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le 18 février 2005

N° 2097

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 15 février 2005

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES, DE L'ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION (N° 1887) DE M. CHRISTIAN PHILIP, RAPPORTEUR DE LA DÉLÉGATION POUR L'UNION EUROPEENNE, sur le troisième paquet ferroviaire (E 2535, E 2536, E 2537 et E 2696)

PAR M. DOMINIQUE LE MÈNER,

Député.

--

Voir le numéro : 1886.

INTRODUCTION 7

I.- PRÉSENTATION DES PROPOSITIONS D'ACTES COMMUNAUTAIRES 9

A.- LA PROPOSITION DE DIRECTIVE OUVRANT À LA CONCURRENCE LE TRANSPORT INTERNATIONAL DE PASSAGERS 9

1. Le droit existant 9

a) La directive de 1991 9

b) Le premier paquet ferroviaire 9

c) Le deuxième paquet ferroviaire 9

2. Une situation économique contrastée dans le secteur du transport ferroviaire de passagers 10

3. La poursuite de la réalisation du marché intérieur pour les services ferroviaires 10

B. - LA PROPOSITION DE DIRECTIVE FIXANT DES RÈGLES COMMUNAUTAIRES POUR LA CERTIFICATION DES CONDUCTEURS DE TRAIN 10

1. Des finalités multiples 10

2. Un champ d'application circonscrit 11

3. Un modèle unique de certification des conducteurs de trains 11

C.- LA PROPOSITION DE RÈGLEMENT SUR LES DROITS ET OBLIGATIONS DES PASSAGERS 11

1. Le droit actuel 12

2. Améliorer les droits des voyageurs pour renforcer la part modale du rail dans le secteur des transports 12

D.- LA PROPOSITION DE RÈGLEMENT RELATIVE AUX COMPENSATIONS DUES EN CAS DE NON RESPECT DES EXIGENCES DE QUALITÉ CONTRACTUELLES APPLICABLES AUX SERVICES DE FRET FERROVIAIRE 13

1. Une évolution alarmante de la qualité des services internationaux de fret ferroviaire 13

2. Le droit existant est devenu inadapté au marché actuel 13

3. Une approche réglementaire fondée sur la liberté contractuelle et la définition de mesures conservatoires en matière de responsabilité et de compensation 13

a) Trois critères de qualité 14

b) La compensation des pertes et avaries de marchandises 14

c) La compensation des annulations et des retards 14

d) La mise en place d'un système de contrôle 14

II.- L'OUVERTURE À LA CONCURRENCE DU TRANSPORT FERROVIAIRE DE VOYAGEURS : UNE OPPORTUNITÉ DE DÉVELOPPEMENT POUR LE MODE FERROVIAIRE 15

A.- OUVRIR ET ENCADRER LE MARCHÉ POUR REVITALISER LE RAIL 15

1. Une libéralisation progressive 15

2. Une libéralisation encadrée et tenant compte des missions de service public des entreprises ferroviaires 15

B.- FAVORISER LE DÉVELOPPEMENT D'UN MODE ÉCOLOGIQUE 16

1. Un mode écologique 16

2. Améliorer la qualité du service ferroviaire pour le rendre plus attrayant tout en se conformant au principe de proportionnalité 16

C.- GARANTIR LA SÉCURITÉ DES VOYAGEURS : UNE PRÉOCCUPATION DE PREMIER ORDRE 17

1. Une mission régalienne de l'Etat 17

2. L'harmonisation communautaire de la certification des conducteurs de train : une mesure en faveur de la sécurité 17

III.- LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION DE LA DÉLÉGATION POUR L'UNION EUROPÉENNE 19

A.- UNE CERTIFICATION PROGRESSIVE DES PERSONNELS 19

1. Un processus législatif avancé 19

2. Un processus progressif 19

B.- L'OUVERTURE TOTALE À LA CONCURRENCE DU TRANSPORT FERROVIAIRE DE PASSAGERS SEMBLE PRÉMATURÉE 20

1. La nécessité de procéder par étapes à la libéralisation 20

2. Une approche du transport de passagers qui doit être globale 20

3. Prévenir les risques de distorsion de concurrence entre les différents modes de transport 21

C.- LA NÉCESSITÉ D'UN ENCADREMENT MINIMAL POUR LE FRET 21

TRAVAUX DE LA COMMISSION 23

I.- AUDITION DU MINISTRE 23

II.- EXAMEN EN COMMISSION 31

MESDAMES, MESSIEURS,

L'Assemblée nationale est saisie d'une proposition de résolution (n° 1887) présentée par M. Christian Philip au nom de la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne sur le troisième paquet ferroviaire, cette proposition de résolution examinant elle-même plusieurs propositions d'actes communautaires s'inscrivant dans le prolongement des premier et deuxième paquets ferroviaires.

En effet, depuis le début des années quatre-vingt-dix, l'Union européenne mène une politique de libéralisation progressive du transport ferroviaire, avec comme objectif d'enrayer son déclin. La méthode retenue consiste à développer la concurrence interne au mode ferroviaire.

C'est en 1991, avec l'adoption de la directive 91/440/CEE du Conseil du 29 juillet 1991, relative au développement des chemins de fer communautaires, que l'Union européenne a entamé le processus d'ouverture graduelle à la concurrence du secteur des transports ferroviaires, en prévoyant dans un premier temps la séparation des opérateurs de services et des gestionnaires d'infrastructures, comme dans d'autres secteurs, tels que les télécommunications. En France, la séparation n'est pas totale car le gestionnaire d'infrastructure et l'opérateur historique ont conservé des relations étroites : la SNCF continue à assurer l'entretien de la voie et la gestion des circulations en tant que maître d'œuvre travaillant pour RFF, maître d'ouvrage.

Outre la séparation entre infrastructure et exploitation, les Etats membres de l'Union européenne ont opéré une segmentation des différentes activités de services de transport. La France a opté depuis le 1er janvier 2002 pour la régionalisation du transport ferroviaire de voyageurs, même si les régions n'ont pas pour l'instant la possibilité de choisir un autre opérateur que la SNCF.

Depuis le 15 mars 2003, dans le cadre du premier « paquet ferroviaire », l'Union européenne a autorisé les entreprises ferroviaires désireuses d'effectuer des services de fret international à accéder aux lignes du réseau ferré national appartenant au réseau trans-européen de fret ferroviaire (RTEFF). Cette ouverture concernera, au plus tard le 15 mars 2008, l'ensemble du réseau ferré européen, soit 150 000 km.

Le premier paquet ferroviaire a été complété par un second volet prévoyant une ouverture totale du réseau pour le fret, ainsi qu'un avancement de cette ouverture de 2008 à 2006. Le deuxième paquet ferroviaire prévoit également l'institution du cabotage (1) à compter du 1er janvier 2007.

Si les deux premiers paquets ferroviaires étaient centrés sur la question du fret, en revanche, le troisième paquet concerne, outre le transport de marchandises, le transport international de passagers. Ce paquet complète également l'acquis communautaire en matière de fret puisqu'il comprend :

- une proposition de directive ouvrant à la concurrence le transport international de passagers à compter du 1er janvier 2010 et autorisant le cabotage ;

- une proposition de directive fixant les règles communautaires pour la certification des conducteurs de trains ;

- une proposition de règlement sur les droits et obligations des passagers, définissant les responsabilités des entreprises ferroviaires en cas d'accident, de retard, d'annulation, ainsi que les montants de compensation ;

- une proposition de règlement relative aux compensations dues en cas de non respect des exigences de qualité contractuelles applicables aux services de fret ferroviaire.

La commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire n'a pas sur ce sujet mené à nouveau le travail d'instruction des propositions communautaires déjà conduit de façon à la fois précise et claire par la Délégation pour l'Union européenne. Elle a en revanche examiné le contenu de la proposition de résolution adoptée par la Délégation, en vertu du règlement de l'Assemblée nationale.

Le présent rapport a pour objet de présenter l'état du droit actuel et le projet de réforme d'une part, et d'examiner la proposition de résolution formulée par la Délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale d'autre part.

