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Mardi 19 janvier 2010

Séance de 17 heures 15

Compte rendu n° 29

Présidence de M. Christian Jacob Président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Louis Gallois, président exécutif d’EADS

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu M. Louis Gallois, président exécutif d’EADS.

M. le président Christian Jacob. Monsieur le président, je suis très heureux de vous accueillir pour la première fois dans notre Commission.

Comment la stratégie et les enjeux de développement industriel d’EADS intègrent-ils les objectifs du développement durable – baisse de la consommation énergétique, des émissions de gaz à effet de serre, des nuisances sonores ? Compte tenu par ailleurs des priorités retenues dans le cadre du grand emprunt national, quel sera le rôle du groupe dans le développement des pôles de compétitivité – politique de démonstrateurs, hélicoptères et avions du futur, observation spatiale ?

M. Louis Gallois, président exécutif d’EADS. Les dix ans d’EADS sont l’occasion de faire un point sur la situation générale de l’entreprise. Alors que son chiffre d’affaires s’élevait à 24 milliards d’euros en 2000, il était l’année dernière de 42 milliards. EADS est aujourd’hui, dans le domaine de l’aéronautique, de l’espace et de la défense, la seule compétitrice des géants américains que sont Boeing, Lockheed-Martin, Northrop-Grumman ou Raytheon. Mieux, elle a été, en 2008, le numéro un mondial du secteur – ce qui ne sera pas le cas en 2009, Boeing ayant retrouvé son niveau de production habituel. La performance est d’autant plus remarquable que, voilà dix ans, ce ne sont pas moins de quatre entreprises distinctes – en dépit de la constitution du groupement d’intérêt économique (GIE) que fut Airbus – qui étaient à la base de ce secteur. Je me sens d’autant plus libre de le dire que je suis arrivé à la tête d’EADS en 2006 et que ma part de ce succès est donc limitée.

Nous employons aujourd’hui 120 000 personnes, dont 45 000 en France, et nous avons créé 15 000 emplois nets depuis 2000, situation notable par rapport à celle que connaissent la plupart des industries en France et en Europe. Soutenant un important réseau de sous-traitants, les achats d’EADS s’élèvent à 11 milliards d’euros dans notre pays et à 25 milliards en Europe. J’ajoute qu’en dépit de la crise, notre production a augmenté en 2009, contribuant pour une grande part à l’excédent commercial de notre secteur qui est, au total, de 15 milliards d’euros environ. Enfin, je note que, pour le seul programme A350, les investissements physiques – constructions d’usines, équipements, outillages spécifiques – s’élèveront en France à 1,4 milliard d’euros.

Si nous avons surmonté des problèmes liés à la gouvernance, nous avons également dû affronter la crise, et des difficultés demeurent sur certains programmes : A380, A400M. Plus fondamentalement, à la différence de Boeing – qui produit et vend en dollars – la détérioration progressive de nos couvertures de change nous coûte un milliard d’euros de plus, chaque année, depuis trois ans ! Somme que nous devons bien entendu récupérer ailleurs. En outre, EADS constitue un exceptionnel réservoir de technologies – des investissements annuels de trois milliards d’euros en recherche-développement nous placent en tête des entreprises de notre secteur d’activité.

Enfin, nous sommes la seule entreprise véritablement européenne puisque EADS résulte du projet de deux grands industriels, MM. Jean-Luc Lagardère et Jürgen Schrempp, mais également d’une forte volonté politique, ce qui ne présente d’ailleurs pas que des avantages car nous éprouvons parfois des difficultés à être identifiés comme Français en France ou Allemands en Allemagne faute d’une « nationalité » clairement définie.

Le développement durable, quant à lui, constitue une dimension essentielle de notre stratégie.

Tout d’abord, nous développons notre action dans ce domaine où les activités spatiales sont d’ailleurs souvent les plus dynamiques : nos satellites d’observation permettent ainsi de limiter l’utilisation de pesticides et d’engrais en évaluant l’état des récoltes mais, également, d’assurer la gestion de l’eau en estimant les besoins agricoles. C’est ainsi que nous livrons les informations nécessaires aussi bien à de grandes exploitations agricoles qu’à des regroupements coopératifs. De surcroît, nos sociétés Spot Image- société dont nous avons acquis la part détenue par le CNES- et Infoterra assurent le suivi de certains paramètres biophysiques, tel celui de la déforestation, tant sur le plan quantitatif que qualitatif. Nous participons aussi à la recherche océanographique – niveau des océans, évolution des courants, salinité de l’eau – ainsi qu’à la prévention des risques et à la gestion des situations d’urgence : inondations, incendies – comme en Grèce où nous avons permis de mesurer les dégâts et de décider les actions à mener - raz-de-marée. En l’occurrence, nous avons d’ores et déjà fourni à Haïti plusieurs informations satellitaires suite au tremblement de terre qui vient de frapper l’île, tout comme nous l’avions fait naguère lors de l’ouragan Katrina et du Tsunami.

