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Commission des affaires étrangères

Mercredi 17 février 2010

Séance de 11 h 00

Compte rendu n° 43

Présidence de M. Axel Poniatowski, président

Audition, ouverte à la presse, de Daniel Shek, ambassadeur d’Israël en France

Audition de M. Daniel Shek, ambassadeur d’Israël en France

La séance est ouverte à onze heures.

M. le président Axel Poniatowski. Mes chers collègues, nous recevons ce matin M. Daniel Shek, ambassadeur d’Israël en France.

Monsieur l’ambassadeur, je vous remercie d’avoir accepté notre invitation.

Les relations israélo-palestiniennes sont aujourd’hui dans une situation particulièrement difficile même si, bien entendu, il ne faut pas désespérer. Les négociations officielles entre les autorités israéliennes et palestiniennes sont interrompues depuis l’intervention militaire israélienne à Gaza et nous souhaitons tous une relance du processus de paix.

Comment y parvenir ? À quel niveau se situent aujourd'hui les échanges et les contacts ? Qui parle encore avec qui ? Le moratoire de la colonisation décidé par Israël n’est pas suffisant puisqu’il n’empêche pas la poursuite de la colonisation à Jérusalem-Est. De même, la constitution de commissions d’enquête consécutives au rapport Goldstone, annoncée par les deux parties, paraît également au point mort.

Monsieur l’ambassadeur, nous souhaitons entendre le point de vue d’Israël. Je rappelle que, comme il est d’usage à la commission, votre audition sera suivie la semaine prochaine par celle de Mme Hind Khoury, déléguée générale de Palestine en France, qui viendra exprimer la position palestinienne.

Il y a un an, une délégation parlementaire de l’Assemblée nationale, conduite par M. Bernard Accoyer, s’était rendue sur place. Nous étions convenus de reproduire un an plus tard cette mission, que je conduirai. Nous comptons sur vous, monsieur l’ambassadeur, pour faciliter son organisation, Gaza étant toujours aussi difficile d’accès pour les parlementaires. J’en veux pour preuve le fait qu’une délégation du Parlement européen n’a pas encore réussi à obtenir les autorisations nécessaires.

M. Daniel Shek, ambassadeur d’Israël en France. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de l’honneur que vous me faites en me recevant de nouveau. Ma précédente venue date de janvier 2009.

Je dois reconnaître que, concernant l’évolution au Proche-Orient, 2009 aura été une année difficile, même pour les optimistes comme moi, puisque, d’une part, nous n’avons observé aucun relâchement dans les menaces qui pèsent sur la région et que, d’autre part, nous n’avons pas pu faire avancer les négociations et le processus de paix. Sans être au point mort, les canaux de la négociation n’ont pas connu une activité débordante.

Il convient de commencer par l’Iran, comme le justifient tant la lecture des journaux français et israéliens que les événements eux-mêmes. Le Président de la République française a coutume de dire que la nucléarisation éventuelle de l’Iran est le défi numéro un que la communauté internationale doit aujourd'hui relever. Je pense, à l’instar des dirigeants de mon pays, qu’il a d’autant plus raison qu’Israël est dans la ligne de mire des intentions iraniennes. Il est toutefois nécessaire de rappeler que la question du nucléaire militaire iranien ne concerne pas le seul État d’Israël et qu’elle est appelée à avoir un impact considérable sur la situation géostratégique de toute la région, voire du monde entier.

En 2009, l’Iran s’est révélé dans tout son cynisme et sa capacité de manipulation de la communauté internationale : s’il a fait semblant de vouloir ouvrir des négociations avec les pays du Groupe des six, principalement les États-Unis, en réponse à la main tendue du président Obama, alors nouvellement élu, très vite, chacun s’est rendu compte qu’il ne s’agissait que d’un stratagème supplémentaire visant à gagner du temps, celui-ci étant, aux yeux des Iraniens, une matière première tout aussi importante que l’uranium enrichi, car il leur est nécessaire pour conduire à son terme leur projet de nucléaire militaire. Du reste, durant l’année, l’existence d’autres installations nucléaires, inconnues jusqu’alors, a été révélée, ce qui sème un doute supplémentaire sur la crédibilité des déclarations des dirigeants iraniens depuis le début de cette affaire.

L’année 2009 a également vu un sursaut impressionnant de l’opposition et du peuple iraniens face à un pouvoir qui, notamment depuis les élections, s’est montré chaque jour plus oppressif : non seulement il persécute les minorités, notamment les homosexuels, mais, de plus, les trois-quarts des exécutions de mineurs dans le monde ont lieu sur le sol iranien – plus de 130 cette année.

Un réveil s’est produit ces derniers mois et les espoirs, louables, mis par les États-Unis et le Groupe des six, dans une possible négociation avec l’Iran en vue de résoudre à l’amiable la question nucléaire, se sont évanouis. Désormais tous les pays, en premier lieu les États-Unis, comprennent qu’il convient de recourir aux moyens de pression que la diplomatie offre à la communauté internationale, notamment à des sanctions efficaces et suivies, sévères non pas envers le peuple iranien mais envers le régime lui-même. Les sanctions sont un outil pacifique que la communauté internationale peut utiliser pour faire valoir ses positions dans un dossier en suspens depuis trop longtemps : l’arrêt du programme nucléaire iranien. Le Parlement européen a du reste adopté récemment une résolution à l’égard de l’Iran qui me semble témoigner de ce réveil et traduire un sentiment d’urgence.

