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Mardi 15 septembre 2009

Séance de 17 heures 30

Compte rendu n° 5

Présidence de M. Christian Jacob
Président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Jean-Louis Borloo, ministre d’État, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, et de Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État chargée de l’écologie

– Informations relatives à la commission

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a auditionné M. Jean-Louis Borloo, ministre d’État, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, et Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État chargée de l’écologie.

M. le président Christian Jacob. Monsieur le ministre d’État, madame la secrétaire d’État, nous avons souhaité vous entendre à l’occasion de l’annonce de la création de la contribution climat-énergie, prévue dans la loi de mise en œuvre du Grenelle de l’environnement, que le Parlement a adoptée à la quasi-unanimité.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d’État, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. Dans son rapport, Sir Nicholas Stern a établi que le coût de l’inaction est dix à vingt fois supérieur à celui de l’action.

Avec les accords du Grenelle de l’environnement des 24 et 25 octobre 2007, les lois de finances pour 2008 et 2009, et les quarante-quatre mesures de verdissement de notre fiscalité, le texte relatif à la responsabilité environnementale puis la loi Grenelle 1, nous avons entamé une mutation vers une société plus respectueuse des ressources, énergétiquement performante et préservatrice de nos ressources naturelles. Cette mutation est sensible dans tous les domaines.

Dans le bâtiment, des normes ont été édictées et nous avons créé l’éco-prêt à taux zéro, qui se cumule avec les avantages accordés aux emprunteurs.

Nous nous sommes accordés unanimement sur la nécessité de développer considérablement les moyens de transport collectif dans les agglomérations françaises. Hors Paris, la distance cumulée des réseaux de sites propres existants s’élève à 329 kilomètres et l’objectif est de passer à un maillage de 400 kilomètres. Depuis le vote du texte et l’appel à projets, les agglomérations se sont mises en mouvement pour y parvenir, ce qui requiert un investissement de 4 milliards d’euros, soit un doublement de l’effort en vingt-cinq ou trente mois, l’objectif étant de le multiplier par cinq à échéance de dix ans.

En matière de transport ferroviaire de voyageurs, vous connaissez les enjeux : nous avons signé pour l’Est et la Bretagne, j’espère que nous allons en faire autant pour le Sud-Ouest. Pour le fret, je citerai le lancement des autoroutes ferroviaires, le fret à grande vitesse, les opérateurs portuaires de proximité, les opérateurs de proximité régionale, qui feront l’objet demain d’une annonce d’investissement de 7 milliards de l’État directement ou via RFF, les efforts conjoints des régions et de l’État en faveur de la régénération du réseau, la mise en place de la gestion optimale des sillons par RFF.

Nous avons présenté le plan sur les énergies renouvelables, visant à une augmentation très importante de leur production. Le bonus-malus sur les véhicules permet à la France de réduire son parc acquis d’un gramme par mois, alors que, au niveau européen, le rythme est d’un gramme par an : ce bonus-malus a créé un choc pour les citoyens consommateurs français, accélérant considérablement la marche vers le moteur « décarboné », à tel point que, d’ici huit à vingt mois, des offres seront compétitives sur l’ensemble des gammes de véhicules utilitaires et privés.

Sur le plan européen, nous avons obtenu la mise en place du paquet climat-énergie, avec cinq directives, tendant notamment à l’instauration de quotas d’émission, sous le contrôle de la Cour de justice des Communautés européennes, en vue d’obtenir une réduction de 30 % si un accord est trouvé au Sommet de Copenhague, de 20 % dans tous les cas.

Un point particulier, évoqué au Parlement de manière insistante, se retrouve dans l’article 2 de la loi Grenelle 1 : « L’État étudiera la création d’une contribution dite “climat-énergie” en vue d’encourager les comportements sobres en carbone et en énergie. » Le texte prévoit que cette contribution soit progressive, évaluable et ne porte atteinte ni à la compétitivité ni au pouvoir d’achat des ménages. L’option choisie, consistant à créer cette contribution le plus rapidement possible, emporte l’agrément de tous. La question de la progressivité est centrale et la restitution aux ménages procède d’une idée simple : taxer le carbone, pas les ménages, avec des baisses d’impôt à l’euro près. Pour les entreprises, vous savez ce qu’il en est.

Le Grenelle 1 prévoyait donc que la question soit étudiée, ce qu’a fait une conférence de consensus d’experts. Celle-ci a conclu qu’il fallait créer cette contribution rapidement, la rendre progressive, elle a proposé plusieurs niveaux d’entrée – 9, 15, 23 et 32 euros –, l’essentiel étant de donner un signal prix à dix, quinze ou vingt ans. En effet, si nous n’agissons pas, nous serons rattrapés par la patrouille prix et par la patrouille CO2. Quant à la restitution aux ménages, il a été proposé de l’opérer directement, par impôt ou par chèque.

La fiscalité écologique étant par nature appelée à évoluer, une commission pluripartite indépendante s’assurera que la taxation frappera non pas les ménages, mais le carbone, et se prononcera sur les modalités de la progressivité, linéaire, asymptotique ou en cloche, le principe général devant être clair et intangible.

