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le 28 juin 2004

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N° 1703

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 24 juin 2004.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION SPÉCIALE CHARGÉE D'EXAMINER LE PROJET DE LOI (n° 1675) relatif à l'assurance maladie,

____________

Président,
M. Yves BUR,

Rapporteur,
M. Jean-Michel DUBERNARD,

Députés.

--

INTRODUCTION 11

I.- LE PROJET DE LOI VISE D'ABORD À PROMOUVOIR LA QUALITÉ DES SOINS ET À RESPONSABILISER LES ACTEURS DU SYSTÈME DE SANTÉ 15

A. L'AUGMENTATION DE LA QUALITÉ ET UNE MEILLEURE ORGANISATION DES SOINS SONT LES OBJECTIF PREMIERS DU PROJET DE LOI 15

1. La qualité accrue des soins passe par une coordination et une continuité renforcées 15

a) Une meilleure coordination des soins doit être assurée 16

b) La continuité des soins doit être garantie 17

2. Promouvoir la qualité impose d'impliquer davantage les professionnels de santé 17

a) L'évaluation des pratiques 18

b) Le respect de référentiels et de protocoles 18

c) Le travail en filières et en réseaux 18

3. Les établissements de santé seront incités à améliorer la qualité de leurs soins 19

B. LES PATIENTS DEVRONT CHANGER LEURS COMPORTEMENTS 19

1. Le partage de l'information médicale est favorisé 19

2. L'encadrement des soins apportés aux patients atteints d'affections de longue durée est renforcé 20

3. Le médecin traitant est au cœur de la coordination des soins 20

4. L'information des assurés sur l'offre de soins est améliorée 21

C. LA RESPONSABILISATION DE L'ENSEMBLE DES ACTEURS DOIT PERMETTRE DE MIEUX LUTTER CONTRE LES DÉPENSES INUTILES 21

1. Les sanctions des comportements abusifs ou frauduleux doivent être renforcées 21

a) La sécurisation de la carte Vitale 21

b) La mise en place d'un dispositif gradué de sanction des professionnels de santé et des usagers 22

c) L'institution d'une procédure de récupération des prestations indues 23

2. Des leviers efficaces sont mis en place pour améliorer la gestion des indemnités journalières 23

a) Une action ciblée sur les plus gros prescripteurs d'arrêts de travail 24

b) Un contrôle plus efficace des assurés 24

3. Le bon usage des médicaments est vigoureusement encouragé 24

a) La poursuite du développement des génériques 24

b) La mise en place de conditionnements mieux adaptés 25

c) L'amélioration de la qualité des pratiques et de l'information des praticiens 25

II.- UNE NOUVELLE GOUVERNANCE AU SERVICE D'UN SYSTÈME DE SANTÉ PLUS EFFICIENT 27

A. UN MEILLEUR PILOTAGE DE L'ASSURANCE MALADIE 27

1. L'indispensable clarification des responsabilités des différents acteurs 27

a) Des interactions préjudiciables 27

b) La réaffirmation des compétences de l'Etat 28

c) Une modification de l'équilibre entre les institutions de l'assurance maladie tendant à confier un rôle essentiel aux partenaires sociaux 29

2. Un renforcement de la structuration des exécutifs de l'assurance maladie 30

3. Une meilleure coordination des régimes de base 30

4. Un pilotage financier plus crédible 31

B. L'ATTRIBUTION À L'ASSURANCE MALADIE DE RESPONSABILITÉS ACCRUES DANS SON CHAMP D'ACTION TRADITIONNEL 32

1. La Haute autorité de santé : une expertise scientifique indispensable à la prise de décision 32

a) L'évaluation médicale de l'ensemble des actes, des produits et des prestations de santé 32

b) La promotion des bonnes pratiques et l'amélioration de l'information des professionnels de santé et des assurés 33

c) L'appui de l'Institut des données de santé 33

2. Des pouvoirs de l'assurance maladie étendus en matière de remboursement des dépenses 34

3. Une compétence confortée dans le champ conventionnel 35

a) Une nécessaire modernisation du cadre conventionnel 35

b) Une responsabilisation renforcée des acteurs du champ conventionnel 36

C. UNE ORGANISATION ET UNE GESTION PLUS COHÉRENTES DE L'ENSEMBLE DU SYSTÈME DE SOINS 37

III.- QUALITÉ ET GOUVERNANCE, RENFORCÉES PAR DES MESURES FINANCIÈRES, PERMETTRONT D'ASSAINIR LES COMPTES DE L'ASSURANCE MALADIE 43

A. L'AMÉLIORATION DE L'ORGANISATION ET DU FONCTIONNEMENT DU SYSTÈME DE SOINS PERMETTRONT DES ÉCONOMIES CONSIDÉRABLES 43

1. Des économies liées à une dépense de soins plus efficiente 43

a) Le choix d'une maîtrise médicalisée des dépenses de soins 43

b) La réforme du mode de financement des établissements de santé devrait graduellement porter ses effets 44

c) Des gisements d'économies importants du côté des produits de santé 44

2. Des économies résultant d'un meilleur contrôle et d'une gestion plus efficace 45

a) Un contrôle renforcé 45

b) Des économies sur les frais financiers 45

B. UN EFFORT FINANCIER ÉQUITABLEMENT RÉPARTI 46

1. Une nécessaire participation de l'usager pour favoriser un juste recours aux soins 46

a) La création d'une contribution forfaitaire pour chaque consultation et chaque acte médical 46

b) L'augmentation du forfait hospitalier 49

2) Des recettes nouvelles servant le redressement financier 49

TRAVAUX DE LA COMMISSION 53

I.- AUDITION DES MINISTRES 53

II.- DISCUSSION GÉNÉRALE 77

III.- EXAMEN DES ARTICLES 87

Avant l'article 1er 87

Article 1er (article L.  111-2-1 du code de la sécurité sociale) Principes fondateurs de l'assurance maladie 89

Après l'article 1er 96

TITRE IER DISPOSITIONS RELATIVES À L'ORGANISATION DE L'OFFRE DE SOINS ET À LA MAÎTRISE MÉDICALISÉE DES DÉPENSES DE SANTÉ 101

Section 1 Coordination des soins 101

Article 2 (articles L. 161-31, L. 161-45 à L. 161-47, L. 162-1-1 à L. 162-1-6 du code de la sécurité sociale) Dossier médical personnel 101

La nécessité du dossier médical personnel ne fait pas de doute mais n'est pas dépourvue d'ambiguïtés 103

L'entreprise sera difficile et de nombreuses conditions doivent être remplies 105

Le nécessaire respect de la protection des données personnelles de santé 106

Article L. 161-45 du code de la sécurité sociale 107

Article L. 161-46 du code de la sécurité sociale 109

Article L. 161-47 du code de la sécurité sociale 111

Après l'article 2 121

Article 3 (articles L. 322-3 et L. 324-1 du code de la sécurité sociale) Prise en charge des patients atteints d'une pathologie chronique ou sévère 122

Avant l'article 4 130

Article 4 (article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale) Médecin traitant 131

Article 5 (article L. 162-5 du code de la sécurité sociale) Dépassements d'honoraires des médecins 139

Après l'article 5 145

Article 6 (article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale) Accords conventionnels interprofessionnels 147

Section 2 Qualité des soins 151

Avant l'article 7 151

Article 7 (articles L. 183-1-1 du code de la sécurité sociale, L. 6113-2 et L. 6114-3 du code de la santé publique) Promotion des bonnes pratiques 153

Après l'article 7 161

Article 8 (article L. 162-4-2 du code de la sécurité sociale) Évaluation et amélioration des pratiques professionnelles médicales 161

Après l'article 8 164

Article 9 (article L. 162-1-11 du code de la sécurité sociale) Information des assurés 164

Article 10 (article L. 314-1 du code de la sécurité sociale) Liquidation médicalisée 167

Après l'article 10 173

Section 3 Recours aux soins 174

Article 11 (articles L. 322-2, L. 322-4, L. 325-1 et L. 432-1 du code de la sécurité sociale) Création d'une contribution forfaitaire à la charge des assurés 174

Après l'article 11 181

Article 12 (articles L. 161-31, L. 162-4-3 et L. 162-21 du code de la sécurité sociale) Accès des professionnels de santé aux informations détenues par les caisses d'assurance maladie et contrôle de l'utilisation de la carte Vitale 181

Article additionnel après l'article 12 (article L. 161-31 du code de la sécurité sociale) Communication à l'assuré porteur d'une carte Vitale du coût des prestations et des médicaments dont il bénéficie 185

Article 13 (article L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale) Institution de pénalités financières en cas d'abus ou de fraude des professionnels, des établissements de santé et des assurés 185

Article 14 (article L. 162-1-15 du code de la sécurité sociale) Renforcement du contrôle des prescripteurs de transports ou d'arrêts de travail 189

Après l'article 14 192

Article 15 (articles L. 315-2, L. 315-2-1 et L. 321-2 du code de la sécurité sociale) Renforcement du contrôle des bénéficiaires d'indemnités journalières 192

Article additionnel après l'article 15 (article L. 162-4-4 du code de la sécurité sociale) Obligation de passer par le médecin prescripteur initial pour la prolongation d'un arrêt de travail 195

Article 16 (article L. 133-4-1 du code de la sécurité sociale) Institution d'une procédure de récupération d'indus auprès des assurés 195

Après l'article 16 198

Section 4 Médicament 198

Article 17 (article L. 5121-1 du code de la santé publique) Elargissement de la définition du générique 198

Après l'article 17 199

Article 18 (articles L. 162-17, L. 162-17-1-1 et L. 162-17-4 et L. 162-17-8 du code de la sécurité sociale et L. 5123-2 du code de la santé publique) Amélioration de la qualité de la visite médicale et du conditionnement des médicaments 200

Article additionnel après l'article 18 (article L. 126-1-14 du code de la sécurité sociale) Logiciels d'aide à la prescription médicale 203

Après l'article 18 203

TITRE II DISPOSITIONS RELATIVES A L'ORGANISATION DE L'ASSURANCE MALADIE 204

Section 1 Haute autorité de santé 204

Avant l'article 19 204

Article 19 (articles L. 161-37 à L. 161-44 du code de la sécurité sociale) Création de la Haute autorité de santé 204

Article L. 161-37 nouveau du code de la sécurité sociale Statut et compétences de la Haute autorité de santé 206

Article L. 161-38 du code de la sécurité sociale Conditions d'exercice des compétences 207

Article L. 161-39 du code de la sécurité sociale Organisation en collège et en commissions spécialisées 208

Article L. 161-40 du code de la sécurité sociale Désignation et durée du mandat des membres du collège 208

Article L. 161-41 nouveau du code de la sécurité sociale Personnel des services 209

Article L. 161-42 nouveau du code de la sécurité sociale Règles déontologiques applicables aux membres et au personnel de la HAS 209

Article L. 161-43 nouveau du code de la sécurité sociale Autonomie financière 210

Article L. 161-44 nouveau du code de la sécurité sociale Conditions d'application 210

Article 20 (articles L. 165-1 du code de la sécurité sociale, articles L. 4001-1, L. 4001-2, L. 5123-3 à L. 5123-5, L. 5211-5-1 et L. 5311-2 du code de la santé publique) Transfert à la Haute autorité de santé de certaines compétences de l'AFSSAPS 217

Section 2 Respect des objectifs de dépenses 219

Avant l'article 21 220

Article 21 (article L. 111-11 du code de la sécurité sociale et article 31 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003) Association des caisses à la préparation du budget de l'assurance maladie 222

Article 22 (articles L. 114-1 et L. 114-4-1 du code de la sécurité sociale) Création d'un comité d'alerte sur l'évolution des dépenses de l'assurance maladie 226

Section 3 Compétences des organismes d'assurance maladie relatives au remboursement des produits, actes ou prestations de santé remboursables 229

Article 23 (articles L. 251-4, L. 322-2 et L. 322-3 du code de la sécurité sociale) Fixation par l'UNCAM des taux de remboursement des médicaments et prestations 229

Article 24 (article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale) Modalités d'inscription à la nomenclature des actes et prescriptions 234

Article 25 (Articles L. 162-16, L. 162-16-4 à 162-16-6, L. 162-17-3, L. 162-17-4, L.162-17-7, L. 162-38, L. 165-2 à 165-4 et L. 165-6 du code de la sécurité sociale et article L. 5126-4 du code de la santé publique) Élargissement des missions du Comité économique des produits de santé 237

Après l'article 25 242

Article 26 (article L. 162-21-2 du code de la sécurité sociale) Comité de l'hospitalisation 243

Article 27 (articles L. 162-22-18 du code de la sécurité sociale et L. 6115-4 du code de la santé publique) Sanctions du non-respect des règles de tarification par les établissements de santé 246

Section 4 Dispositif conventionnel 248

Article 28 (articles L. 162-14-2, L. 162-15, L. 162-15-2, L. 162-5-9 et L.  162-15-4 du code de la sécurité sociale) Cadre des relations conventionnelles 248

Après l'article 28 253

Article 29 (articles L. 162-5-2, L. 162-5-11, L.162-11, L. 162-12-3, L. 162-12-10, L. 162-12-18, L. 162-14-1, L. 645-2, L. 645-2-1, L. 722-1-1, L. 722-4 et L. 722-4-1 du code de la sécurité sociale, article 25 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 et article 4 de l'ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins) Dispositif conventionnel d'aides à l'installation et de prise en charge des cotisations sociales des médecins libéraux 253

Article additionnel après l'article 29 (article L. 183-1-2 du code de la sécurité sociale) : Contrats dérogatoires destinés à faciliter l'exercice regroupé des professions de santé dans les zones de densité médicale insuffisante 257

Article additionnel après l'article 29 Prolongation des conventions nationales avec les professions de santé 258

Section 5 Organisation de l'assurance maladie 258

Avant l'article 30 258

Article 30 (articles L. 221-2 à L. 221-4 du code de la sécurité sociale) Réforme des instances dirigeantes de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) 259

Après l'article 30 269

Article additionnel après l'article 30 Encouragement à la proposition par les partenaires sociaux d'une réforme de la branche accidents du travail et maladies professionnelles 269

Article 31 (articles L. 162-5, L. 162-5-12, L. 162-9, L. 162-12-2, L. 162-12-9, L. 162-12-17 à L. 162-12-20, L. 162-14, L. 162-15-4 et L. 162-32-1, articles L. 182-2-1 à L. 182-2-7 et article L. 182-3-1 du code de la sécurité sociale) Création d'une union nationale des caisses d'assurance maladie et d'une union nationale des organismes de protection sociale complémentaire 270

Article L. 182-2-1 [nouveau] du code de la sécurité sociale 271

Article L. 182-2-2 [nouveau] du code de la sécurité sociale 272

Article L. 182-2-3 [nouveau] du code de la sécurité sociale 273

Article L. 182-2-4 [nouveau] du code de la sécurité sociale 273

Article L. 182-2-5 [nouveau] du code de la sécurité sociale 274

Article L. 182-2-6 [nouveau] du code de la sécurité sociale 274

Article L. 182-2-7 [nouveau] du code de la sécurité sociale 275

Article L. 182-3-1 [nouveau] du code de la sécurité sociale 275

Article 32 (articles L. 242-1 et L. 871-1 du code de la sécurité sociale, articles 83, 154 bis et 995 du code général des impôts et article 9-1 de la loi n°89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques) Coordination entre l'UNCAM et les organismes de protection sociale complémentaire 281

Article additionnel après l'article 32  Création d'une aide pour l'acquisition d'une couverture complémentaire de santé 284

Article 33 (articles L. 211-2, L. 211-2-1, L. 211-2-2, L. 217-3, L. 217-3-1, L. 217-6 et L. 227-3 du code de la sécurité sociale) Réforme des instances dirigeantes des caisses primaires d'assurance maladie et autorité du directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie sur le réseau 285

Article L. 211-2 du code de la sécurité sociale 286

Article L. 211-2-1 du code de la sécurité sociale 286

Article L. 211-2-2 du code de la sécurité sociale 287

Après l'article 33 292

Article 34 (articles L. 123-2-1, L. 224-7 et L. 615-13 du code de la sécurité sociale) Substitution au statut réglementaire d'un statut conventionnel des praticiens conseils 292

Après l'article 34 295

Article 35 (articles L. 161-38 et L. 161-28-2 à L. 161-28-4 du code de la sécurité sociale) Création de l'Institut des données de santé 295

Section 6 Organisation régionale 301

Avant l'article 36 302

Article 36 (articles L. 183-1, L. 183-2, L. 183-2-1 à L. 183-2-3 et L. 183-3 du code de la sécurité sociale) Renforcement des unions régionales des caisses d'assurance maladie 305

Après l'article 36 312

Article 37 (article L. 162-47 [nouveau] du code de la sécurité sociale) Missions conjointes des ARH et des URCAM 313

Article additionnel après l'article 37 Expérimentation de la mise en place d'agences régionales de santé 318

Après l'article 37 318

Article 38 (articles L. 121-1, L. 121-2, L. 151-1, L. 153-5, L. 153-8, L. 200-3, L. 221-1, L. 221-5, L. 224-1, L. 224-5-2, L. 224-9, L. 224-10, L. 227-2, L. 228-1, L. 231-1 à L. 231-12, L. 251-2 à L. 251-4, L. 262-1 et L. 281-2 à L. 281-6 du code de la sécurité sociale) Coordination 319

TITRE III DISPOSITIONS RELATIVES AU FINANCEMENT DE L'ASSURANCE MALADIE 320

Avant l'article 39 320

Article 39 (article L. 131-7 du code de la sécurité sociale) Mesures visant à garantir les ressources de la sécurité sociale 321

Après l'article 39 325

Article 40 (article L. 311-3 du code de la sécurité sociale et articles L. 324-12 et L. 324-14 du code du travail) Consolidation du recouvrement des recettes de la sécurité sociale 325

Après l'article 40 327

Article 41 (articles L. 136-2, L. 136-7-1 et L. 136-8 du code de la sécurité sociale) Dispositions relatives à la contribution sociale généralisée 328

Article 42 (articles L. 245-2 et L. 245-5-2 du code de la sécurité sociale) Relèvement de la contribution sur les dépenses de promotion des fabricants ou distributeurs de dispositifs médicaux et de la contribution sur les dépenses de promotion des laboratoires pharmaceutiques 336

Article 43 (articles L. 138-20 et L. 245-6-1 du code de la sécurité sociale) Contribution sur le chiffre d'affaires des entreprises pharmaceutiques et maîtrise des dépenses de médicament 338

Article L. 245-6-1 du code de la sécurité sociale 339

Après l'article 43 341

Article 44 (article L. 245-13 du code de la sécurité sociale) Contribution additionnelle à la contribution sociale de solidarité des sociétés 341

Article 45 (Articles 1er, 2, 4, 7 et 14 à 18 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale) Dette sociale 343

Après l'article 45 349

TABLEAU COMPARATIF 351

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 475

ANNEXE 563

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR 563

INTRODUCTION

Le projet de loi relatif à l'assurance maladie sur lequel l'Assemblée nationale est appelée à statuer constitue à l'évidence l'un des textes majeurs de la législature. Après la réforme des retraites adoptée l'an dernier, il propose une réforme en profondeur d'un deuxième pan essentiel de notre système de protection sociale et constitue la mise en œuvre d'un des engagements pris par le gouvernement dès le 3 juillet 2002 (1) : « Notre système de santé fait notre fierté, mais il est aujourd'hui dans une situation (...) très difficile. (...) Nous mettrons en place une nouvelle gouvernance du système de santé et d'assurance maladie. Avec le ministre de la santé, de la famille et des handicapés, je souhaite bâtir une politique de santé moderne. C'est un champ prioritaire pour le nouvel humanisme que nous défendons. »

Ces deux réformes ont des traits communs. Tout d'abord,  leur nécessité est mise en évidence par la dégradation des comptes de la sécurité sociale. Ne pas agir reviendrait en la matière à condamner notre système de protection sociale à la faillite, une faillite qui ne serait pas que financière puisqu'elle mettrait en cause la pérennité même d'une conception généreuse de la protection sociale à laquelle tous les Français sont légitimement très attachés. En conséquence, élément essentiel de ce qu'il est convenu d'appeler le pacte social républicain, l'assurance maladie ne saurait pour autant - tout comme les retraites - se contenter de mesures de redressement financier, de quelque réforme comptable, qui laisserait subsister les maux plus profonds dont les déficits ne sont qu'un révélateur. Le présent projet de loi se devait donc d'être une véritable réforme de structures.

La réforme est le fruit d'une longue réflexion et d'une concertation avec l'ensemble des acteurs du système de santé. Ont ainsi été associés à sa préparation aussi bien les premiers intéressés que sont les usagers, directement et par les représentants des assurés sociaux que sont les organisations syndicales représentatives, les acteurs au quotidien du système de santé que sont les professionnels de santé mais aussi ceux qui ont la charge à un titre ou à un autre de son fonctionnement, de son organisation et de sa gestion : partenaires sociaux, organismes gestionnaires, organismes de protection sociale complémentaire, agences sanitaires... Depuis deux ans, la concertation commencée sous l'égide de M. Jean-François Mattei, précédent ministre chargé de la santé, n'a cessé de s'intensifier et a connu son point culminant dans les rencontres organisées ces dernières semaines par le ministre de la santé et de la protection sociale, M. Philippe Douste-Blazy, et le secrétaire d'Etat à l'assurance maladie, M. Xavier Bertrand.

Cette réflexion a connu depuis six mois deux temps forts : le premier a consisté dans la remise de son rapport par le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, le second dans la constitution par l'Assemblée nationale à l'initiative de son président, M. Jean-Louis Debré, d'une mission d'information relative à la problématique de l'assurance maladie.

Ces travaux ont mis en évidence la nécessité urgente d'une réforme de l'assurance maladie. Le diagnostic partagé porté sur l'état de l'assurance maladie et, au-delà, de notre système de santé est sévère. Le système est financièrement à la dérive. Les chiffres, maintenant bien connus de tous, sont effrayants : près de 13 milliards d'euros de déficit prévu pour 2004, soit un déficit record du double du précédent, près de 45 milliards de dette accumulée à la fin de cette année, et un choix de solutions à cette impasse financière qui, limité au seul ajustement comptable, reviendrait à opter pour un doublement de la contribution sociale généralisée d'ici 2020 ou à une baisse drastique de la prise en charge des dépenses de santé.

Tout aussi sévère est le diagnostic porté sur le pilotage de ce système. Il est difficile d'imputer la responsabilité de la dérive à quelque acteur que ce soit ; chacun ne semble avoir été que figurant et l'on chercherait en vain un metteur en scène. Alors que de nombreux acteurs agissent dans le domaine de la santé, personne n'estime en être le pilote et, de fait, le sentiment est unanime sur le fait qu'il n'en a pas.

Plus grave encore, cette absence de cohérence et de coordination de notre système de santé menace - c'est le troisième constat dressé aussi bien par le Haut conseil que par la mission d'information - la qualité même de notre système de soins. Alors que notre pays dispose de l'une des meilleures médecines du monde, de professionnels de santé parmi les plus compétents, sa gestion inefficace et sa désorganisation placent a contrario notre système de santé parmi les plus mauvais des pays industrialisés.

La nécessité de moderniser les systèmes d'assurance maladie n'est d'ailleurs pas une spécificité française : nombre de nos partenaires - par exemple l'Allemagne - ont entamé ou mis en œuvre cette réforme et souvent dans un climat de consensus politique que nous pouvons leur envier. Le présent projet de loi bénéficie ainsi de l'expérience nos partenaires et la commission spéciale a pu fort opportunément prendre connaissance du rapport réalisé par M. Edouard Landrain au nom de la délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale sur les réformes mises en œuvres dans les autres Etats de l'Union européenne.(2)

Conséquence logique de ce constat unanime de la nécessité d'une réforme, il fallait donner un contenu à celle-ci. Les travaux du Haut conseil, mais aussi - plus important encore sur un plan politique - ceux de la mission d'information présidée par M. Jean-Louis Debré, ont montré qu'il existe un consensus extrêmement fort sur les principes devant guider cette réforme. Le présent projet de loi était largement prédéterminé par l'attachement aux principes fondateurs de l'assurance maladie : égal accès à des soins de qualité et solidarité nationale.

La déclinaison de ces principes appelle ensuite des propositions différentes. La mission d'information a mis en évidence des divergences assez nettes sur la thérapeutique mais a permis à chaque sensibilité politique de l'Assemblée nationale d'exposer son point de vue, de le confronter aux autres et d'étudier l'ensemble des options existantes. Dès lors, il a paru opportun de permettre aux parlementaires membres de cette mission de prolonger cette réflexion, tout en y associant les autres députés intéressés, en constituant dès le 16 juin dernier, le jour même du dépôt du projet de loi, une commission spéciale en vertu de l'article 43 de la Constitution.

Celle-ci a dès lors pu concentrer ses travaux sur l'examen du projet de loi présenté. A cet effet, ont été menées à l'initiative du rapporteur vingt-six auditions invitant l'ensemble des acteurs du système de santé à exprimer leur opinion sur le texte de ce projet et à formuler d'éventuelles propositions de modifications.

De l'ensemble de ces travaux émergent trois conclusions majeures.

La première - essentielle parce qu'elle concerne directement ceux pour lesquels le système de santé existe, les patients - est que le projet met au cœur de la réforme la promotion de la qualité de notre système de soins et la responsabilisation de ses acteurs, objet du titre I.

La deuxième est que cet objectif passe - c'est l'objet du titre II - par une réforme profonde de la gouvernance de notre système de santé.

Enfin, ces mesures de structures serviront à remédier pour l'essentiel aux déséquilibres financiers de la branche maladie, même si elles doivent être accompagnées de mesures strictement financières prévues au titre III, destinées à apurer le passif mais également à fonder une gestion plus saine de la branche maladie de la sécurité sociale.

 

I.- LE PROJET DE LOI VISE D'ABORD À PROMOUVOIR
LA QUALITÉ DES SOINS ET À RESPONSABILISER
LES ACTEURS DU SYSTÈME DE SANTÉ

Se fondant sur le constat d'une qualité des soins insuffisante et sur une « irresponsabilisation » croissante des acteurs du système de santé, le projet de loi met en place des mécanismes visant à améliorer la qualité des soins et à responsabiliser davantage les usagers et les professionnels de santé.

Cette lutte pour une qualité améliorée et une responsabilité renforcée ont des conséquences en termes financiers, conséquences qui seront examinées plus loin. Elle nécessitera du temps et beaucoup d'explications afin que les assurés et les professionnels de santé en saisissent tous les enjeux.

Il est important de souligner que la plupart des mécanismes de maîtrise médicalisée et de responsabilisation des professionnels s'appliquent aux établissements de santé, hôpital public comme clinique privée. Il s'agit bien d'une réforme d'ensemble du système de soins. Ainsi, en matière de qualité des soins, il ne saurait y avoir des exigences différentes pour un médecin de ville et pour un médecin hospitalier.

A. L'AUGMENTATION DE LA QUALITÉ ET UNE MEILLEURE ORGANISATION DES SOINS SONT LES OBJECTIF PREMIERS DU PROJET DE LOI

Si le niveau des soins en France est généralement considéré comme bon, il reste très perfectible. Or, la qualité médiocre est synonyme non seulement de mauvaise prise en charge sanitaire des assurés mais aussi de gaspillages financiers. L'esprit de la réforme de l'assurance maladie a souvent été résumé par l'expression suivante : « Soigner mieux et dépenser mieux ». Cet objectif est décliné dans les mesures suivantes, qui mettent en place les conditions d'une régulation par la qualité. Trois grandes orientations du projet traduisent la volonté du gouvernement d'accroître la qualité des soins : le renforcement de la coordination et de la continuité des soins (1), la promotion des bonnes pratiques (2) et l'application de ces dispositifs aux établissements de santé (3).

1. La qualité accrue des soins passe par une coordination et une continuité renforcées

Augmenter le niveau de qualité des soins est une œuvre de longue haleine dont les résultats seront perceptibles dans quelques années. Le but recherché est de changer les comportements des usagers comme des professionnels de santé, en promouvant à la fois la qualité et la continuité des soins.

a) Une meilleure coordination des soins doit être assurée

Tous les diagnostics convergent pour souligner une insuffisante coordination des soins, d'abord imputable à une coordination déficiente des professionnels de santé. Le cloisonnement entre les médecins libéraux (peu habitués au travail en groupe ou en réseaux), entre les différents professionnels de santé (avec les clivages spécialistes/généralistes et médecins/professions paramédicales), auquel s'ajoute l'étanchéité entre la médecine de ville et les établissements de santé, a été mis en évidence. Des dispositions du projet de loi, présentées plus loin, contribuent à remédier à ces insuffisances.

La mauvaise coordination des soins est également causée par les comportements des assurés qui, parfois, ne veulent pas s'inscrire dans des réseaux ou filières de soins et font preuve d'un certain nomadisme médical. Il leur est également parfois impossible de faire face à la complexité de l'offre de soins.

Il convient donc de mettre en place des mécanismes qui, d'une part, donneront aux patients et aux professionnels de santé les moyens de promouvoir la coordination des soins (dossier médical personnel, désignation du médecin traitant ...) et, d'autre part, inciteront les assurés à les utiliser.

