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Commission des Finances, de l’économie générale et du Plan

Mardi 14 octobre 2008

Séance de 23 heures 15

Compte rendu n° 16

Présidence de M. Didier Migaud Président

– Suite de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2009 (n° 1127) :

Examen et vote sur les crédits des missions :

– Défense :

– Préparation de l’avenir (M. Jean-Michel Fourgous, Rapporteur spécial) 2

– Budget opérationnel de la défense (M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur spécial) 9

–  Outre-mer et sur les articles 64 et 65, rattachés (M. Jérôme Cahuzac, Rapporteur spécial) 16

M. le président Didier Migaud. Nous poursuivons l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2009 avec l’examen des crédits de la mission Défense.

Sur les programmes Environnement et prospective de la politique de défense et Équipement des forces,  concourant tous deux à la préparation de l’avenir, la parole est à M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial.

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. Tout d’abord, je dois préciser que le taux de réponses classifiées à mon questionnaire budgétaire atteint près de 50 %, contre 35 % environ les années précédentes. Cette contrainte restreint singulièrement le champ de notre examen.

Le budget de la mission Défense s’élèvera à 47,8 milliards d’euros d’autorisations d’engagements et à 37,4 milliards de crédits de paiement en 2009. La hausse inhabituelle des autorisations d’engagement est destinée à faciliter les commandes groupées de matériels, afin de bénéficier de meilleurs prix.

La mission met en œuvre un plan de modernisation qui se traduira par la fermeture de 82 unités, par le transfert de 33 autres et par la suppression totale de 54 000 emplois militaires et civils d’ici à 2014. C’est un effort sans équivalent dans les autres administrations françaises.

À ce jour, la mission n’a subi aucune annulation de crédits, ce qui n’était pas arrivé depuis longtemps, car elle est souvent traitée comme une variable d’ajustement budgétaire. Le niveau des reports de charges - 2,6 milliards d’euros - tend toutefois à assombrir ce tableau.

Parmi les éléments positifs, il faut noter les efforts consacrés au renseignement : le budget du programme Environnement et prospective de la politique de défense s’élèvera à 1,8 milliard d’euros en autorisations d’engagements, soit une hausse de 10%, qui témoigne du volontarisme du chef de l’Etat dans ce domaine. Dans le même temps, le niveau des crédits de paiement sera porté à 1,7 milliard d’euros.

Cette hausse profite à l’ensemble du programme, mais particulièrement à l’action Recherche et exploitation du renseignement intéressant la sécurité de la France : ses moyens augmenteront de 23 % en AE et de 8 % en CP.

Les études amont bénéficient également d’une hausse de crédits de près de 3 %. Le soutien aux exportations et la diplomatie de défense reçoivent également un coup de pouce.

Le renseignement est essentiel, car il ne sert à rien d’avoir la meilleure armée du monde si l’état-major est incapable de savoir ce qui se passe de l’autre côté de la montagne. Nous avons constaté cet été encore que l’absence de renseignement pouvait être lourde de conséquences… En quelques mois, la France a été prise en défaut à trois reprises : au Tchad en février, en Somalie pendant l’affaire du Ponant, puis en août en Afghanistan. Dans les trois cas, aucun moyen aérien n’était disponible pour fournir au centre de commandement des images en temps réel de la situation.

La location dans l’urgence de drones d’origine israélienne révèle bien nos manques capacitaires. Le système SDTI, seul drone récent et aujourd’hui opérationnel, ne peut pas encore être déployé simultanément sur deux théâtres d’opérations : il est attendu à l’automne au Kosovo, mais son déploiement en Afghanistan ne semble toujours pas être à l’ordre du jour.

Faute de crédits suffisants, la direction du renseignement militaire a d’ailleurs renoncé au drone HALE - haute altitude longue endurance - pour se contenter du programme MALE - moyenne altitude longue endurance -, dont les retards s’accumulent. L’armée a reconnu que les drones avaient été les principales victimes de la loi de programmation militaire 2003-2008. Pendant la crise tchadienne de février, nos forces n’ont pu disposer que d’un Transall du Commandement des opérations spéciales pour obtenir des images en temps réel.

Chacun des vecteurs – satellites, drones et avions – est pourtant nécessaire pour que l’on dispose de l’ensemble des capteurs. J’insiste donc sur la complémentarité des différents programmes, qui doivent tous être menés rapidement à terme. C’est d’autant plus nécessaire que le renseignement n’est pas seulement une composante essentielle de la stratégie militaire : c’est également la meilleure arme contre le terrorisme.

Il faut enfin rappeler l’importance de l’intelligence économique : dans la guerre économique mondiale, nous devons assurer la sécurité de nos entreprises. Il nous reste des efforts à faire pour égaler nos voisins anglo-saxons dans ce domaine.

J’en viens au programme Équipement des forces, dont les crédits s’élèveront à 20,9 milliards d’euros en AE et à 12,2 milliards en CP. L’augmentation des crédits prévus en 2009 permettra des commandes groupées sur toute la durée de la loi de programmation militaire 2009-2014, afin d’obtenir de meilleurs prix auprès des industriels.

Nous devrons veiller à ce que les crédits de paiement correspondants soient bien inscrits dans les budgets des années à venir. Si ce n’était pas le cas, le niveau exceptionnel des autorisations d’engagement perdrait sa crédibilité.

L’année 2009 sera marquée par des niveaux de commandes et de livraisons de matériel rarement atteints.

Le système de forces Dissuasion recevra une enveloppe de 2,9 milliards d’euros, qui permettra de poursuivre la modernisation des différentes composantes de la dissuasion nucléaire, grâce aux missiles M51, dont un troisième et dernier lot sera commandé, et grâce aux missiles ASMPA, en cours de production. La construction du SNLE-NG le Terrible, qui pourra directement utiliser le missile M51, sera également achevée ; ses essais à la mer devraient débuter prochainement. Le SNLE-NG Le Vigilant sera par ailleurs adapté au missile M51, et le Mirage 2000N sera mis au standard K3.

Le système de forces Engagement et combat sera doté de 11,9 milliards d’euros.

Dans le domaine aérien, la montée en puissance des escadrons Rafale se poursuivra avec la livraison de 14 appareils. Soixante autres exemplaires du Rafale seront également commandés, pour un montant de 4,7 milliards d’euros, ainsi que 1 000 armements air-sol modulaires.

Dans le domaine naval, seront commandés un deuxième sous-marin nucléaire d’attaque Barracuda, pour 1,4 milliard d’euros, de même que trois frégates multi-missions, pour 2,3 milliards, et 150 missiles de croisière navals seront commandés.

Dans le domaine terrestre, nos forces recevront 8 hélicoptères de combat Tigre ; les livraisons prévues de véhicules blindés de combat d’infanterie et celles d’équipements Félin pour fantassin permettront respectivement d’équiper un groupe tactique interarmes, et deux régiments.

Le système de forces Commandement et maîtrise de l’information bénéficiera d’une enveloppe de 2,1 milliards.

