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Mercredi 19 novembre 2008

Séance de 11 heures

Compte rendu n° 12

Présidence de M. Patrick Ollier Président

– Audition de M. Claude Allègre, sur la mission qui lui a été confiée par le Président de la République, relative à « l’économie de la connaissance comme moteur du développement de l’Europe »

– Information relative à la Commission

Commission
des affaires économiques, de
l’environnement et du territoire

La Commission a entendu M. Claude Allègre, sur la mission qui lui a été confiée par le Président de la République, relative à « l’économie de la connaissance comme moteur du développement de l’Europe ».

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Mes chers collègues, je remercie M. Claude Allègre qui a souhaité faire part à notre commission des conclusions de la mission que lui a confiée le Président de la République pour préparer les Assises européennes de l’innovation et faire un ensemble de propositions dans ce domaine. Cette audition, dont je souhaite que le compte rendu soit adressé à l’ensemble des députés, devrait permettre à notre commission d’établir une feuille de route et d’élaborer une stratégie propre à aider la recherche.

Vous venez de nous indiquer, monsieur le ministre, que les Assises européennes de l’innovation se tiendraient le mardi 9 décembre à Strasbourg. Bien que notre commission ait prévu de nombreuses auditions ce jour-là, nous essaierons toutefois d’y être présents.

M. Claude Allègre. Merci monsieur le président. Lorsque j’étais ministre du gouvernement de M. Jospin, j’avais organisé des Assises de l’innovation, ayant ensuite donné lieu à une loi sur l’innovation – que vous aviez votée à une quasi unanimité. Ce texte a débloqué certaines situations, permettant désormais à un professeur d’université de créer une entreprise, d’être membre d’un conseil d’administration ou aux universités de collaborer avec le privé. Il serait cependant souhaitable aujourd’hui d’en réviser les décrets d’application, qui freinent encore le développement des entreprises innovantes, et sans doute de compléter la loi elle-même.

Le Président de la République m’a demandé d’organiser les premières Assises européennes de l’innovation et de faire des propositions. J’ai souhaité auditionner le plus grand nombre de personnes, notamment la représentation nationale et le Parlement européen, mais je ne présenterai pas un énième rapport à l’issue de mes consultations : le 9 décembre, le Président de la République fera des propositions, qu’il transmettra ensuite au Conseil européen le 11 décembre. Je ne suis donc pas autorisé à communiquer le contenu de ces propositions. Je vous ferai cependant part de quelques orientations.

Un récent voyage dans de nombreux pays d’Europe m’a permis de constater que la situation de l’innovation est préoccupante pour diverses raisons. La première d’entre elles est commune à tous les pays d’Europe : il s’agit de la désaffection des jeunes pour la science et la technique. Il faut développer l’intérêt des jeunes et des très jeunes pour ces matières. Sur ce point, je croyais que les Scandinaves étaient mieux armés que nous : il n’en est rien ! Il nous faut donc promouvoir la culture scientifique et technique.

Le deuxième problème qui se pose en Europe tient au manque de protection, et même de considération pour les inventeurs. Les inventions sont très mal protégées juridiquement et, même, très mal appréciées. Les PME-PMI innovantes se trouvent dans une situation difficile face aux grandes entreprises, celles-ci ayant une fâcheuse tendance à piller les innovations des plus petites. En France, comme dans les pays scandinaves, s’il est relativement facile de créer une entreprise de quarante personnes, il reste très difficile de passer à trois cents ou cinq cents personnes ! C’est très différent du système existant en Allemagne grâce aux instituts Fraunhofer, que nous n’avons pas réussi à égaler en France avec les instituts Carnot, dont le fonctionnement est trop bureaucratique. Le problème des PME-PMI innovantes est d’autant plus dramatique qu’il existe en Europe de réelles capacités en matière d’innovations technologiques. Malheureusement, une grande partie de ces innovations se retrouvent aux États-Unis où il est plus facile pour une multinationale de capturer une PME-PMI.

Il faut donc porter nos efforts sur la croissance des PME-PMI dans les secteurs innovants et faciliter les relations entre les grandes entreprises et les autres. Le président d’Alcatel, M. Camus, me rappelait récemment qu’aux États-Unis, une grande entreprise peut entrer dans le capital d’une petite entreprise pour l’aider à croître et à exporter, sans nécessairement la capturer. Un tel système ne fonctionne pas en Europe, sauf en Allemagne. Dans ce pays le budget consacré à la recherche et au développement s’élève à environ 55 milliards d’euros, dont les deux tiers relèvent de financements privés. Il faut en effet insister sur le fait que l’État allemand ne finance pas la recherche des grands groupes. Un sixième de ce budget sert à financer la recherche universitaire – la Deutsche forschunggemeinschaft – ainsi que les grands instituts – Max Planck, Helmholtz, Leibnitz et Fraunhofer, les deux tiers des revenus de ce dernier provenant de brevets pris en commun avec l’industrie. Hélas, cette organisation exemplaire n’existe pas ailleurs en Europe, ce qui explique sans doute les chiffres du commerce extérieur de l’Allemagne…

M. le président Patrick Ollier. Savez-vous que vous parlez en présence d’un député du Bundestag ?

M. Claude Allègre. Je m’en réjouis car l’exemple de l’Allemagne devrait inspirer l’Europe entière.

Aujourd’hui, la contribution de l’Union à la recherche et développement en Europe représente 6 à 7% de l’effort, 93 ou 94% restant du ressort des États membres. Or ceux-ci ne coordonnent pas leurs programmes de recherche. Peut-on dès lors s’étonner des difficultés que rencontre le processus de Lisbonne ?