I.- PRÉSENTATION DES PROPOSITIONS D'ACTES COMMUNAUTAIRES

A.- LA PROPOSITION DE DIRECTIVE OUVRANT À LA CONCURRENCE LE TRANSPORT INTERNATIONAL DE PASSAGERS

1. Le droit existant

a) La directive de 1991

La directive 91/440/CEE du Conseil du 29 juillet 1991, relative au développement de chemins de fer communautaires, vise à faciliter l'adaptation des chemins de fer communautaires aux exigences du marché unique et à accroître leur efficacité.

b) Le premier paquet ferroviaire

Le premier paquet ferroviaire, adopté en 2001, a permis non seulement la mise en place d'un réseau ferroviaire transeuropéen pour le fret, d'une longueur de 50 000 kilomètres, mais également l'amélioration de l'interopérabilité ainsi que le renforcement des exigences de sécurité, avec la création d'une Agence ferroviaire européenne. Ce premier paquet introduit le principe de reconnaissance mutuelle des licences des entreprises ferroviaires en autorisant l'accès au marché à toute entreprise disposant d'une licence dans l'un des Etats membres et souhaitant effectuer des transports internationaux de marchandises. Il encadre également le processus d'allocation des capacités et de tarification des infrastructures, reposant sur les deux principes de transparence et de neutralité.

L'ensemble de ces dispositions a permis de clarifier les rôles et les responsabilités des différents acteurs : entreprises ferroviaires, gestionnaires d'infrastructure et organismes de contrôle, chargés d'arbitrer les conflits.

c) Le deuxième paquet ferroviaire

Le deuxième paquet ferroviaire se compose de quatre actes :

- Il comporte tout d'abord une directive sur la sécurité ferroviaire. Cette directive fixe un objectif d'amélioration de la sécurité des chemins de fer dans les Etats membres, et accorde une priorité à la prévention des accidents graves. Le texte prévoit la soumission de la définition et de l'application des règles de sécurité aux principes de transparence et de non discrimination. La directive fixe des objectifs de sécurité commune et des méthodes de sécurité commune.

- Le deuxième paquet ferroviaire comporte également une directive relative à l'interopérabilité du système ferroviaire transeuropéen, définissant un niveau minimal d'harmonisation technique en la matière, assurant l'interopérabilité du système ferroviaire à grande vitesse.

- Le troisième acte faisant partie du deuxième paquet ferroviaire est un règlement instituant une agence ferroviaire européenne, tendant à favoriser l'interopérabilité des systèmes ferroviaires et l'adoption de normes sécuritaires communes, nécessaires à l'unification de l'espace ferroviaire européen.

- Enfin, la directive relative au développement des chemins de fer communautaires prévoit que les entreprises ferroviaires disposent d'un droit d'accès à des conditions équitables à l'infrastructure de tous les Etats membres à des fins d'exploitation de services de fret ferroviaire et de services de transport combiné de marchandises.

2. Une situation économique contrastée dans le secteur du transport ferroviaire de passagers

Si les trains de nuit effectuant des trajets de longue distance connaissent des difficultés, en revanche, le marché des services internationaux à grande vitesse a connu une forte augmentation de trafic et va sans doute encore se développer de façon importante en raison tant du doublement que de l'interconnexion du réseau transeuropéen à grande vitesse à l'horizon 2010. Cependant, la pression de la concurrence des compagnies « low cost » est très forte.

3. La poursuite de la réalisation du marché intérieur pour les services ferroviaires

La proposition de directive E 2535 COM 2004/139 final qui est soumise à l'examen de l'Assemblée nationale par le Gouvernement prévoit l'ouverture, le 1er janvier 2010 au plus tard, des droits d'accès pour la réalisation de services internationaux de transport de passagers, incluant le cabotage. Par conséquent, l'obligation de former un « groupe international » pour bénéficier de droits d'accès à l'infrastructure est supprimée. Ainsi, la directive prévoit-elle que les entreprises offrant des services internationaux pourront prendre et laisser des passagers entre deux gares situées sur un trajet international, y compris entre deux gares situées dans un même Etat membre. Cela signifie que certains trajets domestiques seront ouverts à la concurrence.

B. - LA PROPOSITION DE DIRECTIVE FIXANT DES RÈGLES COMMUNAUTAIRES POUR LA CERTIFICATION DES CONDUCTEURS DE TRAIN

1. Des finalités multiples

La proposition de directive COM (2004) 142 final, relative à la certification du personnel de bord assurant la conduite de locomotives et de trains sur le réseau ferroviaire de la Communauté, s'inscrit dans le prolongement de la directive 2004/50/CE relative à l'interopérabilité. Elle a pour objet de fixer des règles communes de certification des conducteurs, afin de faciliter l'interopérabilité et la certification des entreprises ferroviaires tout en maintenant un niveau exigeant de sécurité et en garantissant la liberté de circulation des travailleurs dans le secteur ferroviaire.

2. Un champ d'application circonscrit

La mise en œuvre de la proposition d'acte sera limitée dans un premier temps aux conducteurs de train engagés dans des services transfrontaliers et travaillant en interopérabilité. Ce n'est que dans un second temps, et sur le fondement d'un rapport relatif à la première étape, que la Commission propose d'étendre la mise en œuvre de la licence européenne à l'ensemble des conducteurs de train. Les autres agents se trouvant à bord des trains seront également pris en compte ultérieurement.

3. Un modèle unique de certification des conducteurs de trains

L'objectif consiste à garantir l'uniformité des documents attestant l'aptitude à la conduite de trains. La Commission européenne propose une mise en œuvre en deux phases :

- provisoirement, la certification donnera lieu à deux pièces : la licence, délivrée par l'autorité compétente sur la base de critères communautaires d'une part, et l'attestation harmonisée, issue de l'entreprise employeur, d'autre part ;

- à terme, ces deux éléments seront intégrés en une carte à puce délivrée par l'autorité compétente.

L'application du principe de reconnaissance mutuelle par les Etats membres aux licences et aux attestations communautaires harmonisées établies selon le modèle communautaire permettra de renforcer la mobilité des conducteurs d'un Etat membre à un autre, et d'une entreprise ferroviaire à une autre.

Le projet de directive prévoit également la définition d'exigences minimales en vue de l'obtention du certificat de conduite, ainsi qu'un système de contrôle et de sanctions par l'autorité compétente pour le territoire concerné.

C.- LA PROPOSITION DE RÈGLEMENT SUR LES DROITS ET OBLIGATIONS DES PASSAGERS

La proposition de règlement E 2536 COM 2004/143 final a pour objet d'établir les droits et obligations des voyageurs des services ferroviaires internationaux, afin d'améliorer l'efficacité et l'attrait du transport international de voyageurs par chemin de fer. La proposition fixe des dispositions concernant :

- les exigences minimales applicables à l'information des voyageurs avant, pendant et après leur voyage ;

- les conditions contractuelles ;

- la responsabilité des entreprises ferroviaires en cas d'accident, de retard ou d'annulation de service ;

- les conditions dans lesquelles les personnes à mobilité réduite sont assistées ;

- et les conditions dans lesquelles les entreprises ferroviaires coopèrent en vue d'atteindre les objectifs de la proposition de règlement.

1. Le droit actuel

La Convention du 9 mai 1980 relative aux transports internationaux ferroviaires (COTIF), actuellement en vigueur, comporte des règles uniformes concernant le contrat de transport international ferroviaire des voyageurs et des bagages. Tous les Etats membres de l'Union européenne ont ratifié cette convention. Cependant, la Commission européenne a jugé nécessaire d'aller au-delà des dispositions prévues par la COTIF, s'agissant notamment des droits des voyageurs.

2. Améliorer les droits des voyageurs pour renforcer la part modale du rail dans le secteur des transports

La proposition de règlement sur les droits et obligations des passagers est plus exigeante que la COTIF s'agissant de l'information à fournir aux voyageurs, la disponibilité des billets, l'indemnisation des dommages indirects, les droits des personnes à mobilité réduite, les mesures de sécurité et le traitement des plaintes.

S'agissant en particulier de la responsabilité en cas de décès ou de blessure d'un voyageur, la proposition de règlement tend à un alignement sur le droit en vigueur en matière de transport aérien. La proposition va également plus loin que la COTIF en matière de responsabilité et d'indemnisation en cas de retard ou d'annulation de services. Le voyageur se voit attribuer un droit à assistance en cas de retard, de correspondance manquée ou d'annulation de service.