Les ondes de choc de la question iranienne conduisent jusqu’au Proche-Orient, du fait que l’Iran continue de soutenir des organisations telles que le Hezbollah et le Hamas, et de fomenter des troubles dans notre région. Chaque fois que la situation semble se stabiliser, des événements liés à l’Iran se produisent dans la région, que ce soit sous forme de déclarations ou de manœuvres, en vue de la troubler. C’est un comportement irresponsable, compte tenu de l’instabilité de la situation tant au nord qu’au sud d’Israël. Il est de la responsabilité de tous les acteurs, non seulement régionaux, mais également internationaux, de décourager ceux qui cherchent le conflit et d’encourager ceux qui veulent la stabilité.

Il est clair, monsieur le président de la commission, que 2009 a été une mauvaise année pour le processus de paix puisque les appels israéliens à négocier, lancés dans les dernières semaines du précédent gouvernement comme depuis la formation du nouveau gouvernement, n’ont pas été entendus. Dois-je rappeler que le précédent gouvernement était engagé dans des négociations intenses avec les Palestiniens, que ce sont ces derniers qui les ont rompues de manière unilatérale et qu’ils ont refusé jusqu’à présent de les reprendre, alors que le nouveau gouvernement n’a cessé d’appeler les partenaires palestiniens à revenir à la table des négociations ? Certes, le succès n’est pas garanti en cas de négociations, mais l’échec est assuré si on ne négocie pas. Les négociations sont donc la seule chance de voir un jour les efforts de paix couronnés de succès.

Le Premier ministre Nétanyahou ne cesse de rappeler en toutes occasions, que le premier objectif de la diplomatie de son pays est la reprise des négociations avec nos partenaires palestiniens. Il a souvent fait preuve de disponibilité et de courage en la matière. Or les Palestiniens, jusqu’à présent, ont répondu à tous ces appels soit par le refus soit en présentant une longue liste de préalables, ce qui est inédit par rapport au modèle qu’Israéliens et Palestiniens avaient adopté depuis les accords d’Oslo, lesquels ont permis de lancer les négociations entre Israël et, à l’époque, l’OLP – aujourd'hui l’Autorité palestinienne –, à la suite de leur reconnaissance mutuelle. La règle était de négocier sans préalable, tous les sujets pouvant être abordés.

Les Palestiniens ont choisi de rompre avec cette règle en 2009, en posant des exigences préalables à l’ouverture des négociations. Il est aujourd'hui question de « pourparlers de proximité », ce qui est un euphémisme pour des négociations indirectes. C’est sans doute mieux que rien, mais ce n’est malheureusement pas beaucoup mieux que rien et c’est avec une profonde tristesse que nous voyons la méthode des pourparlers revenir ainsi quinze à vingt ans en arrière. Il convient de revenir à un mode plus direct de négociation, même si cela se révèle difficile.

Le Premier ministre israélien a du reste déclaré à maintes reprises son attachement à la notion de deux États pour deux peuples, ce qui signifie clairement son soutien à la création d’un État palestinien qui ne représente pas une menace pour la sécurité d’Israël, c'est-à-dire dans des modalités qui permettent d’assurer l’avenir et la pérennité de l’État d’Israël comme foyer national du peuple juif. Il a plus d’une fois exprimé son soutien à l’autorité palestinienne et à son président, Mahmoud Abbas, non seulement par des paroles mais également par des actes. C’est ainsi qu’en 2009 les efforts, non seulement de la communauté internationale, mais également d’Israël ont permis d’améliorer la situation économique de la Cisjordanie. En pleine période de crise internationale, l’économie de la Cisjordanie a connu une croissance de 7 % à 8 %, voire plus – je cite les chiffres du FMI. La qualité de vie s’est améliorée grâce à une relative prospérité, la majeure partie des obstacles entravant les routes de la Cisjordanie ont été levés par l’armée israélienne et la circulation s’est grandement assouplie. Il convient également de ne pas oublier la création d’outils de gouvernance de l’Autorité palestinienne ainsi que leur amélioration grâce à un effort international soutenu par Israël. Tous les sondages, en Cisjordanie, montrent que la méthode de Mahmoud Abbas et de l’Autorité palestinienne, qui prônent le dialogue avec Israël et la coopération avec les autorités israéliennes, est meilleure que celle que le Hamas a adoptée à Gaza.

Mon gouvernement a du reste toujours estimé que la prospérité des Palestiniens qui souhaitent coexister avec Israël est conforme à l’intérêt du pays. C’est pourquoi, souhaitant la progression de leur économie et l’amélioration de leur qualité de vie, nous continuerons sans aucun doute d’œuvrer en ce sens en 2010. Il est dès lors d’autant plus paradoxal de voir l’Autorité palestinienne conduire une campagne de dénigrement d’Israël, appelant notamment au boycott international de produits israéliens, y compris en France, ce qui, je vous le rappelle, est contraire à la loi française. Convient-il de tolérer un tel comportement vis-à-vis de pays soutenant l’économie palestinienne, comme Israël et la France ? En Israël, beaucoup se posent la question. Il serait dommage qu’une opération de marketing international visant à délégitimer Israël en vue de compenser la frustration palestinienne devant une situation prétendument sans issue ait pour conséquence de fragiliser le soutien qu’Israël et la communauté internationale apportent à l’économie palestinienne.