En Europe – et pas seulement en France – les processus de distribution de ces fonds européens sont unanimement jugés trop bureaucratiques. C’est une catastrophe pour les PME-PMI, car pour obtenir de l’argent, une entreprise doit déléguer une personne à Bruxelles : seules les grandes entreprises y parviennent !

Un autre problème vient de l’absence d’évaluation indépendante : en Europe, lorsque l’on veut faire une évaluation, on nomme les personnes ad hoc – qui naturellement disent que tout va bien… Nous devons admettre la nécessité d’évaluer les programmes et accepter de renoncer à certains d’entre eux. Selon certaines agences dans le monde, ce sont 10 % des programmes qui devraient être arrêtés chaque année et remplacés par autant de programmes nouveaux.

Autre problème européen : le FEDER – Fonds européen de développement régional – distribue quasiment la même somme que l’organisme chargé de la recherche à Bruxelles – l’ex-DG 12– mais sans comité scientifique et en l’absence de toute évaluation.

J’en viens aux difficultés dues à l’absence de coordination. Dans les nombreux rapports que j’ai pu lire, toutes les mesures proposées relèvent du « il n’y a qu’à » : il faut qu’une dizaine d’universités européennes soient parmi les quinze meilleures du monde, il faut porter l’indice de l’innovation de 0,4 à 0,6 %... Dire cela ne fait rien avancer.

La présentation des indices et des classements a de lourdes conséquences. Dans certains pays, les dépenses militaires font partie du budget de la recherche tandis que, dans d’autres, elles n’y figurent pas ou seulement pour moitié. Quant à ce qu’on entend par R et D, le terme « développement » est difficile à appréhender car il a une signification différente dans chaque pays ! Ce n’est donc pas ainsi que j’aborderai le problème.

En Europe, si la recherche publique est à peu près correctement financée, c’est loin d’être le cas de la recherche privée, qui souffre de financements insuffisants. Dans notre pays, certains pensent qu’il faudrait porter à 3 % du PIB le montant des dépenses affectées à la recherche : soit, mais le 1 % manquant concerne la recherche privée.

Toutes ces difficultés traduisent un problème philosophique : en Europe, on ne respecte pas l’innovation, et la plupart des chefs d’entreprise ne sont pas formés pour cela. Aux États-Unis, beaucoup ont suivi un Ph.D et participé à une œuvre créative. Les patrons européens imaginent plutôt qu’ils devront la fortune de leur entreprise à telle ou telle astuce de management, voire à des placements bancaires mais pas à l’intelligence de leurs ingénieurs. Il faut absolument que les choses évoluent en ce domaine. A cet égard la protection de la propriété intellectuelle est capitale et il appartient aux parlementaires de faire des lois très strictes pour sanctionner le piratage et protéger les inventeurs. Dans ce domaine, l’Europe est démunie car nous manquons de spécialistes. Le Massachusetts Institute of Technology (MIT) par exemple, dispose d’un cabinet d’avocats de trente personnes, alors que les agences françaises font appel à des cabinets d’avocats extérieurs selon leurs besoins. Il est indispensable d’assurer la protection juridique de la propriété intellectuelle en Europe.

J’en viens aux grandes lignes des propositions que fera peut-être le Président de la République. La première consiste à avancer le calendrier. L’agenda de Lisbonne devait être remis en chantier en 2011. Il est souhaitable qu’il le soit dès 2010 et que 2009 soit l’année de l’innovation en Europe – mais en veillant à utiliser des procédures bottom-up : il faut organiser des colloques régionaux et nationaux, et impliquer les institutions nationales, dont les assemblées élues, avant de synthétiser les propositions et de les faire remonter, sous une présidence européenne qui sera d’abord tchèque, puis suédoise.

On a proposé par ailleurs – idée reprise par le président de la Commission – de créer un MIT européen. A ce stade, permettez-moi un mot sur le fonctionnement de la recherche aux Etats-Unis. Le MIT ne représente pas à lui seul toute la recherche américaine, même si cet établissement est excellent et présente l’avantage de cumuler recherche fondamentale et recherche appliquée. Il existe aux États-Unis un véritable tissu d’excellence et chaque université poursuit l’excellence dans un domaine particulier. C’est ainsi que l’université d’Oklahoma est la meilleure du monde pour la formation de spécialistes du pétrole, et que le Georgia Tech d’Atlanta forme les meilleurs spécialistes en informatique et en électronique. Les États-Unis comptent près de 200 universités extrêmement performantes, et ce n’est pas en créant un MIT ex nihilo que l’Europe pourra les égaler.

En Europe, nous avons commis une erreur fondamentale en dissociant la recherche fondamentale et la recherche appliquée : or la première, prise isolément, n’est pas utilisable par l’industrie ; quant à la seconde, coupée de la première, il n’est pas rare qu’elle dérive vers le simple développement et devienne peu innovante.

