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Mercredi 25 juillet 2007

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 12

Présidence de M. Didier Migaud Président

– Audition de M. Jean Gaeremynck, délégué général à l’emploi et à la formation professionnelle, responsable du programme : accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques 2

– Informations relatives à la Commission 10

Commission des Finances,
de l’économie générale et du Plan

La commission des Finances a désigné les membres de la commission mixte paritaire sur le projet de loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat : au titre des membres titulaires, outre le Président de la Commission et le Rapporteur général, MM. Dominique Tian, Jean-Charles Taugourdeau, Louis Giscard d’Estaing, Jean-Louis Idiart et Jérôme Cahuzac ; en tant que membres suppléants, MM. Michel Bouvard, Jérôme Chartier, Jean-Michel Fourgous, Charles de Courson, Gaëtan Gorce, Pierre-Alain Muet et François de Rugy.

Puis, la Commission a procédé à l’audition de M. Jean Gaeremynck, délégué général à l’emploi et la formation professionnelle.

Le Président Didier Migaud a indiqué que la Commission avait pris connaissance avec intérêt des rapports annuels de performances pour 2006, les premiers du genre ; ils donnent une première illustration de la démarche de performance dans l’administration française. Leur élaboration dans les délais n’a pas été simple. Ces documents sont encore perfectibles, et il appartient au Parlement qui en est destinataire de faire connaître ses attentes. A cet égard, les rapporteurs spéciaux ont un rôle important à jouer. Ils ont d’ailleurs commencé à les analyser.

La Commission souhaite procéder dès à présent à l’audition de quelques responsables de programmes, pour évoquer quelques problématiques exemplaires. La problématique de la gestion des ressources humaines sera abordée cet après-midi avec le directeur général de la police nationale. La commission recevra également la secrétaire générale du ministère de l’Écologie, du développement et de l’aménagement durables. C’est en tant que responsable du programme Accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques que la Commission reçoit ce matin M. Jean Gaeremynck, qui pourra, dans un premier temps, présenter les modalités du partage des compétences entre la ministre chargée de l’emploi et le ministre du travail.

M. Jean Gaeremynck a indiqué que la répartition des compétences entre les ministères dépend des décrets d’attribution ainsi que des lettres de mission adressées aux ministres par le président de la République. La délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle est placée sous l’autorité de la ministre de l’Économie, des finances et de l’emploi ; en outre, elle est mise à la disposition du ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, du ministre de l'Immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement ainsi que du Haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.

Les trois programmes dont le délégué général a la responsabilité, et qui sont placés sous l’autorité de la ministre de l’Économie, des finances et de l’emploi, sont les programmes Développement de l’emploi, Accès et retour à l’emploi, et Accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques. La mission Travail et emploi comporte deux autres programmes : Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail, sous l’autorité du ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, et Conception, gestion et Évaluation des politiques de l’emploi et du travail, programme support placé sous l’autorité conjointe des deux ministres précités. La mission Travail et emploi est donc devenue interministérielle. La délégation générale à l’emploi et la formation professionnelle continue à exercer les mêmes missions et travaille pour les deux ministres sans difficulté.

Le Rapporteur général a souligné qu’avec près de 14 milliards d’euros, la mission Travail et emploi représente un montant considérable. Or, au cours de l’exercice 2006, un abondement des crédits par décret d’avance a été nécessaire pour pallier l’insuffisance des crédits votés en loi de finances initiale. Par ailleurs, une partie des crédits nécessaires pour financer les contrats aidés ont été prélevés, via le mécanisme de fongibilité des crédits, sur les crédits destinés à la compensation d’exonérations de charges sociales pour la sécurité sociale. À combien s’élève cette aggravation de la dette de l’État à l’égard de la sécurité sociale ? Il semble que cette sous-budgétisation se reproduise en 2007. Quel est l’ordre de grandeur des charges non couvertes par les crédits disponibles ? Le besoin de financement sera encore accru en 2008, car le financement de l’allocation de solidarité spécifique, qui a été assuré en 2007 pour partie grâce à la titrisation de la dette de l’UNEDIC, devra être prévu dans le projet de loi de finances.