L’évolution, ces dernières années, des relations bilatérales entre la France et Israël est une source de satisfaction pour mon gouvernement : elles ont connu un essor extraordinaire et nous avons aujourd'hui retrouvé une intimité et une proximité que nous n’avions pas connues depuis les années 60. Cela profite évidemment aux deux parties, dans le cadre d’un dialogue politique de qualité et sur un éventail de sujets de coopération très variés.

Le seul bémol concerne l’Union européenne : alors que la présidence française avait permis la signature d’un accord de principe sur l’élargissement et l’amélioration des relations entre Israël et l’Union européenne, depuis lors, cet accord n’a pas avancé. C’est pourquoi je souhaiterais que la France reprenne en main, en vue de le débloquer, ce dossier qu’elle a soutenu avec tant de générosité lors de sa présidence.

M. Jean-Marc Roubaud. Monsieur l’ambassadeur, j’ai été le rapporteur d’une mission d’information de la commission des affaires étrangères sur la question iranienne, notamment son volet nucléaire. La Turquie a récemment proposé de stocker l’uranium iranien : qu’en pensez-vous ?

Par ailleurs, Mme Clinton a annoncé le durcissement des sanctions si la situation n’évoluait pas de manière positive. Dans quelle mesure un tel durcissement vous paraît-il réalisable ?

Enfin, l’axe traditionnel de stabilité passant par les États-Unis, la Turquie et Israël semble quelque peu fissuré du fait que la Turquie se rapproche de l’Iran. Pensez-vous que la Turquie puisse continuer de jouer un rôle de stabilisateur et de facilitateur au Proche et au Moyen-Orient ?

M. Jean-Michel Boucheron. Monsieur l’ambassadeur, votre pays dispose de plus de 200 armes atomiques et des missiles qui les accompagnent. La dissuasion joue donc totalement et aucun adversaire ne voudra prendre le risque de défier une telle force – vous le savez. Du reste, la dissuasion ne joue pas qu’au Moyen-Orient.

La focalisation du débat sur le problème iranien représente donc un détournement d’énergie par rapport à la question centrale qui concerne les Palestiniens.

C’est dans ce contexte que le ministre des affaires étrangères de votre gouvernement ne cesse de déclarer – il l’a encore fait récemment – que la paix n’a pas pour condition des concessions territoriales. Les implantations à Jérusalem-Est n’ont, à mes yeux, d’autre objectif que de verrouiller cette question en empêchant définitivement la création d’un État palestinien et par conséquent, l’existence de deux Etats. S’il n’y a pas deux Etats, il n’y en a qu’un.

Or, s’il n’y a qu’un État, et que le peuple juif désire conserver le sien, ce qui est son droit, il ne pourra s’agir que d’un pays d’apartheid. Monsieur l’ambassadeur, comment sortirez-vous de ce dilemme ?

Au mois de juin prochain le traité de non-prolifération nucléaire (TNP) doit être renégocié. Or ce traité ne sera crédible qu’à partir du moment où tous les acteurs nucléaires militaires seront parties prenantes du débat. Il est donc temps qu’Israël déclare officiellement la détention de son armement nucléaire, qui ne fait aucun doute. Ce sera alors l’occasion d’une grande négociation internationale et les États pourront évoquer de manière enfin crédible la gestion des matières fissiles au plan mondial, puisque aucun ne pourra plus prétendre qu’il y a, en matière de nucléaire militaire, deux poids deux mesures.

M. Robert Lecou. Monsieur l’ambassadeur, j’ai été le rapporteur pour la commission des affaires étrangères du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord de coopération entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l’État d’Israël sur la lutte contre la criminalité et le terrorisme, signé le 23 juin 2008. C’est après un débat animé que la Commission a émis un avis favorable à la ratification de cet accord, mais le projet doit encore être examiné en séance publique. C’est la raison pour laquelle je souhaite obtenir des précisions sur des questions qui ont été soulevées au sein de la Commission, relatives notamment à la mention du maintien de l’ordre au sein des groupes sociaux, ou aux territoires sur lesquels l’accord est susceptible d’être appliqué. Plus généralement, quel est le bénéfice que votre pays attend d’un tel accord ?

M. Michel Grall. Monsieur l’ambassadeur, on parle actuellement d’un regain de tension à la frontière libanaise alors même qu’un nouveau conflit avec le Hezbollah pourrait devenir un conflit direct avec l’État libanais et acquérir de ce fait une dimension régionale élargie, intégrant la problématique iranienne. Quelle est la position d’Israël sur le sujet ?

M. Henri Plagnol. Comme Jean-Michel Boucheron, et alors même que je suis, depuis toujours, un ami d’Israël, j’avoue ma perplexité quant à la sincérité des efforts israéliens visant à la création de deux États. En effet, je ne vois pas comment l’Autorité palestinienne pourra revenir à la table des négociations tant que le gel des colonies ne fera pas l’objet d’une décision claire.

J’ai été, par ailleurs, surpris, que vous n’ayez pas évoqué la Syrie dans votre propos liminaire, alors qu’elle représente une possibilité d’évolution positive en 2010 dans le contexte sombre que vous avez décrit. En effet, Israël n’a pas avec la Syrie de problème territorial réel – la restitution du Golan est possible. Alors que la Syrie a beaucoup évolué, en particulier grâce à la France, puisqu’elle a accepté définitivement l’existence d’un État libanais indépendant, en y ouvrant une ambassade, l’accélération des pourparlers avec ce pays contribuerait à détendre la situation sur la frontière nord d’Israël. Chacun sait en effet que la Syrie est un acteur majeur des relations avec le Hezbollah.