Le dossier médical personnel

Le premier mécanisme devant remplir la mission de coordination accrue est le dossier médical personnel, dont la création prévue par l'article 2 du projet de loi devra être précédée par la possibilité donnée aux médecins de pouvoir consulter, grâce à la carte Vitale, les données issues des procédures de remboursement ou de prise en charge détenues par l'organisme dont relève le bénéficiaire de l'assurance maladie.

Le dossier médical personnel a pour finalité première d'améliorer la qualité des soins donnés à l'assuré et d'éviter des actes redondants, source de gaspillages et de dégradation de la qualité des soins (retards, prescriptions inadaptées...). Il permettra le décloisonnement entre la médecine de ville et l'hospitalisation. Il facilitera le travail en réseau.

La généralisation du dossier médical personnel posera de nouvelles questions éthiques et déontologiques. Néanmoins, le rapporteur est convaincu, pour peu qu'il soit simple et généralisé d'emblée, s'enrichissant étape par étape, qu'il constituera un formidable outil de modernisation du système de soins français.

Le médecin traitant

Il apparaît que le comportement des assurés est marqué par un certain nomadisme médical. Ce phénomène se traduit notamment par la consultation en nombre excessif de médecins pour soigner un même problème de santé.

Ce comportement, en partie facilité par la grande liberté dont jouissent les patients dans notre système, est aussi imputable à la mauvaise organisation du système de santé. Il en résulte une augmentation des dépenses des régimes de l'assurance maladie sans que soit assurée une prise en charge sanitaire satisfaisante des assurés. Il est donc essentiel de promouvoir les filières de soins, le travail en réseau et le respect de protocoles de soins. Cela contribuera à améliorer l'information de l'assuré, qui est parfois isolé et quelque peu désemparé devant la complexité de l'offre de soins.

Le choix d'un médecin traitant permet de mieux coordonner les soins apportés au patient et donc d'améliorer son état de santé. Si ce choix est accompagné d'un dispositif encourageant l'assuré à respecter des filières de soins intégrant notamment les médecins généralistes et les médecins spécialistes, il sera en outre un moyen de réduire les effets négatifs du nomadisme médical.

Le médecin traitant est un praticien qui dispose d'une vue d'ensemble du patient. Il connaît son histoire personnelle, voire familiale, et son environnement social et économique. Son approche n'est pas limitée à un organe en particulier. Son appréciation s'étend à l'état de santé global de son patient. Le patient pourra, sans lourdes formalités, changer de médecin traitant en en faisant part à la caisse primaire dont il relève.

L'article 4 du projet de loi vise, d'une part, à permettre aux assurés sociaux de désigner un médecin traitant à leur organe gestionnaire d'assurance maladie et, d'autre part, à donner la possibilité de majorer le reste à charge des assurés n'ayant pas choisi de médecin traitant ou consultant un autre médecin sans prescription du médecin traitant.

b) La continuité des soins doit être garantie

La continuité des soins sera en partie garantie par le dossier médical personnel, qui sera en quelque sorte la « mémoire » du patient et des professionnels de santé. En outre, l'article 3 du projet de loi renforce l'encadrement de la prise en charge des patients atteints d'une pathologie chronique et sévère, notamment des malades dont les dépenses sont prises en charge par l'assurance maladie au titre d'une affection de longue durée (ALD). L'article vise à impliquer davantage le patient dans sa démarche de soins et à améliorer la coordination et la continuité des soins entre les professionnels de santé. La Haute autorité de santé élaborera ou validera les outils d'une prise en charge de qualité et coordonnée des personnes ayant besoin de soins longs et coûteux.

2. Promouvoir la qualité impose d'impliquer davantage les professionnels de santé

La réforme ne réussira pas sans les professionnels de santé. Leur engagement est une condition nécessaire au succès de l'entreprise, et le projet de loi est exigeant à leur égard. Ainsi, il leur demande, d'une part, d'approfondir leur démarche d'évaluation et de formation et, d'autre part, de s'engager dans le respect de bonnes pratiques et de référentiels de soins validés par la Haute autorité de santé.

a) L'évaluation des pratiques

Alors que le projet de loi relatif à la politique de santé publique rénove profondément les conditions de la formation médicale continue en simplifiant son organisation et en rendant plus applicable le dispositif, le présent projet de loi souligne la nécessité pour les professionnels de santé de s'engager résolument dans l'évaluation des pratiques professionnelles. Ainsi, l'article 8 du présent projet vise à promouvoir l'évaluation et l'amélioration des pratiques professionnelles médicales. Il concerne tous les médecins conventionnés et les médecins hospitaliers. Jusqu'à une date récente, le rythme de l'évaluation des pratiques professionnelles médicales était bien trop lent. Cet article vise à accélérer le processus. En outre, l'article 9 permet d'informer les assurés sur la participation des médecins à ces dispositifs d'évaluation.

b) Le respect de référentiels et de protocoles

Inciter les professionnels de santé, et en particulier les médecins, à respecter des protocoles de soins et des référentiels est un des axes centraux de la maîtrise médicalisée. Les références médicales opposables (RMO) mises en place en 1996 n'ont certes pas connu une application satisfaisante. En effet, rédigées de manière complexe, elles consistent en des références négatives - du type : « Dans certaines conditions, il convient de ne pas... » - et elles s'inscrivent dans un contexte où les relations entre les médecins et les caisses étaient particulièrement tendues. En outre, leur application a été insuffisamment contrôlée.

La validation scientifique apportée par la Haute autorité de santé devra être de nature à gagner la confiance des professionnels de santé et donc contribuer à l'application du nouveau dispositif.

c) Le travail en filières et en réseaux

En France, l'une des caractéristiques de l'exercice libéral des professionnels de santé est le relatif isolement dans lequel travaillent ces professionnels. Même si les cabinets de groupe se développent, il convient de remédier à ce cloisonnement qui concerne particulièrement les médecins et les professions paramédicales. Le projet de loi vise à contribuer à ce que les professionnels de santé travaillent plus en utilisant les formules du réseau et de la filière de soins. A ce titre, les dispositions de l'article 6 du projet de loi, qui mettent en place la possibilité de conclusion d'accords interprofessionnels entre l'union nationale des caisses d'assurance maladie et les organisations représentatives signataires des conventions nationales des professions concernées, sont particulièrement bienvenues. Elles permettront notamment à plusieurs professions de s'organiser autour de pathologies.

3. Les établissements de santé seront incités à améliorer la qualité de leurs soins

Il est à souligner que la réforme concerne l'ensemble du système de santé, et à ce titre un grand nombre de ses dispositions s'appliquent aux patients hospitalisés ou consultant à l'hôpital mais aussi aux personnels des établissements, dont les médecins, qui devront également conduire, à titre d'exemple, les actions d'évaluation des pratiques professionnelles mentionnées à l'article 8 du projet.

Le dossier médical personnel sera utilisé dans les établissements de santé. Les personnels des établissements seront tenus de le compléter.

La coordination des soins passe aussi par un renforcement des liens entre la ville et l'hôpital au travers notamment d'un pilotage cohérent au niveau régional avec le rapprochement des agences régionales de l'hospitalisation (ARH) et des unions régionales des caisses d'assurance maladie (URCAM), ce que propose l'article 37 du présent projet.

B. LES PATIENTS DEVRONT CHANGER LEURS COMPORTEMENTS

Le système français combine un haut degré de liberté pour le patient et les professionnels de santé avec un niveau élevé de socialisation des dépenses. La comparaison avec les systèmes étrangers montre qu'en France, la liberté du patient atteint un degré de liberté presque exceptionnel. Si cette large liberté est plébiscitée par nos concitoyens, elle comporte aussi des effets pervers, entraîne des gaspillages et ne conduit pas toujours à une prise en charge sanitaire optimale du patient.

Le présent projet de loi comporte donc des dispositions visant à responsabiliser les patients et notamment à modifier leurs comportements grâce à des incitations d'ordre financier. Il s'agit d'inviter le patient à devenir acteur de sa santé.

En matière de réforme de l'assurance maladie, le changement des comportements est indispensable. A cet égard, on peut observer des signes encourageants, dès lors que la mesure est bien expliquée et fait l'objet d'une communication adaptée. Les exemples récents des effets des campagnes visant la réduction de la consommation d'antibiotiques ou de la prescription de médicaments génériques constituent des signes encourageants.

1. Le partage de l'information médicale est favorisé

L'article 2 du projet de loi, relatif au dossier médical personnel, permet de subordonner le niveau de prise en charge des actes et prestations de soins par l'assurance maladie à l'autorisation donnée par l'assuré au professionnel de santé d'accéder à son dossier et de le compléter. Il ne s'agit pas de contraindre de manière autoritaire le patient à autoriser l'accès à son dossier médical personnel. Il convient de lui conserver une liberté de choix ; d'ailleurs, à supposer qu'elle soit souhaitable, sa suppression serait sans doute jugée comme non conforme à la Constitution. En revanche, il est opportun de mettre en place les conditions autorisant l'union des caisses de l'assurance maladie à majorer, si elle souhaite, la participation de l'assuré. En effet, dans le cas où l'assuré refuse l'accès à son dossier, il rend plus difficile le diagnostic de sa maladie et complique le processus de soin. Il convient donc de l'encourager à accroître l'efficience globale du système de soins grâce à une coordination accrue.

2. L'encadrement des soins apportés aux patients atteints d'affections de longue durée est renforcé

L'article 3 du projet vise à impliquer davantage le patient dans sa démarche de soins et à améliorer la coordination des soins entre les professionnels de santé. Il prévoit que le protocole de soins, « périodiquement révisable » et établi conjointement par le médecin-conseil et le médecin traitant, doit tenir compte des recommandations fixées par la Haute autorité de santé. La durée du protocole doit également être fixée « compte tenu des recommandations de la Haute autorité de santé ». Le protocole définit les actes et les prestations pour lesquels la participation de l'assuré peut être réduite ou supprimée. Afin de renforcer l'implication du patient, ce protocole établi par le médecin-conseil et le médecin traitant devra être signé par le patient ou son représentant légal. Cette proposition correspond bien à cette idée d'inviter le patient à être plus responsable dans la construction de son parcours de soins.

3. Le médecin traitant est au cœur de la coordination des soins

L'article 4 du présent projet vise d'une part à permettre aux assurés sociaux de désigner un médecin traitant à leur organe gestionnaire d'assurance maladie. Il ne s'agit pas de contraindre de manière autoritaire l'assuré à passer par un médecin-pivot pour consulter un autre médecin - généralement un spécialiste. Le projet vise plutôt à modifier les comportements en mettant en place des mécanismes incitateurs. A cette fin, il donne à l'union nationale des caisses d'assurance maladie la possibilité de majorer le reste à charge des assurés n'ayant pas choisi de médecin traitant ou consultant un autre médecin sans prescription du médecin traitant.

Si un patient a des exigences particulières, en particulier s'il ne souhaite pas s'intégrer dans des filières de soins, il peut être légitime que la prise en charge de ses dépenses par les régimes de l'assurance maladie soit diminuée. Des exceptions sont prévues, notamment pour les malades s'inscrivant dans un protocole de soins ou pour les personnes hospitalisées.

L'article 5 du présent projet complète le dispositif en permettant à la convention conclue entre les organisations représentatives de médecins et les caisses d'assurance maladie de déterminer les conditions dans lesquelles certains médecins spécialistes pourront augmenter leurs honoraires si le patient les consulte sans avoir consulté au préalable son médecin traitant.

Il est probable qu'un médecin spécialiste directement consulté par un patient, sans que ce dernier n'ait été au préalable examiné par un médecin traitant, passera un temps supplémentaire avec ce patient. Dans cette perspective, il est donc légitime qu'il soit mieux rémunéré, ce que propose cet article 5.

4. L'information des assurés sur l'offre de soins est améliorée

Compte tenu des nombreux mécanismes de responsabilisation des assurés aménagés par le projet, il est indispensable de prévoir que les services des caisses pourront mieux informer les assurés. Cela serait de nature à mieux orienter les assurés dans une offre de soins dont l'architecture est parfois complexe à comprendre et dont la qualité est difficile à évaluer.

C'est à cet objectif que répond l'article 9 du projet de loi, qui propose que les services de conseil administratif et d'orientation des caisses peuvent également informer les assurés de la situation d'un professionnel de santé au regard des contrats individuels de bonne pratique, des contrats de santé publique, de sa participation à des actions de formation ou de coordination des soins.

C. LA RESPONSABILISATION DE L'ENSEMBLE DES ACTEURS DOIT PERMETTRE DE MIEUX LUTTER CONTRE LES DÉPENSES INUTILES

Parce que les ressources de l'assurance maladie ne sont pas illimitées, l'amélioration de la qualité des soins nécessite également de mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour veiller à ce que chaque euro versé par la collectivité soit utilisé au mieux dans l'intérêt du patient, et a contrario qu'il ne le soit pas si l'état de santé de celui-ci ne le justifie pas.

S'appuyant sur ce constat, le projet de loi vise à promouvoir un juste recours aux soins, fondé sur une responsabilisation accrue de l'ensemble des acteurs du système de santé, puisqu'elle seule peut permettre une évolution durable des comportements.

1. Les sanctions des comportements abusifs ou frauduleux doivent être renforcées

a) La sécurisation de la carte Vitale

Rien ne permet aujourd'hui de garantir que la personne qui présente la carte « Vitale » en vue de l'émission d'une feuille de soins électronique est bien son titulaire ou la personne légitimement mandatée pour le faire. La gestion du parc de cartes est par ailleurs loin d'être optimale, à en juger par l'existence de dix millions de cartes en surnombre selon le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur les risques de fraude à l'assurance maladie 3.

Certes, l'utilisation des cartes en surnombre est marginale, puisque moins de 250 000 d'entre elles ont été utilisées depuis 1998 sur six milliards de feuilles de soins reçues par les caisses d'assurance maladie, et elle ne constitue pas nécessairement un abus, mais parfois simplement une facilité d'usage au sein d'une famille. Il n'en demeure pas moins nécessaire de corriger les faiblesses présentées par la carte Vitale au regard des risques de fraude qu'elle présente, et ce d'autant plus qu'elle est aussi « le symbole de non-gestion » du système de soins français, comme l'a fait justement observer le ministre de la santé et de la protection sociale.

C'est pourquoi l'article 12 du projet de loi prévoit qu'il pourra désormais être demandé au bénéficiaire de soins, dans les établissements de santé, de prouver son identité par sa carte d'identité ou tout autre document officiel comportant sa photographie.

b) La mise en place d'un dispositif gradué de sanction des professionnels de santé et des usagers

Le projet de loi permet également aux caisses d'assurance maladie de disposer des moyens adéquats pour répondre rapidement et surtout efficacement aux divers abus et violations qu'ils constatent.

Le directeur de la caisse locale pourra ainsi prononcer une pénalité financière à l'encontre des professionnels de santé, des assurés ou des établissements de santé, dont les manquements à la réglementation en vigueur sont à l'origine d'une prise en charge indue par la sécurité sociale. Une commission constituée au sein du conseil de la caisse sera par ailleurs saisie pour avis afin de s'assurer du bien-fondé de cette décision.

Ces dispositions permettront ainsi de remédier aux insuffisances du contrôle exercé par les caisses d'assurance maladie, qui sont particulièrement manifestes dans le cas des professionnels de santé. En effet, lorsqu'elles constatent des abus, les caisses n'ont en réalité le choix aujourd'hui qu'entre un « pistolet à eau » et l' « arme atomique » qu'est le déconventionnement du professionnel, qui ne devrait en principe être réservé qu'aux cas les plus graves.

Au reste, la mission d'information de l'Assemblée nationale sur la problématique de l'assurance maladie a pu observer que les représentants des médecins « se sont dans l'ensemble montrés ouverts à des procédures de sanction des comportements qui s'écarteraient des normes médicalement admises, à la condition que ces sanctions forment une palette de mesures graduées, qui n'existe pas aujourd'hui ».

c) L'institution d'une procédure de récupération des prestations indues

Dans le même sens, l'article 16 du projet de loi confie aux caisses d'assurance maladie la possibilité de récupérer des prestations indûment versées aux assurés sociaux, puisque cette procédure n'existe actuellement que pour les seuls professionnels de santé, dans le cas notamment de méconnaissance des règles de cotations et de tarification.

Les sommes indues pourront ainsi être récupérées par des retenues sur les prestations futures de l'assuré, qui seront toutefois plafonnées s'il s'agit d'indemnités journalières, ou par un remboursement intégral de sa créance s'il le souhaite.

2. Des leviers efficaces sont mis en place pour améliorer la gestion des indemnités journalières

Comme l'a regretté la mission d'information sur la problématique de l'assurance maladie, le contrôle médical n'a pas aujourd'hui « la place qui devrait être la sienne en tant qu'outil d'amélioration de l'efficience du système de soins », et c'est tout particulièrement le cas concernant les indemnités journalières (IJ), qui ont pourtant représenté près de six milliards d'euros de dépenses pour l'assurance maladie en 2003.

Les dépenses liées à ces prestations ont en effet connu une accélération très nette au cours de ces dernières années (près de 9 % de croissance annuelle entre 1997 et 2002 en euros constants), en particulier pour les arrêts de travail de plus de trois mois, évolution que ne semblent pas pouvoir expliquer à eux seuls le vieillissement de la population ou encore l'évolution de la conjoncture économique. Il existe par ailleurs d'importantes disparités géographiques en termes de prescription, la « consommation » d'arrêts de travail étant par exemple de six jours par an en moyenne par actif occupé à Paris, contre près de dix-huit dans le Gard.

Dès lors, ces éléments semblent étayer l'idée selon laquelle le comportement des assurés et des prescripteurs a constitué l'un des facteurs explicatifs de cette augmentation. C'est d'ailleurs l'une des principales conclusions de l'Inspection générale des affaires sociales, dans son rapport de novembre 2003 sur les indemnités journalières, qui fait état de l'existence « d'anomalies en matière de prescription d'indemnités journalières [IJ]. Aucune explication convaincante n'a pu par exemple rendre compte du fait que certains médecins prescrivent cinq fois plus d'IJ que les autres ».

Or ce recours parfois abusif aux arrêts de travail n'a pu se développer que parce qu'il a été permis, pour ne pas dire encouragé, par la faiblesse et l'insuffisance des contrôles médicaux des caisses d'assurance maladie. Le contrôle des IJ occupe en effet une place encore marginale dans l'activité des médecins conseils de sorte que seuls 6,4  % des arrêts maladie ont été contrôlés en 2001, dont moins de 0,5 % des arrêts de courte durée, alors que ce sont précisément ceux qui sont le plus susceptibles de donner lieu à des « arrêts de confort ». Enfin, sur les arrêts de travail contrôlés par le service médical de la CNAMTS, 12  % présentaient des « anomalies ».

a) Une action ciblée sur les plus gros prescripteurs d'arrêts de travail

Afin de recentrer les indemnités journalières sur leur vocation première, c'est-à-dire garantir un salaire de remplacement au salarié dont l'état de santé lui interdit temporairement de poursuivre son activité professionnelle, il faut tout d'abord d'agir le plus en amont possible, c'est-à-dire au stade de la prescription.

L'article 14 du projet de loi propose en conséquence de mieux repérer les plus gros prescripteurs d'arrêts de travail, et de les soumettre, le cas échéant, à une procédure d'accord préalable des caisses d'assurances maladie qui conditionne le versement des IJ ou la couverture des frais de transports. Le directeur de la caisse pourra également décider de suspendre la prise en charge des prestations prescrites par le médecin, à charge pour lui d'en informer son patient.

b) Un contrôle plus efficace des assurés

En aval, le texte prévoit également plusieurs dispositions visant à inciter les caisses à contrôler davantage les arrêts de travail répétitifs et de courte durée, pour lesquels les procédures doivent être simplifiées, et à mettre en place des sanctions réellement opérationnelles à l'égard des patients, à travers par exemple l'information de l'employeur de la suspension des IJ ou encore le remboursement des sommes indûment perçues.

3. Le bon usage des médicaments est vigoureusement encouragé

a) La poursuite du développement des génériques

Lutter contre les dépenses inutiles sans faire de concession sur la qualité des soins constitue le principe même des génériques et c'est précisément pourquoi leur promotion constitue un axe central de la politique du médicament engagée par le gouvernement. Elle a ainsi permis d'économiser plus de 300 millions d'euros en 2003.

Malgré une réelle montée en puissance au cours des dernières années, les ventes de génériques en France sont encore loin des niveaux atteints en Allemagne ou aux Etats-Unis, où ils représentent plus de 40 % de parts de marché. Cet effort doit donc être poursuivi, à travers notamment le développement progressif des tarifs forfaitaires de responsabilité (TFR) ou encore une politique de baisse de prix plus adaptée au cycle de vie des produits, à l'exception cependant des médicaments innovants.

Dans cet objectif, l'article 17 prévoit également d'étendre la définition des génériques à l'ensemble des dérivés chimiques d'un même principe actif afin également de transposer les dispositions prévues par l'article 10 de la directive n° 2004/27/CE du 31 mars 2004.

b) La mise en place de conditionnements mieux adaptés

Les conditionnements des médicaments, souvent présentés pour des traitements d'un mois, sont bien souvent inadaptés aux prescriptions des médecins. De surcroît, la délivrance de médicaments dans des quantités nettement supérieures à la prescription médicale est de nature à encourager des comportements nocifs de surconsommation et d'automédication.

Or, « loin d'être anecdotique, cet exemple illustre parfaitement l'idée selon laquelle l'addition d'efforts modérés peut produire un effet tangible sur le solde de la branche maladie », comme l'a fort justement rappelé la mission d'information sur la problématique de l'assurance maladie. C'est précisément pourquoi l'article 18 du projet de loi prévoit que les spécialités remboursables doivent être présentées sous des conditionnements appropriés aux traitements prescrits par le médecin, au regard des indications thérapeutiques justifiant la prise en charge par l'assurance maladie.

c) L'amélioration de la qualité des pratiques et de l'information des praticiens

Dans le même souci de maîtrise des dépenses et d'amélioration de la qualité des soins, il est essentiel d'améliorer l'information des professionnels de santé et des assurés sur le bon usage des médicaments, en raison notamment des risques liés à la polymédication ou à la iatrogénie, ce dont sera désormais chargée la Haute autorité de santé.

A cette fin, le projet de loi prévoit également la conclusion d'une « charte de qualité des pratiques professionnelles » des visiteurs médicaux entre les entreprises du médicament et le comité économique des produits de santé, ce qui doit permettre de mettre à un terme à certaines dérives en la matière.

Cette charte pourra ainsi prévoir la communication au médecin visité des indications prévues par l'autorisation de mise sur le marché (AMM), les avis de la commission de la transparence ou les interactions médicamenteuses, ce qui ne pourra que contribuer à accroître la qualité des soins dispensés aux malades.

II.- UNE NOUVELLE GOUVERNANCE AU SERVICE D'UN SYSTÈME DE SANTÉ PLUS EFFICIENT

Le chantier de la gouvernance est probablement l'un des plus difficiles de la réforme de l'assurance maladie : il est également l'un des plus importants. Les travaux de la mission d'information de l'Assemblée nationale sur la problématique de l'assurance maladie ont mis en relief les effets délétères de l'absence de pilotage du système et des impulsions contradictoires données par des acteurs éclatés, sans vision commune, repliés sur leur champ de compétence par nature limité, bref d'un « système devenu fou » selon l'expression de M. Philippe Douste-Blazy.

Dès lors, si la recherche de la qualité constitue l'objectif central de la réforme, la réforme de sa gouvernance constitue à l'évidence l'une des pistes à privilégier dans la réalisation de cet objectif. Le projet de loi intègre pleinement cette préoccupation puisqu'il entend réformer la gestion actuelle du champ conventionnel, en principe assurée par l'assurance maladie mais qui, assumée par trop d'acteurs, ne l'est plus par personne (A). Il entend d'ailleurs confier aux institutions rénovées de l'assurance maladie une responsabilité accrue dans son champ d'action traditionnel (B) et en faire par l'octroi de nouvelles missions un acteur majeur de la mise en cohérence de l'ensemble du système de santé (C).

A. UN MEILLEUR PILOTAGE DE L'ASSURANCE MALADIE

1. L'indispensable clarification des responsabilités des différents acteurs

a) Des interactions préjudiciables

Sans revenir en détail sur le diagnostic qu'appelle l'actuel défaut de gouvernance de l'assurance maladie, on ne saurait manquer de rappeler les traits les plus saillants de l'atrophie croissante du système mis en place en 1945.

Si l'Etat n'a jamais cessé de jouer un rôle essentiel dans le système de santé, force est de constater qu'il est largement sorti de la place qui aurait dû être la sienne dans un système d'assurance maladie fondé sur une gestion paritaire - dans des formes plus ou moins pures - par les partenaires sociaux. Alors que ceux-ci sont en principe en charge du champ conventionnel et bénéficient à cet effet d'une délégation de gestion, la présence de l'Etat n'a cessé de se faire sentir de façon croissante. Son intervention a souvent reposé sur des motifs légitimes, telles la volonté de redresser les comptes dégradés de l'assurance maladie ou celle de sortir de l'impasse les négociations avec les professions de santé, elle n'en a pas moins durablement perturbé le pilotage de l'assurance maladie. Il n'est, dans ces conditions, pas étonnant que les partenaires sociaux et les professionnels de santé se soient souvent retrouvés pour décrier ces interventions et n'aient eu de cesse d'accuser l'Etat de tous les maux comme ce fut par exemple le cas dans le rapport de la commission Ruellan.

Les partenaires sociaux ne sont pas - non plus que les professions de santé souvent promptes à jouer de cette division entre l'assurance maladie et les pouvoirs publics - exempts de toute responsabilité dans la crise du pilotage de l'assurance maladie. La modification du mode de financement de l'assurance maladie, la crise du paritarisme et de la légitimité de ses acteurs, le départ des organisations patronales ont été autant de symptômes d'une crise profonde liée à la confusion des responsabilités. Le projet de loi entend donc remédier à cette situation par la définition claire du rôle de l'Etat et la mise en œuvre d'un nouvel équilibre des responsabilités au sein d'une assurance maladie aux institutions renouvelées.

b) La réaffirmation des compétences de l'Etat

Il est frappant de constater qu'aucune voix ne s'est élevée, par exemple au sein du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, non plus que devant la mission d'information de l'Assemblée nationale sur la problématique de l'assurance maladie ou encore pendant les auditions réalisées dans le cadre de la préparation de l'examen du présent projet de loi, pour nier à l'Etat toute compétence en matière de santé mais également d'assurance maladie.

Le rôle de l'Etat est d'entrée affirmé dans le projet de loi avec le rappel par l'article 1er des principes régissant l'assurance maladie. Il revient de toute évidence aux pouvoirs publics de veiller comme les y invite cet article à la garantie d'une protection indépendante des situations d'âge et de santé et à la détermination des objectifs de santé publique. Il est d'ailleurs significatif de ce point de vue que le présent projet de loi soit examiné au moment où le gouvernement et le Parlement élaborent une loi relative à la santé publique réformant profondément et structurant le cadre d'élaboration de ces objectifs de santé publique. Il traduit la nécessité dans ce domaine connexe à l'assurance maladie de mieux identifier les responsabilités et de laisser chaque acteur exercer les responsabilités qui lui incombent.

Cette volonté traverse tout le projet de loi. N'est-il pas significatif par exemple que l'Etat continue, en dépit de l'octroi aux caisses nationales par l'article 22 de la responsabilité de préparer un « budget de l'assurance maladie », d'adopter de façon souveraine les lois de financements de la sécurité sociale ? Tout aussi révélateur est le maintien par le projet de loi de la faculté pour l'Etat de prendre la décision finale quant à certains éléments du périmètre remboursable (cf. infra point 2) du B). Enfin, l'extension des compétences de l'assurance maladie se fait dans le respect des orientations pluriannuelles en matière de santé publique et des lois de financement de la sécurité sociale.

Pour autant, le projet de loi marque un refus net de toute évolution vers une étatisation de l'assurance maladie et fait une place forte aux instances dirigeantes de celle-ci profondément renouvelées.

c) Une modification de l'équilibre entre les institutions de l'assurance maladie tendant à confier un rôle essentiel aux partenaires sociaux

Le projet de loi procède à une réforme des institutions de l'assurance maladie fondée sur un nouvel équilibre entre ses organes dirigeants. Alors que les conseils d'administration sont aujourd'hui censés assurer l'ensemble des fonctions d'orientation, de gestion et de contrôle de l'assurance maladie, force est de constater que cette concentration des rôles sur une seule instance ne lui permet d'en exercer aucune de façon satisfaisante. Dès lors, le projet de loi propose à tous les échelons - national par l'article 30, local par l'article 33 et régional par l'article 36 - de distinguer entre la fonction d'orientation confiée à un conseil dans lequel les partenaires sociaux continueront de jouer un rôle prépondérant et un exécutif renforcé dans son autonomie de gestion.

