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Assemblée nationale

Commission élargie

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

(Application de l’article 120 du Règlement)

Jeudi 28 octobre 2010

Présidence de M. Jérôme Cahuzac,
président de la Commission des finances

La réunion de la commission élargie commence à quinze heures quinze.

projet de loi de finances pour 2011

Engagements financiers de l’État

M. le président Jérôme Cahuzac. Monsieur le secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation, je suis heureux de vous accueillir.

Nous sommes réunis en formation de commission élargie afin de vous entendre sur les crédits consacrés à la mission « Engagements financiers de l’État » dans le projet de loi de finances pour 2011.

Notre rapporteur spécial, M. Baert, m’a fait savoir qu’il aurait du retard, mais celui-ci s’aggravant, je me propose de commencer à donner lecture de son projet de rapport :

« Mon intervention », comptait-il indiquer en premier lieu, « aura d’abord pour objet de remercier et de féliciter les services de Bercy et de l'Agence France Trésor » – satisfaction que je lui laisserai finalement développer lui-même puisque je constate son arrivée !

Vous avez la parole, monsieur le rapporteur spécial.

M. Dominique Baert, rapporteur spécial, pour la mission « Engagements financiers de l’État »En vous priant, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président, chers collègues, de bien vouloir excuser mon retard, je comptais en effet, en introduction de mon projet de rapport, remercier les services de Bercy et de l'Agence France Trésor car le taux des réponses aux questionnaires budgétaires qui me sont parvenues le 10 octobre, date limite fixée par la loi organique relative aux lois de finances, était de 95 % alors que je n'avais reçu aucune réponse à pareille époque l'an passé.

Je constate, ensuite, que je suis en train de devenir le rapporteur spécial le plus important. Si la mission dont j'ai à rendre compte est le troisième poste de dépenses du budget général, après l'éducation nationale et les remboursements et dégrèvements en faveur des collectivités locales, avant même la défense, elle pourrait, malheureusement, devenir le premier poste dans les années qui viennent ! Songeons que la dette publique française représente déjà 82,9 % du produit intérieur brut – PIB – en 2010 et atteindra 86,2 % du PIB en 2011. Cela correspond à un montant de 1 748 milliards d'euros ou, pour être plus concret encore, environ 26 300 euros par habitant.

Permettez-moi de donner un coup de projecteur rapide sur trois programmes.

Le programme « Charge de la dette et trésorerie de l'État » est le plus important des quatre que comporte la mission. Avec 45,45 milliards d'euros en 2011, il représente près de 97 % des 46,9 milliards de crédits de la mission « Engagements financiers de l'État ».

La gestion « technique » de ce programme est satisfaisante, grâce à la grande réactivité de l'Agence France Trésor par rapport aux demandes du marché. Il n’y a de ce point de vue rien à dire. S'agissant en revanche des évolutions des finances publiques qui sous-tendent les dépenses de ce programme, quatre constats s'imposent.

Premier constat : le besoin de financement de l'État est en plein dérapage.

Ce besoin, constitué du déficit budgétaire et du montant des amortissements de titres arrivés à échéance, qui atteignait déjà des montants historiques dans le projet de loi de finances pour 2010, a progressé de 33 % en cours d'année 2010 – compte tenu de l'impact du grand emprunt national et du soutien en faveur de la Grèce – pour atteindre 239,1 milliards d'euros. Bien évidemment, en 2011, le besoin affiché serait en baisse de près de 40 milliards d'euros, mais cela résulte d'un simple effet mécanique lié à la non-reconduction des mesures exceptionnelles de crise. Il n'en demeure pas moins qu'avec 189,4 milliards d'euros, il dépasse de 25 milliards son niveau d'avant la crise – 164 milliards en 2008. C'est donc une donnée qui devient structurelle.

Deuxième constat : la part de la dette levée à court terme commencerait enfin à diminuer.