Plusieurs perspectives s’offrent par ailleurs à nous : récupération de certains matériaux constitutifs de nos produits, travail sur les biocarburants – sans vouloir, évidemment, concurrencer Total ou Exxon mais en travaillant en amont avec des « start-up » françaises ou américaines qui œuvrent à l’élaboration de technologies nouvelles – et, enfin, gestion du trafic aérien – le programme européen Sésar, dont notre filiale Airbus est, avec notre filiale Astrium, l’architecte industriel, favorisera ainsi le développement d’une gestion automatisée permettant d’assurer une meilleure rotation des avions dans un même espace aérien et de réduire la consommation d’énergie de manière significative jusqu’à 10 % environ grâce, notamment, à des approches plus directes et des routes plus courtes. Nous travaillons également pour le grand avenir à la récupération de l’énergie solaire par satellite et à sa transformation en rayon laser puis en énergie. L’une de nos équipes réfléchit en permanence à la valorisation de nos savoir-faire dans le domaine du développement durable.

Ensuite, même si EADS ne compte pas parmi les industries les plus polluantes, notre appareil industriel doit se conformer aux exigences du développement durable. La norme ISO 1401 est ainsi appliquée sur l’ensemble des sites d’Airbus et, plus généralement, dans 73 sites d’EADS. Ce ne sont ainsi pas moins de 93 % de nos collaborateurs qui travaillent sous ce label ! Plus spécifiquement, nous sommes soumis au programme européen REACH visant à limiter les pollutions chimiques. Nous cherchons ainsi à élaborer des alternatives aux chromates, adjuvants déclarés cancérigènes mais permettant de fixer la peinture des avions. L’Union européenne a interdit leur utilisation. Boeing a suivi, évitant ainsi une distorsion de concurrence. Par ailleurs, sous le contrôle de l’Autorité de Sécurité Nucléaire, nous inventorions l’ensemble des composants radioactifs de nos produits Au final, c’est une nouvelle culture d’entreprise qui se met en place.

Enfin, la construction de nos avions, de nos lanceurs spatiaux et de nos satellites doit intégrer la dimension du développement durable. Selon certains experts, il ne sera plus possible de lancer de satellites dans 75 ans, l’espace étant pollué par leurs débris ou ceux des lanceurs ; nous travaillons à ce que les nouvelles générations de ces derniers puissent revenir dans l’atmosphère afin d’y être brûlés et, plus généralement, aux méthodes envisageables pour «  nettoyer » l’espace. Responsables de 2 % des émissions de gaz effets de serre, les transports en avion le seront quant à eux de 3 % d’ici 2050 si l’on ne fait rien. Parce qu’une partie de l’avenir du transport aérien dépend donc de notre capacité à limiter cet impact environnemental – dans le cas contraire, les opinions publiques ne soutiendront plus le développement de ce secteur, comme c’est d’ailleurs déjà le cas dans certains pays –, Airbus et Eurocopter consacrent 80 % de leurs efforts de recherche à ce qui constitue un véritable impératif. Si l’avion du futur permettra, certes, aux voyageurs de se connecter à Internet, d’utiliser un téléphone portable ou de se déplacer plus rapidement – vols hypersoniques ou subspatiaux – il sera avant tout moins polluant.

Depuis cinquante ans, date de l’apparition des premiers avions à réaction, la consommation de carburant par siège a baissé de 70 % et le bruit de six décibels, l’objectif étant de limiter le caractère agressif de ce dernier à la seule enceinte des aéroports. En la matière, nous nous devons de respecter les objectifs ambitieux définis par le Conseil consultatif pour la recherche aéronautique en Europe (ACARE) : de 2000 à 2020, baisse de 50 % des émissions de CO2 et de la pollution sonore et diminution de 80 % des émissions de monoxyde de carbone. Déjà, l’A380 consomme trois litres aux cent kilomètres par passager – quand la moyenne mondiale s’élève à cinq litres – et deux litres pour les vols d'A 380 « Air Austral » qui embarqueront 840 passagers.

De tels progrès ne sont pas le seul fait des avionneurs, mais de l’ensemble des acteurs du transport aérien, notamment des motoristes. Si Airbus ou Eurocopter travaillent à la diminution du poids des avions – d’où le développement des matériaux composites et à la réduction de la traînée aérodynamique ou à l’intégration des nouveaux concepts de moteurs, les motoristes réfléchissent quant à eux à l’utilisation des biocarburants de deuxième et troisième générations. En ce qui nous concerne, nous suivons les recherches faites sur les algues – leur culture occupant peu d’espace et utilisant des eaux usées – ou les salicornes –, les pétroliers devant prendre le relais le moment venu afin d’organiser la production sur une grande échelle.

Par ailleurs, les moteurs classiques évoluent : Pratt & Whitney a ainsi élaboré un moteur comprenant un boîtier d’engrenage permettant de ralentir la vitesse de rotation de la grande roue à l’avant de l’avion (la soufflante), ce qui réduit le bruit et augmente l’efficacité du moteur tandis que CFM, société issue de l’association de SAFRAN et General Electric, travaille sur un moteur dit Leap 56 permettant de réduire également la consommation de 12 % à 15 % par rapport aux moteurs actuels. Des moteurs révolutionnaires sont également étudiés tel l’open rotor, moteur sans nacelle dont les «  hélices »  sont fixées sur le compresseur ou la turbine, mécanisme permettant une diminution de la consommation de 25 % à 30 %. Les obstacles résultant de l’absence de nacelle – bruit, risques en cas de destruction de l’hélice – peuvent être surmontés, ce qui peut, peut-être, conduire à de nouvelles formes d’avions, notamment pour l’empennage arrière. Enfin, dans un avenir nettement plus lointain, le développement du moteur à hydrogène et des piles à combustible permettrait de s’affranchir partiellement au moins des carburants générateurs de CO2, notamment pour les moteurs auxiliaires.

