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Mercredi 25 juillet 2007

Séance de 15 heures

Compte rendu n° 13

Présidence de M. Didier Migaud Président, puis de M. Yves Censi Vice-président, puis de M. Didier Migaud Président

– Audition de M. Frédéric Péchenard, directeur général de la Police nationale, responsable du programme : police nationale 2

– Audition de Mme Michèle Rousseau, secrétaire générale du ministère de l’Écologie, du développement et de l’aménagement durables, responsable du programme : protection de l’environnement et prévention des risques 11

– Informations relatives à la Commission 18

Commission des Finances,
de l’économie générale et du Plan

Le Président Didier Migaud a annoncé à la Commission que son Bureau préconisait une reprise rapide des activités de la mission d’évaluation et de contrôle, la MEC. En effet, cette structure a démontré sa capacité à dégager des consensus au sein du Parlement sur de grands sujets de politique publique. Le travail de contrôle doit donc être amplifié au sein de la MEC.

Cinq principes de fonctionnement se sont imposés depuis 1999.

Premièrement, la composition de la MEC est équilibrée et non proportionnelle avec une co-présidence partagée entre la majorité et l’opposition. Outre les membres de droit que sont le Président et le Rapporteur général de la Commission, les deux principaux groupes (UMP et SRC) auront cinq membres chacun, et les deux autres groupes (NC et GDR) deux membres chacun.

Deuxièmement, les commissions pour avis sont associées aux travaux de la MEC. Les rapporteurs pour avis de ces commissions siègent de droit à la MEC comme les co-rapporteurs éventuellement désignés par les commissions.

Le troisième principe consiste à associer la Cour des comptes par certains rapports d’enquête et les magistrats qu’elle désigne pour assister aux réunions de la MEC.

Le quatrième principe est celui de la publicité des auditions de la MEC qui sont ouvertes à la presse et au public. Les rapports de la MEC doivent donner lieu à une analyse des suites apportées par le gouvernement, ce qui est essentiel en matière de contrôle.

En dernier lieu, le calendrier de la MEC réserve le jeudi matin comme créneau de ses travaux. On peut envisager le choix d’un autre jour en dehors de l’automne budgétaire. Le Bureau propose également que la MEC étende son activité sur une plus longue période, de janvier à septembre.

Le Président Didier Migaud a ajouté que le Bureau avait sélectionné quatre thèmes pour les travaux de la MEC : le financement des projets d’équipement naval militaire, la gestion des ressources humaines au ministère de l’Écologie, du développement et de l’aménagement durables, l’argent des radars et le recouvrement des amendes de police ainsi que la présence audiovisuelle extérieure de la France.

Il sera demandé deux études à la Cour des comptes : la première sur les systèmes d’information de l’État, et l’autre sur le droit individuel à la formation. Un cabinet privé sera par ailleurs chargé de préparer un rapport d’évaluation sur les dépenses fiscales en faveur du logement.

Dans le cadre des travaux de la commission des Affaires sociales, un commissaire des Finances devrait être associé aux travaux de la MECS sur le dossier médical personnel. En dernier lieu, la commission des Finances et celle des Affaires culturelles, familiales et sociales mèneront une mission d’information commune sur la fusion de l’ANPE, de l’UNEDIC et des maisons pour l’emploi.

La Commission a ensuite procédé à l’audition de M. Frédéric Péchenard, directeur général de la police nationale, responsable du programme Police nationale.

Après avoir rappelé que cette audition était ouverte tant aux membres des autres commissions qu’à la presse, le Président Didier Migaud a souhaité que les échanges soient les plus directs possible et permettent de mettre au jour la marge de progression dont disposent les responsables des politiques de sécurité dans l’évaluation de l’efficacité de l’action publique.

Tout en soulignant les bons résultats de l’exécution 2006 (notamment en matière du taux d’élucidation et de diminution de la délinquance), M. Michel Diefenbacher, Rapporteur spécial, a considéré que la lecture du rapport annuel de performances (RAP) soulevait trois types de questions. En matière de gestion des personnels d’abord, comment ont été utilisées les facilités permises par la fongibilité asymétrique et où en est la mise en œuvre du protocole d’accord de juin 2004 ? Quel bilan peut ensuite être fait de la mise en œuvre de la loi d’orientation pour la sécurité intérieure (LOPSI) ? Quels enseignements peuvent enfin être tirés des redéploiements entre police et gendarmerie ? Au-delà de l’exécution 2006 proprement dite, quelle est la position de la direction générale de la police nationale sur le rapprochement ou, mieux, la fusion des services de renseignements français ? La question se pose également de savoir s’il convient de créer un pôle antiterroriste unique : quel serait alors le calendrier d’une telle réforme ? Enfin, les retards de la France en matière de vidéosurveillance impliquent de mettre en place un programme national de rattrapage (par rapport notamment à notre voisin britannique) : quel doit en être le financement ?

Le Président Didier Migaud a souhaité savoir quelles décisions avaient été prises pour régler la question des heures supplémentaires pour les officiers de la police nationale. Le coût et l’impact de ces décisions sont, en effet, loin d’être neutres pour la mission Sécurité.

Tout en se disant honoré et ému de se présenter devant la Représentation nationale après une carrière entièrement consacrée à ses fonctions de commissaire de police, M. Frédéric Péchenard, directeur général de la police nationale, a précisé que la question des heures supplémentaires concernait effectivement davantage les officiers que les gardiens et était réglée depuis 1996 pour les commissaires de police. À l’image de ces derniers, les officiers passeront à un régime « cadres » au 1er janvier 2008 : ce régime permettra une récupération des heures supplémentaires effectuées, lesquelles seront capitalisées comme pour tous les cadres A de la fonction publique. S’agissant des 5 millions d’heures supplémentaires accumulées par les officiers de police ces dernières années, la proposition qui a été faite par le ministère de l’Intérieur est un traitement partiel et par tranches permettant de payer 50 % de ces heures supplémentaires. Les 50 % restant pourraient être intégrés à un éventuel « compte épargne temps » ou à un dispositif de « compte épargne retraite » avec possibilité de récupération. Les négociations avec les syndicats d’officiers de police (le SNOP et Synergie) pourraient aboutir la semaine prochaine à la conclusion d’un accord qui viserait en priorité les officiers ayant effectué jusqu’à 200 heures. Le problème pourrait ainsi être réglé rapidement pour 46 % des officiers. L’heure serait payée 9,25 euros, soit un coût total de 24 millions d’euros pour l’État.

S’agissant de la gestion du personnel, la LOPSI avait prévu la création de 1.300 emplois nets en 2006, ainsi que la transformation d’emplois de commissaires et d’officiers. Si ces objectifs ont bien été atteints, on doit déplorer une forte déflation des adjoints de sécurité (ADS), en raison notamment d’un problème de places disponibles en écoles.

