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Assemblée nationale

Commission élargie

vendredi 7 novembre 2008

Séance de 15 heures
Commission des finances, de l'économie générale et du Plan
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Présidence de M. Didier Migaud, Président,
et de M. Jacques Alain Bénisti, suppléant M. Jean-Luc Warsmann, Président

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2009

GESTION DES FINANCES PUBLIQUES ET DES RESSOURCES HUMAINES
FONCTION PUBLIQUE
RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE
COMPTES SPÉCIAUX : PENSIONS,
GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L’ÉTAT,
PRÊTS ET AVANCES À DES PARTICULIERS OU À DES ORGANISMES PRIVÉS

La réunion de la commission élargie commence à quinze heures.

M. le président Didier MigaudMonsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, monsieur le secrétaire d’État chargé de la fonction publique, je suis heureux, avec M. Jacques Alain Bénisti, de vous accueillir et je vous prie d’excuser M. Jean-Luc Warsmann, président de la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

Nous sommes réunis en commission élargie afin de vous entendre sur les crédits de deux missions : « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » et « Régimes sociaux et de retraite ». Les crédits de plusieurs comptes spéciaux seront également soumis à discussion commune.

Je rappelle que la procédure des commissions élargies tend à favoriser des échanges directs et aussi vivants que possible entre les ministres et les députés, et, mes chers collègues, que les projets de rapport sont à votre disposition dans cette salle.

Je propose que les rapporteurs fassent dès à présent part de leurs observations générales et des questions qu’ils souhaitent poser aux ministres. Au demeurant, chacun sait que la tâche des rapporteurs ne consiste pas seulement à intervenir à l’occasion de l’examen des crédits : leur travail se fait tout au long de l’année, en lien avec les ministres concernés et leurs services. Avec mon collègue Jacques Alain Bénisti, je veux saluer ce travail.

M. Thierry Carcenac est notre rapporteur spécial pour les programmes « Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public » et « Facilitation et sécurisation des échanges » de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », et il supplée MM. Patrick Lemasle et Michel Vergnier, rapporteurs spéciaux pour la mission « Régimes sociaux et de retraite » et pour le compte spécial « Pensions ».

M. Pierre-Alain Muet est rapporteur spécial pour les programmes « Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État » et « Conduite et pilotage des politiques économique et financière ».

M. Georges Tron est rapporteur spécial pour le programme « Fonction publique », M. Bernard Derosier, rapporteur pour avis de la Commission des lois pour la « Fonction publique », et M. Yves Deniaud, rapporteur spécial pour le programme « Entretien des bâtiments de l’État » et pour les comptes spéciaux « Gestion du patrimoine immobilier de l’État » et « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ».

M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial de la Commission des finances, de l’économie générale et du plan pour les programmes « Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public » et « Facilitation et sécurisation des échanges » de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines ». Les crédits du programme 156, « Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local », sont de 8,3 milliards d’euros en autorisations d’engagement. Compte tenu des contraintes budgétaires actuelles, ces crédits n’augmenteront que faiblement, voire régresseront pour certains d’entre eux.

Ainsi, les dépenses de personnel, qui représentent 83 % des crédits du programme, augmentent de 1,9 %, mais les effectifs diminuent dans la même proportion en équivalents temps plein. Cette réduction des effectifs devrait d’ailleurs s’accélérer jusqu’en 2011.

Alors que les investissements dans les projets informatiques COPERNIC et HÉLIOS sont aujourd’hui presque entièrement engagés, le budget est appelé à financer la nouvelle direction générale des finances publiques, qui doit réorganiser et concentrer son réseau tout en harmonisant la rémunération des agents, qu’il s’agisse des traitements ou des indemnités.

J’observe enfin que la performance relative à la gestion publique territoriale stagne, de même que celle ayant trait à la qualité comptable.

J’aborderai quatre points : la DGFIP, les moyens en personnel, les moyens en informatique et le contrôle de la fraude fiscale.

La création de la direction générale des finances publiques, en avril 2008, procède de la fusion de la direction générale des impôts et de la direction générale de la comptabilité publique. Un nouveau directeur général, M. Parini, a été nommé et sera assisté de trois directeurs. Cette direction a quatre objectifs prioritaires, qui sont exposés dans le rapport. Le projet annuel de performance affiche désormais neuf objectifs, dont le premier est « Réussir la fusion ». Il comporte trois indicateurs qui suivent le niveau de déploiement du guichet local unifié, le nombre de directions locales des finances publiques et les services rendus aux collectivités territoriales, cela jusqu'à la fin du déploiement, prévue en 2012.

Un point positif est que ce programme suit les préconisations de la Cour des comptes, qui proposait en mai 2007 la création d'un indicateur de grande réforme. Un regret cependant : aucune sous-action budgétaire ne permet de suivre les surcoûts momentanés de la mise en œuvre de la fusion. La Cour a d’ailleurs dénoncé cette méconnaissance. A-t-on une idée, monsieur le ministre, des implications de cette fusion, compte tenu notamment des services qui seront mis en place durant cette période transitoire jusqu’en 2012 ?

Pour ce qui concerne les moyens en personnel, avec la suppression nette de 2 434 ETPT en 2009, le programme 156 contribue à hauteur de 7,9 % à la réduction des postes inscrits dans le budget général de l'État pour 2008, alors qu'il ne représente que 5,9 % des effectifs totaux. Le non-remplacement avoisine les 60 % des départs à la retraite.

Quel sera le rythme de la réduction des effectifs en 2010-2011, compte tenu de la nécessité de sauvegarder les compétences dans certains secteurs et, en termes de management, de préserver le climat social ?

On constate également une réduction massive de la catégorie C, ce qui peut s’expliquer par l’informatisation, mais cette fusion ne s’accompagne pas d’une diminution de la catégorie A+, qui croît alors que des bureaux sont supprimés dans l’administration centrale et ailleurs.

Les moyens informatiques accusent, à la fin du déploiement des programmes COPERNIC et HELIOS, une baisse des crédits d’investissement, mais les dépenses de fonctionnement informatique sont relativement importantes, représentant près de 22 % du total.

Nous souhaiterions connaître le montant et la cause des importants reports de crédits dérogatoires pour 2009. De fait, alors que COPERNIC a toujours été présenté comme un système informatique dont le coût, sur les neuf années de son déploiement, ne devait pas dépasser les 911,5 millions d’euros de coûts d’investissement, la Cour des comptes parvient à un coût total de 1,8 milliard d’euros. La transparence est donc moindre pour COPERNIC que pour HELIOS.

Pour le projet SIRHIUS, dans le domaine des ressources humaines, un montant de l’ordre de 62 millions d’euros est prévu pour la période 2009-2011. Cependant, au vu des réponses aux questionnaires, il semble que ce programme manque quelque peu de transparence et de coordination.

Le contrôle de la fraude fiscale, chiffrée par le Conseil des prélèvements obligatoires de mars 2007 entre 29 et 49 millions d’euros, est une nouvelle priorité du programme, mais sans action dédiée ni création d’indicateurs spécifiques. Des révélations relatives à la fraude dans les paradis fiscaux, comme au Lichtenstein, ont eu lieu ces derniers mois, et vous avez, monsieur le ministre, déjà évoqué ce sujet devant nous, déclarant que les moyens du contrôle fiscal étaient sanctuarisés. Cependant, nous n’avons pas les moyens de vérifier que c’est bien le cas ni d’assurer le suivi.

Vous avez également indiqué votre intention de mettre en place un service national judiciaire fiscal. Où en sont vos réflexions en la matière ? Je rappelle que, le 4 novembre 2008, le commissaire européen à la fiscalité, M. Laszlo Kovács déclarait qu’il fallait intensifier la lutte contre l’évasion et la fraude fiscale.

S’agissant de l’objectif n° 5, relatif à la maîtrise des coûts de gestion des administrations financières, les pourcentages des taux d'intervention décroissent à l’exception, répétée, du taux d'intervention sur les produits locaux. Comment expliquer la dégradation de cet indicateur en soi et au regard des autres taux d'intervention ?

Alors que les coûts de gestion des impôts devraient progressivement se réduire, sous l’effet conjugué de l’informatisation et de la fusion des directions donnant naissance à la DGFIP, on constate que le coût de gestion des recettes douanières au mieux stagne et que celui des produits locaux augmente. Toutes ces activités bénéficient pourtant de développements technologiques et informatiques qui devraient permettre des gains de productivité.

Comment se fait-il que le coût de gestion des dépenses de l'État soit à la hausse sur la période 2008 à 2011, alors que les dépenses du secteur public local sont en augmentation en 2008 ? On observe là encore une opposition entre les prévisions de taux d'intervention des dépenses de l'État et celles du secteur public.

Quant à l’objectif n° 6, ne révèle-t-il pas une certaine démission quant aux indicateurs de suivi de la qualité comptable ? En quoi la fiabilisation des processus comptables pourrait-elle retarder l'évolution d'un dispositif de maîtrise des risques ?

Comment se fait-il que les dépenses d'affranchissement informatique connaissent dans certaines actions, notamment la fiscalité des PME, une augmentation de plus de 3,5 % alors que la dématérialisation qui se développe devrait contribuer à réduire ces coûts ? Ne faudrait-il pas renégocier les marchés d'affranchissement ?

Concernant le programme 302, « Facilitation et sécurisation des échanges », qui représente une partie des activités de la douane, les masses sont moins importantes, puisque la demande de crédits s’élève à 1,5 milliard en crédits de paiement. Malgré une réduction de 2 % des effectifs, il n’est pas prévu d’augmenter les crédits de personnel. Par ailleurs, des crédits d’investissement importants ont été réservés pour renouveler les équipements de surveillance, notamment le parc aéronaval, et pour achever le développement de l’application de dédouanement automatisé Delta qui, en simplifiant la dématérialisation du dédouanement, vise à reconquérir le traitement du fret international. C’est un enjeu pour l’emploi et le commerce extérieur, et il importe d’aller plus avant en la matière.

Des mesures et dispositifs sont adoptés dans le cadre européen pour aplanir les obligations des entreprises, mais ce programme est peu mis en perspective avec l’environnement économique et commercial, ce qui affecte la mesure de son efficacité et de sa performance.

Quelles sont, par ailleurs, les initiatives lancées dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne pour lutter contre la contrefaçon en particulier via Internet ?

Il semblerait que la direction générale des douanes éprouve des difficultés pour financer en 2008 ses ETPT, malgré la mise à disposition de sa réserve de précaution sur les crédits du titre 2, et que l'exécution 2008 sera tendue. Quelle en est la raison ? Comment se fait-il par ailleurs que les agents de la douane cumulent dans leur compte épargne temps un nombre de jours sensiblement supérieur à celui des autres agents du ministère – 19 jours contre 11 ? Réaliseraient-ils des heures supplémentaires que le ministère devrait leur payer ?

Quant aux laboratoires communs mis en place par la douane et la DGCCRF, il serait souhaitable de disposer de plus d’informations concernant les prévisions de dépenses de personnel. Les dépenses de fonctionnement et d'investissement de ces laboratoires communs figurent dans le programme 218 – « Conduite et pilotage de la politique économique et financière » –, mais où sont inscrites les dépenses de titre 2 de ces laboratoires ?

J’en viens à la réforme des opérations commerciales. À ce jour, la centralisation des services comptables au niveau de la recette régionale est-elle achevée ? Combien de bureaux ont-ils vu leurs services de comptabilité et de recouvrement migrer vers une recette régionale ? La première phase du cahier des charges de cette réforme visant à repérer les bureaux qui peuvent répondre de manière optimale à l'ensemble des fonctions locales est normalement achevée. À l'issue de cette phase, combien de bureaux vont-ils être fermés et selon quelles caractéristiques ?

Permettez-moi enfin de vous demander, monsieur le ministre, au nom d’un droit de suite que j’invoque en tant qu’ancien rapporteur du budget annexe des monnaies et médailles, ce qu’il en est de la restitution de la parcelle dite « de l’An IV » par la Monnaie de Paris à l’Institut de France. S’il est compréhensible que vous ayez pris des engagements pour cette restitution et indiqué des délais de mise en œuvre pour permettre une mission d’expertise, la question de l’investissement se pose d’une manière particulièrement nette dans une période difficile. La création de l’amphithéâtre envisagé est coûteuse et, des trois signataires d’un courrier sur cette question – la ministre de l’économie et des finances, vous-même, monsieur le ministre, et le ministre de l’éducation nationale –, il semble que ce soit ce dernier qui doive supporter le coût de ce projet. Compte tenu de la complexité technique de l’opération, peut-être la durée des baux prévus est-elle trop courte.