La priorité accordée à la fonction stratégique Connaissance et anticipation se traduit par le renforcement des moyens d’observation spatiale, avec la préparation du programme MUSIS, qui devrait être lancée en 2010. Sont aussi renforcés les moyens de reconnaissance et de surveillance aérienne, ainsi que des moyens de renseignement d’origine électromagnétique, notamment grâce à la rénovation des deux avions Transall. La numérisation des forces se poursuivra et les moyens de communication par satellite seront renforcés.

Le système de forces Projection mobilité soutien recevra 1,3 milliard d’euros de crédits. Le financement du programme A400M, malheureusement en retard, se poursuivra ; le premier hélicoptère NH90 sera livré à la marine nationale, et 250 porteurs polyvalents terrestres seront commandés.

Le système de forces Protection sauvegarde bénéficiera enfin d’une enveloppe de 474 millions d’euros. La marine nationale recevra une seconde frégate anti-aérienne Horizon, avec son système de défense sol-air. Il est également prévu de livrer trois systèmes de défense sol-air à l’armée de l’air, ainsi que 30 missiles air-air MICA. Un programme de détection d’agents biologiques sera également lancé.

La liste des équipements qui devraient être soit commandés soit livrés en 2009 est donc fort longue. Mais nous devrons être vigilants sur la date de livraison de l’Airbus A400M, encore inconnue.

Ce budget va dans le bon sens. Il tendra notamment à améliorer le ratio entre les dépenses opérationnelles et les dépenses administratives, dont la part respective est aujourd’hui de 40 et 60 % du total. L’objectif est d’inverser ce ratio pour nous rapprocher du modèle anglo-saxon.

Les crédits ouverts pour 2009 contribueront en outre à renforcer la compétitivité de nos industries de défense. Le marché mondial de la sécurité représente 250 milliards d’euros par an, et croît de 10 % par an. Il faut donc donner un coup de pouce à nos industriels : nous devons les aider à accroître leurs parts de marché. L’emploi et la richesse nationale y gagneront.

Ce budget permet également de mieux nous protéger et de préparer notre pays aux nouvelles menaces - catastrophes naturelles ou encore terrorisme. Dans notre monde plein de surprises et d’incertitudes, c’est un engagement des plus hautes autorités de l’État.

La modernisation de notre armée dépend enfin de sa capacité d’innovation. Celle-ci alimentant souvent la recherche civile, la défense contribue à la croissance. En soutenant la recherche-développement militaire, nous soutenons donc indirectement l’ensemble de notre économie.

La modernisation de l’armée dépend également de la conclusion de partenariats ambitieux et des progrès de l’externalisation, qui a déjà fait ses preuves. Je pense notamment à la formation.

Au total, ce budget est une première étape de l’ambitieuse loi de programmation militaire pour les années 2009 à 2014, qui permettra à notre armée - aujourd’hui la sixième au monde - de conserver son rang.

M. le président Didier Migaud. S’agissant de la classification des réponses – « diffusion restreinte » ou « confidentiel défense » –, je crois savoir que parfois la pratique varie selon les services concernés. En tant que rapporteur spécial, vous pouvez apprécier si la communication des informations vous semble possible. En cas de besoin, n’hésitez pas à vous tourner vers le rapporteur général ainsi que vers moi-même. Nous pouvons tout à fait « inviter » les responsables du ministère à venir s’expliquer devant la commission.

Nous devons en effet éviter certains abus. Il arrive que des réponses classifiées soient publiées par la presse, alors que nos rapports ne peuvent en faire état. Il faut également éviter que le ministère classifie ses réponses dès que les questions l’embarrassent. Dans ce cas, je vois mal comment nous pourrions exercer efficacement notre contrôle.

Je le répète : n’hésitez pas à apprécier vous-même la nature des informations, et à contester éventuellement leur classification. Si vous avez suffisamment d’exemples troublants, nous entendrons le ministre.

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. Ce qui me préoccupe, c’est que la part d’informations dont je ne peux faire état s’est accrue. Le ministère répond à mes questions, mais en me demandant de garder le silence.

M. le président Didier Migaud. Cela dépend peut-être aussi de la nature de vos questions… Pour avoir participé à de nombreux conseils d’administration, je suis toutefois conscient que la notion de secret perd parfois un peu de son sens. Au CEA, par exemple, tous les documents importants étaient classés « secret défense » ou « confidentiel défense ». Il faudrait s’entendre sur ce qui relève réellement du secret.

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. A titre d’exemple, le degré d’avancement de la coopération spatiale européenne est classé « confidentiel défense. »

M. Bernard Carayon. Simple précaution…

M. le président Didier Migaud. On voit bien qu’il faut faire attention aux excès.

M. Bernard Carayon. La commission pourrait-elle obtenir la liste des organismes publics, parapublics et privés auxquelles la direction des affaires stratégiques commande des études ? Dans le contexte actuel de tensions budgétaires, il serait bon que le Parlement puisse évaluer l’opportunité de certaines commandes. Certaines des institutions concernées ont bonne réputation, mais d’autres non.

J’en viens à la question des programmes technologiques et de communication, pour lesquels la DGSE a été nommée chef de file technique national depuis un an. Un effort de mutualisation entre la Direction générale de la sécurité extérieure, la Direction de la surveillance du territoire et la Direction du renseignement militaire avait été annoncé. A-t-il été engagé ?

Compte tenu de la suppression du CIR, le comité interministériel du renseignement, pouvez-vous me dire ce que deviennent ses crédits, qui finançaient certains programmes techniques ?

J’aimerais également savoir si le Gouvernement envisage de rationaliser le champ de compétences du SGDN, le secrétariat général de la défense nationale. La logique voudrait que son rôle se limite à assurer le secrétariat des Conseils de défense : la direction centrale de la sécurité des systèmes d’information pourrait être rattachée à d’autres autorités, de même que la CIEEMG, la commission interministérielle pour l’étude des exportations du matériel de guerre. Il avait d’ailleurs été décidé, l’an dernier, que l’exportation des matériels de guerre serait facilitée, grâce à la simplification et à la rationalisation des procédures d’autorisation. Où en sommes-nous ?

Quid également du projet de mieux définir les secteurs dits sensibles, qui peuvent être protégés au titre de l’intelligence économique ? La Commission européenne a en effet bloqué à plusieurs reprises le projet de décret – à juste titre d’ailleurs, car la démarche du Gouvernement a tout d’une erreur stratégique : on ne sort de l’ambiguïté qu’à son propre détriment.

Ma dernière question concerne les retards du programme Rafale, qui affectent non seulement les capacités opérationnelles de l’armée de l’air, mais également nos finances publiques. Les conséquences ont-elles été chiffrées ?

M. Michel Bouvard. Je m’étonne que les informations relatives à Nexter, anciennement GIAT industries, ait été classifiées. Nous en sommes en effet en droit d’obtenir des éclaircissements sur cette société industrielle, qui a été recapitalisée à plusieurs reprises par l’Etat, et qui a fait l’objet de rapports publics de la Cour des comptes.

Je m’interroge également sur le projet d’appliquer la règle de non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux à l’ONERA, l’Office national d’études et de recherches aérospatiales. Ce type de gestion des effectifs me semble tout à fait incompatible avec le fonctionnement de cet organisme, qui est un établissement public à caractère industriel et commercial et subit d’importantes variations d’activité en fonction des programmes en cours. Quel est l’avis du rapporteur spécial sur cette question ? Il me semble que l’ONERA devrait pouvoir ajuster ses effectifs en fonction de son activité.

