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Commission des affaires étrangères

Mercredi 28 octobre 2009

Séance de 9 h 45

Compte rendu n° 10

Présidence de M. Axel Poniatowski, Président

– Examen pour avis des crédits de la mission Action extérieure de l’Etat du projet de loi de finances pour 2010 – Mme Geneviève Colot, rapporteure pour avis sur les crédits des programmes « Action de la France en Europe et dans le monde » ; « Français à l’étranger et affaires consulaires » et M. François Rochebloine, rapporteur pour avis sur les crédits du programme « Rayonnement culturel et scientifique »

– Informations relatives à la commission

Projet de loi de finances pour 2010 – mission Action extérieure de l’Etat

La séance est ouverte à neuf heures quarante cinq.

La commission des affaires étrangères examine pour avis, sur le rapport de Mme Geneviève Colot, rapporteure des crédits des programmes « Action de la France en Europe et dans le monde » ; « Français à l’étranger et affaires consulaires », et sur le rapport de M. François Rochebloine, rapporteur des crédits du programme « Rayonnement culturel et scientifique », les crédits de la mission « Action extérieure de l’Etat » pour 2010.

Mme Geneviève Colot, rapporteure. Le ministre des affaires étrangères et européennes a présenté à notre commission le projet de budget de la mission « Action extérieure de l’Etat », il y a deux semaines. Je ne vais donc pas vous décrire, en détail, les crédits des deux programmes dont j’ai la charge, c’est-à-dire le programme Action de la France en Europe et dans le monde, et le programme Français à l’étranger et affaires consulaires. Je vais en revanche vous donner mon sentiment sur les principales évolutions qui sont proposées : j’ai à la fois plusieurs motifs de satisfaction et quelques inquiétudes.

Les crédits du programme Action de la France en Europe et dans le monde devraient augmenter de 6,13 %, ceux du programme Français à l’étranger et affaires consulaires de 4,76 %.

Mais il ne faut pas voir ces demandes d’augmentation comme reflétant un manque de rigueur budgétaire de la part du ministère. Dans le respect des préconisations du Livre blanc et des décisions prises à l’issue de la RGPP, il prévoit au contraire de réformer profondément ses réseaux et de réduire ses effectifs et ses dépenses de fonctionnement de 2 % en 2010. Je tiens à saluer les efforts qui sont entrepris en ce sens, en administration centrale comme dans les postes, et à féliciter les ambassadeurs qui, dans leur très grande majorité, comprennent les enjeux de la réorganisation des réseaux et acceptent de bon gré les changements inévitables dans le fonctionnement des postes. S’il est demandé à la Représentation nationale une augmentation des crédits, c’est que certaines des dépenses vont inévitablement augmenter, j’y reviendrai.

Le mouvement de réforme en cours au ministère constitue donc mon premier motif de satisfaction. Les postes diplomatiques sont en train d’être réorganisés en trois catégories : les ambassades à missions élargies, les mieux dotées, qui sont au nombre de trente-huit, les ambassades à missions prioritaires, qui sont les plus nombreuses (quatre-vingt douze) et les « postes de présence diplomatique simple, à format allégé et simplifié », soit trente-deux ambassades. La réduction des effectifs des huit ambassades les plus importantes et des ambassades de la troisième catégorie, ainsi qu’un fonctionnement des ambassades plus interministériel doivent conduire à une économie de l’ordre de 380 ETP en trois ans. 190 ETP supplémentaires devraient être économisés grâce à une série d’autres mesures : le recalibrage de la mission consulaire, des opérations de fusion, de mutualisation et d’externalisation. Ainsi, de nombreux consulats ont désormais essentiellement une fonction de veille politique ; les dossiers consulaires sont traités dans un seul poste, le plus souvent dans la capitale du pays concerné, et parfois même dans la capitale d’un autre Etat de la région. La fusion des services de coopération et d’action culturelle avec les centres culturels français à l’étranger est une question que notre collègue François Rochebloine traitera tout à l’heure. On assiste également à des mesures de regroupement, de mutualisation et d’externalisation au moins partielles des fonctions de soutien, comme, par exemple, la création de services communs de gestion, la mise en commun de certains moyens, tels que les véhicules, et le recours à des prestataires de services, principalement pour le gardiennage et le nettoyage. En 2010, ce sont 255 ETPT qui pourront ainsi être supprimés.

Des économies importantes seront aussi consenties sur le « train de vie » du ministère. Les frais de fonctionnement seront réduits de 2 %, en administration centrale comme dans les postes. Il participe ainsi à la maîtrise des dépenses publiques. Cependant, le ministère a fait une priorité du renforcement de la sécurité des postes diplomatiques et de la modernisation de ses équipements informatiques.

Vous allez me dire : les effectifs baissent mais les crédits de personnel augmentent. Le ministère a en effet obtenu 10 millions d’euros supplémentaires sur ces crédits de personnel, et ceci afin de remettre à niveau une enveloppe sous-dotée depuis plusieurs années : c’est aussi un motif de satisfaction dans la mesure où cela facilitera la gestion des ressources humaines du ministère et lui permettra d’utiliser plus complètement son plafond d’emplois. Faute de crédit, les recrutements de contractuels étaient gelés durant les derniers mois de l’année.

Je tiens aussi à féliciter le ministère pour les progrès qu’il a faits dans sa gestion immobilière. Un compte d’affectation spéciale par l’intermédiaire duquel doivent transiter les produits de ses cessions avait été créé. Il devait financer les constructions et les travaux avec ces cessions immobilières. Il ne fonctionne toujours pas comme on pourrait le souhaiter. Cependant, le ministère a considérablement dynamisé sa gestion. Il devrait prochainement être aidé dans cette voie par la création d’une foncière de l’Etat à l’étranger, dont le projet est très avancé. Il pourra être mis en œuvre lorsque nous aurons adopté le projet de loi relatif à l’action extérieure de l’Etat. Je signale par ailleurs que la progression de 65 millions d’euros des crédits de fonctionnement destinés à l’immobilier résulte de la généralisation des loyers budgétaires, qui ne concernaient auparavant que les sites français et un petit nombre de locaux situés à l’étranger.

Sur la question des contributions aux organisations internationales, je suis partagée entre satisfaction et inquiétudes. Déduction faite des 6,7 millions d’euros de contributions qui sont transférées vers d’autres ministères, l’enveloppe dépassera 779 millions d’euros, en hausse de plus de 51 millions d’euros. Cette augmentation est donc conséquente.