Le Gouvernement bénéficie en effet d'un regain de la demande des investisseurs pour les titres d'une maturité supérieure à quinze ans, qui avait été significativement affectée par la crise économique et financière. La part des bons du trésor à taux fixe (BTF) à moins d'un an, après avoir atteint un pic en 2009 – 18,6 % de l'encours total de la dette négociable de l'État –, a ainsi commencé à diminuer en 2010 et pourrait passer sous la barre des 15 % du volume de dette en fin d'année 2011. Cette démarche mérite considération car il n'est pas souhaitable que l'État finance ses déficits structurels de moyen et long terme avec des moyens de court terme ; comme tout emprunteur, il s'expose en effet à un double risque : d’abord de liquidité avec la rupture de la disponibilité de ses sources de financement ; ensuite de brutale remontée des taux d'intérêt. Cet appel croissant au court terme s’était imposé à mon attention et je vous avais interrogé précédemment sur ce point. J'observe avec intérêt ce tassement, mais je veux appeler de nouveau votre attention sur la vigilance nécessaire à cet égard.

Troisième constat : si, comme en 2009, la charge de la dette demeure contenue en 2010, elle ne le doit qu'à un effet d'optique, à savoir la conjonction opportune de taux d'intérêt encore bas et d'une inflation limitée. D'un montant d'environ 41 milliards d'euros – avant swaps – en 2010, la charge d'intérêts serait inférieure d'environ 1,5 milliard d'euros aux crédits votés. Mais cette situation ne durera malheureusement pas indéfiniment. Selon les prévisions du Gouvernement lui-même, qui table sur une remontée progressive des taux d'intérêt, la charge de la dette augmentera de 30 % entre 2010 et 2013, à un rythme d'environ 5 milliards d'euros par an, pour atteindre 45,4 milliards d'euros en 2011 et 55,2 milliards en 2013.

Cette dérive inexorable, je l'avais anticipée depuis déjà deux ans dans les prévisions que je fournissais à l’appui de mon rapport spécial. Sans doute vous en souvenez-vous, monsieur le secrétaire d'État, puisque nous les avions évoquées en commission élargie.

Quelle sera cette charge en cas de hausse des taux ? À titre indicatif, une hausse des taux globale et pérenne de 1 point entraînerait, toutes choses égales par ailleurs, une augmentation des intérêts de la dette d'environ 2 milliards dès la première année, de 3,9 milliards l'année suivante, de 5,9 milliards la troisième année, jusqu'à environ 14 milliards à un horizon de dix ans. Confirmez-vous ces chiffres ?

Quatrième constat : au-delà de la question de la charge de la dette, c'est plus généralement le problème de l'emballement de l'endettement public et de ses conséquences lourdes et mécaniques qui est aujourd'hui posé. Ce sera le corset de toutes les politiques économiques et budgétaires pour de nombreuses années. Après 78,1 % en 2009, la dette publique devrait, selon les prévisions du Gouvernement, atteindre 82,9 % en 2010, puis 86,2 % en 2011 et 87,4 % en 2012.

Or, nul ne doute désormais du relèvement des taux d'intérêt de court, moyen et long terme, à laquelle la France se trouve d'autant plus exposée que 70 % de sa dette est dorénavant détenue par des non-résidents : des risques d'assèchement de certains segments de titres publics et de liquidités ne sont plus à négliger. Dans la mesure où les hypothèses macroéconomiques qui sous-tendent le scénario du Gouvernement sont plus qu'optimistes, avec une croissance de 2,5 % par an dès 2012 et une progression des dépenses publiques de 0,8 % – soit un niveau jamais atteint correspondant au tiers de la progression tendancielle desdites dépenses entre 2000 et 2008 –, la perspective d'un endettement supérieur à 90 % voire 100 % du PIB n'est plus un exercice théorique, comme le montrent les simulations que j'ai explorées dans le cadre de mon rapport spécial.