Une autre interrogation porte sur le retard de livraison de l’A400M. Le rapporteur spécial pense-t-il qu’il y a lieu d’appliquer des pénalités à EADS ?

En dernier lieu, je ne trouve aucune trace dans les documents budgétaires des chenillettes que les troupes alpines attendent depuis plusieurs années, et que l’on peut acheter « sur catalogue » en Suède. Cet équipement sera-t-il enfin livré en 2009 ? Avec les conflits d’ex-Yougoslavie et d’Afghanistan, chacun a pris conscience de l’importance des troupes de montagne ; encore faudrait-il qu’elles reçoivent les matériels dont elles ont besoin. Je n’espère pas une réponse dès ce soir, mais peut-être d’ici quelques jours.

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. S’agissant de l’A400M, les retards devaient d’abord être limités à six mois, puis douze, après quoi ils sont passés à vingt-quatre mois. EADS ayant indiqué que plusieurs retards ne lui étaient pas directement imputables, il me paraît délicat de lancer une procédure de pénalités. Cela ne me semblerait envisageable que si l’entreprise était entièrement responsable du retard, ce qui n’est apparemment pas le cas.

Bien que des réductions globales d’effectifs soient prévues, la recherche et l’information ne seront pas affectées par le budget. Ces secteurs seront au contraire privilégiés.

M. Michel Bouvard. Je répète que le non remplacement d’un départ en retraite sur deux relève d’un type de gestion tout à fait inadapté à un établissement comme l’ONERA. Il faudra peut-être déposer un amendement sur ce sujet.

M. le rapporteur spécial. S’agissant de Nexter, je suis tout à fait d’accord avec votre souhait d’une plus grande transparence.

La disponibilité du Rafale s’est améliorée, et il y a un déblocage dans la production, malgré les retards accumulés.

Pour ce qui est des ventes de matériel, je note que les aides à l’exportation ont augmenté de 20 %. Il n’y a donc pas de freinage dans ce domaine.

S’agissant du renseignement, je rappelle qu’il s’agit d’un secteur en pleine réorganisation. Les différents services, qui emploient au total 12 500 agents, travaillent de plus en plus ensemble, grâce au rapprochement entre la DGSE, la Direction de la protection et de la sécurité de la défense et la Direction du renseignement militaire d’une part, et de l’autre à la création de la DCRI, la direction centrale du renseignement intérieur, qui regroupe la DST et les Renseignements généraux. À cela s’ajoute bien sûr la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, qui travaille en lien avec TRACFIN, instance chargée de l’action contre les circuits financiers clandestins.

M. Bernard Carayon. Je voulais savoir si la mutualisation des programmes techniques, notamment d’information et de communication, était engagée. Le plus grand désordre a longtemps régné. Il en a résulté des problèmes opérationnels, des redondances budgétaires et de nombreuses incompréhensions chez nos partenaires étrangers.

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. Sur toutes ces questions, je devais rencontrer M. Pierre Brochant, mais il m’a fait savoir qu’il serait préférable que je m’entretienne directement avec M. Bernard Bajolet. Ce sera fait dès la semaine prochaine.

M. Bernard Carayon. C’est plutôt à la DGSE qu’il faut poser la question, puisqu’elle est chef de file dans ce domaine.

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. Nous aurons le temps d’y revenir avant l’examen du budget en séance publique. Je n’ai pas non plus la liste des organisations financées par la direction des affaires stratégiques, mais soyez sûr que je vais me pencher sur cette très intéressante question.

M. Bernard Carayon. Il faudrait connaître non seulement la liste des institutions, mais aussi l’objet des études commandées.

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. Je vous en ferai part, soit discrètement, soit publiquement s’il n’y a pas de contraintes de diffusion.

Pour ce qui est de la mutualisation que vous souhaitez, c’est précisément l’esprit de la réforme en cours, qui vise à améliorer l’efficacité de nos effectifs.

En dernier lieu, il faut noter le rôle essentiel qu’a joué le crédit impôt recherche, dont le montant est passé de 428 millions d’euros en 2003 à 890 millions en 2004, puis à 982 millions en 2005 et à 1,4 milliard en 2006.

M. Michel Bouvard. Ce sont des chiffres globaux. Peut-on connaître la part des industries de défense ?

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. C’est un sujet délicat. Il faudra que j’en discute avec le rapporteur général.

M. Bernard Carayon. Que répondez-vous à ma question sur la réaffectation des crédits du CIR ?

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. Ils seront transférés à la structure que pilotera M. Bajolet.

M. Bernard Carayon. Au sein des crédits de l’Elysée ?

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. La nouvelle structure élyséenne prend ces crédits sous sa responsabilité, mais ils demeurent au sein du budget de la défense.

M. Bernard Carayon. Quid du projet de décret sur les secteurs sensibles, du périmètre du SGDN et du fonctionnement de la CIEEMP ?

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. Je me ferai un plaisir de vous répondre quand j’aurai rencontré M. Bajolet. Je vous rappelle que le renseignement est un secteur en pleine réorganisation.

M. le président Didier Migaud. La discussion de ces crédits en séance publique est prévue le 7 novembre. Cela nous laisse encore quelque temps.

M. Hervé Mariton. Puisque nous bénéficions désormais d’une présentation pluriannuelle des crédits, j’aimerais savoir si la réorganisation du ministère et les orientations du Livre blanc trouvent déjà une traduction budgétaire à l’horizon de 2010 ou de 2011.

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. Pour le moment, c’est difficile à évaluer. Le maintien des crédits malgré la baisse des effectifs est plutôt bon signe. Il est certain qu’un effort particulier portera sur le renseignement, sur les moyens satellitaires ainsi que sur les aides à l’exportation.

M. le président Didier Migaud. Concernant les programmes Environnement et prospective de la politique de défense et Equipement des forces, l’avis de notre rapporteur spécial est-il favorable à l’adoption des crédits ?

M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. Oui, Monsieur le Président.

M. le président Didier Migaud. Sur les deux programmes concourant au budget opérationnel de la défense, la parole est à M. Louis Giscard d’Estaing, rapporteur spécial.

M. Louis Giscard d’Estaing, rapporteur spécial. Le programme 178, Préparation et emploi des forces, est le plus important de la mission Défense, puisqu’il recouvre tous ses aspects humains : le recrutement, les rémunérations et les charges sociales, mais aussi l’entraînement, la projection, la disponibilité des forces, ainsi que les opérations extérieures. Nous ne disposons pas, pour le moment, d’un « bleu » budgétaire en bonne et due forme, et nous subissons des contraintes de calendrier très délicates.

En 2009, les crédits du programme Préparation et emploi des forces bénéficieront d’une hausse substantielle : les autorisations d’engagement s’élèveront à 22,4 milliards d’euros, en hausse de 6,3 %. Les crédits de paiement seront de 21,8 milliards d’euros, en hausse de 2,4 %. Ces augmentations témoignent d’une volonté d’améliorer la condition matérielle et l’entraînement des militaires, ainsi que la disponibilité des matériels. Il est vrai que la bonne exécution du budget 2009 dépendra de celle du budget 2008. Aucune annulation de crédits n’a été décidée à ce jour, ce qui est plutôt encourageant.