Toutefois, il est clair que cet exécutif reste subordonné au conseil s'agissant de l'élaboration de la politique de la caisse : il agit dans le respect des orientations définies par le conseil auquel le fait d'être déchargé la tâche de gestion courante de la caisse - d'ailleurs souvent déléguée en réalité au directeur de celle-ci dans le système actuel, le conseil d'administration se bornant souvent à ratifier ses décisions - permettra d'exercer un rôle structurant. Un exemple illustre bien cette nouvelle répartition des compétences : le conseil de la CNAMTS détermine des orientations pour l'élaboration de la convention d'objectif et de gestion, le directeur général est chargé de négocier et d'élaborer le projet de convention ensuite signé par le président du conseil et le directeur général.

Le débat se focalise souvent sur les questions institutionnelles, les rapports de pouvoir : combien de membres pour telle catégorie ? Quelle ouverture à des représentants autres que ceux désignés par les partenaires sociaux ? Quelles règles de majorité au sein du conseil ? Quelle procédure de désignation du directeur général ? Ces questions méritent d'être posées et approfondies mais elles ne constituent pas le point essentiel.

La réforme repose sur deux caractéristiques majeures : le maintien d'un pilotage par les partenaires sociaux de l'assurance maladie et une organisation institutionnelle leur permettant d'exercer réellement cette compétence. Le nouvel équilibre ne doit pas être appréhendé en termes de concurrence entre les conseils et les directeurs mais en termes de complémentarité : chacun des deux sort renforcé dans sa sphère de compétence désormais bien délimitée.

2. Un renforcement de la structuration des exécutifs de l'assurance maladie

Le projet de loi renforce indéniablement les pouvoirs du directeur général de la CNAM, des directeurs des caisses primaires d'assurance maladie et des directeurs des URCAM dans le champ de compétences qui est le leur, même s'ils doivent rendre compte à leurs conseils respectifs et si leur action se fait dans le respect des orientations déterminées par les conseils.

Les exécutifs sont en effet dotés d'une compétence de principe sur les affaires de leur caisse, exercent sur elle une mission générale de direction et de responsabilité de son bon fonctionnement. Ils interviennent en amont des décisions du conseil, certaines des délibérations de celui-ci faisant explicitement l'objet d'une proposition du directeur, et en aval puisqu'ils assurent la mise en œuvre des orientations adoptées et l'exécution des décisions prises par le conseil. Ils disposent par ailleurs d'un pouvoir élargi en matière de gestion et d'une capacité renforcée à engager la caisse tant financièrement que juridiquement.

Cette évolution concerne l'ensemble des niveaux de gestion de l'assurance maladie mais s'avère particulièrement frappante s'agissant du directeur de la CNAMTS élevé au rang de directeur général dans l'article 30 du projet, qui est notamment chargé de la préparation des orientations de la politique de gestion du risque ainsi que de celle du projet de « budget de l'assurance maladie » en vue de l'élaboration du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il est en outre responsable non seulement du bon fonctionnement de la CNAMTS mais de celui de l'ensemble du réseau et dispose à cet effet d'une réelle autorité sur celui-ci. Il est le « patron » du réseau de l'assurance maladie et l'article 33 lui confère d'ailleurs un vaste pouvoir de nomination sur les agents de direction au niveau local et régional.

Ces compétences fortes soutenues par de réels moyens devraient permettre de parvenir à une gestion plus efficace et plus réactive de l'assurance maladie.

3. Une meilleure coordination des régimes de base

La généralisation et l'universalisation de la couverture maladie par les régimes de base obligatoires permettent indéniablement un rapprochement des actions de chacun d'eux que les difficultés communes aux trois régimes - notamment l'exigence d'une maîtrise de l'ensemble des dépenses de la branche maladie - rendent particulièrement opportun. Dès lors, le projet de loi propose par son article 31 d'aller plus loin que la collaboration - souvent informelle - déjà existante en créant une union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM) regroupant la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), la Caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés (CANAM) et la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA).

L'UNCAM aura notamment pour mission de mener et conclure la négociation conventionnelle - aussi bien interprofessionnelle qu'avec chacune des professions de santé - mais également d'adopter des décisions relatives à la définition des conditions d'inscription au remboursement d'un acte ou d'une prestation, à la fixation de son tarif ou encore de fixer le montant de la participation forfaitaire de l'assuré.

Ses décisions engageront naturellement chacune des trois caisses mais celles-ci ne perdent pas pour autant leur identité. Les instances dirigeantes de l'UNCAM permettent en effet de tenir compte à la fois du poids du régime général dans la branche maladie (environ 85 % des dépenses) par l'octroi aux représentants de la CNAM de deux tiers des sièges au conseil de l'UNCAM et de la spécificité de chaque régime avec une représentation paritaire entre la CNAMTS d'une part, et la CCMSA et la CANAM d'autre part, au sein du collège des directeurs chargé de préparer et mettre en œuvre les délibérations du conseil. Sont ainsi écartées toute tentation hégémonique de la CNAMTS et toute possibilité pour l'un des autres régimes de bloquer l'action de l'UNCAM.

4. Un pilotage financier plus crédible

Les observateurs du financement de l'assurance maladie, au premier rang desquels la Cour des comptes, ne trouvent plus de mots assez durs pour stigmatiser la faillite du pilotage financier de l'assurance maladie et son symbole : l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) voté « pour la forme » chaque année en loi de financement de la sécurité sociale. Au sein de la mission d'information sur la problématique de l'assurance maladie comme au sein de la commission spéciale, pour ne citer que les prises de position les plus récentes, de nombreuses voix se sont élevées pour réclamer qui l'opposabilité de l'ONDAM, qui la transformation des lois de financement de la sécurité sociale en « véritables lois de finances sociales ».

Parce que le présent projet n'est ni utopique ni organique, il ne contient pas ces deux pistes de réforme. En revanche, il comprend en ses articles 21 et 22 des outils simples, réalistes et rapides à mettre en place pour progresser dans le sens d'une crédibilité retrouvée de l'ONDAM et par conséquent du débat parlementaire. Le premier de ces outils repose sur les caisses nationales, chargées de formuler chaque année avant l'été des propositions relatives au budget de l'assurance maladie pour l'année suivante, en recettes comme en dépenses. Le second outil, dénommé à dessein « comité d'alerte », est une structure indépendante et très légère, placée auprès de la Commission des comptes de la sécurité sociale et destinée à prévenir tout dérapage des dépenses qui viderait de son sens le vote de l'ONDAM, comme le cas s'est trop souvent produit depuis 1998. Sans préjuger de l'efficacité de tels mécanismes, on peut d'ores et déjà saluer le pragmatisme du projet de loi sur ce point.

Mieux pilotée, clarifiée dans son fonctionnement et assise sur un cadrage financier qui doit prochainement devenir pluriannuel, l'assurance maladie possédera ainsi des bases plus saines et plus solides qu'aujourd'hui, rendant possible l'extension de ses responsabilités et l'instauration d'instances nouvelles.

B. L'ATTRIBUTION À L'ASSURANCE MALADIE DE RESPONSABILITÉS ACCRUES DANS SON CHAMP D'ACTION TRADITIONNEL

1. La Haute autorité de santé : une expertise scientifique indispensable à la prise de décision

L'article 19 du projet de loi prévoit d'instituer une nouvelle autorité publique indépendante à caractère scientifique, la « Haute autorité de santé », qui aura pour mission d'éclairer les choix des gestionnaires de l'assurance maladie mais également d'améliorer l'information des professionnels de santé et des usagers, afin de promouvoir la qualité des pratiques et des soins.

a) L'évaluation médicale de l'ensemble des actes, des produits et des prestations de santé

La diversité des actes et des produits de santé et leur évolution toujours plus rapide liée aux progrès technologiques requièrent une gestion active et surtout médicalisée du périmètre des biens et services pris en charge par l'assurance maladie, c'est-à-dire de définir régulièrement des priorités collectives, fondées sur des critères objectifs, scientifiques et transparents.

Or les produits et les prestations inscrits au remboursement font aujourd'hui l'objet d'une évaluation médicale insuffisante, voire quasi inexistante dans le cas des actes de soins et d'analyse. Il n'est pas rare en effet que les instances chargées d'émettre un avis sur leur inscription au remboursement soient composées de praticiens - professionnels, industriels ou représentants de l'assurance maladie - qui auront ensuite à appliquer ces décisions ou à les contrôler.

La première mission dévolue à la Haute autorité de santé, dont le collège sera composé de personnes nommées au seul titre de leur compétence et de leur expérience scientifiques, sera donc de procéder de l'évaluation périodique du service attendu et rendu par l'ensemble des produits, des actes ou des prestations de santé.

Par son expertise médicale, la haute autorité devra également contribuer à l'élaboration des décisions prises dans le domaine du remboursement ainsi que des conditions particulières de prise en charge des soins pour les affections de longue durée. Elle pourra être saisie par l'assurance maladie, l'Etat, les professionnels de santé et les représentants des usagers pour réévaluer l'efficacité de certains actes médicaux et certains traitements, si cela s'avère nécessaire.

Elle permettra ainsi de généraliser un dispositif d'évaluation qui n'existe réellement aujourd'hui que pour les médicaments, à travers la commission de la transparence, et  d'« objectiver » davantage les conditions de prise en charge des actes et des produits de santé par l'assurance maladie.

b) La promotion des bonnes pratiques et l'amélioration de l'information des professionnels de santé et des assurés

Le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie a souligné l'existence d'insuffisances notoires en matière d'élaboration, et plus encore, de diffusion des références des bonnes pratiques et de soins. Celles-ci semblent liées tout à la fois à l'abondance de l'information disponible, du fait notamment de multiples intervenants dans ce domaine - les caisses d'assurance maladie, l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), l'agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, le fonds de promotion de l'information médicale et médico-économique (FOPIM) ou encore les sociétés savantes - mais également du fait de référentiels pas toujours présentés et diffusés de façon suffisamment accessible, lisible et adaptée aux besoins quotidiens des professionnels de santé.

En outre, lorsqu'elles existent, ces recommandations sont loin d'être appliquées uniformément par l'ensemble des professionnels. C'est par exemple le cas des médicaments hypolipémiants de traitement du cholestérol, qui ne devraient en principe être prescrits qu'en cas d'inefficacité constatée, après trois mois, de règles d'hygiène de vie et de diététique, et en fonction du taux mesuré de « mauvais cholestérol ».

« Sur ce sujet, il faut [donc] passer à la vitesse supérieure », comme l'a appelé de ses vœux le ministre de la santé et de la protection sociale, lors de son audition par la commission le 17 juin dernier. La Haute autorité de santé se verra ainsi confier une deuxième mission tout aussi essentielle, à savoir veiller à l'élaboration et à la diffusion des référentiels de bonne pratique et contribuer à l'information des professionnels de santé et du public dans ces domaines.

Instance de coordination des travaux des agences spécialisées (AFSSAPS et ANAES) et d'impulsion de la diffusion des bonnes pratiques, qui a trop longtemps marqué le pas dans notre pays, la Haute autorité de santé pourra également s'appuyer dans l'exercice de ses missions sur les données recueillies par l'Institut des données de santé.

c) L'appui de l'Institut des données de santé

Dans l'exercice de ses missions, la Haute autorité devra pouvoir s'appuyer sur des bases de données actualisées et de grande ampleur. Attendue par les acteurs du système de financement des soins et en particulier par les organismes d'assurance complémentaire en santé, la création de l'Institut des données de santé du projet était préconisée, afin d'accroître le partage de telles données, par plusieurs rapports : celui du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, mais aussi celui rédigé par M. Christian Babusiaux ou encore celui du comité pour la transparence des statistiques de l'assurance maladie. C'est précisément ce conseil, doté d'un champ et de moyens d'action trop restreints, auquel se substitue l'Institut des données de santé. Volontiers qualifié d'« INSEE de la santé », l'institut ne devrait pourtant pas en posséder les missions d'études ; en revanche, l'objectif poursuivi est bien d'en faire un établissement collecteur et diffuseur de données bénéficiant d'une crédibilité incontestée. Sur la forme, le choix du groupement d'intérêt public apparaît des plus judicieux pour faire échanger avec souplesse des acteurs aussi différents que les caisses, les assureurs, les professionnels de santé ou les établissements. Quant au fond, les données susceptibles d'être utilisées par les membres du GIP sont bien évidemment anonymes, et protégées par la CNIL.

2. Des pouvoirs de l'assurance maladie étendus en matière de remboursement des dépenses

À partir d'un constat partagé selon lequel, pour reprendre en substance les propos du ministre de la Santé devant la mission d'information sur la problématique de l'assurance maladie, il n'est plus possible de prévoir la fixation des taux de remboursement des actes et prestations pris en charge par l'assurance maladie dans un bureau de l'avenue de Ségur, le présent projet procède à de substantiels transferts de compétences du gouvernement vers l'assurance maladie en cette matière, comme le prévoit en particulier son article 23. Le même raisonnement peut être transposé aux dispositions des articles 24 et 25, respectivement consacrées à l'inscription des actes et prestations à la nomenclature et aux missions du Comité économique des produits de santé : davantage de pouvoirs pour l'assurance maladie, mais pas de désengagement complet de l'État.

Ainsi, l'UNCAM reçoit compétence pour déterminer, en lieu et place du pouvoir réglementaire, le taux de remboursement des prestations en nature de l'assurance maladie. Le puissant levier du montant du ticket modérateur est donc transféré à l'union nationale des caisses et, même si cette compétence demeure encadrée dans des limites fixées par décret, elle représente une grande avancée dans la voie de la possession par les gestionnaires des régimes des moyens concrets d'assumer leur rôle de gestionnaires.

L'UNCAM se voit également confier, en lien avec la Haute autorité de santé, la responsabilité principale de la procédure d'inscription à la nomenclature des actes et prestations remboursables − jusques et y compris en matière de cotation tarifaire −, hors dispositifs médicaux. Les ministres compétents conservent néanmoins un droit d'opposition, pour raisons de santé publique.

Enfin, en matière de fixation des prix des médicaments et dispositifs médicaux remboursables, l'assurance maladie bénéficie également de prérogatives accrues, sous forme d'un pouvoir de décision qui se substitue aux compétences ministérielles actuelles, moyennant, là encore, un ultime droit d'opposition. Sont ainsi reconnues à l'article 25 l'expertise et la compétence du Comité économique des produits de santé. De par ses pouvoirs accrus et sa composition codifiée pour mieux y associer les régimes obligatoires de base d'assurance maladie, le comité voit sa place confortée dans le sens d'une amélioration de la chaîne du remboursement, au bénéfice des assurés.

Ce véritable basculement de compétences ne fait pas que promouvoir les gestionnaires des régimes de base ; il les place devant leurs responsabilités en faisant le choix d'une plus grande délégation de gestion. Désireux, dans leur grande majorité, de s'impliquer effectivement dans cette gestion, les partenaires sociaux se trouveront en première ligne.

3. Une compétence confortée dans le champ conventionnel

a) Une nécessaire modernisation du cadre conventionnel

Les dispositions du projet de loi s'appuient sur le constat d'un paysage conventionnel en crise profonde.

Un des piliers de l'assurance maladie, et donc de l'organisation de notre système de soins, est le conventionnement des professionnels de santé et plus particulièrement des médecins. La convention médicale peut être considérée comme l'acte fondateur entre les médecins et la société. C'est l'outil qui permet de concilier deux principes qui pourraient, sans lui, entrer en contradiction l'un avec l'autre : d'une part, un haut degré de liberté dans l'organisation du système de soins et, d'autre part, un haut niveau de la socialisation des dépenses de santé.

Or, le système conventionnel, créée en 1967, traverse une crise profonde depuis plus une dizaine d'années. A titre d'illustration, il est utile de rappeler que les rapports des médecins spécialistes avec les régimes de l'assurance maladie sont fixés depuis 1995 par un règlement conventionnel minimal qui consiste dans la fixation unilatérale par l'Etat de certains éléments relevant de la convention. Les médecins généralistes sont, eux, restés sous statut conventionnel.

Le rapport 2003 de la Cour des comptes sur l'exécution des lois de financement de la sécurité sociale, les conclusions des travaux du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie et de celles de la mission d'information sur la problématique de l'assurance maladie convergent pour souligner l'inefficacité du système conventionnel actuel pour réguler les relations entre les régimes de l'assurance maladie et les professions de santé.

Le dispositif est lourd, inefficace, marqué par des litiges juridiques. Il place l'Etat dans la position de décideur d'ultime recours et ne conduit pas à responsabiliser les partenaires aux négociations conventionnelles. Il ne donne satisfaction à personne.

Ces diagnostics mettent en évidence la nécessité de moderniser le cadre conventionnel, ce qu'a déjà entrepris, mais dans un cadre institutionnel inchangé, la loi n° 2002-322 du 6 mars 2002 portant rénovation des rapports conventionnels entre les professions de santé libérales et les organismes de l'assurance maladie, qui avait créé l'accord-cadre interprofessionnel.

Le présent article s'inscrit dans une réforme plus ambitieuse du système de santé et propose des changements structurels.

b) Une responsabilisation renforcée des acteurs du champ conventionnel

Il convient en premier lieu de noter que le présent projet, dans l'esprit d'une délégation élargie aux acteurs de l'assurance maladie, propose d'étendre le champ de la négociation conventionnelle.

Ainsi, l'article 5 du présent projet renvoie à la convention conclue entre les organisations de médecins et les caisses pour fixer les modalités de dépassement d'honoraires des médecins en cas de consultation d'un patient n'ayant pas au préalable consulté son médecin traitant. En outre, l'article 6 du projet permet à des organisations représentatives de professions de santé de conclure des accords interprofessionnels sur des sujets précis. L'article 29 confie à la convention le soin de définir les modalités d'organisation du dispositif d'aide à l'installation des professionnels libéraux, en particulier les obligations auxquelles sont soumis les bénéficiaires de ces aides et les modalités d'attribution des aides.

L'article 28 du projet propose de simplifier la conclusion et l'application des conventions, en apportant les modifications suivantes :

- facilitation des conditions de transmission des conventions aux ministres ;

- facilitation des conditions de leur approbation ;

- instauration d'un « droit d'opposition » ;

- suppression du règlement conventionnel minimal (RCM) et la création d'une procédure d'arbitrage.

Transmission aux ministres et approbation des conventions

L'article 28 du projet simplifie la procédure en supprimant l'obligation de transmission aux ministres chargés de l'agriculture, de l'économie et du budget (l'obligation de transmission des conventions ne concerne donc que les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale). Ce changement est cohérent avec les mesures financières visant à mieux distinguer le budget de l'Etat de celui des régimes de l'assurance maladie (dont le transfert d'une partie des ressources provenant des droits tabac à l'assurance maladie) et avec le choix d'une maîtrise des dépenses de santé sur une base médicalisée. L'article 28 propose que le délai à l'issue duquel l'accord est réputé approuvé soit réduit de quarante-cinq à vingt et un jours.

Il est en outre proposé de réduire les motifs d'opposition des ministres à la non-conformité aux lois et règlements et à la présence de dispositions contraires à la politique de santé publique ou à la sécurité sanitaire. Dans la rédaction en vigueur, les ministres peuvent s'opposer à la convention en raison de l'incompatibilité de la convention avec l'objectif de dépenses. Cette proposition diminuera considérablement la marge de manœuvre des ministres et elle responsabilise d'autant les partenaires à la convention. Elle signifie que les décisions conventionnelles ne peuvent faire l'objet d'un refus par le ministre de la santé ou de la sécurité sociale que pour des motifs liés à la légalité de l'accord ou à des motifs de santé publique.

Création d'un droit d'opposition

A l'image de la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, l'article 28 crée une sorte de « droit d'opposition majoritaire » qui vise à éviter l'adoption de dispositions conventionnelles auxquelles serait opposée la majorité de la profession concernée. Si cette possibilité d'un droit d'opposition majoritaire n'est pas employée par un ou des syndicats contestant une convention, cela exprime de leur part une adhésion minimale à ses dispositions. Cette procédure responsabilise davantage les négociateurs et évite des surenchères stériles. Si un ou des syndicats utilisait cette procédure et échouait à réunir une majorité, la convention pourrait en ressortir paradoxalement renforcée.

Mise en place d'un règlement arbitral

Le projet vise à supprimer le règlement conventionnel minimal, dont la fixation unilatérale par l'Etat est devenue incompatible avec le souhait d'une délégation élargie aux partenaires sociaux. La procédure d'arbitrage intervient en cas de rupture de négociation ou d'opposition à la reconduction d'une convention. L'arbitre désigné soit par accord des parties, soit par le premier président de la Cour des comptes, arrête un projet de convention « dans le respect du cadre financier pluriannuel des dépenses de santé ». Ce projet est soumis pour approbation aux ministres, qui ne peuvent s'y opposer que pour des motifs liés à la santé publique ou à la légalité de la convention. Si l'UNCAM et au moins un syndicat représentatif des professionnels de santé libéraux adhèrent à ce projet, ce projet devient la convention soumise à approbation ministérielle. Sinon, le projet s'applique en tant que règlement arbitral.

C. UNE ORGANISATION ET UNE GESTION PLUS COHÉRENTES DE L'ENSEMBLE DU SYSTÈME DE SOINS

1. La coordination tant attendue des régimes de base et des complémentaires

La maîtrise des dépenses de santé s'est fréquemment heurtée à la mauvaise coordination entre régimes de base et couverture complémentaire : ainsi, les mesures tels le ticket modérateur, le forfait hospitalier ou encore les déremboursements ou moindres remboursements se sont souvent heurtées par le passé à cet obstacle. Loin d'agir de façon coordonnée avec les régimes de base, les complémentaires se sont souvent posées en concurrentes en offrant aux patients une couverture du vide laissée par la couverture de base, en investissant les nouveaux marchés ainsi ouverts.

Le respect des règles de la concurrence et de la liberté d'entreprendre s'accommode mal de mesures autoritaires interdisant de telles pratiques. Dès lors, la solution passe d'abord par un dialogue entre ces deux catégories d'acteurs. L'article 31 en permet l'instauration par la création à la fois de l'UNCAM et d'une union des organismes de protection sociale complémentaire. La seconde émet un avis sur certaines décisions relevant de la compétence de la première tout en respectant la prééminence des régimes de base dans la prise de décision. La solution passe ensuite par des mesures incitatives : l'article 32 crée une incitation financière forte pour les complémentaires à respecter le cahier des charges établi par l'Etat sur proposition des deux unions définissant notamment le champ des dépenses qui ne doivent pas être remboursées au premier euro.

Cette coordination permet d'ailleurs d'envisager la poursuite de l'extension de la couverture complémentaire dont 8 % de Français sont encore dépourvus.

2. Le renforcement de la coordination entre la ville et l'hôpital : la réforme concerne aussi l'hôpital

La présente réforme n'a de sens que dans la mesure où elle concerne l'hôpital, qui concentre la moitié des dépenses de l'assurance maladie.

Cette extension de la réforme à l'hôpital se traduit par l'application de nombreux dispositifs de maîtrise médicalisée aux établissements de santé, comme le dossier médical personnel ou la promotion des bonnes pratiques (cf. infra, partie  I). Elle se traduit aussi par la réforme de la gouvernance de l'hôpital au niveau local grâce à la promotion de la coopération entre les agences régionales de l'hospitalisation et les URCAM (cf. infra).

Au niveau central, l'article 26 du présent projet créé un « comité de l'hospitalisation » qui a vocation à associer les régimes de l'assurance maladie dans le pilotage de la politique hospitalière.

En France, la politique hospitalière ne pourra sans doute jamais échapper complètement à la tutelle étatique. En particulier, l'Etat conserve compétence pleine en matière de négociation sur les statuts et les rémunérations de la fonction publique hospitalière et des médecins praticiens hospitaliers. L'importance de la fonction publique hospitalière, la présence de corps nationaux des directeurs d'hôpitaux ou de praticiens hospitaliers, l'impact local des restructurations hospitalières, les impératifs de sécurité sanitaire et enfin le mode de financement conduisent à souligner la prépondérance de l'Etat dans le pilotage de cette politique, alors même que l'hôpital représente plus de la moitié des dépenses des régimes de l'assurance maladie, régimes gérés par les partenaires sociaux.

Un besoin de coordination avec l'assurance maladie est apparu, aboutissant à la proposition de création de ce comité de l'hospitalisation. L'objectif recherché est de créer un centre d'expertise qui, sur le sujet de la politique de financement, associerait davantage l'assurance maladie aux décisions prises relatives à l'hôpital public et privé. Cette mesure s'inscrit dans un contexte marqué par l'application progressive de la réforme appliquant la tarification à l'activité dans les hôpitaux et les cliniques.

A titre de rappel, la nécessité de créer une instance nationale de concertation de l'hôpital qui associerait les régimes de l'assurance maladie avait été mise en évidence par le rapport de la mission parlementaire d'information sur l'organisation interne de l'hôpital4.

Le périmètre de ce comité est limité à la politique de financement des établissements. Ses compétences restent minces : le comité donne des avis sur des décisions financières prises par le gouvernement, il est informé de certaines décisions, notamment les accords salariaux, et il peut procéder à des consultations. La discussion parlementaire parviendra peut-être à renforcer la portée de cette innovation bienvenue.

De l'avis unanime, l'échelon régional est le plus pertinent pour mettre en œuvre une coordination concrète entre la ville et l'hôpital. C'est la raison pour laquelle, à l'article 37, est mise en place une articulation institutionnalisée entre l'agence régionale de l'hospitalisation responsable de la gestion de l'hôpital et l'union régionale des caisses d'assurance maladie désormais mise à même, de par l'article 36, d'exercer un certain pilotage de l'offre de soins de ville dans son ressort territorial. L'enjeu est majeur ; il doit être traité en conséquence dans le texte.

3. L'enjeu majeur de la coordination à l'échelon régional

À l'échelle régionale, force est de constater que le pilotage des organismes d'assurance maladie ne s'exerce pas avec toute l'efficacité souhaitable. Alors que les caisses régionales d'assurance maladie n'ont pas pour rôle, contrairement à ce que leur nom pourrait laisser penser, de coordonner l'action des caisses primaires, les unions régionales des caisses d'assurance maladie (URCAM) mises en place à la fin de 1997 pour définir et mettre en œuvre une véritable politique régionale de gestion du risque n'ont pas, faute de moyens et de prérogatives suffisants, convenablement rempli cet office.

Tirant les conséquences de cet état de fait, l'article 36 du projet renforce notablement les URCAM, d'une part en rénovant leur structure pour l'aligner sur le schéma conseil / directeur adopté pour la caisse nationale et pour les caisses locales, d'autre part en les dotant de réels pouvoirs d'impulsion, y compris financière : dans le cadre d'un contrat conclu avec l'UNCAM, chaque URCAM pourra être financièrement intéressée à l'atteinte de certains objectifs et pourra à son tour encourager financièrement la conduite à l'échelle régionale d'actions de promotion de la qualité et de l'efficience des soins. On mesure ainsi le saut qualitatif du pilotage régional de l'assurance maladie. Là aussi, la discussion parlementaire pourrait en renforcer la portée.

On peut dater des ordonnances de 1996 pour l'essentiel, l'impulsion donnée à l'échelon régional dans l'organisation de l'assurance maladie. Depuis lors, les structures y ont « fleuri » à tel point que l'observateur non averti peut peiner à établir la cohérence du paysage institutionnel. Le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie ne dit d'ailleurs pas autre chose, qui critique les « empilements institutionnels » et indique que « le cloisonnement des secteurs hospitalier et ambulatoire empêche une gestion optimale des ressources centrée sur le malade ».

La surcharge de l'échelon régional, dit encore très justement le rapport du Haut Conseil, est manifeste. Dresser une liste non exhaustive des entités présentes en région s'apparent à une figure imposée non dépourvue de vertus pédagogiques : agences régionales de l'hospitalisation, unions régionales des caisses d'assurance maladie, unions régionales des médecins libéraux, directions régionales des affaires sanitaires et sociales, caisses régionales d'assurance maladie, conférence régionale de santé, groupements de santé publique, groupements de coopération sanitaire, observatoires régionaux de santé... Non que chacune de ces instances, prise individuellement, n'ait sa logique propre, mais l'empilement ne peut que nuire à l'efficacité et le système en paie le prix, en termes de qualité.

À cette stratification des organismes fait écho la succession rapide de textes de valeur législative traitant, chacun sous un angle différent, de la santé à l'échelon local. Pour ne recenser que les plus récents : loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, lois de financement (pour 2004 notamment), loi d'habilitation, ordonnance du 4 septembre 2003 qui en est issue, nouveau projet de loi d'habilitation, projet de loi relatif à la politique de santé publique, projet de loi relatif aux responsabilités locales, projet de loi relatif aux territoires ruraux (s'agissant des zones sous-médicalisées)...

Devant un tel constat, il est fort logique que se soit fait jour, depuis plusieurs années maintenant, la volonté de regrouper en de vastes agences régionales de santé toutes les compétences sanitaires et médico-sociales. À lire l'article 37, ce projet est présent en filigrane ; cependant, l'on doit à la vérité de dire qu'il y a loin d'un tel projet à sa réalisation effective, tant sont nombreux et complexes les obstacles techniques et juridiques à un regroupement aussi ambitieux. Le texte fait donc œuvre de sagesse en prévoyant « seulement » une coopération renforcée entre les organes décisionnaires des ARH et des URCAM.