Nous devons donc redynamiser les universités européennes pour qu’elles puissent conjuguer recherche fondamentale et recherche appliquée, enseignement fondamental et enseignement appliqué. C’est ce que fait actuellement la Finlande, où l’on enseigne la propriété intellectuelle aux étudiants des filières scientifiques. Nous devons faire un effort important en ce sens.

Les financements du FEDER devront s’adresser prioritairement aux nouveaux États membres. Ceux-ci trouvent anormal qu’un tiers des crédits affectés à un programme européen soit destiné à la Sicile du seul fait qu’il s’agit d’une région particulièrement défavorisée ! Je pense en effet qu’il faut assurer aux nouveaux membres un niveau d’innovation et de recherche comparable à celui des autres.

Il importe également de coordonner les programmes européens, mais pas en partant du sommet : il faut initier les choses par le bas, en proposant certaines lignes de conduite, mais en laissant ensuite se développer les initiatives. Pour illustrer les gaspillages au niveau européen, laissez-moi vous raconter ce qui s’est passé lors de la crise de la vache folle. J’étais alors ministre. Nous avons confié les recherches sur le prion à une équipe du CEA, où se trouvait la seule équipe française compétente en la matière, qui n’a dépensé qu’un cinquième du budget alloué. La Hollande, la Grande-Bretagne, l’Allemagne et l’Italie ont fait la même démarche, avec des équipes minimales, réduites aux seuls spécialistes du prion. Croyez-vous que quelqu’un a eu l’idée de coordonner ces recherches nationales ? Au contraire, l’Europe a elle-même financé de manière autonome son propre programme de recherches ! Voilà un bel exemple du manque de coordination. Pourtant, si elle coordonnait ses recherches, l’Europe serait très compétitive – le CERN en est un exemple éloquent.

Il est clair que l’on ne peut démarrer un véritable programme d’incitation à l’innovation en se contentant des procédures bruxelloises qui sont longues, bureaucratiques et inefficaces. Ainsi l’harmonisation européenne des diplômes fut d’abord le fait de quelques pays novateurs, suivis ensuite par les autres. Pour avancer, il faudrait développer le système des « coopérations renforcées ». La France, l’Allemagne, la Suède, la Finlande et l’Espagne ont ainsi accepté l’idée d’un Innovative Small Business Act, consistant à réserver aux PME un certain nombre de commandes. De même nous souhaitons mettre en place un brevet européen unique, qui permettra aux entreprises de faire des économies considérables : aujourd’hui, un brevet européen doit être déposé à Zurich, puis dans chacun des pays européens, ce qui représente à chaque fois une taxe de 30 % !

Se pose également le problème du « délai de grâce ». Aux États-Unis, un scientifique qui souhaite déposer un brevet ne peut le faire avant l’écoulement d’un délai d’un an à partir de la date de publication. En Europe, une découverte est considérée comme faisant partie du domaine public dès la publication de l’article dans une revue. C’est pourquoi 30 % des brevets américains correspondent à des découvertes faites en Europe.

L’Europe doit aussi trouver un accord sur des exemptions de charges en faveur des petites entreprises : une évolution de la législation serait nécessaire. Aujourd’hui, les créateurs de start up, avant même d’avoir gagné de l’argent, doivent rendre des comptes à l’URSSAF, ce qui conduit certains d’entre eux à abandonner. Pourquoi ne pas offrir aux start up innovantes ce que les avocats ont obtenu, à savoir l’exemption de charges pendant trois ans ?

L’un des décrets d’application de la loi que vous aviez votée à mon initiative dispose qu’un professeur qui souhaite devenir consultant ou créer une entreprise doit obtenir une autorisation préalable de la part d’un comité d’éthique, où siègent naturellement des personnes qui n’ont jamais travaillé avec l’industrie… De telles dispositions nous empêchent d’aider correctement les PME-PMI.

Nous discutons actuellement avec la Banque européenne d’investissement sur la mobilisation de fonds : l’idée est de construire un espace européen de l’innovation doté de règles communes aux pays qui auront choisi d’y participer. Vous serez naturellement impliqués, mesdames et messieurs les députés, car chaque État de l’Union européenne devra adapter sa législation.

Enfin, le Président de la République souhaite que, chaque année, un Conseil européen soit consacré aux questions d’innovation et de recherche, et aux grandes priorités de l’Europe en ce domaine. C’est ce que fait le gouvernement américain, qui a pu lancer ainsi les autoroutes de l’information par exemple. Le Président considère que la recherche et l’innovation sont l’une des grandes réponses à la crise, mais il souhaite adopter, je le répète, le processus de sélection bottom-up : les États définissent de grandes priorités, mais ensuite on fait émerger les propositions du bas vers le haut.

M. le président Patrick Ollier. Toutes ces propositions reflètent un tel bon sens qu’on s’étonne qu’elles n’aient pas encore été mises en œuvre… Savez-vous que dans le cadre du changement des compétences des commissions qui existera à compter du mois de mars 2009, l’« innovation » n’existe pas en tant que telle ? Il nous appartient de modifier cette situation avant le mois de mars prochain…

M. Claude Allègre. Nous vous proposerons d’adopter l’expression de « recherche et innovation » à la place de « recherche et développement », mais c’est à vous de décider ce que vous voulez y mettre. Ce sera plus clair, à mon avis, car la notion de « développement » permet seulement certains effets d’aubaine.