En application du plan de modernisation présenté le 24 juillet dernier par le Premier ministre, pour faire suite au Livre Blanc de la défense, des réductions d’effectifs auront lieu dès l’année prochaine. D’ici à 2014, 82 unités seront ainsi supprimées et 33 autres transférées. Dans le même temps, un renforcement opérationnel de 65 régiments et bases militaires est prévu afin d’atteindre la masse critique.

L’armée de terre sera la première concernée : ses effectifs se réduiront de 26 500 hommes, et 20 régiments ou bataillons devront disparaître. L’armée de l’air perdra 11 bases aériennes, notamment celles de Colmar, de Reims, de Metz, de Cambrai et de Toulouse. La marine perdra enfin 6 000 hommes, mais un seul de ses sites d’importance fermera, à savoir la base aéronavale de Nîmes-Garons.

En 2014, la défense aérienne de la France reposera sur une flotte de 350 avions de combat, dont 270 en ligne, armée de l’air et forces aéronavales confondues. Ce parc relativement homogène sera constitué de Rafale F3 et de Mirage 2000D.

Je l’ai dit, 65 unités bénéficieront d’un renforcement opérationnel : 80 bases de défense, appelées à regrouper plusieurs unités dont les fonctions de soutien seront mutualisées, doivent être en effet être constituées d’ici à 2014. Bon nombre de régiments d’artillerie seront dissous, mais d’autres seront renforcés, et certaines unités de fantassins recevront le renfort de compagnies de combat. Ces restructurations, qui seront réalisées entre 2009 et 2014, devraient aboutir à une suppression totale de 54 000 postes.

En contrepartie, la défense avait obtenu de bénéficier directement du produit des cessions d’implantations devenues vacantes. Toutefois, afin de dédommager les collectivités qui perdront des unités militaires, il est probable que nombre de biens immobiliers seront cédés pour un euro symbolique, ce qui réduira les rentrées financières escomptées.

Je souhaite maintenant appeler l’attention de la Commission sur deux sujets de préoccupations graves : les OPEX, à savoir les opérations extérieures menées par la France, et le maintien en condition opérationnelle du matériel.

Depuis près de deux décennies, la France doit gérer en permanence la participation de plus de 10 000 militaires à des OPEX, mais aussi le pré-positionnement d’environ 8 000 soldats dans des pays amis.

Les effectifs participant aux OPEX fluctuent naturellement en fonction du contexte international. Ainsi, alors que l’évolution de la situation en Bosnie-Herzégovine avait permis le départ de la quasi-totalité des troupes françaises, la déclaration d’indépendance du Kosovo a ravivé les tensions et requis un léger renforcement du dispositif dans ce pays.

En outre, la création de l’EUFOR au Tchad et le renforcement des effectifs présents en Afghanistan n’ont pas été entièrement compensés par la réduction de la présence militaire française en Côte d’Ivoire. Il en résulte une hausse de 5,8 % des effectifs déployés en OPEX, et le coût de ces opérations a encore augmenté de 167,3 millions d’euros en 2008.

Le projet de budget pour 2009 prévoit 525 millions de crédits pour les OPEX – 510 millions pour la défense et 15 pour la sécurité –, contre 475 millions en 2008 et 375 en 2007. Déjà en hausse de 100 millions en 2008, la budgétisation des OPEX augmentera encore de 50 millions en 2009.

Les demandes réitérées de notre commission pour une plus grande sincérité dans ce domaine ont donc été entendues : les sommes inscrites sont en augmentation constante depuis 2003, année où nous sommes partis de zéro.

Les dépenses réelles ont toutefois continué à augmenter au cours des dernières années : elles sont passées de 685 millions d’euros en 2007 à 852 millions en 2008. Les crédits inscrits en loi de finances ne correspondent donc qu’à la moitié des dépenses réelles.

Pour maîtriser davantage cette charge financière, qui pourrait atteindre un milliard d’euros en 2009, j’appelle l’attention de la commission sur la nécessité de faire participer d’autres pays à certaines OPEX auxquelles la France est partie prenante, mais qui sont menées sous mandat international.

En Côte d’Ivoire, où je me suis rendu en compagnie de M. Jean-Michel Fourgous, il est grand temps d’impliquer davantage les pays de l’Union africaine. Nous devons les sensibiliser à la situation de la Côte d’Ivoire et les placer face à leurs responsabilités. Des troupes africaines participent déjà à l’ONUCI, l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire, mais l’essentiel de la préparation et de l’organisation des élections est assuré par le dispositif militaire français.

Au Tchad et au Darfour, où une opération européenne est en cours, il est également nécessaire de trouver d’autres relais parmi les pays de l’Union européenne. La France assure aujourd’hui la quasi-totalité d’une logistique aérienne particulièrement coûteuse, alors que les opérations menées sur le terrain s’apparentent parfois plus à une œuvre humanitaire qu’à une opération militaire nécessitant des soldats aguerris.

Il faudra en outre mieux appréhender les possibilités de remboursement des opérations sous mandat international, sujet que nous aurons l’occasion d’examiner à l’occasion d’une mission d’évaluation et de contrôle. Au Liban, par exemple, notre participation donne lieu à un remboursement, mais sous une forme et selon des critères qui justifieraient un examen approfondi.

Notre dispositif de forces pré-positionnées à l’étranger va être profondément remanié pour des raisons d’économies.

Les implantations françaises en Allemagne seront réduites. Le 16e bataillon de chasseurs, actuellement basé à Saarburg, sera transféré à Illkirch dans le Bas-Rhin. Il reste à décider de l’avenir du 110e régiment d’infanterie et du 3e régiment de hussards, qui appartiennent à la brigade franco-allemande. Des discussions sont en cours avec l’Allemagne.

La présence militaire française en Afrique, qui s’appuie sur quatre bases, au Sénégal, en Côte d’Ivoire, au Gabon et à Djibouti, fait également l’objet d’une importante réorientation. D’autres effectifs étant déployés sur place dans le cadre de l’opération Licorne, les 484 soldats du 43e bataillon d’infanterie de marine, présents à Abidjan depuis l’indépendance de ce pays, sont en cours de rapatriement depuis cette année, et n’apparaissent plus sur les effectifs des forces pré-positionnées. La dissolution de cette unité interviendra en 2009, et le pays devrait être totalement évacué lorsque sa situation politique sera apaisée. Ce sera la fin d’un siècle et demi de présence militaire française en Côte d’Ivoire.

La France ne conserve donc pour l’instant que deux des trois bases situées sur la façade atlantique de l’Afrique. Celle de Dakar permet de disposer d’une ouverture sur l’Atlantique sud, d’un contact avec l’Afrique sahélienne et d’un relais avec l’Amérique latine ; celle du Gabon est proche des ressources minières et pétrolifères de l’Afrique centrale et du Golfe de Guinée ; quant à la base de Djibouti, sur la côte est du continent, elle se trouve à proximité d’un axe essentiel du commerce maritime mondial et des champs pétrolifères du Moyen-Orient.

