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Commission des affaires étrangères

Mercredi 27 octobre 2010

Séance de 11 h 20

Compte rendu n° 9

Présidence de  M. Axel Poniatowski, président

– Examen pour avis des crédits de la mission Immigration, asile et intégration du projet de loi de finances pour 2011 – M. Philippe Cochet, rapporteur 2

Projet de loi de finances pour 2011 – mission Immigration, asile et intégration

La séance est ouverte à onze heures vingt.

La commission des affaires étrangères examine pour avis, sur le rapport de M. Philippe Cochet, rapporteur des crédits de la mission Immigration, asile et intégration du projet de loi de finances pour 2011.

M. Philippe Cochet. En dépit de la stabilisation de l’ensemble des dépenses de l’Etat entre 2010 et 2011, la mission « Immigration, asile et intégration » bénéficiera d’une augmentation de ses moyens en crédits de paiement de 0,73 %. Cette hausse est rendue indispensable par l’augmentation continue du nombre des demandeurs d’asile depuis 2008, mais elle ne doit pas cacher les efforts importants d’économie réalisés par ce ministère de création récente, y compris d’ailleurs pour ce qui concerne la demande d’asile.

Plus de 58 % des crédits de la mission sont destinés au financement des différents dispositifs nécessaires à la prise en charge des demandeurs d’asile et au traitement de leurs demandes. Celles-ci ont augmenté de 20 % en 2008, 12 % en 2009 et encore 8,5 % au premier semestre 2010. Même si cette hausse semble aujourd’hui se ralentir, le système a été submergé par ces afflux de demandeurs.

La part des demandeurs logés dans les centres destinés à les accueillir a chuté de 48,6 % à 36,7 % entre 2008 et 2009, et était limitée à 33 % fin juin 2010, entraînant des dépenses très supérieures aux prévisions pour l’hébergement d’urgence et l’allocation temporaire d’attente. Les délais d’examen des demandes s’allongent : de 100 jours en 2008 à 135 jours à l’issue du premier semestre 2010 devant l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), de moins d’un an en 2007 à plus de 13 mois en 2010 devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), alors même que l’OFPRA a nettement amélioré la productivité de ses officiers de protection et que la Cour s’est profondément réformée pour réduire ses délais d’examen. Il faut donc souligner que cette dégradation est la conséquence de l’augmentation de la demande, pas d’un manque de performances de la part de ces organismes.

Des moyens supplémentaires avaient déjà été accordés en 2010, mais ils ont encore été insuffisants. C’est pourquoi le projet de budget pour 2011 prévoit une nouvelle augmentation des crédits sur cette action : ces besoins devraient néanmoins n’être que temporaires, si la demande retrouve un rythme plus calme. En bénéficient l’OFPRA, dont la subvention passera de 32 millions d’euros à 34,5 millions d’euros afin de lui permettre de recruter 30 officiers de protection supplémentaires pendant 18 mois afin de traiter les dossiers en stock, l’allocation temporaire d’urgence, pour laquelle seront ouverts 54 millions d’euros en 2011, et l’hébergement d’urgence, dont les moyens déconcentrés seront augmentés de 10 millions d’euros. Sur ces deux derniers postes, l’exécution des crédits en 2010 laisse craindre que les besoins pour 2011 dépassent encore les prévisions retenues pour le projet de budget.

La CNDA, dont le financement relève de la mission « Conseil et contrôle de l’Etat », recevra aussi des moyens supplémentaires pour embaucher 10 agents et 10 magistrats permanents de plus.

Sans permettre de couvrir l’augmentation considérable des besoins financiers induits par la hausse de la demande d’asile, des efforts de rationalisation et d’économies sont parallèlement consentis dans l’organisation des plate-formes d’accueil des demandeurs d’asile et dans la gestion des centres d’accueil.

Des efforts du même type concernent la gestion des centres de rétention administrative (CRA), dont le transfert à la Police aux frontières devrait s’achever en 2011. Ils devraient permettre de stabiliser l’enveloppe destinée à leur fonctionnement autour de 31 millions d’euros bien que le nombre de places augmente, pour atteindre 2 063 en 2011. Les crédits destinés au suivi sanitaire et à l’accompagnement social des retenus augmentent en revanche, de 11,5 à 13,3 millions d’euros, pour tenir compte de l’évolution de la capacité des centres.