Cette mesure s’entend évidemment comme un complément, en plus du financement des réductions de dépenses énergétiques, de l’effort en faveur des transports collectifs et des crédits pour les voitures électriques, y compris les infrastructures de recharge. Lorsque nous nous battions pour réduire les émissions du parc automobile européen, nos amis allemands trouvaient que le niveau de 95 grammes exercerait une pression très forte sur l’industrie automobile ; or, à l’échéance considérée, si toutes les voitures ne sont pas quasi « décarbonées », l’Europe aura perdu la bataille mondiale de la mobilité.

L’USH, l’Union sociale pour l’habitat, est réunie depuis ce matin pour trois jours à Toulouse. Nous avons signé avec elle une convention de chantiers thermiques portant sur les 800 000 logements les moins performants du point de vue énergétique. Je lui ai adressé un message dans lequel je propose d’ouvrir le débat en vue d’accélérer le changement pour l’ensemble du parc, car l’impact sur le pouvoir d’achat des ménages est direct. Nous avons la chance de disposer d’un organisme très coordonné, maîtrisant le logement de 4,2 millions de foyers ; il convient d’accélérer le processus de réduction des dépenses énergétiques grâce à des financements complémentaires de l’État.

Nous sommes donc restés dans le cadrage strict de l’article 2 de la loi Grenelle 1.

M. Jean-Paul Chanteguet. Le groupe socialiste approuve l’instauration de la contribution climat-énergie. Nous étions favorables à la taxation de l’électricité, dont une part importante, en période de pointe, est produite dans les centrales thermiques au charbon ou au fioul. Nous étions favorables à un prix de la tonne bien supérieur à 17 euros : nous nous étions ralliés à la proposition de 32 euros émise par Michel Rocard et Alain Quinet.

Pour ceux qui paient l’impôt sur le revenu, il serait réduit, et un chèque vert serait versé aux ménages qui n’y sont pas assujettis. Tous les ménages, quel que soit leur niveau de revenu, bénéficieraient ainsi d’une compensation de 70 ou 80 euros, avec une modulation liée à la composition du ménage et à la localisation géographique, et une distinction entre urbains et ruraux. Quel sera le montant de la compensation moyenne ? Quelles seront les compensations supplémentaires liées à la localisation géographique et à la composition des ménages ?

Pourquoi les ménages percevant les revenus les plus élevés bénéficieraient-ils d’une compensation ? N’y aurait-il pas là un moyen de dégager des moyens supplémentaires, soit pour assortir cette compensation d’un effet redistributif plus important, soit pour conduire des actions dans les domaines du transport ou du logement ?

L’objectif est que les chefs d’entreprise, mais aussi les consommateurs, changent de comportement. À 17 euros, le signal est-il suffisant ? Le principe de progressivité et son degré seront-ils inscrits dans la loi de finances ?

M. Serge Grouard. Je vais faire un peu d’histoire, un peu d’économie, un peu d’international et un peu de pédagogie.

La taxe carbone et, au-delà, toutes les mesures prises récemment, témoignent d’un changement structurel de l’ensemble des processus de décision et d’action. Le Grenelle, de ce point de vue, a été tout à fait remarquable. Au XIXe siècle, le système dit « capitaliste » a intégré la dimension sociale. Nous sommes en train d’intégrer la dimension de l’environnement et du développement durable.

L’objectif est d’internaliser les effets externes, de restituer le prix intégrant l’ensemble des paramètres, en jouant avec l’élasticité-prix. Si l’on veut modifier les comportements de consommation, il faut augmenter le prix des énergies fossiles.

La France n’est certes même pas responsable de 1 % des rejets mondiaux de CO2, mais la taxe carbone a valeur d’exemplarité. Celle-ci s’est déjà manifestée à travers la négociation du fameux paquet climat-énergie et l’enjeu est majeur pour le sommet de Copenhague, qui s’ouvrira dans quelques semaines. Si la France adopte des mesures fortes, il n’est pas certain qu’elle parvienne à convaincre tous ses partenaires internationaux. En revanche, si elle n’adopte pas de telles mesures, alors que ses positions sont reconnues sur le plan international, les chances de réussite du sommet seront singulièrement réduites.

Les experts proposent 17 ou 32 euros, mais nos concitoyens s’interrogent : concrètement, qui paiera ? Comment les personnes morales, par exemple les collectivités territoriales, seront-elles affectées ? Qui paie ? Combien ? Comment ? Sur quelle base ?

Je connais parfaitement le problème des heures de pointe, mais je ne vois pas trop quel résultat nous obtiendrons si nous neutralisons l’effet prix pour l’électricité. Une différenciation doit intervenir.

Quand la restitution interviendra-t-elle ? Comment sera-t-elle assurée ?

Il faut savoir ce que nous voulons. Nous sommes investis d’une grande responsabilité et ce n’est pas le moment de caler. Le courage politique consiste à donner des explications à nos concitoyens qui sont en désaccord et à agir. Telle est la logique qui anime le groupe UMP.