Les organisations syndicales, qui m’ont informé de ces questions, soulignent que l’établissement public industriel et commercial des Monnaies et médailles se remet sur les rails. Or, nous n’avons toujours pas de réponse à la question de savoir quel avait été le montant de la dotation à cet établissement. Il serait pourtant intéressant de savoir de quels moyens un tel établissement a besoin pour fonctionner et quel pourrait être son avenir.

M. Pierre-Alain Muet, rapporteur spécial de la Commission des finances, de l’économie générale et du plan, pour les programmes « Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État » et « Conduite et pilotage des politiques économique et financière ». Je concentrerai mon intervention sur la RGPP, avant d’évoquer le projet CHORUS.

Un an après son lancement, la RGPP ne m’apparaît pas à la hauteur des enjeux de la modernisation de l’État. Elle m’inspire six remarques.

D’abord, l’objectif de non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux me semble avoir conduit à un dévoiement de la politique de réforme de l’État : la RGPP aurait dû être une réflexion sur les missions de service public et sur les évolutions à apporter, sans être ainsi contrainte par cet objectif quantitatif. Cette suspicion généralisée à l’égard des fonctionnaires a été fortement ressentie par eux ainsi que par les chefs d’équipe de la RGPP. L’un d’entre eux me disait : « Il est extrêmement difficile de dialoguer avec l’administration quand on part du principe de non-renouvellement d’un fonctionnaire sur deux, même s’il y a la promesse de rétrocéder la moitié des économies réalisées ».

Ensuite, la culture du secret a conduit à un gaspillage de la réflexion publique. La première condition pour réussir une réforme, c’est la transparence, donc la publication des travaux. Or là encore, les personnes que j’ai auditionnées ont été claires : « Le fait qu’aucun document n’ait circulé a entretenu les fantasmes », a dit l’un ; « Tout ce qui va mal dans l’administration est maintenant attribué à la RGPP », a souligné un autre ; « Le fait de savoir que le document sera publié rend plus attentif au contenu des mesures », a indiqué un troisième. Au sein de la RGPP, les vingt équipes d’audit ont généralement mobilisé quatre ou cinq fonctionnaires ainsi qu’un consultant extérieur, pendant dix mois en moyenne, durée beaucoup plus longue que celle de la plupart des missions demandées aux corps d’inspection : il est vraiment dommage que les résultats de ce vaste travail n’aient pas été publiés. Il eût été préférable, monsieur le ministre, de vous inspirer de la démarche conduite par votre prédécesseur, qui avait systématiquement publié les audits de modernisation.

Troisième remarque : on ne réforme pas sans concertation avec les citoyens ni appropriation de la réforme par les agents publics. À cet égard, je ne suis pas très convaincu par une réforme conduite uniquement sous la houlette des cabinets du Premier ministre et du Président de la République. Le dialogue et la concertation ont été pratiqués dans tous les pays qui ont conduit des réformes ambitieuses de l’État ; en France, non seulement il a fallu reculer sur la suppression de la carte de famille nombreuse, mais le Président de la République a renvoyé à une date indéterminée toutes les RGPP concernant les politiques d’intervention. Que deviennent-elles, monsieur le ministre ?

Le Gouvernement a beaucoup fait référence à la politique canadienne : il est vrai que, dans une première phase, certains ont pu à cet égard parler de « coupes à la hache » dans les dépenses publiques et que le gouvernement canadien s’est lui aussi défaussé sur les collectivités locales. L’effet de cette politique sur la réduction du déficit a néanmoins été plus visible que chez nous. Quoi qu’il en soit, dans une deuxième phase, après que l’on se fut aperçu que cette démarche démotivait les fonctionnaires et en avait conduit beaucoup parmi les plus jeunes à quitter l’administration, le Canada est revenu à une politique centrée sur la concertation. Si l’on veut s’inspirer du modèle canadien, il faut aller jusqu’au bout.

Les autres pays qui ont conduit des politiques du type de la RGPP l’ont fait avec des Livres blancs et en lançant des discussions. En Australie, par exemple, chaque haut fonctionnaire en charge de l’un des chantiers a animé des tournées en régions, des débats, des colloques ; la réforme a pris plus de trois ans. L’expérience des pays nordiques me paraît à peu près identique.

Ma quatrième remarque concerne le recours systématique aux cabinets d’audit privés, qui ne me paraît guère justifié, et mériterait en tout cas d’être évalué. Je ne suis pas opposé par principe au recours aux cabinets privés, qui peuvent apporter un regard extérieur et une compétence appréciables, mais le coût de ce recours me paraît excessif dans le cas de la RGPP. Voici, là encore, ce que disait un chef d’équipe : « L’apport des consultants privés a été quasiment nul sur le fond. On a donc payé cher une formation accélérée, que les cabinets en question pourront faire valoir après ».

Sur le plan financier, les économies attendues de la RGPP – sept milliards sur trois ans – sont une goutte d’eau dans l’océan des déficits.

Enfin, dernière remarque, la RGPP ne comble pas l’absence d’une politique d’évaluation. Celle-ci demeure le parent pauvre de l’action publique en France. Or une véritable révision des politiques publiques ne peut ignorer l’évaluation de ces politiques, même si le temps de l’évaluation est beaucoup plus long que celui de la RGPP. Il y a là une lacune qui n’est pas comblée, même si l’évaluation figure dans l’intitulé d’un secrétariat d’État. L’efficacité des différents dispositifs – audit de modernisation, RGPP – mériterait elle-même d’être évaluée.

En ce qui concerne CHORUS, je renouvelle la remarque que j’avais faite l’an dernier : il aurait été utile de disposer d’un indicateur sur l’état d’avancement du projet et sur son coût. J’ai cru comprendre qu’il y aurait un décalage de près d’un an : il faut nous éclairer sur ce délai. Concernant le coût, la Cour des comptes mentionne un dérapage, mais il est difficile d’en avoir une idée précise, le Gouvernement nous ayant toujours donné une évaluation partielle de ce coût. Là encore, nous aimerions être éclairés.

Par ailleurs, la gouvernance de CHORUS me paraît un peu trop technique ; il manque sans doute un pilotage politique.

Je terminerai en rendant hommage à la qualité des agents. Nous avons en France une fonction publique remarquablement formée et performante, que de nombreux pays nous envient ; et autant je suis partisan d’une gestion rigoureuse des finances publiques, autant je trouve absurde de conduire la réforme de l’État avec comme seul objectif le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux : c’est à la fois choquant et inefficace.

M. Bernard Derosier, rapporteur pour avis de la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour le programme « Fonction publique ». Dans la bouche des représentants des fonctionnaires que j’ai auditionnés pour préparer cette réunion, les questions concernant le pouvoir d’achat, les mesures salariales, les effectifs revenaient régulièrement. J’en reparlerai dans la seconde partie de mon propos, après avoir évoqué les objectifs et les actions du programme « Fonction publique ».

Les objectifs proposés sont au nombre de trois : promouvoir une nouvelle gestion des ressources humaines dans la fonction publique d’État ; optimiser la formation des fonctionnaires ; rendre optimale la gestion des prestations d’action sociale. L’année dernière, on prévoyait d’atteindre la cible de 100 % en 2010 sur l’ensemble des indicateurs. Le projet de loi de finances retarde l’échéance à 2011. Quelles sont les raisons de ce décalage d’un an ? Faut-il s’attendre chaque année à un report ?

Le premier objectif tend à promouvoir une nouvelle gestion des ressources humaines. Sa mesure repose sur deux indicateurs qui témoignent de l’ampleur du chantier : le degré de mise en œuvre d’une stratégie de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et la part de l’encadrement concernée par le dispositif de rémunération à la performance. Un troisième indicateur, dans le projet de loi de finances pour 2008, était relatif au nombre de corps de fonctionnaires relevant de l’État concernés par les mesures envisagées. Pourquoi a-t-il disparu, alors que la fusion des corps reste un sujet d’actualité ?

Le second indicateur concerné, relatif à la rémunération à la performance, devrait afficher un taux de 51 % de personnels concernés pour 2008 et de 75 % pour 2009, mais il recouvre des réalités diverses : ne conviendrait-il pas de distinguer les directeurs d’administration centrale, qui sont effectivement soumis au dispositif, et les autres cadres, qui ne sont que progressivement concernés par la démarche ? Le Gouvernement envisage-t-il d’étendre la rémunération à la performance à d’autres agents et aux fonctions publiques hospitalière et territoriale ?

Le deuxième objectif consiste à optimiser la formation. L’un des indicateurs porte sur la mise en œuvre du droit individuel à la formation, qui est désormais suivie par le biais du taux de réalisation du document d’orientation à moyen terme de la formation continue dans les ministères.

Il ressort de toutes nos auditions que beaucoup trop de demandes sont refusées, au prétexte soit du manque de crédits, soit du dysfonctionnement du service. Par ailleurs, l’indicateur relatif à la mise en œuvre de la reconnaissance des acquis de l’expérience professionnelle ne permet d’apprécier l’implication des ministères que de façon quantitative, et non qualitative. Est-il prévu de le faire évoluer en ce sens ?

Le troisième objectif concerne l’optimisation de la gestion des prestations d’action sociale interministérielle. L’un des indicateurs porte sur le pourcentage des restaurants inter-administratifs conformes aux normes d’hygiène et de sécurité en vigueur. La cible de 100 % n’est fixée que pour 2013. Ne serait-il pas possible d’aller plus vite ? Quant à l’indicateur du taux de pénétration des prestations CESU, il montre, s’agissant des gardes d’enfants, une lente montée en puissance du dispositif : le taux de pénétration n’est que de 55 % en 2008 et devrait atteindre 60 % en 2009. Le Gouvernement envisage-t-il une analyse approfondie des causes de ce retard, notamment financières ?

J’en arrive aux actions et, d’abord, à celle qui concerne la formation des fonctionnaires. Le montant des crédits de paiement alloués aux dépenses de personnel dans ce cadre s’élèvent à 500 000 euros – soit une baisse de 300 000 euros. L’objectif affiché est d’améliorer la qualité des formations dispensées, mais aucun indicateur ne permet de mesurer l’amélioration. La réduction des moyens humains alloués à la formation interministérielle est-elle compatible avec cet objectif ?

Quant à la seconde action, l’action sociale interministérielle, qui recouvre l’aide aux familles, l’aide aux retraités – qui correspond en un aide ménagère à domicile, AMD – et les aides au logement, elle soulève beaucoup d’inquiétudes. La convention relative à l’AMD arrive à échéance le 1er avril 2009, sans que l’on sache si elle sera renouvelée. La prestation va-t-elle disparaître ? Qu’envisage le Gouvernement pour faire face aux besoins croissants dans ce domaine ?

La compression des effectifs de la fonction publique reste affichée comme l’objectif prioritaire de la politique de gestion des ressources humaines de l’État : 30 627 emplois équivalent temps plein doivent être supprimés en 2009. Sachant que des recrutements seront nécessaires dans les années à venir du fait des départs en retraite, une connaissance précise des effectifs et des missions exercées est indispensable au contrôle parlementaire. Le Gouvernement compte-t-il élaborer un indicateur clair permettant d’apprécier la gestion prévisionnelle des emplois et des effectifs ?

Rendre le service public plus efficace est synonyme pour le Gouvernement d’économies d’emplois, et non de recherche de qualité du service rendu. La réduction de la fonction publique est ainsi présentée comme un objectif en soi, sans que soit posée au préalable la question des missions que l’État doit continuer à exercer ou abandonner. Sur quels critères objectifs de modernisation se fonde le Gouvernement pour décider de la suppression de 30 627 postes ? Dans un contexte de crise économique qui impose de sauvegarder l’emploi, un moratoire sur la suppression des postes ne serait-il pas opportun ?

L’octroi de subventions par les collectivités publiques aux mutuelles de fonctionnaires pose également problème : en juin 2006, le Gouvernement avait annoncé l’abrogation des dispositions correspondantes et engagé une réflexion, en liaison avec la Commission européenne, pour que les personnes publiques puissent contribuer au financement de la protection sociale complémentaire de leurs agents. Où en est-on de la négociation avec les partenaires sociaux ? Il faut que la réforme aboutisse dans de brefs délais afin de maintenir une aide des employeurs publics aux mutuelles.

Enfin, s’agissant de l’information relative aux salaires dans la fonction publique, aucun lien d’analyse n’existe alors que l’Observatoire de l’emploi public ne s’est pas réuni depuis au moins un an. Le Gouvernement envisage-t-il toujours de lui permettre d’aborder les questions salariales, afin d’avoir une connaissance plus globale des composantes des salaires et de leur évolution ?