M. Frédéric Péchenard a présenté le bilan provisoire de mise en œuvre de la loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPSI). L’objectif fixé en termes d’effectifs était une augmentation totale de 6 500 emplois équivalent temps plein, dont 4 500 policiers et 2 000 personnels dans les corps de soutien. À la fin de l’année 2006, 5 200 fonctionnaires, dont 3 350 policiers et 1 850 personnels administratifs, avaient été recrutés. À la fin de l’année 2007, 6 200 emplois, dont 4 200 emplois actifs et 2 000 emplois administratifs, devraient avoir été recrutés. Le nombre d’officiers de police judiciaire a également été augmenté, de 9 873 nouveaux officiers à la fin de l’année 2006 et de 10 100 officiers à la fin de l’année 2007.

Une réserve civile de police nationale a été créée. Elle permet d’aider le service actif et de fournir un complément de revenus à de jeunes retraités qui en ont besoin. En 2006, 3 600 vacataires ont ainsi été employés, pour un montant total de 6 millions d’euros. Le maximum est de 150 jours par an par personne. Cette réserve civile a vocation à se développer, sur le modèle de celle de la gendarmerie nationale, qui fonctionne très bien. Les réservistes peuvent mener des actions de formation ou de coopération internationale, par exemple.

Dans le domaine immobilier, l’objectif fixé était de 100 000 mètres carrés mis en chantier par an. En 2002, 61 000 mètres carrés ont été mis en chantier, 98 000 en 2005, 84 000 en 2006, 77 000 en 2007, compte tenu du coût élevé de l’immobilier. En ce qui concerne les transmissions, le déploiement d’ACROPOLE (automatisation des communications radio opérationnelles de la police), qui couvrait seulement 34 % des zones de police en 2002, a été achevé sur le territoire métropolitain en mai 2007, l’outre-mer restant à équiper. La modernisation des centres d’information et de commandement des directions départementales de la sécurité publique est en cours : 5 départements avaient été équipés en 2006, 30 devraient l’être à la fin de l’année 2007.

Le rapprochement des fichiers JUDEX de la gendarmerie nationale et STIC de la police nationale progresse grâce au projet ARIANE (application de rapprochements, d’identifications et d’analyses pour les enquêteurs), qui sera un système commun à la police nationale et à la gendarmerie.

Les moyens de la police technique et scientifique ont été développés. Le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG), créé en 1998, ne comportait que 722 profils en 2002 et n’avait permis d’élucider que deux affaires. À la fin de l’année 2006, il comportait 515 000 profils et devrait en inclure 550 000 à la fin de l’année 2007. Au 1er juillet 2007, il a permis d’identifier 8 300 délinquants. Le fichier automatisé des empreintes digitales recensait pour sa part 1,5 million de personnes en 2002. Ce chiffre s’élevait à 2,7 millions à la fin de l’année 2006 et devrait être de 2,9 millions à la fin de cette année. La signalisation d’une part importante des gardés à vue et mis en cause a permis cette augmentation.

La nouvelle tenue est aujourd’hui entièrement déployée. La nouvelle arme de service, un pistolet automatique fabriqué par la firme SIG SAUER, équipera les forces de la police nationale et de la gendarmerie, ce qui permettra des économies importantes en termes de maintenance, d’achats de munitions, etc. Le parc automobile est passé de 29 700 à 33 000 véhicules à la fin de l’année 2007 et cette augmentation s’est accompagnée d’une diminution du taux d’indisponibilité, passé de 2,5 % à 2 % en 2006. Il devrait être de 1,4 % à la fin de cette année.

En ce qui concerne l’action sociale, le soutien au personnel a été développé afin de fidéliser les policiers dans les zones les plus difficiles : 21 millions d’euros ont été consacrés aux réservations de logement en 2007, contre 11 millions en 2002.

Le redéploiement des forces de police nationale et de gendarmerie a été opéré entre 2003 et 2006. 343 communes situées dans 66 départements ont été concernées, dont 222 ont été transférées à la police nationale et 121 à la gendarmerie nationale. Un dernier redéploiement doit encore avoir lieu à La Réunion. Cette réforme a renforcé la cohérence du partage des compétences. Un groupe de travail commun à la direction générale de la gendarmerie nationale et à la direction générale de la police nationale a été constitué pour déterminer si ce redéploiement doit être poursuivi.

Chacun a pu mesurer l’impact de la vidéosurveillance lors des enquêtes ayant suivi les attentats ou les tentatives d’attentats de Londres. La vidéosurveillance n’est pas un remède miracle, mais elle peut jouer un rôle crucial, combinée à d’autres éléments de police technique et scientifique. À Paris, le réseau métropolitain et les bus sont désormais équipés, ce qui présente un double intérêt, à la fois dissuasif et pour l’élucidation de certaines affaires. Un plan, appelé « 1 000 caméras », est prévu à Paris. Un plan national devrait également être lancé. Au 1er juillet 2007, 230 villes se sont dotées d’un système de vidéosurveillance dont 53 ont prévu un renvoi des images vers le commissariat de police concerné. Il convient évidemment que les caméras installées soient dotées d’un système d’enregistrement et qu’elles répondent à des normes techniques garantissant l’identification des personnes.

Il n’y a pas encore de calendrier arrêté au sujet de la fusion des services de renseignement. Le conseil des ministres du 20 juin dernier a identifié cette fusion comme l’un des quatre chantiers prioritaires de la révision des politiques publiques. Trois services sont concernés : la direction de la surveillance du territoire (DST), la direction centrale des renseignements généraux (DCRG) et la direction des renseignements généraux de la préfecture de police. La fusion vise à renforcer leur efficacité grâce à une mutualisation de leurs moyens. Le déménagement à Levallois-Perret, dans un immeuble commun, de la DST et de la DCRG ainsi que de la sous-direction anti-terroriste de la direction centrale de la police judiciaire a déjà contribué à leur rapprochement. M. Frédéric Péchenard a indiqué avoir reçu une lettre de mission du ministre de l’Intérieur lui demandant de présenter ses propositions en septembre prochain.

M. Jérôme Cahuzac a rappelé que plus de 200 communes ont déployé un système de vidéosurveillance et que plus de 50 ont accepté un renvoi des images enregistrées vers les commissariats de police. Une convention de collaboration a-t-elle été conclue entre les communes concernées et l’État ? Les commissariats ont-ils été dotés d’effectifs suffisants pour que ces images soient regardées 24 heures sur 24 et, en particulier, la nuit ?

M. Frédéric Péchenard a répondu, sur le thème de la vidéosurveillance, que les relations entre les services de l’État et les communes s’étaient nouées au cas par cas, avec l’accord du préfet, sans plan d’ensemble national. Il est certain que les centres d’information et de commandement doivent être en mesure de recevoir des images là où elles existent ; c’est la raison pour laquelle les communes dotées de moyens de vidéosurveillance sont prioritaires dans l’implantation des centres. S’agissant des moyens humains consacrés à la vidéosurveillance, on considère qu’un même fonctionnaire ne peut surveiller plus de six écrans en même temps ; or, cette surveillance est nécessaire à toute réaction en temps réel des services de police. Pour autant, l’enregistrement des images est également indispensable, que ce soit pour pallier un manque d’attention passager ou pour remonter au point de départ d’un incident.