M. Yves Cochet. Les écologistes, parlementaires, associatifs et autres, étaient tous favorables, depuis plusieurs années, à une contribution climat-énergie, mais pratiquement tous s’opposent aux modalités proposées par le Président de la République. C’est un paradoxe : l’idée, popularisée notamment par Nicolas Hulot dans son pacte écologique, se traduit, selon nous, par une mesure décevante.

Le Grenelle de l’environnement évoque une contribution dite « climat-énergie », c’est-à-dire non pas une mesure limitée à la taxe carbone mais une invitation générale à économiser l’énergie, y compris les sources d’énergie renouvelable, qui fonctionnent avec des appareils demandant à être entretenus et régulièrement remplacés. Quant à agir sur le carbone, nous étions tous d’accord, particulièrement dans la perspective du sommet de Copenhague.

La contribution climat-énergie aurait dû avoir comme première qualité d’être large, de taxer toutes les énergies, peut-être de manière modulée, parce qu’il n’est jamais innocent de consommer de l’énergie, à cause des lois de la thermodynamique.

Cette contribution aurait aussi dû être incitative, afin que le signal prix entraîne des changements de comportement de consommation, de production et de déplacement. Le raisonnement du Président de la République qui a conduit à retenir le prix de 17 euros la tonne est très mauvais car le marché de la tonne de carbone joue au yoyo. Si le prix moyen du marché, en 2010, atteint 32 euros, le niveau de la contribution climat-énergie sera-t-il revu ? Non. Le marché européen des quotas échangeables ETS (European Trading System) est au demeurant très peu efficace et les grosses entreprises, les plus polluantes, sont tranquilles. Pourquoi les 1 200 ou 1 300 entreprises participant au marché du carbone échappent-elles à la taxe carbone ? C’est une décision du Président de la République. Tout le monde aurait dû y être assujetti : les grandes entreprises, les petites, les collectivités et les ménages. Cette contribution ne changera guère les comportements, c’est un échec annoncé.

La progressivité compte aussi, évidemment, et un article de la loi de finances initiale devra déterminer son niveau. Quand les chiffres sont petits, la progression exponentielle est plus lente que la progression linéaire. En partant de 17 euros, une progression exponentielle ne conduirait pas à des chiffres très haut avant 2030. Même en partant de 32 euros, avec un taux de croissance de 5 % – je préférerais 10 % –, on arriverait à environ 120 euros en 2030. Le linéaire est bon au départ, mais régressif : plus le temps avance, moins l’on paie.

La mesure proposée est-elle écologiquement efficace et socialement juste ? Sa première vertu doit être écologique. Parler de « compensation » sous-entend que l’on est coupable. Les enjeux sont formidables pour nous-mêmes, les générations futures, la planète, pour les pauvres des pays pauvres et les pauvres des pays riches ! Ensuite, je suis tout à fait d’accord pour qu’une redistribution soit assurée, mais sous quelle forme ? La meilleure forme de redistribution serait une sorte d’allocation universelle, non pas par ménage mais pas personne, qui n’entraînerait pas de frais supplémentaires pour l’État. Une modulation pour les ruraux ou les femmes célibataires avec enfants fera travailler 500 fonctionnaires à Bercy. La priorité n’est pas de créer des postes là-bas mais plutôt dans les hôpitaux et les écoles !

Deux études parues au début du mois, émanant respectivement de l’ONU et de la CNUCED (Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement) établissent que la situation est beaucoup plus grave que l’on pouvait le croire : pour infléchir l’évolution et ne pas atteindre les 2 degrés du température supplémentaires en 2060, la somme annuelle nécessaire n’est pas de quelques milliards, mais au moins de 500 milliards de dollars selon l’ONU et même de 800 milliards selon le cabinet McKinsey.

La France manifestant un certain volontarisme au moins verbal, c’est à elle d’agir, à condition que la mesure soit écologiquement efficace et socialement juste.

M. le ministre d’État. Sur ces sujets, celui qui a la certitude de savoir est très fort. Je trouve toujours extraordinaires ceux qui se disent favorables à un principe mais affirment que ce ne sont pas les bonnes modalités ou pas le bon jour. Faisons preuve d’un peu d’humilité, y compris au Gouvernement ! De toute façon, nous devrons nous adapter.

Les deux grands constructeurs français, lors de la création du bonus-malus écologique voiture, avaient jugé la mesure injuste et inefficace, l’assimilant à une nouvelle vignette ; ils avaient annoncé un taux de déplacement du marché de 2 %. Sauf qu’une mesure possède parfois une puissance magique, qu’elle peut rencontrer la conscience des citoyens. Quand le comité de veille évoque un « signal prix dans la durée », c’est pour provoquer un débat avec la population. Ses membres n’ont pas votre sévérité, monsieur Cochet : pour eux, le plus important est de lancer un nouveau signal. Je suis convaincu que le bonus-malus écologique voiture a remporté un succès allant au-delà de l’avantage financier de 300 euros sur l’achat d’un véhicule valant 10 000 ou 15 000 euros.