M. Georges Tron, rapporteur spécial de la Commission des finances pour le programme « Fonction publique ». Aborder des questions aussi larges en quelques minutes relève de la gageure, mais je ferai de mon mieux…

En ce qui concerne les questions proprement budgétaires, la forte augmentation des crédits du programme « Fonction publique », qui passent de 223 à 456 millions, est due en grande partie aux crédits de l’action sociale – mais il ne s’agit en réalité que de jeux d’écriture et de changements de périmètres, dus, pour l’essentiel, à des renouvellements de marchés de prestations sociales. Le point fondamental concerne les aides ménagères à domicile : on passe d’un dispositif sans limite et sans condition de ressources, à une enveloppe fermée, qui ne sera attribuée qu’en dessous d’un certain plafond de ressources. Une telle rationalisation me paraît loin d’être incongrue.

Je suis en revanche très dubitatif, comme plusieurs autres parlementaires, pour ce qui est de la gestion de l’École nationale d’administration. La dotation de l’ENA a augmenté de 3,7 millions cette année, mais l’école, qui doit être assujettie au compte d’affectation spéciale « Pensions » et aligner son taux de cotisation sur celui de l’État – ce qui coûtera 5 millions au total – devra faire des économies sur le reste. Nous nous sommes souvent battus pour que ses dotations ne soient pas amputées, mais en contrepartie l’école, symbole de la République, se devrait d’être exemplaire. Or, par exemple, le contrat d’objectifs et de performance de l’ENA n’est toujours pas conclu, alors que les instituts régionaux d’administration en sont déjà à leur deuxième génération de contrats.

L’indicateur concernant la dépense consacrée à la formation initiale par l’ENA ne prend pas par ailleurs en compte, contrairement à celui des instituts régionaux d’administration, la totalité du coût, puisqu’il ne comprend que les coûts de fonctionnement et non d’investissement. Pourquoi les IRA sont-ils plus performants ? Et n’oublions pas la gestion pour le moins particulière par l’ENA de ses opérations immobilières, puisque la vente à la Fondation des sciences politiques des locaux de la rue de l’Université accroîtra la dette de l’État de 22 millions.

Il me semble en outre toujours indispensable de regrouper l’ensemble des crédits qui concourent à la fonction publique. La situation actuelle est contraire à l’esprit de la LOLF. Il faut rattacher au programme « Fonction publique » les crédits de personnel de la direction générale de l’administration et de la fonction publique, ce qui, non seulement, serait en conformité avec l’esprit de la LOLF, mais améliorerait la lisibilité du programme. Pourquoi, depuis quatre années que je pose la question, n’est-ce toujours pas le cas ?

J’en viens aux questions de fond relatives à la politique de la fonction publique.

En ce qui concerne la réduction des effectifs, je ne comprends même pas que l’on puisse encore entretenir des polémiques : la question est aujourd’hui totalement dépassée. Il en est ainsi de l’objectif de ne pas remplacer un départ à la retraite sur deux dans les effectifs de l’État. On pourrait gloser sans fin sur la question de savoir si la réduction de 30 529 ETP est ou non justifiée. Elle est en tout cas appliquée avec discernement, certains ministères voyant leurs effectifs diminuer, et d’autres augmenter – je pense notamment à celui de la justice. Dans mon rapport, j’ai surtout cherché à savoir ce que ce chiffre dissimulait.

Entre 1996 et 2006, on constate que les effectifs de la fonction publique d’État ont progressé en moyenne annuelle de 0,5 % par an. L’essentiel de cette hausse est à imputer à la croissance des établissements publics administratifs. Les effectifs des EPA ont en effet augmenté, en moyenne, de près de 4 % par an, contre 0,2 % pour ceux des ministères. Ces établissements ont ainsi contribué pour 66 % à la croissance des effectifs de la fonction publique d’État entre 1996 et 2006 – car ces effectifs ont augmenté, malgré les transferts générés par la décentralisation. On ne peut que se demander pourquoi, pendant tant d’années, on a laissé dériver les effectifs des établissements publics, de même qu’en matière immobilière on a laissé dériver la gestion par les EPA de leur patrimoine.

Je me réjouis donc que, pour la première fois cette année, et conformément à l’article 64 de la loi de finances pour 2008, le projet de loi de finances pour 2009 fixe un plafond des emplois des opérateurs. L’annexe jaune sur les opérateurs de l’État estime que les emplois sous plafond augmenteront de près de 49 000 ETP, mais diminueront de plus de 1 100 à périmètre constant.

Le rapport rappelle à cet égard certains chiffres intéressants. Ainsi, après la prise en compte des transferts de décentralisation sur la période 2006-2009 – qui concernent 116 180 ETP travaillés –, la baisse des effectifs de l’État s’établit en réalité à 110 010 emplois entre 2006 et 2009, soit beaucoup moins que ce qu’affiche le Gouvernement. En effet, simultanément, l’augmentation cumulée des effectifs des opérateurs est de près de 80 000 emplois sur la même période. Si l’on tient compte de cette évolution, on s’aperçoit donc que les effectifs de l’État et de ses opérateurs ne sont réduits que de 31 000 emplois entre 2006 et 2009. Pourquoi la règle de non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux n’a-t-elle pas été, jusqu’à présent, pleinement appliquée aux opérateurs ?

Par ailleurs, quelles sont les actions entreprises pour rendre les décomptes d’emploi des opérateurs plus fiables ? En effet, pour l’État, le décompte s’établit en équivalents temps plein travaillé, et, pour les opérateurs, en équivalents temps plein. Ne pourrait-on pas disposer d’une présentation moins opaque dans l’annexe jaune ? Enfin, question fondamentale, comment le Gouvernement s’assurera-t-il que les opérateurs respecteront les plafonds d’emploi ?

S’agissant du coût des réformes, nous devons réfléchir aux moyenx de rendre un service public de meilleure qualité à un coût modéré, voire réduit. Dans ce domaine, l’approche politique doit passer derrière l’approche financière.

Malgré la réduction des effectifs, les dépenses de personnel de l’État ne diminuent pas : elles représenteront 119,8 milliards d’euros en 2009. Le non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux en 2010 et 2011 devrait permettre d’aboutir en quatre ans à une économie totale brute de 3,1 milliards d’euros. Mais il ne faut pas oublier que le Gouvernement a pris l’engagement de rétrocéder aux fonctionnaires la moitié des économies réalisées. L’économie nette serait donc de 1,6 milliard d’euros.

Si j’adhère totalement à la politique gouvernementale, certains points doivent être soulignés. Ainsi, si l’on peut penser que les opérations de regroupement de différentes directions doivent générer des économies, le résultat des études auxquelles nous avons procédé nous laisse plus dubitatifs. Par exemple, alors que les effectifs de la nouvelle direction générale des finances publiques, après fusion de la direction générale des impôts et de la direction générale de la comptabilité publique, baissent de plus de 6 000 entre 2006 et 2009, les coûts de personnel augmenteront encore de 1,9 % en 2009, en raison de l’harmonisation des régimes statutaires et indemnitaires et de l’octroi d’une prime annuelle de 350 euros à tous les agents. Une telle augmentation était nécessaire, mais elle montre que des opérations de cette nature engendrent des surcoûts, au moins dans un premier temps. Je précise que ces chiffres ne sortent pas de mon imagination, mais m’ont été fournis par le directeur concerné.

Quoi qu’il en soit, dans tous les ministères, les mouvements de fusion de corps et de réforme des carrières donneront lieu une harmonisation vers le haut. Pour l’instant, nous ne sommes donc pas dans une logique de réduction de la dépense permise par la réduction des effectifs, mais dans celle d’une reconstruction de la structure administrative, laquelle, on le sait, entraîne des coûts supplémentaires. Dans ce registre, je pourrais également citer l’exonération des charges fiscales et sociales pour les heures supplémentaires, la monétisation des jours épargnés sur les comptes épargne-temps, ou les conséquences immobilières des réformes.

Enfin, un des points fondamentaux de la politique gouvernementale concerne la mobilité, pour laquelle un projet de loi, d’ores et déjà discuté au Sénat, devrait être mis à l’ordre du jour de notre assemblée. Je n’imagine pas qu’un dispositif aussi ambitieux ait pu être élaboré sans que l’on tente d’en mesurer le coût. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous informer sur le coût des réformes dans chaque ministère, en particulier pour les crédits de personnel ? Tout en faisant cette demande, je répète, pour qu’il n’y ait pas la moindre ambiguïté à ce sujet, que j’approuve totalement le principe de ces réformes.

M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial. M. Vergnier, retenu dans sa circonscription par une réunion avec le préfet au sujet de la nouvelle carte militaire, s’excuse de ne pas pouvoir présenter lui-même son rapport sur certains régimes spéciaux de retraite et sur les pensions des fonctionnaires de l’État, dont le budget représente 55 milliards d’euros, soit près de 20 % des 278 milliards de dépenses nettes inscrites au budget de l’État. M. Vergnier avait fait part, l’année dernière, des difficultés qu’il avait éprouvées à obtenir dans les délais des réponses à ses questions. Il est satisfait de constater cette année une amélioration dans ce domaine.

Ce budget mérite une attention d’autant plus importante que, derrière l’énormité des sommes en jeu et le caractère ardu des mécanismes de financement, on peut constater des mouvements de crédits étonnants. En y regardant de plus près, on s’aperçoit en effet que l’État tend à reporter sur d’autres les charges qui devraient lui incomber afin d’économiser quelques millions sur une ligne ou sur une autre. Ainsi, alors que le Gouvernement s’est flatté de présenter le budget le plus sincère depuis quinze ans, l’étude attentive des crédits concernés nous montre qu’il n’en est rien.

L’État transférant à d’autres les charges qui devraient être les siennes, les questions porteront sur ses relations avec les différentes parties prenantes au financement des régimes de retraite.

La loi du 21 août 2003 a prévu une diminution progressive du taux de la surcompensation entre régimes spéciaux de retraite. Ce taux doit diminuer de 3 % par an jusqu’en 2012, date à laquelle cette compensation spécifique aura disparue. Les contributeurs, au premier chef la CNRACL, en seront soulagés d’autant. Or aucun décret n’a été pris pour prévoir cette diminution à partir de 2009. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous en dire plus à ce sujet ?

En ce qui concerne la mission « Régimes sociaux et de retraite », l’État doit toujours plus de 250 millions d’euros à la caisse de retraite de la SNCF. M. Vergnier avait appelé votre attention sur ce point l’an dernier, mais il constate que rien n’a été fait. Je vous pose donc à nouveau la question : quand et comment cette dette va-t-elle être apurée ?

Le niveau de la trésorerie du compte d’affectation spéciale « Pensions » s’élevait à quelque 350 millions d’euros au 31 décembre 2007. Aux termes des dispositions prévues dans la loi de finances pour 2007, le CAS aurait dû être abondé début 2008 pour atteindre le seuil de 800 millions d’euros, seuil qui garantit le bon fonctionnement du compte. Or, cela n’a pas été le cas. Le Gouvernement compte-t-il respecter la loi – nous n’imaginons pas qu’il puisse en être autrement – et reconstituer le fonds au 31 décembre 2008 ?

Enfin, le versement des contributions exceptionnelles de France Télécom et de La Poste a été anticipé. Celle de France Télécom verra son montant gonflé de 100 millions d’euros en 2009 et 2010, ce qui conduit à minorer de 200 millions d’euros la contribution pour 2011. Celle de La Poste sera totalement versée en 2009, en avance d’un an sur l’échéancier prévu. Comment assurer l’équilibre du compte après 2009 ? Ces deux entreprises seront-elles, à nouveau, mises à contribution ?

M. Yves Deniaud, rapporteur spécial de la Commission des finances, de l’économie générale et du plan, pour le programme « Politique immobilière de l’État » et pour les comptes spéciaux « Gestion du patrimoine immobilier de l’État » et « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés »La politique immobilière de l’État ne fait l’objet d’un contrôle du Parlement que depuis peu. Mais depuis le premier rapport de la mission d’évaluation et de contrôle de la Commission des finances en 2005 sur le sujet, cette politique a été suivie de près : un rapport spécial et un deuxième rapport d’étape de la MEC ont été présentés en juin dernier. Nos collègues sénateurs ont également accompli un travail important sur le même thème.