M. Jérôme Cahuzac a souhaité se faire confirmer l’engagement du déploiement de moyens supplémentaires dans les commissariats où la surveillance se révèle nécessaire.

M. Frédéric Péchenard a indiqué que cette surveillance était exercée 24 heures sur 24 dans les centres d’information et de commandement, des mutualisations étant possibles pour améliorer encore la présence des personnels. À cet égard, des moyens supplémentaires seraient appréciables.

M. Gérard Bapt a demandé que soit honoré l’engagement pris par la ministre de l’Intérieur de rendre publics les rapports d’inspection relatifs au dispositif de suivi des statistiques de la délinquance. Il a également évoqué la fermeture, dans le département de Haute-Garonne, d’un poste de police de proximité dont la réouverture a été unanimement réclamée localement suite à l’installation d’une station de métro au même endroit. Enfin, on peut légitimement s’offusquer des propos récemment tenus dans le magazine La Tribune du commissaire par Monsieur David Skuli, directeur départemental de la sécurité publique de la Seine-Saint-Denis, qui semble assimiler le travail de la police, faisant appel à des hélicoptères et autres drones, à des missions de guerre fort éloignées d’une police de proximité.

M. Frédéric Péchenard s’est félicité de l’équilibre qui a été trouvé en matière de publication et d’analyse des statistiques de la délinquance. Ces statistiques ont toujours été discutées, c’est la raison pour laquelle la DGPN ne les publie plus directement, se contentant de s’exprimer sur la seule action des services de police. C’est à l’Observatoire national de la délinquance (OND), organisme indépendant, qu’échoit désormais la responsabilité de la diffusion des statistiques. Sur le fond, l’état 4 001, principal support des statistiques de la délinquance, n’est certes pas parfait mais il a le mérite de la stabilité sur une très longue période, à la différence d’autres indicateurs peut-être plus pertinents ponctuellement mais qui peuvent ne pas le rester à moyen terme. Il convient donc de conserver inchangé l’état 4 001 et de laisser l’OND poursuivre sa mission propre. S’agissant de la police localisée, la priorité doit aller en effet au renforcement de la proximité avec la population. Telle est d’ailleurs la fonction première de la police nationale : connaître la population et savoir l’aborder. Seuls certains services spécialisés dérogent à ce schéma général. Les fermetures de postes de police, lorsqu’elles ont eu lieu, ont été motivées par la très faible efficacité desdits postes, qui parfois n’enregistraient qu’une seule plainte par jour, tout en mobilisant trois policiers tenus d’assurer leur permanence sans pouvoir patrouiller sur le terrain. La préférence est allée à des patrouilles à pied, à vélo ou à cheval avec pour point d’ancrage un commissariat central ouvert 24 heures sur 24. Ce dispositif n’exclut pas que certaines difficultés puissent subsister localement. Quant aux propos tenus par Monsieur David Skuli, ils reflètent la situation particulièrement difficile de la Seine-Saint-Denis, que l’on peut rapprocher de celle du département de l’Essonne. Bien évidemment, il ne faut pas confondre rétablissement de l’ordre public et action de guerre. On doit justement souligner que lors des violences urbaines de l’automne 2005, aucune victime n’a été à déplorer, ce qui invite à rendre hommage aux fonctionnaires de la sécurité publique et aux forces mobiles, dont bien des pays nous envient l’efficacité.

M. Julien Dray, usant de la faculté que l’article 38 du Règlement de l’Assemblée nationale confère aux députés d’assister aux réunions des commissions dont ils ne sont pas membres, a lui aussi souhaité obtenir des précisions sur le nouveau concept d’expérience de police localisée en Seine-Saint-Denis énoncé par la ministre de l’Intérieur. Par ailleurs, s’exprimant en tant que vice-président de la région Île-de-France chargé de la sécurité, il a demandé que l’on compare les données d’exécution de la LOPSI avec les effectifs réels déployés sur le terrain, qui semblent moins nombreux. La fusion annoncée des services de renseignement a été récemment citée par Madame Lagarde, ministre de l’Économie, des finances et de l’emploi, comme exemple d’économies à réaliser en termes d’emplois publics. En sait-elle déjà plus sur ce point que les services eux-mêmes ? Toute réduction d’effectifs dans les services de renseignement serait dommageable, surtout si l’on considère l’excellent travail de terrain que ces services ont accompli dans la lutte contre les violences urbaines. La vidéosurveillance a quelques chauds partisans, mais elle ne doit pas se substituer à la présence policière sur la voie publique. Si la police britannique s’est révélée efficace pour appréhender des terroristes après les attentats, il est bien préférable d’empêcher qu’ils se produisent. Autre exemple : la présence de caméras ne fait pas reculer les violences dans les transports en commun.

M. Frédéric Péchenard a souscrit à l’objectif d’empêcher les attentats avant tout. D’ailleurs, parmi les raisons expliquant que notre territoire n’ait plus connu d’attentats meurtriers depuis décembre 1996, certaines sont propres à la police, à la justice et à l’efficacité de notre droit pour réprimer l’association de malfaiteurs pour entreprise terroriste. En matière d’effectifs des services de police, les départs en retraite devront être remplacés : il serait curieux de « détricoter » en deux ans ce qui a été obtenu en cinq ans grâce à la LOPSI. Les effectifs sont aujourd’hui suffisants ; ils sont nécessaires, notamment dans les services de renseignement. Dans ce dernier domaine, le nouveau service qui sera créé devra être organisé autour des missions qui lui seront confiées. Le rapport écrit sur ce point ne sera remis à la ministre que le 30 septembre prochain, mais d’ores et déjà quelques lignes directrices apparaissent : aucune mission aujourd’hui assumée par les services existants ne doit disparaître ; pour autant le futur service unifié devra se concentrer sur les trois missions que sont le contre-terrorisme, le contre-espionnage et la contre-ingérence. Dès lors, le renseignement ouvert, la lutte contre les violences urbaines, la lutte contre l’économie souterraine et la surveillance des courses et jeux devront relever d’autres services. Pourquoi, par exemple, ne pas rattacher les courses et jeux à la police judiciaire, comme c’est déjà le cas à la préfecture de police ? Les autres missions citées pourraient, soit être regroupées au sein d’une sous-direction spécifique, soit être rattachées, sous une forme à préciser, à la Direction centrale de la sécurité publique. Il serait prématuré, à ce stade, de s’engager plus avant.

Il est difficile de se fonder sur un effectif de référence pour affirmer le nombre de policiers souhaitable dans une circonscription. Il est possible de se fonder en partie sur les effectifs départementaux de fonctionnement annuel (EDFA) ; cet indicateur est important mais ne permet pas la gestion de toutes les situations, variables en fonction des évolutions de l’effectif liées à l’absence pour formation, maladie, dépression, indisponibilité pour différentes raisons, congé maternité et enfin du fait des nombreuses demandes de mutation. La gestion des effectifs en Île-de-France est particulièrement difficile à cause du grand nombre de demandes de mutation pour la province, ce qui s’explique par le fort recrutement de fonctionnaires d’origine provinciale. Il est très difficile de fidéliser les effectifs dans les secteurs difficiles des départements 93, 77, 91.