D.- LA PROPOSITION DE RÈGLEMENT RELATIVE AUX COMPENSATIONS DUES EN CAS DE NON RESPECT DES EXIGENCES DE QUALITÉ CONTRACTUELLES APPLICABLES AUX SERVICES DE FRET FERROVIAIRE

1. Une évolution alarmante de la qualité des services internationaux de fret ferroviaire

Ainsi que le précise la Commission dans l'exposé des motifs de la proposition de règlement E 2537 COM (2004) 144 final, l'évolution de la qualité des services internationaux de fret ferroviaire est peu enviable. Le problème majeur est celui de la ponctualité puisqu'en 2002, 52 % des trains internationaux de transport combiné n'étaient pas à l'heure, 7 % de ceux-ci ayant un retard de plus de 24 heures en raison de l'absence de locomotives ou de personnel aux points de remise des marchandises. Ce problème de qualité a des conséquences sur le coût supporté par le secteur ferroviaire.

2. Le droit existant est devenu inadapté au marché actuel

Dans le droit actuel, la Convention relative aux transports internationaux ferroviaires du 9 mai 1980 prévoit que l'entreprise ferroviaire doit payer une indemnité en cas de perte ou d'avarie de la marchandise transportée ou de non respect d'un temps de transport maximal. La convention fixe des délais qui ne correspondent plus aux attentes des clients d'aujourd'hui.

Ce n'est qu'au niveau national qu'il existe des exigences de qualité contractuelles, notamment des dispositions en matière de compensation pour non respect des heures d'arrivée convenues.

3. Une approche réglementaire fondée sur la liberté contractuelle et la définition de mesures conservatoires en matière de responsabilité et de compensation

Le règlement proposé par la Commission européenne donne aux acteurs du marché une liberté contractuelle tout en définissant des dispositions conservatoires pour les responsabilités des transporteurs et des clients, et pour les niveaux de compensation. Le texte a vocation à s'appliquer à tous les services nationaux et internationaux de fret ferroviaire dans la Communauté. L'article 3 de la proposition de règlement prévoit l'ensemble des éléments devant, sous peine de nullité, figurer dans le contrat de transport, dont, notamment, les heures convenues pour le transfert des marchandises, l'heure d'arrivée, ainsi que les compensations en cas de retard, de perte ou d'avarie de la marchandise, en cas d'annulation d'un train, et le système de contrôle défini par les parties.

Selon la Commission, les systèmes de compensation proposés ne seront efficaces que si les responsables ne sont pas subventionnés sous la forme d'aides d'Etat. La proposition de règlement exclut toute responsabilité en cas de négligence, de force majeure ou de circonstances fortuites. La proposition prévoit également une responsabilité du gestionnaire de l'infrastructure à l'égard de l'entreprise ferroviaire si la perturbation du trafic entraîne un retard du transport.

a) Trois critères de qualité

Il s'agit :

- du respect du délai de livraison convenu,

- de l'information des clients en cas de problème de livraison,

- et de l'obligation de flexibilité relative de l'ordre de transport.

b) La compensation des pertes et avaries de marchandises

La proposition de règlement a fixé à 75 euros par kilogramme de masse brute le montant de la compensation pour la perte ou l'avarie de la marchandise. Ce montant a donc été triplé par rapport au montant fixé par la Convention de 1980, en raison de l'augmentation de la valeur des marchandises depuis 25 ans.

c) La compensation des annulations et des retards

Les niveaux de compensation en cas d'annulation de trains par l'entreprise ferroviaire peuvent dépendre du temps écoulé entre l'annulation et la date prévue de départ du train. En cas de retard, la proposition prévoit que les niveaux de compensation seront adaptés en fonction de la gravité du retard et du type de transport ferroviaire utilisé.

d) La mise en place d'un système de contrôle

Les parties au contrat doivent s'accorder sur la mise en œuvre d'un système de contrôle approprié permettant de faire état de façon objective de tout manquement aux exigences contractuelles.

II.- L'OUVERTURE À LA CONCURRENCE DU TRANSPORT FERROVIAIRE DE VOYAGEURS : UNE OPPORTUNITÉ DE DÉVELOPPEMENT POUR LE MODE FERROVIAIRE

Les quatre propositions d'actes communautaires constituant le troisième paquet ferroviaire sont complémentaires, et s'inscrivent dans la continuité de la directive 91/ 440/ CEE du 29 juillet 1991, véritable texte fondateur pour la libéralisation du transport ferroviaire en Europe.

A.- OUVRIR ET ENCADRER LE MARCHÉ POUR REVITALISER LE RAIL

Dans un secteur dominé par des opérateurs nationaux en situation de monopole, l'introduction de la concurrence pour le transport international de voyageurs, comme pour le fret, a pour but de relancer le développement du transport ferroviaire.

1. Une libéralisation progressive

A l'instar de la démarche adoptée pour le fret, la proposition de directive relative au transport de passagers prévoit une ouverture à la concurrence progressive, commençant par les transports internationaux, avec la possibilité de pratiquer le cabotage intérieur. Si la Délégation pour l'Union européenne préconise « d'envisager une ouverture totale des trafics de voyageurs plutôt que de commencer par le seul trafic international », votre rapporteur estime qu'il est préférable de s'en tenir à la démarche progressive proposée par la Commission européenne, et ce d'autant qu'il n'existe pas d'évaluation globale des effets de la libéralisation du marché ferroviaire communautaire pour le fret.

2. Une libéralisation encadrée et tenant compte des missions de service public des entreprises ferroviaires

La proposition de directive ouvrant à la concurrence le transport international de passagers prévoit la faculté pour les Etats membres de limiter les droits d'accès des entreprises ferroviaires pour les relations qui font l'objet d'un contrat de service public(2). Cette limitation n'est cependant possible que s'il est démontré qu'elle est nécessaire au maintien de l'équilibre économique d'un contrat de service public. Afin d'éviter tout abus, l'organisme de contrôle devra émettre un avis favorable à cette limitation.

Votre rapporteur juge indispensable de concilier les avantages économiques et environnementaux attendus de l'ouverture à la concurrence du transport de voyageurs, avec la nécessité d'offrir des services correspondant aux besoins des usagers. A cet égard, il souscrit pleinement au principe posé par M. le Ministre de l'Equipement, des Transports, de l'Aménagement du territoire, du Tourisme et de la Mer, lors du Conseil « Transports » du 9 mars 2004, selon lequel la libéralisation du trafic international de passagers doit s'effectuer « dans le respect du service public et de la sécurité ».

B.- FAVORISER LE DÉVELOPPEMENT D'UN MODE ÉCOLOGIQUE

1. Un mode écologique

Le transport ferroviaire possède de réels avantages en termes de développement durable. En effet, les effets externes négatifs de ce mode sont très inférieurs à ceux de la route.

S'il est vrai que le chemin de fer ne peut aucunement prétendre convenir à tout type de demande de transport, il possède bien des avantages décisifs dès lors qu'il s'agit de rendre le transport compatible avec la nécessité de préserver l'environnement. Ainsi possède-t-il un rendement énergétique élevé. Ses roues d'acier sur des rails d'acier présentent une faible résistance au roulement et dissipent moins d'énergie dans les frottements que les autres modes de transport. En moyenne, le rail (trafics de voyageurs et de marchandises confondus) utilise l'énergie trois fois plus efficacement que la route.

La technologie ferroviaire permet aussi des vitesses élevées en toute sécurité. Le contrôle centralisé et la faculté de transporter un grand nombre de voyageurs ou d'importantes quantités de marchandises dans les trains présentent une efficacité bien meilleure que les autres modes pour l'utilisation de l'espace et des capacités. La souplesse dans le choix des sources d'énergie primaire signifie que les rejets de CO2 et d'autres gaz à effet de serre sont sensiblement moindres que ceux des autres modes de transport.

Enfin, grâce à sa plus grande capacité de transport et sa moindre consommation d'espace à volume transporté égal, le rail est plus respectueux des paysages.

2. Améliorer la qualité du service ferroviaire pour le rendre plus attrayant tout en se conformant au principe de proportionnalité

Il semble que des améliorations de la qualité du service et l'organisation interne des entreprises ferroviaires, puissent avoir un effet de relance important sur la demande de transport ferroviaire. A ce titre, votre rapporteur tient à souligner l'intérêt de définir à l'échelon communautaire des droits et obligations, s'agissant des passagers internationaux, et des normes de compensations, en cas de non respect des exigences de qualité pour les services de fret.