M. Philippe Tourtelier. Je vous remercie pour votre exposé qui a soulevé des questions importantes sur lesquelles je voudrais rebondir.

La première est la place de la culture scientifique et technique. Elle pose plus globalement la question des rapports entre la science et la société. Que pensez-vous, d’une part, du principe de précaution et, d’autre part, de l’acceptabilité sociale de certaines recherches ? Les OGM, les nanotechnologies ont suscité des débats. Tout est-il acceptable ?

Vous avez dénoncé l’absence d’évaluation des programmes et de l’utilisation des fonds du FEDER. Quels pourraient être les critères de ces évaluations ?

Vous plaidez pour que la recherche fondamentale et la recherche appliquée ne soient pas séparées. Où mettez-vous le curseur entre les deux ? La recherche appliquée est plutôt en lien avec la société tandis que la recherche fondamentale relève plutôt de la science, ce qui nous ramène à l’articulation entre science et société.

Autre problème de curseur, entre les sujets déjà pris en compte et ceux qui émergent. Ainsi la recherche porte pour 90 % sur le nucléaire et pour 10 % sur les énergies renouvelables. Où est l’innovation ? Ne faut-il pas prévoir des réorientations ?

Vous avez souligné l’impossibilité pour les PME-PMI d’avoir des contacts permanents à Bruxelles. Il ne me semble pas très difficile de créer des bureaux de conseil chargés de missions ponctuelles. Cela me semble être un problème moins technique que financier.

Que pensez-vous enfin des politiques de brevets par rapport aux nécessaires transferts de technologie aux pays en voie de développement en matière, par exemple, de changement climatique ? Et que pensez-vous du brevetage du vivant ?

M. Claude Gatignol. Merci de nous avoir rappelé que vous étiez un excellent antidote à la « fausse science » et que la lecture de certains de vos ouvrages pourrait utilement accompagner les réflexions de la vie politique. Vous n’hésitez pas à déranger et vous orientez très nettement vos conclusions vers la simplification et l’efficacité.

La notion d’innovation directement issue de la recherche pose le problème des choix. Comment ceux-ci sont-ils faits ? Vous avez indiqué qu’il faut au moins deux tiers de recherche privée et un tiers de recherche publique et qu’il faut avoir le courage d’arrêter certains programmes. Des pays comme les États-Unis savent le faire : ils se fixent un délai, procèdent à une évaluation et prennent ensuite la décision de poursuivre ou d’arrêter.

Vous avez évoqué la notion de fiscalité et de charges. Nous devrons en tenir compte.

Il y a un début d’évaluation en France, avec l’AERES, l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, dirigée par un scientifique. Celui-ci n’a pas une tâche facile mais il est intéressant et assez décapant. Son évaluation tient, pour l’instant, plus de la peer review, du jugement par les pairs, que de l’auto-évaluation dont on connaît les limites.

Avez-vous estimé les budgets nécessaires pour l’application de la recherche ? Je prends un exemple. Les biotechnologies ont fait l’objet de débats au sein du Parlement. Je suis, personnellement, désespéré que la France ait sollicité la clause de sauvegarde en ce domaine, notamment pour la recherche sur les organismes génétiquement améliorés. Dans le même temps, la Chine décidait un programme de 4 milliards d’euros uniquement dans les biotechnologies. Il y aura bientôt, dans ce pays, 150 millions d’hectares cultivés mais aucun en France. Jugez-vous cela convenable ? La Chine et les USA vont être les précurseurs en la matière.

Je rejoins vos craintes concernant la désaffection des jeunes générations envers la science et la technique.

Comment peut-on orienter des recherches vers l’énergie de demain : le photovoltaïque, les batteries, les condensateurs, les catalyseurs ? Nous avons deux grands programmes à mener : le premier sur l’énergie atomique car elle sera la seule énergie, avec le charbon, disponible au siècle prochain ; la seconde sur les carburants végétaux. Je n’oserai pas vous interroger sur la capture et le stockage du CO2, tant le sujet est controversé.

M. Jean-Pierre Giran. Vous avez souligné, monsieur le ministre, la difficulté du passage de l’invention à l’innovation, c’est-à-dire de la traduction en termes économiques des apports de la recherche fondamentale. Je déplore comme vous que notre société manque de considération pour cette dernière. On subit, là comme ailleurs, des effets de mode : dès lors qu’une recherche n’a pas d’application palpable immédiate, elle n’a pas grand intérêt. Or il n’y a pas de recherche sans recherche fondamentale libre.

Selon moi, le problème naît aussi de la formation à l’université. On y fait des thèses « académiques » où il ne faut pas trop surprendre et où la synthèse est souvent préférée à la créativité. Il faudrait privilégier l’innovation plutôt que le nombre de pages et le nombre de citations des membres du jury. De ce point de vue, je trouve tout à fait intéressant que ce soit à M. Claude Allègre que le Président de la République ait confié la mission. Président de rupture, il a choisi un rapporteur de rupture.