Le ministère cherche des solutions pour remédier à cette situation insatisfaisante : les concours déconcentrés, les cadets de la République (il s’agit du recrutement de jeunes originaires des départements en question en qualité d’adjoints de sécurité, dans le but de les voir ensuite s’engager dans la police), le partenariat avec l’éducation nationale enfin pour informer les jeunes et les intéresser aux carrières de la police. Toutes ces pistes de réflexion ont pour objectif de fidéliser les effectifs de la région parisienne en recrutant dans cette même région.

M. Bruno Lemaire a indiqué partager les interrogations de M. Julien Dray au sujet de la sécurité dans les quartiers difficiles. Les compagnies de CRS sont actuellement prêtées aux départements de la région parisienne pour accomplir des missions de sécurité publique : si cette situation devait évoluer, par quoi ces forces seraient-elles remplacées ? Il a également demandé que des efforts en personnel policier soient consentis afin de renforcer les investigations, ce qui est indispensable si l’on veut faire baisser le taux de criminalité dans ces départements. Enfin, il a demandé quelles étaient les perspectives de recrutement en ce qui concerne les cadets de la République.

M. Frédéric Péchenard a répondu que les CRS, déployés dans les secteurs difficiles après 2005, n’ont pas vocation à y demeurer car ce sont des forces mobiles qui doivent garder ce statut. C’est pourquoi il est prévu de revenir à la zonalisation des compagnies au mois de septembre. Les préfets de zones et de départements sont les mieux à même de savoir où déployer les compagnies en fonction des besoins. Cependant, ce retour des CRS dans leurs zones ne sera pas une règle absolue car les compagnies pourront toujours être demandées par le préfet de police de Paris, par exemple. Pour maintenir un bon niveau de sécurité dans les zones difficiles, le ministère envisage de renforcer les compagnies régionales d’intervention.

M. Bruno Lemaire a souhaité avoir confirmation du fait qu’il n’y aurait pas de retrait des compagnies de CRS sans substitution d’autres effectifs pour assurer la sécurité.

M. Frédéric Péchenard a répondu que les préfets de départements décideront par quels moyens maintenir ou rétablir l’ordre. Il leur sera possible de remplacer les CRS par les compagnies régionales d’intervention dans les zones urbaines. Il a approuvé les propos de M. Lemaire en ce qui concerne l’importance de l’investigation sur les crimes et délits, car il faut absolument que ceux-ci reçoivent une réponse de la police ; l’impunité doit absolument être évitée. Il a estimé que les personnels de la sûreté départementale devaient se concentrer sur leur cœur de métier en investiguant en particulier dans les affaires d’agression sur les personnes, qui sont en augmentation, et non pas privilégier une affaire de stupéfiants par exemple en y consacrant trop de temps et de personnel. Le protocole de répartition des compétences, qui a été adopté à Paris, a très bien fonctionné et pourrait être mis en œuvre dans les départements voisins : il s’agit d’une définition des tâches des différents corps de sécurité, déclinée ensuite au niveau de chaque tribunal de grande instance. Ce protocole a permis d’éviter que certaines affaires soient privilégiées aux dépens d’autres faits de criminalité ou de délinquance dont l’impact est fortement ressenti par la population. Généralement, c’est un minimum d’éléments perturbateurs qui causent un maximum de dégâts très mal perçus par la population.

Ainsi, en matière de proxénétisme, le fait de recourir à une méthode synthétique en matière d’investigation permet d’appréhender un individu pour l’ensemble de son parcours délictueux. Le développement de cette méthode et de la police scientifique donnent des résultats remarquables. On peut, par exemple, suivre le parcours d’un agresseur sexuel, recueillir un ensemble d’éléments permettant de l’inculper et d’avoir une répression à la hauteur de ce qu’il a fait.

M. Dominique Baert a regretté, en tant qu’élu de Roubaix, la baisse de la présence policière dans sa circonscription alors que de nombreuses tensions existent dans certains quartiers et que la surveillance de la frontière belge doit être assurée. Ce constat est paradoxal compte tenu du discours tenu sur la nécessité de maintenir la police au plus près de la population. Se pose aussi la question de la sortie du contentieux des heures supplémentaires et sur la possibilité pour un sous-brigadier désormais à la retraite de faire valoir ses heures supplémentaires.

M. Frédéric Péchenard a répondu qu’un officier parti à la retraite ne pouvait plus faire valoir ses heures supplémentaires car il a eu la possibilité de partir en retraite avant la date légale pour faire valoir ses droits à récupération. En outre, cette règle ne concerne que les officiers de police et non les sous-brigadiers.

M. Jean-Pierre Brard a rappelé la difficulté du métier de policier et a regretté la détérioration des relations entre la population et la police suite à la disparition de la police de proximité, comme en ont témoigné les violences urbaines de novembre 2005. Il est regrettable que les jeunes policiers craignent de venir travailler en région parisienne. À Montreuil, vivent des cinéastes, des écrivains, des artistes... Les jeunes policiers ont peut-être une image fausse de ce qu’est la vie en région parisienne, même s’il faut convenir qu’il existe des tensions réelles dans certaines villes comme Clichy-sous-Bois ou Stains. Une réunion organisée par le préfet de la Seine Saint-Denis et le directeur départemental avec les élus locaux et les nouveaux policiers a montré l’attitude peu respectueuse de certains policiers qui tutoient les personnes interpellées. De même, l’accueil téléphonique dans les commissariats de police pourrait être amélioré. Il faut regretter aussi le manque de coordination entre la police et la gendarmerie. Certaines pratiques ne sont pas remises en cause. Ainsi à Montreuil, les policiers à cheval refusent de descendre de leur monture pour verbaliser les personnes qui promènent leur chien dans une réserve ornithologique. Il est important de déterminer les critères permettant d’évaluer ce qu’est un policier efficace.

M. Frédéric Péchenard a approuvé l’hommage rendu au travail du préfet de la Seine Saint-Denis et au directeur départemental. Il est important de développer le parc locatif pour les policiers afin de les inciter à rester en activité en région parisienne. La mission des policiers est de poursuivre et d’interpeller les délinquants et non d’assurer un rôle d’enseignant ou de travailleur social. Ils ont été incités par le passé à faire autre chose que leur mission première, ce qui ne leur a pas permis de se concentrer pleinement sur le maintien de l’ordre public. Leur attitude doit être respectueuse de la population notamment par l’emploi du vouvoiement. Mais ce problème relève en partie de la formation initiale. Les primes au résultat se sont élevées à 5 millions d’euros en 2004, elles devraient représenter 15 à 20 millions d’euros en 2008 pour environ 36 000 agents. Celles-ci sont attribuées aux policiers les plus efficaces, distingués par leur chef de service.