Monsieur l’ambassadeur, qu’en est-il du dossier syro-israélien ?

M. Dino Cinieri. Nos deux États partagent les mêmes préoccupations sur le dossier iranien, qu’il s’agisse du respect des droits de l’homme ou de la question nucléaire.

À quel niveau les autorités israéliennes situent-elles la menace nucléaire iranienne ? De plus, quel enseignement peut-on tirer de la rencontre lundi dernier entre M. Nétanyahou et le président russe Dimitri Medvedev, au cours de laquelle il a été question de l’Iran ?

Enfin, la situation géopolitique du Moyen-Orient a été récemment qualifiée de préoccupante par le Conseil de sécurité des Nations unies. Quelle information pouvez-vous nous apporter sur la reprise des négociations de paix avec la Syrie ?

M. Philippe Cochet. En tant que président du groupe d’amitié France-Iran, je tiens tout d’abord à déclarer que je ne saurais tolérer que le pouvoir politique d’un pays annonce qu’il souhaite rayer un autre pays de la carte.

Par ailleurs, quelle analyse Israël fait-il de la dichotomie entre le pouvoir religieux et le pouvoir politique dans ce pays ? La révolution verte, qui se déroule aujourd'hui en Iran, en est certainement une traduction.

Enfin, à la suite du drame vécu par Haïti, Israël a su être présent de manière très efficace. Ne serait-ce pas pour lui l’occasion de tendre la main à d’autres partenaires, les Palestiniens notamment, en les associant à ce type de démarche ?

M. Jean-Claude Guibal. Monsieur l’ambassadeur, considérez-vous que les pays qui ont assuré jusqu’à présent la stabilité de la région continuent de jouer leur rôle ? Quelle pourrait être la position de l’Arabie Saoudite dans les tensions actuelles ?

Par ailleurs, la Chine vous paraît-elle disposée à rejoindre le camp de ceux qui souhaitent apporter la détente dans la région. S’agissant de l’Iran, vous paraît-elle disposée à accepter un renforcement des sanctions ? Ne pourrait-on pas favoriser cette évolution en lui assurant un approvisionnement énergétique qui ne dépendrait plus autant de l’Iran ?

M. Jean-Paul Lecoq. Monsieur l’ambassadeur, l’État d’Israël n’a toujours pas de constitution : son fonctionnement repose sur des lois fondamentales qui organisent la discrimination raciale, puisque l’égalité des droits entre les juifs et les non-juifs n’existe pas, notamment en ce qui concerne le mariage. L’intervention de M. Nétanyahou, qui vise à exiger désormais des Palestiniens la reconnaissance d’Israël comme État juif et non plus seulement de l’État d’Israël, doit-elle être considérée comme marquant une évolution vers une plus grande discrimination ?

En ce qui concerne les événements de Gaza, il semblerait que les Palestiniens s’appuient, pour leurs enquêtes, sur des instances indépendantes, tandis qu’Israël aurait recours à des enquêteurs militaires, en contradiction avec les suggestions du rapport Goldstone. Peut-on espérer des évolutions en ce domaine ?

Monsieur l’ambassadeur. En ce qui concerne l’efficacité des sanctions contre l’Iran, je tiens à rappeler que même les sanctions les plus modestes que la communauté internationale a imposées ont laissé des traces sur le régime iranien. Tous les services de renseignement du monde s’entendent pour reconnaître l’inquiétude qui règne dans ce pays, ce qui signifie que le choix de moyens appropriés permettra de parvenir à l’objectif fixé.

Exercer des pressions en recourant à des sanctions devrait être la méthode favorite de tous ceux qui craignent, à juste titre, un embrasement militaire. Le meilleur moyen de l’éviter est en effet d’user de tous les outils de la diplomatie internationale : or, nous sommes encore loin du compte. Il faut une mobilisation internationale efficace pour choisir les bonnes sanctions et les appliquer.

J’ai lu, moi aussi, toute la littérature géopolitique moderne en matière de dissuasion : la guerre froide y était donnée comme l’exemple majeur de son efficacité. Permettez-moi d’avoir des doutes sur l’efficacité de cette même dissuasion face à un régime islamiste à la tête duquel se trouve un président qui communique tous les matins avec le Tout-puissant pour savoir ce qu’il doit faire. Je ne suis pas certain que nous puissions compter sur le sens des responsabilités et la rationalité d’un tel régime. En cas de grave tension internationale, la tentation serait grande pour les dirigeants iraniens d’employer l’arme nucléaire pour éliminer Israël de la carte, quitte à subir de leur côté des pertes considérables. Les martyrs ne sont-ils pas bien traités au paradis des islamistes ?

De plus, il ne s’agit pas uniquement des menaces tangibles pesant sur la sécurité, voire l’existence d’Israël : la seule détention par l’Iran de l’arme nucléaire changerait la donne géostratégique de la région, qui est une des plus sensibles pour la communauté internationale. Cette perspective inquiète les pays arabes modérés tout autant, sinon plus, qu’Israël, du fait que d’autres pays pourraient chercher à se doter de la même arme pour répondre à cette nouvelle menace régionale, ce qui relancerait la course à l’arme nucléaire. Les contacts fréquents des ministres ou des parlementaires français avec leurs homologues arabes ne font, je suppose, que le confirmer.