Le grand emprunt participera au financement des nouvelles générations d’avions et d’hélicoptères utilisant ces nouveaux concepts. Motoristes, équipementiers, avionneurs, c’est toute la chaîne du transport aérien, de Latécoère à la Sogerma en passant par l’ensemble de leurs sous-traitants, qui bénéficiera de ses retombées – si j’ose dire. Les pôles de compétitivité – dont ceux qui sont en relation avec le secteur de l’aéronautique – seront également impliqués. La diminution des dépenses d’énergie est l’affaire de tous : lorsqu’Air France décide d’utiliser un A380 pour les vols reliant Paris à Tokyo et, ainsi, de remplacer un B777 et un A341, la consommation passe de cinq à trois litres aux cent kilomètres par voyageur. Les compagnies aériennes savent que les économies d’énergie sont fondamentales pour optimiser les coûts et mieux gérer les émissions de CO2.

Les aéroports sont des lieux de consommation d’énergie. Pourquoi les avions ne seraient-ils pas tractés sur la voie d’accès aux pistes d’atterrissage, dite taxiway, par des chariots électriques ? Ne pourraient-ils pas également bénéficier d’une alimentation électrique pour toutes les fonctions mues par le moteur auxiliaire, lorsque l’avion est à l’arrêt ? Ne serait-il pas possible de limiter les attentes sur les taxiways?

Enfin, les États jouent un rôle très important en matière de développement durable, en particulier à travers la réglementation et les incitations fiscales. Ces métiers étant mondiaux, la règlementation doit être mondiale, afin de préserver la compétitivité de nos produits.

M. le président Christian Jacob. Je vous remercie pour ce tour d’horizon très complet.

M. Philippe Duron. C’est un plaisir d’entendre l’excellent président de la SNCF que vous fûtes naguère, monsieur Gallois, car vous étiez aussi convaincant en faisant l’apologie du rail et de la grande vitesse que vous l’êtes désormais en tant que président d’un grand groupe aéronautique mondial dans lequel vous avez ramené la sérénité après les turbulences – passez-moi l’expression – qu’a connues sa gouvernance.

Le transport aérien est aujourd’hui confronté à un grand nombre de défis environnementaux, économiques, industriels ou d’aménagement du territoire. Compte tenu des problèmes de change auxquels vous avez fait allusion, mais aussi des difficultés de financement de l’A400M ou de celles qui affectent Emirates, compagnie qui a commandé 58 exemplaires de l’A380, des délocalisations ne sont-elles pas à craindre ?

Par ailleurs, les compagnies aériennes – nous venons d’apprendre ce matin que Japan Airlines venait de déposer son bilan – ne souffrent-elles pas d’une modification des modèles économiques – que l’on songe à la concurrence des low cost ou du train à grande vitesse ? Quels sont, parmi ces modèles économiques, ceux qui vous semblent les plus pertinents ?

M. Serge Grouard. Si la création d’EADS a répondu au mouvement de concentration de l’industrie américaine, quel bilan peut-on tirer de la consolidation de ce groupe étant entendu que des difficultés se sont fait jour aux États-Unis suite aux processus de concentration et de fusions ?

Par ailleurs, vous avez décrit des perspectives très intéressantes de réduction d'émissions de gaz à effet de serre. Pourriez-vous les préciser, et nous dire si l'objectif fixé pour 2020 vous paraît accessible ?

Les satellites sont un très utile outil d'analyse et de suivi environnemental mais, bien que la France soit une grande nation spatiale, elle semble paradoxalement avoir à ce sujet une attitude frileuse, tout comme l'Europe, Si vous deviez établir un programme satellitaire, quelles seraient vos priorités ?

S'agissant de transport militaire A400M, on annonce régulièrement des délais de fabrication supplémentaires, au point que le retard est de trois ans, avec des surcoûts estimés à quelque 10 milliards d'euros. Quelles erreurs ont été commises qui expliquent cette situation et quelle issue trouvera-t-on ? Nos forces armées, équipées de Transall à bout de souffle, ne peuvent en effet se passer de cet aéronef.

M. André Chassaigne. La grande qualité de votre exposé nous a rappelé heureusement les explications que vous nous donniez lorsque vous présidiez la SNCF. Vous avez mentionné le respect des normes environnementales ISO ; pouvez-vous nous donner une évaluation du bilan environnemental global par produit de votre entreprise ?

Le développement durable, c'est aussi l'emploi. Vous avez évoqué la création de 5 000 emplois en France, mais qu'en est-il de la sous-traitance ? Y a-t-il une évolution vers des achats hors d'Europe, avec toutes les conséquences environnementales et sociales que cela entraînerait ? Considérant les objectifs de réduction des gaz à effet de serre que se sont fixé les États, avez-vous des objectifs précis à ce sujet ?