Les crédits d’investissement peuvent quant à eux diminuer car il n’est pas envisagé d’accroître encore la capacité de rétention dans les prochaines années. Les 13,65 millions d’euros prévus en 2011 permettront de rénover le CRA de Coquelles, d’adapter (enfin) le secteur judiciaire de Roissy, de construire un nouveau centre à Mayotte et d’équiper l’île d’un quatrième radar.

De même, en dépit d’un objectif d’exécution des mesures d’éloignement en hausse, de 27 000 à 28 000, les dépenses de transport qu’elles induisent sont prévues en repli de 5 millions d’euros entre 2010 et 2011, soit une dotation de 32,2 millions d’euros, grâce à la maîtrise des frais de billetterie et au développement des retours volontaires, qui représentent le tiers du total, et sont pris en charge par l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII).

Cet office assure un nombre toujours croissant de missions et joue désormais un rôle central dans la conduite de nos politiques migratoire et d’intégration. Le 19 juillet 2010, l’OFII a signé un contrat d’objectifs et de performance avec le ministre chargé de l’immigration, dans lequel il s’engage à continuer à simplifier les démarches et à renforcer l’efficacité des dispositifs qu’il met en œuvre. L’article 74 du projet de loi de finances propose de rééquilibrer ses recettes à la hausse, en diminuant certaines taxes (pour un montant total de 15,5 millions d’euros) et en augmentant certaines autres (à hauteur de 26 millions d’euros). Une subvention de 14,4 millions d’euros devrait permettre d’équilibrer ses résultats en 2011.

C’est la mise en œuvre des contrats d’accueil et d’intégration (CAI), qui représente la principale dépense de l’OFII : autour de 100 000 par an, ils comprennent plusieurs formations et, désormais, un bilan de compétences. L’OFII assure aussi le financement des formations linguistiques destinées à des migrants arrivés en France depuis plus de cinq ans.

La réalisation dans le pays d’origine des tests de connaissance de la langue française et des valeurs de la République pour certaines catégories de migrants progresse, mais encore lentement : elle est effective depuis longtemps dans les sept pays où l’OFII est représenté ; elle l’est aussi 38 pays où il a pu conclure une convention avec un délégataire qui en est chargé, une Alliance française ou un centre culturel français, le plus souvent. Hélas, une telle solution n’est pas encore mise en œuvre dans un grand nombre de pays, dont la Chine et la Russie où les demandes de visas pour la France sont pourtant très nombreuses : cette situation résulte de l’attention variable que nos ambassadeurs portent à cette question, ce qui est inacceptable. Ce n’est pas parce que la gestion des flux migratoires ne relève pas des compétences du ministère des affaires étrangères que les ambassadeurs, qui représentent l’Etat dans son ensemble, ne doivent pas se soucier de l’application de la loi française dans ce domaine. Il me semble que le Quai d’Orsay sera d’autant plus respecté qu’il effectuera avec diligence toutes les missions qui lui sont confiées.

Si l’OFII joue un rôle dominant dans l’intégration des étrangers nouvellement arrivés en France, le ministère continue à financer directement un certain nombre d’actions. Les crédits d’intervention qui leur sont destinés diminueront en 2011, conformément aux instructions du Premier ministre, mais ils seront complétés par des financements communautaires. Une centaine de subventions sera versée pour diverses initiatives en faveur de l’intégration, de la lutte contre le racisme et la discrimination à l’embauche ou dans l’emploi des personnes immigrées ou issues de l’immigration. Les dispositifs « parcours de réussite professionnelle » et « ouvrir l’école aux parents » seront poursuivis, tout comme le financement des mesures d’accompagnement des occupants des foyers de travailleurs migrants concernés par le plan de traitement de ces foyers.

Enfin, l’accent continuera à être mis sur les aides à l’insertion des réfugiés, notamment celles visant à faciliter leur accès au logement. En effet, cet accompagnement permet de réduire le séjour des réfugiés en CADA, permettant à ceux-ci d’accueillir de nouveaux demandeurs d’asile.