Le voyage de M. Nétanyahou à Moscou entre évidemment dans le cadre de la mobilisation de la communauté internationale pour faire face à la nucléarisation de l’Iran. Les deux pays voient les choses de la même manière : la Russie s’est déclarée plus d’une fois opposée à une telle éventualité car elle est consciente du comportement irresponsable des Iraniens. C’est un des dossiers sur lesquels Israël et la France partagent la même analyse, en ce qui concerne tant la gravité de la situation, que l’urgence d’imposer à l’Iran des sanctions efficaces.

En ce qui concerne la question palestinienne, je ne vois pas en quoi on pourrait douter de la volonté israélienne de faire la paix avec les Palestiniens. Pour le vérifier, aidez-nous à ramener les Palestiniens à la table des négociations : chacun pourra voir alors que le Premier ministre israélien et son Gouvernement sont prêts à faire, comme ils le déclarent, des efforts considérables, y compris des sacrifices territoriaux en vue de signer la paix avec les Palestiniens. Ce ne saurait être évidemment une paix à tout prix – aucun État ne l’accepterait pour soi dans le monde.

L’objectif, ce sont bien deux États, Israël reconnaissant la nécessité de créer un État palestinien vivant en paix à ses côtés.

Les implantations sont une des questions fondamentales de la négociation, au même titre que la sécurité, les frontières, les ressources ou les réfugiés – nous sommes d’accord sur ce point depuis Oslo. Je le répète : aucun sujet n’est tabou dans la négociation et, du reste, tous ces sujets ont déjà été abordés entre les Israéliens et les Palestiniens. Ce qui n’est pas possible, à nos yeux, c’est de sortir un seul de ces sujets de la négociation pour en faire un préalable. Pourquoi Israël n’en ferait-il pas autant avec la question des réfugiés palestiniens ? Toutefois, afin de témoigner de sa bonne volonté et pour convaincre les Palestiniens de revenir à la table des négociations, l’actuel gouvernement a décidé de déclarer un moratoire de dix mois sur les implantations, décision qui n’a servi à rien puisque les Palestiniens n’ont pas répondu présents.

Je ne peux pas laisser passer, monsieur Lecoq, votre affirmation selon laquelle l’égalité des droits ne serait pas garantie en Israël. Les Palestiniens exigeant la reconnaissance d’un État palestinien, les Israéliens sont dans leur droit – c’est une question d’équilibre – d’exiger à leur tour la reconnaissance de l’État d’Israël en tant que foyer national du peuple juif. La notion de peuple juif ne signifie pas que cet État est uniquement peuplé de Juifs mais qu’il est l’incarnation du peuple juif et de son droit à l’autodétermination et à l’indépendance nationale, au même titre que tous les autres peuples, y compris le peuple palestinien : il existera un jour un État de Palestine. Une minorité arabe peut vivre en Israël avec l’égalité des droits. Il y a certainement plus de députés arabes en Israël qu’il n’y a de députés juifs dans le monde arabe. Les Arabes israéliens ont le droit de vote, sont éligibles et ont accès à tous les services de l’État. Des déséquilibres économiques persistent, assurément : ils sont le fruit de sociétés, de modes de vie et d’héritages culturels très différents, mais ils s’estompent progressivement. De plus, il convient de respecter les différences : le fait que les enfants arabes n’aient pas le même programme scolaire que les enfants juifs n’est pas un signe de discrimination mais de respect de la culture arabe. Telle est la logique des démocraties modernes : respecter les minorités tout en leur donnant l’égalité des droits. Je souhaite qu’une minorité israélienne puisse un jour vivre dans un État de Palestine. Ce n’est pas impensable à mes yeux, du moins sur le plan théorique.

Je ne peux vous répondre en détail sur l’accord franco-israélien visant à lutter contre la criminalité et le terrorisme : il entre dans le cadre des vastes relations de deux pays amis, lesquelles couvrent des domaines aussi divers que l’éducation, le commerce, la coopération scientifique et culturelle ou la sécurité routière. Du reste, la coopération policière entre nos deux pays existe déjà : l’ambassade d’Israël à Paris a un attaché de police, il en est de même de l’ambassade de France à Tel-Aviv. Cet accord crée un cadre politique et pratique adéquat.

S’agissant de la situation au nord d’Israël, mon pays est inquiet de constater que le Hezbollah rétablit, voire double ses capacités militaires, par rapport à la situation existant en 2006, notamment en ce qui concerne le nombre et la sophistication des roquettes. Il n’en est pas moins vrai que depuis trois ans cette frontière est calme. C’est dû en grande partie aux arrangements qui ont mis fin à la guerre de l’été 2006 entre Israël et le Hezbollah, notamment à la présence de forces internationales. Du côté israélien, il n’y a donc aucune raison de voir s’enflammer cette région. Nous souhaitons que le Liban désire un jour lui aussi faire la paix avec Israël par la voie de la négociation : la porte est ouverte.

Cela étant, le Hezbollah n’est plus, au Liban, une organisation indépendante. S’il se comportait de manière irresponsable, comme en 2006, en vue d’enflammer la région, ce serait l’État libanais qui en porterait la responsabilité puisque aujourd'hui le Hezbollah est une composante centrale du gouvernement libanais. Le Hezbollah, c’est le Liban. Nous espérons que l’attitude responsable du Liban, État membre de l’organisation des Nations unies, l’emportera sur les tendances aventurières d’une organisation terroriste comme le Hezbollah.