Pour autant, un équilibre est sans doute à trouver entre la création prématurée d'agences régionales de santé et l'esquisse trop timide d'un mécanisme de coordination. Dès lors, il semble possible de rédiger un texte un peu plus volontariste, afin que la perspective de la création des ARS, même à un terme assez éloigné, ne soit pas perdue de vue. Il y va, sans conteste, de l'avenir de la régulation de l'offre et de la demande de soins, tant l'échelon régional s'impose comme le plus pertinent.

III.- QUALITÉ ET GOUVERNANCE, RENFORCÉES PAR DES MESURES FINANCIÈRES, PERMETTRONT D'ASSAINIR LES COMPTES DE L'ASSURANCE MALADIE

Le gouvernement s'est d'emblée refusé à faire du présent projet de loi un nouveau plan de redressement financier de l'assurance maladie qu'aurait rapidement rendu désuet la capacité d'un système de santé source de non-qualité et sans cohérence. Un simple ravaudage de cette nature aurait immanquablement appelé de nouvelles mesures financières à court terme. En revanche, les réformes de structures portées par le projet de loi dans ses deux premiers titres contribuent à la réalisation d'économies plus intelligentes, conséquentes et durables que des mesures purement financières. En revanche, il n'est pas possible - notamment compte tenu du passif accumulé - de faire l'impasse sur de telles mesures, au surplus plus légitimes dès lors que les ressources seront mieux gérées.

A. L'AMÉLIORATION DE L'ORGANISATION ET DU FONCTIONNEMENT DU SYSTÈME DE SOINS PERMETTRONT DES ÉCONOMIES CONSIDÉRABLES

1. Des économies liées à une dépense de soins plus efficiente

a) Le choix d'une maîtrise médicalisée des dépenses de soins

Ecartant la régulation comptable, aussi injuste qu'inefficace, le gouvernement propose une maîtrise des dépenses grâce à deux moyens : d'abord grâce à l'utilisation d'outils médicalisés et ensuite grâce au renforcement de la qualité.

Cette qualité accrue des soins concerne autant les professionnels installés en ville que les établissements de santé. Elle passe aussi par le changement des comportements des usagers grâce à des mécanismes incitateurs. Il s'agit de mieux responsabiliser les assurés.

Ainsi, le patient sera encouragé à laisser les professionnels de santé qu'il consulte accéder à son dossier médical personnel. Il peut choisir de ne pas laisser le professionnel accéder à son dossier médical personnel, mais il devra alors assumer les conséquences financières de son comportement (participation majorée). Certes, le déploiement du dossier médical personnel sera source de dépenses ; mais à terme les économies que le dossier médical personnel engendrera (moins de prescriptions de médicaments, d'analyses, d'examens...) couvriront largement ces coûts.

La qualité des soins passe aussi par une meilleure coordination des soins grâce au système du médecin traitant. Les mécanismes financiers mis en place découragent le nomadisme médical, phénomène à l'ampleur mal connue mais source de gaspillages et de prise en charge sanitaire insuffisante. Ce nomadisme est aussi combattu par les dispositions relatives aux affections de longue durée.

b) La réforme du mode de financement des établissements de santé devrait graduellement porter ses effets

La loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 de financement de la sécurité sociale pour 2004 a profondément modifié les principes de tarification des prestations hospitalières en prévoyant une application graduelle de la tarification à l'activité. En abandonnant le système du budget global et en prévoyant le financement sur la base de tarifs nationaux, éventuellement modifiés par des coefficients correcteurs, certaines activités restant financées par des enveloppes forfaitaires.

Il s'agit là d'une profonde réforme, qui vise à appliquer le principe de responsabilisation aux personnels des établissements et, aux agences régionales de l'hospitalisation. La loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le gouvernement à simplifier le droit, notamment les articles 6 et 21, et l'ordonnance n° 2003-850 du 4 septembre 2003 portant simplification de l'organisation administrative et du fonctionnement du système de santé ainsi que de procédures de création d'établissements ou de services sociaux ou médico-sociaux soumis à autorisation ont augmenté les compétences des agences régionales de l'hospitalisation.

Cette réforme est d'application graduée (8 ans) et elle prévoit, s'agissant de l'hospitalisation publique, une montée en charge progressive en augmentant chaque année la proportion du budget de l'hôpital financée par la tarification à l'activité. La réforme augmentera les moyens des établissements particulièrement actifs. Elle devrait accroître l'efficience du système hospitalier en favorisant des regroupements et des restructurations du tissu hospitalier, et constitue à ce titre la preuve que l'hôpital est lui aussi concerné par la réforme. En outre, l'article 50 du projet de loi de simplification du droit, actuellement en discussion au Parlement, habilite le gouvernement à modifier par ordonnance l'organisation interne de l'hôpital. Ces modifications devraient assouplir l'organisation des établissements afin de faciliter leur adaptation aux changements qu'impose la réforme portant tarification à l'activité.

c) Des gisements d'économies importants du côté des produits de santé

S'agissant des produits de santé, spécialités pharmaceutiques et dispositifs médicaux, les gisements d'économies sont également de grande ampleur au stade de la fixation des prix, des tarifs de responsabilité et des taux de remboursement. De ce point de vue, les articles 23 à 25 du projet, en accroissant les prérogatives de l'assurance maladie au sein des organismes compétents pour prendre de telles décisions, portent en germe des possibilités de moindre progression de dépenses traditionnellement dynamiques. En 2003, le total des mesures de déremboursement ou de baisse de remboursement de médicaments a représenté quelque 350 millions d'euros et, en 2004, 270 millions d'euros sont attendus de l'évolution du prix des médicaments et dispositifs médicaux ainsi que de l'évolution de certains taux de marge des entreprises.

Pour autant, la Cour des comptes note que « la France est le seul pays européen qui poursuive simultanément un aussi grand nombre d'objectifs : le réseau de répartition et de distribution le plus dense, protégé par un encadrement des marges et des remises commerciales à tous les stades, une protection de l'industrie contre l'importation dite «  parallèle », un rapprochement des prix industriels les plus chers, un taux moyen de remboursement élevé et croissant, un nombre de présentations admises au remboursement très important, et cela dans un contexte où les quantités consommées par habitant sont parmi les plus élevées au monde. »

D'autre part, il faut prendre conscience de la très forte prépondérance de l'effet de structure dans la hausse des dépenses de médicament : en 2002, pour une évolution globale du chiffre d'affaire des médicaments de 3,6 %, l'effet prix a joué pour − 1,5 %, l'effet volume pour 0,3 %, et l'effet de structure, c'est-à-dire la déformation vers les spécialités les plus coûteuses (qui sont souvent les plus récentes et/ou les plus innovantes), pour 4,9 %. Autant de données qui militent pour l'utilisation la plus large, par l'UNCAM et le comité économique des produits de santé, des marges de manœuvre que leur ouvre le projet.

2. Des économies résultant d'un meilleur contrôle et d'une gestion plus efficace

a) Un contrôle renforcé

L'assurance maladie va sur un certain nombre de points adopter dans une démarche de meilleur contrôle de sa gestion. Il devrait notamment en résulter une économie sur les coûts de gestion de la branche.

Cette démarche ne s'appliquera pas cependant uniquement à la gestion administrative du régime mais aussi aux actes et prestations eux-mêmes. Ainsi, à titre d'exemple, par le renforcement du contrôle médical et l'encadrement des pratiques des prescripteurs, le projet de loi doit permettre d'apporter une inflexion sensible à la progression des indemnités journalières. Une diminution de moitié du rythme de croissance des indemnités journalières (IJ) permettrait une économie de l'ordre de 800 millions d'euros en 2007.

Relèvent de la même logique les dispositions visant à la systématisation des recours contre tiers ou les nouveaux moyens juridiques octroyés aux agents chargés de la lutte contre le travail dissimulé, c'est-à-dire l'emploi de salariés sans versement des cotisations et contributions sociales ordinairement dues.

b) Des économies sur les frais financiers

La situation des comptes de l'assurance maladie est aujourd'hui catastrophique. Le déficit prévisionnel de la branche pour 2004 est supérieur à celui de l'ensemble du régime général en 1995 - alors même que ce dernier avait conduit à créer la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) et un prélèvement à l'assiette quasiment identique à celle de la CSG : la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS). Le seul déficit 2004 équivaut à la totalité de la dette accumulée entre 1996 et 1998 qui avait conduit à la prolongation de cinq ans de la durée de vie de la CADES et de la CRDS (de 2009 à 2014). Outre le fait que cette situation est incompatible avec les engagements européens de la France, la dette issue de l'accumulation des déficits pèse sur les comptes courants de la branche (500 millions d'euros d'intérêts prévus en 2004).

A contrario, la situation de la CADES est saine en dépit des charges nouvelles qui lui ont périodiquement été confiées depuis 1998. En outre, la CADES bénéficie de nombreux atouts au premier rang desquels figurent le dynamisme du produit de la CRDS et l'équilibre structurellement excédentaire de la caisse.

Dès lors, une nouvelle reprise de dette par la CADES - outre qu'il n'existe guère d'alternative - constitue une solution tentante. C'est celle retenue par l'article 45 du projet qui prévoit une reprise de dette de 35 milliards d'euros financée par la prolongation de la CADES et de la CRDS jusqu'à l'extinction de la dette. Si le transfert de la dette à la CADES semble une mesure de bon sens, il existe néanmoins un débat sur ses modalités. Le projet de loi fait le choix de la seule prolongation de la durée ; on aurait pu envisager une augmentation du taux de la CRDS - en fait un doublement - et le maintien de la date de 2014 pour l'extinction de la CADES. On aurait également pu envisager une solution intermédiaire évitant par une hausse modérée du taux un alourdissement excessif des prélèvements obligatoires couplée à une prolongation courte évitant de transférer une charge importante sur les générations futures. Nul doute que le débat sera nourri sur ce point.

B. UN EFFORT FINANCIER ÉQUITABLEMENT RÉPARTI

1. Une nécessaire participation de l'usager pour favoriser un juste recours aux soins

a) La création d'une contribution forfaitaire pour chaque consultation et chaque acte médical

L'institution du « ticket modérateur », c'est-à-dire d'un reste à charge pour l'assuré après le remboursement par les caisses d'assurance maladie, visait initialement à faire prendre conscience aux assurés du coût de leurs dépenses de santé et limiter de ce fait les comportements abusifs en matière de consommation de soins.

Or, comme l'a souligné le rapport du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, « on peut considérer que cette finalité n'a plus aujourd'hui qu'une portée extrêmement limitée, compte tenu de la proportion très élevée (environ 95 %) d'assurés bénéficiaires, soit d'une couverture complémentaire, soit d'une prise en charge intégrale par l'assurance maladie obligatoire ». Toutes choses égales par ailleurs, les personnes bénéficiant d'une couverture complémentaire recourent en effet entre 1,9 et 2,7 fois plus aux médecins de ville que les personnes dépourvues d'assurance complémentaire.

La participation financière des assurés français au coût des soins est ainsi l'une des plus faibles des pays développés, comme l'illustre le graphique suivant, extrait du rapport d'information de M. Edouard Landrain sur les réformes de l'assurance maladie en Europe (juin 2004).

Les versements nets des ménages
en pourcentage des dépenses totales de santé
en 2000

graphique

Source : OCDE, Eco-santé, 2003

A l'évidence, le rapporteur ne peut que se réjouir de cette évolution ainsi que du développement du tiers payant, qui ont été autant de jalons dans l'amélioration de l'accès aux soins, en particulier pour les plus démunis. On ne saurait cependant ignorer que le corollaire nécessaire en est la « neutralisation » de l'effet du ticket modérateur sur la prise de conscience des assurés du poids des dépenses de santé, qui apparaît aujourd'hui, à bien des égards, limitée.

La prise de conscience du coût de la santé est insuffisante chez les usagers

« A la différence des représentants d'associations d'usagers auditionnés par la mission, qui ont démontré leur claire conscience des enjeux, y compris financiers, de l'indispensable réforme de l'assurance maladie, les études disponibles tendent à indiquer que les assurés sociaux ne réalisent pas leur condition d'assuré. On trouve ainsi trace de comportements de type patrimonial à l'égard des prestations en espèces : il arrive que les indemnités journalières de maladie soient perçues non seulement comme un salaire différé, mais encore comme un dû. Le comportement patrimonial n'est pas aussi net pour les prestations en nature, mais il peut se rencontrer également, sous la forme de raisonnements du type : « Je cotise, j'acquitte la CSG, j'ai droit à tel examen biologique ou tel acte clinique coûteux ». De tels excès sont certainement rares, mais ils n'en sont pas moins condamnables.

« Cela est d'autant plus vrai que, comme l'a rappelé M. Bertrand Fragonard devant la mission, citant une récente étude du CREDOC15, les Français sous-estiment le montant de leur contribution au financement du système de santé. 72 % des actifs ignorent le taux des cotisations d'assurance maladie pesant sur leur salaire. Parmi les 28 % restants, ils sont un tiers à l'estimer inférieur à 7 %. Quant au taux de la CSG, il est chiffré à moins de 4 % par 47 % de l'échantillon. Le coût d'une couverture complémentaire est mieux connu, probablement du fait de la connaissance par un certain nombre de personnes interrogées du montant de leur contrat individuel.

« En outre, selon l'étude précitée du CREDOC, la moitié des Français ignore le montant moyen par personne des dépenses de soins engagées en un mois. La moyenne des réponses s'établit à 50 euros, pour une fourchette s'étageant entre 0 et 2 000 euros, et 47 % des personnes interrogées mentionnent un montant de 15 euros. La loi du 4 mars 2002 autorise pourtant les caisses à informer les assurés sur les tarifs de remboursement et les conditions de prise en charge des biens et services médicaux.

« L'un des facteurs explicatifs de cette méconnaissance réside sans doute dans la généralisation du tiers payant. Une telle situation contribue à l'évidence à rendre difficile la maîtrise de la demande de soins ; elle invite aussi, d'ores et déjà, à mesurer l'effort de pédagogie nécessaire pour convaincre les Français de l'urgence d'une réforme d'ampleur, et à anticiper leur perception des efforts qui leur seront demandés. »

Source : extrait du rapport de la mission d'information sur la problématique de l'assurance maladie

C'est pourquoi l'article 11 du projet de loi propose d'instituer une contribution forfaitaire ou « franchise » à la charge des assurés pour chaque consultation ou chaque acte réalisé par un médecin, à l'exception néanmoins de ceux d'entre eux qui sont suivis d'une hospitalisation.

Pour autant, ce forfait ne doit pas constituer un obstacle à l'accès aux soins : fixé dans un premier temps par décret, puis par l'UNCAM, son montant serait en effet modeste, soit d'un euro. De plus, il est prévu que les mineurs ainsi que les bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire et de l'assurance maternité en soient exonérés.

Proche du « ticket modérateur d'ordre public » dans sa finalité, c'est-à-dire d'une participation restant automatiquement à la charge de l'assuré, le forfait institué par le projet de loi en diffère cependant par ses modalités, puisqu'il est proposé, à l'article 32, d'inciter les organismes complémentaires, par des mesures fiscales, à ne pas proposer dans leurs contrats la prise en charge de celui-ci. Symbole d'une solidarité partagée, cet euro doit ainsi permettre de responsabiliser chacun, en participant aux frais de soins pris en charge par l'ensemble de la collectivité.

b) L'augmentation du forfait hospitalier

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie, a confirmé lors de son audition par la commission spéciale que le gouvernement prévoit une augmentation graduelle du montant du forfait hospitalier. Le paiement de ce forfait hospitalier, qui peut être pris en charge par les organismes d'assurance complémentaire, ne s'applique pas à une série de cas qui bénéficient d'une exonération (enfants et adolescents handicapés hébergés dans des établissements d'éducation spéciale ou professionnelle, victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles, bénéficiaires de l'assurance maternité et de l'article L. 115 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre). La fixation de ce montant ressortit au pouvoir réglementaire mais l'article L. 174-1 du code de la sécurité sociale dresse la liste des exonérations. Depuis le 1er janvier 2004, ce montant est de 13 euros.

2) Des recettes nouvelles servant le redressement financier

Le projet de loi fait le choix de créer des recettes nouvelles au profit de l'assurance maladie. Ces recettes répondent à la philosophie suivante : l'effort doit être équitablement partagé entre les différents contributeurs et doit rester d'un niveau modeste afin de pas pénaliser la croissance ni creuser les déficits.

Le projet de loi prévoit ainsi par ses articles 42, 43 et 44 un effort des entreprises - en particulier celles œuvrant dans le secteur pharmaceutique - par :

- la création d'une contribution additionnelle à la contribution sociale de solidarité des sociétés ;

- le relèvement des contributions assises sur les dépenses de promotion des dispositifs médicaux et des médicaments ;

- la pérennisation et le relèvement de la contribution sur le chiffre d'affaires des entreprises pharmaceutiques instaurée à titre exceptionnel pour 2004 par la loi de financement de la sécurité sociale pour cette année ;

- un accroissement de la contribution due par les entreprises non conventionnées avec le Comité économique du médicament.

Est de même demandé un effort aux Français au travers des dispositions relatives à la contribution sociale généralisée figurant à l'article 41 du projet :

- réduction (5) de deux points de l'abattement forfaitaire représentatif de frais professionnels ;

- hausse de 0,4 point du taux de CSG applicable aux revenus de remplacement - à l'exception des IJ - des personnes imposables ;

- hausse de 0,7 point du taux applicable aux revenus du patrimoine et des produits de placement et de 2 points des produits liés aux jeux.

Enfin, il est également demandé un effort à l'Etat qui, en vertu de l'article 39 du projet de loi, transférera à la CNAMTS une partie supplémentaire des droits tabac.

Le rapport des différentes mesures tant d'économies sur les dépenses que sur les recettes devrait donc en 2007 s'établir ainsi.

Impact financier de la réforme en 2007

1. Organisation et fonctionnement du système de soins

Maîtrise médicalisée

3,50

Produits de santé

2,30

Hôpital (hors revalorisation du forfait journalier)

1,60

Amélioration de la gestion des indemnités journalières

0,80

Systématisation du recours contre tiers

0,30

Economies sur les frais financiers (reprise de la dette par la CADES)

1,10

Diminution des coûts de gestion de la CNAMTS

0,20

Total offre de soins

9,80

2. Participation de l'usager

Contribution de 1 € par acte

0,70

Revalorisation du forfait journalier hospitalier

0,30

Total participation de l'usager

1,00

3. Redressement financier

Transfert d'une partie des droits tabacs de l'Etat à la CNAMTS

1,00

Création d'une contribution additionnelle à la C3S

0,90

Relèvement de la CSG :

- élargissement de l'assiette de la CSG des actifs

- relèvement de 0,4 point du taux de CSG des retraités imposables

- relèvement de 0,7 point du taux sur les revenus du patrimoine

- augmentation de 2 points du taux de CSG sur les jeux

1,00

0,60

0,60

0,10

Total volet recettes

4,20

TOTAL DES MESURES

15,00

Source : Dossier de presse du ministère de la santé sur le projet de loi

*

La commission spéciale a tenu sept réunions d'une durée de 17 heures 30. Elle a examiné 1 360 amendements et en a adopté 113 : 65 du rapporteur, 19 du groupe UMP, 5 du groupe socialiste, 14 du groupe UDF, 9 du groupe des député-e-s communistes et républicains et 1 d'un député n'appartenant à aucun groupe.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- AUDITION DES MINISTRES

La commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à l'assurance maladie a entendu M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale, et M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie, sur le projet de loi relatif à l'assurance maladie au cours de sa séance du jeudi 17 juin 2004.

Le président Yves Bur a souligné qu'il a fallu attendre neuf ans après la démarche courageuse de M. Alain Juppé avant qu'un gouvernement ne s'attaque à nouveau à un domaine jugé particulièrement risqué. Après un long travail de concertation et le rapport très consensuel du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, le ministre relève le défi de remettre sur les rails une assurance maladie et un système de santé qui, sans intervention, vont dans le mur. Comme l'a rappelé hier la réunion de la Commission des comptes de la sécurité sociale, le taux de couverture des charges de l'assurance maladie par ses produits est tombé à 90  %. En clair, 10  % de ses dépenses ne sont pas financés, ce qui représente l'équivalent des remboursements de médicaments.

Face à une telle situation, il était temps de réagir. Il faut se réjouir de la détermination des ministres, MM. Philippe Douste-Blazy et Xavier Bertrand, à sauver notre sécurité sociale. L'objectif du projet de réforme - et de l'ensemble des mesures qui ont fait l'objet de débats avec les partenaires sociaux -  est d'engager le pays, les Français et bien évidemment les professionnels de santé dans une démarche de changement des comportements afin que chacun des acteurs fasse un usage raisonné et raisonnable du système de santé, avec le souci permanent de l'utilisation optimale des ressources. Il s'agit d'un chantier considérable.

Cette mobilisation doit associer les usagers. Elle doit concerner aussi naturellement les professionnels de santé qui portent la responsabilité première dans la réussite de la réforme. Celle-ci n'exonère pas l'hôpital de profonds changements afin de mieux utiliser les moyens considérables qui lui sont consacrés.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale, a d'abord souligné la fierté que M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie, et lui-même éprouvent de présenter devant les députés le projet de loi relatif à l'assurance maladie. Conformément au souhait du Président de la république, le gouvernement engage, un an après la réforme des retraites, la modernisation du pilier majeur du système de protection sociale que constitue l'assurance maladie. Cela montre tout l'attachement que le gouvernement et les parlementaires accordent à ce système public et solidaire. Cette réforme est attendue par les Français et peut les rassurer sur l'avenir de leur système d'assurance maladie, qui est préservé et consolidé.

Le système de santé entre dans une nouvelle étape de cette grande réforme, celle du débat au Parlement. C'est une étape majeure qui permettra de faire évoluer le projet du gouvernement. Ce débat au Parlement fait suite à une phase de concertation très intense menée avec l'ensemble des acteurs du monde de la santé, de l'assurance maladie et des partenaires sociaux. Cette concertation a permis d'aboutir à un projet qui va faire évoluer en profondeur le système de santé et d'assurance maladie et tous ceux qui ont contribué à l'amélioration du projet, dans le cadre de la démocratie sociale, doivent être remerciés. Peu de réformes ont donné lieu à autant de rencontres, d'échanges et de débats. Depuis plus de deux mois, les ministres ont été en contact permanent avec les partenaires sociaux, les représentants des professionnels de santé et des patients, les représentants des organismes d'assurance maladie de base et complémentaire. Plus d'une centaine d'entretiens ont été menés avec l'ensemble des partenaires de cette réforme.

Cela est venu après le diagnostic partagé établi par le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie et la première phase de concertation menée par M. Jean-François Mattei, dont l'action doit être saluée. Tous les acteurs de l'assurance maladie, auxquels il faut rendre hommage, se sont, eux aussi, investis dans cette concertation, et ont fait remonter leur vision de la situation, leurs propositions, leurs inquiétudes.

La contribution de l'Assemblée nationale à ce grand débat, grâce aux travaux de la mission présidée par le Président de l'Assemblée nationale, M. Jean-Louis Debré, sur la problématique de l'assurance maladie, a également été importante. Les travaux de la mission ont bien montré les enjeux de la modernisation de l'assurance maladie. L'assurance maladie est bien, en effet, ce « patient gravement affaibli » que la mission évoque et il faut faire à la fois des « soins intensifs » et de « la chirurgie réparatrice ». Comme l'avait relevé le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, la mission a souligné la nécessaire réorganisation du système de soins comme de la gouvernance de l'assurance maladie et pointé l'indispensable responsabilisation de tous les acteurs. Au-delà des divergences de fond qui subsistent et qui subsisteront sans doute entre les différentes familles politiques sur ce sujet, le travail de cette mission parlementaire a joué un rôle très important dans cette phase de concertation et de débats.

Mais après le temps de l'écoute, du dialogue et de la concertation est venu le temps de l'action.

Face à l'accumulation des déficits, il est en effet indispensable de stopper la dérive des comptes et d'entamer le retour à l'équilibre. La Commission des comptes de la sécurité sociale, qui s'est réunie hier, a rappelé l'ampleur des déséquilibres actuels. Le déficit devrait atteindre près de 12,9 milliards d'euros. Ce résultat s'explique d'abord par la faible croissance des recettes. La croissance de 1,9 % de la masse salariale en 2003 et les prévisions actualisées pour 2004, soit 2,9%, demeurent relativement faibles. La croissance montre des signes de reprise mais qui demeurent encore trop modestes pour avoir un impact sur les recettes. Tous souhaitent voir cette tendance s'accélérer, ce qui se vérifiera ou non à l'automne. Cette atonie conjoncturelle des recettes se conjugue avec un dynamisme des dépenses de l'assurance maladie qui ne se dément pas. L'ensemble des travaux récents, qu'il s'agisse du rapport du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie ou du rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale, montre bien la continuité des évolutions dans ce domaine depuis 1997 : depuis cette date, le déficit structurel de l'assurance maladie, c'est-à-dire le déficit corrigé des variations conjoncturelles, a crû continûment. Il s'agit bien, ici, d'une tendance de fond relative aux dépenses de santé.

Une croissance exceptionnelle des recettes en 2001 et 2002, liée à une conjoncture économique internationale très particulière, a masqué ce dynamisme des dépenses. Une fois cette évolution favorable des recettes passée, le ralentissement de la croissance a brusquement fait ressortir le déficit cumulé. Une telle vivacité des dépenses fait peser une menace sur l'équilibre des comptes de l'assurance maladie. Les années 2002 et 2003 ont été aussi marquées par des mesures ponctuelles qui ont contribué à entretenir ce dynamisme des dépenses d'assurance maladie, en particulier la mise en place des 35 heures : 3,4 milliards d'euros, c'est le coût des 35 heures à l'hôpital. Ce montant considérable continue de peser en 2004 sur l'évolution des dépenses hospitalières.

Il y a néanmoins des signes positifs lorsque l'on regarde attentivement l'évolution très récente de l'assurance maladie. L'année 2003 marque une première décélération de la croissance des dépenses de l'assurance maladie par rapport à 2002, où le taux de croissance atteignait 7,2 %. Ensuite, le dépassement de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM), même s'il reste important, se réduit substantiellement par rapport aux années antérieures : il ne sera que de 1,2 milliard d'euros en 2003, contre plus de 3 milliards d'euros en 2001 et presque 4 milliards d'euros en 2002. Les premiers chiffres pour 2004 confirment cette nouvelle tendance même s'il convient de rester prudent. Ces évolutions ne permettent pas de revenir à l'équilibre mais elles évitent une plus forte dégradation des comptes. Face à l'ampleur de ces déséquilibres, il est donc nécessaire d'agir et d'entamer ce « redressement par la qualité » qu'appelle de ses vœux le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie.

Organiser notre système de soins est la priorité du gouvernement : c'est le cœur du projet de loi.

Le premier élément de cohérence du système de soins est la constitution du dossier médical personnel. Chaque Français doit pouvoir disposer d'ici 2007 de ce dossier médical, qu'il partagera avec son médecin traitant et, le cas échéant, avec l'ensemble des professionnels de santé avec lesquels il est en contact. Ce dossier répond à une demande d'information médicale de la part de nos concitoyens ; il est aussi un droit donné aux patients par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Ce dossier sera obligatoire et à terme, l'accès au dossier conditionnera le remboursement des soins. L'expérience menée en 1993 par le ministre de la santé, Mme Simone Veil, où le dossier médical n'avait pas été rendu obligatoire, est à cet égard riche d'enseignements. L'ensemble des partenaires gagnera à la mise en place rapide d'un dossier médical : le médecin par un meilleur suivi de son patient grâce à l'information en temps réel sur son patient ; le patient, par une garantie de qualité de soins et un accès unifié aux informations le concernant, trop souvent éparses ; l'assurance maladie, par la limitation des soins inutiles ou dangereux .

L'organisation de l'offre de soins suppose aussi de construire de véritables « parcours de soins » au bénéfice du malade, qui ne doit plus être laissé seul face à une organisation qu'il ne comprend pas toujours et dans laquelle, parfois, il se perd. Tout le monde a en tête des exemples personnels, ou de proches, d'examens ou de consultations répétés parce que le patient est mal renseigné ou qu'il ne sait pas précisément à qui s'adresser. Il est nécessaire de remettre de la cohérence dans un système de soins qui est parmi les plus performants du monde, particulièrement dans ce que les experts appellent le « curatif individuel », mais qui s'épuise parce qu'il manque de repères et d'organisation. C'est là que la mise en place du médecin traitant prend tout son sens.

Porte d'entrée pour le malade, ce médecin, qu'il soit généraliste, la plupart du temps, ou spécialiste, sera librement choisi par le malade car la liberté est au cœur de notre système. Aucun Français ne se verra imposer son médecin car ce n'est pas notre système, ce n'est pas notre modèle. Le médecin traitant orientera le patient dans le système de santé afin de l'aider à construire son parcours de soins. Un certain nombre de spécialistes resteront évidemment en accès direct, tels que les pédiatres ou les ophtalmologistes. Il n'est pas souhaitable que la loi ou des décrets fixent un cadre rigide à ce médecin traitant car cela relève de la responsabilité des partenaires conventionnels, c'est-à-dire des caisses d'assurance maladie et des professionnels de santé.