Dans l’évolution des carrières des universitaires on privilégie l’ancienneté et la dimension administrative, au point de dissuader certains de chercher. Si les promotions étaient liées davantage aux publications qu’au vieillissement et aux tâches administratives – qui masquent parfois une incapacité à faire de la recherche –, on ne s’en porterait peut-être pas plus mal.

Enfin, les chercheurs sont souvent allergiques à la bureaucratie et à l’administration. Or, on leur demande, avant de faire de la recherche, d’être des spécialistes du droit, ce qui est souvent dissuasif.

M. Jean-Louis Gagnaire. En dépit des pesanteurs du système, il y aussi des expériences réussies en France. Le système français est, il est vrai, « gravitaire », fondé sur l’idée que la recherche académique va fatalement avoir des retombées sur les entreprises. Or cela ne se passe pas ainsi. C’est ce qu’a bien montré l’évaluation des pôles de compétitivité, qui nourrissent les controverses : l’irrigation du tissu des PME-PMI fonctionne bien quand il y a de bons accompagnements et ne marche pas du tout si on en reste à des systèmes décidés depuis Paris.

Notre système est également trop étatisé, contrairement au système allemand, qui est très régionalisé. En régionaliste convaincu, je ne cesse de répéter qu’on ne peut pas décider de tout depuis Paris. Des expériences intéressantes sont menées dans un certain nombre de régions dont la mienne, Rhône-Alpes. Il serait bien qu’avant de décider d’une politique nouvelle, on aille voir ce qui se passe sur le terrain.

L’innovation n’est pas seulement technologique mais aussi organisationnelle. Les ruptures technologiques ne sont pas si courantes. Le directeur de la stratégie de SEB me faisait remarquer dernièrement qu’il n’y en a pas eu dans son entreprise en dehors du four à micro-ondes : cela n’a pas empêché celle-ci de se développer à l’international et d’être un grand leader français.

Il existe des programmes pour aider les PME-PMI à redéfinir leur stratégie et à devenir plus performantes. Nous en avons monté quelques-uns dans notre région. Dans certains pôles de compétitivité comme MINALOGIC, ces programmes montés par la région et cofinancés par l’État sont appropriés par la direction du pôle pour accompagner les PME.

Il faut, comme vous l’avez indiqué, une approche à partir de la base, bottom-up. Il faut en finir avec une conception hiérarchique top-down, c’est-à-dire du haut vers le bas. Les démarches cluster procédant par mise en commun des forces et des compétences sont de ce type et fonctionnent. Dans notre région, nous faisons appel à un cabinet catalan pour accompagner ces démarches parce qu’avec des consultants français, nous n’arrivons pas à faire émerger ce type de politique.

Monsieur le ministre, je vous invite à venir voir dans notre région – à Grenoble, Lyon, Saint-Etienne et ailleurs – un certain nombre d’expériences réussies. Vous serez le bienvenu.

M. Yanick Paternotte. En tant que pharmacien et détenteur de brevets, j’ai apprécié vos remarques en la matière, monsieur le ministre.

Je confirme que ce qui fonctionne en Allemagne, à savoir le portage par les grands groupes des PME à l’exportation sur l’innovation, ne marche pas en France, en dépit des efforts faits en leur temps par des structures comme l’AFI.

Pour lutter contre les délocalisations au niveau européen par rapport aux BRIC – Brésil, Russie, Inde, Chine –, il faudrait sans doute avoir un plan européen sur la robotique. Il y a des obstacles fiscaux : les immobilisations plombent complètement les investissements en la matière. C’est pourtant une bonne manière de maintenir de l’emploi industriel – sans lequel il n’y a pas d’emplois de services – et de créer de l’emploi innovant en France et en Europe.

Il ressort de mes discussions avec le LEEM (les entreprises du médicament) que nous avons un vrai souci en matière de propriété industrielle et de protection des brevets dans le domaine de la santé. Alors que nous assistons à un retour d’épidémies dans certains pays, comme la tuberculose en Afrique, il n’y a pas assez de perméabilité entre le secteur privé et le secteur public. De plus beaucoup de laboratoires font des recherches jusqu’au stade 2 et les arrêtent ensuite, c’est-à-dire déposent des brevets sans finalement produire les molécules, souvent de biotechnologie. La limitation des droits de la propriété intellectuelle à vingt ans dans certains secteurs dissuade les chercheurs privés d’aller au bout de la logique. Dans des domaines stratégiques d’intérêts mondiaux touchant à la santé et à certaines maladies, il serait bon de mettre les brevets, non pas au départ des publications ou avant expérimentation, mais après la phase 2 ou 3, c’est-à-dire après vingt ans d’exploitation effective et non vingt ans incluant la recherche, la mise au point et l’exploitation, car cette dernière est ainsi réduite à moins de douze ans. D’ailleurs les innovations thérapeutiques sont en baisse et de fausses molécules sortent. Une initiative européenne serait à prendre en la matière.

Mme Geneviève Fioraso. Nous constatons un manque de volonté et d’interventionnisme européen en matière d’innovation. Les États-Unis sont extrêmement interventionnistes : ils financent directement des programmes de PME-PMI via le Department of Energy, la NASA ou d’autres grandes directions. En Europe, pour un projet de recherche et développement comme la microélectronique à Crolles, nous sommes obligés d’attendre six mois l’autorisation de Bruxelles.