Les Syriens, quant à eux, souhaitent reprendre des négociations indirectes – nous en avions par l’intermédiaire de la Turquie – alors que l’actuel gouvernement israélien, à l’instar du précédent, juge que cette méthode a fait son temps et qu’il est temps de rouvrir des négociations directes sans préalables, comme ce fut déjà le cas par le passé. Pour le moment, la Syrie, alors même qu’elle a entamé son retour vers la respectabilité internationale, semble préférer, dans la notion de « processus de paix », le « processus » à la « paix », c'est-à-dire les déclarations théoriques aux efforts tangibles.

M. le président Axel Poniatowski. En ce qui concerne le TNP, Israël est-il prêt à se déclarer puissance nucléaire ? Et si oui, participera-t-il dans la renégociation du TNP ?

M. l’ambassadeur. La politique israélienne repose sur deux principes : ne pas être le premier pays à introduire l’arme nucléaire dans la région et soutenir l’installation d’une zone dénucléarisée dans tout le Proche-Orient lorsque la situation géopolitique le permettra.

M. Jacques Myard. Vos propos, en tant qu’ambassadeur d’Israël, reflètent évidemment la politique de votre pays. Toutefois, on ne peut qu’être troublé par certaines de vos affirmations. Personne ici ne souhaite la mise en cause de la sécurité d’Israël et je comprends parfaitement certaines réactions de votre État devant, notamment, des tirs de roquettes. Cela étant, la situation n’est pas celle que vous nous avez décrite.

Il est clair que l’Iran a violé ses obligations au titre du TNP, ce qui provoque de la méfiance envers l’actuel pouvoir iranien. Ce pays n’a toujours pas ratifié le protocole additionnel dit « 93+2 », qu’il a pourtant signé, alors même que ce serait une étape importante pour le retour de la confiance.

Toutefois, les sanctions, voire une action militaire, telle qu’un bombardement, empêcheront-elles l’Iran d’avoir la bombe ? Non ! C’est une réalité de la donne nucléaire. De même, tous les experts savent que votre pays possède au moins 200 têtes et nous, Français, le savons d’autant mieux que c’est nous qui vous avons aidés à avoir l’arme nucléaire. C’est la raison pour laquelle la reconnaissance par Israël du fait qu’elle est une puissance nucléaire serait un élément positif permettant de combler un des « trous » du TNP – l’Inde, le Pakistan, la Corée du Nord, qui est sortie du système, et Israël qui n’a jamais admis qu’il avait la bombe.

La commission des affaires étrangères est donc favorable à la fois à la reconnaissance de la réalité nucléaire et à des contrôles efficaces. C’est une gageure, assurément, mais il convient de parer à un risque majeur car la situation n’est plus maîtrisable.

Alors que notre objectif est la sécurité d’Israël, il me semble aujourd'hui que vous vous êtes engagés dans une voie qui risque de vous conduire dans une impasse.

Nous avons, par ailleurs, effectué une mission en Syrie. Or, vous dites – je vous crois – vouloir la paix : les Syriens disent la même chose mais ajoutent que les Israéliens sont si divisés qu’ils n’arrivent pas à prendre une décision. Comment réagissez-vous à cette affirmation des Syriens qui souhaitent, à mon avis, trouver un accord avec Israël, le Golan ne représentant pas un réel point d’achoppement ? La paix avec la Syrie est d’autant plus souhaitable qu’elle permettra certainement de réaliser de grands progrès en ce sens dans toute la région.

M. Gérard Voisin. Monsieur l’ambassadeur, les relations économiques ont également valeur diplomatique car elles révèlent l’état des relations politiques entre les pays. Israël a choisi Renault pour une commande de voitures entièrement électriques : pourquoi le choix d’une production française dans cette option technologique nouvelle, essentielle pour l’avenir ?

Mme Martine Aurillac. L’État d’Israël dispose d’une armée très forte et bien formée, sans même qu’on ait besoin d’évoquer son arsenal nucléaire. De son côté l’État palestinien connaît, à l’instar du monde arabe qui l’environne, un essor démographique plus important que celui d’Israël. C’est un paramètre qui doit rendre la reprise des négociations incontournable.

Monsieur l’ambassadeur, qu’attendez-vous de l’Égypte, dont l’attitude est quelquefois ambiguë ?

M. Jean-Luc Reitzer. Monsieur l’ambassadeur, vous n’avez pas évoqué Gaza dans votre propos liminaire : qu’en est-il de la pauvreté due au blocus, de la reconstruction après les tragiques événements de l’opération « Plomb durci » et de la libre circulation des personnes ?

En ce qui concerne la colonisation, vous avez tenté de noyer le poisson en affirmant qu’il s’agissait d’un problème parmi d’autres : on ne saurait raisonner ainsi du fait que la colonisation est un des abcès qu’il faut absolument crever car il dissuade les Palestiniens de revenir à la table des négociations.

Du reste, le parallèle avec les réfugiés palestiniens ne vaut pas, puisque la situation de ces derniers est bloquée tandis que la colonisation se poursuit, Israël pratiquant en la matière la même politique que pour la construction du mur, celle du fait accompli.

Comment justifier une telle colonisation autrement que par une volonté hégémonique ou par celle de tuer dans l’œuf, comme l’a souligné Jean-Michel Boucheron, toute velléité de création d’un futur État palestinien ?

M. Daniel Garrigue. Vous avez affirmé que l’objectif était la reconnaissance mutuelle et la coexistence de deux États, tout en minimisant le problème du développement des colonies – que vous appelez implantations – alors qu’il bloque, manifestement, la reprise des négociations en raison du caractère provisoire du moratoire, et de la poursuite des implantations à Jérusalem-Est.