Une étude récente menée par les économistes Carmen Reinhart et Kenneth Rogoff montre qu'au regard de l'évolution de la dette et de la croissance de vingt pays avancés depuis plus d'un siècle, une dette supérieure à 90 % du PIB est associée à une croissance très inférieure à la moyenne. La dette publique d'aujourd'hui va corseter non seulement les dépenses budgétaires de demain, mais aussi notre croissance économique d'après-demain.

Dès lors, quelles sont les garanties que peut apporter le Gouvernement pour nous démontrer le caractère soutenable de nos finances publiques à l'horizon 2013 ?

S'agissant du grand emprunt, pouvez vous expliciter les modalités de suivi et d'évaluation de l'action des opérateurs signataires d'une convention d'avenir ? On est vraiment sur une colossale opération de débudgétisation ! Quels sont les pouvoirs de l'État dans l'utilisation des fonds, par exemple en cas de performance non satisfaisante ? Comment l'État pourra-t-il réallouer les fonds ?

Le deuxième coup de projecteur concerne le programme « Appels en garantie de l'État », qui bénéficierait de 227,3 millions d'euros de crédits en 2011. Les principales dépenses concernent deux domaines.

D’abord, des garanties de prêts de l'Agence française de développement (AFD) et de la Banque européenne d'investissement (BEI) pour 74 millions d'euros, en réduction de 40 % par rapport à l'an passé. Pouvez-vous nous expliquer les raisons de cette évolution à la baisse, le projet annuel de performances pour 2011 étant muet sur le sujet ? Faut-il y voir un désengagement du Gouvernement en faveur de l'aide publique au développement ?

Ensuite, des garanties d'aides à l'exportation de la Coface. D'un montant de 122 millions d'euros, les crédits de l'action « Développement international de l'économie française » ont progressé de 42 % entre 2010 et 2011. Cette augmentation me semble essentiellement imputable aux réformes des procédures de garanties de la Coface. Pouvez-vous, par conséquent, nous indiquer dans quelle mesure les garanties Coface ont effectivement permis de soutenir nos exportations et de réduire les défauts de paiement en 2010 ? Quelles sont les perspectives attendues pour 2011 ?

Le dernier coup de projecteur concerne les crédits budgétaires du programme « Épargne », systématiquement sous-évalués depuis 2006. Malgré l'augmentation des crédits ouverts en loi de finances initiale en 2009 et 2010 et la baisse des primes d’épargne logement depuis 2009, les reports de charges d'une année sur l'autre sont toujours monnaie courante. Si le découvert de l'État auprès du Crédit Foncier de France s'est fortement réduit en 2010, passant de 719,2 millions d'euros en 2009 à 144,7 millions d'euros, le problème n'est toujours pas réglé. Sachant que l'année 2011 devrait se traduire par une augmentation du montant des primes d'épargne logement, envisagez-vous d'apurer enfin les dettes de l'État vis-à-vis du Crédit Foncier de France dès 2010 ? Il y a deux ans, vous m’aviez affirmé que cela prendrait « un certain temps ». Sans doute avez-vous précisé le calendrier depuis, car il n'est pas normal ni sain que le Crédit Foncier soit un banquier de l'État. Proposerez-vous donc d'ouvrir des crédits en collectif budgétaire de fin d'année pour faire face à cette situation ?

Enfin, le programme « Épargne » se caractérise par d'importantes dépenses fiscales. Fait préoccupant, alors qu'elles représentaient 8,5 % de l'ensemble des dépenses fiscales en 2010, les dépenses fiscales rattachées à ce programme ne représentent plus que 5,6 % en 2011. S'agit-il, comme le projet annuel de performances pourrait le laisser croire, d'une baisse drastique de 40 % de ces dépenses en 2011 ? Non, puisque le tome II de l’annexe relative aux « Voies et moyens » lève le lièvre en indiquant que deux des principales dépenses fiscales du programme n'ont pas été supprimées, mais déclassées : elles sont désormais considérées comme des modalités de calcul de l'impôt. Il s’agit des mesures n° 100112, « Déduction des cotisations versées au titre de l’épargne retraite individuelle et facultative (PERP), et n° 120139, « Exonération des sommes prélevées sur un compte épargne-temps (CET) pour alimenter un PERCO » – plan d'épargne pour la retraite collectif.