M. Jean Gaeremynck a indiqué que le montant des sommes dues et non payées à la Sécurité sociale en 2006 s’élève à 730 millions d’euros. Les crédits disponibles étaient insuffisants pour les contrats aidés, mais également sur d’autres postes, comme l’allocation de fin de formation, l’allocation de solidarité spécifique, le fonds transitoire pour les intermittents du spectacle et les préretraites progressives. Les crédits votés ont été abondés par décret d’avance, ainsi que par la loi de finances rectificative pour 2006 à hauteur de 186 millions d’euros.

Pour l’exercice 2007, il manque un milliard d’euros, répartis de la façon suivante : 300 millions d’euros pour les contrats aidés, 400 millions d’euros pour le fonds de solidarité qui finance principalement l’allocation de solidarité spécifique, le fonds intermittents et l’allocation équivalent retraite, 100 millions d’euros pour le secteur des hôtels, cafés et restaurants (HCR), 100 millions d’euros pour l’allocation de fin de formation, le reste étant réparti entre les préretraites, les stagiaires en formation professionnelle et l’association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA). Il faudra prendre des décrets d’avance avant la fin de l’année pour financer tous ces dispositifs.

Le Président Didier Migaud a demandé comment évoluait le rythme de conclusion des contrats aidés actuellement, et quelles étaient les instructions gouvernementales.

M. Jean Gaeremynck a répondu qu’une décélération avait été décidée au second semestre 2007. Les contrats initiative emploi, destinés au secteur marchand, sont maintenus à 40 000. En revanche, les contrats aidés dans le secteur non marchand devront être de 130 000 au deuxième semestre 2007, contre 175 000 signatures au premier.

Dans le cadre de la préparation du budget 2008, la difficulté principale est de doter suffisamment en loi de finances le Fonds de solidarité et l’Association nationale pour la Formation Professionnelle des Adultes (AFPA).

En effet, en 2007, des ressources extrabudgétaires ont été demandées dans la lettre-plafond pour financer les actions de ces organismes. S’agissant de l’AFPA, un prélèvement a été opéré sur le Fonds unique de péréquation. Le Fonds de solidarité a quant à lui bénéficié du versement d’une créance de l’État sur l’UNEDIC, d’un montant de 650 millions d’euros.

Le Rapporteur général a demandé si ce versement avait bien été effectué.

M. Jean Gaeremynck a confirmé l’effectivité du versement. Mais de telles ressources sont uniques, ne présentant aucun caractère pérenne. Il faut donc trouver en loi de finances pour 2008 un moyen de faire face aux besoins que les ressources extrabudgétaires ont permis de satisfaire en 2007. C’est la difficulté principale.

Si un point positif doit cependant être souligné puisque, pour la première fois depuis longtemps, le nombre prévisionnel de bénéficiaires de l’Allocation Spécifique de Solidarité (ASS), jusqu’ici résistants au recul du chômage est en baisse, ce qui a pour conséquence une réduction de 2 à 3 % des besoins de financement, les dépenses du Fonds de solidarité tendent globalement à s’accroître : les candidats potentiels à l’allocation équivalent retraite sont plus nombreux, pour des raisons démographiques. Le dispositif commence à être bien connu et il est difficile de dégager les ressources nécessaires à son financement. Les prestations d’ASS feront l’objet d’une activation pour les bénéficiaires qui entrent dans le mécanisme du contrat d’avenir.

Enfin, le Fonds de solidarité va prendre en charge pour la première fois les indemnités versées aux intermittents du spectacle.

En raison du dynamisme des dépenses, le Fonds de solidarité court ainsi le risque de ne pas être suffisamment budgétisé.

M. René Couanau a demandé à M. Jean Gaeremynck à quelle hauteur pouvaient être évalués les besoins du Fonds de solidarité et de l’AFPA pour 2008.