M. Charles de Courson a noté que l’indicateur relatif au dépistage de stupéfiants indiquait un taux de 58 % en 2006. Il s’est interrogé sur l’expérimentation des kits salivaires, sur la place donnée à la prévention en matière de sécurité aérienne et sur la durée moyenne hebdomadaire de travail des policiers. Une durée de 32 heures, voire 27 heures en région parisienne est parfois évoquée. Comment seront utilisés les nouveaux dispositifs en faveur des heures supplémentaires ?

M. Frédéric Péchenard a répondu qu’il est délicat, en matière de sécurité aérienne, de hiérarchiser entre la sécurité d’une plate-forme aérienne et le développement de dispositifs préventifs. Les deux sont indissociables et doivent être développés de façon complémentaire pour garantir pleinement la sécurité des voyageurs. Le décompte du temps de travail d’un policier est complexe. La durée hebdomadaire officielle est de 40,3 heures. Mais selon l’organisation du travail, hebdomadaire ou par cycles – par exemple les week-ends, les jours fériés ou les nuits – le temps de travail sera le même mais le régime de récupération sera différent. En cas de nombreuses heures de service par cycle, le temps de travail sur l’année peut donc être inférieur à 40,3 heures. Afin de favoriser le temps de travail, il a été procédé à un rachat de huit jours de réduction de temps de travail. De même, l’apurement des stocks d’heures supplémentaires et la modification du régime de récupération devraient permettre aux agents de travailler davantage. Les tests de dépistage des stupéfiants actuels ne sont pas tout-à-fait fiables et nécessitent un matériel lourd. Les premières expérimentations de tests salivaires sont conduites actuellement. Les résultats seront comparés à des tests urinaires pour retenir le procédé le plus fiable.

Mme Marie-Anne Montchamp prend note avec satisfaction du souhait du directeur général de la Police nationale de voir compenser les départs en retraite. La mise en place des protocoles de répartition des compétences entre la Police judiciaire et la Sécurité publique dans le ressort de chaque TGI et la diffusion d’outils d’aide à la conduite d’enquêtes constituent deux progrès importants. Une question essentielle est aussi celle de l’évolution des métiers de la police, de ses conséquences en termes d’effectifs et d’évolution de la masse salariale.

M. Frédéric Péchenard, directeur général de la Police nationale, précise qu’il est souhaitable d’augmenter, à l’avenir, la part des agents administratifs dans la police nationale, qui est de 13 % actuellement contre 20 à 25 % dans les autres pays comparables, de manière à ne pas démotiver les policiers de terrain en les affectant à des tâches de secrétariat. Rendu possible par la transformation de postes de commissaires et d’officiers, ce mouvement, déjà entamé, devrait conduire à une diminution de la masse salariale en 2012, en raison du coût salarial moins élevé des agents administratifs par rapport à celui des policiers.

Par ailleurs, les métiers de la police doivent évoluer avec la société et l’état des techniques. De la fin de la deuxième guerre mondiale à la fin des années quatre-vingt, peu de changements se sont produits dans les techniques policières. Il y a vingt ans, n’existaient encore ni ordinateurs, ni téléphones portables, ni identification par l’ADN, ni fichiers automatisés d’empreintes, ni fichiers de travail, ni logiciels de procédures. Au-delà de ces outils nouveaux apparus depuis lors, le développement de la police scientifique est un progrès capital. Faut-il attendre d’autres bouleversements ? Sans aucun doute, le domaine des écoutes téléphoniques et les échanges de courrier électronique par Internet doivent entraîner la mise au point de nouvelles méthodes d’enquête. L’adaptation à ces nouvelles technologies viendra d’efforts de formation continue et d’investissements.

S’il faut penser la police à 20-30 ans, il faut aussi mettre en place la police de « demain matin ». Jusqu’à présent, la police nationale a été trop souvent placée en situation de devoir réagir et de remédier à des failles techniques. Le recrutement d’ingénieurs de talent est nécessaire, ainsi que, probablement, le recours à des soutiens extérieurs. Ne générant pas d’économies de masse salariale, ces évolutions sont toutefois indispensables pour améliorer l’efficacité.

Le Président Didier Migaud accueille Mme Michèle Rousseau, secrétaire générale du ministère de l’Écologie, du développement et de l’aménagement durable (MEDAD), responsable du programme n° 181 Protection de l’environnement et prévention des risques, accompagnée de Mme Nicole Malmassari, chef du service des affaires financières et du contrôle de gestion et de plusieurs collaborateurs.

M. Jacques Pélissard, Rapporteur spécial, souligne l’importance du changement d’architecture du ministère, la mission correspondante comptant désormais douze programmes et s’interroge sur les contours du programme n° 181 ainsi que sur la coordination au sein du ministère entre des fonctions et des corps de fonctionnaires très divers.

Mme Michèle Rousseau, secrétaire générale du ministère de l’Écologie, du développement et de l’aménagement durable, précise que le programme n° 181 comprend cinq actions. L’action n° 1 correspond à l’ancien programme n° 181 Prévention des risques et lutte contre les pollutions du MEDD (ministère de l’Écologie et du développement durable). L’action n° 2 reprend l’ancien programme n° 153 Gestion des milieux et biodiversité du MEDD. L’action n° 3 correspond à une partie de l’ancien programme n° 127 Contrôle et prévention des risques technologiques et développement industriel du ministère de l’industrie. L’action n° 4 reprend la partie de ce même programme concernant le contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. L’action n° 5 reprend les crédits de soutien aux associations de protection de l’environnement, inclus anciennement dans l’ancien programme n° 211 Conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable.

S’agissant de la coordination au sein de la mission, les règles n’en sont pas totalement arrêtées. On peut toutefois imaginer qu’elle reviendra au secrétaire général du ministère et au directeur du cabinet du ministre.

M. Jacques Pélissard précise que les crédits de l’ancien MEDD ne représentaient que le quart de l’effort budgétaire de l’État en faveur de l’environnement, ce qui pose la question de la coordination des différentes composantes de la politique environnementale de l’État.

Mme Michèle Rousseau confirme que le jaune budgétaire sur l’environnement ne fournissait qu’une photographie des crédits alloués à l’environnement et ne constituait pas un document de coordination. L’environnement étant par nature un thème transversal, le nouveau MEDAD, malgré son périmètre de compétences fortement élargi par rapport au MEDD, ne comportera encore qu’une partie des crédits alloués à l’environnement. Toutefois, un document de politique transversale DPT sera joint au projet de loi de finances pour 2008. Au reste, le travail interministériel sur ces sujets est important, comme le montre l’exemple récent d’action commune du MEDAD et du ministère de l’Agriculture et de la pêche sur les sites Natura 2000.

M. Jacques Pélissard souligne que le nouveau programme n° 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables agrégera les crédits de rémunération de la grande majorité des effectifs du ministère. Or la commission des finances est réticente à la mise en place de ce type de grands programmes de soutien, qui font obstacle à la fongibilité asymétrique rendue possible par la LOLF et compliquent le calcul des coûts complets des différents programmes et actions.