Enfin, pour une nouvelle organisation de l'offre de soins, il faut renforcer le lien entre la médecine de ville et l'hôpital. Ces deux mondes s'ignorent trop souvent.

Il n'y a pas d'un côté une réforme de l'assurance maladie et de l'autre une réforme de l'hôpital. Il y a bien une réforme de l'organisation des soins qui vise au décloisonnement, au développement des réseaux, à l'élaboration d'une véritable stratégie d'offre de soins sur un territoire donné. Le médecin libéral et le médecin hospitalier, qu'il soit public ou privé, n'ont pas à connaître des règles différentes. Trop souvent on a montré du doigt la médecine libérale, qui serait la cause de tous les soucis. Cela n'est pas vrai. Tous doivent être logés à la même enseigne.

C'est notamment pour mettre en œuvre ces décloisonnements que le projet de loi prévoit un rapprochement entre les unions régionales des caisses d'assurance maladie (URCAM) et les agences régionales de l'hospitalisation (ARH). Ces deux institutions devront travailler ensemble sur toute une série de sujets comme la répartition de l'offre de soins, la permanence des soins, le développement des réseaux. Le rapprochement entre la ville et l'hôpital est une exigence. Il passe aussi par un même respect par les professionnels de santé des référentiels de bonne pratique, la même adhésion aux démarches d'évaluation, le même engagement en faveur de la qualité des soins. Il n'y a pas lieu de douter de l'adhésion des médecins à une démarche qui met le patient au cœur des préoccupations.

Pour accompagner cette organisation de l'offre de soins, il est apparu indispensable de mieux définir les compétences de l'ensemble des acteurs et de rénover la régulation du système et son pilotage.

C'est le sens tout d'abord de la nouvelle gouvernance de l'assurance maladie. Il ne faut pas parler de cette gouvernance uniquement en termes d'institutions et de pouvoirs. Il s'agit avant tout de mettre le système d'assurance maladie au service du malade et d'une offre de soins plus efficace et mieux organisée. La délégation de nouvelles compétences au bénéfice des caisses d'assurance maladie et le partenariat entre régimes de base et organismes complémentaires doivent permettre aux gestionnaires de l'assurance maladie de mener une politique globale du risque maladie, sur la base des objectifs de santé publique et des principes généraux, dont l'Etat reste garant. Sur le médicament et la gestion de l'hôpital, l'assurance maladie sera très étroitement associée aux décisions, au travers de sa participation, d'une part, au comité économique des produits de santé dont les compétences sont élargies et, d'autre part, au comité de l'hospitalisation qui va se mettre en place. De la même façon, le renforcement de la coopération entre les différents régimes d'assurance maladie via l'union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM) et la réforme des instances dirigeantes des caisses nationales et locales doivent donner plus de lisibilité et plus d'efficacité à ce système.

Le pilotage passe aussi par un dialogue conventionnel rénové et pacifié entre les caisses d'assurance maladie et les professionnels de santé. Il faut retrouver confiance dans les relations conventionnelles. Là encore la loi donne des outils, grâce à l'arbitrage, pour régler les éventuels différends et consolide les accords grâce au droit d'opposition donné aux syndicats majoritaires. C'est aux acteurs du système de santé et d'assurance maladie qu'il revient de faire vivre cette négociation conventionnelle dans un esprit de dialogue et d'ouverture.

La deuxième ligne de force du projet de loi, le fil rouge de la réforme, est la promotion de la qualité des soins. La nécessité d'une évaluation de l'utilité médicale fondée sur des critères réellement scientifiques est un des messages forts du rapport du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie. Le système s'épuise, d'une certaine façon, à vouloir tout financer, sans hiérarchie ni visibilité. C'est la raison pour laquelle il faut redonner une cohérence aux choix que nous sommes amenés à faire et nous donner les moyens de rembourser les médicaments et les traitements innovants qui constituent la médecine de demain. Or aujourd'hui, aucun outil ne permet d'évaluer l'utilité médicale d'un acte lorsqu'une demande d'admission au remboursement est faite, alors que la démarche existe pour le médicament. C'est évidemment une lacune très importante à laquelle il faut remédier. La Haute autorité de santé devra émettre un avis sur l'utilité médicale des produits et des actes avant l'admission au remboursement. Elle pourra également être sollicitée par différents acteurs. Elle pourra être saisie par l'assurance maladie, l'Etat, les professionnels de santé et les représentants des usagers pour réévaluer l'efficacité de certains actes médicaux et certains traitements, si cela s'avère nécessaire. La Haute autorité se verra confier une deuxième mission toute aussi centrale dans le nouveau dispositif : celle de veiller à l'élaboration et à la diffusion des référentiels de bonne pratique. Sur ce sujet, il faut passer à la vitesse supérieure et surtout diffuser des référentiels qui sont applicables dans la vie quotidienne des professionnels de santé. Rien ne sert en effet d'avoir une référence médicale de cinquante pages, inapplicable pour le médecin généraliste.

La qualité des soins passe aussi par un engagement renforcé des professionnels de santé dans des démarches de formation continue et d'évaluation. Il faut avoir confiance dans la capacité des professionnels de santé à être les acteurs de la réforme, à relever le défi de la qualité. Le projet de loi prévoit un certain nombre de dispositions qui vont dans ce sens. Cet engagement doit concerner les professionnels libéraux comme ceux qui exercent à l'hôpital, public ou privé. C'est un point central auquel le gouvernement est extrêmement attaché. Cette logique de qualité des soins entrera à l'hôpital, au travers d'accords de bons usages des soins qui pourront être signés au niveau national entre l'Etat, les fédérations hospitalières et l'assurance maladie, accords déclinés ensuite au niveau local.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie, a indiqué que le troisième axe de ce projet est le redressement financier de l'assurance maladie.

La situation financière de l'assurance maladie est très grave et il est urgent d'agir. En présentant un plan de redressement de 15 milliards d'euros, le gouvernement répond à ce défi ; 15 milliards d'euros, c'est évidemment considérable. Il y a eu un temps où les plans de réforme de la sécurité sociale étaient sur ces ordres de grandeurs, mais en francs et non en euros. C'est donc un plan ambitieux et structurant pour l'avenir. Il repose d'abord sur 10 milliards d'euros de moindres dépenses en 2007 et non d'économies comme, par un raccourci trompeur, on a trop souvent tendance à le dire. En effet, en 2007, les Français dépenseront beaucoup plus pour leur santé qu'en 2004. Les dépenses de santé continueront de croître car c'est légitime. Il n'y a pas et il n'y aura pas de rationnement des soins, de quelque nature que ce soit. Cependant, tout a été mis en œuvre pour que chaque euro investi dans le système de soins le soit à bon escient, de façon efficace.

Cela passe tout d'abord, à hauteur de 3,5 milliards, par la mise en œuvre des mesures de maîtrise médicalisée des dépenses, notamment le dossier médical personnel, le médecin traitant et la promotion du bon usage du médicament. La diffusion effective de référentiels de bonne pratique sous l'égide de la Haute autorité de santé constitue également un volet essentiel de cette maîtrise médicalisée des dépenses. Des interrogations se font entendre ici et là sur les moyens d'atteindre ces objectifs. Or la CNAMTS vient d'expliquer dans une étude datant de quelques semaines qu'en réalité les dépenses inutiles peuvent être estimées à près de 5 à 6 milliards, ce qui représente l'équivalent de près de 15 % des prescriptions de biens et de soins médicaux. Par rapport à notre objectif de 3,5 milliards, cela signifie qu'il y a des marges de manœuvres considérables dans la promotion des bonnes pratiques médicales, le renforcement de la coordination des soins autour du malade. Soigner mieux et dépenser mieux, ce n'est pas un slogan, cela peut et cela va devenir une réalité.

La politique du médicament, au travers notamment d'un développement rapide du médicament générique, constitue le deuxième volet de ce plan, à hauteur de 2,3 milliards d'euros. Ce volet est construit en lien avec l'industrie du médicament, afin de concilier les exigences d'économies avec la nécessaire valorisation de la recherche et de l'innovation. Soigner mieux en dépensant mieux doit aussi s'appliquer à la filière des produits de santé. C'est tout le sens de la politique du médicament qui va être développée dans les années qui viennent. Si le développement du générique constitue l'axe principal de ce plan, d'autres mesures y contribueront :

- une meilleure adaptation des conditionnements aux prescriptions, par exemple en permettant la délivrance de boîte de médicaments de trois mois aux malades chroniques ;

- une plus grande maîtrise du processus de rétrocession des médicaments de l'hôpital vers la ville qui est à l'origine d'une forte progression des dépenses ;

- un relèvement mesuré des taxes applicables aux industries du médicament, au travers de la reconduction de la taxe sur le chiffre d'affaires des laboratoires pharmaceutiques instaurée par la loi de financement pour 2004 et l'augmentation de la taxe sur les dépenses de promotion.

Les Français consomment en moyenne une boîte de médicament par personne et par semaine, soit 1,5 fois plus que les Allemands et les Espagnols. La promotion contribue indéniablement à cette situation, même si ce n'est pas la seule explication. Le projet de loi prévoit aussi la mise en place d'une charte de qualité de la visite médicale conclue entre les industriels et le comité économique des produits de santé. Cela devait aussi favoriser la diffusion d'une information de meilleure qualité sur le médicament.

Parce qu'il contribue à près de la moitié des dépenses d'assurance maladie, il est légitime que la modernisation de la gestion de l'hôpital participe à la réforme de l'assurance maladie. C'est principalement grâce à une rationalisation de la politique d'achat que l'hôpital contribuera à ces 10 milliards d'euros, à hauteur d'1,6 milliard d'euros. La mission d'étude et d'analyse hospitalière a souligné la très grande hétérogénéité des coûts d'achats à l'hôpital, qui pour certains produits vont de 1 à 5. Ce n'est évidemment pas satisfaisant et il y a là aussi des marges de progrès très importantes.

Le renforcement du contrôle des arrêts de travail au travers de procédures plus simples et plus efficaces, dans le respect des droits des professionnels comme des patients, devrait permettre d'économiser 800 millions d'euros dans ce domaine d'ici à 2007. Il ne s'agit en rien de culpabiliser les uns ou les autres. Il s'agit simplement de s'assurer de la réalité de la justification médicale de l'arrêt de travail et de décourager les abus.

Tout le monde sait qu'il y a des abus : de certaines entreprises, de certains médecins, de certains patients. Ils sont toujours très minoritaires mais pour préserver le système des arrêts de travail, qui est historiquement l'un des fondements de notre système d'assurance maladie, il faut veiller à ce qu'il ne soit pas détourné. Encore une fois, rien ne peut raisonnablement justifier qu'on consomme trois fois plus d'arrêts de travail dans un département par rapport à un autre et bien évidemment en proportion de la population. Cela n'a, à l'évidence, rien à voir avec un quelconque besoin de santé de la population.

L'économie des frais financiers liés au transfert de la dette à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) et la modernisation de la gestion du réseau des caisses d'assurance maladie contribueront également à ce plan, respectivement pour 1,1 milliard et 200 millions d'euros.

Pour compléter ces 10 milliards d'euros d'économies ou de moindres dépenses, le plan du gouvernement prévoit 5 milliards d'euros de recettes supplémentaires qui se déclinent en 1 milliard d'euros au titre de la participation des usagers (contribution de 1 euro et de l'augmentation du forfait journalier) et 4 milliards de recettes supplémentaires.

Parmi ces 4 milliards, il faut relever notamment la contribution d'1 milliard de l'Etat au travers d'une fraction plus importante des droits tabacs donnée à l'assurance maladie. Le Parlement a souvent souligné la complexité des liens financiers entre l'Etat et la sécurité sociale et la nécessité de clarifier les choses. Une clarification a déjà été entamée en supprimant le FOREC et en affectant une part croissance des droits tabacs à l'assurance maladie depuis 2002.

Avec la réforme de l'assurance maladie, un pas supplémentaire est fait en opérant ce transfert d'1 milliard d'euros des droits tabacs. Ce transfert de l'Etat est un geste très fort, dans un contexte financier difficile pour les finances de l'Etat : c'est aussi une réponse très concrète au débat sur les charges indues. Au surplus, une telle affectation des droits tabacs à l'assurance maladie repose sur une logique de santé publique.

Un souci de justice et d'équité a animé le gouvernement dans le choix des mesures de recettes.

C'est un effort partagé, des entreprises, des actifs, des retraités, à chaque fois dans des limites qui semblent acceptables par les uns et les autres. L'augmentation de la CSG sur les retraités ne s'applique qu'aux retraités imposables. Elle est limitée puisqu'elle se monte à 0,4 point, ce qui laisse un écart important -  0,9 point -  avec la CSG payée par les actifs. Alors qu'une politique très ambitieuse de prise en charge de la dépendance se met en place, il a semblé possible que les retraités contribuent également à l'effort de redressement de l'assurance maladie. L'augmentation de l'assiette de la CSG sur les revenus d'activités a semblé justifiée après la réforme des frais professionnels intervenue fin 2002.

Le taux de CSG sur les revenus du patrimoine et de placement sera par ailleurs relevé de 0,7 point. Compte tenu du prélèvement déjà prévu au profit de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) - 0,3 point au 1er juillet 2004) - le taux de la CSG sur les revenus financiers et du patrimoine sera porté à 8,5 %.

Enfin, la CSG sur le produit des jeux sera quant à elle relevée de 2 points et passera à 9,5 %. S'agissant des entreprises, le projet de loi prévoit une augmentation de 0,03 point de la contribution spécifique de solidarité sur les sociétés. Il était logique que les entreprises participent à l'effort de redressement des comptes de l'assurance maladie. Elles le font dans des proportions qui, là encore, sont raisonnables.

En conclusion, M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale, a souligné que la réforme qu'il entend mener est une réforme nécessaire dont l'ambition est de modifier les structures du système de soins dans le sens d'une plus grande cohérence et d'une qualité accrue des soins.

Après l'exposé des ministres, le président Yves Bur a posé les trois questions suivantes :

- La réforme proposée par le gouvernement, dans la mesure où elle est fondée sur la volonté de modifier le comportement des acteurs du système de soins, produira essentiellement ses effets à long terme. Toutefois, quelle est la montée en charge envisagée par le gouvernement et quel est l'échéancier des économies à venir sur la période 2004-2007 ?

- Est-il possible d'avoir des précisions quant au comité d'alerte créé par le projet de loi : quelle est la nature de ses missions, quelles mesures sera-t-il chargé de mettre en œuvre ?

- Si la mise en place d'une véritable gouvernance à la tête du système de soins est indispensable tant l'absence de pilotage a nui, jusqu'à présent, à l'ensemble du système, ne faudrait-il pas veiller, dans un souci de meilleure gestion, à associer le niveau territorial à cette gouvernance rénovée, par exemple en créant des agences régionales de santé (ARS) ?

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur, a posé les questions suivantes :

- Quelle articulation existe-t-il entre ce projet de loi et la réforme de la santé publique actuellement en deuxième lecture au Sénat ? Quel sera notamment le rôle de la Conférence nationale de santé publique - instance consultative créée par le projet de loi relatif à la santé publique et absente du présent projet de loi - et de ses déclinaisons régionales ?

- L'hôpital occupe une place centrale dans le système de soins français en raison de la qualité des soins qu'il assure. A ce titre, toute réforme de l'hôpital a un impact fort sur l'ensemble du système de soins. Comment s'articule le projet de loi avec le principe de la tarification à l'activité (TAA) mis en place par la loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2004 ? Comme se conjugue la réforme avec les ordonnances qui seront prises au titre de l'article 50 du projet de loi d'habilitation ?

- Au niveau local, s'agissant du pilotage de la santé, il existe un enchevêtrement complexe de structures qui va à rebours de toute efficacité. Quelles solutions sont préconisées pour améliorer la coordination au niveau local ?

- Quel est l'échéancier pour la mise en œuvre du dossier médical personnel (DMP) et quelles sont les économies attendues pour le régime d'assurance maladie par la mise en place de cette mesure ?

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale, a apporté les éléments de réponse suivants :

- Préalablement à toute réforme doit être posée la question suivante : faut-il préserver le système de santé à la française ? Une fois qu'il a été répondu à cette question par l'affirmative, l'alternative qui s'est présentée devant le gouvernement a été la suivante : soit s'engager dans une réforme de type maîtrise comptable des dépenses, soit opter pour une politique plus ambitieuse de maîtrise médicalisée du système de soins.

C'est cette dernière option qui a été choisie et dont le projet de loi relatif à l'assurance maladie est l'expression. Celui-ci repose sur un principe simple : la responsabilisation des acteurs, déclinée au niveau des patients (par la prise en charge d'1 euro à chaque consultation) et des professionnels de santé (avec la mise en place d'un dossier médical personnel).

Cette responsabilisation correspond à une rationalisation - et non à un rationnement - des dépenses. Enfin, le gouvernement entend, une fois la loi votée, être très attentif à son application. Il souhaite ainsi exercer un véritable « service après vote » qui consistera notamment à veiller à ce que la nouvelle gouvernance du système de soins soit entrée dans les faits dès le 1er janvier 2005.

- La mise en place du comité d'alerte a pour ambition de répondre à cette situation préjudiciable consistant à ce que l'ONDAM, voté chaque année par le Parlement, soit systématiquement dépassé sans que jamais n'en soit tirée aucune conséquence. Le rôle du comité d'alerte sera précisément d'intervenir dès que l'ONDAM risque d'être dépassé et de formuler des propositions propres à limiter les dépenses de santé afin que celles-ci n'excèdent pas trop largement - sauf dans le cas d'une crise sanitaire majeure - l'enveloppe décidée par le Parlement. Cette mesure est un élément central de la crédibilité de la réforme envisagée par le gouvernement. Elle tend en effet à la responsabilisation des acteurs sans toutefois agir comme un couperet.

- Il est indispensable de rapprocher la gouvernance de l'hôpital et celle de la médecine de ville, notamment dans un souci de meilleure gestion des risques sanitaires. Le projet de loi comporte des dispositions en ce sens, particulièrement au niveau décentralisé. Il est possible d'aller plus loin. Toutefois, il importe, en terme de structures administratives, de respecter une certaine cohérence. En particulier, en raison de considérations relatives à la fonction publique hospitalière et au fonctionnement des hôpitaux, la gestion de l'hôpital doit continuer à relever de l'ARH. En outre, il serait imprudent de supprimer l'échelon régional de l'assurance maladie.

- Il existe un lien évident entre la réforme de l'assurance maladie et les dispositions du projet de loi relatif à la santé publique. L'assurance maladie contribuera à la réalisation des objectifs de santé publique. Une réforme des structures n'a de sens que sous-tendue par la poursuite d'objectifs clairs de santé publique, lesquels sont précisément définis dans le projet de loi actuellement en cours d'examen au Sénat. Il est impossible que l'Etat délègue la compétence du choix des objectifs de santé publique, mais la Haute autorité de santé pourra définir le contenu de la consultation de prévention.

- Le processus de décision à l'intérieur de l'hôpital public et dans l'ensemble du système de soins doit être rendu plus transparent. Des assises régionales de l'hospitalisation vont être organisées pour expliquer la réforme. Dans un souci de meilleure efficacité, il importe de rapprocher l'assurance maladie de l'hôpital. Le comité de l'hospitalisation est la structure qui remplira cette mission.

- La tarification à l'activité doit évidemment être maintenue. Personne ne souhaite aujourd'hui revenir sur ce principe au profit d'un retour au budget global. Toutefois, il faut veiller à ce que chaque hôpital reçoive, en plus de ce financement, une enveloppe pour l'accomplissement des missions d'intérêt général. Enfin, le dossier médical personnel sera aussi utilisé à l'hôpital.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie, a ensuite précisé les modalités de la montée en puissance de l'application des dispositions de nature financière :

(en milliards d'euros)

Participation
des usagers

Nouvelles recettes

Organisation et fonctionnement du système de soins

Total

Fin 2005

0,8

4

2,5 - 3

7,3 - 7,8

Fin 2006

0,9

4,2

6 - 6,5

11,1 - 11,6

Fin 2007

1

4,2

10

15,2

Ces chiffres ne sont que des objectifs à atteindre puisqu'ils sont susceptibles d'évoluer en fonction du texte qui sera finalement voté par Parlement et du comportement des acteurs du système de santé.

Par ailleurs, le gouvernement est conscient à la fois de la nécessité d'agir rapidement et de l'obligation de résultat qui lui incombe étant donné la gravité de la situation. C'est pourquoi, il veillera à assurer un « service après vote » consistant, une fois le texte adopté, à assurer une sortie rapide des textes d'application et la mise en place de dispositifs d'évaluation.

M. Marc Bernier a souligné que la réforme de l'assurance maladie est très attendue dans la population car elle paraît indispensable pour sauvegarder le système de protection sociale. Elle sera d'autant mieux acceptée qu'elle paraîtra équitable et fondée sur des principes justes qui respectent l'égalité des citoyens devant l'offre de soins. Il semble à ce titre important de rapprocher le fonctionnement de la médecine libérale et de la médecine hospitalière.

Certaines questions doivent être précisées. Il faudra être très attentif à la question de la répartition de l'offre de soin sur tout le territoire, notamment dans les zones rurales. Ainsi qu'en sera-t-il de l'organisation de maisons médicales, qui devraient permettre de soulager les urgences hospitalières tout en améliorant la permanence des soins ? Est-il envisagé de nommer des médecins libéraux sur des postes à temps partiel à l'hôpital pour permettre une meilleure collaboration entre les deux types de médecine et tenir compte de la féminisation de la profession ? Cette réforme sera-t-elle l'occasion de lancer des expériences pilotes pour l'organisation des soins ?

M. Jean-Marie Le Guen a tout d'abord noté que s'ouvrait aujourd'hui une nouvelle période du débat sur l'assurance maladie, période marquée par la fin du spectacle et le début d'une réelle analyse de la réforme. Le débat parlementaire y contribuera. A titre d'illustration, lors de la dernière audition du ministre de la santé par la mission d'information sur la problématique de l'assurance maladie, celui-ci a souligné l'ampleur supposée des fraudes liées à l'usage de la carte vitale. Depuis, cette question a fait « pschitt » et elle ne semble plus à l'ordre du jour pour permettre à l'assurance maladie d'obtenir des économies. L'heure n'est plus à esquiver les véritables questions.

Les commentateurs prennent lentement conscience des insuffisances, notamment financières, de ce projet de loi. En réalité, il ne s'agit pas d'une réforme mais plutôt d'un énième plan de redressement qui n'est pas crédible, s'avère déjà insuffisant et comporte des lacunes. Il propose une solution miracle, qui est le report à l'infini du déficit sur les générations futures. Le plan est moins anodin qu'il est souvent dit mais plus dangereux que ce qu'évoquent les ministres : il ne propose pas une réforme du système de santé mais bien une déstructuration de l'assurance maladie.

S'agissant du bilan, il faut souligner que les gouvernements de gauche ont sauvegardé l'assurance maladie. Les gouvernements de droite ont pris des décisions qui ont fragilisé la situation financière de l'assurance maladie et ont en fait créé une régulation par le déficit.

Le groupe socialiste conteste la méthode utilisée par le gouvernement. Ce dernier a publié des prévisions apocalyptiques, puis a stigmatisé la fraude et enfin a annoncé des solutions miracles au chiffrage ahurissant. Des prises de positions de responsables sociaux ont été détournées. Après une phase de confusion d'idées, le gouvernement a précipité le calendrier après l'avoir différé pendant de longs mois.

Il est souvent difficile pour les parlementaires de recueillir des informations lors des auditions du ministre de la santé. Afin de préserver la qualité des conditions de travail de la commission, qui doit travailler dans des délais serrés, il serait donc utile de savoir rapidement si le gouvernement entend déposer des amendements pour combler les lacunes de son texte.

M. Jean-Luc Préel a souligné l'urgence de cette réforme alors que tous les secteurs de la santé sont en crise. Les travaux du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie ont permis d'identifier les causes de cette crise, parmi lesquelles l'absence de pilotage du système et de critères fiables d'évaluation. La réforme proposée comporte plusieurs avancées positives, s'agissant notamment de l'organisation de l'offre de soins ou la mise en place du dossier médical personnel, qui doit d'abord être un vecteur d'amélioration de la qualité des soins. Encore faudra-t-il préciser le rôle - décisionnaire ou seulement consultatif - de la Haute autorité de santé, qui doit être réellement scientifique, ainsi que les missions de l'Institut des données de santé.

Ce projet de loi soulève cependant plusieurs interrogations :

- Concernant les aspects financiers, la décision de prolonger la durée de vie de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) conduit à faire porter la charge de cette réforme sur les générations futures. Dès lors, il convient de s'interroger sur les autres modes de financement que la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS).

- S'agissant de la gouvernance, cette réforme a pour objectif de clarifier les responsabilités de chacun des acteurs, mais n'aurait-il pas été préférable de distinguer ce qui doit relever de la solidarité nationale de ce qui doit relever de la gestion par les partenaires sociaux, par exemple pour la prise en charge des accidents du travail et des maladies professionnelles, qui pourraient être gérés par une caisse autonome ? Dans le même sens, n'est-il pas nécessaire de renforcer la régionalisation afin de regrouper sous une autorité unique, nommée par l'Etat, l'ensemble des acteurs compétents à cet échelon en matière de prévention, de médecine ambulatoire et de médecine hospitalière ?

- Il convient par ailleurs de préciser l'articulation entre cette réforme et les différentes réformes intervenues en matière de santé : le projet de loi relatif à la politique de santé publique, l'ordonnance de simplification en matière sanitaire, le projet de loi habilitant le gouvernement à simplifier le droit, qui porte notamment sur l'organisation interne de l'hôpital, ainsi que les projets de loi relatifs aux responsabilités locales et aux affaires rurales.

- Enfin, allons-nous vers la médicalisation de l'ONDAM, alors qu'il n'indiquait jusqu'à présent qu'une progression arithmétique des dépenses de santé ? Quel sera le rôle du comité d'alerte et du conseil d'orientation, afin de parvenir à une meilleure maîtrise de la progression de l'ONDAM ? Enfin, l'ONDAM comportera-t-il un volet hospitalier et un volet médico-social ? De manière plus générale, il semble préférable de ne pas s'orienter vers une enveloppe fermée de progression des dépenses de santé et de s'interroger sur les moyens de renforcer la médicalisation de l'ONDAM, à travers notamment la détermination d'orientations pluriannuelles.

En réponse aux différents intervenants, M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale, a apporté les précisions suivantes :

- La répartition de l'offre de soins sur l'ensemble du territoire, en particulier en milieu rural, est une question importante. Il faut donc améliorer le dispositif actuel, en réformant le décret prévoyant des aides à l'installation des médecins libéraux.

- Le débat reste ouvert sur la question des postes de praticiens hospitaliers à mi-temps ou à temps partiel. Autant le système des attachés n'était pas suffisamment valorisant pour les médecins libéraux, autant celui des praticiens à temps partiel, en particulier dans les hôpitaux de proximité, peut permettre aux praticiens libéraux d'hospitaliser eux-mêmes certains de leurs patients en tant que de besoin. Ce système représente, en outre, un intérêt en termes d'aménagement du territoire. C'est la raison pour laquelle il convient d'expérimenter un tel système, en lien notamment avec le développement du dossier médical personnalisé.

- La dialectique de M. Jean-Marie Le Guen, consistant à affirmer qu'il n'y a pas de réforme et dans le même temps que le projet de loi constitue une déstructuration du système, est difficile à saisir. La réforme ne consiste pas seulement à augmenter les recettes de l'assurance maladie, mais surtout à remédier aux causes de l'augmentation des dépenses. Aujourd'hui, 10 millions de cartes Vitale sont en surnombre, ce qui met en évidence l'existence de difficultés de gestion de l'assurance maladie. Cela ne signifie cependant pas qu'il y a 10 millions de cas de fraude, ni que l'on peut ignorer l'existence des 48 millions de cartes dont le fonctionnement ne pose pas problème. La difficulté principale réside dans l'absence d'identification de la personne présentant une carte Vitale, qui peut ne pas en être la titulaire. Des travaux sont actuellement engagés par l'Inspection générale des affaires sociales afin d'évaluer plus précisément le montant de ces fraudes, qui pourraient porter sur des sommes importantes.

- Il convient par ailleurs de souligner que la réforme ne peut porter sur les seuls salariés ou les seules entreprises, mais requiert un effort équitable et partagé par tous.

- S'agissant des reports de charges, le niveau de la dette cumulée s'élève à 32 milliards d'euros. Doubler le niveau de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) risque de freiner la consommation des ménages et, partant, d'obérer la croissance, au détriment de l'emploi. Le transfert des dettes de 2004, 2005 et 2006 sur la CADES correspond à un transfert sur les générations futures, lié à un déficit exceptionnel de l'assurance maladie. Pour enrayer ces augmentations folles, il convient de porter les efforts sur l'accroissement des dépenses de santé. Mais il est à noter que c'est l'opposition actuelle qui a adopté la prolongation de la CRDS jusqu'en 2014.