Quand pourra-t-on utiliser les carburants à base d'algues dont vous avez parlé ? Plus largement, quelle est votre stratégie de recherche ? Vous avez dit consacrer trois milliards d’euros par an à la recherche-développement : s'agit-il de recherches menées en interne ? Quels sont vos liens avec les institutions de recherche publique et avec les collectivités territoriales par le biais des pôles de compétitivité ?

Considérez-vous le transport ferroviaire et le transport aérien comme en compétition ou complémentaires ? Quel regard portez-vous sur la nécessaire évolution du système de transport en France et, plus largement, en Europe ? Notre collègue Yves Cochet, qui a choisi de se rendre en train à la Conférence de Copenhague a mis 17 heures à l'aller et 22 heures au retour... Quelques progrès peuvent sans doute être faits...

M. Louis Gallois. J'ai senti, monsieur Duron, une pointe de perfidie dans la manière dont vous m'avez décrit prompt à défendre le train un jour, l'avion le lendemain... Mais je continue de considérer le TGV comme une avancée remarquable. S'agissant des éventuelles délocalisations liées au taux de change euro/dollar, sachez que pour le moment 97 % des employés d'EADS travaillent dans les quatre pays d'origine de la société, alors même que nous exportons 75 % de notre production hors de ces quatre pays. Peu d'entreprises sont dans cette situation, qui n'est d'ailleurs pas tout à fait normale. Notre objectif pour 2020 est que 20 % de nos effectifs soient installés hors d'Europe, et donc 80 % en Europe ; dans le même temps, nos comptons doubler notre chiffre d'affaires. Il s'agit donc de partager une croissance qui sera forte, et pas de quitter l’Europe.

M. André Chassaigne. Et qu'en est-il des sous-traitants ?

M. Louis Gallois. Nous leur imposons la discipline qui nous est imposée, en les payant en dollars – ainsi, c'est dans cette devise que nous payons Latécoère ou Thales. Ce faisant, nous reportons sur eux une partie du risque de change, ce qui peut en cascade pousser certains à transférer une partie de leurs activités hors d'Europe. L'euro est la seule monnaie forte dans le monde. Certains s'en félicitent au motif que cela réduit le coût de nos importations ; je considère pour ma part que cette situation constitue une menace pour les entreprises européennes exportatrices. Le Président de la République l’a souligné dans son discours de Cholet : « Si l'on fabrique en zone euro et qu'on vend en zone dollar, avec le dollar qui chute et l'euro qui monte, comment voulez-vous compenser le déficit de compétitivité ? ». Je puis le confirmer : le taux de change euro/dollar nous a coûté 3 milliards d'euros de résultat annuel en trois ans, que nous devons regagner d'une manière ou d'une autre. Imaginez l'avantage compétitif que cela donne à Boeing !

J'ai eu l’occasion d’évoquer cette question avec M. Jean-Claude Trichet, président de la Banque centrale européenne, et avec le commissaire européen Joaquin Almunia lorsqu'il était chargé des affaires économiques et monétaires. Je regrette que le G7 et le G20 n’aient pas abordé les évolutions monétaires. Dès que le yen s'est apprécié face au dollar, les autorités japonaises ont demandé que le problème soit abordé au G7 ou au G20. Je souhaite que l'Europe exige que la question soit traitée dans ce cadre ; cela se fera peut-être, des commissaires européens commencent à s’exprimer sur ce sujet. Comment ne pas parler de la loi de la jungle monétaire qui règne actuellement, alors qu'elle a un impact direct sur nos industries ? Cela étant, je vous l'ai dit, nous avons été, en 2009, le meilleur soutien du réseau de sous-traitance aéronautique en France, après avoir tiré leur croissance depuis 10 ans.

Vous m'avez interrogé, monsieur Grouard, sur le bilan de la consolidation de l'entreprise. Il y a eu des turbulences, vous le savez, ce qui m'a valu de me retrouver à la tête de l'entreprise, mais globalement, une grande partie des problèmes sont derrière nous. Certes, il peut exister une compétition entre les sites de production, comme ceux de Hambourg et de Toulouse, mais il pourrait en exister de semblables entre deux sites situés dans un même pays. C'est humain, et cela ne disparaîtra pas par enchantement ; les syndicats défendent leur site respectif, et c'est normal. À la direction de l'entreprise, la consolidation est faite.

Ce qui me préoccupe, c'est le risque de perte de repères des personnels. Nous avons fait procéder à une enquête qui a révélé un attachement à l'entreprise et une grande fierté à propos des produits, mais qui a montré aussi que la politique de ressources humaines n'était pas à la hauteur. Il nous faut savoir recréer des repères dans une entreprise et des équipes de plus en plus européennes - un Britannique peut avoir un chef espagnol qu’il voit très rarement. De cette internationalisation dépend l'avenir d'EADS, car elle conditionne son efficacité, mais nous devons établir des repères et de la proximité.

Monsieur Chassaigne, nos objectifs sont ceux qu'a fixés l'ACARE. Il s'agit, d'ici à 2020, de réduire le bruit et les émissions de gaz à effet de serre de moitié et de 80 % les émissions d'oxyde d'azote. Ces objectifs sont-ils réalistes ? Ils sont ambitieux. Ils seront atteints pour les matériels nouveaux ; pour la moyenne des flottes, c'est une autre affaire et tout dépendra du rythme de renouvellement des avions, notamment de la gigantesque flotte américaine, la plus ancienne du monde.

