La commission a auditionné M. Augustin de Romanet, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations.
M. le président Serge Poignant. M. de Romanet, je vous souhaite la bienvenue. Lorsque nous vous avions auditionné le 9 février dernier, en compagnie de M. Michel Bouvard, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, nous étions convenus de nous revoir. Notre Commission est ainsi dans son rôle puisque l’article L. 518-2 du code monétaire et financier dispose que la Caisse « est placée, de la manière la plus spéciale, sous la surveillance et la garantie de l'autorité législative ».
Au-delà de son action en faveur du logement social, que nous connaissons bien, la CDC est aujourd'hui un acteur majeur de l'intervention publique en faveur des entreprises et des territoires et il est nécessaire que la représentation nationale comprenne bien ses interventions, dont la loi Châtel de 2008 a précisé les conditions en la définissant comme un « investisseur de long terme » contribuant « au développement économique local et national » ainsi qu’à celui « des entreprises ».
Les priorités identifiées en 2007 dans son plan stratégique portaient sur le logement, les universités, les PME et le développement durable. L'actualité montre qu’elle a été amenée à s'investir dans d'autres secteurs, comme la Poste ou l'économie numérique. Pourriez-vous précisément nous rappeler brièvement les secteurs dans lesquels elle intervient et les engagements financiers correspondants ?
À propos de l’entrée au capital de La Poste, quel rôle comptez-vous jouer dans la stratégie du groupe ? Quelle est votre analyse quant à la présence postale territoriale, à laquelle notre Commission est particulièrement sensible ?
Comment intervenez-vous par ailleurs dans la gestion du fonds national pour la société numérique ? Comment votre action s'articule-t-elle avec celle du Commissaire général à l'investissement et avec celle de l’ARCEP, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes ?
S'agissant des entreprises, quel est le sens des interventions du FSI, le fonds stratégique d'investissement, en faveur des filières d'avenir ? Quid du lancement du fonds méditerranée ?
Enfin, vous vous êtes engagé à représenter 10 % des capacités de production d'énergie renouvelable prévues par la programmation pluriannuelle des investissements, soit 500 MW en 2010 et 1000 MW en 2020. Où en êtes-vous ?
M. Augustin de Romanet, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations. Je tiens tout d'abord à vous remercier de vous être mobilisés au moment du débat sur le livret A. Lorsque vous m'aviez auditionné, le 9 février dernier, en compagnie de Michel Bouvard, la situation était d'autant plus menaçante que l'on ne mesurait pas bien la portée et l'importance de l'accroissement des encours du livret A.
Si j'ai alors considéré qu'il était de mon devoir d'alerter la représentation nationale sur le fait que le livret A est un bien public, c'est parce que j'en mesure l'utilité sur le territoire et parce que les encours explosent depuis qu’en 2004 la conjonction du plan national de rénovation urbaine et du plan de cohésion sociale a entraîné un accroissement spectaculaire du flux annuel de prêts au logement social et à la politique de la ville. Auparavant, le montant des nouveaux prêts était chaque année de 3 à 4 milliards d'euros, soit autant que les remboursements, et le stock des prêts sur le livret A demeurait donc stable. Or, en 2010, nous avons prêté 16,1 milliards d'euros au logement social et à la politique de la ville, soit 3,7 fois plus qu'en 2004. Mais les prêts ayant une durée de 40 ans, et même de 50 ans pour le foncier, le montant des remboursements n’a que peu crû et le stock s'accroît donc chaque année d’une dizaine de milliards d’euros. Avec une ressource du livret A et du LDD centralisée de 170 milliards l'an dernier et un stock de prêts habitat-ville appelé à passer dans les années qui viennent de 110 à 160 milliards, nous risquons de nous trouver, d'ici quatre ou cinq ans, en pénurie de ressources.
Au moment du débat sur la centralisation, beaucoup ne comprenaient pas les craintes de la Caisse des dépôts vis-à-vis d'un système qui fonctionnait de manière satisfaisante depuis trente ans. Je confirme donc que la représentation nationale a des motifs de se préoccuper de la gestion de ce bien public qu’est le livret A parce que la construction de logements sociaux a explosé depuis 2004-2005, sans que d’ailleurs cela suffise à régler les problèmes de logement de nos concitoyens. Pour compenser la décohabitation et le départ de plus en plus précoce des enfants du domicile familial, on estime que, pour maintenir le nombre des habitants d'une commune, il faut accroître chaque année de 5 à 10 % le nombre des logements.