- S'agissant de la proposition de création d'agences régionales de santé (ARS), le développement du dossier médical personnalisé ou encore, plus généralement, la nouvelle gouvernance, ces questions ont déjà été évoquées à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à la politique de santé publique avec M. Yves Bur et M. Jean-Michel Dubernard, également rapporteur de ce texte. S'il peut en effet apparaître souhaitable de renforcer la coordination des acteurs au niveau régional, selon des modalités qui restent à déterminer, une attention particulière doit cependant être portée aux moyens d'atténuer les disparités en termes d'offres de soins ainsi que sur le moment adapté pour mettre en œuvre cette réforme. Il convient pour y répondre d'accroître la coopération entre les ARH et les unions régionales des caisses d'assurance maladie (URCAM). En revanche, il est difficilement envisageable que la fonction publique hospitalière soit, du jour au lendemain, gérée directement par l'assurance maladie.

- Le comité d'alerte doit également prendre en compte la médecine ambulatoire et le secteur médico-social.

- Enfin, s'agissant du débat parlementaire à venir, le gouvernement n'envisage pas de proposer des modifications d'envergure du projet de loi, même si des amendements pourront être présentés en tant que de besoin.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie, a ensuite souligné le caractère à la fois indispensable et urgent de la réforme, qui a bien été compris par les Français, alors que le déficit de l'assurance maladie se creuse de 23 000 euros par minute. Après la phase de concertation et de dialogue social, au cours de laquelle les partenaires sociaux ont pu contribuer à certaines avancées, vient à présent le temps du débat parlementaire, débat ouvert et susceptible d'améliorer le projet de loi.

En tout état de cause, il est fallacieux d'affirmer que le gouvernement se livre à une présentation apocalyptique de la situation de l'assurance maladie, puisqu'il s'appuie sur le constat dressé en janvier 2004 par le Haut conseil pour la réforme de l'assurance maladie et procédant d'une démarche consensuelle. De ce constat, il ressort que, pour couvrir le déficit à l'horizon de 2020 sans recettes nouvelles, il faudrait par exemple abaisser le taux de prise en charge par les régimes de base de 76 % à 51 % de la dépense de santé, ce que nous ne voulons pas. Une deuxième possibilité consiste à doubler le niveau de la contribution sociale généralisée (CSG), soit une forme d'étatisation, mais cela conduirait à diminuer le pouvoir d'achat des Français d'ici 2020. Enfin, une troisième option pourrait être de réduire la qualité de l'offre de soins et de participer ainsi au délitement de notre système de santé. C'est pourquoi il est aussi important de mener à bien cette modernisation de l'assurance maladie.

Notre démarche ne s'inscrit pas dans une logique purement financière. Seize plans de redressement ont été mis en œuvre depuis 1977, dix par la gauche et six par la droite. Aucun n'a permis d'atteindre des objectifs satisfaisants pour l'assurance maladie. La détermination et la méthode sont aujourd'hui plus que jamais de mise, car cette réforme vise pour la première fois à faire véritablement évoluer les comportements. Le débat ne porte pas sur le constat, ni sur les principes du système de l'assurance maladie lui-même : il ne sera procédé à aucun déremboursement, pas plus qu'à des transferts du régime obligatoire vers les régimes complémentaires. Il est important de préserver le système « à la française » ; c'est bien l'objet du présent projet de loi.

- Au sujet de la branche accidents du travail et maladies professionnelles, certains sont favorables à la création d'une caisse distincte. Or, les partenaires sociaux ne souhaitent pas la création d'une telle caisse pour une branche qui, au demeurant, comporte des services communs avec ceux de la branche maladie.

- L'ONDAM doit permettre de favoriser une maîtrise médicalisée des dépenses, qui préserve la qualité des soins. Cela ne correspond donc pas à une logique comptable de court terme, mais plutôt à une logique de responsabilisation face à des objectifs de dépenses. La santé publique ne doit pas rester prisonnière d'une enveloppe, sauf à ce que soient niées les spécificités du système français. A l'automne, un projet de réforme de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale sera présenté, afin notamment qu'elles puissent présenter des perspectives pluriannuelles.

M. Gérard Bapt a estimé que si la responsabilisation des acteurs, et non la culpabilisation, est présentée comme l'un des principes sous-tendant le projet de loi, ses articles 3, 5 et surtout 10 prévoient des déremboursements, qui constituent bien des sanctions pour les assurés, en cas de « dépenses indues », dont on ignore la définition. Il faudrait en effet préciser si elles correspondent à des erreurs administratives, à une faute des usagers ou encore au non-respect d'une prestation de la part du prescripteur ; mais dans tous les cas, c'est l'usager qui serait sanctionné.

Quant à la méthode proposée, le groupe socialiste a avancé des propositions mais souhaite également travailler à partir du projet présenté. Concernant les modalités de financement de la couverture complémentaire, il semble que le ministre ait déjà indiqué qu'il s'agirait d'un crédit d'impôts, avant même que l'Assemblée nationale n'ait été saisie de cette question. L'annonce dans la presse d'une réforme de la loi organique relative aux lois de financement au mois de septembre peut également laisser penser qu'il s'agit en réalité de mettre en place une maîtrise comptable de l'assurance maladie.

Après avoir salué un projet courageux, qui repose sur un effort partagé entre tous les acteurs, M. Philippe Auberger s'est interrogé, compte tenu des projections chiffrées fournies par M. Xavier Bertrand à l'horizon 2005-2007, sur le montant du déficit prévisionnel sur cette période en l'absence de mesure de redressement.

En tout état de cause, il faut mettre un terme aux mythes entourant la CADES : les frais financiers de cette caisse ne pourront en effet que croître car, pour l'alimenter, il faudra bien emprunter à long terme, c'est-à-dire aux taux les plus élevés. A l'origine, la CADES devait être équilibrée par la CRDS. Or, si rien n'est fait, la CADES risque de sombrer dans un gouffre financier. Dans ces conditions, il peut sembler légitime de s'interroger sur la suppression de la CADES et la reprise de sa dette par l'Etat, ce qui lui permettrait de bénéficier de sa garantie pour contracter des emprunts.

Pour la première fois, et l'on peut s'en réjouir, le terme de « déficit structurel » a été employé en matière de sécurité sociale. Il serait cependant utile que le ministre apporte des précisions sur cette notion. En effet, les recettes nouvelles seront prélevées sur la consommation ce qui augmentera, de façon mécanique, l'épargne de précaution.

Enfin, une ambiguïté doit être levée concernant la nature des lois de financement de la sécurité sociale. Comme pour les lois de finances, le Parlement devrait voter des normes, c'est-à-dire des crédits qui ne doivent pas être dépassés, avec, le cas échéant, la possibilité de présenter un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificatif.

Mme Elisabeth Guigou a rappelé l'impérieuse nécessité d'engager au Parlement un débat digne de ce sujet important. En raison notamment du vieillissement démographique et des progrès médicaux, la croissance des dépenses de santé est en effet supérieure à celle du produit national brut. Dans ces conditions, la question principale porte sur les moyens de maîtriser les dépenses et d'organiser les recettes.

Quelques chiffres au préalable : entre les années 1993 et 1997, la Commission des comptes de la sécurité sociale a évalué à près de 22,5 milliards d'euros le déficit cumulé de l'assurance maladie. Pour la période 1998-2002 ce montant a été divisé par deux. Pour la période allant de 2003 à aujourd'hui, ce montant atteint désormais environ 24 milliards d'euros. Ainsi, pendant trois ans de gouvernement socialiste, le régime général a été excédentaire. Les mesures alors adoptées portaient notamment sur la maîtrise des dépenses des professionnels de santé et une politique vigoureuse du médicament, avec la promotion des génériques et la prescription en dénomination commune. Par ailleurs, afin de ne pas limiter les remboursements, comme l'a fait l'actuel gouvernement, une taxe sur la promotion pharmaceutique a été instituée et un effort a été demandé aux laboratoires afin de diminuer les prix des médicaments, y compris ceux des médicaments innovants. Concernant l'hôpital, qui doit rester le pilier de notre système de santé, la majorité précédente a augmenté ses moyens, tant il est vrai que les personnels hospitaliers sont parmi ceux qui méritent le plus de bénéficier des 35 heures. Au reste, cette gestion n'a pas été un échec puisque les hôpitaux ont pu respecter leurs enveloppes.

Deux points particuliers méritent par ailleurs d'être clarifiés : en premier lieu, pour quelles raisons le gouvernement n'a-t-il rien fait depuis deux ans pour mettre en place le système de couverture supplémentaire mis au point par la majorité précédente pour les personnes non éligibles à la CMU bien que disposant de faibles revenus ? Le gouvernement envisage-t-il, d'autre part, de rétablir la gratuité de l'aide médicale d'Etat (AME) ?

En réalité, la politique menée depuis deux ans pèse uniquement sur les recettes et laisse filer les dépenses, et ce d'autant plus que la politique économique actuelle a contribué à l'augmentation du chômage, qui a entraîné une baisse des recettes sociales. Or, 100 000 chômeurs de moins représentent près de 1,5 milliard d'euros supplémentaires pour les caisses de sécurité sociale. Si le projet de loi prétend se fonder sur un effort nécessaire partagé entre tous, il ne saurait en réalité avoir d'autres effets que de reporter vers les générations futures la charge des déficits. Il s'agit donc d'un projet inefficace et dangereux.

Le groupe socialiste a pour sa part avancé plusieurs propositions visant à garantir la solidarité du financement, et en particulier l'institution de cotisations patronales assises sur les richesses produites et non sur les salaires, et la réaffectation à l'assurance maladie des taxes sur le tabac, les alcools et les conventions d'assurances, qui représentent près de 15 milliards d'euros. Dans le domaine de la prévention, chacun sait qu'en France on rembourse trop et on ne prévient pas assez. Deux axes prioritaires doivent donc être dégagés : santé au travail et santé en milieu scolaire. Or, la politique du gouvernement actuel a conduit à baisser les moyens de la prévention scolaire. Quant à la prévention en milieu professionnel, elle doit résulter de négociations entre les partenaires sociaux afin de limiter les coûts induits par les accidents du travail. Enfin, la tarification à l'activité doit être mise en œuvre dans le respect des missions particulières du secteur public.

M. François Guillaume a rendu hommage à un projet courageux, responsable et cohérent. Pour ce qui concerne l'augmentation des ressources, la responsabilité accrue des assurés sociaux constitue une avancée positive. Cependant, le montant d'1 euro de la contribution semble trop faible et il peut sembler nécessaire de réduire l'écart du taux de prélèvement de la CSG entre les actifs et les retraités. La gouvernance de l'hôpital doit, certes, être centrée sur la responsabilisation des directeurs d'hôpitaux et des chefs de service mais cela ne rend pas moins urgente la réduction de la complexité administrative, dont le coût semble aujourd'hui excessif. S'agissant du regroupement des trois caisses d'assurance maladie au sein de l'UNCAM, la Mutualité sociale agricole (MSA) pourra-t-elle conserver les spécificités de son régime ? A cet égard, l'équilibre constant du régime particulier de l'Alsace-Lorraine constitue un exemple de décentralisation réussi.

M. Jacques Domergue a jugé qu'un des éléments structurants de la réforme réside en effet dans la responsabilisation des patients. Cependant, la contribution d'1 euro mis à la charge de ces derniers connaît des exonérations, au profit notamment des bénéficiaires de la CMU et des mineurs. Il serait cependant préférable de retenir des critères médicaux plutôt que sociaux pour déterminer le champ des personnes soumises à cette franchise.

M. Jean Le Garrec a souligné l'élégance des propos du ministre et son habileté aux « jeux de cape », mais il convient d'entrer dans le vif du débat. Le débat ne doit certes pas se résumer à une opposition entre un bilan et un projet mais les députés socialistes étant fiers de leur bilan, ils seront sévères avec le projet. En réponse aux critiques émises au sujet de ce bilan, il convient de rappeler que, durant les trois années du gouvernement de Lionel Jospin, la croissance en France a été supérieure d'un point à la croissance en Europe, alors que durant les deux dernières années, la croissance dans notre pays a été inférieure d'un point à celle des autres pays d'Europe. Quant aux 35 heures à l'hôpital, les travaux de la mission d'information sur les 35 heures sont là pour témoigner de la complexité de la mise en œuvre de cette mesure mais également de ses effets bénéfiques à terme. Enfin, si l'on doit se féliciter que le gouvernement actuel prolonge les politiques initiées sous la majorité précédente en matière de prévention ou de médicament générique, il est très regrettable qu'il ait supprimé les mesures de péréquation hospitalière alors qu'il est essentiel d'améliorer l'offre de soins sur l'ensemble du territoire.

Le projet présenté par le gouvernement se résume en fait à un plan comptable pour le citoyen usager et à un plan de maîtrise médicalisée aléatoire pour les professionnels de santé, ordonnateurs de la dépense publique. Les articles 10 et 14 du projet de loi sont à ce titre très éloquents : dans les deux cas, si le médecin ne respecte pas ses obligations, ce sera le patient qui sera pénalisé. Le texte fait preuve d'une très grande prudence par rapport aux professionnels de santé tout en demandant de gros efforts aux citoyens.

M. Edouard Landrain a rappelé que la situation française n'est pas une exception. Tous les pays d'Europe ont affronté ces dernières années des problèmes de déficit de leurs régimes de sécurité sociale mais ils ont su prendre à temps des mesures qui ne diffèrent pas vraiment des dispositions proposées aujourd'hui. On doit donc surtout déplorer le retard pris par le précédent gouvernement et les positions idéologiques de l'opposition. Pourquoi ne serait-il pas possible d'obtenir en France un consensus comme celui obtenu en Allemagne entre la CDU et le SPD, sur des mesures bien plus sévères que celles proposées par le gouvernement ? Décentralisation, responsabilisation, promotion des médicaments génériques, formation des médecins ne sont pas des solutions miracle, mais des dispositifs qui ont déjà fait leur preuve ailleurs en Europe. Il est vrai cependant que les autres pays européens n'ont pas les 35 heures, qui compliquent formidablement la tâche !

Après s'être félicité que la réforme prenne en compte des problèmes structurels laissés de côté depuis de nombreuses années, M. Richard Mallié a souhaité que le projet de loi soit source de simplification et non de complexification des structures existantes. Alors que la généralisation du tiers payant a eu un effet déresponsabilisant sur les patients, en les incitant au nomadisme médical et à la surconsommation de soins, il faut se réjouir de l'instauration d'une franchise d'un euro sur tous les actes médicaux, même si des interrogations demeurent sur le coût sa perception et de sa gestion pour les établissements hospitaliers. Quel a été finalement l'accueil réservé par les professionnels de santé au projet de réforme ?

M. Pierre-Louis Fagniez a constaté que face au sujet du projet présenté par le gouvernement, la gauche évoque surtout les recettes, et ce de façon très pessimiste, alors que la droite parle plutôt des dépenses à éviter. Le texte affirme la volonté de responsabiliser tous les acteurs du système de santé : les usagers, les caisses et les professionnels de santé. Il ne s'agit pas de fustiger quiconque mais l'on peut néanmoins reconnaître qu'il n'existe pas de dépenses qui ne passent pas par un médecin. Il faut être honnête et le reconnaître : les médecins jouent un rôle essentiel pour réguler le système. Ce qui compte avant tout, c'est que les dépenses soient utiles ; or la CNAM a récemment chiffré entre 5 et 6 milliards d'euros le montant des dépenses inutiles. Il y a donc de quoi faire !

En ce qui concerne le dossier médical personnel, le ministre le place au cœur de sa réforme. Cependant, pour que ce dossier devienne un élément important de dispositif de santé publique, il faut éviter de renouveler la mauvaise expérience du carnet de soin, qui n'était pas obligatoire et dont certains médecins n'ont jamais su quoi faire. Une utilisation rationnelle et systématique du dossier médical personnel d'ici 2007 implique que de gros efforts soient faits en matière d'informatisation et de formation de tous les médecins. Le gouvernement doit en être bien conscient.

En réponse aux différents intervenants, M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale, a apporté les précisions suivantes :

- Le gouvernement a effectivement l'intention de modifier la loi organique afin de renforcer la portée des lois de financement de la sécurité sociale en les complétant par une vision pluriannuelle et en faisant mieux concorder les champs des recettes et des dépenses. Par ailleurs, il est d'ores et déjà possible de présenter des lois de financement rectificatives mais cela n'a jamais été fait car, jusqu'à présent, l'ONDAM n'a jamais été considéré comme une norme. Cela doit désormais être le cas, y compris pour les gestionnaires des caisses.

- En ce qui concerne le déremboursement des dépenses indues, il ne s'agit pas de faire supporter à l'usager les erreurs du prescripteur mais bien de lutter contre les fraudes et les abus.

- Il reviendra au Parlement de décider de la forme que prendra l'aide de l'Etat pour l'adhésion à une mutuelle. Il pourra s'agir d'une aide directe ou d'un crédit d'impôt, la Mutualité française étant plus favorable à cette dernière solution.

- Il est indiscutable que l'augmentation de la CSG entraînera une diminution de la consommation. On doit cependant noter que, contrairement au gouvernement précédent, la majorité actuelle n'a pas fait le choix d'augmenter le taux de la CSG mais plutôt de modifier son assiette.

- Les chiffres évoqués par Mme Elisabeth Guigou au sujet de la croissance durant les dernières années sont tout à fait exacts mais l'opposition aurait bien tort de s'en prévaloir car ils ne sont que le reflet de la conjoncture économique mondiale durant cette période. Tout le monde sait que quand la croissance ralentit, le chômage augmente et les cotisations sociales diminuent, ce qui entraîne un déficit des comptes sociaux. Le rééquilibrage de ces mêmes comptes sociaux en période de croissance n'est donc pas dû à l'action spécifique d'un gouvernement mais résulte des mécanismes macro-économiques.

- En revanche, les chiffres d'augmentation des dépenses de l'assurance maladie publiés par la Commission des comptes de la sécurité sociale sont eux tout à fait significatifs des politiques menées. Le taux d'accroissement des dépenses est en effet passé de 1,5 % en 1997 à 4 % en 1998, 3,3 % en 1999, 4,7 % en 2000, 5,8 % en 2001 et 7,2 % en 2002. Nombreux sont ceux qui évoquent la fixation à 20 euros du montant de la consultation chez un médecin généraliste pour expliquer la hausse des dépenses de santé en 2002, mais c'est trop vite oublier que cette hausse avait été préparée par les conventions signées en 2001 et 2002, sous le gouvernement précédent. Ainsi, l'opposition a non seulement aucun titre à se prévaloir de la réduction des déficits sociaux constatée entre 1997 et 2002, mais elle doit au contraire reconnaître que le gouvernement socialiste a participé à l'accroissement des dépenses en favorisant l'augmentation du coût de la médecine libérale.

- Il est faux de dire que l'instauration des 35 heures a permis de donner plus de moyens aux hôpitaux. Bien au contraire, les 35 heures ont été appliquées - ce qui était normal, la loi ayant été votée - mais les postes supplémentaires correspondants n'ont pas été financés, ce qui a conduit à une dégradation des conditions de travail. Il ne s'agit pas aujourd'hui de revenir sur les 35 heures mais bien de prendre ses responsabilités. A cet égard, la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) a publié un intéressant rapport sur l'application des 35 heures à l'hôpital que Mme Elisabeth Guigou pourrait lire utilement.

- En ce qui concerne la politique du médicament, il est nécessaire de mettre l'accent sur le développement des génériques, mais il faut également continuer à favoriser l'innovation et la recherche, en remboursant au juste prix les médicaments innovants.

- La couverture maladie universelle (CMU) se caractérise par un effet de seuil intolérable : avec 566,50 euros de revenus, la prise en charge est intégrale ; avec 1 euro de plus, il n'y a plus aucune aide. C'est pourquoi le gouvernement va proposer de réformer ce dispositif, après concertation avec l'ensemble des partenaires sociaux.

- L'évolution des dépenses d'aide médicale d'Etat (AME) renvoie en fait à la politique de l'immigration. Le Président de la République a eu raison d'insister sur la nécessité de réduire drastiquement les délais de traitement des demandes d'asile. Comme les gouvernements socialistes de l'Allemagne et de la Grande-Bretagne, le gouvernement français considère également qu'il faut reconduire à la frontière les étrangers en situation irrégulière. Mais la prise en charge plus ou moins généreuse des soins ne saurait constituer un instrument de gestion des flux migratoires : une maladie grave, comme le sida ou la tuberculose, doit en tout état de cause être soignée.

- L'affirmation selon laquelle le poids de la réforme serait supporté par les plus modestes n'est pas fondée. C'est, au contraire, en l'absence de réforme, avec une croissance annuelle de 6 ou 7 % des dépenses d'assurance maladie, que l'on aboutirait à court terme à des déremboursements massifs et à l'entrée dans le système des assureurs privés, aux dépens des plus modestes, ce dont nous ne voulons pas, pas plus que l'opposition. Quant à affecter l'intégralité des taxes sur les tabacs et les alcools à l'assurance maladie, cela nécessiterait une compensation pour le budget de l'Etat et, comme souvent avec l'opposition, davantage de charges et d'impôts. Enfin, il n'est pas nécessaire de revenir sur le dispositif mis en place avec le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales (FOREC).

- Le développement de la prévention en milieu scolaire est effectivement une nécessité. Il est prévu de mettre en place des consultations systématiques en ophtalmologie et pour les soins dentaires à l'âge de six ans et à l'entrée au collège.

- La tarification à l'activité prendra en compte les missions d'intérêt général de l'hôpital, qui doivent naturellement être préservées.

- En ce qui concerne le rôle de l'UNCAM, une concertation est engagée pour trouver le meilleur équilibre possible et préserver l'identité et le réseau du régime agricole. La MSA a en effet développé, grâce à sa connaissance du milieu rural, des actions très intéressantes, notamment dans le domaine de la prévention.

- S'agissant de la contribution forfaitaire d'un euro, le projet de loi prévoit qu'elle s'applique également pour les soins dispensés aux urgences, qui ne sont pas suivis d'une hospitalisation. Or, il est vrai que la récupération matérielle de cette somme poserait des problèmes d'organisation aux hôpitaux et il existe certainement d'autres moyens d'éviter la saturation des services d'urgences. Le texte pourra donc évoluer sur ce point.

- Comme l'a souligné à juste titre M. Jean Le Garrec, il subsiste d'importantes disparités régionales, concernant en particulier le Nord-Pas-de-Calais, en matière de dépenses de santé. Ces disparités doivent toutefois être analysées en fonction de la structure de la population : âge moyen, répartition des sexes et catégories socioprofessionnelles. La tarification à l'activité permettra de corriger plus efficacement les déséquilibres que les dispositifs précédents, qui se fixaient un horizon de trente ans pour parvenir à l'équité territoriale. Par ailleurs, en ce qui concerne les dépenses indues, il est légitime que le patient ne soit pas tenu pour responsable des dérives dues aux professionnels de santé ou aux chefs d'entreprise ; le texte pourra donc être amendé sur ce point.

- S'agissant des systèmes de santé étrangers, évoqués avec précision par M. Edouard Landrain, il apparaît clairement que des principes tels que le développement des génériques, la coordination des soins ou la mise en place d'un dossier médical partagé sont présents dans de nombreuses réformes menées ou envisagées par nos voisins européens.

- Les professionnels de santé ont bien compris qu'ils seraient soumis à des dispositions contraignantes : pour la première fois de véritables sanctions sont prévues mais, comme cela avait été demandé par les syndicats de médecins lors du « plan Juppé », il s'agit de sanctions individuelles et non collectives. Les professionnels de santé sont intimement associés à l'élaboration de la présente réforme ; au-delà de tout clivage, le gouvernement travaille avec l'ensemble des organisations représentatives, et notamment avec la Fédération hospitalière de France (FHF) présidée par M. Claude Evin. et il serait souhaitable d'arriver à ce type de relation de manière générale.

M. Jean-Marie Le Guen a regretté la nature des propos tenus par le ministre et en particulier que la coopération avec la FHF soit en quelque doute instrumentalisée : bientôt il ne sera plus possible de lui serrer la main, sans que cela soit aussitôt interprété comme une adhésion à la réforme de l'assurance maladie...

M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale, a ensuite évoqué la question des « dépenses inutiles ». Le président de la Caisse nationale d'assurance maladie estime que 6 à 7 milliards d'euros d'économies peuvent être faites à ce titre. Aussi bien la majorité que l'opposition peuvent et doivent dire ensemble qu'il est légitime de ne rembourser que les dépenses utiles. Enfin, tous les médecins devront utiliser le dossier médical personnalisé. Un accès par Internet est envisagé afin de faciliter sa mise en place.

En réponse à M. Philippe Auberger, M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie, a en premier lieu évoqué la question de la détermination des « tendanciels ». La Commission des comptes de la sécurité sociale réfléchit à cette question et les dépenses tendancielles pourraient être effectivement supérieures de 1 à 1,5 milliard d'euros par an à ce qui était jusqu'à présent admis. Cependant, les prévisions du gouvernement pour l'équilibre futur de l'assurance maladie sont prudentes car elles n'intègrent pas l'incidence psychologique de la réforme - dans les pays étrangers, le choc psychologique des grandes réformes se traduit clairement par un ralentissement de la dépense - non plus que les recettes supplémentaires qui pourraient être liées à la croissance.

L'ONDAM doit effectivement être mieux cerné. D'une part, l'organisation d'un débat d'orientation permettra d'intervenir en amont sur sa fixation ; d'autre part, l'enjeu de la réforme organique envisagée réside dans l'introduction de dispositions pluriannuelles. Cependant, l'ONDAM doit rester un objectif et non pas devenir une enveloppe fermée.

S'agissant des recettes, certains ont pu dire que la création de nouvelles taxes ou l'augmentation massive de la CSG constituaient le préalable nécessaire à toute réforme. Ce serait la voie de la facilité. Il convient de ne pas briser la croissance future par des prélèvements excessifs et il est pour le moins contradictoire, de la part de l'opposition, d'appeler à plus de prélèvements tout en regrettant l'insuffisance de la croissance. Le gouvernement a retenu une option équilibrée en matière de recettes nouvelles ; en particulier, l'augmentation limitée à 0,4 point de la CSG des retraités les rapprochera du taux de droit commun sans les aligner sur celui-ci, car leurs perspectives de gains de revenus sont moindres que celles des actifs qui bénéficient de la croissance, même s'il convient de rappeler que la réforme des retraites a mis en place un dispositif de rattrapage des pensions en cas d'inflation supérieure à la prévision initiale qui profitera aux retraités dès cette année.

Les spécificités du régime alsacien-mosellan doivent être étudiées. Sa situation est-elle meilleure parce que le taux de cotisation est plus élevé ou parce que l'esprit de responsabilité y est plus développé ? Les contributions des parlementaires et des élus de cette région sur ce sujet seront naturellement les bienvenues.

En ce qui concerne le rôle futur de la MSA, l'UNCAM n'a pas vocation à fusionner les réseaux existants mais à les coordonner en préservant leur identité. Les apports de la MSA en matière de prévention, de maillage du territoire et de dialogue avec les organismes complémentaires doivent être préservés.

Enfin, pour ce qui est de la participation d'un euro pour les consultations et de sa conciliation avec le tiers-payant, il s'agit d'un problème technique qui devra être étudié. En tout état de cause, du point de vue du gouvernement, les bénéficiaires de la CMU ne doivent pas être concernés par cette disposition, compte tenu de la modestie de leurs moyens. D'ailleurs, la responsabilisation des assurés ne passe pas seulement par cette contribution forfaitaire.

En conclusion, M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de l'assurance maladie, a souligné qu'il s'agit d'une réforme structurelle et juste et indiqué que le gouvernement est prêt à examiner toutes les améliorations qui seront proposées.

M. Pierre Morange, président, a remercié les ministres d'avoir apporté des réponses détaillées aux commissaires, s'agissant d'une question qui est au cœur du pacte républicain.

II.- DISCUSSION GÉNÉRALE

La commission spéciale a examiné le présent projet de loi au cours de ses séances des 22 et 23 juin 2004.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Jean-Marie Le Guen s'est déclaré prêt à amender le texte. Le rendre acceptable semble difficile : le projet est en effet injuste, insuffisant et dangereux.

Il est d'abord injuste. Le 1er janvier 2005, l'augmentation de la CSG va frapper salariés et retraités alors que les revenus du capital comme les entreprises seront épargnés. La dette sociale est reportée sans limite sur les générations futures pour un montant de 35 milliards d'euros. La reprise de dette sera insuffisante : à l'horizon 2007, le déficit sera bien supérieur à 13 milliards d'euros. La mesure est irresponsable et traduit un comportement de fuite.

Le projet est insuffisant. Il ne permet même pas, au prix des sacrifices évoqués, de franchir un cap difficile. Exempt de réformes de structures, il ne permet pas un départ sur de nouvelles bases. Rien n'est prévu concernant l'offre de soins, la médecine de ville, la coordination entre la ville et l'hôpital et enfin l'industrie du médicament. Il aurait été souhaitable de ne pas se limiter à l'assurance maladie et de prendre en compte le système de santé dans son ensemble. On aurait pu, ainsi, agir sur les comportements et les rendre vertueux. Or les mesures de maîtrise médicalisée sont toutes tournées contre le patient. On ne touche pas à l'offre de soins.