Pour autant, s'agissant de ce dernier élément, votre rapporteur tient à rappeler que « l'opposition [à la proposition de règlement] est presque unanime au Conseil », qu'en vertu du principe de proportionnalité, l'on peut s'interroger sur l'opportunité pour l'Union européenne de s'immiscer dans les relations contractuelles qui s'établissent entre les acteurs économiques.

C.- GARANTIR LA SÉCURITÉ DES VOYAGEURS : UNE PRÉOCCUPATION DE PREMIER ORDRE

Dans son rapport rendu à l'occasion de l'examen d'une proposition de résolution de la Délégation pour l'Union européenne relative au deuxième paquet ferroviaire, votre rapporteur estimait que, s'agissant du fret, « l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de marchandises, parce qu'elle [allait permettre] à de multiples opérateurs d'accéder à un même réseau ferré, [devait] nécessairement s'accompagner de règles de sécurité adaptées ». Une telle exigence de sécurité n'est pas seulement valable pour les marchandises, mais également, sinon davantage, pour le transport de passagers.

1. Une mission régalienne de l'Etat

La sécurité constitue une mission régalienne de l'Etat. Dans le domaine des transports, cette mission est rappelée dans l'article 9 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs modifiée qui dispose que « l'Etat définit les règles de sécurité, d'organisation des secours et de contrôle technique applicables aux transports » et qu'il « veille à leur mise en œuvre et en contrôle l'application ».

L'ouverture progressive à la concurrence du secteur des transports ferroviaires en Europe pose de manière pressante le problème du renforcement des moyens de l'Etat dans le domaine de la sécurité ferroviaire. En effet, la directive 2004/49/CE relative à la sécurité ferroviaire, la directive 2004/50/CE relative à l'interopérabilité ferroviaire et le règlement 881/2004 instituant l'Agence ferroviaire européenne entraînent de nouvelles missions et un accroissement considérable des tâches de l'Etat liées à la sécurité.

2. L'harmonisation communautaire de la certification des conducteurs de train : une mesure en faveur de la sécurité

Dans le cadre du deuxième paquet ferroviaire, le règlement 881/2004 du 29 avril 2004 institue une Agence ferroviaire européenne chargée du développement de normes communes de sécurité et du développement de la gestion d'un système de contrôle des performances de sécurité. Selon les informations fournies à votre rapporteur, cette Agence européenne sera probablement secondée à l'échelon national par une agence française de la sécurité ferroviaire, sous la forme d'un établissement public.

Ces mesures de sécurité sont confortées, dans le cadre du troisième paquet ferroviaire qui est soumis à l'examen de la Commission des affaires économiques, puisque la proposition de directive relative à la certification des conducteurs de train tend à concilier sécurité ferroviaire et mobilité des conducteurs. Soucieux de la sécurité des passagers utilisant le mode ferroviaire, votre rapporteur milite en faveur d'une adoption rapide de cette proposition de directive et insiste sur la nécessité de mettre rapidement en place l'agence française qui sera chargée de relayer l'Agence européenne sur le territoire national .

III.- LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION DE LA DÉLÉGATION POUR L'UNION EUROPÉENNE

A.- UNE CERTIFICATION PROGRESSIVE DES PERSONNELS

1. Un processus législatif avancé

Dans sa proposition de résolution, la Délégation pour l'Union européenne « demand[ait] que la proposition de directive [relative à la certification du personnel de bord assurant la conduite de locomotives et de trains sur le réseau ferroviaire de la Communauté] puisse faire l'objet d'un accord politique lors du Conseil des ministres des Transports des 9-10 décembre 2004, afin qu'elle puisse être définitivement adoptée dans un bref délai et entrer en vigueur lors de l'ouverture totale des réseaux de fret ».

Lors du Conseil des 9 et 10 décembre 2004, « le Conseil a convenu à l'unanimité d'une orientation générale sur le projet de directive (...). La Commission a maintenu, à ce stade, une réserve par laquelle elle cherche à s'assurer que les quatre propositions législatives seront adoptées ensemble (3) ». Ainsi, le processus législatif semble-t-il relativement avancé s'agissant de la certification des conducteurs de trains. A la différence de la Commission, M. le secrétaire d'Etat aux Transports et à la Mer, auprès du ministre de l'Equipement, des Transports, de l'Aménagement du Territoire, du Tourisme et de la Mer a affirmé lors de son audition du 8 février 2005 par la Commission des affaires économiques, que « les quatre textes [n'étaient] certes pas de même nature ni de même importance, et [qu'il n'était] pas exclu que les calendriers d'adoption soient dissociés ».

S'agissant du texte de la proposition de résolution, votre rapporteur vous propose la suppression de la référence, aujourd'hui dépassée, au Conseil des Ministres des transports de l'Union des 9 et 10 décembre 2004.

2. Un processus progressif

Dans sa proposition de directive, la Commission européenne adopte une démarche progressive puisqu'elle a choisi de limiter son champ d'application dans un premier temps aux conducteurs de trains des services transfrontaliers. Il s'agit ainsi de permettre une application rapide de la directive aux conducteurs les plus directement concernés par l'ouverture du marché ferroviaire et devant opérer sur le territoire d'autres Etats membres de l'Union européenne. Ce n'est que dans un second temps que la Commission entend proposer l'extension du champ d'application de la directive à l'ensemble des conducteurs. Sur ce point, votre rapporteur approuve pleinement la proposition de résolution de la Délégation pour l'Union européenne qui dispose que « l'Assemblée nationale (...) accepte que le champ d'application de la proposition de directive soit limité aux seuls conducteurs de trains transfrontaliers », et ne s'oppose pas à ce que « l'Agence ferroviaire européenne puisse être chargée d'examiner la possibilité d'y inclure ultérieurement d'autres conducteurs, et, le cas échéant, certains personnels de bord. »

B.- L'OUVERTURE TOTALE À LA CONCURRENCE DU TRANSPORT FERROVIAIRE DE PASSAGERS SEMBLE PRÉMATURÉE

1. La nécessité de procéder par étapes à la libéralisation

Dans sa proposition de résolution, le rapporteur de la Délégation pour l'Union européenne, M. Christian Philip, estime « qu'il aurait préféré que la Commission [européenne] aille jusqu'au bout de la logique de l'ouverture et ne se limite pas aux liaisons internationales ou qu'elle l'entame par les réseaux régionaux et interrégionaux, ceux-ci paraissant offrir des perspectives plus intéressantes que le réseau international pour répondre à des besoins aujourd'hui non offerts aux usagers ».

En effet, selon la Délégation pour l'Union européenne, « c'est sur les lignes régionales et les TER, et non sur les lignes internationales à grande vitesse, que peut s'instaurer une véritable concurrence », ce qui permettrait, selon elle, à la SNCF « d'être opportunément déchargée de l'obligation d'assurer la gestion des lignes déficitaires ». On peut néanmoins s'interroger sur l'intérêt que présenterait la desserte de lignes déficitaires pour d'éventuels concurrents de la SNCF.

Quant à votre rapporteur, il juge l'ouverture totale à la concurrence prématurée, et préfère l'approche graduelle retenue par la Commission européenne, pour la libéralisation de l'ensemble du secteur, du fret au transport international de passagers, puis à l'ensemble du marché. Votre rapporteur estime que l'expérience de l'ouverture du transport international, incluant le cabotage, doit d'abord être concluante avant de passer à l'étape suivante. Il propose donc à la Commission adopter un amendement visant à supprimer du texte de la résolution l'alinéa consacré à cette hypothèse.

2. Une approche du transport de passagers qui doit être globale

Votre rapporteur rejoint la position de M. Christian Philip, s'agissant de la nécessité d'examiner et d'adopter conjointement les deux propositions d'actes relatives au trafic de passagers, tant il est nécessaire que la libéralisation du transport ferroviaire de passagers s'accompagne de la protection de leurs droits.

Ainsi que le précise à juste titre le rapporteur de la Délégation pour l'Union européenne, non seulement « l'ouverture du trafic doit s'accompagner d'une amélioration de la qualité de l'offre de transport », mais en outre, « l'Union européenne montrerait aux citoyens que l'objectif d'un marché ferroviaire ouvert et unifié n'est pas contradictoire avec celui d'un haut niveau de protection des consommateurs ».