Grâce aux prêts sur fonds d'épargne, nous avons aidé l'an dernier à financer 130 000 logements sociaux – c’est un record – et, bien que nos prévisions soient à l'avenir de 90 000 logements par an, nous estimons que l'encours, c'est-à-dire le stock des prêts sur livret A, va passer de 110 milliards cette année à 160 milliards en 2016.
Le Gouvernement envisageait, dans le projet de décret, de plafonner à 3 % la collecte annuelle au profit de la CDC, toute la part au-delà allant au système bancaire. Ce plafonnement me paraissait mortifère et je me réjouis que le Gouvernement y ait renoncé à la suite du débat qui s'est instauré parce que la représentation nationale s'est saisie de ce sujet. Je crois que le décret qui a finalement été pris préserve l'avenir dans la mesure où si nous nous apercevons, en 2014-2015, que le financement du logement social est menacé par une absence de ressources, il sera possible d’utiliser de nombreux leviers, comme par exemple d'augmenter le plafond du livret A pour alimenter le financement du logement social.
Dès lors que la Commission des affaires économiques avait été saisie au fond du projet de loi de modernisation de l'économie, il me semblait nécessaire de faire aujourd'hui devant elle le point à ce propos.
Mais, vous l'avez dit monsieur le président, la présente audition porte sur les autres activités de la Caisse des dépôts et je vais m'efforcer de répondre aux questions que vous m'avez posées.
Je rappelle en préambule qu’en 2010 nos résultats ont été élevés, avec un total de 2,15 milliards d'euros pour l'ensemble du groupe. Hors éléments exceptionnels, notre résultat récurrent – 1,8 milliard – est le plus élevé de l'histoire, de même que notre niveau de capitaux propres, qui atteint 20,2 milliards. On peut donc dire que la Maison a effacé la crise.
La Poste est un sujet d'actualité puisque nous allons participer demain à notre premier conseil d'administration de cet établissement.
Je tiens tout d'abord à vous rassurer quant au maintien des missions d'intérêt général et de service public dans le cadre de cette opération. Ces missions ont été précisément codifiées par la loi du 9 février 2010, La Poste et l'État ayant des obligations respectives à ce titre. Par ailleurs, La Poste s'est engagée à maintenir ses points de contact sur l'ensemble du territoire. Ce réseau de proximité est pour elle une force et un atout. Je sais que vous y êtes attentifs et nous avons créé les conditions pour que la Caisse des Dépôts soit pleinement associée à La Poste dans le respect de ses engagements.
Nous avons négocié notre entrée au capital en veillant à ne jamais nous trouver en divergence avec les missions d'intérêt général de La Poste. Certains ont pu penser que nous nous étions montrés rugueux dans la négociation de nos conditions d'entrée au capital et que nous avions tiré le prix vers le bas. Mais je l'ai fait tout simplement parce que je ne veux me trouver à aucun moment en situation de dire au président de La Poste que la rentabilité exige de supprimer davantage de points de contact ou d'emplois. J'ai toujours considéré que notre investissement avait pour seul objectif d'aider à la modernisation de cette entreprise publique. Il n'est pas fréquent que l'État décide d'apporter du capital à une entreprise alors qu'elle n’est pas en crise. Or, La Poste n'est pas en crise et on a pourtant décidé de lui apporter 2,7 milliards d'euros pour investir – 1,2 milliard provenant de l'État et 1,5 milliard de la CDC. Nous avons pris soin que cette entrée se fasse à partir d'une valeur des fonds propres suffisamment raisonnable pour que nous puissions « acheter » le business plan dans l’état dans lequel son président l'avait présenté à son conseil d'administration, qui l’avait approuvé. Nous entrons donc à La Poste, à hauteur de 26,3 % du capital, de plain-pied avec les projets de M. Jean-Paul Bailly, sans remettre en cause quoi que ce soit et en étant partie prenante des missions de service public que nous souhaitons maintenir, tout en étant assurés qu'il s'agit d'un investissement raisonnable pour la Caisse des dépôts. Je tiens à ce propos à rendre hommage à Mme Lagarde, qui a mené les négociations avec nous et qui a compris que le fait que nous entrions au capital à un prix raisonnable allait dans le sens de l'intérêt collectif.
