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TEXTE ADOPTé no 110

« Petite loi »

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

session ordinaire de 2002-2003

2 avril 2003

RÉSOLUTION

sur les négociations agricoles à l'organisation mondiale du commerce (com [1999] 331 final/n° e 1285).

est considérée comme définitive, en application de l'article 151-3 du règlement, la résolution dont la teneur suit :

organisations internationales.

Article unique

L'Assemblée nationale,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la communication de la Commission européenne au Conseil et au Parlement européen du 8 juillet 1999 relative à l'approche de l'Union européenne en vue du cycle du millénaire de l'Organisation mondiale du commerce (COM [1999] 331 final/n° E 1285),

Vu l'accord de Marrakech instituant l'Organisation mondiale du commerce (OMC), auquel sont annexés les différents accords concluant les négociations commerciales du cycle d'Uruguay, notamment l'accord sur l'agriculture, signé le 15 avril 1994, dont la ratification a été autorisée par la loi n° 94-1137 du 27 décembre 1994, et entré en vigueur le 1er janvier 1995,

Vu la déclaration adoptée le 14 novembre 2001 à Doha par la conférence ministérielle de l'OMC, qui fixe l'ordre du jour du nouveau cycle de négociations commerciales multilatérales,

Vu la proposition de la Communauté européenne relative aux modalités des négociations agricoles adoptée le 27 janvier 2003 par le Conseil,

Vu le projet d'accord sur les modalités agricoles présenté le 12 février 2003 par le président du comité de l'agriculture de l'OMC,

Considérant que les membres de l'OMC doivent déterminer, d'ici le 31 mars 2003, les modalités des négociations agricoles, c'est-à-dire les objectifs chiffrés de baisse des droits de douane et des soutiens à l'agriculture, pour élaborer ensuite leurs projets d'engagements globaux ou offres de négociation, qui seront discutés du 10 au 14 septembre 2003 lors de la conférence ministérielle de l'OMC de Cancun ;

Considérant que la politique agricole commune (PAC) fait l'objet, dans le cadre de ces négociations, d'attaques inacceptables de la part principalement des Etats-Unis et des pays du « groupe de Cairns » ;

Considérant que ces attaques compliquent la position de négociation de l'Union européenne, qui s'est pourtant largement acquittée, de manière responsable et transparente, des obligations souscrites en 1994 à Marrakech, à l'inverse des Etats-Unis, qui n'ont cessé d'accroître leurs aides agricoles ;

Considérant que l'Union européenne est le premier importateur de produits agricoles en provenance des pays en développement ;

Considérant que les discussions concernant la révision à mi-parcours de la PAC risquent d'interférer dangereusement avec les négociations à l'OMC, en conduisant nos partenaires à durcir leurs exigences, et de fragiliser la capacité de l'Union européenne à défendre ses intérêts ;

Considérant que l'enjeu central des négociations en cours est d'obtenir la reconnaissance de la diversité des modèles agricoles régionaux à l'OMC et de contribuer au renforcement de l'agriculture vivrière des pays en développement ;

Considérant que le projet d'accord sur les modalités agricoles présenté le 12 février 2003 par le président du comité de l'agriculture de l'OMC, M. Stuart Harbinson, propose la suppression complète des subventions à l'exportation, sans prendre en compte l'impact international des politiques américaines de soutien interne, telles que les prêts de commercialisation, dits « marketing loans », ou encore l'aide alimentaire variable aux pays en développement ;

Considérant que les mesures envisagées conduiraient à la remise en cause du principe de « préférence communautaire » ainsi que des avantages accordés par l'Union européenne aux pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique ;

Considérant, en conséquence, que les modalités de négociation ne sauraient être discutées à partir d'un document aussi déséquilibré ;

Sur la proposition de modalités des négociations agricoles de la Communauté européenne :

1. Demande à la Commission européenne de respecter le mandat de négociation arrêté par le Conseil du 25 octobre 1999 qui s'appuie sur la réforme de l'Agenda 2000, laquelle a marqué un effort important pour adapter la PAC aux exigences de la société et au contexte international, alors que certains des partenaires, notamment les Etats-Unis, empruntaient à l'OMC la voie inverse en accroissant leurs engagements budgétaires en faveur de l'agriculture, en supprimant toute maîtrise de la production et en mettant en œuvre des mécanismes exerçant une pression à la baisse des prix mondiaux, néfaste tant pour les pays importateurs que pour les exportateurs traditionnels.