3. Prévenir les risques de distorsion de concurrence entre les différents modes de transport

Votre rapporteur approuve également la proposition de résolution s'agissant de la nécessité pour le Conseil de modifier le dispositif de la proposition de règlement sur les droits et obligations des voyageurs ferroviaires internationaux afin qu'elle contribue à prévenir les risques de distorsions de concurrence entre le transport ferroviaire et les autres modes de transport.

C.- LA NÉCESSITÉ D'UN ENCADREMENT MINIMAL POUR LE FRET

Votre rapporteur partage le souci, exprimé par la Délégation pour l'Union européenne dans sa proposition de résolution, de chercher, dans le domaine du fret, un équilibre entre, d'une part, la nécessité de définir des normes communautaires de compensations en cas de non respect des exigences de qualité contractuelles applicables au service de fret ferroviaire, et, d'autre part, celle de prendre en compte l'hostilité existant à l'encontre du projet de règlement en cause. Ainsi que le constate M. Christian Philip, il est reproché par la quasi-unanimité des industriels à la proposition de règlement sur la qualité des relations contractuelles dans le fret « d'empiéter sur les relations entre les entreprises et leurs clients ».

C'est pourquoi votre rapporteur propose de mentionner, ainsi que le suggère la Délégation pour l'Union européenne, dans la résolution, la nécessité pour le Conseil d'examiner « la possibilité de prévoir un mécanisme fondé sur des contrats-types, auxquels les parties pourraient déroger à certaines conditions ». En effet, si le règlement n'est pas adopté par la Communauté, la Commission envisage de recourir à une recommandation sans véritable portée contraignante.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- AUDITION DU MINISTRE

La Commission a entendu M. François GOULARD, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer, sur la proposition de résolution de M. Christian Philip (n° 1887) sur le troisième paquet ferroviaire (documents E 2535, E 2536, E 2537 et E 2696) au cours de sa séance du mardi 8 février 2005.

M. Yves Coussain, président, a souligné que, contrairement aux premier et deuxième paquets ferroviaires, qui étaient centrés sur le fret, les nouveaux projets d'actes communautaires proposés portent principalement sur l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs. Ce troisième paquet comprend en effet deux propositions de directive et deux propositions de règlement ayant respectivement trait à l'ouverture à la concurrence du transport international de passagers à compter du 1er janvier 2010, à la certification des conducteurs de train, aux droits et obligations des passagers, et aux compensations en cas de non-respect des exigences de qualité applicables aux services de fret.

C'est une première puisqu'il n'existait jusqu'à présent pas de véritable concurrence, au niveau communautaire, dans le domaine du transport ferroviaire de voyageurs. Au cours de la négociation, la France a progressivement adopté une position constructive, tendant à concilier l'efficacité économique avec l'exigence d'un service de qualité rendu au public de façon équitable sur l'ensemble du territoire national.

M. Yves Coussain, président, a demandé si, dans ce cadre, les Etats membres auront la possibilité de limiter l'accès au réseau en établissant des contrats de service public pour des services précis.

M. François Goulard, après avoir noté que ce paquet ferroviaire couvrait des sujets techniques d'une importance non négligeable pour les services ferroviaires, a précisé que la Commission européenne proposait une adoption commune des deux directives et des deux règlements, mais qu'une disjonction n'était cependant pas exclue.

Il a ensuite présenté les quatre textes.

- La première proposition de directive concerne la certification du personnel de bord assurant la conduite de locomotives et de trains. Un genre de permis de conduire européen serait délivré par une autorité compétente nationale, avec trois types de certificats, pour les trains de manœuvre, les trains de personnes et les trains de marchandises. La France est favorable à ce texte, la présidence proposant de limiter son champ d'application aux seuls conducteurs de train, à l'exclusion des contrôleurs. Un groupe ad hoc du Conseil travaille actuellement à la question, et l'orientation générale a été approuvée par le Conseil du 10 décembre 2004, avec un amendement prévoyant des dérogations temporaires reconductibles. L'examen et le vote en séance plénière du Parlement européen devraient avoir lieu entre mars et mai 2005 - le rapporteur est M. Gilles Savary. Une position commune du Conseil est envisagée pour juin 2005, et la deuxième lecture au Parlement pour septembre ou octobre 2005, la fin de parcours étant prévue pour avril 2006.

- La deuxième proposition de directive est plus consistante puisqu'elle tend à modifier la directive 91-440, fondatrice en matière de transport ferroviaire européen. La France considère comme très positif que la proposition de directive rappelle que les règles de sécurité doivent être pleinement appliquées. Par ailleurs, le texte mentionne explicitement la possibilité de limiter le droit d'accès pour préserver les services faisant l'objet d'un contrat de service public - en France, les chemins de fer régionaux font l'objet de tels contrats, mais pas les grandes lignes. Sur ce point, il conviendra de coordonner la proposition de directive ferroviaire avec la proposition de directive relative aux services publics. En outre, dans la mesure où il est prévu d'ouvrir le transport international de passagers à la concurrence, la France plaide pour une définition précise de la notion de « transport international », le franchissement d'une frontière ne constituant pas un critère suffisant - le trafic de la ligne Kehl-Strasbourg-Paris, par exemple, est essentiellement national. Des clarifications doivent également être apportées pour que puissent être dégagées des possibilités physiques de circulation des trains dans le cadre des contrats de service public, et pour répondre au souhait exprimé par la Confédération européenne des syndicats concernant l'harmonisation sociale. La France, sous ces quelques réserves, accorde une approbation de principe au texte. L'échéance de 2010 paraît raisonnable, mais le rapporteur du Parlement européen, M. Georg Jarzembowski, s'est prononcé pour une mise en œuvre plus précoce, dès 2009, et il a même évoqué l'ouverture à la concurrence des services nationaux de transport de passagers. Pour mémoire, en France, les 9 milliards de voyageurs-kilomètres du transport international doivent être rapprochés des 73 milliards de voyageurs-kilomètres du transport national.

- La première proposition de règlement porte sur les droits des passagers internationaux. Il s'agit, à l'instar de ce qui se fait dans le transport aérien, de définir leurs droits vis-à-vis des compagnies ferroviaires. Les dispositions sont assez hétérogènes : responsabilité des entreprises en cas d'accident, droit à indemnisation en cas de retard, droit au transport et à l'assistance de personnes à mobilité réduite, sûreté des passagers dans les gares et les trains, limitation des pénalités pour absence de titre de transport à 100 % du prix du billet. La France n'est pas hostile à un texte de cette nature, mais elle attire l'attention de la Commission européenne sur l'inutilité de normalisations excessives, le principe de subsidiarité devant s'appliquer. Une orientation générale devrait être conclue en juin puisque le sujet est inscrit à l'ordre du jour du Conseil d'avril.

- La deuxième proposition de règlement est relative à la qualité du service de fret. Sous peine de nullité, les contrats de transport de fret ferroviaire national ou international devraient comporter des exigences de qualité détaillées, ainsi que des compensations à payer en cas de non-respect de celles-ci. La France s'interroge sur l'opportunité d'une réglementation européenne couvrant les relations contractuelles entre ces entreprises ; une majorité d'Etats membres se montrent d'ailleurs assez réticents. Quoique cette proposition de règlement figure au programme de la présidence luxembourgeoise, aucun groupe de travail ne s'étant réuni depuis le début de l'année, il n'est pas exclu que la Commission européenne revoie sa copie.

Votre rapporteur a indiqué que ce troisième paquet, lorsqu'il sera adopté par les Etats membres, représentera un tournant pour le secteur ferroviaire en Europe, dont l'ouverture à la concurrence, jusqu'à présent limitée au fret, sera étendue au transport de voyageurs.

Le rapporteur a rappelé qu'il avait estimé, en qualité de rapporteur de la proposition de résolution de la Délégation pour l'Union européenne relative au deuxième paquet ferroviaire, que la France devait accepter une libéralisation maîtrisée du fret ferroviaire mais que l'ouverture à la concurrence devait s'accompagner de garanties sociales et sécuritaires suffisantes, et, s'agissant du transport de passagers, il a recommandé la même prudence.

