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Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mercredi 9 janvier 2008

Séance de 9 h 30

Compte rendu n° 30

Présidence de M. Jean-Luc Warsmann, Président

– Examen de la proposition de loi constitutionnelle de M. Patrick Braouezec visant à compléter l’article 11 de la Constitution par un alinéa tendant à ce que la ratification d’un traité contenant des dispositions similaires à celles d’un traité rejeté fasse l’objet de consultation et soit soumis à référendum (n° 560) (M. Patrick Braouezec, rapporteur)

– Examen du projet de loi constitutionnelle modifiant le titre XV de la Constitution (n° 561) (M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur) 4

– Informations relatives à la Commission

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Patrick Braouezec, la proposition de loi constitutionnelle de M. Patrick Braouezec visant à compléter l’article 11 de la Constitution par un alinéa tendant à ce que la ratification d’un traité contenant des dispositions similaires à celles d’un traité rejeté fasse l’objet de consultation et soit soumis à référendum (n° 560).

M. Patrick Braouezec, rapporteur, a rappelé que le peuple français avait rejeté le traité établissant une Constitution pour l’Europe par près de 55 % des voix, avec une forte mobilisation marquée par une participation de 70 % des électeurs. Dans ces conditions, on aurait pu attendre qu’une véritable alternative soit proposée : au lieu de cela, un traité quasi identique a été signé, mais le Président de la République a annoncé que ce serait au Parlement d’autoriser sa ratification. Ce déni de démocratie a motivé la proposition de loi présentée par le groupe GDR. Cette proposition de loi constitutionnelle a pour objet de modifier l’article 11 de la Constitution afin de contraindre le Président de la République à l’organisation d’un référendum lorsqu’un texte porte sur le même sujet qu’un précédent texte rejeté par référendum.

En effet, le rapporteur a rappelé que le référendum constituait l’expression directe de la souveraineté nationale et qu’il était malhonnête d’opposer démocratie représentative et démocratie directe. Il a ensuite rappelé que le premier référendum de l’histoire de France est ainsi celui qui a permis l’adoption de la Constitution du 24 juin 1793. Cette Constitution très démocratique, fondée sur le primat de la souveraineté populaire, prévoyait d’ailleurs le recours à la consultation directe des citoyens.

Le rapporteur a donc considéré que le recours au référendum devrait être obligatoire pour l’adoption de lois qui contiennent des dispositions précédemment rejetées par le peuple, consulté par référendum. Le parallélisme des formes et le respect de l’expression directe de la souveraineté nationale exigent d’encadrer le pouvoir législatif du Parlement sur les matières ayant fait l’objet d’une consultation populaire : le résultat d’un référendum ne peut être déjugé que par un autre référendum.

Ainsi, la ratification du traité de Lisbonne ne devrait pouvoir être autorisée que par référendum, compte tenu de la position exprimée par le peuple français le 29 mai 2005. En effet, s’il existe des différences entre le traité de Lisbonne et le traité constitutionnel, celles-ci sont principalement d’ordre cosmétiques. D’ailleurs, Valéry Giscard d’Estaing lui-même a reconnu que les différences concernant le contenu étaient minimes et étaient avant destinées à échapper à la contrainte du recours au référendum.

Le rapporteur a ensuite indiqué que la proposition de loi constitutionnelle du groupe GDR avait pour objet de donner au référendum un autre rôle que celui qu’il a traditionnellement sous la Cinquième République. Le référendum n’y est effectivement pas utilisé comme un moyen de consulter les citoyens sur les grandes questions qui les concernent, mais il constitue davantage un outil au service de l’exécutif.

Face au déni de démocratie que constitue le contournement du peuple pour la ratification du traité de Lisbonne, la proposition de loi constitutionnelle met donc en place un mécanisme de protection de l’expression du suffrage universel en cas de rejet d’un projet de loi soumis au référendum.

M. Thierry Mariani après avoir expliqué qu’il avait été favorable au recours au referendum pour autoriser la ratification du Traité établissant une Constitution pour l’Europe, a considéré que la disposition proposée ne serait pas dénuée d’intérêt, s’il ne s’agissait pas d’un texte de circonstance et si ses effets ne valaient que pour l’avenir. Il a rappelé le choix politique de l’actuel Président de la République, qui justifie pleinement que la voie législative ordinaire soit utilisée pour ratifier le traité de Lisbonne.

M. Alain Vidalies a expliqué que le lien direct avec l’actualité de la proposition de loi communiste ne devrait pas suffire à justifier son rejet, sauf à devoir rejeter la plupart des projets de loi dont le Parlement est saisi. Il a rappelé que, dans l’histoire française, aucun projet rejeté par la voie du referendum n’avait ensuite fait l’objet d’une adoption par voie législative. Il a estimé que, dès lors que le peuple français est appelé à se prononcer, le fait de ne plus prendre en compte sa réponse pourrait conduire à une opposition dangereuse entre démocratie directe et démocratie représentative. Il a annoncé qu’il voterait en faveur de l’adoption de la proposition de loi.

M. Christophe Caresche s’est interrogé sur le fait de savoir si le traité qui sera soumis à la ratification pouvait être considéré comme identique ou même analogue au traité qui a été rejeté il y a quelques mois par referendum. Il a estimé pour sa part que ces deux textes ne l’étaient pas.

Le président Jean-Luc Warsmann a confirmé cette analyse, en précisant que le Conseil constitutionnel avait justement examiné la question de la conformité à la Constitution du traité de Lisbonne dans la mesure où ce traité n’était pas identique au projet de « Constitution européenne », dont la conformité à la Constitution avait déjà été examinée par le Conseil.