Nous avons pour objectif de ne pas nous montrer intrusifs dans le management de La Poste. Nous avons trois représentants au sein de son conseil d'administration : une collaboratrice de la Caisse des dépôts, Mme Sabine Schimel, moi-même, ainsi que M. Michel Rose, que nous avons choisi parce qu'il connaît bien l’international, pour avoir été directeur de Lafarge aux États-Unis, ainsi que les ressources humaines, puisqu'il a été DRH au sein de ce groupe. Je souhaitais que nous ayons avec nous une personne attentive aux relations sociales, qui m'apparaissent essentielles dans une entreprise de plus de 300 000 personnes.
Des possibilités de coopération existent entre nos deux maisons dont les cultures sont voisines. Il s'agit en particulier du numérique dans lequel des partages d'expertise sont escomptés ; des points de présence locale, à propos desquels nous avons récemment signé un accord avec le ministre de l'aménagement du territoire ; des activités bancaires et du crédit aux entreprises, en particulier autour du microcrédit et du crédit aux très petites entreprises, les TPE ; de l'actionnariat salarié à grande échelle et pour lequel j'ambitionne, avec M. Jean-Paul Bailly, de mettre en œuvre un projet innovant est ambitieux.
J'en viens à la contribution du groupe Caisse des dépôts au développement des entreprises, qui est une des priorités du plan ELAN 2020 que j’ai mis en place en décembre 2007. Au fond, nous sommes assez fiers d'avoir anticipé la crise de l'endettement… La crise des subprimes a marqué l'apogée d'un système dans lequel, pendant 30 ans, on a abusivement endetté aussi bien les ménages américains que les États européens, tandis que les entreprises spéculatrices ont fait du leverage un usage tellement excessif qu'il a abouti à cette catastrophe. Nous avons aujourd'hui besoin de passer d'une économie d'endettement abusif à une économie de fonds propres. Or, dans notre pays, trop peu d'institutions sont capables d'en apporter aux entreprises : nous ne disposons ni des banques de développement allemandes ou italiennes, ni de fonds de pension. Au total, nous nous trouvons de fait, avec le fonds stratégique d'investissement, dans la position de principal acteur du capital-développement en France.
Nous alimentons ainsi 180 fonds de capital-risque et de capital-développement, dont 80 fonds territoriaux. Nous aurons bientôt le bonheur de créer un fonds territorial avec le Crédit mutuel d'Alsace ainsi que la région Alsace, mais je cite cette région parce que, malheureusement, nous avons trop peu d'acteurs locaux qui acceptent de co-investir avec nous. Or, nos engagements européens interdisent de disposer de plus de 49 % de fonds publics dans ces fonds d'investissement dans lesquels nous intervenons.
Nous sommes très engagés dans cette politique et le partage des rôles est très clair : OSEO s'occupe du bas de bilan, c'est-à-dire des crédits et des garanties, tandis que le groupe Caisse des dépôts, notamment avec le FSI, s'occupe des fonds propres. Filiale d’OSEO et de la CDC, Avenir Entreprises intervient également dans ce domaine.
La Caisse des dépôts est toutefois aussi présente dans le domaine des prêts, puisqu’elle gère le dispositif Nacre (Nouvelle aide à la création d'entreprise), qui a concerné 13 500 entreprises en 2010, ainsi que tous les prêts d'honneur et les micros crédits pour la création d'entreprises, dont 27 000 d'entre elles ont bénéficié.