Mme Michèle Rousseau indique que l’architecture de la mission pourrait encore être modifiée par le cabinet du ministre, y compris le programme n° 217. En tout état de cause, la mise en œuvre de grands programmes de soutien n’est pas nouvelle, ayant été pratiquée par le MEDD et par le ministère de l’équipement. Lorsqu’il existe des directions régionales et des directions départementales, les grands programmes de soutien facilitent le travail des responsables en ne rigidifiant pas leurs possibilités d’action. Par ailleurs, les actions miroirs permettent de connaître les effectifs affectés à chaque action, les coûts complets pouvant aussi être calculés avec précision. En outre, les responsables de programmes peuvent ventiler les effectifs au niveau des budgets opérationnels de programme (BOP). Si la fongibilité asymétrique entre dépenses de personnel et dépenses d’intervention n’est pas facilitée, la solution adoptée constitue néanmoins un compromis acceptable entre le respect de la capacité de décision des responsables de programme et la nécessité d’une souplesse de gestion au niveau des territoires.

Le Rapporteur général ayant précisé qu’au niveau global, en 2006, la fongibilité asymétrique n’a été mise en jeu qu’à hauteur de 380 millions d’euros, le Président Didier Migaud demande dans quelle mesure la mission Écologie et développement durable a recouru à cette possibilité la même année.

Mme Nicole Malmassari indique que la mission a, pour sa part, utilisé la fongibilité asymétrique en 2006 à hauteur de 2,9 millions d’euros, pour le paiement de frais de contentieux (un million) et le remboursement de dépenses acquittés par le ministère de l’équipement.

M. Jacques Pélissard, constatant que moins de la moitié de l’effort budgétaire de l’Etat en faveur de l’environnement ressort du cadre budgétaire, s’interroge en conséquence sur la capacité réelle du MEDAD à piloter réellement chacun de ses 74 opérateurs.

Mme Michèle Rousseau précise que le MEDAD met en œuvre une politique systématique de contrats d’objectifs avec tous les opérateurs dont il a la tutelle, exclusive ou partagée. Vingt-trois contrats d’objectifs ont été signés entre 2005 et 2007, d’autres sont en cours d’élaboration. À titre d’exemple, le contrat d’objectif de l’ADEME, qui conduit quatre types d’activités différentes, comprend 28 indicateurs de contexte et 83 indicateurs de suivi d’activité ou d’efficience. Effectué deux fois par an, à mi-année et en fin d’année, ce suivi de l’activité est réalisé par le service des affaires financières pour l’ensemble des établissements publics, que leurs ressources proviennent du ministère ou de taxes affectées.

Le Président Didier Migaud ayant remarqué que, sur la base des projets et des rapports annuels de performance, le nombre d’indicateurs de suivi est souvent très important alors qu’ils sont trop peu nombreux à porter sur l’efficience des politiques, Mme Michèle Rousseau précise que le nombre d’objectifs du programme est divisé par deux pour 2008 et que le nombre d’indicateurs passera de 18 à 13, les indicateurs d’efficience étant privilégiés dans toute la mesure du possible.

M. Jacques Pélissard met ensuite l’accent sur la nécessité de revoir les dépenses fiscales, de manière à lutter contre la sédimentation des dispositions et à supprimer celles qui sont inefficientes.

La Cour des comptes déplore un recours parfois anarchique à cet instrument. Le MEDAD dispose depuis peu d’un bureau pour la fiscalité de l’environnement. Quel est, dans une perspective prospective, l’état de la démarche de pilotage par la performance en matière de dépenses fiscales ? Une remise en cause systématique des plus petits dispositifs est-elle effectuée, afin de déterminer ceux qui sont vieillis ou plus justifiés ?

Mme Michèle Rousseau a répondu que le ministère de l’Écologie disposait depuis longtemps d’un bureau à compétence fiscale. Le MEDAD a entrepris un gros travail d’examen systématique des dispositifs fiscaux afin de déterminer ceux qu’il faut renforcer, simplifier, regrouper ou aménager. Le ministère pourrait ainsi détecter les mesures coûteuses qui présentent une économie de CO2 modeste. En réponse à la demande expresse du Président Didier Migaud, Mme Michèle Rousseau a déclaré que malheureusement elle ne pouvait de donner d’exemples précis de tels dispositifs devenus inefficaces, sauf à rappeler les observations du Conseil national des impôts sur les crédits d’impôt pour les économies d’énergie engendrées par les fenêtres isolantes.

M. Jacques Pélissard a demandé quel était l’état d’avancement du réseau de sites Natura 2000, et quelles étaient les raisons des retards persistants de la France dans la mise en œuvre de ce programme, pourtant ancien. Le rapport annuel de performance reconnaît ainsi que, « malgré la montée en puissance du dispositif, les engagements et les mandatements 2006 ont été inférieurs aux prévisions ».

Mme Michèle Rousseau a rappelé la mobilisation des services du ministère à la fin de l’année 2006 et au début de l’année 2007 pour, face à la menace de saisine de la Cour de justice des Communautés européennes, achever la désignation des sites NATURA 2000. Ceux-ci représentent 12,4 % du territoire national terrestre. Il s’agit maintenant d’animer ces sites, avec la conclusion de contrats de gestion, l’abondement de crédits budgétaires pour ce faire. En liaison avec le ministère de l’Agriculture, une évaluation des incidences environnementales est en cours d’élaboration.

Mme Geneviève Gaillard, usant de la faculté que l’article 38 du Règlement de l’Assemblée nationale confère aux députés d’assister aux réunions des commissions dont ils ne sont pas membres, a demandé si la nouvelle maquette « missions, programmes, actions » et le périmètre du nouveau MEDAD amélioreraient la lisibilité des documents budgétaires relatifs à l’environnement : diversité des ministères qui participent à cette politique, pluralité de fonds d’intervention et multiplicité des dispositifs fiscaux. On a déjà signalé que la structuration actuelle, avec des actions dispersées, rendait peu lisible les actions menées en matière d’environnement et de développement durable.

Mme Michèle Rousseau a répondu que la création de la grande mission Écologie, développement et aménagements durables n’apporterait pas plus de lisibilité. Elle résulte simplement de la fusion des programmes n° 153 et 181, avec l’adjonction de la sécurité industrielle, qui précédemment était gérée au ministère de l’Industrie. Il restera toujours difficile de consolider les informations disséminées dans plusieurs documents, sauf en matière de climat quand le prochain document de politique transversale sur ce sujet sera disponible. Le programme unique permettra cependant de faire de la fongibilité. Mais il est probable que les crédits d’impôt ne seront toujours pas rattachés à ce programme. La nouvelle structure a été confectionnée de façon précipitée et il faudra attendre le budget 2009 pour tenter d’améliorer la lisibilité.