Fallait-il créer un fonds pour des travaux spécifiques ? Je n’ai pas soutenu cette thèse. En effet, après le Grenelle de l’environnement, accorder des prêts à taux zéro, développer les tramways, instaurer une prime à la casse pour favoriser des moteurs de camion plus performants, mieux capter l’électricité dans les batteries, financer massivement les chantiers thermiques des logements sociaux, ce sont, si j’ose dire, des actions publiques de droit commun, qui relèvent de la responsabilité de l’État et des collectivités. Laisser penser que de telles mesures seraient financées par la fiscalité écologique, ce serait abîmer l’idée même de fiscalité écologique.

Nous étions assez séduits par la notion d’allocation universelle et le débat parlementaire n’est pas clos. C’est simple, aisé à mettre en place, strictement écologique, aucune triche n’est possible, mais ceux qui vivent en milieu rural, dans une maison et avec deux voitures, seraient astreints à la double peine. Les études de l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) font apparaître une vraie différence objective de situation. Au fond, nous proposons une allocation universelle un peu modulée, qui n’avait pas de vocation redistributive au départ mais qui en aura une dans les faits. Le bonus-malus écologique voiture, fixé en fonction du CO2 émis par la voiture, a généralement un effet redistributif incident car tout le monde ne peut pas se payer une Mercedes 500 SEL. Pour la contribution climat-énergie, ce sera pareil : les ménages des deux quartiles les plus élevés paieront beaucoup plus que le coût moyen de 70 euros. La justice ne se résume pas à une phrase : elle nécessite de la précision. Mais au fond, pour une mesure aussi importante, on peut avoir l’ambition de se montrer précis.

Si le Parlement adopte la mesure, le chèque vert sera versé aux ménages fin février de la première année, tandis que la contribution sera supporté sur toute l’année. Quant à la réduction fiscale, elle sera forfaitaire, directe et s’appliquera au premier tiers. L’État aurait peut-être pu faire mieux mais cette mesure sera neutre pour lui – il n’est même pas impossible qu’il soit en débours. Le sujet est tellement important que nous n’avons pas le droit de tricher, même à la marge.

Monsieur Cochet, je retiens vos remarques sur le caractère exponentiel de la progressivité.

La stratégie générale se porte vers les énergies fossiles, mais parvenir à un modèle moins « énergivore » serait encore préférable. Il n’en demeure pas moins que certaines énergies sont plus nocives que d’autres et que le texte que vous avez tous voté concerne les énergies fossiles. Nous incitons tout de même à l’équipement en voitures électriques et à la production d’énergies renouvelables. Je connais le problème des pointes, mais ce n’est pas une priorité absolue, d’autant que le système ETS s’applique.

La somme des éco-prêts à taux zéro accordés pour des travaux, en trois mois, atteint 1,750 milliard d’euros. Si nous nous mettons d’accord avec les HLM, le programme grimpe immédiatement à 65 milliards sur la seule catégorie 2. Il vous sera proposé d’étendre le périmètre des bénéficiaires et des actions des certificats d’économie d’énergie, pour atteindre des sommes considérables. Nous nous orientons vers une réduction très importante du déploiement des énergies, y compris non fossiles.

Je trouve très faible le chiffre de 500 milliards de dollars pour la mutation avancé par M. Yves Cochet. Sur dix ans, l’effort de la nation française – collectivités, particuliers et État – atteindra 440 milliards d’euros uniquement pour les mesures dont nous débattons aujourd’hui. Les dix-huit pays les plus gros émetteurs, responsables de 90 % des émissions, devraient se situer dans des ordres de grandeur similaire. La vraie question sera celle de l’adaptation : souhaitons-nous accroître immédiatement les crédits mis à disposition, notamment ceux du Fonds pour l’environnement mondial ? Pendant la négociation de la mise en application des mesures adoptées à Copenhague, les programmes prévus devront fonctionner. Or nous prenons du retard.

Je vous prie de m’excuser, mais je dois me rendre au Sénat pour l’examen du projet de loi Grenelle 2.

(M. le ministre d’État quitte la salle de réunion.)

M. Philippe Tourtelier. La loi Grenelle 1 comporte une ambiguïté : il y est question de « contribution climat-énergie » et, deux lignes plus bas, de « taxe carbone ». La différence est claire : une taxe carbone ne taxe que le carbone, tandis qu’une contribution climat-énergie taxe l’ensemble des énergies. Je regrette que la commission Rocard et le Gouvernement aient maintenu l’ambiguïté. Il s’agit là d’une taxe carbone, alors que nous avions besoin d’une contribution climat-énergie pour donner un signal pédagogique et psychologique permettant à la France et à l’Union européenne d’atteindre leurs objectifs. Je rappelle que l’efficacité énergétique est la première source de sécurité énergétique et de réduction des gaz à effet de serre. Nous avons donc laissé passer une occasion.