Dans le domaine spatial, ni notre entreprise ni la France ne sont particulièrement frileuses. Spot Image est une activité importante pour nous et nous investissons massivement dans ce domaine. Nous sommes un des principaux fournisseurs d'images satellitaires de Google. Quant à l'agriculture française, elle n'est pas la dernière à utiliser nos capacités satellitaires. L'Europe n'est pas en retard dans ce domaine. C'est un marché sur lequel nous devons être présents et offensifs.

Il existe trois catégories de satellites : d'observation, de navigation – comme pour le système Galileo – et de télécommunications. Tous les satellites sont de plus en plus performants. Dans le cadre du grand emprunt, nous avons demandé à réfléchir à des plates-formes moins consommatrices d'énergie. Nous souhaitons ainsi prolonger la vie des satellites et, je l'ai dit, éviter qu'à l'avenir leurs débris ne polluent l'espace. Pour les satellites d'observation, nous travaillons avec une optique de plus en plus fine. Les applications militaires trouvent, cinq ou dix ans après qu'elles ont été mises au point, des déclinaisons civiles extrêmement performantes. Pour les satellites de navigation, une précision toujours plus grande est bien sûr recherchée, avec des constellations aussi réduites que possible.

La fabrication de l’A400M accuse des retards, peut-être parce que le calendrier initial, qui prévoyait une durée de construction de 6 ans et demi, n'était pas réaliste - et comme il n'était pas réaliste, nous ne le réaliserons pas... Pouvait-on deviner, en 2003, qu'il en irait ainsi ? Ce n'est pas évident, car on n'avait pas alors une estimation claire des défis techniques, dont certains sont apparus au cours du développement de l'appareil.

Vous avez parlé de surcoûts. Je ne confirme aucun chiffre. J'ai demandé la semaine dernière l'ouverture d'une négociation ; je ne dis pas que j'ai été entendu, mais elle s'engage jeudi. Nous l'abordons avec la volonté d'aboutir. Il serait absurde que l'on ne trouve pas d'accord alors que l'avion vole, qu'il correspond à un besoin, que, même si son prix augmente, il restera moins cher que ses concurrents et qu'il créera 40 000 emplois en Europe.

Pour l'avion, la concurrence du train se fait sentir jusqu'à 1 500 kilomètres. Au-delà, l’avion est pratiquement incontournable : vous admettez vous-même, monsieur Chassaigne, que 22 heures de voyage pour revenir de Copenhague, c'est long... Cela étant, il existe une complémentarité entre les deux modes de transport, et l'on ne va pas supprimer l'avion pour les distances inférieures à 1 500 kilomètres, car les besoins des voyageurs sont différents. On préférera venir de Marseille à Paris en avion si l'on doit ensuite s'envoler de Roissy, et en train si l'on doit rester au centre ville.

Il faudra attendre dix ou quinze ans pour disposer de carburant à base d'algues. Mais, déjà, nous testons avec certaines compagnies comme Qatar Airways la propulsion au gaz liquide et aux biocarburants.

Les 3 milliards d’euros consacrés chaque année à la recherche-développement partent en grande partie vers la sous-traitance. Nous sous-traitons parfois, faute de capacités internes, et nous sous-traitons peut-être trop. Il peut y avoir des fuites de savoir par le biais des sous-traitants : il faut garder un équilibre prudent.

M. Jean-Marie Sermier. Je vous remercie pour vos propos clairvoyants et optimistes. Vous avez évoqué la déconstruction des avions, une activité importante qui permet à la fois de recycler des matériaux, d'éviter que des avions en fin de vie n'encombrent le bout des pistes d'aérodromes lointains et de valoriser des aéroports sous-utilisés. Avez-vous des projets précis dans ce domaine ?

Vous avez aussi évoqué le développement du moteur à hydrogène ; vous êtes-vous, à ce sujet, rapproché du pôle « Véhicule du futur » qui travaille aussi à un projet de stockage d'hydrogène embarquée dans les automobiles ?

Enfin, on a constaté l'ampleur des difficultés des sous-traitants dans le secteur automobile en temps de crise. EADS signe-t-elle avec ses sous-traitants des contrats pluriannuels ?

M. Jean-Paul Chanteguet. Vous avez rappelé que le transport aérien contribue pour 2 % aux émissions de gaz à effet de serre et qu'il y contribuera à hauteur de 3 % en 2050 si on laisse faire. Si l'on en croit les experts du GIEC, ces 3 % seraient vraiment trop élevés pour permettre d'atteindre les objectifs généraux. Ne faut-il pas, alors, envisager de taxer le transport aérien ?

Quelle sera selon vous l'évolution du trafic aérien ? Avez-vous intégré ce facteur dans votre estimation des futures émissions de gaz à effet de serre ?

Pouvez-vous par ailleurs nous indiquer quelle part de votre budget de recherche-développement est consacrée au développement durable ?

M. Louis Gallois. Cette part est de 80 % pour Airbus et Eurocopter et d’au moins 70 % pour EADS globalement.

M. Jean-Paul Chanteguet. Enfin, vous avez indiqué que la fabrication d'avions en matériaux composites posait des problèmes spécifiques. Pourriez-vous nous en dire plus ?