M. Jean Gaeremynck a répondu que le besoin de financement par l’État du Fonds de solidarité s’élève à 2,07 milliards d’euros environ, l’autre source de financement du Fonds étant la contribution de solidarité des fonctionnaires. En loi de finances initiale pour 2007, 900 millions seulement ont été budgétés pour les dépenses, de sorte qu’il a fallu recourir à une ressource extrabudgétaire : l’État a cédé au Fonds de solidarité une créance qu’il détenait sur l’UNEDIC.

Au-delà du Fonds de solidarité, le deuxième sujet de difficultés pour 2008 est le financement de l’AFPA. En 2007, 200 millions d’euros ont été prélevés sur le Fonds unique de péréquation afin de financer les actions de l’AFPA. Mais ce prélèvement est par nature exceptionnel et il faut en conséquence trouver un financement pour 2008.

Telles sont les principales contraintes qui pèsent sur la construction du budget pour 2008.

M. Bruno Le Maire a souhaité prolonger la question du Rapporteur général sur les contrats aidés.

Début 2007, le précédent gouvernement a annoncé vouloir poursuivre le financement de ces contrats. Ce financement s’est fait par une compensation des exonérations de charges sociales. Le choix du nouveau gouvernement est celui d’un transfert de charge des contrats aidés vers les emplois marchands. Dès lors, quels sont les transferts de charge prévus en ce sens, et quelles sont les créations attendues de contrats marchands ? L’extension des expérimentations menées, avec par exemple les Contrats de transition professionnelle (CTP), qui ont montré leur efficacité, est-elle envisagée? Le cas échéant, sur quels bassins d’emploi, et à quel coût ?

Quelles économies peuvent naître de la fusion entre l’ANPE et l’UNEDIC, et de l’éventuel reciblage de la prime pour l’emploi ?

M. Jean Gaeremynck a rappelé que les bons chiffres en matière de créations d’emplois, qui pourraient conduire à une décrue des mécanismes d’emplois aidés, sont corroborés par l’UNEDIC et par nombre d’économistes. Mais il convient de faire preuve de prudence, car les personnes bénéficiaires de contrats aidés sont particulièrement en difficulté et ne profitent pas nécessairement des emplois créés par l’économie. Il faut donc maintenir la possibilité pour ces personnes d’accéder à un emploi.

Mme Françoise Bouygard, déléguée adjointe, a indiqué que pour 2008, 230 000 entrées sont attendues dans les dispositifs de contrats non marchands, contre 300 000 à 310 000 entrées en 2007. Les contrats marchands, du type contrat initiative emploi, devraient enregistrer 75 000 entrées en 2008 contre 90 000 en 2007. La baisse des entrées s’explique par la croissance économique attendue, mais aussi par l’amélioration du service rendu par l’ANPE dans le cadre du suivi mensuel, qui permet une meilleure orientation des demandeurs d’emploi.

Quant au contrat de transition professionnelle, M. Jean Gaeremynck a répondu que le CTP est actuellement expérimenté sur sept sites seulement. Aux termes de l’ordonnance d’avril 2006, l’expérimentation devait durer jusqu’en avril 2007. Elle a été prolongée d’un an, jusqu’en avril 2008. À ce jour, 2 300 personnes ont bénéficié d’un CTP, avec des résultats intéressants.

La question de la généralisation de l’expérimentation n’a pas à ce jour fait l’objet d’une décision. Il convient en tout état de cause de mettre en relation le dispositif CTP avec celui des Conventions de Reclassement Personnalisé (CRP), créé par les partenaires sociaux en avril 2005. En effet, les deux dispositifs s’adressent à des personnes ayant fait l’objet d’un licenciement économique. Aucune décision n’est prise à ce jour quant à savoir si l’expérimentation doit être généralisée.