M. Manuel Valls a souligné l’importance du débat sur la question de la similitude des textes. Il a d’autre part estimé qu’il n’était pas possible de considérer la proposition de loi constitutionnelle indépendamment du projet de révision constitutionnelle qui permettra de ratifier le traité de Lisbonne. Il a enfin jugé que l’exposé des motifs de la proposition de loi devrait conduire à ne pas voter cette proposition.

M. Philippe Vuilque a considéré qu’il convenait de distinguer l’exposé des motifs – avec lequel on peut effectivement être en désaccord – de l’article unique de la proposition de loi. Il a jugé que cet article unique, qui propose d’établir un parallélisme des formes, devrait être approuvé, dans la mesure où il serait difficile de refuser aux Français de s’exprimer directement sur un sujet dont ils ont déjà eu à connaître par referendum, même si c’était en termes différents.

M. Jean-Jacques Urvoas a expliqué que, alors même que l’article unique lui semblait pouvoir être approuvé en soi, il ne voterait pas en faveur de la proposition de loi en raison de l’exposé des motifs, ouvertement défavorable au traité de Lisbonne.

Le rapporteur a reconnu qu’il ne cherchait pas à nier le lien entre l’actualité et le texte proposé, mais que celle-ci commandait d’agir afin d’éviter un déni de démocratie. Il a estimé que ce sujet était digne de l’attention des parlementaires qui devaient veiller à ne pas opposer démocratie directe et démocratie parlementaire. En effet, il faut éviter que la parole et la volonté du peuple ne soient détournées par un biais parlementaire, au risque d’accroître la méfiance à l’égard de la démocratie représentative.

Certes, le traité de Lisbonne n’est pas formellement identique au traité constitutionnel, mais les principales dispositions de ce dernier s’y retrouvent, sans aucun changement, par exemple sur le sujet crucial de la place des services publics dans la construction européenne.

Il a par ailleurs estimé normal que certains députés partagent la préoccupation démocratique portée par la proposition de loi, sans en partager l’exposé des motifs. En effet, la question de fond est bien de savoir s’il est possible de demander au Parlement de déjuger le résultat d’une consultation référendaire, ce qui serait sans précédent.

La Commission a alors rejeté l’article unique de la proposition de loi.

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La Commission a examiné, sur le rapport du président Jean-Luc Warsmann, le projet de loi constitutionnelle modifiant le titre XV de la Constitution (n° 561).

Article 1er (art. 88-1 de la Constitution) : Consentement aux transferts de souveraineté rendus nécessaires par le traité :

La Commission a adopté l’article premier sans modification.

Article 2 (titre XV de la Constitution) : Modification des dispositions relatives à l’Union européenne :

La Commission a adopté l’article 2 sans modification.

Article 3 (art. 3 et 4 de la loi constitutionnelle n° 2005-204 du 1er mars 2005) : Suppression de dispositions inutiles :

La Commission a adopté l’article 3 sans modification.

La Commission a enfin adopté l’ensemble du projet de loi sans modification.

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Après que le président Jean-Luc Warsmann eut indiqué qu’une proposition de loi relative aux droits des victimes et à l’exécution des peines, en instance de dépôt, tirait les conclusions législatives du rapport d’Étienne Blanc sur l’exécution des décisions de justice, en réservant toutefois la question de l’aménagement des peines qui devrait être traitée dans le cadre du futur projet de loi pénitentiaire, il a proposé à la Commission de désigner M. Étienne Blanc rapporteur de cette proposition de loi.

Le président Jean-Luc Warsmann a ensuite informé la commission qu’il avait déposé une proposition de loi facilitant l’égal accès des hommes et des femmes au mandat de conseiller général, afin d’apporter une réponse à un « bug législatif » apparu dans la loi n° 2007-128 du 31 janvier 2007 tendant à promouvoir l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives. Il a expliqué que ce texte, qui prévoit l’élection de suppléants de sexe différent en même temps que l’élection des conseillers généraux, afin d’éviter de trop nombreuses élections partielles et de promouvoir la parité, ne permettra pas au suppléant de remplacer le conseiller général démissionnaire en raison d’un cumul avec un mandat de député ou de sénateur, alors même que le suppléant remplacera le titulaire si le cumul est lié à des mandats locaux ou à un mandat de député européen. Il a regretté que cette dissymétrie n’ait pas été corrigée lors de l’examen de la loi du 31 janvier 2007, tout en rappelant que le texte n’avait subi aucune modification à l’Assemblée nationale en raison du souhait d’aboutir à un vote conforme. Il a estimé qu’il serait souhaitable de modifier la loi avant les prochaines élections cantonales, c’est-à-dire avant le mois de mars, et il a formé des vœux pour que les débats en commission et les positions exprimées par les différents groupes politiques permettent une inscription rapide de la proposition de loi à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Il a enfin proposé que M. Thierry Mariani soit nommé rapporteur de la proposition de loi et présente son rapport en commission dès la semaine prochaine.

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Informations relatives à la Commission

La Commission a désigné :

— M. Étienne Blanc, rapporteur sur une proposition de loi de MM. Jean-Luc Warsmann et Étienne Blanc relative aux droits des victimes et à l’exécution des peines ;

— M. Thierry Mariani, rapporteur sur une proposition de loi de M. Jean-Luc Warsmann facilitant l’égal accès des hommes et des femmes au mandat de conseiller général (n° 571) ;

— M. Charles de Courson, rapporteur sur une proposition de loi constitutionnelle de M. François Sauvadet relative au retour à l’équilibre des finances publiques (n° 573).

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