M. Alain Gest. Je vous remercie pour la franchise réitérée de vos propos relatifs au taux de change euro/dollar ; espérons que vous serez entendu. Vous avez dit que EADS entend contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, notamment en fabriquant des avions en matériaux composites, ce qui contribue aussi à ce que votre groupe continue d'embaucher. Député de la Somme, je sais l'inquiétude du personnel de votre filiale Aerolia, qui craint de voir une partie de la production du site de Méaulte transférée dans un pays non européen. Qu'en est-il ?

Mme Marie-Line Reynaud. Pourriez-vous nous donner des précisions sur le programme européen SESAR (Single European Sky Air traffic management and Research) ?

L'idée d'avions supersoniques est abandonnée pour l'instant, avez-vous dit ; cela signifie-t-il vraiment qu'EADS n'a rien dans ses cartons à ce sujet ?

M. Christophe Priou. La restructuration du site de Nantes-Saint-Nazaire est achevée mais l'inquiétude des personnels, des syndicats et des sous-traitants ne faiblit pas, puisque même en délocalisant une partie des productions, ils se trouvent en concurrence avec des entreprises qui délocalisent encore un peu plus dans des pays où le dumping est la norme. Qu'en sera-t-il ?

M. Philippe Plisson. Comment expliquez-vous l'échec d'Astrium face à un concurrent de moindre envergure dans l'appel d'offres lancé pour la première tranche de la constellation satellitaire destinée au système européen Galileo ? Ensuite, si le marché que vous avez passé avec la Chine pour Airbus comprend effectivement un transfert de technologies, n'est-ce pas un marché de dupes qui privilégie une vision de court terme au détriment de l'avenir ? Enfin, étant donné son impact environnemental, est-il raisonnable de perpétuer des transports aériens intérieurs quand ils doublonnent avec le rail ?

M. Yves Albarello. Eurocopter compte en France deux unités de production, l'une à Marignane, l'autre à La Courneuve, qui est associée à un site d'essais de pales situé au Bourget. Si la première usine peut s'étendre, il sera difficile de moderniser la seconde. Quel sera son avenir ? Sur un plan plus général, êtes-vous optimiste quant au marché des hélicoptères civils et militaires ?

M. Jean-Luc Pérat. Vous avez demandé l'ouverture de négociations sur l'avenir de l'avion de transport militaire A400M, mais nul ne sait comment elles se termineront, ce qui n'est pas sans inquiéter le personnel. Les dépassements de coûts sont problématiques, et votre souhait est que les États européens futurs clients d'Airbus mettent la main à la poche. La France n'y est pas opposée, l'Allemagne est relativement frileuse. Quelle stratégie mettrez-vous en œuvre pour assurer l’avenir de ce programme ?

Comment concilier compétitivité et préservation du moral des personnels ? Entendez-vous définir une politique d'accompagnement pour gérer le stress ? On sait ce qu'il est advenu chez France Telecom ; comptez-vous anticiper les difficultés éventuelles ?

Dans un autre domaine, quels partenariats avez-vous définis avec les universités françaises, et quelles sont les raisons qui vous ont conduit à ouvrir un centre de recherche à Bangalore en Inde ?

M. Philippe Meunier. Quelle chance vous avez, monsieur Gallois, de pouvoir parler à M. Trichet ! Pour notre part, nous ne le pouvons plus depuis que le traité de Maastricht a rendu la Banque centrale européenne (BCE) indépendante – c'est un des éléments qui font que je ne regrette pas mon « non » à ce traité, dans le sillage de Philippe Séguin.

S'agissant des avions de transport militaire, chaque pays souhaitant des modifications qu'il estime nécessaires, ce qui entraîne des surcoûts considérables, ne pourrait-on revenir à des productions nationales ?

Vous avez parlé de limiter le bruit des avions à la seule emprise des aéroports. Quand en sera-t-il ainsi ?

M. Yanick Paternotte. En 2005, l'Union européenne évoquait le doublement du trafic aérien à l'horizon 2020 et le renouvellement des flottes aéronautiques ; aujourd'hui, on marque un peu le pas, et le développement du trafic se fait plutôt dans la zone Asie-Pacifique. À cet égard, EADS n'a-t-il pas pris un risque de perte de données stratégiques à très court terme en vendant à la Chine des avions de la famille de l’A320 et en y installant pour cela une chaîne d'assemblage ?

Par ailleurs, la plaquette d'EADS qui nous a été distribuée fait mention de l'avion-cargo A380F ; je pensais que sa fabrication avait été abandonnée faute de commandes suffisantes. Qu'en est-il ?

M. Louis Gallois. Pour ce qui est de la déconstruction d’avions, monsieur Sermier, je vous donne l’exemple de la plateforme de Tarbes. Nous soutenons les entreprises qui s'y intéressent, car ce n'est pas une activité simple : il faut s'équiper pour la mener, puis faire qu'elle soit rentable.

Nous travaillons avec l'industrie automobile – le directeur technique d'EADS vient de General Motors, où il était spécialiste des moteurs. Nous soutenons la recherche en formule 1. Nous travaillons à la mise au point d'un moteur à explosion pour les hélicoptères, beaucoup moins consommateur d'énergie que ne le sont les moteurs à turbine.