Devant cette mobilisation du Parlement, le Gouvernement a fourni un effort indéniable, tout particulièrement vous-même, monsieur le ministre, pour avancer dans la réforme avec l’abrogation annoncée du régime de l’affectation des immeubles, l’extension du mécanisme des loyers budgétaires et la mise en place de France Domaine, organisme qui mérite d’être encore renforcé et professionnalisé. L’objectif est qu’à terme il n’y ait plus qu’un propriétaire unique, l’État, représenté par France Domaine, afin que chaque ministère ne se comporte plus comme le propriétaire exclusif des locaux qu’il occupe. Hélas, l’immense majorité des ministères et des hautes administrations opposent une forte résistance à cette réforme : j’aurai l’occasion d’en donner des exemples précis.

Le compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État » prévoit 1,4 milliard de recettes de cessions immobilières en 2009 – inutile de dire que l’état actuel du marché immobilier rend incertaine l’atteinte de cet objectif. Sur ce total, un milliard devrait provenir de la restructuration des sites militaires, somme qui reviendra intégralement au ministère de la défense. Ce dernier, je tiens à le souligner, a des projets de qualité aux montants crédibles, ce qui n’est pas le cas de tous les ministères.

La nouveauté cette année est que si 15 % des recettes de cessions sont toujours affectés au désendettement, seuls 65 % reviendront au ministère cessionnaire, 20 % étant mutualisés entre l’ensemble des ministères de façon à assurer une sorte de péréquation entre ceux ayant la chance de posséder un important patrimoine à forte valeur marchande et les autres. Les ministères, au demeurant assez nombreux, qui bénéficiaient d’un régime dérogatoire le conserveront. C’est le cas du ministère des affaires étrangères pour toutes ses opérations hors de France.

Notre souhait est que disparaisse totalement à terme le droit de retour. L’État doit être le propriétaire unique et déléguer la gestion de l’intégralité de son patrimoine à France Domaine, organisme professionnalisé qui exercera les droits et prérogatives du propriétaire, chaque ministère s’adressant à cet opérateur unique pour toute cession, acquisition, prise de bail et résiliation de bail.

Une autre difficulté tient à l’entretien insuffisant du patrimoine immobilier de l’État. Chaque ministère propriétaire de ses locaux en assurait jusqu’à présent l’entretien, si bien que selon la situation financière de chacun, cet entretien a été très inégal et pas toujours optimal. Je salue donc la création prévue l’an prochain d’un programme « Entretien des bâtiments de l’État », placé sous la responsabilité de France Domaine. C’est un premier pas intéressant. En effet, l’absence d’entretien annuel régulier conduit à terme à des rénovations lourdes, beaucoup plus coûteuses. Je ne citerai que l’exemple de l’immeuble Ségur-Fontenoy du ministère de la santé qui, ayant été négligé durant des décennies, a fait l’objet d’une réhabilitation qui a déjà coûté 175 millions d’euros, autant ou presque restant à engager, alors même que l’opération n’a fait l’objet d’aucune décision politique, n’émanât-elle que d’un simple ministre, ce qui est proprement scandaleux. Des engagements d’un tel montant devraient avoir l’aval du Premier ministre. En tout cas, voilà un exemple de ce qui ne doit plus jamais se reproduire.

Les crédits d’entretien se monteront à 77 millions d’euros en 2009, soit 12 % du montant total des loyers – budgétaires ou non – des différents ministères. Les professionnels estiment généralement qu’un ratio de 20 % des loyers est nécessaire pour financer un entretien convenable. À l’évidence, 77 millions pour entretenir un patrimoine se montant à quelque 50 milliards d’euros, c’est fort peu – sans parler de la mise aux normes induite par le Grenelle de l’environnement qui devrait coûter quelque 24 milliards d’euros pour l’ensemble du patrimoine immobilier de l’État. Vu les disponibilités budgétaires, peut-être mes petits-enfants ont-ils chance de la voir réalisée…

J’en viens aux trois ministères sur lesquels nous avons plus particulièrement concentré nos travaux. Tout d’abord, le ministère de la défense, duquel nous n’avons pas obtenu de réponses très précises. Il faudra suivre de très près ses opérations immobilières à partir de 2009, car les mouvements vont être considérables. Notre jugement sur les opérations envisagées est a priori positif, mais il faudra surveiller de très près leur exécution.

Au ministère des finances, la fusion de la direction générale des impôts et de la direction générale de la comptabilité publique aura des conséquences immobilières, sur lesquelles nous n’avons pas obtenu beaucoup de précisions. Nous ne relâcherons pas l’effort, mais d’après les éléments dont nous disposons, il semble qu’il n’y ait pas d’inquiétude particulière à nourrir. Je ne doute pas que le ministère, appelé à exercer sa tutelle sur France Domaine, veillera à ce que ces opérations immobilières soient irréprochables.

J’en viens au ministère de la justice – je reviendrai sur les conséquences de la réforme de la carte judiciaire lorsque je traiterai des schémas prévisionnels de stratégie immobilière. Pour l’heure, je m’en tiens aux trois missions de contrôle que j’ai effectuées sur des immeubles de ce ministère et à la politique de location de ce dernier. En effet, le ministère de la justice loue tous ses locaux, à l’exception du prestigieux immeuble de la place Vendôme et d’un seul autre.

Ses effectifs d’administration centrale ont crû rapidement ces dernières décennies, si bien qu’il a essaimé, hélas, autour de la place Vendôme, c’est-à-dire dans un des quartiers les plus chers de Paris. Et quand il a dû s’en éloigner, il a quand même tenu au « prestige » de ses locaux – le terme n’est pas de moi, mais figure dans ses propres documents. Le ministère a ainsi loué l’ancien siège de Canal Plus sur le front de Seine.

Quant au pôle financier du tribunal de grande instance de Paris, il a renouvelé en début d’année son bail rue des Italiens dans l’ancien immeuble du Monde. Ce bâtiment a été racheté en 2007 par un fonds de pension qui, six mois avant l’échéance du bail, a laissé au ministère de la justice le choix de quitter les lieux ou d’accepter une augmentation de loyer d’un tiers. Comme l’échéance n’avait pas été anticipée et qu’il n’existait pas de solution de rechange, le ministère a dû se résoudre à s’acquitter du nouveau loyer, très supérieur au prix du marché.

J’ajoute que le renouvellement de ce bail s’est fait alors que perdure le projet de construction, pour 800 millions, d’un immeuble regroupant tous les services du TGI de Paris – un véritable serpent de mer. En réalité, toute la gestion des baux du ministère m’a paru défaillante. La chancellerie a dépensé quelque 26 millions d’euros en loyers en 2007 pour ses seuls sites parisiens, et pour cinq de ces sites, les loyers versés sont supérieurs à 1 000 euros le mètre carré. Pourriez-vous me dire, monsieur le ministre, si France Domaine sera chargé de contrôler les baux des locaux de l’État et s’il aura les moyens de le faire ?

J’en viens aux schémas pluriannuels de stratégie immobilière – les SPSI - pour constater que les ministères n’ont pas tiré toutes les conséquences de la révision générale des politiques publiques. Sur seize ministères, seuls ceux de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur et de la recherche ont chiffré les réductions d’effectifs induites par la RGPP. Je donnerai à cet égard trois exemples particulièrement éloquents, le premier étant celui du ministère de l’écologie qui envisage, pour rassembler tous ses services, sur la base de ses effectifs actuels, de faire construire une tour à La Défense pour un coût supérieur à 700 millions. Est-il là vraiment dans son rôle ?

Quant au ministère des affaires étrangères, il prévoit d’utiliser l’ancien immeuble de l’Imprimerie nationale pour en faire un simple centre de conférences « ministérielles » pour des raisons de sécurité et au motif que le bâtiment doit héberger un effectif de 1 400 personnes.

M. Georges Tron, rapporteur spécial. Une idée véritablement scandaleuse !

M. Yves Deniaud, rapporteur spécial. Il est acquis que l’effectif, selon la RGPP, devrait être de mille personnes. Mieux vaudrait au moins prévoir en ces locaux un centre de conférences internationales, ce qui éviterait de devoir en construire un, à grand frais, dans l’aérogare des Invalides.

Manifestement, les SPSI doivent être actualisés pour tenir compte des conclusions de la RGPP.

Dernier exemple, celui du ministère de la justice, où la situation n’est pas plus satisfaisante. La chancellerie estime les dépenses liées à la réforme de la carte judiciaire à 385 millions en cinq ans. Dans le même temps, la restructuration n’entraînera aucune économie ni en fonctionnement ni en nombre de postes, tant s’en faut, puisque l’on va recruter des greffiers. De plus, il n’y aura pas de produits de cession, puisque les 200 sites abandonnés n’appartiennent pas à l’État, qui devra en revanche financer les extensions de locaux rendues nécessaires par les regroupements de tribunaux. L’ancien directeur de l’administration générale et de l’équipement de la chancellerie a estimé à 545 millions le coût prévisible de ces restructurations, mais chacun sait qu’en ces matières les prévisions sont le plus souvent dépassées.

M. Georges Tron, rapporteur spécial. Mes questions, monsieur le ministre, pourraient être résumées en un mot : pourquoi ?

Pourquoi, alors que depuis trois ans, avec le concours de votre prédécesseur puis avec le vôtre, nous avons entrepris une réforme de l’immobilier de l’État en tous points opportune, en est-on à patiner sinon à régresser ?

Pourquoi France Domaine doit-il se battre avec les ministères pour mener à bien la mission qui lui est assignée ?

Pourquoi s’emploie-t-on à fragiliser le Conseil de l'immobilier de l’État – le CIE - que j’ai l’honneur de présider, au mépris de la cause commune ?

Pourquoi le décret réformant le CIE tend-il à le dessaisir de ses compétences au bénéfice du Premier ministre, qui pourrait le saisir s’il le souhaite ? Nous avions pourtant mis au point un dispositif apte à bloquer des opérations immobilières inopportunes, et nous sommes garants de la cause que nous défendons tous. Qui, mieux que le CIE peut le faire, puisque c’est sa vocation ? Si le Conseil de l'immobilier de l'État venait à être vidé de sa substance, je proposerais au bureau de la Commission des finances de notre assemblée de reprendre le travail engagé, conformément aux nouveaux pouvoirs conférés au Parlement par la réforme constitutionnelle.

Par ailleurs, le pilotage de la politique immobilière de l’État respecte-t-il le schéma prévu par la loi de 2005 – un ministre responsable assisté d’un bras séculier, France Domaine ? Je le répète, ce dernier service, qui cherche à remplir sa mission, doit le faire dans des conditions extrêmement compliquées. Pourquoi ne menons-nous pas la réforme à son terme ? Pourquoi compliquer les choses en reprenant le droit de retour vers les ministères, que l’on pensait aboli ?

Pourquoi, enfin, ne pas appliquer au patrimoine immobilier des opérateurs les mêmes règles que celles qui valent pour le patrimoine de l’État ? Il est anormal qu’ils ne soient pas soumis au contrôle du Parlement. L’exemple de l’établissement public du grand Louvre est emblématique de cette dérive : il s’est installé dans un immeuble du Louvre des Antiquaires, à Paris, où le CIE avait refusé l’installation de la direction de la danse du ministère de la culture ! Il est inadmissible que les rapporteurs spéciaux et le CIE puissent empêcher une opération immobilière d’un ministère jugée inopportune et qu’un opérateur décide de s’installer là où il le souhaite.

Pourquoi ne pas décider d’une politique immobilière globale, portant non seulement sur les 50 milliards du patrimoine de l’État, mais aussi sur les 30 milliards du patrimoine des opérateurs ?

Je sais que vous êtes convaincu, monsieur le secrétaire d’État, du rôle majeur que le CIE doit jouer dans cette réforme à laquelle vous avez d’ailleurs contribué. Or, nous sommes dans une phase de retour en arrière : les ministères recouvrent des prérogatives qui ne devraient pas leur revenir. Si cela se confirmait, la MEC n’aurait fait que soulever un problème, sans qu’une réponse lui soit ensuite apportée – et ce n’est pas ce que nous espérions.

M. Michel Bouvard. Je voudrais réaffirmer mon soutien, ainsi que celui de la majorité, à la RGPP et à l’effort de rationalisation des effectifs de la fonction publique, l’objectif étant avant tout de rétablir nos finances – je le rappelle à l’intention de notre collègue Pierre-Alain Muet.

Une première série de questions portera sur les systèmes d’information de l’État, sujet auquel la mission d’information sur la mise en œuvre de la LOLF s’est déjà intéressé, et qui devrait faire l’objet d’un rapport de la Cour des comptes, à la demande de la Commission des finances.

Étant donné que les échéances initiales ne pourront pas être tenues, je voudrais savoir s’il existe aujourd’hui un nouveau calendrier. Alors que le déploiement du système Chorus devait être achevé en 2010, il est maintenant question qu’il entre seulement en vigueur à cette date. Il serait bon que chaque ministère puisse savoir quand le système sera opérationnel.