Suivant les préconisations du Livre blanc, une de ces trois implantations devrait disparaître, et les effectifs des deux bases restantes devraient être notablement réduits.

Compte tenu du contexte géopolitique, la pérennité de l’implantation française à Djibouti paraissait assurée – jusqu’à ce qu’il soit décidé d’installer une structure militaire permanente aux Emirats arabes unis, c’est-à-dire dans la même zone géographique. Il faudra donc comparer le coût élevé de l’implantation à Djibouti avec celui de la nouvelle base d’Abou Dhabi. Bien que j’aie reçu moins de réponses classifiées que mon collègue Jean-Michel Fourgous, je ne peux pas vous donner d’informations sur ce point. Les éléments qui m’ont été fournis sont en effet classifiés.

J’en viens à la disponibilité du matériel, qui conditionne le caractère opérationnel de nos forces.

La marine est la seule arme qui dispose d’un bon taux de disponibilité, compris entre 70 et 90 %, même si celui des sous-marins nucléaires d’attaque est limité à 40 %. Mais notre porte-avions est également indisponible à 100 %, puisqu’il est actuellement immobilisé pour quinze mois.

La situation est plus délicate pour l’armée de terre, compte tenu du vieillissement de certains matériels. Ainsi, le taux de disponibilité du véhicule blindé AMX-10 RC ne dépasse pas 53 %, et celui des hélicoptères Puma et Gazelle va de 45 à 70 %.

Plus préoccupants encore sont les problèmes techniques persistants du char Leclerc, qui limitent sa disponibilité à 33 % du parc. Cela étant, une partie des chars a été volontairement mise « sous cocon », et les douze chars déployés au Sud Liban fonctionnent très bien. Le problème est que les chars Leclerc, utiles pour démontrer que nous sommes en mesure d’agir, ne peuvent pas traverser les villages sans risquer de dégrader la voirie, à moins d’installer des patins de caoutchouc dont la durée de vie ne dépasse pas trois semaines, car les pistes situées le long de la frontière sont en terre…

La disponibilité du Rafale, en service depuis maintenant deux ans, s’est en revanche sensiblement améliorée : elle est passée de 45 % en 2006 à 50 % en 2007 et 65 % en 2008. Une formule satisfaisante de gestion des pièces détachées a en effet été trouvée avec le fournisseur.

En revanche, la situation devient critique en matière de transport et de ravitaillement, pourtant indispensables pour le soutien de nos forces sur des théâtres éloignés des voies maritimes, comme l’Afghanistan et le Tchad. Ainsi, les Hercules C130 ne sont disponibles qu’à 60 % et les Transall à 52 %. Le nombre de ces appareils se réduit également du fait du vieillissement du parc. Par conséquent, il faudra impérativement adopter une solution de transition en attendant la livraison de l’A400M.

Le projet de budget pour 2009 devrait permettre de relever trois défis majeurs : mettre en œuvre la première annuité du plan de modernisation de la défense ; améliorer l’entraînement de nos forces, dont l’actualité nous a cruellement rappelé à quel point elle était nécessaire malgré les problèmes de disponibilité des matériels et la hausse des prix des carburants ; améliorer enfin le maintien en condition opérationnelle du matériel. Sur ce dernier point, les problèmes de jeunesse de certains matériels commencent à s’estomper, mais les retards des programmes d’hélicoptères de transport NH90 et d’avions A400M conduiront à maintenir en activité plus longtemps que prévu des Puma et des Transall, dont certains ont déjà plus de 35 ans de service.

M. Alain Rodet. Ma première question porte sur le projet d’implantation à Abou Dhabi. Il s’agit effectivement d’une zone sensible, mais nous sommes déjà présents dans la région, à Djibouti, ainsi qu’à La Réunion. Au risque d’enfreindre un tabou, je me demande si cette opération n’est pas simplement la contrepartie d’une nouvelle tentative d’exportation du Rafale ? Celui-ci commence décidément à nous coûter cher.

Le Livre blanc prévoit par ailleurs la suppression de 54 000 postes, sans compter l’externalisation, précise le rapport. Pouvez-vous nous donner des indications sur ce dernier point ?

J’en viens aux crédits alloués en 2009 pour aider les collectivités frappées par des diminutions drastiques des activités militaires. L’aide prévue ne dépasserait pas 6 millions d’euros en crédits de paiement, ce qui me semble très peu, même pour une première année. Ce chiffre est-il exact ?

Enfin le produit des cessions du patrimoine immobilier de la Défense pourrait non seulement échapper à France Domaine, mais il serait également envisagé que certains biens puissent être cédés pour un euro symbolique aux collectivités. Pouvez-vous nous en dire davantage ?

M. Bernard Carayon. Le niveau de disponibilité opérationnelle de certains matériels de combat atteint des niveaux catastrophiques. C’est une injure pour le contribuable et pour le Parlement qui vote chaque année ces crédits avec passion et patriotisme. On ne peut plus accepter une telle situation, qui affecte la sécurité des forces engagées à l’extérieur de notre territoire.

Je m’interroge également sur la justification d’une présence militaire permanente en Afrique, à l’exception peut-être de Djibouti. Or, j’ai cru comprendre que le gouvernement djiboutien souhaitait mettre un terme à notre présence. Est-ce confirmé ?

Par ailleurs, la « rupture » qui est censée affecter notre action diplomatique ne doit-elle pas concerner également nos accords de défense ? Je trouve ahurissant de pré-positionner des forces parce qu’il y a des productions minières à proximité, ou bien parce qu’il faudrait surveiller le sud de l’Atlantique. Nous ne sommes plus au XIXe siècle ! Je m’interroge également sur l’utilité du déploiement de nos chars de combat au Sud du Liban.

Ma dernière question est relative à la situation en Afghanistan. Élu d’une circonscription lourdement touchée par l’embuscade qui a coûté la vie à huit parachutistes du 8e RPIMa de Castres, et membre de l’amicale des anciens de cette unité, j’aimerais savoir si les engagements du ministère en matière d’aéromobilité et d’appui feu seront rapidement tenus. Qu’en est-il également des vêtements de protection qui devaient être fournis aux unités ?

M. Michel Bouvard. Le taux de disponibilité des matériels s’améliore en France, mais j’aimerais savoir quel est le niveau atteint dans les autres grandes armées de l’Union européenne. La comparaison serait intéressante.

Les crédits inscrits en loi de finances au titre des OPEX s’accroissent d’année en année, ce qui est un gage de sincérité, mais les dépenses constatées augmentent aussi, de sorte que seulement 50 % des crédits effectivement dépensés étaient inscrits dans la loi de finances initiale. Si un effort a été fait, il demeure donc insuffisant.

J’aimerais également en savoir davantage sur la part des dépenses donnant lieu à un remboursement dans le cadre de missions effectuées sous mandat de l’ONU ou de l’Union européenne. Au Tchad, par exemple, le rapport spécial souligne la nécessité de trouver de nouveaux relais chez nos partenaires européens, la logistique aérienne, particulièrement coûteuse, étant assurée presque exclusivement par la France. Bref, quel est le taux de couverture des dépenses exposées quand nous intervenons sous mandat international ? Il est toujours question des dépenses réalisées au titre des OPEX, mais jamais des recettes éventuelles. Comment les négociations évoluent-elles dans ce domaine ?