Nous signons, bien sûr, des contrats pluriannuels avec l'essentiel de nos sous-traitants – la nature de nos activités l'exige. Cela veut dire que lorsque notre production fléchit, nous jouons en quelque sorte un rôle d'amortisseur. Nous devons veiller à éviter l'augmentation excessive de nos stocks ; mais lorsque, à partir d'octobre, nous avons dû réduire notre cadence de production de 36 à 34 A320 par mois, nos sous-traitants ont continué de nous approvisionner et nos stocks ont gonflé.

Nous considérons, monsieur Chanteguet, que le trafic aérien continuera de croître de 4,5 % par an, non pas en Europe ni aux États-Unis mais en Chine ou en Inde, où il occupe une part très faible du trafic total. Au moment le plus fort de la crise, le transport aérien augmentait de 15 % par an en Chine ! Autant dire que les émissions de CO2 seront largement le fait des marchés émergents. Notre objectif est évidemment de maintenir la contribution du transport aérien à ces émissions aussi proche que possible des 2 % actuels, et moins si cela se peut.

Vous avez évoqué l'hypothèse de taxer le transport aérien. Les compagnies aériennes sont nos clientes et je souhaite qu'on leur évite ce que M. Spinetta avait qualifié de « double peine » : le prix du carburant monte en flèche, a-t-il fait observer, et l’on veut nous taxer ! Au moment de prendre toute décision fiscale, il faut veiller à ce qu'elle ne place pas l'industrie française et européenne en situation défavorable par rapport à ses concurrents sur le marché mondial.

Le démantèlement des avions en matériaux composites pose des problèmes spécifiques car si l'on peut récupérer du titane ou de l'aluminium presque indéfiniment, on ne sait ce qu'il en est pour ces matériaux. Nous en sommes encore au stade de la recherche.

Sachez, monsieur Gest, que le chiffre d'affaires de nos sous-traitants a augmenté de 7 % en 2009 dans le bassin de Méaulte, où Aerolia a créé 47 emplois. Nous projetons de transférer une partie de la production en Tunisie, c'est exact. En contrepartie, nous investissons de 150 à 200 millions d’euros à Méaulte pour y produire des matériaux composites, et la pérennité du site est assurée pour trente ans. Des évolutions sont nécessaires ; il n'est pas anormal que des activités banales soient transférées en Tunisie et que, dans le même temps, le développement des composites se fasse sur l'excellent site de Méaulte qui produit, je le rappelle, l’ensemble des pointes-avant des avions Airbus.

Vous m'avez interrogé, madame Reynaud, sur le programme européen SESAR. Il tend à la refonte complète du trafic aérien en Europe ; un programme de modernisation de même nature est en cours aux États-Unis. Il s'agit de réorganiser les routes aériennes et de rendre la gestion du trafic plus économique et plus fluide. Le système actuel est d'une complexité extrême. La réorganisation provoque l’inquiétude des contrôleurs aériens, dont une partie du travail sera informatisée.

J'ai un attachement sentimental à l'avion supersonique mais je me sens bien seul... Je reste pourtant persuadé que l'on parviendra un jour à résoudre les problèmes posés par le bang supersonique et la pollution de l'atmosphère qui empêchent la fabrication d'un successeur du Concorde, nécessaire pour rendre plus rapide la traversée du Pacifique. Je considère comme une régression le fait d'être redescendu à Mach 0,8 après avoir atteint Mach 2,2. À l’inverse, il n'est pas impossible que l’on réduise un jour progressivement de 10 % la vitesse des avions court courrier pour réduire les consommations de carburant ; ce serait presque insensible pour les voyageurs et cela permettrait une diminution non négligeable de la consommation d'énergie. Après tout, on peut faire pour les avions ce que l'on a fait pour les automobiles sur les autoroutes.

Effectivement, monsieur Priou, le marché des matelas d'isolation n'a pas été attribué à Daher. La décision n'est pas encore prise, mais il est exact que les fabricants européens ne sont pas parvenus à aligner leurs prix sur ceux de la concurrence. Cela aura un impact pour l'emploi d'une cinquantaine de personnes employées à l'usine de la zone industrielle de Brais et chacun devra travailler à trouver une solution convenable ; il y a suffisamment d'activités aérospatiales à Saint-Nazaire pour que l’on y parvienne. En ce qui concerne le Belly Fairing de l’A320, je rappelle que la majorité des emplois sont au Maroc

Les sous-traitants sont inquiets car ils ont une moindre visibilité des marchés que nous et ils ont le sentiment que nous allons leur annoncer les mauvaises nouvelles au dernier moment. Nous prenons nos décisions le plus tard possible, c'est vrai. Toutefois, nous entretenons avec eux un dialogue permanent et, encore une fois, nous avons soutenu le réseau français des sous-traitants aéronautiques en 2009, au moment où d’autres constructeurs traversaient des difficultés de charge.

Vous m'avez demandé, monsieur Plisson, pourquoi nous n'avons pas remporté l'appel d'offres lancé pour la fourniture de satellites destinés au système de radionavigation Galileo ; je vous le dirai quand le débriefing aura eu lieu. Nous devons maintenant gagner le contrat portant sur la seconde tranche de satellites. Deux entreprises avaient été présélectionnées : Astrium et OHB. Cette dernière a emporté la première tranche, j'espère que nous serons capables d'avoir la seconde.

