière d'assiette et de recouvrement de l'impôt.

L'avenant du 9 juin 1969 a principalement modifié le régime d'imposition des dividendes en accordant notamment le transfert de l'avoir fiscal au profit des personnes résidentes d'Allemagne et en instituant le dispositif particulier de retenue à la source. Cet avenant a aussi instauré entre nos deux Etats un échange automatique d'information en cas de modifications de nos législations fiscales internes dans le domaine de l'impôt sur les sociétés et des revenus distribués.

L'avenant du 28 septembre 1989 a fait entrer l'impôt de solidarité sur la fortune dans le champ des impôts couverts par la convention. Il a, en outre, modifié les articles conventionnels traitant de la rémunération du personnel employé de manière temporaire à l'étranger et des travailleurs frontaliers et créé un dispositif de bénéfice des avantages conventionnels au profit des OPCVM allemands qui jusqu'alors ne pouvaient obtenir ni la retenue à la source au taux réduit de 15 %, ni le transfert de l'avoir fiscal attaché à des dividendes de source française.

B - Le dispositif conventionnel actuel applicable aux dividendes

Le régime des dividendes est prévu par l'article 9 de la convention. Remanié par les avenants de 1969 et 1989, il prévoit une imposition de ces rémunérations dans l'Etat de résidence du bénéficiaire, sachant qu'une retenue à la source au taux réduit de 15 % peut être prélevée dans l'Etat source des dividendes. De plus, les dividendes versés par une société de capitaux française à un résident allemand ouvrent droit à un transfert de l'avoir fiscal. Cet article prévoit également que les dividendes distribués par une société d'un Etat à une société résidente de l'autre Etat détenant plus de 10 % du capital de la première société ne sont pas soumis à retenue à la source dans l'Etat d'origine et qu'ils n'ouvrent corrélativement pas droit à avoir fiscal.

Enfin, de manière originale, la retenue à la source n'est jamais acquittée lors de la distribution de dividendes par des sociétés françaises à des bénéficiaires allemands. En effet, afin d'être certain que l'avoir fiscal bénéficie réellement à des résidents allemands, cette retenue est soustraite du montant de l'avoir fiscal dont le Trésor allemand réclame le transfert au Trésor français après que l'usager allemand a déclaré l'avoir fiscal sur sa déclaration d'impôt sur le revenu, pour les personnes physiques, ou de résultat, pour les personnes morales.

II - PRÉSENTATION DE LA RÉFORME FISCALE ADOPTÉE EN ALLEMAGNE AU COURS DE L'ANNÉE 2000 ET DE L'AVENANT DU 20 DÉCEMBRE 2001

A - Principales mesures de la réforme fiscale allemande adoptée en dernière lecture le 14 juillet 2000 par le Bundesrat

La réforme fiscale allemande de juillet 2000, prévue pour être mise en place au cours de la période 2001-2005, constitue le second volet de la réforme qui avait d'abord porté sur les années 1999 et 2000. Il convient de distinguer les mesures visant les ménages, des mesures applicables aux entreprises.

1) Mesures visant les ménages :

- allégement de l'ensemble du barème de l'impôt sur le revenu (le taux minimal passe de 19,9 % en 2001 à 15 % en 2005 ; le taux maximal est ramené de 48,5 % en 2001 à 42 % en 2005) ;

- l'abattement personnel d'impôt sur le revenu (tranche à 0 % de l'impôt sur le revenu) est relevé de 7 150 euros en 2000 à 7660 euros en 2005 ;

- suppression de l'avoir fiscal, remplacé par un abattement de 50 % applicable aux dividendes imposables ;

- abaissement à 1 % du seuil de 10 % au-delà duquel les plus values immobilières sont imposables.

2) Mesures visant les entreprises :

- les deux taux d'impôt sur les sociétés de 40 % (bénéfices non distribués) et 30 % (bénéfices distribués) sont abaissés et unifiés à 25 % ;

- exonération des plus-values de cession de participations allemandes détenues depuis au moins un an, quel que soit le niveau de participation ;

- exonération des dividendes de source allemande ou étrangère, quel que soit le niveau de participation de la société distributrice ;

- augmentation de la plupart des durées d'amortissement ;

- baisse du plafond de l'amortissement dégressif des actifs mobiliers ;

- extension aux succursales allemandes de sociétés étrangères et aux sociétés de personnes des règles fiscales tendant à lutter contre la sous-capitalisation ;

- durcissement du dispositif de lutte contre les paradis fiscaux : le seuil de participation dans les sociétés étrangères visées par le dispositif est abaissé de 50 % à 10 %.

B - Conséquence de la réforme fiscale allemande en matière d'imposition des dividendes

Jusqu'en 2000, nos partenaires allemands disposaient d'un régime d'élimination des doubles impositions économiques des dividendes semblable à celui qui prévaut encore à l'heure actuelle en France. Un crédit d'impôt (équivalent allemand de l'avoir fiscal) était attaché aux dividendes de source allemande. Il n'était accordé qu'aux seuls résidents d'Allemagne.