De plus, quelle pourrait être la viabilité d’un futur État palestinien compte tenu du développement des implantations qui transforment la Cisjordanie, à peine plus grande qu’un département français, en peau de léopard, sans oublier le problème des accès et celui du mur ?

Le risque d’évolution vers un modèle de type sud-africain est, non seulement une hypothèse de plus en plus évoquée dans les pays voisins, notamment en Égypte – M. Boutros Boutros Ghali l’a évoquée devant l’Assemblée nationale –, mais il fait également débat à l’intérieur même de l’État d’Israël où beaucoup s’interrogent sur le danger qu’il y aurait à reculer la constitution de deux États. Votre volonté d’aller vers deux États est-elle réelle ?

M. Lionnel Luca. Vous avez déclaré qu’Israël était prêt à faire un grand nombre de sacrifices pour la paix, notamment territoriaux. Or, votre ministre des affaires étrangères, lundi dernier, a estimé, devant la commission des affaires étrangères et de la défense de la Knesset que parvenir à la paix au Moyen-Orient grâce à des compromis territoriaux était une « illusion ». Pouvez-nous expliquer le sens de tels propos ?

M. le président Axel Poniatowski. Monsieur l’ambassadeur, si le moratoire porte sur la quasi-totalité des territoires occupés, il ne concerne pas Jérusalem-Est : comment justifiez-vous cette décision du Premier ministre ?

M. l’ambassadeur. Sur ce point précis, la réponse est simple : Jérusalem-Est, aux yeux des Israéliens, fait partie de l’État d’Israël, contrairement à la Cisjordanie. Jérusalem, comme Tel-Aviv, Raanana ou Beer Sheva, est soumise au droit israélien dans tous les domaines, y compris celui des permis de construire.

Si j’étais venu il y a quatre ans devant votre commission, vous m’auriez reproché la colonisation de la bande de Gaza par plusieurs milliers de colons israéliens comme un fait accompli visant à rendre impossible la viabilité de l’État palestinien. Or, aujourd'hui, ces colonies ont été démantelées et il n’y a plus un seul Israélien à Gaza, civil ou militaire, exception faite de Gilad Shalit. Cela prouve, tout d’abord, que le fait d’arrêter la construction de localités israéliennes ne garantit pas la paix puisque le Hamas a pris le pouvoir et que 8 000 roquettes sont tombées sur la tête des Israéliens – ce qui n’encourage pas l’opinion publique israélienne à souhaiter la répétition du même processus en Cisjordanie : Tel-Aviv, le cœur économique et social du pays, serait à la portée des missiles palestiniens !

Ce démantèlement prouve également qu’on ne saurait extrapoler l’avenir à partir de la situation actuelle, qui n’est ni une situation de paix, ni même une situation de négociation. La décision appartient au gouvernement israélien. Les négociations passées avec les Palestiniens se sont déroulées sans aucun préalable relatif au gel des implantations : aucun Premier ministre israélien ne l’avait proposé et aucun gouvernement palestinien ne l’avait exigé. En revanche, que ce soit à Camp David, à Taba ou à Annapolis, cette question était évidemment sur la table et avait fait l’objet de différentes propositions. Toutefois, ce n’est pas elle qui a fait capoter les accords de Camp David.

Je ne noie pas le poisson : si les implantations sont un sujet de négociation légitime, la sécurité des citoyens israéliens l’est tout autant. Israël a été construit il y a soixante-deux ans après 2 000 ans d’exil : j’ai le droit de m’inquiéter de la sécurité de cet État.

La guerre a été déclenchée contre Gaza après des années d’attaques du Hamas contre les localités israéliennes. La guerre est aujourd'hui suspendue, mais la pression demeure sur Gaza pour plusieurs raisons : la détention de Gilad Shalit, le risque pour les Israéliens d’une reprise des tirs de roquette et l’attitude internationale vis-à-vis du Hamas, que boycotte la communauté internationale, notamment l’Union européenne et la France. Il n’y a pas à Gaza de drame humanitaire même si ce n’est ni le confort ni la prospérité. Je ne suis pas opposé au fait que les Palestiniens sentent une nette différence entre vivre sous le régime légitime de Mahmoud Abbas en Cisjordanie, qui a choisi un avenir de paix et de coexistence avec Israël, et vivre sous l’autorité du Hamas, qui a pris le pouvoir par un coup d’État militaire sanglant et qui ne souhaite aucune coexistence avec Israël mais au contraire sa disparition au profit de la création d’un État islamique de la Méditerranée au Jourdain.

Gaza bénéficie de toute l’aide humanitaire nécessaire et ne connaît pas la famine – des images de marchés le prouvent. En revanche, il est vrai que la vie n’y est pas très agréable et ne le sera pas tant que la vie dans les localités israéliennes limitrophes ne sera pas normalisée.

En ce qui concerne la méthode des sanctions contre l’Iran, je n’affirme pas qu’elle nous assurera l’arrêt du programme nucléaire iranien. Il faut toutefois tenter de créer un vrai dilemme chez les dirigeants iraniens : vaut-il vraiment la peine de subir de telles pressions internationales pour conduire à son terme un programme nucléaire militaire ? Du reste Israël n’est pas le seul à le penser : il est rejoint en cela par le Groupe des six dans sa grande majorité. Vous devez donc adresser cette question à votre gouvernement tout autant qu’au mien. L’avenir des méthodes de dissuasion internationale, le TNP et l’avenir de l’Iran : ce sont de bien lourds fardeaux que vous mettez sur les frêles épaules d’un petit pays du Proche-Orient.