Il est pourtant à craindre qu’elle ne soit pas suffisante : pour l’exercice en cours, il manquera près de 90 millions d’euros, alors même que le niveau du dollar par rapport à l’euro est actuellement bas. Comme 70 % des contributions sont versées dans cette monnaie, la question du taux de change est essentielle : la bonne tenue du dollar au début de l’exercice explique la quasi-totalité du besoin de financement de 2009. On ne sait évidemment pas à quel niveau sera le dollar en 2010. A cela s’ajoute le risque de dépenses supérieures aux prévisions sur plusieurs opérations de maintien de la paix et la mise en place de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM). Il est déjà à craindre que les 386,4 millions d’euros ouverts ne suffisent pas.

Il ne faut néanmoins pas dramatiser : la sous-dotation initiale, systématique depuis des années, pose un problème de sincérité budgétaire et complique la gestion des crédits, mais le ministère a toujours obtenu, in fine, les moyens de répondre aux appels de fonds qui lui sont adressés.

Je suis en revanche véritablement inquiète en ce qui concerne le programme Français à l’étranger et affaires consulaires, en particulier pour l’action Offre d’un service public de qualité aux Français à l’étranger. Cette action finance l’action sociale du ministère en faveur de nos compatriotes de l’étranger les plus modestes. L’enveloppe ouverte pour l’action sociale est en baisse de 7,5 % et sera limitée à 14,8 millions d’euros en 2010.

Cette réduction a contraint le ministère à prendre des décisions difficiles. Cette démarche est différente selon que les personnes concernées vivent dans un pays « ancien » membre de l’Union européenne d’une part ou dans un pays nouvellement entrant, ou un autre Etat, d’autre part.

En effet, le ministère n’accordera plus d’allocation mensuelle aux Français qui résident dans l’un des Etats de l’Europe « riche », à l’exception de l’aide aux handicapés et de l’aide à l’enfance en détresse. En application du principe de non-discrimination, ces Français peuvent bénéficier des dispositifs sociaux de leur pays de résidence.

Pour les Français vivant dans les autres pays (nouveaux Etats membres et reste du monde), le montant des aides destinées aux enfants et celui de l’aide complémentaire pour les adultes handicapés sont maintenus au niveau actuel. En revanche, les allocations mensuelles vont être revues à la baisse. Le « taux de base » (c’est-à-dire le plafond, variable d’un pays à l’autre, au-dessous duquel doivent se situer les revenus des bénéficiaires) est réduit de 10 %. Cela aura un impact sur le nombre de personnes aidées et sur le montant des allocations. Environ 4 500 de nos compatriotes les plus modestes vont voir leurs faibles revenus réduits, pour une économie totale de l’ordre de 1,5 million d’euros au mieux ; les consulats risquent d’être contraints de leur accorder des soutiens exceptionnels pour leur éviter une trop grande précarité.

La dotation destinée au dispositif d’aide à l’emploi et la formation professionnelle sera aussi réduite d’un quart (à 600 000 euros), malgré son efficacité. Elle a aidé 4 000 Français à trouver un emploi en 2008.

Je regrette donc que nos compatriotes de l’étranger les plus fragiles soient les principales victimes des économies budgétaires demandées au ministère, alors que les sommes en jeu sont faibles et que le contexte de crise justifierait à lui seul largement le maintien du niveau des aides actuelles.

Il me parait important dans cette présentation d’aborder la question de la prise en charge des frais de scolarité des enfants français dans les lycées de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE). Pour la troisième année, l’enveloppe destinée à cette prise en charge et aux bourses à caractère social augmentera de 20 millions d’euros. Jusqu’ici, cette hausse des moyens a suffi à couvrir l’augmentation des dépenses, qui porte non seulement sur la prise en charge elle-même, étendue à une classe de lycée supplémentaire à chaque rentrée, mais aussi sur les bourses à caractère social : en 2009, la prise en charge devrait coûter plus de 28 millions d’euros et les bourses représenter près de 59 millions d’euros, soit 13,5 millions de plus qu’en 2007. Les prévisions pour 2010 s’établissent actuellement à 45,6 millions d’euros pour la prise en charge et 70 millions d’euros pour les bourses.

Ces évolutions résultent de plusieurs facteurs. Le principal est l’augmentation soutenue des frais de scolarité. S’y ajoute l’accroissement sensible du nombre de demandes, lié à l’augmentation du nombre d’élèves français dans le réseau. Cet accroissement est dû à la qualité de l’enseignement mais aussi à l’effet d’attraction de la prise en charge, qui pousse davantage de familles françaises vers les établissements du réseau de l’AEFE.

Cette hausse exponentielle des coûts est inquiétante, en particulier dans le contexte de forte contrainte budgétaire que nous connaissons. Nous avions déjà attiré l’attention du ministère sur ces phénomènes l’année dernière, sans obtenir le double plafonnement du montant des frais de scolarité d’une part et du revenu des bénéficiaires d’autre part. La commission avait pourtant voté à l’unanimité cet amendement. Le ministère commence néanmoins à mesurer la gravité du problème et à essayer de limiter son ampleur.

Plusieurs mesures d’encadrement ont été décidées en juillet dernier. Elles consistent principalement à refuser les demandes de prise en charge déposées hors délai. Le mode de calcul des droits à bourse dans les fratries comportant un bénéficiaire de la prise en charge a été modifié. La part du revenu disponible des familles affectée aux frais de scolarité pour juger de l’éligibilité à une bourse à caractère social a été augmentée de 5 %. Dans les lycées homologués, le montant de la prise en charge a été plafonné sur le niveau des tarifs en vigueur au moment du lancement de la réforme, c’est-à-dire en 2007.

L’existence même de ces mesures est une bonne chose puisqu’elle témoigne d’une prise de conscience du Gouvernement de la nécessité de limiter l’explosion du coût de la mesure, tout en respectant l’engament présidentiel. Force est néanmoins de reconnaître qu’une partie d’entre elles va se traduire par l’exclusion de certaines familles du dispositif des bourses. Il faudra suivre attentivement leurs effets. Pour ce qui est de la « cristallisation » du montant de la prise en charge, c’est une bonne décision, dont on peut regretter qu’elle soit limitée aux lycées conventionnés. Ceux-ci présentent souvent, il est vrai, les frais de scolarité les plus élevés et la croissance la plus rapide.

Un moratoire a été annoncé sur l’extension de la prise en charge aux classes de collège. Il permettra de respecter les dispositions de l’article 133 de la loi de finances pour 2009, qui impose que toute extension soit précédée d’une étude d’impact transmise au Parlement précisant notamment les modalités de son financement. La raison voudrait que son report soit étendu au moins jusqu’à ce que nos comptes publics soient rétablis.