Cette réforme, applicable dès les dividendes versés en 2001, prévoit la suppression de l'avoir fiscal attaché aux dividendes de source allemande. L'élimination de la double imposition économique des dividendes, que le dividende soit d'origine allemande ou étrangère, est désormais assurée de la manière suivante :

- pour les personnes physiques, le dividende est imposé après déduction d'un abattement de 50 % ;

- pour les personnes morales, le dividende est exonéré, quel que soit le niveau de participation dans la société distributrice.

La double imposition économique des dividendes étant désormais intégralement prise en charge par l'Allemagne, le transfert de l'avoir fiscal attaché à des dividendes de source française n'avait plus lieu d'être. Si l'avoir fiscal continuait à être transféré, on parviendrait en effet, dans certains cas, à un revenu net perçu par le bénéficiaire allemand supérieur au dividende mis en paiement. Pour cette raison, l'avenant du 20 décembre 2001 modifie la convention de 1959, afin de remédier à cette situation.

C - L'avenant du 20 décembre 2001

L'avenant à la convention fiscale franco-allemande du 21 juillet 1959, signé à Paris le 20 décembre 2001 comporte quatre articles modifiant les articles 9 et 20 de la convention de 1959 et prévoyant les modalités de l'entrée en vigueur et de prise d'effet des nouvelles dispositions. L'article 1er supprime la possibilité pour les résidents d'Allemagne de bénéficier du transfert de l'avoir fiscal et il permet désormais d'appliquer, dans les cas prévus, la retenue à la source de 15 % dès la mise en paiement des dividendes. L'article 2 prévoit, pour sa part, les modalités d'élimination de la double imposition des dividendes versés à des résidents d'Allemagne.

Les articles 3 et 4 définissent respectivement les modalités de l'entrée en vigueur et de prise d'effet des nouvelles dispositions, soit le premier jour du deuxième mois suivant le jour de réception de la notification d'achèvement des procédures d'approbation, ainsi que les règles de publicité de cet avenant.

Celui-ci a été approuvé en dernière lecture par le Bundestag le 11 septembre 2002. La loi d'approbation est parue dans la Bundesgesetzblatt (Journal officiel allemand) le 17 septembre 2002. Du côté allemand, l'avenant à la convention fiscale franco-allemande du 21 juillet 1959, signé à Paris le 20 décembre 2001, est donc ratifié. Ce texte pourra donc entrer en vigueur dès le premier jour du deuxième mois qui suivra la notification par la France à l'Allemagne de l'accomplissement des procédures internes françaises requises pour l'approbation.

III - IMPACT BUDGÉTAIRE DE LA SUPPRESSION DU TRANSFERT DE L'AVOIR FISCAL POUR LA FRANCE ET L'ALLEMAGNE

Environ 37 000 demandes de transfert de l'avoir fiscal attaché à des dividendes de source française à destination de résidents d'Allemagne étaient reçues chaque année par la direction générale des impôts.

Le flux cumulé de ce transfert d'avoir fiscal peut être évalué à 51 millions d'euros pour l'année 1999, 58,3 millions d'euros au titre de 2000 et 62,6 millions pour 2001, dernière année pour laquelle des statistiques ont pu être établies, soit une augmentation de 15 % entre 1999 et 2000 et de 7 % entre 2000 et 2001, alors que dans la même période, le taux de l'avoir fiscal attaché aux dividendes versés à des personnes morales a constamment diminué.

L'avoir fiscal, considéré comme un dividende pour l'application de la convention étant lui-même soumis à retenue à la source de 15 % en France, le gain financier pour le Trésor français peut être estimé à 49,6 millions d'euros (85 % de 62,6 millions d'euros). Du côté allemand, l'impact direct de cette mesure ne peut être chiffré. Seule l'économie générale de la mesure visant à supprimer l'imposition des dividendes versés aux personnes morales est connue. Elle peut être estimée à 1,5 milliard d'euros, pour l'ensemble des revenus concernés, sachant qu'une partie de cette perte fiscale est compensée par la suppression de l'avoir fiscal.

Il peut être utilement précisé que l'objet de l'avenant du 20 décembre 2001 à la convention fiscale franco-allemande du 21 juillet 1959 n'entraîne aucune conséquence financière pour les actionnaires français de sociétés allemandes dans la mesure où l'avoir fiscal attaché à des dividendes de source allemande n'était jamais transféré à des actionnaires français.

Financièrement, seul le Trésor public allemand est touché par cette modification de la convention fiscale franco-allemande puisqu'il va désormais prendre en charge l'élimination de la double imposition économique des dividendes de source française alors qu'auparavant cette charge incombait au Trésor public français.

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En conclusion, et pour ces raisons, votre Rapporteur vous propose d'adopter le présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du 14 janvier 2003.

Après l'exposé du Rapporteur et suivant les conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (no 337).

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La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de l'avenant figure en annexe au projet de loi (n° 337).

N° 0522 - Rapport  sur le projet de loi de ratification de la convention d'assistance administrative et juridique avec l'Allemagne (M. Gilbert Gantier)


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