Nous déplorons aussi un problème de financement européen pour le rachat des start up cotées en Bourse ou susceptibles de faire l’objet d’OPA. L’Europe ne fait rien et ne peut rien faire, par exemple, pour l’entreprise SELTEC, qui est extrêmement fragile. Kelkoo, issue de l’INRIA et de Bull, a été rachetée par Yahoo. L’Europe n’a aucun fonds mutualisé pour éviter ces rachats qui nous privent de retour sur nos investissements.

Quant au lien entre les PME-PMI et les grands groupes, je déplore que la majorité ait refusé un amendement qui visait à le renforcer via les pôles de compétitivité, notamment pour le portage à l’exportation.

M. le président Patrick Ollier. Il était mal rédigé !

Mme Geneviève Fioraso. Schneider Electric a signé un pack PMI-PME dans le cadre du pôle de compétitivité MINALOGIC pour emmener toutes les start up, les PMI-PME traditionnelles et ses sous-traitants. Cela fonctionne mieux que les expositions d’UBIFRANCE auxquelles nous consacrons bien des efforts pour peu de fruit.

Innovation et recherche n’ont rien à voir. Ce sont deux choses différentes. En revanche, comme l’a indiqué Jean-Louis Gagnaire, il existe des innovations juridiques et organisationnelles essentielles dont on ne parle pas assez. Nous avons tendance à ne voir que l’innovation issue des sciences dures. La France n’a pas de culture commerciale. C’est de là que vient notre faiblesse, en particulier en matière de propriété industrielle. Nous diffusons des publications mais ce sont les Japonais ou les Américains qui tirent des brevets.

Je déplore, moi aussi, le manque de coordination et de mutualisation et juge le travail en réseau indispensable. L’Institut européen de l’innovation sera-t-il virtuel ?

La décision d’« implémenter » les pays émergents en Europe en matière d’innovation et de recherche relève-t-elle de la démagogie ou de l’habileté politique ? On ne peut pas faire de la « datarisation » du territoire européen.

Mme Pascale Got. Quelle est votre approche aujourd’hui, monsieur le ministre, sur les agrocarburants ? D’une manière générale, voyez-vous une issue à la crise sur les matières premières par la recherche et l’innovation ? Si oui, pourquoi avons-nous tant tardé à mettre en place des processus ?

Il y a longtemps qu’on parle d’un Small Business Act pour l’Europe. Quelle chance a-t-il aujourd’hui d’aboutir ?

Je regrette enfin que l’innovation et la recherche n’aient pas été prises en compte à leur juste valeur dans la loi de finances pour 2009.

M. Yves Albarello. Nous ne sommes qu’au début du captage, du transport et du stockage du CO2. J’aimerais avoir votre éclairage sur ce sujet important pour les années à venir et pour notre planète.

M. Claude Allègre. La mission qui m’a été confiée ne consiste pas à donner des recettes pour la recherche française. Je ne suis pas un représentant du Gouvernement. Je suis chargé d’une mission sur le plan européen. Vous comprendrez, dès lors, que je ne puisse pas répondre aux questions portant sur la France.

Par ailleurs, je répondrai à la dernière question, mais en mon nom personnel puisque je travaille sur le sujet.

Sur le principe de précaution, j’ai écrit des articles fort clairs. Prendre des précautions est une bonne idée. Cependant, dans sa rédaction actuelle, ce principe ne me paraît pas susceptible de favoriser le développement scientifique. Je renvoie sur ce sujet aux déclarations d’Hubert Curien que je fais entièrement miennes.

On ne peut pas, aujourd’hui, fixer de limites entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée. Je prends deux exemples. L’étude par mon ami Pierre-Gilles de Gennes de la propagation d’une goutte de liquide sur un support, qui met en jeu une théorie extrêmement compliquée des polymères et fait appel à des batteries de physique statistique très complexes, a permis, en ajoutant quelques produits dans une peinture, d’en utiliser trois fois moins qu’une peinture classique ou encore d’avoir des lunettes dont les verres ne gardent pas les gouttes d’eau. Inversement, des scientifiques qui cherchaient à produire une molécule pour L’Oréal, ont trouvé un phénomène fondamental pour la compréhension des mécanismes de la vie. La frontière est donc poreuse.

Mais ce qui est important, ce n’est pas que les scientifiques fassent les deux types de recherche : c’est que, sur un même campus, il y ait des chercheurs dans les deux domaines. Le MIT et le Caltech ont chacun plus de prix Nobel et plus de brevets que l’ensemble des organismes de recherche français réunis. Ces deux institutions ont été pionnières car, à l’époque, les grandes universités de la côte Est des États-Unis ne voulaient pas entendre parler de recherche appliquée. La rencontre d’un chercheur qui fait de la recherche fondamentale avec un chercheur qui fait de la recherche appliquée peut faire naître quelque chose de nouveau. Nous n’avons donc pas à distinguer les deux formes de recherche, mais la bonne recherche de la mauvaise.

L’enseignement doit aussi ouvrir l’esprit à ces possibilités. Ce n’est pas le cas en France, ni dans beaucoup d’autres pays. Ainsi l’Allemagne a construit des Technischerschule d’un côté et des universités de l’autre. On essaie maintenant de les fusionner à Munich.

