Version PDF
Retour vers le dossier législatif

Document

mis en distribution

le 19 mars 2004

graphique

N° 1467

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 3 mars 2004.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI n° 1327, autorisant l'approbation d'une convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tchèque en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole),

PAR M. FRANÇOIS LONCLE,

Député

--

SOMMAIRE

___

INTRODUCTION 5

I - LA SITUATION EN RÉPUBLIQUE TCHÈQUE 7

A - LA SITUATION ÉCONOMIQUE 7

1) Accélération de la croissance en 2003 7

2) Evolution du déficit courant 7

B - LES ÉCHANGES COMMERCIAUX ENTRE LA FRANCE ET
     LA RÉPUBLIQUE TCHÈQUE
8

1) Des échanges commerciaux franco-tchèques en progression constante 8

2) Les importations en provenance de République tchèque
    poursuivent leur ralentissement mais restent dynamiques
8

II - LES DISPOSITIONS DE LA CONVENTION FISCALE 11

A - LE CHAMP D'APPLICATION DE L'ACCORD 11

1) Les définitions générales 11

2) La prévention de l'évasion et de la fraude fiscale 11

3) La taxation des impôts sur le revenu 13

B - UN CADRE JURIDIQUE ET FISCAL CLASSIQUE 13

1) L'élimination des doubles impositions 13

2) Le règlement de conflits 14

CONCLUSION 15

EXAMEN EN COMMISSION 17

Mesdames, Messieurs,

La convention fiscale entre la France et la République tchèque, signée à Prague le 28 avril 2003, est destinée à se substituer à la convention franco-tchécoslovaque du 1er juin 1973, actuellement en vigueur, afin de tenir compte de la partition de ce pays le 1er janvier 1993 et de moderniser les dispositions de ce texte.

Dans ses grandes lignes, cette nouvelle convention est conforme aux principes retenus par l'OCDE, mais présente néanmoins certains traits originaux qui seront plus particulièrement commentés.

Voter Rapporteur rappellera brièvement la situation économique de la République Tchèque ainsi que l'état des échanges économiques franco-tchèques, avant de détailler le contenu de la convention fiscale.

I - LA SITUATION EN RÉPUBLIQUE TCHÈQUE

A - La situation économique

1) Accélération de la croissance en 2003

La République tchèque est, avec la Slovénie, l'un des pays les plus développés des PECO1. Après avoir ralenti en 2001 et 2002, dans un contexte international difficile, la croissance tchèque s'est accélérée en 2003, soutenue principalement par la consommation des ménages, pour s'établir à environ 3%. Le déficit courant s'élève à près de 6% du PIB.

La réforme budgétaire de l'automne 2003 devra être approfondie, notamment par une réforme du système des retraites et de santé pour garantir l'équilibre à long terme des finances publiques.

Le chômage a, quant à lui, sensiblement progressé en 2003 (10,3% contre 9,8% en 2002), en raison notamment de la poursuite de la restructuration de certains secteurs.

2) Evolution du déficit courant

En 2002, les flux d'IDE entrants (13,4% du PIB en 2002 dont 41% liés aux privatisations) avaient largement suffi à couvrir le déficit courant (6,4% du PIB). En revanche, sur les trois premiers trimestres de 2003, le compte financier (+6% du PIB) suffit juste à couvrir le déficit courant qui reste élevé (-5,9% du PIB), les investissements étrangers n'ayant pas été soutenus par des privatisations majeures en 2003, contrairement à 2002 (privatisation de Transgaz). Dans les années à venir, les privatisations restantes (Cesky Telecom, Unipetrol...) soutiendront les investissements étrangers, qui devraient suffire à couvrir largement le déficit courant.

B - Les échanges commerciaux entre la France et la République tchèque

Alors que la croissance des échanges commerciaux entre la France et la République tchèque demeurait très soutenue depuis 1993, elle s'est fortement ralentie en 2002 en raison du tassement de l'activité en France et en République tchèque, ralentissement qui s'est poursuivi au 1er semestre de l'année 2003.

1) Des échanges commerciaux franco-tchèques en progression constante

Les ventes françaises à la République Tchèque ont progressé de 16% en moyenne annuelle depuis 1995 contre une moyenne communautaire de 11,8%. La France voit ainsi ses ventes croître sur une longue période, plus vite que celles de l'Italie ou de l'Allemagne. Cette évolution témoigne du rattrapage rapide des exportations françaises, qui partaient, il est vrai, de niveaux relativement peu élevés.