En conclusion, mes chers collègues, ce projet de budget n’est pas parfait, mais il va dans le bon sens en poussant le ministère à poursuivre ses réformes, tout en lui donnant les moyens de faire face dans des conditions correctes aux dépenses inévitables.

Je vous invite donc à émettre un avis favorable à l’adoption des crédits des deux programmes dont j’ai la charge, et à ceux de la mission dans son ensemble.

Monsieur François Rochebloine, Rapporteur pour avis. Nous revenons cette année à un débat budgétaire « classique », avec une réunion de commission à laquelle succédera une séance publique qui permettra à nos collègues de s’exprimer plus nombreux et qui, surtout, donnera à notre collègue et ami Jacques Myard l’occasion de montrer dans l’hémicycle toute l’étendue de son talent oratoire. Plus sérieusement, cette procédure a une conséquence sur le calendrier de nos travaux. La séance publique étant programmée assez tôt, au tout début des débats budgétaires de seconde partie, nous devons nous réunir une semaine auparavant. Je dois dire que dans le laps de temps qui a séparé le dépôt du projet de loi de finances et notre réunion de ce matin, j’ai eu toutes les peines du monde à rencontrer les membres du cabinet du ministre pour leur poser des questions détaillées. Malgré mes demandes répétées et la libération de plusieurs créneaux dans mon agenda, jusqu’à hier, les conseillers du ministre étaient soit indisponibles, soit non qualifiés pour me répondre sur le fond.

Si le ministre est venu nous présenter le budget de l’action extérieure de l’État le 13 octobre dernier, on ne cesse de me dire à présent que les annonces de sa part sont imminentes sur le sujet majeur qui concerne le périmètre budgétaire dont je suis le rapporteur pour avis, c’est-à-dire la réforme de notre réseau culturel. Là encore, le cabinet du ministre a préféré garder le silence et il n’a pas autorisé la personne chargée de mener l’ultime réflexion sur cette réforme à répondre à mon invitation, dans l’attente des annonces ministérielles. Espérons simplement que nous en saurons un peu plus mardi prochain dans l’hémicycle.

Car la mesure phare du projet de budget, c’est justement la « rallonge » exceptionnelle de crédits que le Quai d’Orsay a obtenue du Premier ministre, à savoir 20 millions d’euros à titre non reconductible, précisément pour accompagner la réforme de l’action culturelle extérieure. Dans le même temps, vingt autres millions d’euros ont été obtenus en exécution 2009, toujours dans le cadre de la réforme en cours de notre réseau culturel. Mais ces crédits pour 2009 n’étant toujours pas disponibles concrètement sur le terrain, il faut espérer qu’ils le seront très prochainement ou, à tout le moins, qu’ils seront reportables sur l’exercice suivant. Je dois toutefois préciser que sur ces 20 millions d’euros encore attendus pour 2009, seuls 6,5 millions d’euros iront au programme 185 « Rayonnement culturel et scientifique » qui relève de l’avis budgétaire dont j’ai la charge. 13,5 millions d’euros iront au programme 209 « Solidarité à l’égard des pays en développement » de la mission « Aide publique au développement ». Quant aux 20 millions d’euros supplémentaires prévus pour 2010, ils seront ventilés entre 8,26 millions d’euros pour le programme 185 et 11,74 millions d’euros pour le programme 209. C’est pour moi l’occasion de souhaiter, une nouvelle fois, que soit mis un terme à cette césure au sein de notre action culturelle extérieure entre, d’une part, les pays de l’OCDE qui relèvent de la mission « Action extérieure de l’État », et d’autre part, les pays relevant de la mission « Aide publique au développement ». À partir du moment où le ministère a fait le choix, lors du passage à la LOLF, de ne pas s’organiser selon une logique géographique mais thématique, il ne me semble pas optimal que le directeur général de la mondialisation, du développement et des partenariats, comme naguère la directrice générale de la DGCID, ne puisse pas piloter ses crédits d’action culturelle en les redéployant d’un pays à l’autre en fonction des priorités, des besoins ou de l’efficacité recherchée. Or aujourd’hui il s’agit de deux enveloppes complètement séparées. Là non plus, le cabinet du ministre n’a pas été très disert car aucune modification de la maquette budgétaire ne semble envisageable tant que s’applique la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2011. L’argument ne me paraît pas imparable.

Quoi qu’il en soit, alors que cette loi de programmation que nous avons votée en février dernier indiquait en 2010 un montant de crédits de 577,4 millions d’euros pour le programme « Rayonnement culturel et scientifique » de la mission « Action extérieure de l’État », la somme demandée dans le présent projet de loi de finances s’élève à 597,9 millions d’euros. Cela représente, par rapport à la loi de finances initiale pour 2009, une progression de 0,9 %, en autorisations d’engagement et crédits de paiement. Comment les crédits de cette « rallonge » seront-ils consommés ? Lors de son audition devant notre commission le 13 octobre dernier, le ministre nous avait déjà un peu renseignés sur ce point. Quatre utilisations sont prévues. Il s’agit, premièrement, d’accompagner la création de la grande agence culturelle en gestation ; deuxièmement, de moderniser notre réseau culturel en le dotant des nouvelles technologies de façon beaucoup plus développée qu’à l’heure actuelle ; troisièmement, d’accompagner les industries culturelles françaises, telles que le cinéma, la musique, le livre et la télévision. À cet égard, les auditions que nous menons actuellement dans le cadre de la mission d’information que je préside sur le rayonnement de la France par son enseignement et sa culture, nous ont permis de découvrir la vitalité des différentes associations chargées de promouvoir ces industries culturelles dans le monde. Le Bureau international de l’édition française, le Bureau export musique et Unifrance accomplissent avec l’appui de moyens publics limités des actions de promotion qui méritent d’être mieux connues et largement encouragées. Quatrièmement enfin, ces crédits supplémentaires et non pérennes serviront à des actions de formation des agents du réseau, en vue de rendre notre diplomatie culturelle plus professionnelle. C’est là un enjeu tout à fait crucial et l’on peut regretter que les financements dégagés à cette fin ne soient que ponctuels.