Le prix de la tonne n’avait pas été fixé au hasard : il s’agissait de ne pas dépasser deux degrés d’augmentation de la température globale. Dès lors que ce prix est divisé par deux, l’objectif est de fait divisé par deux, à moins d’accentuer le caractère exponentiel de la progressivité à un moment donné. Toutes les mesures effectuées depuis 2005 montrent que l’évolution va beaucoup plus vite que prévu et que la situation est grave. Nous devrions donc prendre des mesures autrement plus fortes.

Les changements de comportement souhaités ne sont possibles que si un fonds spécifique, contrôlé par les cinq parties du Grenelle, fixe les alternatives, par exemple en ce qui concerne le changement des chaudières ou des voitures.

M. Philippe Martin. Quel produit exact attendez-vous de cette taxe ?

M. André Chassaigne. Je suis personnellement très opposé à cette taxe carbone. Je considère certes qu’une prise de conscience individuelle est nécessaire, mais cette mesure procède d’un déplacement complet de responsabilité : on fait culpabiliser les comportements individuels, comme si ce n’était pas le système mais le comportement des gens qui était mauvais. Les entreprises sont complètement exonérées. Vous nous dites que 2 milliards d’euros seront prélevés sur les ménages et 2 milliards sur les entreprises. Mais les entreprises, en parallèle, vont économiser 11 milliards avec la suppression de la taxe professionnelle. Avec la taxe carbone, il s’agit de canaliser de l’argent au profit des entreprises. Prévoyez-vous des mesures correctives pour accroître les taxes pollueur-payeur acquittées par les entreprises ? Prévoyez-vous des mesures correctives pour modifier la répartition des permis d’émission ? Prévoyez-vous des politiques publiques pour augmenter les investissements dans la recherche sur des technologies plus respectueuses de l’environnement ? Avez-vous la volonté d’obtenir des résultats ou vous contentez-vous d’agiter une muleta pour occulter les véritables responsabilités d’entreprises recherchant le profit avant tout et refusant d’internaliser les externalités ?

C’est du système capitaliste, du système libéral, qu’il s’agit. Or vous refusez de le mettre en cause et vous faites reposer la taxation sur les ménages.

Mme Catherine Quéré. On va toujours dans le bon sens en accomplissant des économies d’énergies polluantes. Comment permettre aux ménages les plus modestes d’accéder aux énergies et aux technologies propres ? Pourquoi ne pas taxer l’électricité ? Je ne suis pas une intégriste antinucléaire – quoique… – mais quid des déchets nucléaires ? Ne conviendrait-il pas de taxer toutes les énergies, même les énergies propres, afin de financer les énergies renouvelables et d’aider les ménages les plus modestes à accéder aux énergies propres ?

Les propos du ministre donnent une impression de complexité, d’usine à gaz : on taxe, on rembourse les plus modestes, on verse un chèque vert aux ménages ruraux. Faudra-t-il tenir compte du climat du Nord et du Sud de la France ?

Pour ma part, je suis persuadée, contrairement au ministre, que les modalités sont essentielles.

M. Jean-Pierre Giran. Je suis totalement partisan de cette taxe carbone et je trouve le prix bien choisi. S’il était plus élevé, cela signifierait qu’une alternative évidente est à la disposition de chaque consommateur. Tel n’étant pas le cas, il serait particulièrement brutal de soumettre à une imposition excessive ceux qui n’ont pas les moyens de s’équiper différemment ou qui n’ont pas la culture nécessaire.

L’accompagnement qu’assurera le Gouvernement sera crucial, dans l’esprit du Grenelle, afin de favoriser des formes alternatives de consommation d’énergie, notamment en matière de transport.

Dans des communes vertueuses, qui ont mis sur pied des systèmes de transport urbain très efficaces et économes, les habitants ont le choix de ne pas utiliser leur véhicule ; dans d’autres, cette initiative n’a pas été prise. Les ménages doivent-ils payer l’irresponsabilité de leur commune ? En d’autres termes, parmi les critères de la DGF et de la DGE, la dotation globale de fonctionnement et la dotation globale d’équipement, ne convient-il pas d’introduire celui de la qualité des transports à énergie propre ?

M. François Grosdidier. Peut-être les membres de cette commission sont-ils particulièrement sensibles aux sujets environnementaux, mais je note que chacun ici se défend d’être opposé au principe. Je me souviens de la façon dont l’extension du bonus-malus, il y a dix mois, a été critiquée.

Les deux tiers des Français sont contre cette contribution, nous dit-on, sans doute parce qu’ils ont l’impression que la pression fiscale s’exerçant sur eux va encore être accentuée, de façon détournée, avec un impôt habillé de vert. C’est pourquoi le chèque vert doit être neutre socialement. La contribution climat-énergie n’est faite ni pour combler le déficit de l’État, ni pour redistribuer, mais pour modifier les comportements, et exclusivement pour cela. Si elle était employée pour autre chose, comme le fut naguère la vignette automobile, la confusion s’emparerait de l’esprit des Français et l’opinion la condamnerait majoritairement. L’éducation et l’information ne font changer que 10 ou 20 % des comportements. Le signal prix est déterminant, comme le système de bonus-malus écologique l’a montré. Pour ne pas introduire de confusion, cette contribution ne doit avoir qu’une seule fonction.