M. Louis Giscard d’Estaing, rapporteur spécial. Le Livre blanc conduira à une profonde réorganisation de nos forces de défense en vue d’inverser le ratio entre les dépenses de soutien et les dépenses opérationnelles. Notre objectif est en effet de nous rapprocher du ratio de l’armée britannique. Des restructurations géographiques auront lieu et des unités vont disparaître. Près de 54 000 postes seront certes supprimés au total, mais cela ne se fera pas du jour au lendemain. Ces mutations n’ayant que très peu d’impact sur le budget 2009, il est normal que le fonds de modernisation ne soit d’abord doté que de 5 millions d’euros. La plupart des restructurations ne commenceront qu’à partir de 2010 ou 2011.

Parmi les compensations envisagées par M. Hubert Falco, le secrétaire d’État à l’Aménagement du territoire, qui a été chargé de réfléchir à des mesures d’accompagnement, les cessions immobilières aux collectivités pourraient avoir lieu pour un euro symbolique.

M. Michel Bouvard. Il ne faudrait pas oublier que la pollution des sites a souvent été un obstacle aux cessions. Nous l’avons constaté à l’occasion des travaux de la MEC sur l’immobilier de l’État. Alors que certaines collectivités refusaient de prendre en charge les coûts de remise en état, le ministère de la Défense n’a pas accepté de céder les terrains tant qu’ils n’étaient pas dépollués… Des mesures ont-elles été prévues pour éviter ces blocages ?

M. Louis Giscard d’Estaing, rapporteur spécial. Vous avez raison : il est parfois nécessaire de dépolluer les sols. Je m’informerai des mesures prévues pour la prise en charge de ces coûts. Mais cela ne concerne pas tous les terrains, notamment pas les bâtiments d’état-major situés en centre ville.

M. Charles de Courson. Histoire comique : en 1992, le Conseil général de la Marne a racheté les terrains de la base militaire de Vatry, mais le TPG refuse de payer, car le ministère de la Défense n’a pas produit de certificat de dépollution. Le département a pourtant construit un aéroport et des bâtiments... L’armée demeure juridiquement propriétaire des terrains, ce qui emporte une conséquence cocasse : les terrains bénéficient d’une exonération fiscale puisqu’ils appartiennent toujours à l’État !

Depuis une modification récente, la loi autorise la vente de terrains à un prix net du coût de dépollution, celle-ci incombant alors à l’acheteur. Contrairement à ce que supposait initialement Mme Lagarde, le prix de vente peut désormais être inférieur à l’estimation du coût de dépollution, ce qui signifie que le vendeur doit verser une soulte… Toutefois, ces dispositions n’ont été que très peu appliquées.

M. Louis Giscard d’Estaing, rapporteur spécial. J’ai peu d’éléments d’information à vous apporter pour le moment, mais je creuserai la question (Sourires).

S’agissant du projet d’implantation à Abou Dhabi, je rappelle que c’est avec la vente des chars Leclerc que nous avons connu quelques difficultés aux Émirats. Les mesures de compensations et de changes prévues dans le contrat avaient fait de cette opération un succès financier très relatif.

Le projet actuel d’implantation correspond surtout à la volonté commune des deux gouvernements de donner un signal stratégique grâce à l’installation de forces militaires européennes dans cette zone très sensible. L’attitude du gouvernement djiboutien est bien différente : il ne considère pas la présence française comme un atout pour sa sécurité, mais comme une source de revenus, qu’il cherche à optimiser. La configuration est donc bien différente dans les deux cas, mais il faudra tout de même s’interroger sur le coût de la présence française.

Pour ce qui est des taux de disponibilité, il faut distinguer les matériels demeurant en France et les équipements déployés dans le cadre des OPEX. Dans ce dernier cas, le taux de disponibilité dépasse 90 %.

Quant aux bases françaises en Afrique, il semble qu’aucune décision définitive n’ait été prise : j’ignore quelle implantation sera supprimée.

Pour ce qui est des dispositifs de protection destinés aux forces françaises en Afghanistan, sachez qu’il n’y a pas de gilet pare-balles idéal : il faut toujours adopter un compromis entre le poids de l’équipement et la protection des hommes. On protège le corps, mais pas le visage. Celui-ci reste donc vulnérable, surtout face à des tireurs d’élite. En revanche, il est vrai que l’armée de terre demande de pouvoir plus facilement acheter « sur étagères » du matériel en petites quantités.

M. Bernard Carayon. Et qu’en est-il de l’aéromobilité et de l’appui feu ?

M. Louis Giscard d’Estaing, rapporteur spécial. Nous participons à un dispositif géré par l’OTAN : nous ne fournissons pas les hélicoptères utilisés, et nous achetons des heures de vol. Lors de l’embuscade en question, nous avions demandé un appui auprès des Américains. Nous n’avons pas vocation à fournir l’ensemble des moyens aériens et d’aéromobilité.

M. Bernard Carayon. Nous avons pourtant besoin que l’OTAN apporte des garanties supplémentaires pour la sécurité de nos troupes.

M. Louis Giscard d’Estaing, rapporteur spécial. Nous ne leur rendrions pas nécessairement service en déployant davantage de Pumas, compte tenu de leur vétusté. Si nous les utilisions sur le terrain, il serait par ailleurs encore plus délicat de compter sur eux en attendant la livraison des NH90.

Pour ce qui est des comparaisons européennes, il n’y a pas d’écarts notables de disponibilité, à ceci près que les Britanniques ont un meilleur ratio entre les dépenses opérationnelles et les dépenses de soutien. La différence s’explique en partie par le fait que nous avions à l’origine une armée de conscription, eux une armée professionnelle depuis longtemps.

S’agissant des OPEX, la Commission souhaite naturellement une sincérité accrue. Cela étant, il ne serait pas forcément bon que 100 % des dépenses soient inscrites en loi de finances initiale : il y a des variations en cours d’année, car l’ampleur de certains dispositifs se réduit parfois. Nous pourrions nous fixer comme objectif d’inscrire les deux tiers des dépenses dans le budget. Nous nous en rapprochons.

J’en viens à la question du remboursement des opérations engagées dans un cadre international.

Les opérations EUFOR et Épervier nous coûtent à peu près autant que notre engagement en Afghanistan - respectivement 130, 104 et 236 millions d’euros. Or, nous ne bénéficions d’aucun remboursement pour EUFOR, bien que nous ayons un mandat des Nations Unies et qu’il s’agisse essentiellement d’opérations humanitaires.

Si la mission Épervier nous coûte également très cher, c’est que nous fournissons l’essentiel de la logistique aérienne. Les opérations au Liban ne coûtent en revanche que 78 millions d’euros alors que nous déployons 1 811 hommes sur le terrain. La raison est que la logistique est acheminée par la voie maritime.

Nous bénéficions par ailleurs de 30 millions d’euros de remboursement au titre de notre engagement au Liban ; il me reste à vérifier si ce montant est déjà déduit du coût total. Cette opération présente d’ailleurs une spécificité : le matériel est directement pris en charge par l’ONU, car il existe des barèmes préétablis, sauf pour les chars Leclerc. Ainsi un AMX-10 P nous est remboursé 78 000 dollars par an au titre de la FINUL, et il existe également des accords concernant les dotations en munitions.