La part de marché de la France est ainsi passée de 3,4% en 1993 à 4,9% en 2002, ce qui la plaçait au quatrième rang des exportateurs, derrière l'Allemagne (32,6% de parts de marché), l'Italie et la Slovaquie (5,2%) et devant la Chine, qui confirme quant à elle sa progression dans les importations tchèques (4,8% de parts de marché).

Excédentaire en faveur de la France, le solde commercial s'est cependant détérioré de 79 millions d'euros entre le 1er semestre 2002 et le 1er semestre 2003 pour s'établir à 167 millions d'euros, sous l'effet du dynamisme des importations françaises.

Les échanges commerciaux franco-tchèques se caractérisent par une part considérable d'échanges intra-branches. La structure des échanges commerciaux entre la France et la République Tchèque est très proche. Sur les quatre premiers produits exportés par la France et la République tchèque, trois sont communs. Au premier semestre 2003, la France exporte ainsi vers la République tchèque, par ordre décroissant : les véhicules automobiles (13,2% des ventes), les équipements automobiles (6,8%), les préparations pharmaceutiques (5,6%), puis les produits agrochimiques (3,7%). La République tchèque, de son côté, exporte vers la France les équipements pour automobiles (13,4%), les véhicules automobiles (12,9%), les composants électroniques (4,9%) et les pneumatiques (4,2%). Dans le cadre de l'intégration croissante des deux économies, ces échanges devraient encore progresser.

2) Les importations en provenance de République tchèque poursuivent leur ralentissement mais restent dynamiques

La République tchèque a amélioré sa position en tant que fournisseur de la France, (de la 32ème à la 30ème place), ce qui confirme une tendance à moyen terme à la diversification géographique des exportations tchèques (38ème fournisseur de la France en 2000).

Les importations en provenance de République tchèque poursuivent leur ralentissement mais restent dynamiques (+8,5% au 1er semestre 2003 par rapport au 1er semestre 2002, contre +11,3% en 2002) et s'établissent à 896 millions d'euros. On constate là l'effet du ralentissement économique français, alors que la légère dépréciation de la couronne au premier semestre 2003 (-1,4% en glissement annuel) était favorable à la compétitivité des produits tchèques.

L'importance de l'industrie automobile pour les exportations tchèques témoigne de la spécialisation grandissante de l'économie tchèque. Les équipements et véhicules automobiles constituent en effet respectivement 13,4% et 12,9% des ventes tchèques vers la France. Les exportations tchèques de biens d'équipement sont également très dynamiques (+23,4%), notamment les équipements électroniques et électriques (+36,4%). Dans le secteur des biens intermédiaires, on note des taux de croissance importants pour les composants électriques et électroniques (+17,4%), les métaux et produits métalliques (+12,5%) et les produits chimiques et plastiques (+4,9%).

II - LES DISPOSITIONS DE LA CONVENTION FISCALE

A - Le champ d'application de l'accord

1) Les définitions générales

Les impôts couverts par la convention sont énumérés à l'article 2. La liste des impôts qui figurait dans la convention de 1973 a été actualisée et complétée de part et d'autre. Il convient également de se référer à l'article 8, paragraphe 4, en ce qui concerne l'assujettissement des compagnies aériennes à la taxe professionnelle.

L'article 3 énonce, selon l'usage, les définitions nécessaires à l'interprétation des termes utilisés dans la convention. Les expressions « trafic international » et « national » sont désormais définies. En outre, il est précisé que le droit fiscal prévaut sur les autres branches du droit pour l'interprétation des termes non définis dans la convention.

La notion de résidence, qui constitue un critère essentiel de répartition des droits d'imposer entre les deux Etats, est définie à l'article 4. Les paragraphes 1 et 4, ainsi que le paragraphe 2 du Protocole, précisent que sont des résidents les Etats eux-mêmes, leurs collectivités locales et leurs personnes morales de droit public, ainsi que les sociétés de personnes dont les résultats sont assujettis à l'impôt entre les mains de l'ensemble de leurs associés.