Pouvez-vous également nous indiquer comment vous comptez effectuer l’intégration des services administratifs dans Chorus ? Selon la Cour des comptes, le regroupement des fonctions « support » en région n’est pas prévu pour le moment.

Je m’interroge en outre sur le pilotage du système par consensus : ce principe vous semble-t-il toujours raisonnable ? Ne risque-t-il pas d’aboutir à une absence de décision ?

Qu’en est-il par ailleurs des retours sur investissement qui avaient été annoncés ? Seront-ils tenus ?

Enfin, comment comptez-vous favoriser la mise en œuvre d’une véritable comptabilité analytique, laquelle est nécessaire à l’évaluation des performances ?

Ma deuxième série de questions portera sur l’immobilier, objet d’une sévérité qui m’a semblé un peu excessive de la part de notre collègue Georges Tron.

La situation immobilière n’a certes rien de satisfaisante, mais je veux donner un coup de chapeau à Eric Woerth pour la façon dont nous avons progressé depuis un an et demi dans la connaissance des opérateurs, notamment en matière d’effectifs. Il reste un gros travail à effectuer en matière d’immobilier, mais je ne doute pas de la détermination du ministre.

Pour ma part, je m’étonne que des opérateurs puissent s’endetter afin d’investir dans des opérations immobilières en l’absence de schéma stratégique de l’État, dont le parc immobilier est relativement similaire.

Je m’interroge également sur la situation dans la région Île-de-France : alors que les autres préfets jouissent d’une vision globale du patrimoine immobilier de l’État, le préfet d’Île-de-France ne peut connaître que des services de l’État en région : il ignore s’il existe des locaux libres dans les services centraux, ce qui peut conduire au renouvellement de baux de plus en plus coûteux, alors que des solutions plus rationnelles seraient possibles. Que comptez-vous faire à ce sujet ?

M. Jacques Alain Benisti, suppléant M. le président Jean-Luc Warsmann. La mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » poursuit les efforts déjà engagés et témoigne à nouveau du volontarisme dont fait preuve le Gouvernement en vue de moderniser, d’optimiser et de rationaliser l’État et la fonction publique au sens large du terme.

Contrairement à ce que j’ai pu entendre, cette démarche est réalisée dans la plus grande transparence et la plus grande concertation. Le Libre blanc que notre collègue Pierre-Alain Muet appelait de ses vœux a déjà été réalisé. Il contient de nombreuses propositions et fait suite à l’audition de plus de deux cents représentants de fonctionnaires.

Je tiens à saluer la création de deux nouveaux programmes : Chorus, tout d’abord, qui entre dans une phase de test à la direction générale des finances publiques de la Loire-Atlantique, et qui est un outil de gestion budgétaire et comptable destiné à faciliter l’application de la LOLF ; mais aussi le programme « Entretien des bâtiments de l’État », qui regroupe pour la première fois les crédits d’entretien immobilier des différents ministères au sein d’un même programme, afin de rationaliser les besoins.

Les quatre autres programmes – « Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local », « Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État », « Conduite et pilotage des politiques économique et financière » et enfin « Facilitation et sécurisation des échanges » –témoignent également de la volonté du Gouvernement de poursuivre les efforts de modernisation des outils de gestion, grâce notamment à la montée en puissance de l’informatisation, mais également à la mise en œuvre la RGPP.

Je trouve par ailleurs assez judicieux de faire appel à des cabinets d’études privés, ce qui nous procure une vision extérieure et une approche plus pragmatique de la situation.

Dans le contexte économique et financier actuel, on ne peut en outre que saluer la volonté de maîtriser les dépenses publiques tout en gardant comme objectif principal l’amélioration des performances publiques et des services rendus à nos concitoyens. La fusion de la direction générale des impôts et de la direction générale de la comptabilité publique, déjà en grande partie réalisée, est un exemple probant de la réussite de cette politique.

J’en viens à la question de la modernisation des systèmes d’information de l’État, domaine dans lequel de grands progrès ont déjà été réalisés : de nombreux programmes ont ainsi été mis en place, notamment Copernic pour le système fiscal, ou encore Chorus ; d’autres devraient également voir le jour prochainement, que ce soit en matière de dématérialisation des déclarations et de paiement des principaux impôts pour les particuliers et les entreprises, de conservation des hypothèques et des actes notariés, ou encore de dédouanement en ligne, dont la généralisation sera réalisée grâce à l’application DELTA.

J’en viens au budget du programme « Fonction publique », dont la pertinence ne peut qu’être saluée, cette année encore. Même s’il reste encore beaucoup à faire – je pense notamment au projet de loi relatif à la mobilité et aux parcours professionnels, déjà débattu au Sénat et qui devrait bientôt venir en discussion devant notre assemblée –, ce programme contribue à donner corps aux ambitions dont le Président de la République a fait part dans son discours du 19 septembre 2007, en mettant en musique l’application financière des textes de modernisation de la fonction publique qui ont déjà été adoptés.

Il faudra toutefois poursuivre la réforme des politiques salariales et celle de la formation initiale et continue, simplifier les statuts et les concours et encourager la mobilité entre les trois fonctions publiques, dans l’esprit gagnant gagnant défendu par le Président de la République.

Au demeurant, il faut croire que nous ne rencontrons pas les mêmes agents de la fonction publique, monsieur Derosier : ceux que je connais se disent satisfaits des réformes audacieuses que nous avons menées. Ils en attendent en effet des opportunités d’évolution de carrière plus attractives et plus motivantes. Nous devons favoriser la mobilité, qui est un facteur essentiel d’attractivité, mais aussi l’épanouissement professionnel dans des conditions de travail améliorées. La mission budgétaire qui nous est présentée y contribuera.

Cela étant, le développement d’une politique de gestion des ressources humaines prenant réellement en compte l’individu et les cas particuliers est un objectif ambitieux qui ne pourra être atteint sans l’engagement politique fort voulu par Éric Woerth et André Santini.

L’élan que vous avez donné, messieurs les ministres, à ces chantiers est d’autant plus positif qu’il est mené en totale concertation avec l’ensemble des acteurs de la fonction publique. En témoigne l’accord, signé en février dernier, qui instaure un dispositif innovant de garantie du pouvoir d’achat et qui fixe des orientations pour l’évolution des régimes indemnitaires ainsi que de nouvelles modalités de gestion des comptes épargne temps.

La logique purement comptable des effectifs est maintenant obsolète, en dépit de ce que tentent de dire certains. Les fonctionnaires ont compris l’intérêt qu’il y avait à envisager une autre façon d’aborder les réformes. Au bout du compte, je crois utile de rappeler qu’elles vont bénéficier à quelque 5 millions d’agents en activité.

Je crois sincèrement que les mentalités des agents publics ont évolué et que les attentes sont devenues de plus en plus fortes. C’est grâce, messieurs les ministres, à la pugnacité avec laquelle vous vous employez à lever les verrous qui freinent trop souvent les ambitions et les bonnes volontés que nous réussirons, j’en suis convaincu, à moderniser notre fonction publique, dans le respect du service public, qui fait la fierté de notre pays.

Mes chers collègues, l’ensemble des programmes de cette mission va dans le sens d’une meilleure organisation humaine et fonctionnelle de notre administration.

Le groupe UMP votera ce budget et j’inviterai l’ensemble de la représentation nationale à faire de même.

M. André Santini, secrétaire d’État chargé de la fonction publique. Monsieur Derosier, vous m’avez interrogé sur les indicateurs de performance.

Je rappelle la disparition de l’indicateur « fusion de corps ». L’objectif est de rationaliser, c’est-à-dire de simplifier le maquis actuel des corps : de 850 corps que l’on dénombrait encore récemment, nous en avons réduit le nombre à 500. Un gros effort a été accompli en deux ans pour supprimer de nombreux corps, notamment dans la catégorie C, par consensus, grâce à la discussion. L’objectif est maintenant le Livre blanc : passer plus largement aux filières métiers et aux cadres statutaires sera le chantier majeur pour les années 2009-2001. Un indicateur lié aux corps n’aurait donc plus de sens.

Pour la rémunération à la performance, l’indicateur prévu dans le projet de loi de finances pour 2009 concerne bien les directeurs d’administration centrale. Je rappelle qu’en 1946, Maurice Thorez, qui avait imposé à la CGT le statut plutôt que le contrat et signait ses actes en qualité de « vice-président du Gouvernement et secrétaire général du Parti communiste français », déclarait que l’intéressement était parfaitement possible. Intéressante leçon d’archéologie juridique !

Le recours à la rémunération à la performance sera progressif. Ainsi, le mécanisme sera mis en place à partir de 2009 pour les autres emplois de direction des services centraux, comme ceux de sous-directeurs. Notre ambition est plus large et doit viser dans les trois ans toutes les catégories de fonctionnaires. La première étape clé est la publication de la prime de fonction et de résultats, ou PFR, pour la filière administrative, en commençant dès la fin de 2008 par les attachés. Deux cent mille fonctionnaires environ seront touchés. Par la suite, les ministères seront concernés sur la base du volontariat.

Pour la formation professionnelle, le droit individuel à la formation, ou DIF, sera mis en place. La refondation de la formation résulte d’un accord social de la fin de 2006, de la loi de modernisation de la fonction publique de février 2007, des dispositifs réglementaires et d’instruction de la fin de 2007 : l’action des ministères est donc étroitement pilotée au niveau interministériel pour établir de véritables plans de formation. De ce fait, le droit individuel à la formation n’occupe encore qu’une place limitée, ni plus ni moins, d’ailleurs, que dans le secteur privé. C’est encore un outil récent, qui doit s’installer.

Pour ce qui concerne les crédits de formation interministériels, la demande d’une diminution de 200 000 euros tient au fait que la quasi-totalité des crédits de formation des fonctionnaires relève du budget de chaque ministère, que les crédits interministériels du programme 148 correspondent à des objectifs très ciblés, soit pour soutenir un thème de formation commun à tous les ministères dans un domaine prioritaire, soit pour servir d’effet de levier, notamment au niveau déconcentré et interministériel. Certes, la baisse de 300 000 euros sur un total de 4,37 millions d’euros n’est qu’un effort limité, qui doit passer par des gains de productivité dans la conduite d’actions de formation.

Vous nous avez interpellés sur l’action sociale interministérielle, à propos du taux de pénétration du CESU. Depuis 2006, l’aide à la garde des jeunes enfants ou le recours au CESU sont devenus une orientation majeure pour concilier vie familiale et professionnelle. Le choix est donc fait dans le cadre des négociations salariales, en accord avec les partenaires sociaux. Créé de toutes pièces il y a moins de deux ans, pleinement opérationnel depuis 2007, le CESU connaît un vrai succès et progresse rapidement, avec plus de 100 000 ménages bénéficiaires et une progression de 10 %.

L’Observatoire de l’emploi public, adossé à la direction générale de la fonction publique, vise à faciliter la transparence sur les chiffres relatifs à l’emploi public. Depuis deux ans, un effort sans précédent et salué par tous les partenaires a été réalisé par la direction générale de la fonction publique sur les chiffres désormais publiés dans le rapport annuel sur l’emploi public. Elle est loin, la plaisanterie selon laquelle l’État ne sait même pas combien il a de fonctionnaires ! Aujourd’hui, grâce à ce rapport qui est à votre disposition, nous savons combien il y a de fonctionnaires – mais rien n’est pour autant réglé.

L’objectif de la transparence sur les emplois et les salaires est donc aujourd’hui atteint. Les accords de Bercy sur le dialogue social, au mois de juin dernier, ont prévu la création d’une instance commune aux trois fonctions publiques, très attendue notamment par les syndicats. Je rappelle que six syndicats sur huit ont signé ces accords publics, ce qui est très rare. De fait, alors que la CGT n’avait rien signé en 1968, où M. Séguy avait été hué à Boulogne-Billancourt, pas plus que la FSU ni, bien évidemment, Sud, ces trois syndicats font partie des six qui ont signé, ce qui est bon signe pour la maturité sociale du pays.

Le champ de compétence inclura l’examen du rapport annuel de l’emploi public, rendant donc inutile le maintien d’un observatoire particulier.

Un plan de cinq ans a été adopté par le Conseil interministériel de l’action sociale pour le programme de rénovation des restaurants interadministratifs, avec la caution des organisations syndicales. Près de 15 millions d’euros seront dépensés chaque année et les restaurants qui soulèvent des difficultés seront traités en priorité. Le Gouvernement applique scrupuleusement ces rénovations afin que ces restaurants soient attractifs et sûrs pour les agents. Il faudra en outre s’interroger sur des solutions autres que la restauration collective. En effet, les attentes des agents vont aujourd’hui plutôt dans le sens des titres de restauration.