Il faut aussi envisager la simplification du système. La situation actuelle se caractérise d’une part par la mutation du service public de l’emploi de droit commun, avec le suivi mensuel personnalisé réalisé par l’ANPE, d’autre part par une grande diversité des mesures spécifiques d’accompagnement et de personnalisation, notamment à destination des personnes ayant fait l’objet d’un licenciement économique. L’ensemble n’est pas très bien coordonné : cellule de reclassement, CRP financée par l’Etat et les employeurs, CTP financé par l’assurance chômage et l’État… L’hypothèse d’une simplification mérite donc d’être soumise au ministre.

Lorsque le mécanisme d’accompagnement est très soutenu et très personnalisé, le dispositif s’avère donc performant. En l’occurrence, les chiffres de retour à l’emploi durable (vers un CDI ou un CDD de plus de 6 mois) sont satisfaisants, entre 60 et 70 %. Un dispositif en matière de formation accompagne le CTP. La formule est donc adaptée, même si les bénéficiaires sont peu nombreux : 3 000 entrées envisagées, 2 300 réalisées à ce jour.

Une évaluation du dispositif par la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) est en cours, ainsi qu’une mission de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS). Ces travaux devraient fournir les premiers éléments en faveur d’une simplification, voire d’une fusion des dispositifs.

M. Patrice Martin-Lalande s’est interrogé, s’agissant du rapprochement entre l’UNEDIC et l’ANPE, sur le bilan de la création des maisons de l’emploi.

M. Jean Gaeremynck a souligné la lenteur de leur mise en place. En premier lieu, est intervenu un processus de labellisation. Cette phase a été assez rapide. Dans un second temps, des conventions doivent matérialiser le soutien financier de l’État : or, leur mise en place a pris du retard. Aujourd’hui, 227 projets ont été labellisés. Seules 40 conventions étaient signées en septembre 2006. Fin 2006, elles étaient moins de 100 et on en dénombre aujourd’hui entre 160 et 170. La priorité est de combler ce retard. Il existe une grande diversité des maisons de l’emploi. Elles reflètent le dynamisme des bassins d’emploi, les initiatives des élus et la qualité des partenariats locaux. L’enjeu est de développer les partenariats avec les chambres consulaires, les organismes professionnels et les partenaires sociaux. La DARES vient de débuter un travail d’évaluation, mais il est difficile de porter une appréciation générale sur les maisons de l’emploi tant leur diversité est forte. Le ministre de l’Emploi et de la cohésion sociale, Jean-Louis Borloo, avait créé ces maisons pour faciliter le rapprochement entre l’ANPE et l’UNEDIC. Celui-ci existe, comme le montre la création de guichets uniques, mais ce n’est pas systématique et ce n’est pas la principale caractéristique des maisons de l’emploi, qui est davantage le développement des partenariats.

M. Charles de Courson s’est étonné du caractère lacunaire de l’évaluation de dépenses importantes dans le rapport annuel de performances. Le rapport sur le programme Développement de l’emploi ne donne guère d’indication sur l’efficacité des politiques de l’emploi, alors que ce programme représente 20 milliards d’euros. Le constat est le même pour le programme Accès et retour à l’emploi. Ainsi la prime pour l’emploi, qui représente 3,2 milliards d’euros, ne fait l’objet d’aucune évaluation alors même que la Cour des comptes considère que celle-ci a un rôle redistributif en faveur de neuf millions de ménages, mais aucun caractère incitatif en matière de retour à l’emploi. L’évaluation de la performance de ces programmes, qui représentent 50 à 60 milliards d’euros, est très insuffisante. Quant aux indicateurs de contrôle, ils montrent que celui-ci intervient en moyenne une fois tous les 300 ans. Ces lacunes en matière d’évaluation ne sont pas nouvelles et proviennent d’une culture insuffisante de la France dans ce domaine. La commission des Finances ne dispose pas d’évaluation précise des politiques publiques, notamment des exonérations de charges sociales, qui s’élèvent à 16 milliards d’euros.