L’aide apportée aux nouveaux États membres est la contrepartie de la charte de l’innovation. Je suis, personnellement, partisan de sélectionner d’après l’excellence. De ce point de vue l’European Research Council fonctionne bien même si je crains qu’il soit complètement bureaucratisé par Bruxelles. Si nous ne voulons pas que les votes soient bloqués au Parlement européen, il faut donner quelque chose aux nouveaux pays. Ce n’est pas moi qui les ai fait adhérer, mais ils sont là et ils votent. C’est pourquoi il faut leur assurer un système de développement, et le FEDER a là un rôle indispensable.

Le brevetage du vivant est un problème très difficile. Il n’y a pas de réponse automatique. Je ne fais pas partie des scientistes aveugles. Quand j’étais ministre, je n’ai pas autorisé l’expérimentation du colza transgénique parce qu’elle présentait des dangers de contamination. Mais je suis obligé de constater que la France va être éliminée du commerce des semences, alors que les deux équipes qui ont fait les premières en ce domaine sont belges et françaises. Je viens d’apprendre que Limagrain quitte la France pour pouvoir mener ses expérimentations. Bayer s’en va également, ce qui aboutit à conférer un monopole à Monsanto. Cela mérite donc réflexion, d’autant que l’on n’en est plus à fabriquer uniquement des plantes résistantes au papillon pyrale, mais à créer des plantes qui consomment moitié moins d’eau qu’une plante habituelle. À Stanford, on produit des plantes transgéniques qui absorbent trois fois plus de CO2. Il n’est donc plus nécessaire de stocker celui-ci : ce sont les plantes qui le font. Devons-nous être absents de toutes ces innovations alors que nous en sommes les initiateurs ? Pour moi, ces questions doivent être discutées au niveau politique, de façon claire et contradictoire.

Un Small Business Act de portée générale ne passera jamais dans les instances européennes. Il est bloqué par le lobbying des grandes entreprises. Ce que nous proposons à ceux qui veulent rentrer dans l’espace européen de l’innovation, c’est d’adopter un Innovative Small Business Act sur les technologies innovantes – dont il vous reviendra de définir la nature. La Hollande souhaiterait entrer dans cet espace européen de l’innovation, mais, à cause de la pression d’Unilever, de Shell et de Philips, elle ne veut pas entendre parler de Small Business Act… Elle ne pourra donc pas rentrer dans cet espace. Nous ne cèderons pas aux multinationales hollandaises sur ce point.

Sur le plan médical, permettez-moi de vous indiquer ma conviction personnelle. En France, des petites PME-PMI de 30 à 40 personnes fabriquent des appareils médicaux plus performants que ceux du commerce. S’il y avait le Small Innovative Business Act, il suffirait que les hôpitaux français commandent trente appareils à ces entreprises pour qu’elles portent le nombre de leurs salariés à 300 et partent à la conquête du monde. Plutôt que de demander de l’argent à l’État, achetons les produits fabriqués en France. Mais il faut savoir que certains sont opposés à cela.

Monsieur Gagnaire, je sais qu’il y a des expériences réussies en France. Je n’ai fait que vous donner le sentiment général en Europe. Il y a partout des innovations et de merveilleuses créations d’entreprises. Mais il y a aussi des initiatives qui n’aboutissent pas faute de soutien. Je citerai un exemple, que connaît bien la présidente du MEDEF. La voiture avec un toit rigide pouvant se fermer pour transformer une voiture en décapotable a été inventée par une PME de l’Ouest de la France. Elle s’est fait voler le brevet par l’entreprise Peugeot, laquelle touche aujourd’hui les royalties de Mercedes et de Volkswagen pour cette découverte. La petite entreprise a dépensé un million d’euros en avocats contre Peugeot mais elle sait que son affaire est perdue. Le GPS est également une invention française mais personne ne le sait en dehors du malheureux inventeur qui s’est fait pirater son invention. Le procédé est toujours le même : une grande entreprise se déclare intéressée par une invention et demande qu’on lui en montre le principe. Elle refait la même chose puis redépose un brevet, et le tour est joué.

De tels agissements ne se produisent pas aux États-Unis pour des raisons culturelles. Les grandes sociétés américaines prennent aussi les découvertes mais l’inventeur devient riche et continue ses expériences. En France, les inventeurs gardent leurs découvertes dans un coin et refusent toute association par peur d’être piratés.

Les PME se heurtent également aux banques qui, au bout d’un moment, en deviennent propriétaires et assassinent quasiment l’innovation suivante.

J’insiste sur ces problèmes car vous aurez probablement des lois à examiner. La protection de la propriété intellectuelle est une question clé pour vous, législateurs de la République. Il faut protéger les inventeurs. Il serait bon, d’ailleurs, que vous receviez des associations d’inventeurs, comme je l’ai fait, pour qu’ils vous racontent leur vie.

Concernant le nucléaire, la solution est dans la quatrième génération qui s’accompagne d’une destruction des déchets. La France est leader mondial dans ce domaine.

En matière d’innovation, il faut arrêter de se tirer des balles dans les jambes. Sinon, au bout d’un moment, nous n’arriverons plus à marcher.