Pour le reste, la diminution des moyens d’intervention du programme, déjà importante entre 2008 et 2009 puisque le ministre a pu parler d’« effondrement » pour la qualifier la semaine dernière, se poursuit, surtout au sein de l’action 2, consacrée à la « Coopération culturelle, linguistique, scientifique, universitaire et technique ». Globalement, les crédits du programme consacrés à la diplomatie publique d’influence, hors subvention à l’AEFE, s’établiront à 88 millions d’euros en 2010, en baisse de 4,9 % par rapport à 2009. S’agissant en revanche des emplois affectés au programme, exprimés en équivalents temps plein travaillé (ETPT), 2010 devrait marquer une stabilisation (+ 1 ETPT, pour un total de 1 236) après la baisse sensible enregistrée en 2009 (− 45 ETPT).

J’ai dit précédemment que nous attendions les annonces du ministre à propos de la réforme de l’action culturelle extérieure, mais les déterminants de cette réforme sont connus. Après la mise en place, en mars 2009, de la direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats (DGM), l’année 2010 verra se compléter ce que le ministère appelle « le cercle de ses quatre opérateurs », dans les domaines du développement avec l’AFD, de l’enseignement français à l’étranger avec l’AEFE, ainsi que, dorénavant, du rayonnement culturel, de l’attractivité et de la mobilité. En effet, est prévue la mise en place d’une agence culturelle dotée du statut d’établissement public pour l’action culturelle extérieure, selon le projet de loi présenté au conseil des ministres du 22 juillet dernier et déposé le même jour sur le bureau du Sénat. L’agence se substituera à l’association CulturesFrance et doit devenir l’instrument privilégié de la relance de notre action culturelle à l’étranger. En attendant, le présent projet de budget maintient à 9,7 millions d’euros la subvention à CulturesFrance. D’autre part, est prévue dans le même projet de loi relatif à l’action extérieure de l’État la création d’un nouvel opérateur chargé de contribuer au renforcement de l’attractivité et au rayonnement de la France, de promouvoir l’expertise française à l’étranger, de concourir au développement de la mobilité internationale et enfin de faire connaître le système d’enseignement supérieur et de formation professionnelle français à l’étranger. Cet opérateur sera issu de la fusion de l’association Egide et des groupements d’intérêt public France Coopération Internationale et CampusFrance. Dans l’attente de la réforme, CampusFrance voit sa subvention reconduite à 400 000 euros. Ce n’est là que l’un des schémas possibles pour la réforme ; nous en reparlerons lorsque le projet de loi nous sera transmis.

Par ailleurs, je note que ce projet ne tranche pas la question qui doit, après quelques atermoiements, faire l’objet des prochaines annonces du ministre. Je veux parler du choix à effectuer quant au rattachement du réseau culturel, soit au ministère des Affaires étrangères et européennes comme c’est le cas actuellement, soit directement à la future agence culturelle dont la création est proche. Après avoir plusieurs fois « sursis à statuer » cet été, le ministre doit arrêter sa position incessamment. Aura-t-il l’audace de doter l’agence culturelle de son propre réseau ?

J’en viens, pour terminer, à un sujet qui préoccupe particulièrement la mission d’information que je préside, et dont notre collègue Geneviève Colot est le Rapporteur : l’enseignement français à l’étranger, est cet outil irremplaçable de notre influence dans le monde, et ce précieux service rendu à nos compatriotes expatriés. Précieux est bien le mot, car ce réseau coûte de plus en plus cher ! Cela est tout d’abord le résultat de son excellence et par conséquent de son pouvoir d’attraction : il accueillait environ 78 600 élèves français et 89 300 élèves étrangers en 2007-2008, et en 2008-2009, 82 200 élèves français et 91 400 élèves étrangers. Le réseau compte aujourd’hui 461 établissements contre 452 l’an dernier. Il est donc en expansion continue. Mais le coût croissant du réseau résulte aussi de l’augmentation de certaines dépenses nouvellement mises à la charge des établissements, comme la contribution pour pensions civiles des personnels détachés, appliquée depuis le 1er janvier 2009. 10 millions d’euros supplémentaires sont prévus à ce titre en 2010 au sein de la subvention de l’État à l’AEFE, mais cela ne suffira pas à couvrir les besoins. Je pense également au coût de l’investissement et de l’entretien immobiliers qui pèse de façon croissante sur l’Agence, à hauteur de 60 millions d’euros en 2009. La seule mise aux normes de sécurité du parc existant nécessiterait immédiatement 50 millions d’euros. D’une façon générale, la subvention nette à l’AEFE, hors bourses et prise en charge des écolages pour les lycéens français et hors contribution pour les pensions, qui s’élevait à 292,67 millions d’euros en 2009, serait ramenée à 277,82 millions d’euros en PLF 2010, tandis que les effectifs augmentent. Pour faire face, l’AEFE demande aux établissements, et donc aux familles, des participations toujours plus élevées, et puise dans son fonds de roulement en diminution constante.

C’est notamment pour ces raisons que je proposerai un amendement visant à plafonner la prise en charge de la scolarité des enfants français, et à redéployer ces moyens pour soulager le budget de l’AEFE. Sous cette réserve, je vous propose d’émettre un avis favorable à l’adoption des crédits du programme « Rayonnement culturel et scientifique » pour 2010, dans l’attente de la réforme tant annoncée du réseau culturel.

M. le président Axel Poniatowski. Je remercie nos deux rapporteurs pour leur travail. Je rappelle que nous sommes invités à déjeuner par le ministre ce midi et que ce sera l’occasion de lui dire de vive voix ce que l’attitude inadmissible de son cabinet a d’inacceptable. Ce n’est d’ailleurs pas sans précédent, puisque deux de nos collègues, Claude Goasguen et Jean Mallot, dans le cadre du travail qu’ils mènent au sein du Comité d’évaluation et de contrôle sur les études d’impact, ont déjà eu l’occasion de faire ce genre de remarque. Il nous appartient de marquer notre protestation vigoureuse.

M. Roland Blum. Je voudrais poser deux questions à Geneviève Colot. En ce qui concerne le programme 151, a-t-on pu évaluer l’impact sur l’AEFE de la création des nouveaux sièges de députés, compte tenu du fait que les 12 sénateurs de l’étranger en sont déjà membres de droit ? Dans le programme 105, il est prévu 1 million d’euros à l’action n° 1 pour le financement d’associations. De quelles associations s’agit-il ? Des ONG ? De quel type ? Quels sont les contrôles prévus quant à l’utilisation des fonds ? J’ai posé il y a quelque temps une question écrite au ministre à ce sujet, pour laquelle j’attends toujours la réponse !