Si la France est championne de la création d'entreprises – 600 000 en 2010 –, elle rencontre davantage de difficultés dans leur croissance et dans leur pérennisation une fois qu’elles atteignent le seuil de 500 salariés : la tendance à la vente à de grands groupes étant alors beaucoup plus forte dans notre pays qu’ailleurs, l'entreprise perdure mais elle n'a pas le même dynamisme que lorsqu'elle était dirigée par une petite équipe totalement responsabilisée. Ce manque d’entreprises de taille intermédiaire, les ETI, entre 250 et 5 000 salariés, est un des points de fragilité de notre économie. Si l'on retranche de nos 4 700 ETI les entreprises bancaires, immobilières et de commerce, qui ne sont pas dans le champ du FSI, notre cible est de seulement 751 entreprises, parmi lesquels 440 ont déjà fait l'objet des attentions du FSI. Il est donc pleinement légitime de se fixer pour objectif de faire progresser ces entreprises, suffisamment grandes pour être exportatrices et suffisamment petites pour être dynamiques et créer des emplois car, chacun le sait, ce ne sont plus les grandes entreprises qui sont fortement créatrices d'emplois. Nos ETI représentent 20 % de l'emploi salarié, soit 3 millions de personnes qui produisent 20 % de la valeur ajoutée.
Perçu à l’origine comme un pompier destiné à protéger de l'incendie les pépites du CAC 40, le FSI se trouve en fait au cœur de cet enjeu national qu'est la structuration des fonds propres des entreprises de taille intermédiaire. Il intervient bien évidemment dans les entreprises plus importantes, mais, doté de 20 milliards d'euros, il ne peut avoir l'ambition d'être l’actionnaire de référence de toutes les sociétés du CAC 40…
Nous voulons maintenir le rythme au cours des trois prochaines années et nous avons pour ambition d'investir dans 1 200 nouvelles entreprises. Le FSI s'appuie sur CDC Entreprises, qui est une société de gestion de notre groupe, et sur nos directeurs régionaux.
Je vous sais par ailleurs très attentifs à la visibilité de notre action dans les territoires. Vous avez d’autant plus raison que cette action est nouvelle : avant 2007, nos directeurs régionaux avaient pour instruction de ne pas s'occuper des entreprises… Depuis lors, nous avons fait de l'apport de fonds propres aux PME une priorité ; nos directeurs régionaux ont par exemple créé avec OSEO des plates-formes d'appui aux PME. Il nous appartient de faire mieux connaître nos offres : la nomination comme directeur général délégué du FSI et président de CDC Entreprises de M. Philippe Braidy, ancien directeur du développement territorial de la Caisse, y concourra sans doute.
Depuis dix ans, la CDC accompagne les collectivités et l'État dans leur politique de développement du numérique ; elle investit dans des projets d'infrastructures haut et très haut débit, et soutient des projets d'utilisation et d'accès au haut débit. Ainsi, dans le cadre du projet structurant « + de services publics », nous avons signé en septembre 2010 avec le ministre de l'aménagement du territoire, aux côtés de neuf opérateurs de service public, un protocole en vue de créer dans les territoires ruraux des lieux d'accueil uniques avec visio-guichets, internet et bornes interactives. Nous menons également depuis dix ans, une action en faveur des cyber-bases : nous en comptons désormais 850, dotées d'ordinateurs et d'animateurs qui forment ceux qui se présentent, en particulier ceux qui cherchent un emploi. Nos cibles d'implantations prioritaires sont les maisons de l'emploi, les prisons et les écoles, où il s’agit souvent d’un moyen de faire entrer les parents, comme nous le constatons dans les 23 cyber-bases de l'agglomération des Portes du Hainaut.
Le programme des investissements d'avenir intervient fortement sur le numérique et a clairement dévolu ce rôle à la Caisse des Dépôts, où Mme Karen Le Chenadec et son équipe ont la charge des 4,25 milliards d'euros que l'État a décidé de consacrer à ce sujet. Ce montant est certes très important mais aussi insuffisant au regard des 25 à 30 milliards qui seraient nécessaires pour équiper d'ici 2025 tous nos concitoyens sur l'ensemble du territoire en très haut débit, chiffre que l'on peut en outre rapporter aux 3 milliards qui ont été nécessaires pour l'équipement en haut débit. Avec un tel budget, il va nous falloir être très rigoureux et très inventifs, très modestes et très ambitieux !
Cette somme se décompose en deux parties. Un premier volet de 2 milliards sera consacré au développement des infrastructures, notamment au déploiement de réseaux optiques : 1 milliard sera destiné aux prêts aux opérateurs d'infrastructures en dehors des zones denses ; 750 millions aux subventions aux collectivités locales en dehors des zones denses ; 250 millions aux subventions et prises de participations pour les zones les plus difficiles d'accès comme la montagne et les zones forestières.