Le Président Didier Migaud a constaté que cette problématique était au cœur de la loi organique relative aux lois de finances. Ces auditions constituent une première et les rapporteurs spéciaux ont un rôle à jouer pour permettre à la Commission de mieux appréhender les différentes missions.

M. Jean Gaeremynck a reconnu les limites de l’évaluation de la politique de l’emploi. Les dépenses fiscales sont effectivement chiffrées dans le rapport annuel de performances, mais leur efficacité n’est pas évaluée, ce qui est tout-à-fait regrettable. Ce sujet fait l’objet d’une réflexion avec la direction de la législation fiscale. Quelques dépenses fiscales telles que la prime pour l’emploi et le dispositif « hôtellerie, café, restaurant » connaissent une croissance importante et pèsent lourd sur les finances publiques. Des modifications interviennent en cours d’année sans réelle étude d’impact préalable. Il faut donc développer de véritables objectifs et indicateurs de performances qui ne mesurent pas simplement l’activité et ont une signification pour les services centraux et déconcentrés. En outre, le responsable de programme doit répondre d’outils qu’il ne pilote pas réellement. L’exemple du dispositif « hôtellerie, café, restaurant » est, à cet égard, tout à fait significatif. La DARES est responsable de l’évaluation mais il n’existe pas encore de véritable lieu de l’évaluation de la performance des politiques de l’emploi.

Le Président Didier Migaud a rappelé que, sous la législature précédente, le ministre de l’Emploi et de la cohésion sociale avait communiqué des prévisions en matière de création d’emploi et d’augmentation de salaire au moment de l’adoption du dispositif « hôtellerie, café, restaurant ». Il s’est interrogé sur le bilan de cette politique.

M. Jean Gaeremynck a confirmé que l’emploi dans le secteur de l’hôtellerie avait connu une croissance importante mais qu’aucune étude ne permet de distinguer les emplois créés par l’activité économique de ceux spécifiquement créés par le dispositif.

Mme Françoise Bouygard, déléguée adjointe, a souligné que la direction n’était pas encore convaincue que les indicateurs permettaient une réelle évaluation de la performance. Certains indicateurs ont été modifiés à la demande de la direction du budget et donnent, par conséquent, davantage l’indication d’une activité plutôt qu’une véritable évaluation de la performance des politiques de l’emploi. A titre d’exemple, l’évaluation des contrats aidés par la DARES prend la forme d’un suivi du parcours des bénéficiaires de ces contrats et n’intervient pas chaque année. La direction du budget a donc préféré retenir comme indicateur une enquête rapide et annuelle. Par ailleurs, certains dispositifs ont été rattachés au programme sans que la direction n’ait jamais été associée en amont. C’est le cas de deux dispositifs concernant le secteur agricole qui seront intégrés au programme Développement de l’emploi dans le cadre du projet de loi de finances pour 2008. La situation actuelle manque d’une culture de l’évaluation des politiques publiques en France. Le budget de la DARES représente 7 millions d’euros par an, alors que les crédits budgétaires s’élèvent à 12 milliards d’euros et que les trois programmes représentent, dépenses fiscales incluses, 50 milliards d’euros. Il serait peut-être nécessaire de consacrer à l’évaluation un pourcentage systématique du budget de la politique de l’emploi, comme le pratiquent déjà certains pays occidentaux. Il manque en France un lieu de l’évaluation de la dépense publique qui réunisse experts et organismes de réflexion. Il n’existe pas, par exemple, d’organisme qui évalue les dispositifs de formation professionnelle. Cela constitue un handicap depuis la disparition du Conseil scientifique de l’évaluation.

Le Président Didier Migaud a souligné le rôle que devront jouer les rapporteurs spéciaux pour développer et approfondir l’évaluation des politiques publiques.