M. David Habib a relevé des chiffres contradictoires sur la prévention des risques industriels dans le rapport annuel de performance. Le ministère a accumulé un retard considérable dans cette tâche immense. À la suite de l’accident AZF, la « loi Bachelot » de 2003 devait aboutir à une reconsidération de la prévention des risques et a suscité des attentes importantes des populations concernées. Il faut cependant constater que, quatre ans après la loi, et sur 421 sites recensés, seuls 2 ont vu leur plan de prévention des risques technologiques (PPRT) terminé. En outre, les quelque 120 procédures PPRT déjà lancées ont entraîné un blocage du développement des territoires, créant ainsi des situations de plus en plus intenables. Un basculement culturel est en train de se produire, avec une opposition de plus en plus forte des populations aux installations industrielles. La montée des « parapluies » administratifs a entraîné de véritables situations de crise dans ces territoires. Il faut donc accélérer la préparation des PPRT, faute de quoi nous risquons de perdre la capacité d’accueillir des industries utiles à la création de richesses.

Par ailleurs, les vicissitudes du climat ont amené certaines préfectures à fermer des sites de loisir, comme par exemple des campings ; mais les indemnisations prévues ne sont jamais venues, du fait de l’absence de dotation suffisante du « fonds Barnier ».

Mme Michèle Rousseau a convenu que, sur le premier point, on ne pouvait que constater le retard accusé dans la mise en place des PRRT, puisqu’un seul a été approuvé. Ce retard est à mettre au compte du caractère novateur du dispositif, puisque l’approche probabiliste qui le fonde est difficile à mettre en œuvre. Il s’agissait tout d’abord de procéder à une étude des dangers ; une fois cette étape achevée, la loi de 2003 demande une négociation avec les industriels et les collectivités locales pour la détermination des engagements financiers respectifs. Or, ces négociations s’avèrent délicates, et les services ont du mal à les mener. Le ministère considère toutefois comme une tâche prioritaire l’exploitation des résultats de ces études afin de déterminer les moyens à mettre en œuvre autour des usines concernées.

M. David Habib a tenu à rappeler que lors de la discussion du projet de loi en 2003, cette disposition avait été votée à l’unanimité. Or, aujourd’hui, la démarche de l’État, qui consiste dans une stratégie d’évitement des populations aux abords des usines, va à l’encontre de cette disposition. Par ailleurs, les négociations n’ont été lancées qu’autour de 8 sites sur les 421 sites concernés : force est de constater que les blocages viennent donc d’ailleurs. Le retard est en réalité dû à l’absence de ligne de conduite du ministère lui-même.

Mme Michèle Rousseau a indiqué que les retards provenaient d’abord des études de dangers, mais que les autres facteurs varient selon les sites, ce pourquoi il faudrait pouvoir répondre au cas par cas.

Concernant le fonds Barnier, il est en effet, pour reprendre l’expression de M. Habib, « exsangue ». Ce fonds, qui repose sur des promesses d’indemnisation, devrait être réalimenté : le taux de prélèvement sur le fonds « cat nat » (catastrophes naturelles) devrait ainsi être augmenté par voie législative.

Le Président Didier Migaud a également tenu à rappeler l’extrême complexité de la procédure d’indemnisation pour ce fonds. Un effort de simplification serait à ce titre plus que bienvenu.

M. Charles de Courson a estimé que cette complexité était encore accrue pour les sites abandonnés par des sociétés en faillite.

Le Rapporteur général s’est interrogé sur l’organisation du ministère. L’existence d’un seul secrétaire général pour le ministère de l’Écologie, du développement et de l’aménagement durables est-elle envisagée ? Ensuite, dans la perspective du regroupement des champs de l’énergie, de l’environnement et de l’équipement, quelles seront les modalités de gestion des services déconcentrés, et notamment les directions régionales de l’industrie, de la recherche et de l’environnement (DRIRE) et les directions régionales de l’environnement (DIREN) ? Des instances de coordination sont-elles prévues à ce titre ?

Mme Michèle Rousseau a indiqué que la profonde réorganisation du ministère devait s’opérer d’ici la fin de l’année 2007 ou le début de l’année 2008, avec la mise en place entre autres d’un secrétaire général unique et d’un directeur des affaires financières unique. Au niveau déconcentré, une réelle volonté d’avancer existe sur le plan régional avec les DRIRE et les DIREN, de la même manière qu’il est envisagé des regroupements de services au niveau départemental. Mais ces réorganisations doivent évidemment faire l’objet de débats avec les syndicats et l’ensemble des personnels et des agents concernés. Globalement, c’est un semestre qui doit permettre de bâtir le futur ministère de l’Écologie, du développement et de l’aménagement durables (MÉDAD). Pour le moment, en effet, il existe un second secrétaire général, issu du ministère de l’équipement et des transports.

M. Charles de Courson s’est ensuite interrogé sur l’action 6 du programme Prévention des risques et lutte contre les pollutions, qui concerne la lutte contre le changement climatique. Le rapport annuel de performances pour 2006 évoque une exécution des crédits à hauteur de 9,6 millions d’euros. Or, où sont les dépenses fiscales liées aux biocarburants, qui s’élèvent approximativement à 150 ou 160 millions d’euros ?

Un second point concerne le programme Gestion des milieux et biodiversité : le premier objectif fixé à la politique du programme consiste à satisfaire aux obligations communautaires de bon état de l’eau et des milieux aquatiques en conciliant les différents usages de l’eau. L’indicateur qui lui est associé évalue la réalisation des objectifs environnementaux de la directive cadre sur l’eau (DCE). Or, le rapport annuel de performances est sur ce point assez éloquent pour qu’on le cite : « les résultats de cet indicateur ne sont pas disponibles pour 2006 et cet indicateur ne figure plus dans le PAP 2007. En effet, il dépend de la mise en place des réseaux de surveillance de l’état des eaux requise par la directive cadre sur l’eau, dont les mesures commencent à s’appliquer en 2007. Cet indicateur pourra figurer dans le PAP 2009 avec les premiers résultats des mesures de l’année 2007 ». En l’état, ces renseignements ne font que mettre l’accent sur les manquements persistants de l’administration française au regard de ses obligations communautaires.

Troisièmement, concernant le Conservatoire de l’espace littoral et de l’élevage lacustre, il a fait l’objet en 2006 d’une substitution de recettes fiscales aux ressources budgétaires existantes, avec l’affectation de 80 % du produit du droit annuel de francisation et de navigation (DAFN). Le rapport annuel de performances fait état de ressources fiscales à hauteur de 24,2 millions d’euros, contre 28,2 millions d’euros prévus en loi de finances initiale, en raison d’une révision par la loi de finances rectificative pour 2005 de l’assiette et du taux du DAFN. Le budget de l’État compense-t-il ce différentiel ?

Enfin, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage connaît un problème budgétaire important : en effet, la prévision de dépenses de l’Office était évaluée à 101,2 millions d’euros, alors que seulement 92 millions d’euros ont pu être dépensés au final. Comment expliquer cette baisse notable quand 80 % des dépenses de l’Office sont en réalité des dépenses de personnel ?