Pour ce qui est de la diminution des aides ménagères à domicile, l’allocation de maintien à domicile, ou AMD, est une prestation d’action sociale facultative, servie par l’État employeur aux retraités de la fonction publique de l’État. Elle a été élaborée sur la base de la prestation d’action sociale du régime général et son service est ciblé sur les retraités en situation de dépendance sensible, avec de faibles ressources – 60 % relèvent du GIR 5 et 60 % disposent de moins de 1 000 euros de ressources mensuelles. Aujourd’hui, l’AMD n’est pas attribuée aux personnes qui ont le plus besoin d’une aide sociale, ce qui n’est pas satisfaisant. En effet, l’AMD a glissé du champ de l’action sociale à celui de la prestation sociale. La gestion en guichet ouvert conduit à ce que l’essentiel des bénéficiaires soit en situation de dépendance limitée, avec 60 % en GIR 6 – la catégorie la moins dépendante, que connaissent bien les élus locaux. Ils disposent de revenus supérieurs à ceux des bénéficiaires du régime général – supérieurs, pour 70 % d’entre eux, à 1 550 euros par mois et 2 300 euros pour un couple. Quatre-vingts pour cent des dossiers de demande d’aide donnent lieu à reconduction automatique.

Le choix du Gouvernement, monsieur Derosier, est donc de repositionner, et non de supprimer l’AMD pour qu’elle retrouve sa vocation sociale. Pour les nouvelles demandes, l’AMD sera donc ciblée sur des critères sociaux. Aucune économie ne sera faite avec ce repositionnement, car chaque euro sera consacré à l’aide sociale.

Ainsi, les mesures en faveur d’une meilleure articulation entre vie professionnelle et vie personnelle, comme les dispositifs d’aide à la garde d’enfants, le CESU, les réservations de places de crèche, l’aide au logement des fonctionnaires, seront en définitive accrues.

Quant au programme 148 – « Fonction publique » –, le décret n° 2007-1373 du 19 septembre 2007 relatif à la participation de l’État et de ses personnels publics au financement de la protection sociale complémentaire va donc fixer les règles régissant le régime d’aide rénovée. Il a été approuvé le 30 mai 2007 par la Commission européenne, qui l’a estimé compatible avec le traité instituant la Communauté européenne.

Deux orientations majeures : prendre en compte les exigences d’égalité de traitement et de respect de règles de sélection transparentes, et préserver les facteurs de solidarité, en particulier intergénérationnels et familiaux, afin de maintenir le niveau de protection sociale des agents de l’État.

La désignation du ou des organismes assureurs s’effectue par le biais d’une mise en concurrence. La procédure est menée par l’employeur public à partir du cadre général défini par le décret.

Dans la fonction publique territoriale, les conditions de la participation des collectivités et de leurs établissements publics au financement de garanties de protection sociale complémentaires souscrites par leurs agents doivent également permettre de répondre aux recommandations de la Commission européenne, traduites dans la loi du 2 février 2007 portant modernisation de la fonction publique.

Les modalités d’application à la fonction publique territoriale doivent répondre au principe de transparence, de mise en concurrence et de solidarité intergénérationnelle – je m’attarde sur cette question car elle intéresse de nombreux élus, compte tenu de l’effervescence qui se manifeste actuellement dans les mutuelles du fait de la remise en cause de certaines situations considérées comme acquises. Elles nécessitent toutefois une déclinaison qui tienne compte des spécificités de l’emploi territorial : multiplicité des employeurs et des situations – 55 000 employeurs de collectivités qui ne disposent pas toujours de l’expertise juridique indispensable à l’élaboration d’un cahier des charges complexe –, mobilité sur l’ensemble du territoire, impliquant la possibilité pour les agents de conserver leur organisme de protection lorsqu’ils sont affectés dans une autre collectivité. Il est donc envisagé de s’orienter vers un dispositif d’aide per capita reposant sur une procédure de labellisation ou d’agrément des contrats proposés par les organismes de protection sociale. Ce principe a fait l’objet de premiers échanges avec la Commission européenne et, dans la perspective d’une validation formelle, la Direction générale des collectivités locales poursuit le travail préparatoire de définition de la structure d’agrément et du cahier des charges. Un projet de décret sera donc proposé prochainement.

Monsieur Tron, concernant le non-rattachement du programme n° 148 au programme n° 221 – « Stratégie des finances publiques et réforme de l’État » –, je précise que les finalités des deux programmes sont différentes. Pour le programme n° 221, il s’agit d’un moyen de fonctionnement, accompagné d’une masse salariale en direction des charges de l’action de modernisation de l’État. Pour le programme n° 148, il s’agit de l’action sociale interministérielle et les subventions aux IRA et à l’ENA. Le mélange des deux types de dépenses ne serait donc pas cohérent. Nous souhaitons cependant conserver une visibilité politique importante, notamment pour les organisations syndicales. En revanche, les crédits de rémunération de la direction générale de l’administration et de la fonction publique, ou DGAFP, ont été intégrés dans le programme n° 221.

Quant aux opérations immobilières liées au transfert de l’ENA à Strasbourg, je rappelle que celle-ci n’a conservé à Paris que l’immeuble du 2, avenue de l’Observatoire. La vente du 13, rue de l’Université a permis à l’État de dégager 46,33 millions euros. Une partie du produit de cette cession a été versée au compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État » pour clore la série d’opérations liées au regroupement des activités à Strasbourg.

Un premier versement de 880 000 euros est intervenu en 2006, au titre de la contrepartie financière due à la Fondation nationale des sciences politiques pour l’occupation transitoire du site du 13, rue de l’Université. Un deuxième versement de 2 422 000 euros a eu lieu, au titre de l’exercice 2007, pour financer la Maison des élèves à Strasbourg – 1 500 000 euros –, l’achèvement des travaux sur le site de l’Observatoire – 600 000 euros –, le déménagement de la rue de l’Université vers l’avenue de l’Observatoire – 322 000 euros. Un dernier versement de 12 056 000 euros est intervenu en juillet 2007 pour financer l’extension de l’école à Strasbourg et pour rénover le Centre de documentation. Le reste du produit de la cession, soit 30 900 000 euros, a été affecté au désendettement de l’État dès novembre 2007 ; nous en avons informé le président de votre commission des finances par une lettre en date du 19 novembre 2007. Selon les règles de droit commun, la part du produit d’une cession qui doit être consacrée au désendettement de l’État est de 15 %, soit en l’espèce 6 095 000 euros ; ici, elle atteint 66 %.

M. le président Didier Migaud. MM. Deniaud et Tron semblent très sceptiques.

M. Yves Deniaud, rapporteur spécial. Mon scepticisme concerne les ressources dont dispose l’acheteur, à savoir la FNSP, pour acquérir l’immeuble : il s’agit d’un emprunt qui, au sens de Maastricht, fait partie de la dette de l’État.

M. Georges Tron, rapporteur spécial. Eh oui !

M. le secrétaire d’État. En ce qui concerne le contrat de performance avec l’ENA, nous avons pleinement conscience de la nécessité de contractualiser davantage les relations entre l’État et les opérateurs. Le pilotage des cinq IRA en témoigne. Les travaux devant conduire à la conclusion d’un contrat d’objectifs et de performance ont été engagés dès le quatrième trimestre de l’année 2007, conformément à l’engagement pris par le ministre chargé de la fonction publique lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2007. Cependant, plusieurs éléments ont plaidé pour le report à 2009 de la conclusion de ce contrat : de grands chantiers ont été ouverts depuis un an, avec la réforme des concours, appuyée sur deux rapports, et l’optimisation de l’appareil de formation, sujet sur lequel Raymond-François Le Bris doit nous rendre ses conclusions à la fin de ce mois ; et le Président de la République, dans ses vœux aux corps constitués en janvier 2008, puis dans une lettre du 16 juillet dernier, nous a demandé de bâtir un nouveau projet articulé autour d’une mesure forte, la suppression du classement de sortie. Nous avons constaté qu’il était peut-être prématuré de conclure avec l’ENA un contrat d’objectifs et de performance. Dans la même logique, nous avons repoussé de quelques mois les travaux de révision et de renouvellement de la convention d’objectifs et de gestion avec les IRA. Nous prenons l’engagement solennel que, tant pour l’ENA que pour les IRA, les contrats seront conclus en 2009.

Les économies induites par les non-remplacements seront affectées à hauteur de la moitié aux rémunérations des fonctionnaires. Au terme de trois années, cela représentera 1,67 milliard d’euros. Ce montant considérable permettra aux ministères de dynamiser leur politique salariale par divers moyens – rémunérations au mérite individuelles, intéressement collectif, paiement des jours de RTT et CET, rénovation des grilles indiciaires pour les militaires. En outre, une enveloppe de 192 millions d’euros par an est inscrite pour accompagner les restructurations. Ces crédits à caractère non reconductible sont inscrits dans les budgets ministériels.

Le choix de ne pas regrouper les crédits repose d’abord sur un principe de responsabilité : l’ensemble du dispositif d’accompagnement relève de la libre décision des ministères, la seule contrainte étant le montant maximum. Dès lors que chaque employeur fixe les montants individuels, il ne peut y avoir de mutualisation des crédits. Par ailleurs, l’amplitude des réformes et leur calendrier diffèrent selon les ministères ; un fonds unique n’aurait donc pas de sens.

Nous engageons le chantier auquel vous nous invitez : nous chiffrerons en 2009 les dépenses d’investissement accompagnant les restructurations de l’administration.

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publiqueLe retour sur investissement en termes comptables est évidemment un objectif majeur, même si ce n’est pas le seul, dans les restructurations administratives et en particulier dans le cas de la DGFiP. Les effectifs auront été réduits de 10 % entre 2003 et 2009. Le mouvement va se poursuivre ; le taux de non-remplacement sera supérieur à 50 %. Cette année, entre 2 300 et 2 400 emplois ont été supprimés ; c’est plus que précédemment, mais cela correspond aux termes du contrat qui arrive à échéance. Nous allons continuer dans la même voie, ce qui sera bien sûr de plus en plus difficile : les premiers emplois gagnés sont les plus aisés à trouver.

En termes de frais de personnel, l’opération coûte 118 millions d’euros, couvrant la prime, dite de fusion, de 350 euros, et l’harmonisation indemnitaire. On ne peut pas, en effet, réorganiser des administrations en disant aux intéressés qu’ils gagneront moins. Cette harmonisation se fera dans la plupart des cas sur trois ans, et parfois sur quatre. Nous irons peut-être un peu plus vite pour les catégories C.

Les économies liées aux suppressions d’emplois atteignant 223 millions d’euros, le taux de retour est ainsi de 53 %.

Par rapport à 2008, les crédits de fonctionnement seront en baisse de 4 % en 2009 et de 7 % en 2011.

En ce qui concerne l’immobilier, 300 000 mètres carrés vont probablement pouvoir être libérés, soit 8 % de toutes les surfaces actuellement occupées. Nous les valorisons à environ 200 millions d’euros. Dans ce domaine, beaucoup de solutions locales doivent être trouvées, et nous invitons les gestionnaires locaux à les rechercher. Les dépenses de regroupement et de travaux sont chiffrés à environ 100 millions d’euros sur les trois prochaines années. Cela étant, outre les dépenses d’entretien, celles qu’entraîneront le respect de diverses normes et le Grenelle de l’environnement auront certainement pour effet une hausse des dépenses liées à l’immobilier. Nous aurons une meilleure visibilité dans un an, l’année 2009 devant être marquée par une très forte accélération dans la mise en place de la réforme.

L’augmentation des dépenses du titre II s’explique par celle du CAS « Pensions ». Hors ce compte d’affectation spéciale, les dotations du titre II pour la DGFiP sont en diminution de 0,25 %.

S’agissant de la fraude fiscale, nous en sommes à l’arbitrage et je ne peux pas préjuger de la décision qui sera prise. Il y a beaucoup d’opposition à la création d’un service national judiciaire – ou quel que soit le titre qu’on lui donne –, mais je persévère.

M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial. Il existe déjà les douanes…

M. le ministre. …qui ne sont pas opposées à la création d’un service – mais commun, ou séparé ? Et qui coopérera de quelle façon avec la direction de la police judiciaire ? Il y a des questions de boutique, certes, mais aussi de fond à régler, concernant par exemple les rapports entre le contribuable et son contrôleur. En tout état de cause, si l’on souhaite plus de régulation, il faut davantage de contrôle. Les flux financiers doivent être fiscalisés et nous devons nous doter des moyens nécessaires pour contrer les professionnels de la fraude. Par ailleurs, les contrôles fiscaux ont été stables cette année – environ 52 000, avec des montants de redressement qui augmentent légèrement – et les effectifs aussi. Après la fusion, nous avons veillé à préserver le contrôle fiscal dans la nouvelle DGFiP, de sorte que le travail puisse se faire sans pression particulière et en respectant les règles de déontologie et de hiérarchie.