M. Charles de Courson s’est étonné des écarts entre objectifs et réalisations s’agissant des finalités poursuivies par l’allocation de solidarité spécifique (ASS). Les commentaires du rapport annuel de performances (RAP) sur les indicateurs associés à l’objectif n° 2 du programme Accès et retour à l’emploi (notamment pour l’indicateur mesurant la part des allocataires de l’ASS bénéficiant de l’intéressement) mériteraient d’être plus clairs. Doit-on conclure de la lecture du RAP que des objectifs irréalistes ont été fixés en matière de retour à l’emploi ? Les résultats obtenus donnent en tout cas le sentiment d’une relative absence de maîtrise et de contrôle de la part des services de l’État.

M. Jean Gaeremynck a précisé que deux séries de contrôle étaient effectuées : si les contrôles de l’ANPE, qui peuvent se traduire par des radiations de liste, sont de plus en plus nombreux, les contrôles effectués par les services de l’État, et notamment par les directions départementales sur proposition des ASSEDIC, doivent être améliorés. La réforme de l’organisation des services contribuera à renforcer l’efficacité des dispositifs de contrôle.

Rappelant les enjeux financiers considérables de cette question, M. Philippe Vigier s’est interrogé sur la qualité des formations dispensées lorsque certains territoires font face à des mutations économiques importantes. Quelles préconisations peuvent être formulées pour améliorer l’adaptation des formations – annuelles et pluriannuelles – aux situations de changements de branches ou de métiers ? L’éclatement des financements entre régions implique de renforcer l’évaluation de l’ensemble du système. Quelles sont les conséquences de l’évolution du cadre juridique des contrats aidés sur la qualité et la pérennité des formations ?

M. Jean Gaeremynck a reconnu que le dispositif actuel était mal adapté aux attentes et aux besoins des demandeurs d’emploi. L’administration doit savoir mieux anticiper les évolutions du marché du travail pour adapter les formations dispensées en fonction des compétences requises. La recherche d’une meilleure approche territoriale doit permettre de renforcer la coordination entre les différents intervenants.

Mme Françoise Bouygard, déléguée adjointe, a souligné qu’il était paradoxal d’interroger le ministère sur la qualité des formations alors que ces dernières sont décentralisées depuis 2004. Les contestations régulières dont font l’objet les crédits consacrés chaque année aux politiques de formation peuvent également surprendre. Alors que l’évaluation de ces politiques publiques reste indispensable, l’insuffisance des réponses locales est liée pour partie à un problème d’articulation entre niveaux de collectivités territoriales.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a rappelé que la mission que lui avait confiée le Premier ministre en 2004 dans le but de faire progresser les systèmes d’évaluation publique s’était traduite par l’insertion de mesures législatives ambitieuses et unanimes à l’Assemblée nationale : on ne peut que déplorer le fait que le Sénat – qui soutenait au cours du débat que l’élu local n’avait pas à être évalué – ait supprimé ces mesures de la loi de 2004.

M. Yves Censi a souligné que le Parlement jouait pleinement son rôle en exigeant de telles évaluations. L’exemple de la Maison de l’emploi de Rodez montre que les changements dans les critères de financement des projets peuvent avoir un impact préjudiciable à la mobilisation des financements publics. Pourquoi ces changements de critères de financement sont-ils intervenus ?

M. Jean Gaeremynck a indiqué qu’à sa connaissance, les critères de financement n’ont pas évolué et que ce cas particulier mérite un examen plus approfondi.

M. Dominique Baert a souhaité savoir si la réflexion annoncée sur le devenir et l’évolution des contrats aidés trouverait des applications concrètes dès 2007 : est-il à craindre un durcissement des conditions d’accès et d’éligibilité à ces contrats ? Doit-on réexaminer le maillage territorial des Maisons de l’emploi, en liaison notamment avec l’avenir des comités de bassins d’emploi ? Par ailleurs, l’État a-t-il prévu de compenser le désengagement du Fonds social européen (FSE) en matière d’insertion par l’activité économique ? Enfin, on ne peut pas à la fois considérer comme essentielle la question du contrôle et risquer d’affaiblir les conditions d’intervention des inspecteurs du travail sur le territoire national dans un contexte d’attentes accrues et de diminution annoncée du nombre des fonctionnaires.