Combien de fois devrai-je répéter qu’Israël est favorable à deux États pour deux peuples et non pas à un seul État sans l’égalité des droits ? Israël est un pays démocratique, qui souhaite le rester et vit selon des valeurs que nous avons reçues de l’Europe, notamment de la France. Nous y attachons une énorme importance et voulons les préserver. L’objectif est donc bien la création de deux États-nations pour deux peuples.

La création de l’État palestinien, compte tenu de l’histoire difficile des relations entre Israël et, non seulement, les Palestiniens mais, également, l’ensemble du monde arabe, nécessitera de prendre certaines précautions : c’est pourquoi M. Nétanyahou propose que l’État palestinien, dont il soutient la création, soit démilitarisé durant une certaine période, afin d’assurer la sécurité d’Israël.

En ce qui concerne la barrière de sécurité, que vous appelez le mur, son impopularité n’est dépassée que par son efficacité : il n’y a plus d’attentat suicide en Israël. C’est une des plus grandes contributions à la paix dans la région. En effet, lorsque trois bus sautaient chaque semaine dans les rues de Tel-Aviv, aucun Israélien ne souhaitait négocier la paix avec les États voisins. La méthode n’est pas belle et ne me plaît pas mais la barrière disparaîtra lorsque, la paix étant venue, les citoyens israéliens n’auront plus besoin d’être protégés. Pour le moment, les intérêts et les droits des Palestiniens étant pris en compte notamment grâce à l’aide de la Cour suprême israélienne, je vous demande de prendre en compte également les droits des Israéliens, le premier d’entre eux étant le droit à la vie.

L’Égypte demeure le pays arabe avec lequel nous entretenons les relations les plus denses et nous comptons sur lui dans tous nos efforts de paix avec les pays arabes. Certes, la paix entre Israël et l’Égypte n’est pas toujours idyllique mais ce pays joue un rôle régional très important et le dialogue avec lui reste intense. Quant aux questions afférentes à la construction d’un obstacle le long de la frontière de la bande de Gaza avec l’Égypte, je vous demande de les poser à mon ami Nasser Kamel, l’ambassadeur d’Égypte en France. Les Égyptiens ont des raisons de le construire. Cet obstacle a du reste le mérite de nous rappeler, lorsqu’on évoque le blocus, que Gaza n’est pas entourée uniquement de frontières israéliennes : la Bande a également une frontière avec l’Égypte.

Le projet de voiture électrique est une aventure extraordinaire qui est le fruit du mariage entre une société d’innovation israélienne, Project Better Place, créée par un visionnaire, Shai Agassi, et une entreprise française qui a, depuis un certain temps déjà, investi dans la recherche et la construction de voitures entièrement électriques. Renault a été très intéressé par le projet et nous espérons que ce partenariat franchira les frontières d’Israël. J’ai été très fier d’entendre les patrons de Renault annoncer qu’Israël serait le premier pays auquel l’entreprise française fournira des voitures électriques en grande quantité dès 2011.

Enfin, les propos de notre ministre des affaires étrangères relèvent du débat politique israélien. Les gouvernements israéliens sont des gouvernements de coalition : le ministre a du reste précisé qu’il exprimait ses propres analyses. Je me réfère, quant à moi, aux déclarations du Premier ministre et au programme du Gouvernement israélien, qui préconisent des négociations de paix avec les Palestiniens.

M. le président Axel Poniatowski. Je vous remercie, monsieur l’ambassadeur.

La séance est levée à douze heures trente-cinq.

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Membres présents ou excusés

Commission des affaires étrangères

Réunion du mercredi 17 février 2010 à 11 heures

Présents. - Mme Martine Aurillac, M. Jean-Paul Bacquet, M. Patrick Balkany, M. Jacques Bascou, M. Claude Birraux, M. Alain Bocquet, M. Jean-Michel Boucheron, M. Loïc Bouvard, M. Hervé de Charette, M. Jean-Louis Christ, M. Dino Cinieri, M. Pascal Clément, M. Philippe Cochet, M. Gilles Cocquempot, M. Pierre Cohen, M. Alain Cousin, M. Jean-Pierre Dufau, M. Jean-Paul Dupré, M. Jean-Michel Ferrand, M. Alain Ferry, M. Gaëtan Gorce, M. Jean-Claude Guibal, Mme Élisabeth Guigou, M. Jean-Jacques Guillet, M. Serge Janquin, M. Didier Julia, M. Jean-Pierre Kucheida, M. Patrick Labaune, M. Jean-Paul Lecoq, M. Robert Lecou, M. Lionnel Luca, Mme Henriette Martinez, M. Jean-Claude Mignon, M. Jacques Myard, M. Henri Plagnol, M. Axel Poniatowski, M. Jean-Luc Reitzer, M. Jacques Remiller, M. Jean-Marc Roubaud, M. Rudy Salles, Mme Odile Saugues, M. Michel Terrot, M. Gérard Voisin

Excusés. - Mme Sylvie Andrieux, Mme Chantal Bourragué, Mme Geneviève Colot, M. Michel Delebarre, M. Michel Destot, Mme Marie-Louise Fort, M. Didier Mathus, M. Éric Raoult, M. Jean Roatta, M. François Rochebloine, M. Michel Vauzelle

Assistaient également à la réunion. - M. Daniel Garrigue, M. Gérard Gaudron, M. Michel Grall, M. Philippe Vitel