M. Hervé de Charette. Je formulerai quatre observations sur le budget. Sur les moyens des postes, tout d’abord, dont les effectifs sont en baisse constante. Il nous manque une analyse globale et sérieuse quant à la stratégie du ministère des affaires étrangères et européennes en matière de ressources humaine, qui ne semble pas claire. On ne peut continuer ainsi. Le ministère a une capacité de réflexion sur ces questions qui est des plus faibles. La répartition des effectifs est mauvaise et je voudrais savoir ce que l’on peut demander au Quai d’Orsay en termes de prospective pour qu’il défende ses moyens et maîtrise ses dépenses.

Ensuite, en ce qui concerne le soutien au multilatéralisme, nous passons de 140 à 70 organisations internationales financées par le ministère. Quelle est la liste détaillée des organisations maintenues et des sacrifiées ? La maîtrise des coûts des organisations internationales est souhaitable mais elle nous échappe. Il y a beaucoup de laxisme et une politique plus stricte est logique et nécessaire. Il me semble aussi hautement souhaitable, par exemple, qu’on réduise le montant de nos participations à certaines des opérations de maintien de la paix. Notre présence est parfois très discutable et doit être plus sélective. Il est grand temps par exemple que nous quittions l’Afghanistan.

En troisième lieu, la gratuité de la scolarité dans les établissements français à l’étranger est une catastrophe. Il y faut de l’argent public car des investissements sont à réaliser. Nous faisons actuellement faire des bénéfices aux entreprises privées.

Enfin, concernant notre politique culturelle à l’étranger, il est de notre responsabilité d’être extrêmement vigilants car le ministère ne l’est pas suffisamment. Cela étant, je soutiens le ministre des affaires étrangères qui est un excellent ministre.

Mme Martine Aurillac. Parmi les suppressions de postes consulaires, le consulat de Saint Louis, au Sénégal, est-il concerné ? Ce serait très grave, car il est très symbolique de notre présence. En ce qui concerne l’Europe, le service européen d’action extérieure va-t-il recevoir des crédits du ministère ou de la Commission européenne ?

M. Jean-Marc Roubaud. Dans le cadre de la RGPP, la réflexion a-t-elle été menée pour que les conseillers économiques des ambassades dépendent du Quai d’Orsay et pas uniquement de Bercy comme c’est le cas actuellement ? A l’heure de la globalisation, ce serait opportun qu’il y ait une action concertée entre le ministère des affaires étrangères et européennes et le ministère des finances ; ce n’est toujours pas le cas et c’est dommage.

M. le président Axel Poniatowski. C’est une question très intéressante dont je parlais très récemment avec M. Didier Migaud qui considère que le secrétariat d’Etat au commerce extérieur devrait dépendre du ministère des affaires étrangères et européennes.

M. Jean-Paul Lecoq. Il serait bon d’accompagner la discussion budgétaire d’un débat sur l’efficacité des ambassades. Je défends totalement les positions exprimées par Hervé de Charette sur les finances, notamment en ce qui concerne les établissements d’enseignement à l’étranger : cette politique a pour conséquence de moins donner à ceux qui en ont le plus besoin, c’est-à-dire aux boursiers, c’est un pur scandale. En revanche, quant aux questions culturelles, je ne me fais pas trop de souci : la culture passe aujourd’hui beaucoup par l’Internet et les ressortissants français à l’étranger ont toujours la possibilité de télécharger, sans être soumis à la loi Hadopi. Par contre, en ce qui concerne les investissements, je souscris aux conclusions du rapport de François Rochebloine, même si je ne serais pas aussi optimiste sur l’agence culturelle.

M. Philippe Cochet. Trois types d’ambassades vont être institués, mais le monde bouge et les situations peuvent évoluer. Y a-t-il une réflexion prospective sur l’adaptation de ce dispositif ? Par ailleurs, les alliances françaises ne doivent pas s’exclure des politiques publiques et elles devraient notamment s’impliquer davantage en faveur de certaines actions, comme par exemple la réalisation des tests de connaissances civiques et linguistiques des migrants et leur formation, sur lesquelles elle fait preuve d’une certaine réticence.

M. le président Axel Poniatowski. C’est plus une opinion qu’une question.

M. Jacques Myard. Il est urgent de souligner que le MAEE est le seul ministère qui perd des effectifs de catégorie A. Il y a une sorte d’exercice masochiste de la part de Bercy vis-à-vis du Quai d’Orsay qui doit cesser. Nous devons réagir. Tout cela date de l’époque de Hubert Védrine. Je regrette que le budget nous arrive une fois de plus négocié en amont, sans qu’on ait aucune prise dessus. Nous devrions intervenir bien plus tôt.

Quant au multilatéralisme, il y a 150 millions d’euros de plus que pour le bilatéralisme, qui permet pourtant plus de visibilité. Je ne veux pas jeter le bébé avec l’eau du bain, mais je remarque qu’il y a 386 millions d’euros consacrés aux OMP, dans des pays où nous n’avons pas forcément d’intérêts directs. Pourquoi également finance-t-on à hauteur de 10 millions la CPI ? Cela me paraît beaucoup, compte tenu des contributions des autres grands pays, Allemagne, Royaume-Uni. Je ne comprends pas non plus pourquoi nous finançons encore une ligne de 47 millions d’euros pour l’Europe sur ce programme, alors qu’il y a en parallèle le budget communautaire. A quoi cette somme énorme est-elle consacrée ? Cela m’amène à la question de l’articulation des dispositifs : nous assistons à la réduction du nombre de nos cadres diplomatiques au moment où le service européen d’action extérieure va se créer, qui risque d’être un lieu de paralysie. Comment l’articulation de ce service va-t-elle se faire avec les diplomaties des Etats membres ? Y aura-t-il des critères de recrutement, notamment sur le plan linguistique ? J’approuve enfin totalement l’amendement de François Rochebloine sur la question du rayonnement culturel et linguistique.

M. François Asensi. Je ferai un commentaire général. Il est regrettable qu’il y ait un recul de la France au plan extérieur. Il s’agit de missions régaliennes et, à l’heure de la globalisation anglo-saxonne, il est important de maintenir le rayonnement culturel de la France et que ne se perde pas son message universel. Or, il y a des baisses d’emplois, des pertes sèches, la restructuration du réseau d’ambassades selon trois catégories ; c’est dommage. L’identité nationale, c’est aussi le regard extérieur sur notre nation et si notre rayonnement culturel diminue, une part de notre identité française s’affaiblit. Je regrette cet affaiblissement et remarque enfin que si on a réintégré l’OTAN, l’idée de défense européenne en revanche n’a pas progressé.

Mme Marie-Louise Fort. Il semblerait que certains ambassadeurs n’aient pas d’affectation et restent longtemps à Paris en attente d’une nomination. Est-ce vrai ? Y a-t-il une bonne gestion des ressources humaines au ministère des affaires étrangères et européennes ?