Le texte est enfin dangereux. L'un de ses dangers majeurs consiste dans le changement d'approche de la problématique de l'assurance maladie, approche qui faisait l'objet d'un consensus depuis vingt ans. Cette rupture risque de conduire à un décrochage entre les dépenses d'assurance maladie et les dépenses de santé.

M. Claude Evin a souligné que le gouvernement dispose d'une véritable opportunité de préparer une vraie réforme de notre système de santé. Or le projet présenté ne règle même pas le problème de financement de l'assurance maladie. Ce point est reconnu par tous les économistes de la santé, quelle que soit leur sensibilité politique, ce qui est véritablement inquiétant. En réalité, le gouvernement ne s'est jamais engagé dans ce qui aurait été une véritable réforme, c'est-à-dire une réorganisation de l'offre de soins. Il s'est engagé dans une impasse en se contentant d'une démarche d'acheteur de soins, en posant le problème en termes de prix et de tarifs, sans s'interroger sur l'organisation du système. Il faut cependant reconnaître que les partenaires sociaux se sont fourvoyés de la même façon. Les résultats sont prévisibles. C'est d'abord une offre de soin inadéquate, notamment sur le plan géographique, porteuse de difficultés d'accès aux soins. C'est aussi la disparition de toute politique de soutien à la recherche et au médicament.

Le projet de loi n'apporte aucune démarche nouvelle et ne propose aucune évolution du système susceptible d'instaurer une relation plus proche entre la ville et l'hôpital. Il se limite à un patchwork de mesures qui auraient très bien pu figurer dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale ou un texte portant diverses dispositions d'ordre social. Le rapporteur lui-même a reconnu que le texte aurait pu aller plus loin dans le décloisonnement du système de santé. C'est bien faire l'aveu des insuffisances du projet, qui n'apporte aucune réponse valable à la seule question qui vaille : qui pilote le système ? Si le projet de loi ne permet pas une redéfinition de la répartition des responsabilités entre l'Etat et les caisses, il ne pourra pas être présenté comme une grande réforme du système de santé, ni même du financement de l'assurance maladie.

M. Maxime Gremetz a tout d'abord rappelé le contexte dans lequel le gouvernement présente son projet de réforme. Le déficit de l'assurance maladie s'élève à 12,9 milliards d'euros pour 2004 après des années d'équilibre ; le déficit général est de 14 milliards d'euros - avec, pour la première fois depuis plusieurs années, une situation déficitaire pour toutes les branches - et le déficit cumulé d'environ 49 milliards d'euros. Ce dernier devrait atteindre 66 milliards d'euros d'ici quinze ans. Les dépenses d'assurance maladie ont augmenté cette année de 6,6 %, soit un milliard d'euros de plus que l'objectif prévu. L'assurance maladie rembourse les trois quarts de ces dépenses, 12,3 % sont remboursées par les régimes complémentaires et 11 % restent à la charge des ménages. Les postes les plus dépensiers sont le remboursement des soins en établissements (52 % des dépenses de l'assurance maladie) et celui des médicaments (14,4 milliards d'euros). En 2003, les arrêts maladie ont représenté 5,4 milliards d'euros, soit 5,6 % des dépenses de l'assurance maladie. Face à toutes ces dépenses, quelles sont les sources de financement ? Le régime d'assurance maladie est financé à 89 % par les cotisations patronales et la CSG, à hauteur de 110,3 milliards d'euros. Plus précisément, 58,1 milliards d'euros proviennent des cotisations sociales, 33,5 milliards d'euros de la CSG, 4,2 milliards d'euros de la CSG sur les produits du patrimoine et des placements et 2,2 milliards d'euros de l'impôt (taxes alcools et tabacs principalement).

La question qui se pose aujourd'hui est de savoir comment préserver le système de sécurité sociale mis en place en 1946, sur un projet élaboré par le Conseil national de la résistance, par le général de Gaulle et le ministre communiste Ambroise Croizat. Pour le dire autrement, doit-on se rendre à la fatalité d'une privatisation de la sécurité sociale ? Le Parlement devra prendre le temps nécessaire au débat car il s'agit d'une question lourde. Le groupe communiste a de nombreuses propositions de modernisation à présenter et s'il n'est pas nécessaire d'alourdir outre mesure les débats en commission, la séance publique devra lui permettre de les exprimer.

A l'instar de ce qui avait été fait pour la réforme des retraites, le gouvernement a créé un Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie chargé d'établir un diagnostic - comme le Conseil d'orientation des retraites (COR) pour les retraites - de la situation de l'assurance maladie. Il a abouti à un diagnostic partagé. A sa suite, le président de l'Assemblée nationale, M. Jean-Louis Debré, a constitué une mission d'information sur la problématique de l'assurance maladie qui a fait de très nombreuses auditions et produit un bon rapport porteur d'un constat lucide. Il a en conséquence placé la barre très haut pour la réforme. Le projet de gouvernement est très en retrait par rapport à ces états des lieux et n'apporte aucune réponse aux besoins nouveaux nés de l'allongement de la durée de la vie, de l'apparition de nouvelles maladies ou des avancées de la recherche. Toutefois, il pose les jalons d'une nouvelle organisation de la gouvernance de l'assurance maladie qu'il est intéressant d'analyser.

Deux orientations majeures sont affichées pour la réforme : atteindre l'équilibre financier par la responsabilisation des acteurs (assurés, professionnels, pouvoirs publics) et ne réaliser ni privatisation ni étatisation - mais on sait maintenant qu'il faut se méfier du « ni-ni ».

Les objectifs d'équilibre et de responsabilisation ont comme dénominateur commun la réalisation de 15 milliards d'euros d'économies, soit 10 milliards d'euros au titre de la réorganisation de l'offre de soins dite responsabilisation et 5 milliards d'euros au titre de recettes nouvelles. Ces nouvelles recettes se composent du taux du forfait d'un euro par acte et consultation (400 millions d'euros), de la hausse de 6,2 à 6,6 % de la CSG des retraités (560 millions d'euros), de l'extension de l'assiette de la CSG des salariés (un milliard d'euros), de la hausse de la CSG de 0,7 point sur les revenus du patrimoine et sur les revenus de placement (630 millions d'euros), de la hausse de la CSG sur les produits des jeux (100 millions d'euros), du relèvement de 0,3 point de la C3S (700 millions d'euros) et du transfert de recettes fiscales (un milliard d'euros), soit un total de 4,39 milliards d'euros. Quant aux économies sur l'offre de soins, elles concernent la maîtrise médicalisée (pour 3,5 milliards d'euros), le contrôle des arrêts de travail (800 millions d'euros), la politique du médicament (2 milliards d'euros), l'augmentation de la taxe sur les dépenses de publicité des laboratoires pharmaceutiques (1,5 milliard d'euros) et le prolongement de la CADES (1 milliard d'euros), pour un total de 8,8 milliards d'euros.

Concernant le principe « ni privatisation, ni étatisation », le projet de loi met en fait en place un nouveau schéma de gouvernance de la sécurité sociale. Il prévoit la création d'une Haute autorité de santé ayant plusieurs missions comme la vérification du service médical rendu (SMR), la réflexion sur les niveaux de remboursement et le périmètre de prise en charge par l'assurance maladie, avec un regard particulier sur les ALD, l'élaboration des référentiels de bon usage de soins ou de bonne pratique et l'information des professionnels comme du grand public. La Haute autorité devrait être dirigée par un collège composé de douze membres pour un mandat de six ans renouvelable une fois. C'est l'une des grandes nouveautés dans le système. On veut faire passer la Haute autorité de santé pour une autorité morale au-dessus de tous soupçons et désintéressée dans la gestion mais les nominations ne sont pas sans incidences de ce point de vue, pas plus que les décisions qui seront prises en matière de service médical rendu (SMR), de panier remboursable, de taux de remboursement. Jusqu'à aujourd'hui, ces missions étaient remplies par différentes institutions qui ne sont pas compromises dans le déficit de l'assurance maladie. Le texte prévoit également la création d'une union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM) réunissant la CNAMTS, la CANAM et la MSA, qui participera à la réflexion sur les mêmes sujets que la Haute autorité de santé. Elle devrait suivre les avis rendus par cette dernière. Les orientations seront communiquées aux trois caisses en vue de leur application jusqu'au niveau local. Il est également créé une union nationale des organismes de protection sociale complémentaire qui émettra des avis sur les orientations de l'UNCAM, et donc sur le périmètre de soins et les niveaux de prise en charge.

Enfin, le projet prévoit un changement de fonctionnement à la CNAM puisque le conseil d'administration est relégué au second plan au profit d'un nouveau conseil composé en nombre égal - sans plus de précisions - de représentants des salariés et des employeurs ainsi que de représentants de la mutualité et des autres acteurs de l'assurance maladie. Cela concerne-t-il les assurances, les usagers, les personnalités qualifiées ? Il y a fort à parier qu'il y aura un peu de tout. Ce conseil sera dirigé par un « super directeur », nommé par le ministre, doté d'une capacité de décision et d'organisation dans de nombreux domaines. C'est bien là que l'on peut parler d'étatisation. En d'autres termes, le conseil bavardera, donnera des orientations et le directeur agira et décidera. Les salariés ne seront plus aux commandes. Le texte ne prévoit effectivement ni privatisation immédiate ni étatisation complète. Cependant les pierres sont posées une à une vers la privatisation et, dans le même temps, vers une forme d'étatisation. La nouvelle organisation fait officiellement entrer les assurances complémentaires dans le circuit de gestion. Elles seront présentes dans le conseil de la CNAM et participeront à la définition du périmètre de l'assurance maladie. Le Président de la Fédération française des sociétés d'assurances (FFSA) s'est d'ailleurs publiquement félicité du projet qui ouvre le champ de la santé aux assureurs, ce que s'est empressé de démentir - mais un peu tard -, le ministre Xavier Bertrand ! Aujourd'hui, le périmètre d'intervention des caisses complémentaires est encore limité mais il est déjà plus important qu'hier. Demain, les vagues de déremboursement vont encore accroître le rôle des complémentaires santé.

Le dispositif de crédit d'impôt prévu pour aider ceux qui ne pourraient augmenter leur budget d'assurance complémentaire santé confirme bien la logique d'étatisation et de privatisation. La mesure est cependant porteuse d'inégalités car tout le monde ne paye pas l'impôt. De plus, on évoque un montant d'environ 150 euros par an alors qu'aujourd'hui, une couverture moyenne par une assurance complémentaire coûte entre 50 et 100 euros par mois. Enfin, si le gouvernement a la volonté de favoriser l'accès aux complémentaires, c'est bien le signe que les complémentaires vont prendre plus d'importance dans le remboursement et donc par conséquent que le champ du remboursement par l'assurance maladie va se réduire ! Pour les autres, il restera la couverture maladie universelle (CMU).

L'Etat devient maître des nominations au sein de la CNAMTS. En effet, le « super directeur » est nommé par le ministre et le mode de désignation des membres du conseil (représentants des salariés, des employeurs, des mutuelles, assurances...) n'est pas précisé. Une chose est sûre : ils ne seront pas élus.

En conclusion, la réforme peut se résumer en deux points : des mesures éculées et la préparation d'un avenir plus régressif encore pour l'après 2007. On ne peut que constater un profond décalage entre ce qu'il conviendrait de faire et ce qui est fait. Les mesures proposées ne répondent pas à l'ampleur des problèmes posés tout en préparant le terrain pour qu'une prochaine réforme puisse aboutir à la privatisation, encore impossible aujourd'hui.

Les propositions du groupe communiste sont bien connues. De nombreux amendements seront déposés pour les reprendre et améliorer le texte : 1 000 amendements ont été déposés en commission et 10 000 seront présentés en séance car le débat, qui existe actuellement dans tout le pays, tant sur le financement que la gouvernance de la sécurité sociale, doit trouver un écho à l'Assemblée nationale.

M. Jean-Luc Préel a souligné le caractère nécessaire et urgent d'une réforme attendue par tous. La discussion des articles et amendements sera l'occasion de préciser l'ensemble des questions abordées par le projet. D'ores et déjà, il convient néanmoins de replacer ce texte dans le contexte de la discussion de nombreux autres : le projet de loi relatif à la politique de santé publique, le projet concernant les territoires ruraux, celui portant sur la décentralisation ou encore l'élaboration des ordonnances relatives, notamment, à la question de l'hôpital.

Il existe un accord de principe sur le fait d'accorder à tous un accès à des soins de qualité. Encore est-il nécessaire de parvenir à l'élaboration de propositions consensuelles acceptables par tous, ce qui est moins évident. De nombreux rapports, parmi lesquels celui du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, ont dressé le constat d'une crise de l'ensemble des secteurs médicaux, pour de nombreuses raisons : absence d'un pilote clairement identifié pour la gouvernance ; problème de la mise en œuvre du paritarisme ; séparation entre médecine de ville et hôpital ; développement insuffisant de la prévention ; mise en cause de la qualité de l'évaluation et de l'efficience des soins ; problèmes dans la coordination des soins ; questions de démographie médicale, pour ne citer que les principaux d'entre eux. Le déficit cumulé de l'assurance maladie - 32 milliards d'euros - représente, à lui seul, un défi majeur. Compte tenu de ce déficit, la proposition d'un transfert de ces sommes à la CADES paraît logique. Est moins logique, en revanche, le prolongement de la durée de vie de celle-ci.

Une fois que les compteurs seront « remis à zéro », il restera le problème de la gouvernance, qui recoupe la question du développement d'une maîtrise médicalisée des dépenses de santé. De ce point de vue, la création d'une caisse autonome pour la couverture du risque accidents du travail et maladies professionnelles, de même que l'instauration à la CNAM d'un directeur général doté de pouvoirs importants, est une bonne chose. Il convient de rendre les acteurs du système de santé responsables, tant en amont, au plan de la décision, qu'en aval, au plan de la gestion. La régionalisation va dans ce sens, avec l'établissement d'un interlocuteur unique pour toutes les questions, qu'elles touchent l'hôpital, le secteur ambulatoire, ou encore la formation. À cet égard, la position du ministre de la santé et de la protection sociale peut sembler trop timorée. Pourquoi en effet parler d'une deuxième étape pour l'avenir, sans procéder dès aujourd'hui à une véritable régionalisation, par la création des agences régionales de santé ?

Un certain nombre de points mentionnés par le projet sont toutefois très positifs. Il en va ainsi des mesures concernant les médecins traitants, même s'il conviendra de régler les questions en suspens relatives à l'accès au spécialiste, au remboursement ou encore à la liberté des honoraires. De même, le dossier médical personnel est une bonne chose mais il faudra veiller à ce que des économies effectives puissent être réalisées par ce biais. La création d'une Haute autorité de santé est souhaitable, mais elle devra revêtir un caractère réellement scientifique : la procédure de nomination telle qu'elle est prévue aujourd'hui, très officielle, doit encore être revue. Enfin, la création d'un Institut des données de santé doit être saluée - une proposition de loi du groupe UDF avait d'ailleurs été déposée avec ce même objectif - même si, là encore, des questions restent en suspens, relatives par exemple au codage des actes.

M. Jean-Luc Préel a indiqué que les commissaires du groupe UDF avaient déposé environ soixante-dix amendements. Il serait bienvenu que la commission puisse en accepter au moins quelques-uns.

Mme Martine Billard a souligné combien le projet présenté est décevant. Il s'agit bien d'un « énième replâtrage ». Il est dommage que cette réforme sans souffle soit de ce fait probablement condamnée à devoir être recommencée. Pourtant, des propositions ont été avancées par le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, ainsi que la mission d'information relative à la problématique de l'assurance maladie, mais celles-ci ne sont qu'insuffisamment reprises par le projet de loi.

La réflexion est morcelée entre le plan « Hôpital 2007 », le projet relatif à la politique de santé publique, le plan « santé-environnement » annoncé récemment par le ministre de la santé et de la protection sociale et enfin la présente réforme. En réalité, aucune réponse n'est apportée à la nécessité, pourtant mise en évidence, d'une réforme globale du système de santé. Ce n'est pas un processus d'éducation en matière de santé qui est mis en œuvre, mais une tentative de culpabilisation, ainsi que l'a illustré la polémique relative au nombre de fraudes liées à l'utilisation des cartes Vitale, alors que les conclusions du rapport de l'Inspection générale des affaires sociales étaient beaucoup plus nuancées.

Sans cohérence, la réforme se présente comme unijambiste. On peut certes présenter l'augmentation des dépenses de médecine de ville comme liées au nomadisme médical et proposer comme solution la mise en place du système de médecin traitant ou du dossier médical personnel. Mais ces solutions sont trop rapides et devront être revues. Par exemple, qu'en sera-t-il de la contribution forfaitaire prévue pour les actes médicaux en matière d'ALD ? De manière générale, les efforts portent sur les assurés, mais non sur le corps médical, ce qui est révélateur d'un manque de courage. L'enjeu de la réforme ne doit pourtant pas être la diminution de la prise en charge des dépenses d'assurance maladie en accroissant le montant des assurances complémentaires souscrites par les malades.

Enfin, le projet ne donne pas l'impression de ressembler à une construction achevée : c'est en particulier le cas de la Haute autorité de santé, dont l'articulation avec les institutions existantes mérite d'être davantage précisée, au besoin par décret, à défaut de quoi des difficultés de fonctionnement se feront jour. Au-delà, la notion de gouvernance pourrait n'être qu'un écran de fumée, destiné à permettre à des représentants de l'Etat de prendre les décisions de déremboursement qui, hier, incombaient directement au gouvernement.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler a insisté sur l'insuffisante prise en considération du secteur médico-social et en particulier de la situation des personnes âgées et des handicapés. Dans ce projet comme dans beaucoup d'autres, le silence se fait sur cette question. C'est pourquoi il est important que les amendements qui seront présentés permettent d'aborder ces thèmes, dans la mesure où les dépenses sanitaires concernant les personnes âgées et les personnes handicapées doivent en effet rester dans le champ de l'assurance maladie.

M. Jacques Domergue a tout d'abord salué le maintien, voire la sanctuarisation du système d'assurance maladie « à la française », auquel tiennent beaucoup nos concitoyens ainsi qu'en témoignent de nombreuses enquêtes d'opinion. Les travaux du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie ont permis de proposer des pistes de réforme, s'agissant notamment de la responsabilisation des acteurs ou la réorganisation des soins. De ce point de vue, les utilisateurs comme les producteurs de soins savent qu'il reste beaucoup à faire pour rationaliser - et non pas rationner - les dépenses : autrement dit, faire mieux au même prix ou à moindre prix, ce qui permettra, entre autres, de financer l'innovation. Il est également nécessaire de promouvoir le décloisonnement de la médecine de ville et de l'hôpital afin de permettre une meilleure optimisation des moyens et de renforcer les liens entre l'assurance maladie et les organismes d'assurance complémentaire.

Ces réformes nécessitent la mise en œuvre de contraintes nouvelles pour les professionnels, par l'établissement de référentiels au service de l'évaluation, donc de la qualité des soins. Les patients devront aussi participer à la maîtrise des dépenses de soins, car chacun sait que si la santé n'a pas de prix, elle a un coût. L'assurance maladie n'est ni étatisée, ni privatisée, mais dotée à la fois d'une composante libérale et d'une composante étatique, dans le cadre d'un paritarisme rénové. Un tel système devra disposer d'un pilote : celui qui sera désigné comme tel aura la charge de mener à bien cette réforme. Enfin, il faut souligner que le report de la dette sur les générations futures intervient à un moment de relance de la croissance et alors que le pouvoir d'achat des ménages et la compétitivité des entreprises doivent être préservés.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a formulé les observations suivantes :

- Il est dommage de constater que chacun campe sur ses positions, alors même que des pistes pour un accord sont apparues. En Allemagne, par exemple, un certain consensus a pu voir le jour sur des questions voisines, mais il est vrai qu'il s'agit aussi d'une autre culture de gouvernement.

- Dire que la réforme est injuste, inefficace et dangereuse appelle la réponse exactement inverse selon laquelle la réforme est juste, efficace et bénéfique. S'agissant par exemple du transfert de la dette sur les générations futures, la dette de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) ne s'éteindrait qu'en 2024, en l'absence de tout changement : il est donc important d'anticiper ce moment.

- Les réformes structurelles sont certes nombreuses, mais il est important de les prendre toutes en compte, car elles vont toutes dans le sens d'une amélioration de la qualité des soins et de la prévention. Ce projet de loi apporte en quelque sorte la touche finale à ce dispositif.

- Il est en revanche excessif d'affirmer qu'avec ce projet on passerait de la maîtrise des dépenses de santé à celles de l'assurance maladie. Précisément, le projet propose une réforme de l'organisation du système de soins qui aura également des conséquences indirectes sur l'assurance maladie.

- La question du cloisonnement est importante mais le projet y apporte des réponses, en particulier par le renforcement du rôle du médecin traitant ou la mise en œuvre du dossier médical personnel, qui s'inscrit dans la continuité du carnet de santé prévu par l'ordonnance de 1996 et sur lequel s'était sans doute déjà engagée une réflexion alors que M. Claude Evin était ministre de la santé. Il s'agit bien là d'éléments permettant une coordination plus importante des soins.

- Concernant le renforcement des liens entre les agences régionales de l'hospitalisation (ARH) et les unions régionales des caisses d'assurance maladie (URCAM), cet objectif transcende tous les clivages, en apportant une plus grande cohérence à l'organisation régionale du système de soins. Pour autant, la tâche n'est pas aisée. Les ARH sont dans une logique de moyens exorbitante du droit commun du fait de leur lien avec la puissance publique. Quant aux URCAM, elles se trouvent davantage dans une démarche de partenariat. En outre, ces deux entités - de tailles au demeurant relativement réduites - doivent prendre en compte les moyens humains des caisses régionales d'assurance maladie ou encore des directions départementales ou régionales des affaires sanitaires et sociales, soit des moyens étatiques. Or aujourd'hui sans les moyens de l'Etat, les ARH n'existeraient pas. Avant une réunion effective de ces deux structures, au sein par exemple d'une mission régionale de santé, on peut également envisager d'engager des expérimentations, par exemple en Alsace. Car à vouloir aller trop vite, on court le risque de marginaliser la fonction de santé publique.

- L'amélioration de la coordination des soins, qui est au cœur du projet de loi, passe également par le renforcement des réseaux ou encore les protocoles de soins.

- Concernant l'intervention de M. Maxime Gremetz, il faut lui donner acte de ce qu'Ambroise Croizat a bien été ministre en charge des questions sociales en 1945. Le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie peut effectivement, à certains égards, s'apparenter au Conseil d'orientation des retraites. Il est important de prendre en considération les progrès de la médecine et l'accroissement de la durée de vie, ou encore de la réalité des chiffres énoncés qui, du reste, figurent dans le projet. En revanche, l'analyse relative à la privatisation du système est plus que contestable car les mutuelles ont en réalité précédé l'assurance maladie et il n'est pas justifié de leur attribuer un but exclusivement lucratif. Le présent texte n'opère en rien une privatisation ou une étatisation de l'assurance maladie : si l'hospitalisation est en partie une affaire d'Etat, l'assurance maladie relève d'abord de la compétence des partenaires sociaux.

- S'agissant du manque de cohérence que pourrait impliquer la multiplication des textes en discussion, il convient de garder présent à l'esprit qu'ils correspondent tous à un problème bien déterminé, constituant les différents morceaux d'un même puzzle. Par exemple, les conférences de santé, figurant dans le texte relatif à la politique de santé publique, intéressent de très près l'ensemble des personnels de santé. En même temps, il est essentiel de distinguer les différentes questions : la santé publique n'est pas l'assurance maladie et les opérations de dépistage ou de prévention ne peuvent être associées à celles dont le but est curatif.

- Quant au médecin traitant, dont les modalités de mise en œuvre sont précisées par décret, il faut souligner l'importance de l'implication des professionnels de santé dans la réforme : sans eux, cette réforme n'a ni sens, ni avenir. Ils en sont conscients. En tout état de cause, on peut justement évoquer la notion de modernisation, car la réforme porte sur un système ancien, qui s'est amélioré par couches successives, au fil des années, mais qu'il importe aujourd'hui de réviser, comme on procéderait à la révision des cales ou du moteur d'un paquebot.

- Il faut rendre hommage à la détermination de M. Jean-Luc Préel qui a proposé à de nombreuses reprises la création d'un « INSEE de la santé », qui diffère cependant de l'Institut des données de santé prévu par le projet de loi.

- S'agissant de la prolongation de la durée de vie de la CADES, à laquelle les partenaires sociaux sont très opposés tout en ne proposant guère d'alternatives, il serait envisageable de limiter cette prolongation à 2020, ce qui correspondra au moment où le fonds de réserve pour les retraites devrait atteindre son point le plus élevé en matière de charges de financement.

- Le dossier médical personnel présente de nombreux avantages en termes de qualité accrue des soins. L'ampleur de ces avantages devrait excéder le volume des gains attendus en termes d'économies réalisées, même s'il y aura sans doute quelques « bonnes surprises » en la matière.

- Mme Paulette Guinchard-Kunstler a raison de souligner l'importance de la prise en compte du secteur médico-social, mais il faut également se rappeler que des projets de loi récents concernant l'autonomie et le handicap ont permis d'aborder ces questions.

- Enfin, la coordination entre la ville et l'hôpital doit en effet être renforcée et il s'agit là de l'un des objectifs essentiels poursuivis par ce texte.

M. Alain Vidalies a pris acte des propos du rapporteur. En effet, dans sa présentation de l'impact financier de la réforme, le ministre de la santé insiste sur les économies que permettra le dossier médical partagé, qu'il a d'abord chiffrées à 7 milliards d'euros, puis à 3,8 milliards. Or, le rapporteur vient de souligner ce qu'apportera le dossier médical partagé en matière de coordination et de qualité des soins mais a exprimé des doutes sur les économies qu'il entraînerait à court terme. Dans ces conditions, on voit bien que l'équilibre financier présenté comprend une impasse de 3,8 milliards d'euros et on peut dès lors se demander si le débat doit être poursuivi sur une réforme dont le financement est à ce point incertain.

Le rapporteur a considéré qu'il s'agit là d'une prise de position politicienne. Il convient de distinguer les effets de la réforme à court, à moyen et à long termes. A cet effet, à moyen et à long termes, la coordination des soins et la mise en œuvre du plan Hôpital 2007 conduiront tout à la fois à des économies financières et à une amélioration de la qualité du système de santé. Il faut toutefois émettre une réserve sur les possibilités d'économies à long terme, en prenant en compte l'effet de l'allongement de la durée de la vie et le coût des progrès médicaux. Certains progrès techniques induisent pourtant une réduction des dépenses au bénéfice du patient, par exemple le dispositif qui permet de casser les calculs rénaux sans intervention chirurgicale.

M. Jean-Marie Le Guen a souligné que le plan Hôpital 2007 entraîne en fait des dépenses supplémentaires. Par ailleurs, cette réponse du rapporteur ne contredit pas les propos de M. Alain Vidalies : si tout le monde convient que la mise en place du dossier médical partagé conduira à plus d'efficience à moyen terme, il reste tout à fait injustifié d'en attendre 3,8 milliards d'euros d'économies à court terme.

III.- EXAMEN DES ARTICLES

La commission spéciale a examiné les articles du présent projet de loi au cours de ses séances des 22 et 23 juin 2004.

Avant l'article 1er

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Marie Le Guen instituant un crédit d'impôt au titre de l'aide à la mutualisation au profit des personnes non couvertes par un régime complémentaire d'employeur (dont les cotisations sont déductibles de l'impôt) et dont les ressources sont comprises entre le plafond de ressources pour le bénéfice de la CMU et 1,4 fois le montant du SMIC.

M. Gérard Bapt a espéré que cet amendement recueillerait un large consensus. En effet, si la mise en place de la CMU a ouvert aux personnes les plus modestes un droit simple et concret à la couverture maladie, le dispositif souffre cependant d'un effet de seuil qui a déjà conduit le gouvernement précédent à mettre en place un système de lissage pour les personnes se trouvant moins de 10 % au-dessus du plafond de ressources. L'amendement vise à compléter ce système pour l'ensemble de ceux dont les revenus sont modestes et qui ne sont pas couverts par un contrat d'entreprise ; l'aide serait dégressive pour s'annuler pour un revenu de 1,4 fois le SMIC. Il semble qu'à la demande de la Fédération nationale de la mutualité française, le gouvernement, après avoir indiqué dans un premier temps qu'il était ouvert aussi bien à un système de crédit d'impôt qu'à un système d'aide directe, se soit rallié à la première option. Cet amendement devrait donc être adopté.

Le rapporteur s'est déclaré favorable à l'esprit de l'amendement, convenant qu'il est parfaitement injuste que 1,5 million de Français ne puissent accéder à une assurance complémentaire faute de moyens. Toutefois, il faut songer à l'état des finances publiques ; le coût de cette mesure n'a pas été chiffré par ses auteurs. En partant des estimations du rapport de M. Pierre Chadelat, lequel évaluait à 1,8 milliard d'euros le coût d'une mesure comparable si l'on fixait le plafond de ressources pour en bénéficier à 1 000 euros et à 2,4 milliards pour un plafond fixé à 1 200 euros, on peut estimer que le coût fiscal de l'amendement atteindrait 3,5 milliards d'euros. L'incidence d'une telle mesure fiscale sur le budget de l'Etat ne peut pas être négligée. En conséquence, la commission est invitée à rejeter cet amendement, sachant qu'un autre amendement de même implication mais plus précis sera soumis à son examen dans la suite du texte.