Mme Michèle Rousseau a précisé, sur le premier point, qu’un réel problème de lisibilité caractérisait en effet les politiques de prévention des risques et de lutte contre les pollutions, puisqu’il n’existe pas pour le moment d’évaluation des dépenses fiscales liées à ces politiques. Ce problème sera résolu rapidement pour la lutte contre le changement climatique, avec la création d’un document de politique transversale Climat, qui devrait sensiblement améliorer la lisibilité de l’effort budgétaire sur ces politiques.

Concernant ensuite la réalisation des objectifs de la directive cadre sur l’eau (DCE), elle dépendait largement de la validation par la Commission européenne des points de mesure adoptés par la France pour son réseau de surveillance de l’état des eaux. Cette validation est d’ores et déjà intervenue, et les premiers résultats pour cet indicateur seront donc connus dès le rapport annuel de performances pour 2007, soit en 2008.

Concernant les recettes du Conservatoire du littoral, c’est en effet par voie d’amendement que l’affectation des recettes de la taxe de francisation a été adoptée. Celle-ci prend effet en 2007, avec l’élargissement de l’assiette du droit annuel de francisation des navires (DAFN). L’exécution du budget 2006, telle qu’elle est retracée dans le rapport annuel de performances, fait bien état d’une subvention exceptionnelle de 2,3 millions d’euros versée par l’État en cours d’exercice afin de pallier le déficit de recettes fiscales par rapport aux prévisions.

Mme Fabienne Sabotier, chef du bureau des affaires générales de la direction de la nature et des paysages, a enfin précisé que, concernant le dernier point, relatif à l’Office national de la chasse et de la faune sauvage confronté à des difficultés de financement, une revalorisation de sa dotation avait été obtenue en 2007, et qu’une demande de revalorisation avait été adressée pour 2008, de la même manière qu’était demandée une hausse des redevances cynégétiques. Toutefois, en parallèle, une démarche de rationalisation des dépenses de personnel a été engagée avec l’Office.

M. Charles de Courson a précisé que l’on pouvait observer en 2006 une augmentation de 120 emplois à l’Office, ce qui est surprenant pour un établissement en difficulté.

Mme Fabienne Sabotier a indiqué que cet écart était lié à l’amélioration, entre 2005 et 2006, du dispositif de comptabilisation des effectifs, puisque précédemment, n’étaient pas comptabilisés certains personnels, et notamment les contrats à durée déterminée. En réalité, les effectifs de l’Office se sont stabilisés en 2006.

M. Charles de Courson a regretté que des établissements en situation précaire se contentent de stabiliser leurs effectifs et que parfois même ils les augmentent.

Le président Didier Migaud a constaté que le contrôle des opérateurs n’était pas aisé.

Mme Geneviève Gaillard a voulu savoir si le ministère demandait une augmentation de ses crédits dans le cadre du projet de loi de finances pour 2008.

Mme Michèle Rousseau a répondu qu’elle ne pouvait répondre à cette question, les arbitrages interministériels n’ayant pas encore été rendus.

M. Jean-Pierre Brard a fait remarquer que cette circonstance n’empêchait nullement la secrétaire générale de présenter à la commission les souhaits qui étaient ceux de son administration.

Mme Michèle Rousseau a indiqué qu’elle avait pour consigne de ne pas aborder le sujet tant que les arbitrages n’étaient pas rendus. Devant l’insistance du président Didier Migaud, elle a toutefois reconnu que des mesures nouvelles avaient été demandées, ainsi que des réallocations budgétaires assez sensibles.

Le Président Didier Migaud a ensuite souhaité obtenir des informations sur l’exécution du budget 2007.

Mme Michèle Rousseau a répondu que, au 29 juin 2007, 51,355 millions d’euros de crédits de paiements avaient été consommés contre 132 inscrits en loi de finances initiale. Dans le programme 153, ce sont 86 millions d’euros sur 157 inscrits qui ont été consommés et, dans le programme 211, 29 millions d’euros ont été consommés à la même date sur 88 inscrits au budget. Au total, sur 408 millions d’euros inscrits pour l’ensemble de la mission, 166 millions d’euros, soit environ 40 %, ont déjà été consommés à la fin du premier semestre.

M. Charles de Courson a demandé si des problèmes de sous-consommation étaient à craindre en fin d’année tandis que le Président Didier Migaud a souhaité savoir si le profil de l’année 2007 était particulier.

Mme Michèle Rousseau a indiqué que le taux de consommation des crédits était, en 2007, supérieur à celui de 2006.

M. Jean-Pierre Brard a regretté que Mme Michèle Rousseau ait reçu pour consigne de ne pas s’exprimer sur certains sujets devant la Représentation nationale. Qualifiant cette attitude de très grave, il a évoqué la possibilité que soit entendu par la commission le directeur de cabinet du ministre d’État, ministre de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables. Il a rappelé que les personnes entendues par la commission ont toujours la faculté de demander que certains de leurs propos ne soient pas mentionnés au procès-verbal de la réunion.

Mme Michèle Rousseau a indiqué qu’il lui avait été simplement demandé de faire preuve de retenue dans l’attente d’un arbitrage imminent.

Le Rapporteur général a rappelé qu’en 2007, pour la première fois, une analyse pouvait être menée par programme. Pour la première fois également, les responsables de programme sont entendus et deviennent les interlocuteurs privilégiés de la commission, en lieu et place des cabinets ministériels. De bonnes habitudes sont donc à prendre pour que des réponses soient apportées aux interrogations de la commission des finances qui cherche à recueillir de légitimes informations.

Le Président Didier Migaud a constaté que, pour la première fois, la commission était en mesure de comparer les rapports annuels de performance avec les projets annuels de performance. Par conséquent, les interrogations portant sur l’exécution des budgets 2006 et 2007 sont légitimes. Compte tenu du contexte particulier lié à la mise en place d’une nouvelle législature et de nouvelles équipes ministérielles, il a admis une certaine prudence quant à la confection du projet de loi de finances pour 2008. En revanche, l’exécution du budget 2007 doit être entièrement transparente.

Mme Michèle Rousseau a répété que l’exécution du budget 2007 se déroulait mieux que celle de 2006, pour ce qui concerne la consommation des crédits.

Le Rapporteur général a demandé si les crédits du ministère avaient fait l’objet d’une réserve.

Mme Michèle Rousseau a répondu que les crédits du ministère de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables, comme ceux des autres ministères, faisaient l’objet d’un gel de 5 %, hors personnel.

Le Rapporteur général a constaté que, compte tenu de la structure particulière du ministère, cette réserve l’affectait davantage que d’autres administrations plus fournies en personnels.

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Information relative à la Commission

La Commission des finances a désigné les membres de la mission d’évaluation et de contrôle (MEC) pour 2007-2008 conformément à la liste ci-après :

Membres de droit :

M. le Président Didier MIGAUD

M. le Rapporteur général Gilles CARREZ