M. Hervé Gaymard. Sur l’organisation du dispositif économique et commercial, on doit distinguer le souverain du non souverain. La réforme était indispensable mais il faut désormais aller plus loin et l’économie n’est pas distincte de la réalité du monde. Or, il y a une certaine culture d’ambassade avec le « noble », à savoir le politique, qui relève de la chancellerie, et le reste. Il faut casser cela et unifier les carrières pour produire une mixité, des passerelles entre postes diplomatiques, consulaires et économiques, à l’instar de ce que font les Allemands ou les Américains. Il faudrait également comparer notre système avec le modèle allemand des chambres de commerce à l’étranger, plus efficace et moins coûteux.

M. André Schneider. La stabilité des crédits consacrés à la francophonie a été annoncée. Est-ce confirmé ? En ce qui concerne le rayonnement de la France, je voudrais des précisions complémentaires sur le recrutement des personnels qui enseignent le français à l’étranger.

M. Robert Lecou. Je suis préoccupé car lorsqu’on se déplace à l’étranger, on se rend compte que les moyens des postes ne sont plus à la hauteur des besoins ni de ce que l’on attend de la France. Cela ne correspond plus à l’image de notre pays. L’Asie est en train de prendre une place croissante dans la mondialisation et si nous n’y prenons garde, le rayonnement de la France risque d’en pâtir sérieusement. C’est notamment dans les petites ambassades qu’il convient de faire le plus attention, la France doit mieux garantir son rayonnement. Je soutiendrai enfin l’amendement de François Rochebloine : il faut que nous tirions un signal d’alarme.

M. Jacques Remiller. Revenant sur deux questions posées antérieurement, je me demande s’il ne faut pas viser à plus de cohérence et de d’efficacité sur le long terme. J’ai eu l’occasion d’aller à Rome à plusieurs reprises ces dernières semaines. Il semblerait qu’un regroupement de nos trois ambassades, auprès de l’Italie, du Vatican et de la FAO, soit envisagé sur le site du Palais Farnèse. Est-ce ou non confirmé ? Il y a des inquiétudes.

M. Didier Mathus. Tout le monde s’accorde à dire que la gratuité de l’enseignement est une fausse bonne idée, qui se révèle finalement inefficace et nocive. On constate une baisse des moyens, une diminution du nombre d’enseignants expatriés et un seuil critique existe en deçà duquel la qualité sera menacée. Il aurait fallu plus de moyens. Je suis par ailleurs perplexe et sceptique sur l’agence culturelle qu’on nous annonce. Le parallèle avec l’AEFE n’est pas justifié car les objectifs de celle-ci sont précis. L’AEFE a une tâche simple : assurer la scolarité des enfants à conduire jusqu’au baccalauréat. En revanche, l’agence culturelle a des objectifs qui semblent peu clairs. Elle risque d’être surtout « glamour » à Paris, mais au-delà ?

M. Jean-Pierre Kucheida. Je souscris totalement à ce qu’a dit Hervé de Charette. Ce budget ne répond pas aux besoins. Je suis surpris de voir que tout le monde déplore la baisse de 250 emplois alors que les mêmes applaudissent par ailleurs à la baisse des effectifs de fonctionnaires ! Les ambassades sont une part de notre fonction publique et c’est donc toute la politique du gouvernement qui est à remettre en cause. La fonction publique joue un rôle essentiel, le rayonnement de la France se ressent de ces diminutions, tout le monde ici a pu le constater. Il faut maintenir ces 250 emplois et même, pour garantir le rayonnement et le dynamisme de notre pays, les augmenter : quand on a 55 milliards de déficit commercial, on peut s’interroger. Sur le plan culturel, je souscris à l’amendement de François Rochebloine qui permettra de corriger la situation.

M. le président Axel Poniatowski. Je crois toutefois utile de préciser que, malgré cette baisse de 250 emplois, la France conservera le deuxième réseau diplomatique au monde.

M. Jean Glavany. Au nom du groupe PS, je voudrais exprimer notre mécontentement sur le fait que l’on n’arrive pas à obtenir du gouvernement l’organisation d’un débat sur l’Afghanistan. Nous avons 3 300 hommes là-bas, le secrétaire général de l’OTAN vient de remercier la France de l’envoi de personnels supplémentaires, dont nous ne sommes pas au courant ! Nous sommes face à une politique qui, après la défaite des talibans, a été une impasse et un échec et aucun débat n’est organisé en France sur ce sujet ! Nous en sommes à la deuxième révision stratégique, qui ne fait l’objet d’aucune discussion chez nous. Quand on voit le niveau du débat, y compris dans la presse, que ces questions suscitent chez nos voisins, ainsi qu’aux Etats-Unis par exemple, on est en droit de se demander si le parlement français est le seul qui n’ait pas le droit de débattre. J’ai sollicité le Premier ministre qui a répondu à ma demande qu’il n’y aurait pas de débat sauf si le groupe socialiste en faisait la demande dans le cadre de sa niche parlementaire ! Le gouvernement n’a-t-il donc rien à dire ?

M. le président Axel Poniatowski. Je crois qu’il faut être raisonnable : dans le cadre de l’ordre du jour partagé désormais en vigueur, il est incontestable que le gouvernement a vu son temps disponible considérablement réduit, compte tenu notamment de la quantité de textes qu’il doit présenter. Mais rien n’empêche effectivement le groupe socialiste de prendre l’initiative de ce débat, sur le principe duquel je suis totalement d’accord.

M. Jacques Myard. Je suis entièrement d’accord. Il y a effectivement un problème stratégique majeur dont il faut débattre. S’il s’agit d’une question de temps, je suis d’accord pour demander ce débat sur le temps de la majorité.

M. Jean-Luc Reitzer. Je voudrais dire à Jean-Pierre Kucheida qu’on peut très bien globalement vouloir diminuer les effectifs de la fonction publique tout en ayant pour souci de maintenir ceux du ministère qui effectivement, souffre particulièrement. On a notamment parlé de suppression d’agents de catégorie A. Tout est lié et on voit en revanche la politique que mènent l’Allemagne, l’Italie, le Royaume uni, avec les résultats que l’on sait. Il y a une réelle faiblesse de notre outil diplomatique. La question des bourses est aussi de celles qui auront des répercussions non seulement à court terme, mais aussi à moyen et long terme, dans la mesure où la densité du réseau d’influence, les liens d’amitié avec notre pays, qu’elles permettent sur une longue durée, ira diminuant. On sait le travail exceptionnel des lycées français à l’étranger que nous avons tous pu constater et il est certain qu’il faudra faire de lourds investissements pour les maintenir. Enfin, les alliances françaises sont des outils essentiels et dans certains pays elles sont seules pour assurer la présence culturelle de la France.