Il ne s’agit pas d’une usine à gaz : rien n’est plus simple que de distinguer entre ruraux et urbains car les services fiscaux disposent déjà des critères requis.

Cette nouvelle contribution sera-t-elle exclusive de l’extension du bonus-malus à d’autres domaines ?

Je suis d’accord pour que l’électricité soit exclue de la contribution, à condition que nous allions vers l’extinction de l’électricité fossile, faute de quoi certaines critiques pourraient être fondées.

M. Philippe Plisson. Si l’engagement du Gouvernement en faveur de la défense de la planète est une priorité, toutes les lois devraient être étudiées à cette aune. Or quelle est la cohérence entre le discours prononcé hier par le Président de la République, dans lequel il stigmatisait le marché, et le fait qu’il ait fait voter, il y a deux mois, une loi instaurant le travail du dimanche, sans parler du démantèlement des services publics ou du « bouclier fiscal », qui maintient des inégalités inadmissibles ?

De même, quelle cohérence entre une taxe carbone censée entre autres limiter les déplacements individuels en voiture et l’instauration d’un bonus encourageant l’achat de voitures individuelles ? Le Gouvernement ne recourt-il pas à des effets d’annonce ? Ne surfe-t-il pas sur la vague « écolo » au lieu de mettre en œuvre une nouvelle politique de civilisation, qui n’a malheureusement vécu que le temps d’un matin de printemps ?

M. Bertrand Pancher. Je suis attaché à la taxe carbone et au signal prix qu’elle donnera.

Les quelques centimes d’euro de surcoût par litre de carburant ne constitueront cependant pas un signal très fort dès la mise en place de cette taxe, il faut le reconnaître. Je souhaiterais obtenir davantage de précisions sur la façon dont vous envisagez son évolution. Certains parlementaires de la majorité la jugent déjà lourde, d’autres estiment qu’elle devra augmenter très rapidement.

Quant aux contreparties, nous suivons complètement les recommandations du pacte écologique. La contrepartie accordée aux ménages ne me pose aucun problème, mais nous avons peu parlé des contreparties pour les entreprises. Certaines peuvent aller à contre-courant des objectifs environnementaux, en particulier celles concernant les pêcheurs – dans un contexte de réduction de nos richesses halieutiques, la solution réside davantage dans la reconversion que dans des aides pour pêcher plus loin ou plus profondément !

Enfin, certains de nos concitoyens jugent préférables que les contreparties soient directement affectées à des mesures environnementales. Peut-être pourrions-nous réfléchir à des affectations plus spécifiques de notre futur grand emprunt. Les Français, en tout cas, attendent des contreparties encore plus lisibles.

M. Didier Gonzales. Quand je fais Paris-New York en avion, je génère autant de CO2 que toute une famille pour se chauffer pendant une année entière. Le transport aérien, qui représente 13 % des émissions totales de CO2 liées au transport et bénéficie d’une taxation dérogatoire – le kérosène est exonéré de taxes depuis la convention de Chicago de 1947 –, entrera-t-il dans le champ de cette fiscalité ?

M. Philippe Boënnec. L’humilité et la responsabilité du ministre m’ont particulièrement séduit.

Les agriculteurs, les pêcheurs, les transporteurs, les collectivités, les hôpitaux, n’ont pas encore eu le temps de s’adapter. Comment la mesure pèsera-t-elle dans leur budget ? Je suis tout à fait d’accord pour que soit menée une politique incitative suscitant de meilleurs comportements, mais le facteur temps doit être pris en compte. Un professionnel ne peut changer son matériel en quelques semaines, surtout quand l’équipement ad hoc n’est pas disponible. Nous risquons de provoquer un grand nombre de dépôts de bilan chez les pêcheurs. Il n’en demeure pas moins que je suis très favorable à la démarche.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Je suis favorable à 400 % à cette taxe carbone, première étape vers une fiscalité écologique. La France va montrer l’exemple, et c’était un engagement du candidat Nicolas Sarkozy et de beaucoup de députés, signataires du pacte de Nicolas Hulot. J’irai plus loin : il serait intéressant que d’autres pays européens l’appliquent et qu’elle s’impose aussi aux produits importés.

Les importations énergétiques de la France représentent 60 milliards d’euros par an et l’un de nos premiers fournisseurs est la Norvège, pays producteur de pétrole et de gaz, qui a instauré une taxe carbone très lourde depuis fort longtemps : le prix de l’essence à la consommation y est aussi élevé qu’en France. Cette méthode a permis à la Norvège d’avancer en matière d’énergies renouvelables, même si le pays dispose de beaucoup de capacités hydrauliques.

J’aimerais aussi que nous puissions aller dans le sens de la méthanisation, en produisant du gaz à partir des déchets et des effluents d’élevage, ce qui nous permettrait de conquérir notre indépendance énergétique.