De plus, alors que l'évaluation des 27 dépenses fiscales du programme en 2011 est inférieure de 40 % à l'évaluation de ces mêmes dépenses en 2010, aucune explication n'en est présentée dans les documents budgétaires. Je rappelle, que le montant total de ces dépenses passe de 6 milliards en 2010 à 3,6 milliards en 2011.

Je ne puis résister – et c'est ma mission de rapporteur spécial – à vous demander d'éclairer le Parlement sur les raisons de ce déclassement de deux des dépenses fiscales et de nous expliquer pourquoi l'évaluation des 27 dépenses fiscales du programme en 2011 est inférieure de 40 % à l'évaluation de 2010.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Permettez-moi tout d’abord de vous remercier, monsieur le rapporteur spécial, du satisfecit que vous adressez aux agents de l’Agence France Trésor pour leur gestion dynamique de la dette française.

L’accroissement de la dette est-il inéluctable ? Cela dépend de nous et de la rapidité avec laquelle nous reviendrons à l’équilibre budgétaire, seul moyen de stopper la spirale de l’endettement. Le tableau que vous dressez étant assez sombre, je voudrais vous donner quelques raisons d’espérer.

En 2011, le déficit de l'État baissera de 60 milliards d’euros, soit près de 40 %, passant de 152 milliards en 2010 à 92 milliards d’euros. Malgré les 15 milliards que représente la fin du plan de relance, il ne s’agit nullement d’une baisse faciale : 10 milliards proviennent de la réduction des niches fiscales et 35 milliards correspondent au grand emprunt. C'est donc une baisse historique. Jamais, un effort budgétaire aussi important n'a été consenti.

Les dépenses de l'État seront gelées en valeur et le Gouvernement conduira un effort pour réduire les dépenses de fonctionnement et d'intervention de 10 % d'ici à 2013. Les transferts de l'État aux collectivités territoriales seront également gelés en valeur.

S'agissant de la Sécurité sociale, la progression des dépenses d'assurance maladie sera ramenée à 2,9 %, soit nettement moins que leur tendance passée, qui était de 4,5 % par an en moyenne.

Toutes les mesures du PLF 2011 visent à réaliser notre objectif : faire passer le déficit public de 7,7 % en 2010 à 6 % du PIB en 2011, avec l'ambition d'atteindre 2 % en 2014. Ces efforts sont le gage de la réduction future de notre endettement.

S’agissant des modalités de pilotage du grand emprunt, je voudrais également vous rassurer. Aucun engagement ne sera pris en dehors de l’État. Les opérateurs ne feront rien sans l’accord de celui-ci. Les conventions qu’ils passent avec lui prévoient les modalités précises d’instruction des dossiers. Pour chacune des actions, il est institué un comité de pilotage où siègent, outre le commissaire général aux investissements, les ministères concernés auquel rapporte l’opérateur. Ce comité suit les actions engagées et prépare les décisions du Premier ministre, qui in fine valide ou non les opérations. Les conventions prévoient également des restitutions trimestrielles de l’opérateur – un reporting – et, en cas de performance insuffisante, elles donnent à l’État la possibilité de reprendre les fonds pour les réaffecter à d'autres usages.