Mme Geneviève Fioraso. Monsieur le ministre, vous n’avez pas répondu à ma question sur le rachat des start up qui atteignent une dimension critique et sont sous-capitalisées. On n’arrive pas, en Europe, à faire de l’ingénierie financière, à avoir un fonds ou à mettre en relation des industriels pour les racheter.

Par ailleurs ne pourrait-on pas porter le seuil européen des PME-PMI de 250 à 500 salariés ?

M. Jean-Charles Taugourdeau. Que faisons-nous de nos brevets si les Indiens et les Chinois disent s’en moquer ?

M. Claude Gatignol. Comment peut-on faire évoluer la propriété intellectuelle sur des inventions présentant un intérêt majeur pour la nutrition, par exemple, des pays « affamés » ? À Saint-Louis dans le Missouri, le laboratoire de Danforth dirigé par un Français, Claude Fauquet, vient de mettre au point un manioc capable de fabriquer des protéines et des vitamines. C’est de la recherche privée financée par Warren Buffet et Bill Gates. Ces derniers ont mis comme condition que, lorsque le brevet sera utilisé pour des pays comme ceux de l’Afrique, il n’y aura pas de redevances sur celui-ci. Comment peut-on faire cohabiter cette exigence éthique avec la notion de recherche et d’innovation issue de cette recherche ?

M. Claude Allègre. Madame Fioraso, je ne suis pas autorisé à parler des sujets que vous avez évoqués mais je crois que le Président de la République fera des propositions dans le sens que vous souhaitez. Nous sommes conscients du problème. Je ne peux en dire plus pour l’instant. Je découvre les réglementations européennes et elles ne sont pas simples. Ainsi, alors que l’article 169 du Traité d’Amsterdam prévoit un cofinancement européen pour les projets réclamant la coopération de plusieurs pays, une décision de la Commission impose un contrôle de tout financement européen, autrement dit, la soumission à la bureaucratie de Bruxelles.

Au piratage interne s’ajoute, vous avez raison de le souligner, monsieur Taugourdeau, le piratage externe. L’Inde est d’ailleurs plus tentée que les Chinois par ce jeu.

Je suis personnellement favorable au fait de ne pas tirer de redevance des brevets pour les pays en voie de développement. Mais il faut que cela soit clairement dit.

Je me réjouis que vous vous intéressiez à la propriété intellectuelle car c’est un élément clé. Je ne sais pas si ce sujet entre dans les compétences de votre commission mais il doit absolument y avoir une commission du Parlement qui travaille sur cette question et fasse des propositions en ce domaine.

M. le président Patrick Ollier. Notre commission va se saisir de ces problèmes dans le cadre de la révision en cours du Règlement.

Je propose de créer, comme pour le Grenelle de l’environnement, un « Comité de suivi » après les déclarations du Président de la République du 9 décembre. Je vous demanderai alors de revenir devant notre commission, monsieur le ministre, car vous serez alors libre de commenter les propositions du Président. Vous nous aiderez à construire une vraie stratégie pour que le Parlement s’intègre dans le dispositif de mise en œuvre des propositions qui auront été faites, y compris en déposant des propositions de loi puisque 50 % de l’ordre du jour nous est donné à partir de l’année prochaine.

Je propose aussi de constituer une délégation majorité-opposition pour aller écouter le Président de la République à Strasbourg le 9 décembre.

M. Claude Allègre. Je précise que se tiendront, le matin, cinq forums de discussion sur les thèmes suivants : financement et croissance des start up, propriété intellectuelle et protection de celle-ci, valorisation de la recherche, naissance d’un réseau d’universités associant recherche fondamentale et appliquée, culture scientifique et technique et enseignement des sciences au niveau élémentaire.

Ces cinq sujets de réflexion sont destinés à faire sortir les grands thèmes pour l’année de l’innovation en 2009. Je souhaite qu’au cours de cette année, le Parlement s’engage pleinement et organise des colloques sur ce sujet.

M. le président Patrick Ollier. Nous en organiserons, soyez-en assuré.

Je propose que le Comité de suivi soit créé le 10 décembre afin de participer à la mise en œuvre des propositions qui seront faites.

M. Claude Allègre. Vous aurez de toute façon à discuter du contenu de la Charte de l’innovation.

M. le président Patrick Ollier. Nous vous remercions d’être venu devant la commission, Monsieur le ministre. Nous vous accueillerons avec plaisir devant le Comité de suivi afin que vous nous aidiez à pousser la réflexion et à créer.

M. Claude Allègre. Monsieur le président, je suis à la disposition de la représentation nationale.

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Information relative à la Commission

La Commission a procédé à la désignation de quatre rapporteurs.

Ont été nommés :

– Mme Catherine Vautrin, rapporteur pour avis sur la proposition de loi visant à définir les dérogations au repos dominical dans les grandes agglomérations, les zones touristiques et les commerces alimentaires (n° 1254) ;

– M. Serge Poignant, rapporteur sur la proposition de résolution, adoptée par la commission chargée des affaires européennes, sur le paquet « énergie-climat » (n° 1261) ;

– M. Jean-Paul Charié, rapporteur pour le contrôle de l’application de la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 ;

– M. Lionnel Luca, rapporteur pour le contrôle de l’application de la loi sur la sécurité des piscines du 3 janvier 2003.

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