2) La prévention de l'évasion et de la fraude fiscale

L'article 5 reprend la notion classique d'établissement stable. Il en résulte que les chantiers de construction et d'assemblage, qui dans la convention franco-tchécoslovaque de 1973 ne constituaient jamais des établissements stables, sont désormais couverts par cette définition si leur durée dépasse douze mois. Cette disposition permet ainsi d'aligner la durée sur celle retenue dans le modèle de convention de l'OCDE. Le paragraphe 3 du Protocole précise que les chantiers et les activités de supervision liées à un chantier qui ont débuté avant la date de prise d'effet de la convention ne constituent pas des établissements stables.

L'article 6 prévoit, comme il est d'usage, l'imposition des revenus des biens immobiliers au lieu de situation de ces biens. Les biens immobiliers sont définis par rapport à la législation de l'Etat où ils sont situés. Il est précisé que sont considérées comme des biens immobiliers les options et promesses portant sur de tels droits. Les revenus des droits conférant au détenteur la jouissance de biens immobiliers situés dans l'un des Etats contractants sont imposables dans cet Etat.

La règle classique d'imposition des bénéfices d'entreprises tirée du modèle de l'OCDE prévoit l'imposition exclusive des sociétés dans l'Etat de leur siège, sauf si elles disposent dans l'autre Etat d'un établissement stable, auquel cas les bénéfices attribuables à cet établissement stable peuvent être imposés par l'Etat dans lequel il est situé (article 7).

L'article 8 maintient le principe d'imposition exclusive des bénéfices du transport international maritime ou aérien dans l'Etat du siège des entreprises exploitant les navires ou aéronefs. Conformément aux commentaires du modèle de l'OCDE, le champ d'application de cette clause est étendu aux activités accessoires du transport international (location de conteneurs). Le paragraphe 4 dégrève de la taxe professionnelle en France, ou de son équivalent en République tchèque, les établissements qui sont exploités par une entreprise de transport aérien dont le siège se trouve dans l'autre Etat.

Le cas des transferts de bénéfices entre entreprises associées est réglé conformément au principe de pleine concurrence posé par le modèle de l'OCDE. Le paragraphe de la convention de 1973 prévoyant que, lorsqu'un Etat redresse les bénéfices d'une société, l'autre Etat accorde, s'il estime ce redressement fondé, un ajustement corrélatif des bénéfices, n'a pas été repris. Les deux Etats gardent cependant la possibilité d'éliminer toute double imposition par voie d'accord amiable conformément à l'article 25 du modèle de l'OCDE (article 9).

L'article 10 fixe le régime applicable en matière de dividendes. L'Etat de la source peut imposer les dividendes à un taux n'excédant pas 10 % de leur montant brut. Toutefois, le régime applicable aux dividendes payés aux sociétés mères (participation directe d'au moins 25 %) est l'imposition exclusive dans l'Etat de résidence du bénéficiaire effectif. La définition des dividendes est reprise du modèle de l'OCDE.

L'article 12 soumet à une retenue à la source de 10 % de leur montant brut les redevances payées à un résident de l'autre Etat. Toutefois, les droits d'auteur sont exonérés (sauf ceux portant sur les logiciels) et le taux de la retenue à la source est limité à 5 % en ce qui concerne la location d'équipements industriels, commerciaux ou scientifiques. Le paragraphe 4 du Protocole précise que, conformément aux principes posés par les commentaires du modèle de l'OCDE, les prestations d'assistance technique ne constituent pas des redevances pour l'utilisation d'un savoir-faire susceptibles d'être imposées à la source.

Le régime applicable aux gains en capital est défini à l'article 13. Le dispositif de base est conforme au modèle de l'OCDE, mais il est complété par des dispositions qui permettent à la France d'appliquer sa législation interne aux cessions de titres de sociétés à prépondérance immobilière qui sont imposables dans l'Etat où les immeubles sont situés.

3) La taxation des impôts sur le revenu

L'imposition des professions libérales est prévue dans l'Etat d'exercice de l'activité si l'exploitation est réalisée par le biais d'une base fixe ou lorsque l'activité est exécutée pendant une période de six mois au cours de douze mois consécutifs (article 14).

L'article 19 définit le régime d'imposition des rémunérations et pensions publiques. Il maintient, conformément à la règle préconisée par l'OCDE, le principe d'imposition de ces revenus dans l'Etat de source.