M. Michel Terrot. Je constate que la conjonction entre la diminution des fonds disponibles et la RGPP conduit à chaque fois à la diminution du bilatéralisme au profit du multilatéralisme, et ce, budget après budget. Et cela se traduit à chaque fois par une moindre visibilité de notre pays. Il est temps d’envoyer des signaux très forts au ministre pour lui dire son obligation de défendre la langue française sur la scène internationale. Il y a urgence dans cette nécessité. Je suis également sceptique sur l’agence culturelle qui risque de n’être qu’une grosse structure de plus, sur laquelle, en tout cas, il sera essentiel que le ministère et les postes exercent la plus attentive tutelle.

M. le président Axel Poniatowski. Je rappelle que c’est précisément pour répondre à cette inquiétude que la mission d’information sur l’équilibre entre le multilatéralisme et le bilatéralisme a été créée au sein de la commission des affaires étrangères.

M. Loïc Bouvard. Les lycées français à l’étranger ont effectivement un grand rayonnement. J’ai noté les chiffres de François Rochebloine selon lequel ils accueilleraient environ 80 000 lycéens français et 90 000 étrangers. Les Français ont logiquement la priorité, mais ce ne sont pas eux qui, finalement, contribueront au rayonnement de notre pays, ce sont les enfants étrangers qui y sont scolarisés et acquièrent notre langue et notre culture. Or, j’ai pu constater par exemple qu’à Lisbonne, les jeunes Portugais étaient refusés, faute de place. Savez-vous quel est le nombre global de refus ?

M. le président Axel Poniatowski. Cela justifierait sans doute une question écrite au ministre.

M. Gilles Cocquempot. Concernant le réseau consulaire, le Vietnam pose le cas particulier d’un pays au territoire très allongé et j’ai réclamé au contraire une augmentation du nombre des postes consulaires pour éviter que les gens n’aient à se déplacer à Hanoi ou Ho-Chi-Minh Ville, devant prendre l’avion, passer une nuit à l’hôtel, pour effectuer leurs formalités. Il faudrait le rappeler au ministre la nécessité d’un autre poste consulaire au centre du pays.

M. Hervé de Charrette. Concernant le débat entre le bilatéralisme et le multilatéralisme, Hubert Védrine brocarde souvent, à tort, le concept de communauté internationale. La France contribue précisément à l’émergence de la communauté internationale et il est tout à fait justifié qu’on soit présent et que l’on contribue financièrement à ses différentes instances. Il faut donc une aide multilatérale significative même si elle doit être sélective, c’est très important.

Mme Geneviève Colot, Rapporteure. Les députés représentant les Français de l’étranger ne coûteront rien à l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE) car, comme c’est le cas actuellement pour les Sénateurs membres de droit de l’AFE, aucune rémunération autre que celle versée par leur assemblée parlementaire n’est prévue.

S’agissant des critères présidant au choix des associations financées sur les crédits du ministère des Affaires étrangères et européennes, je pourrais vous en citer la liste ; celle-ci figurera dans mon rapport écrit. J’admets que le contrôle de l’utilisation de ces crédits pourrait être renforcé. Dans la plupart des cas, il ne s’agit pas d’ONG, et le financement porte sur des opérations ponctuelles, pas sur le fonctionnement courant. Voici par exemple la liste des huit associations bénéficiant d’une subvention supérieure à 75 000 euros : le centre d’accueil de la presse étrangère, la Fédération française des maisons de l’Europe, le Mouvement européen France, le groupement d’intérêt économique Toute l’Europe, la Fondation Robert Schuman, l’Union des Français de l’étranger, l’Association démocratique des Français de l’étranger et l’Institut français des relations internationales.

La diminution des effectifs du ministère était prévue par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2011. Certes, une baisse de 700 ETPT sur trois ans représente un effort important pour le ministère, d’autant qu’elle fait suite à une diminution de 760 ETPT au cours des trois années précédentes. Même si cela n’est pas en soi une justification, le fait est que ces réductions d’effectifs portent souvent sur des personnels recrutés locaux, occupant des emplois de service dans les postes, et rarement sur des emplois de fonctionnaires de niveau plus élevé.

Les organisations internationales bénéficiaires de contributions inscrites sur le budget du ministère des Affaires étrangères et européennes étaient naguère au nombre de 140 et elles ne sont plus aujourd’hui que 80 car beaucoup parmi elles relevaient de la compétence d’autres ministères, auxquels les crédits correspondants ont été transférés. Le Quai d’Orsay pourra en fournir la liste complète.

Je dois malheureusement confirmer à notre collègue Martine Aurillac que le consulat de Saint-Louis du Sénégal sera supprimé en 2010, en raison du peu de ressortissants français résidant dans cette région et du faible nombre de visas délivrés. Le poste compétent sera dorénavant celui de la capitale.

Le moratoire appliqué à la mesure de prise en charge des écolages des enfants français scolarisés dans le réseau des lycées français à l’étranger intervient dans la situation suivante : en 2009, pour 19 853 enfants boursiers, le coût des bourses « sociales » est de 58,82 millions d’euros. Il sera l’an prochain de 70 millions d’euros pour 20 000 boursiers. Quant à la mesure de gratuité, elle représente en 2009 un coût de 28,19 millions d’euros pour quelque 5 500 enfants pris en charge ; en 2010, il en coûtera au budget de l’État 45,64 millions d’euros pour 9 500 enfants. Les moyens alloués augmenteront donc sensiblement. Au total, ce sont ainsi 29 500 enfants qui bénéficieront d’un soutien budgétaire sur le total de 82 000 élèves français fréquentant le réseau. J’ajoute, pour répondre à une question précise sur ce point, que le montant des ressources prises en compte pour l’éligibilité aux bourses scolaires est en effet relevé de 5 %, de sorte que certaines familles sortiront du dispositif.

Le classement en trois catégories d’ambassades traduisant les décisions du Conseil de modernisation des politiques publiques nous a été communiqué. Les postes y sont répartis entre 38 ambassades à missions élargies, 92 ambassades à missions prioritaires centrées sur l’activité diplomatique et consulaire traditionnelle, et 32 postes de présence diplomatique dans les États de petite taille ou accueillant peu de ressortissants français. À titre d’exemple, cette dernière catégorie comprend nos ambassades en Andorre, à Malte, près le Saint-Siège, au Monténégro – qui sont incontestablement de petits États –, ou encore au Tadjikistan ou en Mongolie – qui sont des États avec lesquels nos relations sont d’une intensité assez réduite.