L’affranchissement, lui, est l’un des premiers postes de dépenses de fonctionnement de la direction générale, qui doit être mis sous surveillance. Nous sommes notamment en train de réfléchir à de nouvelles formes de recours au courrier recommandé. Peut-être l’ouverture du secteur postal à la concurrence aura-t-elle aussi un effet positif, mais c’est assez incertain. Quant aux catégories A et A+, les modalités de calcul ont changé. Il est vrai qu’on ne faisait pas grande différence entre les deux. En tout état de cause, ce sont en gros les mêmes chiffres, avec peut-être un peu plus de A+ que de A. Je me tiens à votre disposition pour plus de détails.

En ce qui concerne les projets informatiques en cours, qui sont extraordinairement longs et coûteux – peu d’entreprises privées mènent des opérations de cette ampleur –, nous voulons la plus grande transparence. Si le coût budgétaire direct de COPERNIC est de 900 millions, il atteindra en fait 1,8 milliard en tenant compte des autres dépenses, telles que le personnel administratif mis à disposition du programme – 350 millions –, les dépenses de formation – 160 millions – et le coût de la maintenance, qui est toujours un peu plus élevé à la mise en route d’un système. CHORUS, lui, a pris une année de retard et devrait être opérationnel vers 2011. Les dépenses informatiques sont stables entre 2008 et 2009. Elles comprennent la prise en charge de la maintenance d’Hélios et des applications de COPERNIC. Les crédits pour COPERNIC se montent en crédit de paiement à 18 millions pour 2009 et il reste 116 millions à consommer d’ici à 2010, dont 90 de reports. L’essentiel du financement est donc assuré.

Deux indicateurs ont disparu du programme de la DGFiP pour 2009 : le délai moyen de paiement par les comptables de l’État, qui devient inutile avec CHORUS et le volume financier des processus comptables de l’État, qui perd de son utilité avec la certification par la Cour des comptes des comptes de l’État.

Concernant la fraude sur Internet, j’ai chargé les douanes de renforcer leur contrôle sur des plateformes de vente telles qu’eBay et de faire des propositions pour améliorer leur action. Pour l’instant, seulement quatre agents s’occupent de ce secteur. Nous allons créer un service plus spécifiquement dédié, avec plus de personnel et des méthodes revues.

Par ailleurs, les saisies douanière n’ont jamais été aussi nombreuses qu’aujourd’hui dans le domaine de la contrefaçon. La provenance des saisies étant principalement asiatique, il faut lancer une coopération au niveau politique et j’ai l’intention de me rendre en Chine après la discussion du budget.

Sur la Monnaie de Paris et la parcelle de l’An IV, plusieurs ministres avaient pris des engagements, de l’actuel Président de la République à M. Breton en passant par M. Copé. Soucieux de tenir la parole de l’État, nous avons confirmé à la Monnaie de Paris qu’elle pourrait disposer de cette parcelle pendant cinq ans – alors qu’elle en réclamait vingt. L’Institut de France la récupérera ensuite, après une période de transition à déterminer. Le plan stratégique de la Monnaie de Paris a dû, ou aurait dû en tout cas, être élaboré dans cette optique et elle doit s’adapter à la décision qui a été prise.

M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial. Il y a dix-neuf presses, de 2 500 tonnes !

M. le ministre. Quant au projet d’auditorium de l’Institut de France, je n’ai pas à juger de son opportunité puisque c’est l’Institut qui paye. C’est en tout cas ce que le chancelier de l’Institut m’avait dit, mais je veux bien lui reposer la question si vous le souhaitez. Le démontage des installations aura certes un coût, mais il faudra le faire.

M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial. Il y avait d’autres solutions !

M. le ministre. Les conclusions qui vont dans ce sens ne sont à mon avis pas réalistes. En tout cas, la Monnaie de Paris a les moyens de poursuivre son développement stratégique.

En ce qui concerne les douanes encore, nous avons fermé des implantations : il n’y a plus que 40 recettes comptables, au lieu de 150 il y a peu de temps – les plus petites n’avaient plus aucune justification compte tenu notamment du développement informatique, et des gains productivité ont aussi été dégagés.

J’ai engagé des discussions avec les syndicats des douanes : l’idée n’est pas d’imposer brutalement une carte entièrement nouvelle, mais de laisser vivre le réseau douanier et de procéder au fur et à mesure aux changements nécessaires. La direction générale et les syndicats ne sont plus en froid et les discussions sont reparties d’un bon pied. Quant aux crédits du titre II de la direction générale des douanes, les départs à la retraite ne seront pas remplacés à hauteur de 58 %, contre une moyenne de 36 % ces trois dernières années, pour tenir compte des nombreux investissements qui ont été réalisés, notamment informatiques, et des procédures Schengen. La masse salariale, hors pensions, est stable entre 2007 et 2009 – aux alentours de 800 millions – et diminuera ensuite. La direction a consommé la totalité de ses dotations du titre II en 2007.

Les services communs du laboratoire sont placés sous l’autorité fonctionnelle conjointe du directeur général des douanes et de la DGCCRF. Nous transférons l’ensemble des programmes 119 – DGCCRF – et 302 – DGDDI – vers le programme 218.

J’en viens à la révision générale des politiques publiques, évoquée par M. Muet. La RGPP est comme les sucres lents : elle aura des effets à long terme sur l’administration, dont elle rendra l’organisation plus efficiente, en permettant un regroupement de services et une vision stratégique des administrations centrales, des réseaux ou de la nature du service public. Je suis donc assez optimiste sur les économies qu’elle permettra de réaliser à terme : celles-ci dépasseront de loin le montant de 7 milliards qui avait été avancé dans un premier temps.

Contrairement aux audits, qui relèvent d’une vision ponctuelle, la RGPP n’a pas vocation à s’arrêter. L’ampleur du travail qu’elle représente, auquel s’ajoute d’ailleurs le résultat des différents audits déjà réalisés, est infiniment supérieure. Cette opération est à la hauteur des enjeux auxquels nous devons faire face en termes de modernisation de l’État.

Nous avons tous cherché, à gauche comme à droite, à nous atteler à la réforme de l’État : la RGPP est une méthode qui permet de donner corps à ce projet. Mais, comme dans les entreprises ou dans les collectivités, la réforme ne doit jamais s’arrêter, même si le rythme en est plus ou moins soutenu.

Il n’y a donc pas de dévoiement de la réforme de l’État par la RGPP, ni par l’idée que l’aboutissement de cette procédure est aussi la diminution du nombre de fonctionnaires. Ce nombre n’a rien à voir avec les services publics : au Canada, par exemple, les fonctionnaires sont beaucoup moins nombreux qu’en France. Bien sûr, chaque pays a sa propre culture en ce domaine, mais il reste que la masse représentée par la fonction publique dans notre pays est plus importante que chez la plupart de nos voisins. Or, dès lors que l’on a pris la décision de réduire le nombre de fonctionnaires, le meilleur moment pour passer à l’acte est, bien entendu, celui où un grand nombre d’entre eux partent en retraite. Et ce n’est pas, monsieur Derosier, parce que nous vivons une crise d’une ampleur particulière ni parce que l’on assiste à une remontée du chômage que nous devons décider un moratoire sur cette politique. Embaucher un fonctionnaire est un acte très important, dont les conséquences s’étendent sur cinquante ans. Ce n’est donc pas une réponse à apporter à une crise conjoncturelle. Nous devons certes tout faire pour réduire le chômage, mais nous sommes aussi comptables des conséquences futures de nos décisions. Il faut donc continuer à recruter des fonctionnaires – et l’État reste probablement le principal recruteur de ce pays –, mais il faut également saisir l’opportunité que représente le départ à la retraite d’une grande partie d’entre eux pour commencer à faire diminuer les effectifs.

Cette diminution est d’ailleurs très lente, et certains, dans notre majorité, nous le reprochent – même si aucun Gouvernement n’en avait jamais fait autant. En fin d’exercice, on aboutit à une réduction de 1,5, voire de 2 % de l’effectif total : nous sommes donc loin de la dépressurisation brutale. C’est une politique très difficile à organiser, mais ce n’est pas une révolution : le service public reste au cœur des préoccupations de notre pays.

Il est vrai que les opérateurs ne connaissent pas le même ratio de diminution, puisque la réduction de leurs effectifs est plutôt de 0,5 %. Ils devront aller plus loin. Nous avons fixé des plafonds d’emploi que nous ferons respecter. Le problème est que la moyenne d’âge des personnes qui travaillent pour les opérateurs est souvent moins élevée que celle des fonctionnaires centraux. Dès lors, les départs en retraite y sont moins nombreux, et les occasions de réduire les effectifs plus rares. Il n’y a toutefois aucune raison que les opérateurs ne se voient pas appliquer les mêmes règles que l’État.

M. Muet a sans doute raison lorsqu’il juge que des progrès doivent être réalisés sur le plan de la méthode. Mais nous devons sortir de la logique infernale des rapports qui se succèdent et nous inscrire dans une logique de décision. Or, ce faisant, nous nous heurtons à de fortes résistances : les administrations, les ministres et, parfois, les parlementaires, refusent de bouger. Chacun considère que la meilleure réforme concerne des sujets que l’on ne veut pas connaître ou qui intéressent le voisin. Dans un tel contexte, la RGPP permet d’avancer – même si elle n’est sans doute jamais à la hauteur des rêves d’un réformateur en chambre.

À la fin du mois de novembre, je ferai en Conseil des ministres un bilan sur les 300 ou 400 premières mesures prises dans le cadre de la RGPP. En ce moment même, les ministres sont auditionnés par le comité de suivi, qui se réunit à nouveau depuis le mois de septembre. Je peux vous assurer que notre rapport sera sans indulgence.

Bien sûr, quand on met en œuvre 350 mesures, on peut toujours en modifier ou en abandonner une – la question n’est pas là. Ce n’est pas le diagnostic qui pose problème, mais c’est le remède à apporter. Lorsque les scénarios que vous élaborez balayent tout le spectre du possible, à partir du moment où ils sont rendus publics, plus aucune réforme ne peut être engagée, car la presse retiendra systématiquement la mesure la plus dure ou la plus provocatrice. Ainsi, quand quelqu’un a intérêt à ce qu’une réforme n’ait pas lieu, il lui suffit d’organiser une fuite vers la place publique. Il n’y a alors pas de vrai débat contradictoire : on reste dans le superficiel et le subjectif, et le Gouvernement n’a plus qu’à battre en retraite. Aucune réforme de l’État n’est possible dans de telles conditions – même si, bien sûr, il est nécessaire de respecter une exigence de transparence et de permettre la discussion.

À partir de janvier, lorsque les résultats opérationnels de la première phase seront connus, nous lancerons la deuxième étape. À cette occasion, nous tenterons de mieux exploiter le travail déjà produit et d’explorer des champs d’investigation qui n’ont pas encore été abordés. Nous procéderons sûrement à des changements de méthode. Ainsi, j’aimerais que les parlementaires soient mieux associés à ce travail. Déjà, les rapporteurs spéciaux qui l’ont souhaité ont pu recevoir les équipes d’audit, et les rapports d’expertise, notamment ceux qui portent sur le diagnostic, sont à leur disposition. Il conviendra d’intégrer, pour les sujets qui les concernent, les rapporteurs aux réunions de la RGPP et de consulter les parlementaires intéressés avant la prise de décision.

En ce qui concerne l’évaluation, je vous renvoie à Éric Besson, qui est chargé de cette question au Gouvernement et qui fait partie du comité de suivi.

Je crois vraiment que nous avons trouvé, dans la RGPP, une méthode de réforme spécifiquement française, même si elle s’inspire de l’expérience d’autres pays. Elle peut évidemment être améliorée.

Vous pouvez contester le principe de ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux, mais il constitue une bonne base de départ et est très incitatif. Il n’a d’ailleurs rien d’insultant pour les fonctionnaires, bien au contraire. La question des effectifs de la fonction publique – qui n’est pas celle de la qualité des agents – doit se poser dans une démocratie dès lors que la masse salariale dépasse 40 % des coûts de fonctionnement.