Certains pays sont plus habiles que nous pour obtenir le remboursement des sommes engagées, mais il y a désormais une cellule plus étoffée en charge de cette question au sein du ministère de la Défense, avec un correspondant aux Nations Unies.

M. Michel Bouvard. Il n’y a donc aucun remboursement pour EUFOR ? On pourrait réduire d’autant le prélèvement sur recettes au bénéfice de l’Union européenne…

M. le rapporteur spécial. C’est difficilement envisageable ! Le ministère de la Défense souhaite en revanche réduire nos coûts par rapport aux autres pays européens, qui sont bien lents à venir sur le terrain.

M. le président Didier Migaud. Concernant les deux programmes concourant au budget opérationnel de la Défense, l’avis de notre rapporteur spécial est-il favorable ?

M. le rapporteur spécial. Oui, Monsieur le Président.

La Commission adopte les crédits de la mission Défense.

*

* *

M. le président Didier Migaud. Nous passons maintenant à l’examen et au vote des crédits de la mission Outre-mer et des articles 64 et 65, rattachés. Je salue à cette occasion la présence de M. Victorin Lurel, membre de la commission des lois.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur spécial. J’ai constaté cette année une légère amélioration du taux de réponse au questionnaire budgétaire adressé au secrétariat d’État à l’Outre-mer, avec 64,7 % de réponses, contre 63 % l’année dernière. Il est vrai que je n’avais posé que 51 questions, contre 87 l’an passé. Cela étant dit, M. le secrétaire d’État à l’Outre-mer m’a assuré cet après-midi que je disposerai dès vendredi de 98 % des réponses.

Les crédits de la mission Outre-mer représentent une faible part de l’effort public à destination de ces territoires, avec 1,88 milliard d’euros en crédits de paiement, à comparer aux 13 milliards en provenance d’autres missions, auxquels s’ajoutent 3,3 milliards de dépenses fiscales.

En ce qui concerne ces dernières, le Gouvernement a retenu une partie des propositions de la mission d’information de la commission des finances sur les niches fiscales : d’une part le projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer, le « PLODEOM », actuellement en cours d’examen au Sénat, renforce la transparence des investissements défiscalisés réalisés outre-mer ; d’autre part, l’article 43 du projet de loi de finances pour 2009 propose de plafonner l’avantage en impôt tiré d’un investissement réalisé outre-mer.

Le projet de budget pour 2009 prévoit une augmentation des crédits de la mission, qui fait passer les autorisations d’engagement de 1,75 à 1,97 milliard d’euros, soit une hausse de 12,6 %, et les crédits de paiement de 1,72 à 1,88 milliard, soit une hausse de 9,3 %. Cette hausse étant due notamment au transfert vers cette mission de dépenses relatives aux contrats de projet avec les collectivités territoriales.

La création d’une délégation générale à l’Outre-mer, DéGéOM, est la deuxième évolution notable de ce projet de budget. L’audition des principaux responsables de cette structure me laisse à penser que cette nouvelle organisation administrative constitue un effort de rationalisation qui devrait permettre un meilleur fonctionnement du secrétariat d’État. La délégation compte 142 agents, au lieu des 210 des deux directions centrales auxquelles elle s’est substituée, mais les missions des agents transférés au ministère de l’Intérieur restent en relation avec l’outre-mer.

J’en viens aux programmes de cette mission.

L’essentiel des crédits du programme Emploi Outre-mer est consacré à la compensation par l’État des exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale propres à l’Outre-mer. L’article 65 de ce projet de budget vise à réformer très profondément ce dispositif. Je vous proposerai la suppression de cet article, simple « copié collé » des articles 11 et 12 du PLODEOM actuellement bloqué par l’embouteillage législatif qui sévit au Sénat et réintroduits ainsi en loi de finances. Outre que cette méthode me paraît pour le moins curieuse, ma proposition est motivée surtout par une raison juridique absolument dirimante : cet article fait référence à des dispositifs qui n’existent pas dans notre droit puisqu’ils ne seront créés que dans le PLODEOM.

Cette obligation de compensation génère une forte dette à la charge de l’État, le montant des exonérations n’étant pas couvert par celui des autorisations d’engagement et des crédits de paiement. S’il faut souligner l’effort réalisé en 2008, qui a permis de réduire considérablement le flux d’impayés, le stock d’impayés à la sécurité sociale devrait cependant s’élever à la fin de 2008 à 900 millions d’euros environ.

Le programme Conditions de vie Outre-mer compte plusieurs actions. En ce qui concerne l’action Logement, notre mission a mis en évidence la nécessité d’un effort très important en faveur du logement social. Si la pénurie de foncier dans ces territoires est à prendre en compte, nous avions préconisé dans le rapport d’information la réorientation vers le logement social de la défiscalisation des investissements réalisés outre-mer et je ne peux que me féliciter de voir cette proposition reprise dans le PLODEOM.

Cette action est une autre source de dette pour l’État, celui-ci étant redevable vis-à-vis des bailleurs sociaux de 17 millions d’euros fin 2007, le stock de dette restant de 660 millions d’euros à la fin de l’année 2008. Interrogé à ce sujet, le secrétaire d’État nous avaient soumis un concept nouveau : celui de la distinction entre dette réelle et dette virtuelle.

En ce qui concerne l’action Aménagement du territoire, les crédits destinés au financement de contrats de projets avec l’outre-mer sont rapatriés dans la mission « Outre-mer », ce qui gonfle ce budget de 30 millions d’euros d’autorisations d’engagement et de 23 millions de crédits de paiement. Il faut aussi relever, pour la déplorer, l’existence de créances impayées aux collectivités territoriales, notamment à la Nouvelle-Calédonie.

L’action Continuité territoriale financera pour l’essentiel le fonds dont le PLODEOM prévoit la création et qui regroupera les crédits du passeport mobilité et la dotation de continuité territoriale. La rationalisation du passeport mobilité proposée par le PLODEOM est bienvenue, étant donné les dérives auxquelles il a donné lieu au détriment des finances publiques et qui sont contestées depuis plusieurs législatures par certains membres de notre commission : son attribution devrait notamment être soumise à des conditions de revenus.

Il me semble que les crédits de l’action Sanitaire, social, culture, jeunesse et sport gagneraient à être rapatriés vers les ministères compétents, notamment celui chargé de la santé.

Les interrogations suscitées par l’action Collectivités territoriales portent principalement sur la dotation globale de développement économique, la DGDE. Si la légitimité de cette dotation en faveur de la reconversion de l’économie de la Polynésie française n’est pas contestable, ce n’est pas le cas de son fonctionnement, marqué par une absence totale de contrôle de l’utilisation de l’argent public. En dépit de la volonté de l’administration centrale de rationaliser l’utilisation de ces 150 millions d’euros, il conviendrait de s’assurer de ce que les acteurs locaux utilisent ces fonds publics selon des critères d’intérêt général.