M. Jean Gaeremynck a expliqué qu’il n’exerçait pas de compétence en matière de gestion des inspecteurs du travail. C’est le Directeur général du travail qui gère cette catégorie de fonctionnaires dans le contexte de la mise en œuvre du plan de modernisation et de développement de l’Inspection du travail.

Sur la question des structures d’insertion par l’activité économique (SIAE), il a considéré qu’il était inexact d’évoquer un quelconque désengagement du Fonds Social Européen (FSE). L’effort reste soutenu, même si le poids relatif de la France est désormais moins important au sein de cette politique de soutien menée à l’échelle de toute l’Union européenne. Dans ce cadre, la délégation à l’emploi détermine les priorités en privilégiant la mise en œuvre des moyens du Fonds à l’échelon des régions. Elle s’applique à préserver l’action des réseaux qui ont déjà mis en œuvre les crédits du FSE, dont ceux des missions locales et des réseaux d’insertion pour l’activité économique. La délégation apprécie les offres de service des différents intervenants en liaison avec les élus, et en suivant une logique de performance. Le rôle des comités départementaux de l’IAE est important pour le développement de l’offre d’insertion, la recherche d’une simplification des conventions, une meilleure appréciation des concours financiers et un suivi pertinent des résultats. Les crédits ouverts en matière d’IAE s’élevaient à 222 millions d’euros en LFI 2007 et les crédits demandés pour 2008 sont de 219 millions d’euros, ce qui signifie que la dotation de l’État sera maintenue.

La délégation à l’emploi a peu d’implication financière sur l’activité des comités de bassin d’emploi dont l’action s’inscrit en coordination avec les maisons de l’emploi.

Mme Françoise Bouygard a expliqué, qu’en matière de contrats aidés, la délégation n’avait pas entrepris une démarche tendant à restreindre leurs conditions d’accès depuis Paris. Les préfets de région sont compétents pour sélectionner les dossiers, déterminer les taux de subvention dans le cadre d’une enveloppe et pour fixer les conditions d’accès en considération des objectifs nationaux. Un changement est cependant envisageable en matière de contrats aidés dans le secteur marchand.

Le contrat jeune en entreprise (« Soutien à l’emploi des jeunes en entreprise » SEJE) ne fait pas actuellement l’objet d’un pilotage similaire, aucune condition d’accès n’ayant été définie a priori. En cas de définition d’une enveloppe de 75 000 contrats en 2008 pour l’ensemble des contrats initiative emploi et des SEJE (au lieu de 90 000 en 2007), le contrat initiative emploi (CIE) pourrait rester accessible aux jeunes éligibles au SEJE. Le SEJE disparaîtrait dans le cadre d’une réunification des deux dispositifs.

Le Président Didier Migaud a demandé des précisions sur l’insuffisance de crédits d’un milliard d’euros actuellement constatée pour l’exécution 2007. Il a souhaité connaître l’évolution prévisible de ce montant d’ici la fin de l’année.

M. Jean Gaeremynck a considéré que cet ordre de grandeur ne devrait pas changer au second semestre.

Le Président Didier Migaud s’est félicité de l’intérêt de cette audition en souhaitant que d’autres auditions de responsables de programme interviennent afin d’affiner l’appréciation que l’on peut porter sur les rapports annuels de performance et approfondir la démarche de performance.

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Informations relatives à la Commission

La Commission a désigné :

– MM. Didier Migaud, Gilles Carrez, Dominique Tian, Jean-Charles Taugourdeau, Louis Giscard d’Estaing, Jean-Louis Idiart et Jérôme Cahuzac, comme candidats titulaires ;

– MM. Michel Bouvard, Jérôme Chartier, Jean-Michel Fourgous, Charles de Courson, Gaëtan Gorce, Pierre-Alain Muet et François de Rugy, comme candidats suppléants,

pour siéger à une éventuelle commission mixte paritaire sur le projet de loi de loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat (n° 4).

——fpfp——