Pour répondre à Georges Tron, je rappellerai que l’ENA voit ses effectifs diminuer, même si c’est de façon modeste : quatre postes en 2009, cinq en 2010, six en 2011. Nous sommes en train de réformer la scolarité, d’en diminuer la durée et de la concentrer sur les stages, afin qu’un élève puisse être plus rapidement « livré » à l’administration qui va l’employer. L’objectif est de transformer en fonctionnaire de qualité une personne seulement capable de réussir des concours difficiles – même si certains élèves ont déjà une expérience professionnelle derrière eux. Nous supprimerons donc la plupart des enseignements demeurés académiques pour privilégier les comptes rendus de stage, l’étude de cas, le travail en équipe. Enfin, nous supprimerons le classement de sortie – et je pense qu’il faudra le faire également pour les autres écoles de fonctionnaires.

En ce qui concerne, monsieur Tron, la gestion par l’ENA de son patrimoine immobilier, M. Santini vous a déjà répondu, mais je dois admettre que vous n’avez pas complètement tort.

M. Muet m’a interrogé sur le pilotage politique des projets informatiques.

Cela est très difficile à faire. Un projet comme CHORUS, qui a demandé des milliers d’heures de travail sur des sujets d’une extrême technicité, s’étale sur dix ans, ce qui signifie que quelque cinq ministres auront eu à en connaître. Ce qu’il faut, je crois, c’est élaborer un cahier des charges très précis, bien compris et bien accepté des politiques dès le départ. Si des difficultés apparaissent en cours d’exécution, il faut savoir le réviser en s’entourant des équipes nécessaires. J’ai moi-même dû revoir le pilotage de différents projets. J’ai ainsi été conduit à recevoir, au sujet d’un module précis, les deux présidents d’IBM et d’UNILOG car les deux sociétés ne s’entendaient plus, et il fallait comprendre ce qui se passait pour remettre un peu d’ordre. Peut-être ne suis-je pas assez compétent en ce domaine, mais le pilotage intégral d’un projet informatique me semble très difficile à assurer.

S’agissant des régimes sociaux et de retraites, nous devons non pas 250 millions, mais 238 millions d’euros à la SNCF, et nous allons les lui régler – vous m’aviez posé la même question l’an passé, à laquelle j’avais apporté la même réponse. De la dette de l’État vis-à-vis de la sécurité sociale, nous avons réglé au 31 décembre 2006 les 5,1 milliards d’euros qui relevaient du régime général. Reste à régler environ 1,5 milliard pour le RSI et la SNCF. Nous allons poursuivre les remboursements cette année, sachant que la dette s’est quelque peu reconstituée en 2008 – j’espère que ce ne sera pas le cas en 2009. Je proposerai dans le prochain projet de loi de finances rectificative de rembourser entre 900 millions et 1 milliard d’euros, en priorité à la SNCF puis, en partie, au RSI.

S’agissant de France Télécom, l’accélération du versement de la soulte à hauteur de 100 millions en 2009 et en 2010 est nécessaire, du fait notamment d’une baisse brutale des cotisations versées par l’entreprise, mais elle ne me semble pas poser de problème particulier.

S’agissant du compte d’affectation spéciale « Pensions », le fonds de roulement est plutôt en diminution. Nous estimons que 200 millions d’euros suffisent. 800 millions était un montant exceptionnel, qui avait été prévu pour couvrir des incertitudes budgétaires et comptables liées au bouleversement du mode de paiement des cotisations. Je vous dirai que, si 800 millions, c’était trop, et 200 millions trop peu, nous avons besoin de 600 millions.

Pour ce qui est des compensations spécifiques entre régimes spéciaux, nous avons pris en compte la situation de tous les régimes, notamment celui de la CNRACL. Il n’y aura aucune incidence ni sur les taux ni sur les cotisations. Le taux de 2008, soit 12 %, sera reconduit en 2009, soit le taux le plus faible depuis la création des compensations spécifiques en 1987.

Sur la gestion du patrimoine immobilier, j’ai trouvé Georges Tron un peu sévère. De gros progrès ont en effet été accomplis. Le Premier ministre va prochainement signer les textes qui mettront un terme au régime de l’affectation par ministère et feront de l’État l’affectataire unique de l’ensemble de son patrimoine. Ce projet n’a pas été facile à mener à bien. Tous les ministères, vous le savez, « s’accrochent » à leurs locaux. La centralisation de la politique immobilière de l’État n’est pas une réforme anodine, mais fondatrice, depuis longtemps préconisée dans de nombreux rapports et très attendue. Parallèlement, nous avons signé des conventions avec les occupants sur des ratios ; nous avons continué d’appliquer des surloyers ; nous avons publié la surface des locaux occupés par l’État ; nous avons établi un schéma pluriannuel de stratégie immobilière. Même si beaucoup reste à faire, nul ne peut nier que beaucoup a été fait. Certes, beaucoup de projets n’ont pu être menés à bien. J’aurais bien aimé à cet instant céder la parole au représentant du ministère de la justice, qui malheureusement vient de partir, mais peut-être pourrez-vous demander à l’entendre.

Nous ne sommes pas d’accord avec tous les ministères, notamment avec la chancellerie. Nous ne voulons pas non plus du projet de tour du ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire à La Défense. Nous n’avons pas opposé de veto définitif, mais en l’état, aucune décision n’a été prise. Le ministère estime le coût de réalisation à 500 millions d’euros, vous à 700 millions. Nous n’étions pas d’accord non plus pour que le Louvre récupère une partie du Louvre des antiquaires. Sur ce point, nous n’avons pas été suivis.

Nous sommes très actifs, mais nous ne réussissons pas toujours à imposer nos vues. Des arbitrages sont parfois rendus à un niveau supérieur, qui ne nous sont pas toujours favorables. Nous ne pouvons pas abandonner totalement la retenue sur les cessions, mais nous la faisons diminuer – pas pour tous les ministères. Le cas du ministère de la défense est tout à fait particulier, avec les propositions du Livre blanc, à l’élaboration duquel le ministère des finances a été étroitement associé. On prévoit 1,4 milliard d’euros de cessions immobilières l’an prochain – dont 1 milliard venant de cessions effectuées par le ministère de la défense. Nous serons très vigilants sur ce point, car l’incidence budgétaire de ces opérations est immédiate. Une cellule se réunit chaque semaine avec le ministère de la défense pour examiner les moyens d’atteindre cet objectif, mais force est de reconnaître que la conjoncture immobilière actuelle n’est pas la meilleure pour y parvenir.

Je pense que la politique immobilière de l’État pourra un jour être totalement centralisée et que nous n’aurons plus besoin d’être incitatifs. Mais prenons garde : sans incitation, il faut beaucoup d’autorité. Nous n’en sommes qu’à la signature du décret. Espérons que rien n’interfère pour la retarder. Ensuite, l’application de ce décret ne devra pas être trop brutale, pour éviter de trop vives contestations. Il faut du temps pour changer les mentalités et faire accepter une nouvelle culture : à vouloir trop faire d’un coup, nous prendrions le risque de braquer toutes les administrations, lesquelles peuvent opposer une force d’inertie considérable.

S’agissant de l’entretien, j’en suis d’accord avec vous, 77 millions d’euros en 2009, c’est peu. Il faut faire davantage. D’ailleurs, le projet de loi de programmation prévoit 200 millions à partir de 2010-2011. Je ne répondrai pas opération par opération. Je signalerai seulement qu’à ma connaissance Bernard Kouchner a démenti le projet de réalisation d’un centre de conférences aux Invalides – un centre sera construit sur la parcelle de l’An IV, qui pourra être utilisé à cette fin, si l’on parvient à déplacer les presses de la Monnaie.

Pour ce qui est des opérateurs, je vous l’avais déjà dit l’année dernière, nous souhaitons accélérer le mouvement en matière d’immobilier. Je vous informe que la majorité d’entre eux nous a fait savoir que l’échéance de 2009 ne serait pas respectée. Sur les 200 qui nous ont répondu – 455 ne l’ayant pas fait –, 59 ont indiqué avoir achevé le recensement, 98 être en train de le faire, dont 20 seulement considèrent qu’ils l’auront terminé en 2009, et 37 n’en avoir effectué aucun.

Je souhaite dénoncer les opérateurs qui ne jouent pas le jeu, au nombre desquels on peut citer l’ONF, l’AFPA et Voies navigables de France. Le patrimoine immobilier dont les opérateurs usent appartient à l’État, mais certains refusent de payer un loyer raisonnable, et même de lui communiquer le détail de leur parc immobilier.

M. Georges Tron, rapporteur spécialEt je serais trop sévère ? Mais c’est tout simplement scandaleux !

M. le ministre. L’INAO gère 26 immeubles ; aucun recensement n’a été fait. Les CROUS ne nous ont communiqué aucune information…

M. Michel Bouvard. Ils ne savent pas ce qu’ils ont !

M. le ministre. Les opérateurs que j’ai cités ne sont pas les seuls à se comporter ainsi. Tous ont pourtant les capacités administratives nécessaires pour faire face à leurs obligations. J’ai donc décidé de prendre des mesures de rétorsion, qui seront définies avant la fin de l’année.

M. Michel Bouvard. Très bien !

M. le ministre. Trois pistes sont envisageables.

La première est celle de la réduction de la rémunération, pour partie variable, des dirigeants de ces organismes. J’examinerai avec les ministres de tutelle concernés la manière dont les prochaines lettres de mission seront rédigées, pour y inclure un objectif précis à ce sujet, la moindre des choses étant de répondre à l’État quand il pose une question.

La deuxième est celle de la réduction de la subvention des opérateurs fautifs.

La troisième est celle du gel d’une partie de leurs crédits, ou du non-dégel en cours d’année. Je vous ferai connaître les règles décidées pour faire respecter la demande d’inventaire.

Je ne considère pas, monsieur Tron, qu’il y ait régression. Je comprends que vous souhaitiez que le CIE soit plus souvent consulté, et il m’arrive de le souhaiter aussi. La consultation systématique du CIE est une procédure que j’ai du mal à faire accepter, mais celui-ci sera consulté le plus souvent possible.

La finalité des cessions est que le patrimoine de l’État soit mieux géré, adapté aux services publics et que la superficie des locaux qui leur sont affectés corresponde à leurs effectifs. Quant à l’évolution des taux de retour, c’est une bonne manière de mutualiser les moyens, et nous avons déjà beaucoup progressé en ce sens.

J’ai proposé au président de votre commission des finances de tenir une réunion spécifiquement consacrée aux systèmes d’information, en ma présence et avec les chefs de mission concernés.

M. Michel Bouvard. Nous devons faire un travail dans le cadre de la mission d’information sur la mise en œuvre de la LOLF (« MILOLF ») !

M. Georges Tron, rapporteur spécial. Je sais, monsieur le ministre, votre parfaite connaissance de ce dossier, et votre lucidité. Nous avons toujours pu compter sur votre soutien, et je n’ignore pas les difficultés auxquelles vous vous heurtez.

Vous m’avez jugé sévère, mais vous l’avez été bien plus que moi, et je trouve tragiques les indications que vous nous avez données. La situation étant celle que vous avez décrite, l’action de tous les organismes d’évaluation et de contrôle doit être confortée. Je pense exprimer l’opinion unanime de tous les membres du Conseil de l’immobilier de l’État, toutes opinions politiques confondues, en vous disant que nous assistons au sein des ministères à une remise en cause délibérée des réformes que nous avons entreprises, et en particulier de votre excellente idée de prendre des avis sur les opérations immobilières envisagées. Si, comme il en est question, le CIE n’et plus consulté que lorsque Matignon le veut bien, d’autres cas apparaîtront qui rappelleront fâcheusement ceux de l’Imprimerie nationale, du 103 rue de Grenelle à Paris ou de la tour de La Défense. À propos des schémas pluriannuels de stratégie immobilière, nous avons auditionné tous les ministres ; les notes de France Domaine dont ils disposaient montraient un hiatus évident entre la réalité et les conclusions de la RGPP. Or, c’est de 90 milliards qu’il s’agit, dont nous sommes les garants.

Nous ne sommes pas dupes ! Une offensive caractérisée est en cours, qui vise à dessaisir le CIE de ses prérogatives. Il serait absurde de le décapiter.

M. le ministre. Je partage largement votre opinion sur l’utilité du CIE, qui doit pouvoir donner des avis. Nous nourrirons sa réflexion, mais peut-être pas de manière systématique.

M. le président Didier Migaud. Nous suivrons ce dossier avec vigilance.

Je vous remercie, messieurs les ministres, pour ces réponses complètes et précises.

La réunion de la commission élargie s’achève à dix-huit heures trente.

Le Directeur du service
des comptes rendus des commissions,

Michel KERAUTRET

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