Les organisations européennes financées sur les crédits du programme « Action de la France en Europe et dans le monde », pour un total d’environ 37 millions d’euros en 2010, ne sont pas des institutions communautaires : il s’agit principalement du Conseil de l’Europe pour 34 millions d’euros et de l’Union de l’Europe occidentale pour 2,46 millions d’euros.

Le problème des ambassadeurs sans affectation tient à la forme atypique de la pyramide des âges de ce corps de fonctionnaires, avec un sommet large et une base étroite. Une vingtaine de diplomates pouvant prétendre à un emploi d’ambassadeur sont en attente de poste. Ces dernières années, a été mis en place un dispositif d’incitation à la fin d’activité pour ceux de ces diplomates qui sont âgés de 58 à 62 ans. Un « pécule de départ » leur était proposé, correspondant à la moitié du total des primes auxquelles ils auraient pu prétendre entre la date de leur départ effectif et la date théorique de leur mise à la retraite. 19 ambassadeurs ont utilisé ce dispositif. Le ministère souhaite qu’un dispositif du même type soit créé à compter de 2010 et offre une possibilité de départ à trente cadres du ministère.

M. François Rochebloine, rapporteur. Les crédits consacrés à la francophonie multilatérale sont maintenus, dans le projet de budget pour 2010, à 65 millions d’euros, dont 13 millions d’euros au titre de la contribution statutaire de la France à l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) et 48 millions d’euros à titre de contributions sur conventions pluriannuelles d’objectifs et de moyens à l’OIF et aux opérateurs. Ces crédits sont inscrits sur le programme 209, ce qui me permet une fois de plus de plaider pour une « réunification » de l’action culturelle, au moins au sein d’une même mission.

Si certains élèves étrangers ne trouvent pas de places dans les lycées français, c’est souvent à cause du dispositif de prise en charge, dont la mise en œuvre s’est traduite par une forte augmentation du nombre d’élèves français, prioritaires par rapport aux étrangers.

Un autre effet pervers de ce dispositif est observé dans les fratries. Certaines familles bénéficient aujourd’hui d’une prise en charge des frais de scolarité moins élevée que par le passé car le fait que les aînés fréquentent une classe devenue gratuite pour eux a parfois pour effet de priver les cadets de bourses sur critères sociaux.

Le travail réalisé par les Alliances françaises est remarquable, surtout au regard de leurs moyens souvent très limités. Il n’est pas dans leur rôle de faire passer des tests de langue ou de connaissance des valeurs de la République aux étrangers, même si elles peuvent évidemment leur fournir une formation linguistique.

Il est difficile de se prononcer sur la future agence culturelle tant que le ministère n’en a pas révélé davantage sur les missions qui lui seront confiées. Le principal avantage qu’elle offrira sera d’isoler et donc de protéger les crédits d’intervention dans le domaine culturel.

Article 35 : Etat B – Mission « Action extérieure de l’Etat »

M. François Rochebloine, rapporteur. L’amendement que je vous propose vise à obtenir un plafonnement du niveau de revenu des familles bénéficiaires de la prise en charge des frais de scolarité, en tenant compte de la zone où elles résident. Je demande que les 10 millions d’euros qui pourraient être économisés soient transférés sur la subvention de l’AEFE et utilisés au profit de ses dépenses immobilières.

Le Président Axel Poniatowski. L’amendement fixe-t-il le niveau de ce plafonnement ?

M. François Rochebloine, rapporteur. Non, la fixation des plafonds relève du domaine réglementaire.

La commission adopte à l’unanimité l’amendement de M. François Rochebloine (amendement n° II- 12).

Suivant les conclusions des deux rapporteurs pour avis, la Commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l’Etat » pour 2010, ainsi modifiés.

*

Informations relatives à la commission

La commission a nommé :

– M. André Schneider, rapporteur du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre la France et la Belgique pour le développement de la coopération et de l’entraide administrative en matière de sécurité sociale (n° 1956) ;

– M. Jean-Paul Dupré, rapporteur du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation de l’accord-cadre entre la France et le Botswana sur l’éducation et la langue française (n° 1980) ;

– M. Didier Julia, rapporteur du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation de la convention relative à la coopération en matière de sécurité et de lutte contre la criminalité organisée entre la France et la Libye (n° 1981) ;

– M. Claude Birraux, rapporteur sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation de l’accord de coopération entre la France et l’Inde pour le développement des utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire (n° 1982).

La séance est levée à onze heures quinze.

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Membres présents ou excusés

Commission des affaires étrangères

Réunion du mercredi 28 octobre 2009 à 9 h 45

Présents. - Mme Sylvie Andrieux, M. François Asensi, Mme Martine Aurillac, M. Jean-Paul Bacquet, M. Jacques Bascou, M. Christian Bataille, M. Claude Birraux, M. Roland Blum, M. Loïc Bouvard, M. Jean-Christophe Cambadélis, M. Hervé de Charette, M. Jean-Louis Christ, M. Pascal Clément, M. Philippe Cochet, M. Gilles Cocquempot, Mme Geneviève Colot, M. Michel Destot, M. Tony Dreyfus, M. Jean-Paul Dupré, M. Jean-Michel Ferrand, Mme Marie-Louise Fort, M. Hervé Gaymard, M. Jean Glavany, M. Gaëtan Gorce, M. Jean Grenet, Mme Élisabeth Guigou, M. Jean-Jacques Guillet, M. Jean-Pierre Kucheida, M. Jean-Paul Lecoq, M. Robert Lecou, M. Lionnel Luca, M. Didier Mathus, M. Jacques Myard, M. Alain Néri, M. Jean-Marc Nesme, M. Henri Plagnol, M. Axel Poniatowski, M. Éric Raoult, M. Jean-Luc Reitzer, M. Jacques Remiller, M. Jean Roatta, M. François Rochebloine, M. Jean-Marc Roubaud, M. Rudy Salles, M. André Santini, Mme Odile Saugues, M. André Schneider, M. Dominique Souchet, M. Michel Terrot, M. Gérard Voisin.

Excusés. - Mme Nicole Ameline, M. Jean-Michel Boucheron, Mme Chantal Bourragué, M. Jean-Pierre Dufau, M. Serge Janquin, M. Didier Julia, Mme Henriette Martinez.