Enfin l’action Fonds exceptionnel d’investissement est destinée à financer un autre fonds créé par le PLODEOM, conformément à ce que j’ai recommandé dans une contribution à notre rapport d’information. Ce fonds a pour but de pallier les difficultés extrêmes des territoires d’outre-mer à investir dans les équipements collectifs du fait de l’ampleur de leurs dépenses de fonctionnement. S’il est inutile de s’indigner de cet état de fait, on pourrait en revanche imaginer des critères d’attribution incitant ces collectivités à une meilleure gestion.

M. Michel Bouvard. Le dispositif du passeport mobilité est appelé à évoluer. Il ne pose pas seulement problème sur le plan financier : ses effets se font sentir également sur la capacité de recrutement de l’université Antilles-Guyane.

En matière de logement social, la question de l’opérateur se pose. Alors que le secrétariat d’État à l’outre-mer, les SIDOM, est favorable au transfert des sociétés immobilières des départements d’outre-mer à la Société nationale immobilière, le ministère des finances semble préférer travailler avec l’Agence française de développement, prouvant encore une fois la capacité de l’État à choisir la solution la plus coûteuse et la plus inadaptée en matière de cession de son patrimoine immobilier... En effet, outre que cette agence n’est toujours pas un opérateur au sens de la LOLF, elle n’a aucune compétence particulière en matière de gestion immobilière.

M. Hervé Mariton. L’Agence française de développement présente l’avantage d’être aussi sous la tutelle du secrétariat d’État à l’outre-mer.

Je souhaiterais que le rapporteur spécial nous éclaire davantage sur l’écart entre dette réelle et dette virtuelle, que je comprends comme la différence entre les factures immédiatement exigibles et celles qui ne le sont pas.

M. Alain Rodet. La pénurie de foncier sévit-elle également aux Antilles ? Pouvez-vous d’autre part nous donner des informations sur l’exploitation du nickel en Nouvelle-Calédonie ?

M. Victorin Lurel. Je veux féliciter le rapporteur spécial pour la clarté de son rapport, notamment en ce qui concerne l’article 65, dont l’intergroupe parlementaire des DOM-TOM demande unanimement la suppression à ce stade de nos travaux. Il appelle quelques observations sur la TVA non perçue récupérable, TVANPR, la révision de l’indemnité temporaire de retraite ou le plafonnement des niches fiscales.

Y a-t-il encore un secrétariat d’État à l’Outre-mer ? Même si la création de la DéGéOM est opportune, la réforme du secrétariat d’État a entraîné, dans la plus grande opacité, la perte d’une soixantaine d’agents.

Il me semble enfin illogique de voter l’article 65 avant l’examen du PLODEOM.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur spécial. Le sujet des SIDOM mérite d’être étudié soigneusement. J’avais interrogé le secrétariat d’État sur la composition du conseil d’administration de la Société immobilière de la Martinique et sur l’élection de son président.

La dette réelle est constituée des factures impayées en fin d’exercice, alors que la dette virtuelle est l’écart entre les autorisations d’engagement et les crédits de paiement : soit. Je crains toutefois que cette notion serve à relativiser l’ampleur du stock de dettes, qui reste préoccupante en dépit d’une évolution positive.

En ce qui concerne l’exploitation du nickel en Nouvelle-Calédonie, monsieur Alain Rodet, je vous apporterai ultérieurement des informations dont je ne dispose pas pour l’instant.

La pénurie de foncier me semble plus aiguë aux Antilles françaises, du fait du relief et de la volonté de maintenir une certaine superficie en terres agricoles, ainsi que de l’absence d’une politique de réserve foncière dynamique.

M. le président Didier Migaud. Émettez-vous un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Outre-mer ?

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur spécial. Comme l’an passé, je m’en remets à la sagesse de la commission.

La commission adopte les crédits de la mission Outre-mer.

Article 64 : Dotation exceptionnelle liée à la réforme de l’état civil dans les communes de Mayotte, et dotation spéciale de construction et d’équipement des établissements scolaires de Mayotte

La commission adopte l’article 64 rattaché.

Article 65 : Réforme des exonérations de cotisations patronales en faveur de l’outre-mer

La commission est saisie d’un amendement de M. le rapporteur spécial, tendant à la suppression de l’article 65.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur spécial. Cet article réforme le dispositif d’exonération de cotisations patronales spécifique à l’outre-mer, dont il modifie le champ d’application et qu’il simplifie en instituant un plafond unique à 1,4 SMIC. Si j’approuve le caractère dégressif du nouveau dispositif, je juge cet article inapplicable, du fait notamment que sa rédaction renvoie à des dispositifs qui n’existent pas encore. Il convient, soit que l’exécutif réécrive cet article, soit que ce nouveau régime d’exonération ne soit examiné que dans le cadre du PLODEOM.

Pour ces raisons, je recommande la suppression de cet article, même si – et il y a là une difficulté – l’économie de dépenses sociales qu’il devrait permettre est déjà prise en compte par le projet de loi de finances.

M. Hervé Mariton. La courbe de dégressivité pourrait être modifiée, de façon à favoriser les emplois de cadres intermédiaires, tout en limitant les effets d’aubaine.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur spécial. Ce débat, intéressant en soi, n’a pas d’objet si ce dispositif est en concurrence avec d’autres dispositifs plus favorables prévus par le PLODEOM.

M. Michel Diefenbacher. La solution du rapporteur serait plus douloureuse encore que celle proposée par le texte. La présence de ce dispositif en loi de finances initiale n’est pas anormale, d’autant que cela lui permettra de s’appliquer dès le 1er avril. Nous pouvons l’adopter, et demander au Gouvernement de proposer des amendements permettant de résoudre les difficultés juridiques nées du fait que ces dispositions ont été sorties de leur contexte juridique d’origine.

M. Michel Bouvard. La présence dans la loi de finances des dispositions qui ont un coût budgétaire ou fiscal est conforme constante à la doctrine de la commission. J’hésite donc à renvoyer cette disposition à un autre texte, même si je comprends la difficulté.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur spécial. Adopter cet article obligerait le Gouvernement à amender le texte, ce qui impliquera des contorsions périlleuses dont je doute qu’elles aboutissent à un texte cohérent.

M. Victorin Lurel. Au delà de ces problèmes juridiques, le contexte politique est défavorable à l’adoption dès la loi de finances de ce texte, à propos duquel le Président de la République va s’entretenir avec l’intergroupe parlementaire. Alors que l’examen du PLODEOM, prévu depuis 2007, est renvoyé à une date indéterminée, on ne cesse de faire voter en loi de finances ou de financement des réductions des acquis économiques et sociaux en faveur de l’outre-mer, qu’il s’agisse de la TVANPR, des ITR ou du plafonnement des niches fiscales, sans oublier le financement du RSA. Si justifiées que puissent être ces mesures, nous en percevrons les inconvénients immédiatement, et les éventuels bienfaits plus tard seulement. Il convient de respecter l’engagement du Président de la République de réserver à ce type de dispositions un unique texte global. Pourquoi se précipiter pour voter un texte dont l’entrée en vigueur est prévue pour avril, et qui suscite des interrogations au sein même de la majorité parlementaire ?

La commission rejette l’amendement du rapporteur spécial puis adopte l’article 65 rattaché.

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