Le rapporteur a ensuite posé les questions suivantes :

- lors du dernier Conseil des ministres des transports de l'Union européenne, qui s'est tenu en décembre, quelle a été la position de la France dans la négociation et quelles ont été les conclusions du Conseil s'agissant de la certification des conducteurs de train ?

- quelle est la position du Gouvernement à propos de l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de passagers ? Dans quelle mesure a-t-elle évolué ?

- enfin, la Commission s'est engagée, lors du Conseil européen de Barcelone de mars 2002, à présenter un rapport d'évaluation sur les effets de l'ouverture à la concurrence dans le domaine du fret. Ce rapport sera-t-il présenté aux États membres ? Est-il en cours d'élaboration ?

Mme Odile Saugues, au nom du groupe socialiste, s'est étonnée de la précipitation avec laquelle le troisième paquet ferroviaire était examiné. En janvier 2004, alors que le groupe socialiste manifestait son opposition au deuxième paquet, l'année de présentation du troisième paquet avait été repoussée de 2008 à 2010. Les pressions répétées exercées par M. Georg Jarzembowski, rapporteur devant le Parlement européen, pour anticiper son adoption devraient inciter à la méfiance.

Par ailleurs, ces quatre textes ne sont pas de même teneur ; l'un d'entre eux est particulièrement inquiétant, et leur jonction dans un même paquet ressemble à une prise en otage.

Aucune étude préalable n'a été menée pour prendre en compte les observations des usagers et des collectivités locales.

Avant d'entamer la libéralisation du trafic de passager, il importerait d'évaluer les effets de l'ouverture à la concurrence du fret.

Une péréquation financière sera-t-elle opérée entre axes rentables et non rentables ? Comment réserver des voies aux TER et éviter la saturation des grandes lignes ? Comment préserver les services intérieurs et régionaux, qui fonctionnent bien ?

Les conséquences catastrophiques de la libéralisation du rail britannique sur la sécurité ne doivent pas être oubliées.

Le troisième paquet du transport aérien est entré en vigueur en avril 1997. Or une dépêche de presse souligne le peu de fiabilité des engagements pris par certaines compagnies - notamment Air Exel et Aerocondor - qui soumissionnent aux appels d'offres concernant les liaisons soumises aux obligations de service public.

Le groupe socialiste est donc très circonspect et s'oppose à une libéralisation à la hussarde.

M. Daniel Fidelin a déclaré que le groupe UMP adhérait au principe de l'unification du système ferroviaire européen, sans ignorer pour autant les problèmes concrets que cela peut poser aux Etats membres et aux industriels concernés. L'ouverture à la concurrence du trafic international de passagers devra être menée progressivement et de manière encadrée, dans le respect des impératifs de sécurité. Elle devra également se traduire, pour le chemin de fer français, par une amélioration des performances et un gain de parts de marché chez ses voisins européens.

La discussion du troisième paquet ferroviaire doit s'étaler jusqu'en 2006 ; il n'y a pas urgence à s'engager dès maintenant dans la voie de l'ouverture totale du transport de voyageurs, notamment au niveau régional, et cela n'est d'ailleurs pas prévu dans les textes en discussion.

La proposition de règlement sur les droits et obligations des voyageurs vise à mieux garantir les droits des passagers en précisant la responsabilité des entreprises ferroviaires, ce qui peut contribuer à renforcer l'attractivité de ce mode de transport. Des efforts restent en effet à accomplir, par exemple en matière d'accessibilité, mais il ne faut pas négliger leur coût.

Avant de se lancer dans une démarche de qualité concernant le fret ferroviaire, qui comprendrait un système de compensation pour couvrir les pertes ou avaries de marchandises, les retards et les annulations, serait-il possible de savoir où en est le fret dans notre pays ? Quel est son degré d'ouverture à la concurrence ? Quel est le niveau de satisfaction de ses clients ? Quelle est la situation financière de la branche fret de la SNCF ?

Enfin, se pose la question de la conformité aux principes de subsidiarité et de proportionnalité. La Commission européenne est-elle fondée à établir des règles impératives interférant dans les relations commerciales ? Les modalités de compensation ne devraient-elles pas plutôt être définies par les entreprises ferroviaires et les industriels, sous forme d'accords contractuels ?

M. Daniel Paul, après avoir insisté sur la précipitation avec laquelle intervenait cette proposition de résolution, a regretté que la mise en concurrence du fret ferroviaire n'ait encore fait l'objet d'aucun bilan, en dépit des dysfonctionnements et difficultés observés dans plusieurs régions, et alors que promesse en avait été faite lors du Conseil européen de Barcelone en 2002. Avant d'aller plus loin dans la construction européenne et de se lancer dans une escalade irréfléchie, un arrêt sur image s'impose pour évaluer les conséquences de la libéralisation sur toutes les entreprises publiques, que ce soit La Poste, France Télécom, EDF, GDF ou la SNCF. L'objectif, hélas ! est bien connu - il s'agit de soumettre ces entreprises aux règles de la concurrence pour les faire disparaître -, mais il convient aujourd'hui de procéder à une sorte d'audit.

Le chemin de fer sera donc ouvert à la concurrence internationale sous prétexte de rentabiliser les entreprises, mais la proposition de directive, qui prend pour exemple la ligne Madrid-Barcelone-Perpignan, recèle bien des dangers. Sur une question aussi lourde de conséquences pour la pérennité de certaines lignes, agir avec autant de désinvolture est étonnant. La Commission des Affaires économiques doit impérativement examiner de façon plus détaillée les quatre textes présentés sous l'appellation de « troisième paquet ferroviaire ».

M. Daniel Boisserie s'est interrogé sur les garanties sociales dont bénéficiera, par exemple, le personnel travaillant dans les trains espagnols qui traverseront la France. Seront-ils soumis au statut français ou espagnol ? Et comment sera fixée la délimitation entre transports internationaux et transports nationaux ?

M. François Dosé a demandé si les TER transfrontaliers seront soumis au nouveau régime des transports internationaux, totalement ou en partie. La question est importante pour la Lorraine, certains TER desservant le grand-duché du Luxembourg ou la Sarre.

Répondant aux différents intervenants, M. François Goulard a apporté les éléments de réponses suivants :

- la directive 91-440 portait déjà en germe la libéralisation du secteur ferroviaire, en prévoyant notamment la séparation entre la gestion de l'infrastructure et les opérateurs, ou encore les règles de sécurité qui doivent relever des Etats. Il n'y a donc aucune précipitation ; le dossier est connu depuis longtemps et il a avancé, étape après étape, quelle que fût la majorité ;

- il existe cependant deux conceptions de l'ouverture à la concurrence. L'une, extrêmement libérale, est défendue par certains Etats membres. L'autre, celle du Gouvernement et de la majorité, consiste à souhaiter une certaine libéralisation, à condition qu'elle reste maîtrisée et que soient notamment prises en compte les contraintes relevant du service public. Du reste, à cet égard aussi, la position de la France se caractérise par une certaine continuité ;

- l'ouverture à la concurrence du fret en Europe est encore extrêmement partielle ; il n'y a donc pas matière à dresser un bilan. Néanmoins, en Allemagne, pays où le fret est déjà relativement ouvert à la concurrence - à hauteur de 8 % du trafic -, 280 entreprises ferroviaires sont apparues et le secteur, en deux ans, a connu une croissance de 40 %. La Deutsche Bahn s'est en effet trouvée stimulée et a accompli d'énormes progrès, à telle enseigne qu'elle constitue désormais une sorte de modèle. A condition d'être menée dans des conditions bien réfléchies, l'ouverture à la concurrence peut donc réveiller les opérateurs traditionnels, incités à proposer des services nouveaux ; sinon, elle risque en effet d'être pénalisante, concernant le service public ou l'aménagement du territoire. Thalys, entreprise distincte des opérateurs français et belge, exploite un marché spécifique avec une efficacité remarquable ; c'est en quelque sorte la préfiguration de ce que pourrait être l'ouverture à la concurrence du trafic international de voyageurs, en vue d'offrir des services ordinairement non assurés par de grands opérateurs nationaux en situation quasi monopolistique. Quoi qu'il en soit, le bilan, à ce stade, ne peut être que partiel et ne doit pas être agité comme un épouvantail ;