Les dispositions actuellement en vigueur relatives aux rémunérations des étudiants et professeurs ont été refondues en un seul article. Conformément au modèle de l'OCDE, les sommes versées aux étudiants ne sont pas imposables dans l'Etat où ils poursuivent leurs études dans la mesure où elles n'y trouvent pas leur source. Par ailleurs, le paragraphe 2 exonère dans l'Etat d'exercice de l'activité, durant une période de deux ans, les rémunérations des professeurs qui, étant précédemment résidents d'un Etat, séjournent dans l'autre Etat afin d'y enseigner. Cette disposition ne s'applique qu'à l'égard des activités financées principalement par des fonds publics de l'Etat d'envoi (article 20).

L'article 21 concerne le régime fiscal des revenus qui ne sont pas traités dans les articles précédents de la convention. Selon la règle habituelle, ces revenus ne sont imposables que dans l'Etat de résidence de leur bénéficiaire lorsque la personne qui les reçoit en est le bénéficiaire effectif à moins qu'ils ne soient rattachables à un établissement stable ou une base fixe que leur bénéficiaire possède dans l'autre Etat.

Le régime d'imposition de la fortune est défini à l'article 22. Conformément au modèle de l'OCDE, les biens immobiliers sont imposables dans l'Etat où ils sont situés. Comme c'est habituellement le cas dans les conventions signées par la France, cette règle a été étendue aux actions des sociétés à prépondérance immobilière.

B - Un cadre juridique et fiscal classique

1) L'élimination des doubles impositions

Les modalités d'élimination des doubles impositions par les deux Etats sont décrites à l'article 23. La France retient une combinaison des deux méthodes couramment utilisées pour éliminer la double imposition des revenus provenant de la République tchèque et perçus par un résident en France.

S'agissant des revenus des sociétés, la convention maintient le principe de l'exonération en France des revenus qui sont imposables ou ne sont imposables qu'en République tchèque, dans la mesure où ils sont exemptés d'impôt sur les sociétés en application de la législation française.

Dans les autres cas, la double imposition des revenus provenant de la République tchèque et perçus par des personnes résidentes de France est éliminée par l'imputation sur l'impôt français d'un crédit d'impôt dont le montant dépend du type de revenu considéré.

Enfin, s'agissant de la fortune, la France élimine la double imposition des biens immobiliers par imputation d'un crédit égal à l'impôt tchèque mais limité au montant de l'impôt français. Du côté tchèque, les méthodes du crédit d'impôt égal à l'impôt français dans la limite de l'impôt tchèque correspondant et de l'exemption avec taux effectif ont été retenues.

2) Le règlement de conflits

La convention prévoit des dispositions de procédure amiable de règlement des différends, d'échange de renseignements et de traitement des membres des missions diplomatiques, des postes consulaires et des missions permanentes auprès d'Organisations internationales qui sont, pour l'essentiel, conformes aux rédactions habituelles tirées du modèle de l'OCDE. Désormais, un délai de 3 ans est prévu pour l'ouverture de la procédure amiable en vue de remédier aux doubles impositions supportées par les résidents des Etats contractants (articles 25 à 27).

L'article 28 prévoit les modalités d'application de la convention et subordonne l'application des avantages conventionnels à la présentation de justificatifs incluant des formulaires d'attestation de résidence, à moins que les autorités compétentes des Etats n'en conviennent autrement.

Les dispositions finales des articles 29 et 30 prévoient des modalités classiques d'entrée en vigueur et de dénonciation de la convention. Il est précisé que cette entrée en vigueur abrogera la convention de 1973. La convention est complétée par un protocole dont les principales dispositions ont été commentées avec les articles correspondants.

CONCLUSION

La convention fiscale avec la République Tchèque constitue un cadre juridique classique, tel que la France en a instauré avec de très nombreux pays. Il consacre la volonté des deux Parties d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune.

La convention fiscale doit compléter les liens juridiques bilatéraux et bientôt européens que la France établit avec la République Tchèque. Les relations économiques entre nos deux pays devraient connaître après l'adhésion de la République Tchèque à l'Union européenne le 1er mai 2004 un développement important.

En conséquence, votre Rapporteur vous propose d'adopter le projet de loi soumis à l'examen de la Commission.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 3 mars 2004.

Après l'exposé du Rapporteur, et suivant ses conclusions, la Commission a adopté le projet de loi (no 1327).

*

* *

La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de la convention figure en annexe au projet de loi (n° 1327).

---------

N° 1467 - Rapport sur le projet de loi approbation d'une convention fiscale France-République tchèque (M. François Loncle)

1 Avec un PIB par habitant de 6 800 dollars par habitant et de 15 600 dollars à parité de pouvoir d'achat


© Assemblée nationale