M. Richard Mallié a approuvé le principe d'une aide à l'accès à l'assurance complémentaire, mais regretté les contradictions du dispositif proposé, lequel renvoie aux lois de financement de la sécurité sociale la fixation des modalités du crédit d'impôt.

M. Jean-Marie Le Guen a souligné que le groupe socialiste fait là une proposition constructive qui répond aux projets du ministre ; un amendement ne doit pas être rejeté simplement parce qu'il est proposé par l'opposition. Par ailleurs, le comportement du gouvernement n'est pas correct : compte tenu des moyens dont il dispose, il est scandaleux que ce dernier ne dépose pas ses amendements en temps et en heure pour que la commission puisse en prendre connaissance avant le début de l'examen des articles.

M. Maxime Gremetz s'est prononcé contre l'amendement. La réforme de la sécurité sociale doit être une réforme progressiste et non régressive, c'est-à-dire qu'elle doit permettre pour tous la couverture des nouveaux risques en fonction des besoins. Ce n'est pas dans cet esprit qu'a été conçue la CMU, qui est un pis-aller, la sécurité sociale des pauvres, et dont, en plus, 2 millions de personnes ont été écartées du fait de la fixation du plafond de ressources juste en dessous des montants de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) et du minimum vieillesse. Bien au contraire, l'objectif est de faire bénéficier tout le monde du même régime de protection maladie et de mettre fin à la diminution constante de la part des dépenses de maladie qui sont prises en charge par la sécurité sociale. La France est un pays riche qui a les moyens de faire un véritable choix pour la santé, surtout si l'on considère le niveau des profits ; cela est d'autant plus vrai que la France n'est pas le pays qui dépense le plus pour la santé, comme l'établissent des statistiques d'Eurostat et contrairement aux affirmations répétées de certains.

Relevant que la CMU entraîne des effets de seuil et des paniers de soins différents pour la personne sans CMU et la personne soumise au droit commun, M. Jean-Luc Préel a rappelé la solution qu'il avait défendue lors de la mise en place de ce dispositif : l'idée d'une aide personnalisée à la santé, inversement proportionnelle aux revenus, à l'aide de laquelle chacun pourrait financer une complémentaire de son choix. Ce serait un meilleur système qu'un crédit d'impôt, qui entraînera des effets d'aubaine.

Sur ce point, M. Gérard Bapt a répondu que le crédit d'impôt qu'il envisage devra s'accompagner de négociations avec les mutuelles et les assurances complémentaires, afin d'éviter les effets d'aubaine à leur profit. Par ailleurs, le présent amendement doit être relié à un autre que défend également le groupe socialiste et qui vise à porter le plafond de ressources de la CMU au niveau de l'AAH.

Après avoir convenu qu'il s'agit d'une question très importante, le rapporteur a rappelé qu'il prépare à cet égard un amendement qui sera placé après l'article 32 ou en fin de texte ; il est en effet curieux d'inscrire une telle mesure avant l'article 1er du projet de loi. Le texte qui sera finalement adopté devra proposer une réponse à l'injustice due à l'effet de seuil de la CMU. Cette question ne peut être renvoyée à la future loi de financement de la sécurité sociale, même si le coût de la mesure implique un examen attentif.

Par ailleurs, l'hostilité exprimée par M. Maxime Gremetz à l'égard des mutuelles, dont l'existence a précédé celle de la sécurité sociale, est surprenante. Il ne s'agit pas d'aller vers un système à deux vitesses, mais il est incontestable que la CMU a représenté un progrès. Au demeurant, elle avait été anticipée, sous une forme légèrement différente, dans un projet de loi préparé par M. Xavier Emmanuelli et dont les élections de 1997 ont empêché l'examen.

M. Jean-Marie Le Guen a relevé que c'est le Président de la République qui, en dissolvant l'Assemblée nationale, a empêché l'examen de ce texte.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Marie Le Guen précisant que la santé est une priorité nationale et que le droit à la santé est garanti à chacun, M. Jean-Marie Le Guen ayant souligné que la réforme doit envisager l'ensemble du système de santé et pas seulement l'assurance maladie.

Le rapporteur ayant estimé cet amendement satisfait par le texte, la commission l'a rejeté.

La commission a examiné deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz affirmant que la Nation assure à chacun les conditions nécessaires à son développement et garantit à tous la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs, ainsi que des moyens convenables d'existence à ceux qui sont dans l'incapacité de travailler.

Le rapporteur n'ayant pas jugé opportun d'insérer dans le projet de loi des dispositions du préambule de la Constitution de 1946, la commission a rejeté l'amendement.

Sur l'avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté un amendement de M. Jean-Marie Le Guen précisant que le système de santé en France contribue à la réalisation du droit fondamental à la protection de la santé au niveau européen et international.

Article 1er

(article L.  111-2-1 du code de la sécurité sociale)


Principes fondateurs de l'assurance maladie

Cet article vise à rappeler de manière solennelle l'attachement de la Nation aux principes fondateurs de l'assurance maladie.

Il s'agit de donner solennité aux fondements de l'assurance maladie, à l'exemple des trois premiers articles de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites, qui rappellent les principes ayant guidé la réforme.

La rédaction du présent article reprend les termes de l'exposé des motifs du projet de loi. La portée normative de ces dispositions législatives est relative ; il semble peu probable qu'un juge apprécie comme fondé un recours contre un règlement ou arrêté s'appuyant sur ces déclarations de principes.

Néanmoins, l'article s'appuie sur le large consensus qui s'est dégagé, d'abord au sein du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie puis lors des travaux de la mission d'information de l'Assemblée nationale sur la problématique de l'assurance maladie. Les rapports de ces deux instances ont montré l'attachement de tous les acteurs concernés, (assurés, patients, professionnels de santé, gestionnaires des caisses et des régimes complémentaires, organisations de salariés et d'employeurs ...) à une série de règles de base, qu'il convient donc de rappeler.

L'article propose de moderniser et de compléter les principes ayant fondé la création de la sécurité sociale en 1945, sur la base du programme du Conseil national de la résistance. Ces principes étaient surtout axés sur l'accès aux soins et sur les revenus de remplacement. Depuis, d'autres préoccupations ont émergé, comme l'attention portée à la qualité des soins, à l'efficience du système de l'assurance maladie et à la promotion de la santé.

De ce point de vue, le présent article apporte une véritable novation en faisant un rappel solennel, dans le code de la sécurité sociale, des impératifs de qualité des soins, d'efficience et de prévention. En particulier, ces notions, souvent évoquées dans le code de la santé publique (par exemple à l'article L. 1110-1), ne sont pas mentionnées dans la rédaction de l'article L. 111-1 du code de la sécurité sociale, placé tout au début de ce code, et qui dispose que : « L'organisation de la sécurité sociale est fondée sur le principe de solidarité nationale. Elle garantit les travailleurs et leur famille contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain. Elle couvre également les charges de maternité, de paternité et les charges de famille. »

Afin de souligner le caractère solennel du rappel de ces déclarations, le texte propose de compléter la section I du chapitre Ier (Organisation de la sécurité sociale) du titre Ier (Généralités) du livre Ier (Généralités - Dispositions communes à tout ou partie des régimes de base) du code de la sécurité sociale par un article L. 111-2-1 nouveau. Ainsi, les principes fondateurs de l'assurance maladie sont énoncés dans le troisième article du code de la sécurité sociale, après le rappel des règles régissant l'organisation de la sécurité sociale (article L. 111-1) et son champ d'application (article L.  111-2).

Le nouvel article L. 111-2-1 du code de la sécurité sociale se compose de deux alinéas. Le premier vise à souligner l'aspect solidaire de l'organisation de l'assurance maladie. Le second rappelle les principes de l'accès de tous à des soins de qualité, dans le cadre d'un système efficient.

L'assurance maladie est un système obligatoire et universel, assurant la solidarité entre les assurés

Les trois phrases du premier alinéa constituent le rappel du socle philosophique du système d'assurance maladie français.

Dans cette perspective, il est d'abord proposé que l'article L. 111-2-1 nouveau souligne que la Nation est attachée à une « assurance maladie obligatoire et universelle ».

S'agissant de l'universalité du régime de l'assurance maladie, on peut rappeler le progrès qu'a constitué l'introduction de la couverture maladie universelle conformément à la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999, qui a étendu la couverture de base à l'ensemble de la population. Comme l'a souligné M. Bertrand Fragonard, président du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, lors de son audition par la mission d'information parlementaire, l'obligation de l'affiliation aux régimes de l'assurance maladie, en ce qui concerne les régimes de base, garantit l'universalité du système et son caractère redistributif. Elle empêche notamment la fuite des « bons risques » hors du système.

Selon la rédaction proposée, l'assurance maladie assure une « protection » indépendante de l'âge ou de l'état de santé de la personne. Le terme de « protection » est un rappel du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, qui dispose : « La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement. Elle garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé (...) ». Cette protection indépendante de l'âge et de la santé est une spécificité du système français et l'éloigne des systèmes à logique assurantielle, susceptible de sélectionner les « bons risques » et rejeter les « mauvais risques ». A ce stade, il est opportun de rappeler que 5 % des malades concentrent environ 60 % des dépenses remboursées6.

Il est ensuite proposé que le premier alinéa de l'article L. 111-2-1 du code de la sécurité sociale rappelle que la Nation « affirme le caractère solidaire de son financement » et que chacun «  contribue à ce financement selon [ses] ressources ».

Si la première phrase du premier alinéa illustre le principe « à chacun selon ses besoins », les deux dernières phrases réaffirment que chacun contribue selon ses ressources, ce qui est un des piliers du système français de l'assurance maladie. Son application conduit notamment à ce qu'une personne ne soit pas appelée à contribuer plus à l'assurance maladie en raison d'un état de santé dégradé, en raison du nombre élevé de ses ayants droit (enfants notamment) ou de son comportement, qui peut pourtant l'amener à dégrader son état de santé (il n'existe pas de contribution majorée pour les fumeurs, par exemple). La contribution est dépendante des ressources : ainsi, la cotisation sociale généralisée (CSG) est proportionnelle à la quasi-totalité des revenus perçus par la personne.

L'assurance maladie, comme l'a souligné le rapport de la mission d'information, est devenue un élément central de redistribution dans la société française. Cet effet s'exerce à de multiples niveaux : entre les bien portants et les malades, entre les personnes disposant de revenus élevés et les autres, entre les personnes sans enfants et les personnes avec enfants...

Les régimes de l'assurance maladie assurent l'accès de tous à des soins de qualité

Le deuxième alinéa de l'article s'inscrit plus dans le registre du qualitatif et de l'efficience, en insistant sur les thèmes de l'accès aux soins, de la qualité des soins, de la santé publique et de l'efficience. Le degré d'engagement des régimes de l'assurance maladie varie fortement suivant le domaine concerné.

- La première préoccupation évoquée est celle de l'accès aux soins.

Il est proposé que la première phrase de cet alinéa indique que « Les régimes d'assurance maladie favorisent un accès effectif de tous les assurés sociaux aux soins, notamment par une bonne répartition de l'offre de soins sur le territoire national ». S'il est impossible de garantir l'accès à la santé, l'équité exige au moins que l'accès aux soins soit assuré, ou, du moins « favorisé » par les régimes de l'assurance maladie, comme le propose la rédaction de cette phrase. Compte tenu de la technicité croissante des soins, de leur coût élevé et de leur répartition inégale sur le territoire, l'accès aux soins devient de plus en plus une condition de la protection effective de la santé.

Cette première phrase indique que les régimes de l'assurance maladie favorisent « la bonne répartition de l'offre de soins sur le territoire ». A ce sujet, il est bon de rappeler que les caisses d'assurance maladie ne disposent guère d'outils pour modifier cette répartition de l'offre, qu'il s'agisse du nombre de professionnels de santé, des modalités de l'installation des libéraux en ville ou de l'offre hospitalière7. Beaucoup de ces outils sont entre les mains de l'Etat, qui, à titre d'exemple, fixe le numerus clausus, définit le nombre de postes ouverts par discipline et spécialité à l'issue des résultats de l'examen national classant (ENC) ou décide de fermer un établissement hospitalier via l'agence régionale de l'hospitalisation (ARH). Quelques dispositions du présent projet de loi visent à remédier à cette carence en mettant en place une « délégation élargie ». Ainsi, l'article 26 (cf. infra) crée un « comité de l'hospitalisation » ayant vocation à intégrer davantage les représentants des régimes de l'assurance maladie dans le pilotage de la politique hospitalière française.

- La rédaction proposée insiste ensuite sur le nécessaire renforcement de la qualité des soins.

La deuxième phrase du deuxième alinéa introduit une nouveauté par rapport aux principes de 1945 : elle aborde la question de la qualité des soins. Selon la rédaction proposée, les régimes de l'assurance maladie « font bénéficier tous les assurés sociaux des progrès de la médecine. » En outre, ils contribuent à assurer la « coordination et à la qualité des soins dispensés ». S'agissant de la qualité des foins, force est de constater que c'est l'Etat qui, aujourd'hui, exerce le plus de responsabilités en matière de garantie de qualité des biens et services médicaux, grâce notamment à la réglementation, au réseau d'agences sanitaires et aux corps d'inspection. En particulier, la sécurité sanitaire reste une compétence quasi étatique. Les régimes de l'assurance maladie ne sont pas totalement absents de ce domaine, notamment grâce au contrôle médical, mais leur action reste marginale.

- La rédaction de l'article L. 111-2-1 du code de la sécurité sociale permet de prendre en compte la politique de santé publique.

Le projet propose également que les régimes de l'assurance maladie « concourent à la réalisation des objectifs de la politique de santé publique ». Les crédits de l'assurance maladie peuvent contribuer à la réalisation d'une politique de santé publique. C'est d'ailleurs déjà le cas conformément à l'article L. 321-1 (6°) du code de la sécurité sociale, issu de l'article 81 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la modernisation du système de santé, qui précise que les actions de dépistage sont prises en charge par l'assurance maladie. Le projet de loi relatif à la politique de santé publique, actuellement en discussion au Parlement, prévoit que l'Etat définit les objectifs de santé publique. Le projet aménage des lieux de concertation où les représentants des régimes de l'assurance maladie peuvent contribuer à l'élaboration de ces objectifs.

- Les régimes de l'assurance maladie doivent améliorer l'efficience de leur action.

La dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 111-2-1 du code de la sécurité sociale correspond à l'une des idées maîtresses du présent projet, idée que le ministre de la santé et de la protection sociale, M. Philippe Douste-Blazy, a résumée dans l'expression suivante : « Mieux dépenser, mieux soigner ».

Selon la rédaction proposée, les régimes de l'assurance maladie « veillent à un usage efficient des ressources » qui leur sont consacrées par la nation. Si l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a considéré, voilà déjà quatre ans, le système de santé français comme le meilleur du monde8, il n'est pas sûr qu'il soit le plus efficient. L'ampleur des besoins actuels de financement et la conscience diffuse qu'a chacun des acteurs de nombreux gaspillages motivent de nombreuses dispositions du projet de loi.

A ce stade, le rapporteur souhaite souligner que la création en 2002, à son initiative, de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé (OPEPS) a anticipé ce besoin d'évaluation et de recherche de l'efficience, en s'attachant à faire établir de véritables analyses médico-économiques des politiques de santé. Deux premières études ont été réalisées, l'une consacrée au dépistage du cancer du sein, l'autre à la prévention des handicaps chez l'enfant.

*

La commission a examiné deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz précisant que la Nation fait le choix social et politique d'assurer à la population le plus haut niveau de santé et de s'en donner les moyens financiers.

M. Maxime Gremetz a fait observer que si le principe de la solidarité nationale en matière d'accès aux soins est bien garanti par la Constitution, il n'en va pas de même des moyens financiers assurant la mise en œuvre de ce principe.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté les amendements.

Elle a rejeté pour la même raison deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz précisant que la Nation assure à tous les citoyens, au moyen de la sécurité sociale, des moyens d'existence dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail.

La commission a examiné deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz précisant que l'assurance maladie concourt à la réalisation des objectifs de santé publique et à la réduction des inégalités, notamment par la promotion de la santé et par le développement du libre et égal accès aux soins et au diagnostic sur l'ensemble du territoire.

M. Maxime Gremetz a souligné qu'il s'agit d'affirmer l'attachement à la préservation du système de sécurité sociale universel, solidaire et égalitaire.

Le rapporteur s'étant déclaré défavorable, la commission a rejeté l'amendement.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz garantissant un haut niveau de santé de la population et une sécurité sociale indépendante des situations d'âge, de santé et de ressources.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz précisant qu'une protection de haut niveau doit être garantie en matière de santé.

Elle a rejeté un amendement de Mme Martine Billard précisant que la Nation garantit une protection de la santé indépendante des situations de revenus, le rapporteur ayant observé que le premier alinéa de l'article prévoit que les assurés sociaux contribuent au financement de l'assurance maladie selon leurs ressources et que ce financement est solidaire.

La commission a rejeté deux amendements, l'un de Mme Martine Billard précisant que l'assurance maladie garantit une protection indépendante des situations d'âge, de santé mais aussi de nationalité, l'autre de Mme Claude Greff précisant que la couverture maladie est indépendante des ressources des personnes.

M. Maxime Gremetz a indiqué que la précision concernant la nationalité est devenue nécessaire en raison de la décision honteuse du gouvernement de remettre en cause l'aide médicale de l'Etat (AME) pour les étrangers en situation irrégulière.

Le rapporteur s'étant déclaré défavorable à l'amendement de Mme Martine Billard au motif que la protection de la santé n'est pas liée à la nationalité de la personne, la commission a rejeté le premier amendement.

Madame Claude Greff a retiré son amendement.

La commission a ensuite examiné neuf amendements ayant pour objet de déterminer quelle autorité garantit l'accès aux soins :

- deux de MM. Claude Evin et Jean-Luc Préel confiant cette mission à l'Etat ;

- deux de Mme Jacqueline Fraysse et M. Maxime Gremetz prévoyant que l'assurance maladie garantit un libre et égal accès aux soins, quel que soit leur lieu de résidence ;

- deux de Mme Jacqueline Fraysse et M. Maxime Gremetz prévoyant que l'assurance maladie garantit un égal accès effectif aux soins, sans discrimination ;

- deux de Mme Jacqueline Fraysse et M. Maxime Gremetz garantissant un accès effectif aux soins de tous les assurés sociaux, par une prise en charge à 100 % ;

- un de M. Philippe Vitel confiant la mission de garantie d'accès aux soins à l'Etat.

M. Claude Evin a estimé que ces amendements posent un problème de fond qui est celui de la responsabilité respective de l'Etat et de l'assurance maladie. En introduisant la responsabilité de l'assurance maladie, le projet de loi consacre une démission de l'Etat face à ses pouvoirs régaliens. La sécurité sociale doit concourir à la bonne répartition de l'offre de soins et à l'égalité des droits à la santé mais il ne relève pas de sa responsabilité de la garantir.

M. Jean-Luc Préel a ajouté que l'égal accès à la santé doit relever de la responsabilité de l'Etat qui garantit cet accès aux soins en y associant tous les acteurs concernés, y compris les collectivités territoriales.

M. Maxime Gremetz a approuvé les propos tenus par MM. Evin et Préel, estimant que ces amendements relèvent du même esprit que ceux qu'il a défendus précédemment.

M. François Guillaume s'est déclaré opposé à cette argumentation car les régimes d'assurance maladie exercent la responsabilité déléguée d'une politique arrêtée par l'Etat. Pour cette raison, le texte du projet de loi est préférable.

M. Philippe Vitel a fait observer que le rapporteur évoque dans son rapport des « outils entre les mains de l'Etat » pour garantir l'égal accès aux soins : c'est donc bien que cette responsabilité ne relève pas de l'assurance maladie. Il faut dissocier ce qui relève de l'accès aux soins, garanti par l'Etat, des mesures incitatives en matière de répartition de l'offre de soins, du ressort de l'assurance maladie.

M. Pierre-Louis Fagniez a également considéré que la garantie et l'organisation de l'offre de soins ne peuvent pas relever de l'assurance maladie.

Le rapporteur a fait observer que la rédaction du projet de loi selon laquelle les régimes d'assurance maladie favorisent un accès effectif de tous les assurés sociaux aux soins ne mérite pas ces critiques et n'exclut pas la responsabilité première de l'Etat.

La commission a adopté l'amendement de M. Claude Evin. En conséquence, les huit autres amendements sont devenus sans objet, ainsi que les quatorze amendements suivants, soit six amendements de Mme Jacqueline Fraysse, six amendements de M. Maxime Gremetz, un amendement de M. Jean-Luc Préel et un amendement rédactionnel du rapporteur.

La commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

Après l'article 1er

La commission a rejeté neuf amendements de M. Jean-Marie Le Guen :

- le premier créant une Agence nationale de la santé au travail ;

- le deuxième instituant un Observatoire de la iatrogénie et des infections nosocomiales ;

- le troisième prévoyant la mise en place de conférences nationales sur la politique de gestion des risques liés à des pathologies lourdes ;

- le quatrième prévoyant la mise en place d'une négociation sur les conditions d'application de la tarification à l'activité de l'hôpital ;

- le cinquième prévoyant la mise en place d'Etats généraux de la lutte contre l'alcoolisme ;

- le sixième imposant au gouvernement de transmettre au Parlement un rapport sur les conditions de création de services de promotion de la santé ;

- le septième demandant au gouvernement de transmettre au Parlement un rapport sur les conditions de création d'un Institut national de recherche sur le vieillissement ;

- le huitième modifiant les conditions d'application de la tarification à l'activité pour l'hôpital ;

- le neuvième introduisant dans le projet de loi des dispositions relatives à la médecine scolaire.

La commission a rejeté un amendement de Mme Martine Billard insérant un titre consacré à la politique de prévention des risques sanitaires.

La commission a examiné deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz précisant que la sécurité sociale garantit à tous les travailleurs et à tous les inactifs la prise en charge intégrale des charges de maladie.

Après que M. Maxime Gremetz a indiqué qu'il s'agit de revenir à l'esprit des propositions du Conseil national de la résistance, la commission a rejeté les amendements sur l'avis défavorable du rapporteur.

Elle a examiné deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz prévoyant la création d'une commission chargée d'analyser les causes de la sous-déclaration des accidents du travail.

M. Maxime Gremetz a précisé qu'il faut mettre un terme aux tricheries massives existant en matière de non déclaration d'accidents du travail et de maladies professionnelles.

Le rapporteur s'est déclaré défavorable aux amendements au motif que le dispositif de reversement forfaitaire existant permet d'éviter les abus.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a examiné deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz précisant que toute personne doit pouvoir bénéficier d'une visite médicale annuelle gratuite.

Le président Yves Bur ayant fait valoir que cet amendement aggravant les charges publiques sera inévitablement déclaré irrecevable conformément à l'article 40 de la Constitution, M. Maxime Gremetz a protesté au motif que l'amendement conduit à aggraver les charges de l'assurance maladie et non celles de l'Etat.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz ouvrant le capital décès aux veuves de victimes de l'amiante ayant bénéficié de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA).

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz abrogeant les dispositions du code de la sécurité sociale limitant au tarif de responsabilité des caisses d'assurance maladie la prise en charge des prestations en nature suite à un accident du travail ou à une maladie professionnelle.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz supprimant l'article L. 432-3 du code de la sécurité sociale relatif au dépassement de tarif pour la prise en charge des traitements liés à un accident du travail ou à une maladie professionnelle.

La commission a examiné deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz abrogeant l'article L. 432-5 du code de la sécurité sociale relatif au tarif de responsabilité pour la prise en charge de l'appareillage.

M. Maxime Gremetz a fait remarquer qu'on ne pouvait opposer à cet amendement l'irrecevabilité financière de l'article 40 car cet amendement traite des dépenses de l'assurance maladie qui sont financées par des cotisations et non par des impôts.

M. Alain Vidalies est intervenu pour souligner que ces amendements posent le problème de la sous-déclaration des accidents du travail qu'a dénoncé en son temps le rapport de M. Masse. La réparation intégrale des accidents du travail est loin d'être assurée, de nombreux frais restant à la charge des accidentés. Le traitement sévère des amendements relatifs aux accidents du travail et aux maladies professionnelles découle certainement du mode de financement spécifique à cette branche.

M. Jean-Marie Le Guen a jugé paradoxal que le projet de loi se focalise sur les fraudes aux indemnités journalières alors que les masses financières en jeu sont trois fois moins importantes que celles représentées par la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles.

La commission a rejeté les deux amendements.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz prévoyant que la rente versée suite à un accident du travail est égale à 70 % du salaire annuel de la personne accidentée.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz supprimant la référence à un seuil de gravité pour permettre la reconnaissance d'une pathologie d'origine professionnelle.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz simplifiant la mise en œuvre des plans régionaux de santé publique afin de permettre un décloisonnement des décisions entre financeurs et gestionnaires.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz rendant obligatoire une visite médicale annuelle jusqu'à la fin de la scolarité obligatoire.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz créant un dispositif permettant d'évaluer le degré d'exposition aux risques que comporte chaque poste de travail.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz accordant le bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité pour les travailleurs de l'amiante, lié à l'inscription de l'entreprise sur une liste, aux salariés des entreprises sous-traitantes et aux intérimaires de cette entreprise ayant été exposés au risque d'amiante.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz étendant le bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante aux salariés travaillant dans des établissements jusque-là exclus de ce dispositif en raison des délais de mise à jour de cette liste, en donnant à celle-ci un caractère indicatif.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz transposant le régime de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante aux agents de la fonction publique nationale, territoriale et hospitalière.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse garantissant que le montant de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante est au moins égal à 85 % du salaire de référence.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz imposant aux fabricants de produits alimentaires d'indiquer, par étiquetage, la composition en graisses saturées et en sodium des marchandises vendues, le rapporteur ayant fait observer que ces dispositions étaient discutées dans le cadre du projet de loi relatif à la politique de santé publique.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz créant une prestation de perte d'autonomie relevant de l'assurance maladie.

La commission a examiné deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz donnant aux conseils d'administration des hôpitaux un véritable pouvoir décisionnaire. Après que le rapporteur a rappelé l'intérêt des ARH, M. Maxime Gremetz a estimé que le problème était que les agences régionales de l'hospitalisation ne rendent compte à personne.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz accordant des pouvoirs accrus au conseil d'administration des hôpitaux.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz prévoyant une modification du régime de tutelle sur les délibérations des conseils d'administration des hôpitaux afin de réduire le pouvoir des directeurs des ARH.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz prévoyant la transmission par le gouvernement au Parlement d'un rapport sur l'opportunité de créer, à l'échelon national, un service public de maintien à domicile des personnes âgées.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz créant une commission de suivi et de vigilance des risques industriels au plan local réunissant des élus locaux, des salariés, des représentants des entreprises et des administrations chargées du contrôle des installations classées, le rapporteur ayant rappelé qu'il existe déjà une réglementation en la matière et des services chargés de la faire respecter.

La commission a rejeté deux amendements identiques de Mme Jacqueline Fraysse et de M. Maxime Gremetz instituant un plan pluriannuel de soutien à la recherche en matière de santé et de prévention.

M. Jean-Marie Le Guen a présenté un amendement relatif à la coordination des soins, instituant des réseaux de santé permettant un accès à des soins de qualité et précisant que les réseaux de santé font l'objet de dispositions spécifiques dans l'accord-cadre interprofessionnel.

Le rapporteur a invité M. Le Guen à retirer son amendement afin qu'il précise sa rédaction. Il est nécessaire de rationaliser l'organisation du système de santé grâce aux réseaux et aux filières.

M. Jean-Marie Le Guen a retiré son amendement pour en présenter une nouvelle version lors de la réunion de la commission tenue en application de l'article 88.

La commission a rejeté un amendement de M. Jean-Marie Le Guen prévoyant la réunion d'une conférence nationale sur la profession médicale chargée de mettre en place un plan global de formation et de revalorisation des emplois, le rapporteur ayant observé que les sujets évoqués par l'amendement sont déjà traités dans différents projets de loi.

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1 () Déclaration de politique générale de M. Jean-Pierre Raffarin, premier ministre, devant l'Assemblée nationale

2 () Rapport d'information n°1672 déposé le 15 juin 2004 « Réforme de l'assurance maladie : les remèdes européens »

3 Rapport d'étape d'évaluation des risques de fraude à l'assurance maladie de la mission de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), 23 avril 2004.

4 Rapport d'information de M. René Couanau sur l'organisation interne de l'hôpital, n° 714, déposé le 19 mars 2003, p. 59

5 () Qui touche également la CRDS.

6 Donnée issue du rapport de la mission d'information sur la problématique de l'assurance maladie.

7 L'assurance maladie a certes disposé du MICA pour influer sur la démographie médicale et siège au conseil d'administration de l'ARH.

8 « La santé dans le monde - 2000 », rapport de l'OMS.


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