En ce qui concerne les appels en garantie de l’État, vous avez indiqué que les montants des crédits destinés à couvrir les prêts de l’Agence française de développement et de la Banque européenne d’investissement connaîtraient une baisse de 40 % et s’élèveraient pour 2011 à 75 millions d’euros. Sachez qu’il n’existe aucun désengagement de l’État en matière d’aide publique au développement. En effet, les crédits de l’action n° 5 – « Autres garanties » – à laquelle vous faites référence couvrent les garanties de prêts à hauteur de près de 7 millions pour l’AFD et de 3 millions pour la BEI. Les 65 autres millions sont affectés au provisionnement de garanties non connues à ce jour, contre 124 millions en loi de finances initiale pour 2010. Donc la diminution des crédits de l’action n° 5 concerne exclusivement la partie non identifiée des garanties, qui nous a semblé trop importante.

Pour ce qui est du découvert de l’État auprès du Crédit Foncier de France, dans le programme « Épargne », vous avez bonne mémoire : j’avais en effet affirmé il y a deux ans qu’il faudrait « un certain temps » pour le résorber. Cela étant, il s’est déjà largement réduit, passant de 720 millions d’euros en 2009 à 145 millions cette année. Nous constatons en outre que les dépenses effectuées au titre des primes d’épargne logement sont dans une dynamique de baisse. Le montant total des primes versées au titre de l’année 2010 devrait être de l’ordre de 612 millions d’euros, contre 907 millions en 2009 et 1 588 millions en 2008. Quant à l’apurement total, il s’agit d’un point qui est aujourd'hui en examen et qui pourrait éventuellement être inscrit en loi de finances rectificative.

Vous avez également demandé des éclaircissements au sujet du déclassement de deux des principales dépenses fiscales du programme, la déduction des cotisations des PERP et l’exonération des sommes prélevées sur un compte épargne temps pour alimenter un PERCO. La baisse que vous évoquez tient à trois raisons.

La première tient à la réévaluation à la baisse de 2,1 milliards de la dépense fiscale « Exonération ou imposition réduite des produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation et d’assurance-vie », conformément à une recommandation de l’Inspection générale des finances. Jusqu’à l’an dernier, la dépense fiscale était estimée par différence entre un impôt théorique – consistant à prélever au fil de l’eau les produits générés par l’ensemble des contrats, qui faisaient ou non l’objet d’un dénouement – et l’impôt réellement perçu au titre des seuls contrats dénoués. L’IGF propose de retenir désormais comme modalité de chiffrage l’imposition des produits des contrats d’assurance-vie à leur dénouement, et non l’imposition au fil de l’eau. C’est ce que le Gouvernement a fait.

La deuxième raison est relative au déclassement des dépenses fiscales « Déduction des cotisations des PERP » et « Exonération des sommes prélevées sur un CET pour alimenter un PERCO ». En effet, il ne s’agit pas de dépenses fiscales, mais de simples reports d’imposition dans le temps. Là aussi, le Gouvernement a suivi les recommandations de l’IGF.

La troisième raison, enfin, tient à une réévaluation de la dépense d'exonération des sommes au titre de la participation, qui prend désormais en compte les produits des comptes courants bloqués, soit un montant de 400 millions d’euros.

M. Jean-Claude Flory. Si le crédit d’impôt recherche, le CIR, est un remarquable outil d’accompagnement du développement économique et de l’emploi futur, l’inspection générale des finances n’en recommande pas moins la réduction, dans l’assiette de ce crédit d’impôt, du forfait représentatif des frais de fonctionnement, ou encore la suppression du taux majoré pour les nouveaux entrants afin d’éviter des effets d’aubaine. Quel est votre avis à ce sujet ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Mon jugement est également très positif en ce qui concerne le crédit d’impôt recherche. Ce dispositif, le plus important de tous les pays de l’OCDE, a créé une dynamique d’accélération des dépenses de recherche et de développement en France.

Les recommandations de l’Inspection générale des finances sur les points que vous évoquez n’ont pas été reprises par le Gouvernement. Après de longs débats lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale, le CIR n’a pas connu de modification sensible, conformément à ce que souhaitait la ministre de l’économie.