L’étude de ce projet de budget, qui est le quatrième pour la mission « Immigration, asile et intégration », m’a permis de mesurer les progrès accomplis depuis la création du ministère de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire dans la conduite des politiques dont il a la charge. Toutes les mesures décidées dans le cadre de la révision générale des politiques publiques ont été mises en œuvre avec diligence et de nouvelles initiatives sont prises dans tous les domaines pour renforcer l’efficacité des procédures, simplifier tant que possible les démarches, et favoriser les mesures de bonne gestion. Le projet de budget pour 2011 traduit cette volonté, et la nécessité de donner au ministère les moyens de traiter dans de bonnes conditions les demandes d’asile.

M. François Asensi. Les crédits de la lutte contre l’immigration irrégulière sont en baisse, en contradiction avec l’affichage politique du gouvernement : pourquoi ? De la même manière, les crédits de l’action « accès à la nationalité » diminuent, alors que le gouvernement affirme que l’accès à la nationalité est une priorité pour l’intégration.

M. Philippe Cochet, rapporteur pour avis. La baisse traduit une meilleure gestion globale de ces questions, et notamment les économies attendues dans la gestion des centres de rétention administrative, avec la volonté d’aboutir à des coûts comparables sur l’ensemble du territoire, et la réduction des coûts de transport des personnes éloignées. Concernant l’accès à la nationalité, le délai s’étant allongé, il était nécessaire de modifier la procédure : elle est désormais déconcentrée, ce qui permet des économies au niveau de l’administration centrale. De plus, il est difficile d’anticiper le nombre de demandeurs d’asile, le budget de cette mission est donc fondamentalement adaptable en fonction de l’évolution de la situation.

M. Jean-Pierre Dufau. Tout ceci me paraît contradictoire : on prévoit une diminution de 10 % des moyens de fonctionnement mais le rapporteur indique que le budget est si aléatoire que l’on ne peut pas prévoir son montant réel. Effectivement, l’intégration et l’asile restent deux inconnues, mais on nous explique que l’on va économiser grâce à la réduction des délais. Comment réduire les délais avec moins de fonctionnaires ?

M. Philippe Cochet, rapporteur pour avis. La réduction de 10 % des crédits de fonctionnement sur la période 2011-2013 est une demande du Premier ministre applicable à tous les ministères.

M. Jean-Pierre Dufau. C’est la méthode Coué !

M. Philippe Cochet, rapporteur pour avis. Non, ce n’est pas la méthode Coué, mais le résultat d’une gestion améliorée. Grâce à l’augmentation des effectifs de l’OFPRA et de la CNDA, visant notamment le traitement du stock, les délais d’examen des dossiers vont être raccourcis, ce qui réduira les frais de prise en charge des demandeurs d’asile et les dépenses sur la mission.

M. Robert Lecou. Ce budget prend-il en compte le fonctionnement des services des visas des consulats ?

M. Philippe Cochet, rapporteur pour avis. Non, seulement ceux de l’administration centrale.

M. Axel Poniatowski, président de la commission. Les crédits de fonctionnement des services consulaires ont été examinés tout à l’heure, dans le cadre des crédits de la mission « Action extérieure de l’Etat ».

Suivant les conclusions du rapporteur pour avis, la commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Immigration, asile et intégration.

La séance est levée à onze heures quarante.

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Membres présents ou excusés

Commission des affaires étrangères

Réunion du mercredi 27 octobre 2010 à 11 h 15

Présents. - M. François Asensi, Mme Martine Aurillac, M. Loïc Bouvard, M. Hervé de Charette, M. Dino Cinieri, M. Philippe Cochet, Mme Geneviève Colot, M. Jean-Pierre Dufau, M. Jean-Michel Ferrand, M. Gaëtan Gorce, M. Jean Grenet, M. Robert Lecou, M. Didier Mathus, M. Jacques Myard, M. Axel Poniatowski, M. François Rochebloine, M. Rudy Salles, M. Dominique Souchet, M. Michel Terrot

Excusés. - Mme Nicole Ameline, Mme Sylvie Andrieux, M. Jean-Paul Bacquet, M. Jacques Bascou, M. Claude Birraux, M. Jean-Michel Boucheron, Mme Chantal Bourragué, M. Michel Delebarre, M. Michel Destot, M. Jean-Paul Dupré, Mme Marie-Louise Fort, M. Paul Giacobbi, Mme Élisabeth Guigou, M. Serge Janquin, M. Didier Julia, M. Lionnel Luca, Mme Henriette Martinez, M. Gérard Menuel, M. Alain Néri, M. Éric Raoult, M. Jean-Luc Reitzer, M. Michel Vauzelle