Mme Christine Marin. À proximité de la frontière avec la Belgique, pays où l’essence est moins chère qu’en France, nous voyons un grand intérêt à ce que cette mesure soit adoptée au niveau européen. Sinon, nos concitoyens – ils ont fait leurs calculs – iront faire le plein là-bas et encaisseront le chèque en France.

Je voudrais que le débat Nord-Sud cesse. Dans le Nord, on se chauffe, mais, dans le Sud, on fait marcher les climatiseurs !

M. Jean-Luc Pérat. L’idée est généreuse, mais elle doit absolument être accompagnée de mesures incitatives, ciblées dans trois directions : les particuliers, notamment ceux dotés de capacités financières limitées, les collectivités et les bailleurs sociaux. Les modalités d’application et la méthodologie devront éventuellement être définies par territoire, pour mutualiser toutes les énergies, notamment dans le cadre des plans « climat ». Qu’en pensez-vous ?

M. le président Christian Jacob. Que se passe-t-il du côté de nos partenaires européens ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État chargée de l’écologie. Le Danemark, la Norvège, la Suède, le Royaume-Uni et certaines provinces canadiennes ont instauré une taxe carbone. Elle est de 20 euros au Danemark, de 30 à 50 euros en Finlande, de 10 à 40 euros en Norvège et de 108 euros en Suède. C’est dans ce dernier pays que la mesure est la plus aboutie : elle a été instaurée en 1991, avec un taux de 27 euros la tonne, niveau de compromis. L’électricité et les combustibles utilisés pour produire de l’électricité ont été exclus. Aucun dispositif de compensation n’a été instauré, ni pour tenir compte de la situation géographique, ni pour tenir compte de la situation sociale, d’autres instruments ayant été utilisés à cet effet : quiconque habite loin de son lieu de travail le déclare et est remboursé de ses frais de transport. Les modalités de compensation se sont inscrites dans une vaste réforme fiscale de baisse de l’impôt sur le revenu, dont sont redevables 95 % des ménages. Les entreprises ne paient que de 16 à 20 euros la tonne de carbone, un consensus national ayant été recueilli pour préserver la compétitivité des entreprises. Les secteurs très « énergivores » étaient inclus dans la taxe carbone mais en sont progressivement exclus depuis l’instauration de quotas. La politique suédoise consiste à exclure les entreprises régies par le système des quotas européen et, pour les autres entreprises, à porter progressivement le taux de taxe carbone au même niveau que celui applicable aux particuliers.

En matière de fiscalité écologique, la France est en 21ème position parmi les pays européens, très loin de la moyenne européenne, notamment pour ce qui concerne la taxe sur l’énergie.

Il ne s’agit vraiment pas d’induire une culpabilisation. Nous sommes au contraire partisans d’un dispositif inspiré du bonus-malus : grâce à la redistribution, les ménages ont la possibilité d’adapter leur comportement et, pour caricaturer, de gagner de l’argent sur le dos des impôts. Il faut prendre conscience que, sans s’attaquer aux comportements, on ne traite pas la moitié des émissions de gaz à effet de serre.

Convient-il d’inclure ou non l’électricité dans la base de la taxe carbone ? Notre priorité absolue est de faire baisser significativement la consommation d’énergie – c’est d’ailleurs le seul moyen de tenir les objectifs européens. À cet effet, nous privilégions les certificats d’économie d’énergie et, pour régler le problème de la consommation de pointe, l’application des prix différenciés. Nous spécialisons donc des outils sur cette dimension, outre les réglementations incitatives comme celle sur les constructions neuves ou l’éco-prêt à taux zéro. Nous nous inscrivons dans une logique d’extinction des énergies fossiles, mais il faut commencer par réduire notre consommation de pointe, qui nous contraint à importer une énergie hautement carbonée.

Le secteur du transport aérien, à ce stade – mais nous pouvons discuter de tout –, n’est pas inclus dans la taxe carbone car il sera traité dans le futur dispositif international de quotas d’émission de gaz à effet de serre. Pour inclure ce secteur dans la taxe carbone, il faudrait s’engager dans une négociation internationale.

La Suède, pays animé par une conscience écologique très forte, est partie de 27 euros. Le prix de 32 euros, proposé par la commission d’Alain Quinet, résulte d’un compromis, pour tracer une pente de progression modérée. Le seul chiffre scientifique, si j’ose dire, est de 100 euros en 2030. Le plus important est d’inscrire ce niveau dans le marbre et de confier à la future commission verte paritaire – il reste à lui trouver un nom – la tâche de rendre le mécanisme progressif et de déterminer le degré de la pente en tenant compte du prix du marché. Celui-ci est actuellement très bas, à 15 euros, mais il devrait s’établir entre 18 et 24 euros en 2010 et entre 23 et 30 euros en 2012. Après 2012, le système des quotas, un peu plus juste et efficace que le système très administré en vigueur, entrera en application.