2. Déplore que les offres d'engagement chiffrées utilisent de manière imprudente tout le crédit de négociation dont dispose l'Union européenne suite à la réforme de l'Agenda 2000, au point de ne plus lui laisser aucune marge de négociation si ses partenaires durcissent leurs exigences.

3. Appelle l'Union européenne à obtenir de ses partenaires, sans nouvelle concession de sa part, des contreparties équivalentes à ses propres offres, les Etats-Unis devant s'engager en adoptant comme référence le volume des aides accordées avant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi agricole américaine.

4. Estime que les propositions de réduction de la protection tarifaire pourraient menacer la préférence communautaire pour les organisations communes de marché et qu'il est nécessaire de conserver une certaine souplesse dans la diminution des tarifs douaniers, en particulier dans les secteurs non réformés de la PAC.

5. Approuve la suppression, par le Conseil des ministres de l'Union européenne, de la référence à l'élimination de certaines subventions aux exportations, ainsi que son remplacement par une formule sur le retrait progressif de celles-ci par toutes les parties, conformément à la déclaration adoptée par la conférence ministérielle de l'OMC à Doha le 14 novembre 2001.

6. Demande un encadrement strict des activités des sociétés commerciales d'Etat de certains pays et de leurs privilèges à l'exportation.

7. Regrette qu'en matière de soutien interne la proposition de négociation ne prévoie pas de soumettre les prêts de commercialisation des Etats-Unis aux disciplines applicables aux subventions aux exportations.

8. Approuve la proposition de maintenir la « boîte bleue », qui regroupe les aides liées à un programme de maîtrise de la production, et de proroger la « clause de paix », qui protège ces aides de toute contestation devant l'organe de règlement des différends de l'OMC, et exige néanmoins une meilleure valorisation des efforts de maîtrise de la production, assortie de mesures efficaces de contrôle des importations.

Sur le projet d'accord sur les modalités agricoles rendu public le 12 février 2003 par le président du comité de l'agriculture de l'OMC :

9. Approuve le régime spécial proposé pour les productions agricoles indispensables à la sécurité alimentaire des pays en développement.

10. Regrette la faible prise en compte de l'accès privilégié offert par l'Union européenne à certains pays en développement ainsi que des règles environnementales et sanitaires auxquelles l'agriculture de certains partenaires est soumise.

11. Observe que le projet d'accord présenté par le président du comité de l'agriculture de l'OMC, M. Stuart Harbinson, propose la suppression totale des subventions à l'exportation, sans prendre en compte l'impact international de politiques de soutien telles que les prêts de commercialisation et l'aide alimentaire variable accordée aux pays en développement par les Etats-Unis.

12. Appelle à l'ouverture de discussions approfondies sur les distorsions commerciales générées par l'ensemble des politiques américaines de soutien interne, dont le volume par agriculteur n'a cessé de croître au cours des six dernières années.

Sur les objectifs de long terme des négociations agricoles :

13. Estime que l'OMC a pour seul rôle de réguler les effets des politiques agricoles sur le commerce international sans poser une interdiction de principe de ces dernières.

14. Juge nécessaire une révision de l'article 20 de l'accord sur l'agriculture signé le 15 avril 1994, afin d'instituer, au sein des règles commerciales multilatérales, une exception agricole fondée sur le caractère spécifique de cette activité et l'impérieuse nécessité d'assurer à tout pays sa sécurité alimentaire.

15. Estime que la reconnaissance de cette exception agricole exige, d'une part, la mise en place d'un mécanisme international de régulation des marchés agricoles respectant la diversité des modèles agricoles et, d'autre part, le maintien de protections tarifaires reflétant le surcoût qu'imposent aux agriculteurs les exigences de qualité et de sécurité alimentaire.

16. Demande à l'Union européenne de conduire le combat en faveur de la préservation de la diversité des agricultures et de nouer dans ce but une alliance avec les pays en développement à faibles revenus et à déficit alimentaire souhaitant protéger leurs agricultures vivrières dans un cadre national ou régional.

17. Demande à la Commission européenne d'encourager les pays en développement à se regrouper au sein d'ensembles régionaux pour assurer leur autosuffisance alimentaire et, dans ce but, d'obtenir que ces pays, identifiés par des critères objectifs et internationalement reconnus, soient autorisés par l'OMC à mettre en place des préférences agricoles régionales spécifiques.

A Paris, le 2 avril 2003.

Le Président,

Signé : Jean-Louis DEBRÉ.

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