M. Dominique Baert, rapporteur spécial. Je souhaite également saluer la qualité de l’analyse des collaborateurs de la Commission des finances. Il y a deux ans, en effet, vous aviez jugé excessif le pessimisme des prévisions d’évolution de la dette contenues dans le rapport spécial qu’ils avaient contribué à préparer. Depuis, ces prévisions se sont confirmées presque chiffre pour chiffre ! Bref, nous avions déjà mis en exergue l’explosion et le caractère insoutenable de la dette de l’État.

Par ailleurs, si le besoin de financement de l’État est affiché en diminution, c’est à celle du déficit budgétaire que nous le devrons, je vous en donne acte. Permettez-moi néanmoins de formuler quelques réserves. Compte tenu de la stratégie de réduction des dépenses suivie en France et en Europe, il est à craindre qu’un trou d’air ne vienne freiner la croissance dans les mois à venir. Comme les taux d’intérêt ont tendance à augmenter, donc à accroître la charge de la dette, je redoute que le Gouvernement ne se retrouve l’an prochain avec un déficit subi et non plus voulu, ou accepté, comme cela a été le cas avec le plan de relance.

La dette risque donc de peser longtemps sur les comptes publics. Nonobstant les inflexions que vous affichez en matière de réduction du déficit budgétaire, on a créé ces dernières années un tel socle de dette que l’alourdissement de la charge paraît implacable.

Enfin, les équipes de l’Agence France Trésor, dont j’ai salué tout à l’heure le professionnalisme, ont pour objectif de capter l’épargne mondiale. Dans le contexte macroéconomique que j’ai évoqué, pensez-vous que la dette française pourra améliorer son attractivité ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Entre la commission élargie de 2008 et celle d’aujourd'hui est intervenue la crise économique qui est largement à l’origine de l’explosion des déficits de nombreux pays.

S’agissant des prévisions de croissance et de l’éventualité d’un trou d’air, nous verrons bien ce qu’il en est. Le Gouvernement se situe dans une hypothèse de croissance de 2 % en 2010 et de 2,5 % les années suivantes, et il fera tout pour y parvenir.

Nous ferons également tout pour respecter le rythme de réduction du déficit qui est affiché – à l’horizon 2014, le déficit devrait être ramené à 2 %. Je rappelle qu’un effort sans précédent a déjà commencé : on n’a jamais obtenu, jusqu’à présent, une réduction de deux points en seulement un an.

Vous avez raison de féliciter l’Agence France Trésor. Elle a su innover en instaurant de nouvelles règles pour les opérations de démembrement sur les obligations assimilables du Trésor (OAT). Les capacités de placement résultant de cette innovation, que nous sommes les premiers à mettre en œuvre, sont observées avec grand intérêt par d’autres pays. Ils devraient bientôt nous imiter.

La dette est bien sûr très élevée, mais on peut se féliciter du caractère innovant et performant de sa gestion.

M. le président Jérôme Cahuzac. Vous estimez que la crise est responsable du déficit actuel. Or, le rapport de la Cour des comptes attribue son origine pour un tiers à la crise et pour deux tiers aux politiques publiques qui sont menées. Mais ce n’est bien sûr que l’avis de la Cour des comptes…

Une question également sur la dette obligataire de l’État. Confirmez-vous qu’elle sera amortie à hauteur d’un tiers l’année prochaine ? Quel taux d’intérêt espérez-vous ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. J’ai un très grand respect pour la Cour des comptes, mais elle n’est pas à l’abri d’erreurs et de mauvaises évaluations. Je pourrai fournir des exemples précis.

M. le président Jérôme Cahuzac. Je ne manquerai pas de transmettre cette remarque au Premier président lors d’une prochaine audition !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Pour ce qui est de l’amortissement du stock de dette, il s’élèvera à 97 milliards d’euros, ce qui représente moins de 10 % du total – environ 1 200 milliards. Le taux d’intérêt moyen attendu est de 3 %.

M. le président Jérôme Cahuzac. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie.

La réunion de la commission élargie s’achève à quinze heures cinquante-cinq.

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