J'en viens, pour répondre à M. Plisson et à M. Paternotte, à nos relations avec la Chine, qui représente 20 % du marché mondial. Notre part de ce marché est passée de 10 % à 35 % parce que nous y avons investi et parce que nous avons noué des relations avec l'industrie locale – il ne faut pas se faire d'illusions à ce sujet. Nous avons créé une ligne d'assemblage en Chine ; Embraer en a fait autant. L'assemblage final concerne la famille des avions A320 qui datent de début des années 1990, et la ligne d'assemblage n'est pas ce qui se fait de plus affûté en matière technologique.

M. Yanick Paternotte. La direction d'Alstom a tenu le même discours à propos du TGV, expliquant avoir vendu à la Corée des appareils anciens. Cela ne me convainc pas, et je crains une fuite de compétences technologiques.

M. Louis Gallois. Souhaiteriez-vous que nous soyons absents du marché chinois ? Les Chinois ont envoyé un homme dans l'espace sans avoir eu besoin d'acheter un de nos lanceurs : ils l'ont fait seuls. Ils se placeront dans toutes les hautes technologies, et le fait d'avoir monté une chaîne d'assemblage en Chine ne change rien. Les étudiants chinois sont dans les meilleures universités américaines. Safran, qui propose son moteur à la Chine pour son nouveau court courrier, sait qu'elle construira des moteurs ; nous savons de même qu'il y aura un avion commercial chinois en 2015 ou 2016.

M. Yanick Paternotte. Sans doute même avant !

M. Louis Gallois. En 2015 peut-être. Sur un plan général, il ne faut pas penser que nous transférons des technologies aux Chinois, ils atteignent progressivement notre niveau. Ce qui leur manque encore, c'est la reconnaissance de la qualité du service à l'égard des compagnies aériennes. Des relations de confiance doivent s'établir, car après l’achat d’un avion, elles durent trente ans et le fournisseur doit être capable d'apporter une solution à tous les problèmes de ses avions dans le monde entier. Sur un plan général, on ne peut imaginer priver la Chine de l'accès aux technologies : elle les maîtrise ou les maîtrisera par ses propres moyens qui sont considérables.

Nous avons deux sites Eurocopter en France, monsieur Albarello, et pour l'instant nous travaillons dans les deux ; nous n'envisageons pas de changement fondamental de l'organisation industrielle.

J'ai parlé, monsieur Pérat, de l'enquête conduite sur état d'esprit des personnels. Il ressort de ses conclusions que le facteur humain doit prendre une place plus importante dans la gestion de nos entreprises. Nous sommes soumis à de très fortes pressions, mais nos dirigeants doivent prendre le temps de s'occuper des hommes et des femmes qu'ils encadrent. Aussi nos 4000 dirigeants ont-ils reçu l'analyse de leur service, et ils ont été invités à mettre au point avec leurs équipes un plan d’actions. Nous allons renforcer la formation des managers en ce sens et nous attacher à améliorer la communication interne. Ces chantiers sont ouverts, mais cela prendra du temps. L'enquête nous a apporté un élément très positif en soulignant l'attachement à l'entreprise et la fierté des produits fabriqués. C'est un levier d'action puissant, mais il faut renforcer la prise en compte de la dimension humaine dans l'entreprise.

Je ne pense pas, monsieur Meunier, que l'on puisse substituer des programmes nationaux à des programmes européens d'une telle ampleur; ils ne peuvent plus être financés au niveau national. En revanche, ils doivent être gérés efficacement. À cet égard, même si l’A400M n'est pas l'archétype du succès, le fait qu'il soit géré par un seul organe, l'Organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAr) et fabriqué par une seule entreprise maître d’œuvre (EADS), est un progrès.

Pour ce qui est de la limitation du bruit aux aéroports, je ne puis vous donner d'échéance, mais vous aurez constaté à quel point la carte du bruit aux abords s'est déjà rétrécie.

La fabrication de l'A380-fret a été reportée mais elle n'a pas été abandonnée, monsieur Paternotte ; nous la reprendrons quand nous aurons des clients. Dans l'intervalle, nous devons livrer l'A380 passagers, c'est sur cette version de l'aéronef que nous concentrons nos efforts.

M. le président Christian Jacob. Je vous remercie, monsieur le président, pour la précision et la franchise de vos réponses.

—fpfp—

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mardi 19 janvier 2010 à 17 h 15

Présents. - M. Yves Albarello, M. Maxime Bono, M. Jean-Paul Chanteguet, M. André Chassaigne, M. Raymond Durand, M. Philippe Duron, M. Yannick Favennec, M. Alain Gest, M. Serge Grouard, M. Christian Jacob, M. Pierre Lang, M. Jacques Le Nay, M. Jean-Pierre Marcon, M. Philippe Meunier, M. Yanick Paternotte, M. Jean-Luc Pérat, M. Philippe Plisson, M. Christophe Priou, Mme Marie-Line Reynaud, M. Jean-Marie Sermier

Excusés. - M. Jérôme Bignon, M. Stéphane Demilly, M. Joël Giraud, Mme Fabienne Labrette-Ménager, Mme Catherine Quéré