- en Conseil des ministres des transports, M. Gilles de Robien a pris la position suivante : « Nous sommes ouverts à l'idée d'une libéralisation du trafic international de passagers dès lors qu'elle s'effectuerait dans le respect du service public et de la sécurité. La possibilité de prendre et de laisser des passagers dans des gares intermédiaires situées dans un même Etat membre peut être envisagée comme un complément à l'ouverture du trafic international ; elle ne doit cependant ni porter atteinte à l'équilibre des contrats de service public ni constituer une ouverture déguisée et prématurée du trafic national et régional de passagers. » ;

- les quatre textes ne sont certes pas de même nature ni de même importance, et il n'est pas exclu que les calendriers d'adoption soient dissociés ;

- le problème de la péréquation financière est explicitement pris en compte dans le cadre des limitations de droit d'accès en cas de mise en péril de l'équilibre économique d'une liaison objet d'un contrat de service public. Il n'en demeure pas moins que ce point est délicat et mérite d'être examiné de près, mais le règlement OSP - organisation des services publics de transports de voyageurs - s'inspire du même esprit ;

- la question des sillons est traitée par la nouvelle réglementation. Il n'y a pas de raison au demeurant que la circulation de trains supplémentaires pénalise les liaisons existantes ; contrairement aux idées reçues, des sillons restent inexploités sur la plupart d'entre elles, les progrès de la technologie ferroviaire accroissant les capacités de transit ;

- le transport aérien est un autre sujet. Cependant, malgré la libéralisation du trafic aérien, la France a conservé la possibilité, via le FIATA - le Fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien -, d'imposer des obligations de service public sur certaines lignes ;

- une ouverture maîtrisée à la concurrence suppose notamment qu'un intérêt majeur soit porté à la sécurité. Même s'il arrive aussi aux systèmes publics de montrer des défaillances, il est essentiel d'affirmer que la responsabilité de la sécurité ferroviaire incombe à l'Etat, en créant, dans le cadre de la nouvelle organisation, une agence spécifique, dotée de moyens propres ;

- quoique le trafic régional ne soit pas visé par ce paquet, la question a été soulevée par un certain nombre de présidents de région, qui s'interrogent sur l'utilité de confier certains tronçons à de nouveaux opérateurs ;

- s'agissant de la démarche qualité fret, le gouvernement français, comme ceux d'autres Etats membres, jugerait inopportun que la Commission européenne normalise les relations contractuelles ;

- l'exécution du plan fret est conforme à ce qui était prévu, sur les plans financier, commercial et organisationnel. Ce plan est douloureux mais nécessaire ; il s'agit de sauvegarder une activité qui était condamnée en opérant un redressement de très grande ampleur. Le fret ferroviaire a de l'avenir, et la SNCF a une carte à jouer dans le secteur : la baisse globale de trafic se poursuit encore, des liaisons inexploitables dans des conditions d'équilibre économique étant progressivement abandonnées, mais la SNCF commence à conquérir de nouveaux marchés ;

- l'ouverture à la concurrence du fret, y compris domestique, sera totale au 1er janvier 2007. Des demandes allant dans ce sens émanent non seulement d'entreprises mais également de grands équipements comme les ports, qui souhaitent bénéficier d'offres plus diversifiées, permettant une meilleure utilisation du mode ferroviaire pour le transport de marchandises ;

- le Président de la République comme le Premier ministre se sont exprimés très clairement à propos du projet de directive Bolkestein. Les salariés travaillant à bord d'un train traversant la frontière ne changeront pas de statut, mais il est exclu qu'une entreprise opérant régulièrement en France soumette ses salariés à un droit étranger. Le cas du transport aérien est différent car les avions se déplacent très vite d'un pays à l'autre ;

a priori, rien n'empêchera de considérer qu'un TER transfrontalier assure une liaison internationale, à condition que les contrats de service public soient respectés et que l'expression « transport international » soit précisée et ne soit pas détournée - pour qu'un simple franchissement de la frontière ne soit pas intégré à cette catégorie.

En réponse à votre rapporteur, qui a distingué les contraintes de sécurité nécessaires pour le fret et celles, plus draconiennes, devant s'appliquer au transport des personnes, M. François Goulard a jugé que la sécurité ferroviaire était indivisible, un accident de train de marchandises pouvant provoquer des dommages aux passagers voyageant dans d'autres trains. L'agence de sécurité ferroviaire prendra vraisemblablement la forme d'un établissement public, intégré dans l'ensemble organisé au niveau européen autour de l'Agence européenne de sécurité ferroviaire, implantée à Valenciennes.

II.- EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du 15 février 2005, la Commission a examiné, sur le rapport de M. Dominique Le Mèner, la proposition de résolution de M. Christian Philip (n° 1887) sur le troisième paquet ferroviaire (documents E 2535, R 2536, E 2537 et E 2696).

Après l'exposé du rapporteur, plusieurs commissaires sont intervenus dans la discussion générale.

Le Président, M. Patrick Ollier, a rappelé que c'était en application de l'article 88-4 de la Constitution que le Gouvernement avait transmis à l'Assemblée nationale les quatre propositions d'actes constituant le troisième paquet ferroviaire. Il a précisé que la principale innovation juridique introduite par ce dispositif résidait dans le fait que les textes ne concernent pas seulement le fret, mais également le transport international de passagers, cabotage inclus.

S'exprimant au nom du groupe socialiste, Mme Odile Saugues a ensuite indiqué d'emblée que le groupe socialiste rejetait le troisième paquet ferroviaire comme il avait déjà rejeté le deuxième. Elle a regretté la vision libérale qui inspire ce troisième paquet ferroviaire. Elle a en effet estimé que les expériences européennes de libéralisation du trafic ferroviaire, en Grande-Bretagne notamment, n'étaient pas concluantes, notamment en termes de renouvellement du matériel et de conditions de sécurité, pour les passagers comme pour les salariés. Elle a regretté en outre que la Délégation à l'Union européenne ait proposé d'étendre le processus de libéralisation par rapport aux propositions de la Commission européenne.

Puis elle a estimé que, contrairement à l'avis du rapporteur, il n'y avait pas lieu d'affirmer que l'ouverture du trafic ferroviaire à la concurrence aurait des incidences positives en matière d'environnement.

Elle a enfin jugé que les textes en discussion méritaient des examens séparés, indiquant que le groupe socialiste avait proposé deux amendements allants dans ce sens.

M. Daniel Paul, s'exprimant au nom du groupe communiste et républicain, a indiqué que si certaines des dispositions de ce troisième paquet ferroviaire pouvaient être considérées comme des avancées, notamment la certification des qualifications des conducteurs, le système de compensation des dommages causés aux voyageurs, les exigences de qualité du service de fret, le processus de libéralisation du rail, déjà engagé par les deux premiers paquets, ne pouvait que susciter l'hostilité de son groupe, car il s'inscrivait en contradiction avec l'idée même de droits sociaux.

Il a observé que la dimension sociale était exclue des analyses proposées par la Commission européenne, comme l'avait déjà illustré sa conduite de la libéralisation dans d'autres secteurs, se traduisant par l'encouragement des pratiques de dumping social, une dégradation des conditions de travail et une réduction de l'emploi, toutes choses qui dans le secteur ferroviaire seraient préjudiciables à la sécurité des transports.

Il a ajouté qu'il n'était aucunement avéré que la libéralisation du rail conduisît à améliorer sa compétitivité par rapport aux autres modes de transport, et qu'il était en conséquence urgent de mener une étude d'impact sur l'ouverture à la concurrence en termes d'efficacité économique, de dynamique de l'emploi, et de sécurité du système ferroviaire.

Il a estimé que le troisième paquet ferroviaire, en assurant la poursuite de la mise en concurrence du rail, s'inscrivait pleinement dans la logique du traité constitutionnel en cours d'examen, qui instituait la libéralisation quasi absolue du marché européen en principe fondamental de la construction européenne.

Il a exprimé sa crainte que la libéralisation du trafic ferroviaire international de passagers et l'autorisation du cabotage à l'horizon 2006 ne risquassent de fragiliser fortement l'opérateur historique français en particulier et les services publics de transport en général.

Il a conclu en indiquant que son groupe rejetterait cette proposition de résolution.