Même si l’objectif premier de la taxe carbone n’est pas d’ordre redistributif, elle produira un effet redistributif : du premier au huitième décile de revenu pour les ménages ruraux et du premier au cinquième pour les ménages urbains, le surcoût de consommation d’énergie sera inférieur au chèque de bonus climat. Si ces ménages parviennent à réduire leur consommation d’énergie, ils bénéficieront même d’un petit bonus supplémentaire.

Quelles seront les mesures d’accompagnement ? Le plan véhicule électrique doit être dévoilé le 23 septembre. Le fonds « chaleur », confié à l’ADEME, est doté d’un milliard d’euros pour les trois prochaines années. Le succès de l’éco-prêt à taux zéro dépasse nos espérances puisque 25 000 contrats ont été signés, pour une moyenne annuelle de 40 000 chantiers de rénovation. Le crédit d’impôt cumulable avec l’éco-prêt à taux zéro atteint 2,7 milliards d’euros. Nous avons réussi à mobiliser 1 milliard supplémentaire en faveur des fonds de recherche pour les technologies propres et le Président de la République a souhaité que nous ajoutions 200 millions d’euros chaque année en faveur des recherches sur les énergies renouvelables, afin que l’investissement atteigne le même niveau que celui consacré aux recherches sur l’énergie nucléaire.

Le produit de la taxe carbone s’élèvera à 4,5 milliards d’euros, mais il n’entrera pas dans les caisses de l’État – même la TVA sera redistribuée. Cette somme se décompose en 2,6 milliards pour les ménages et 1,9 milliard pour les entreprises.

Quid des entreprises ? Le principe pollueur-payeur s’appliquera-t-il ? Les quarante-quatre mesures fiscales de la loi de finances pour 2009 comportaient déjà des augmentations de taxes, notamment de celle relative aux produits phytosanitaires, et des créations de taxe, comme celle relative aux incinérateurs. Nous réfléchissons à de nouvelles taxes sur les pollutions, en particulier sur les oxydes d’azote (NOx).

Des contreparties seront mises en place pour les secteurs particulièrement touchés : agriculteurs, pêcheurs, transporteurs. Ils ne seront pas exonérés, car un tel message serait étrange pour nos concitoyens, mais ils bénéficieront de compensations, nécessairement dégressives dans le temps, afin de s’adapter. Pour le transport routier, outre l’écotaxe poids lourds, qui entrera en vigueur en 2011 ou 2012, deux dispositifs sont à l’étude, portant sur les charges sociales et sur un report sur les chargeurs.

La taxe carbone ne sonne pas la fin de la réflexion sur les mesures de type bonus-malus. Celles-ci peuvent avoir d’autres objets que la réduction des consommations d’énergie, par exemple la réduction des déchets, mais chaque chose en son temps.

Il faut savoir que 60 % des Français utilisent leur voiture pour aller travailler chaque jour. Pour nombre d’entre eux, ce n’est pas un choix mais un impératif, dû à l’urbanisme dont nous avons hérité. Or la pollution et la consommation d’énergie des voitures sont essentiellement imputables à un parc vieillissant, d’où le principe de la prime à la casse, afin de faire sortir du circuit les vieilles voitures. Le bonus n’a pas vocation à inciter les gens à conduire plus, mais à réorienter le marché sur des véhicules consommant moins, et cela marche : les progrès en matière de réduction des émissions des véhicules vendus ont été aussi importants que ceux enregistrés au cours de la décennie précédente.

L’affectation des recettes est un vrai débat, Jean-Louis Borloo en a parlé tout à l’heure. Pour les investissements à venir, la logique du grand emprunt est plus adaptée que celle de la taxe carbone. Le Président de la République a d’ailleurs déjà déclaré que la croissance verte serait l’un des objectifs du grand emprunt.

L’extension du principe de la taxe carbone à l’ensemble des États membres de l’Union européenne est l’une des priorités de la présidence suédoise. D’autre part, la France porte toujours avec détermination le principe de la taxe carbone aux frontières afin d’éviter le dumping environnemental.

Nous franchissons une nouvelle étape et nous tâtonnons, comme tout le monde. Le modèle suédois n’est pas totalement transposable en France, où la culture est différente. Le rôle de la commission verte sera de faire progresser le dispositif et de tirer chaque année les enseignements des observations effectuées sur le terrain.

M. le président Christian Jacob. Nous vous remercions, Madame la secrétaire d’État, pour la grande précision de vos réponses.

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Informations relatives à la commission

La commission a procédé à la nomination de membres de la mission d’information commune avec la commission des affaires économiques sur l’énergie éolienne : outre M. Christian Jacob, président de la commission, ont été désignés : MM. Alain Gest, Michel Havard, Daniel Fidelin, Philippe Plisson, Philippe Tourtelier, Raymond Durand et André Chassaigne.

La commission a décidé la constitution :

– d’un groupe de travail sur le financement du Grenelle de l’environnement ;

– d’une mission d’information sur les priorités à financer par le grand emprunt, dont les conclusions devront être rendue d’ici au 20 novembre 2009, composée de MM. Christian Jacob, président de la commission, Alain Gest et Philippe Duron.

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