S'exprimant au nom du groupe UMP, M. François-Michel Gonnot a rappelé que le troisième paquet ferroviaire s'inscrivait dans un processus de libéralisation du transport ferroviaire entamé en 2001 et soutenu, à l'époque, par M. Jean-Claude Gayssot, ministre des transports, sous l'égide de M. Lionel Jospin, Premier ministre.

Il a ensuite salué le travail du rapporteur, soulignant le caractère équilibré de sa démarche. Il a en effet estimé que l'ouverture du trafic ferroviaire à la concurrence était souhaitable s'il est progressif, encadré et équilibré. Il a en effet souligné l'importance de deux impératifs qui doivent encadrer la libéralisation du trafic ferroviaire : un impératif de sécurité et un impératif de service public.

Il s'est donc félicité du fait que l'ouverture du trafic ferroviaire à la concurrence s'échelonne jusqu'en 2006. Il a estimé qu'il n'y avait pas lieu d'accélérer ce processus, comme le propose la Délégation à l'Union européenne. Il s'est rallié sur ce point à la position du rapporteur et a salué les amendements de ce dernier allant dans ce sens.

Puis la Commission a examiné un amendement présenté par Mme Odile Saugues, ayant pour but de demander un examen séparé des quatre textes constituant le troisième paquet ferroviaire.

Le rapporteur a indiqué que les quatre textes constituant le troisième paquet ferroviaire ne seraient probablement pas adoptés conjointement, en dépit de ce que souhaite la Commission européenne. Il a en effet rappelé que, d'une part, la proposition de règlement relative aux exigences de qualité dans le domaine du fret avait rencontré l'opposition de vingt-et-un des vingt-cinq Etats membres, mais que, d'autre part, à la suite du Conseil des ministres des transports des 9 et 10 décembre 2004, l'adoption de la directive sur la certification des conducteurs de trains se ferait sans doute rapidement.

Pour autant, il a estimé qu'il n'était pas opportun de demander un examen distinct des quatre textes, dans la mesure où, ainsi que le prévoit la résolution, il était souhaitable que les deux textes relatifs aux passagers soient adoptés conjointement.

Enfin, revenant sur l'intervention de Mme Odile Saugues, il a indiqué que la libéralisation du secteur ferroviaire n'avait certes pas d'incidences directes sur l'environnement, mais qu'elle pouvait constituer un facteur de croissance de ce mode de transport, au détriment des modes de transport moins écologiques comme le transport routier.

Suivant l'avis défavorable de son rapporteur, la Commission a par conséquent rejeté cet amendement.

Ensuite, la Commission a, suivant l'avis de son rapporteur, adopté un amendement rédactionnel visant à supprimer la référence, devenue sans objet, au Conseil des ministres des transports de l'Union européenne des 9 et 10 décembre 2004.

Puis la Commission a examiné deux amendements en discussion commune :

- un amendement présenté par Mme Odile Saugues, ayant pour but de s'opposer à l'ouverture à la concurrence du trafic international de passagers, en supprimant de la résolution la mention à la proposition de directive relative à l'ouverture à la concurrence du trafic international de passagers.

- un amendement du rapporteur, visant à restreindre au seul trafic international l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs.

S'agissant de l'amendement de Mme Odile Saugues, le rapporteur a émis un avis défavorable, estimant, d'une part, que l'ouverture à la concurrence du trafic de passagers, pour peu qu'elle soit encadrée, serait bénéfique pour redynamiser un moyen de transport écologique, mais que, d'autre part, la libéralisation devait s'effectuer par étapes et que c'était la raison pour laquelle il avait déposé un amendement prévoyant de restreindre l'ouverture à la concurrence au trafic international dans un premier temps.

Suivant l'avis de son rapporteur, la Commission a par conséquent rejeté l'amendement déposé par Mme Odile Saugues.

S'agissant de son amendement, le rapporteur a indiqué qu'il s'interrogeait sur la pertinence de la proposition issue de la Délégation pour l'Union européenne, consistant à plaider pour une ouverture totale du transport ferroviaire de passagers, au motif que c'est sur les lignes régionales et les TER que peut s'instaurer une véritable concurrence. Il s'est montré peu convaincu de l'intérêt que présentait actuellement la desserte des lignes régionales, aujourd'hui déficitaires, pour d'éventuels concurrents de la SNCF. En outre, il a estimé nécessaire de procéder par étape, d'autant plus que l'ouverture à la concurrence pour le fret n'avait pas encore fait l'objet d'un bilan.

Suivant l'avis de son rapporteur, la Commission a adopté cet amendement, puis la proposition de résolution de M. Christian Philip (n° 1887) ainsi modifiée.

·

· ·

En conséquence, la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire vous demande d'adopter la proposition de résolution, dont le texte suit :

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

sur le troisième paquet ferroviaire
(documents E 2535, E 2536, E 2537 et E 2696)

Article unique

L'Assemblée nationale,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

I. Sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la certification du personnel de bord assurant la conduite de locomotives et de trains sur le réseau ferroviaire de la Communauté (COM[2004] 142 final, document E 2696) :

1. Accepte que le champ d'application de la proposition de directive soit limité aux seuls conducteurs de trains transfrontaliers, mais demande que l'Agence ferroviaire européenne puisse être chargée d'examiner la possibilité d'y inclure ultérieurement d'autres conducteurs et, le cas échéant, certains personnels de bord.

2. Souhaite que le Conseil retienne le principe de l'inclusion, en annexe à la proposition de directive, des annexes I et II de l'accord entre la Communauté européenne du Rail et la Fédération européenne des travailleurs du transport, relatives aux aptitudes physiques, psychologiques et professionnelles.

II. Sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 91/440/CEE du Conseil relative au développement de chemins de fer communautaires (COM[2004] 139 final, document E 2535) et la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur les droits et obligations des voyageurs ferroviaires internationaux (COM[2004] 143 final, document E 2536):

1. Juge opportun que les deux propositions relatives au trafic des passagers puissent être examinées et adoptées conjointement par le Conseil.

2. Considère qu'il est indispensable de mettre en œuvre des mécanismes destinés à :

- garantir, pour l'attribution des sillons, les droits acquis des opérateurs ayant procédé à d'importants investissements, et à faciliter la signature d'accords-cadres avec le gestionnaire de l'infrastructure d'une durée supérieure à dix ans ;

- harmoniser les péages d'infrastructures ;

- poursuivre une politique d'investissements soutenue en faveur des réseaux ferroviaires.

3. Estime nécessaire que le Conseil modifie le dispositif de la proposition de règlement sur les droits et obligations des voyageurs ferroviaires internationaux, afin qu'elle soit davantage conforme au principe de proportionnalité ; qu'elle contribue à prévenir les risques de distorsions de concurrence entre le transport ferroviaire et les autres modes de transport ; que les imprécisions qu'elle recèle puissent être corrigées.

III. Sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les compensations en cas de non-respect des exigences de qualité contractuelles applicables aux services de fret ferroviaire (COM[2004] 144 final, document E 2537) :

1. Juge indispensable que l'ouverture du fret ferroviaire à la concurrence s'accompagne de la mise en place d'un encadrement minimal, conformément à un principe déjà appliqué dans les autres secteurs ouverts à la concurrence.

2. Estime toutefois nécessaire que, devant l'hostilité affichée, à l'heure actuelle, par la quasi-totalité des Etats membres et par la très large majorité des transporteurs à l'encontre de la proposition de règlement, le Conseil examine la possibilité de prévoir un mécanisme fondé sur des contrats-types, auxquels les parties pourraient déroger à certaines conditions.

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N° 2097 - Sur la proposition de résolution de la délégation pour l'Union européenne sur le troisième paquet ferroviaire (Dominique Le Mèner)

1 () Le cabotage se définit comme le droit de prendre et laisser des clients tout au long d'un parcours international, y compris entre duex gares situées dans le même Etat membre.

2 () Au sens du règlement n° 1191/69 du Conseil du 26 juin 1969, relatif à l'action des Etats membres en matière d'obligations inhérentes à la notion de service public dans le domaine des transports par chemin de fer, par route et par voie navigable. Le règlement prévoit la possibilité pour les Etats membres et les collectivités locales d'attribuer des contrats de service public pouvant comporter des droits exclusifs pour l'exploitation de certains services.

3 () http://ue.eu.int/ueDocs/cms_Data/docs/pressData/fr/trans/83255.pdf


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