Doté de 2,25 milliards, le second volet sera dédié au soutien des usages, services et contenus numériques : 1,4 milliard en financement classique de projets innovants – fonds propres, quasi fonds propres, prêts, fonds dédié aux investissements des PME numériques ; 850 millions pour soutenir des projets de recherche et développement, sous forme de subventions ou d'avances remboursables.
Vous m'avez par ailleurs interrogé sur les engagements financiers de la Caisse des dépôts. La totalité des résultats du bilan des fonds d'épargne va à l'État : sur un bilan de 200 milliards en 2010, 1,450 milliard de résultats sera entièrement consacré au regonflement des fonds propres du Fonds d'épargne pour 485 millions d’euros et à l'État, qui pourra prélever 965 millions.
S'agissant de la section générale, qui dispose de 20,2 milliards de capitaux propres, notre résultat est de 2,150 milliards. Il est d'abord consacré à une contribution volontaire, sorte de dividende. Nous attribuons chaque année à l'État une fraction de notre résultat, soit, en application d'une nouvelle règle, 50 % de notre résultat consolidé, plafonné à 75 % de notre résultat social. Cela va nous conduire cette année à lui verser 39 % de notre résultat, soit 839 millions. Nous investissons ce qui nous reste principalement en dépenses d'intérêt général : nous engagerons ainsi 450 millions dans la politique du logement et de la ville, 380 millions à destination des fonds propres des entreprises, 120 millions pour les brevets et les universités et 130 millions en faveur du développement durable. Un tiers de cette dernière enveloppe est dédié aux énergies renouvelables. En la matière, nous avons pour objectif difficile de faire émerger des filières professionnelles nationales sans susciter d'effet d'aubaine. Si nous nous demandons toujours si nous avons raison d'investir dans l'éolien ou dans le photovoltaïque, nous n'avons pas d'hésitation à soutenir la valorisation de la biomasse, pour laquelle notre pays compte 10 unités contre 5 000 en Allemagne ! Nous sommes ainsi partie prenante de projets innovants, par exemple la méthanisation des résidus agricoles dans les Côtes-d'Armor ou la valorisation des déchets des centres commerciaux en Picardie. Nous nous efforçons ainsi d'atteindre l'objectif d'un gigawatt d’énergies renouvelables en 2013. Nous nous intéressons aussi aux éoliennes offshores.
M. le président Serge Poignant. S’agissant de La Poste, j'informe mes collègues que nous procéderons la semaine prochaine à une nouvelle audition du président Bailly, l'ouverture du capital entraînant en effet une nouvelle procédure de nomination.
M. Alfred Trassy-Paillogues. La CDC est un énorme bras séculier de l’État pour le développement économique et l'aménagement du territoire. Existe-t-il dans les pays européens voisins des structures comparables ?
Vous avez indiqué, s'agissant de La Poste, que vous entendez mener une politique d'actionnariat salarié à grande échelle, y voyant sans doute une martingale pour rendre cette entreprise plus sereine et plus performante. Vous paraît-elle pouvoir être appliquée à d'autres entreprises dont vous vous occupez ?
Vous avez dit par ailleurs avoir recensé 751 ETI dans le champ d'intervention du FSI, avez-vous une idée de leur nombre chez nos voisins ?
Vous êtes-vous intéressés au corpus législatif et réglementaire en matière d'entreprises, de droit du travail, de compétitivité, etc. ? Quels sont en la matière nos atouts et nos handicaps ?
Notre pays ayant tendance à se désindustrialiser, menez-vous des actions en faveur de nos industries ?
Vous avez prévu 4 milliards d'investissements en faveur du numérique. Quel est votre avis quant au comportement des opérateurs privés ? Comment encourager une coordination entre tous ceux qui disposent déjà d'une infrastructure de fibres optiques – sociétés d'autoroutes, RTE, SNCF.
S'agissant des énergies renouvelables, vous avez logiquement parlé de la biomasse. Notre législation nous empêchant d'utiliser les déchets comme combustible, comment allons-nous résorber notre retard vis-à-vis de l'Allemagne ?
Enfin, vous vous occupez déjà d'un très grand nombre de choses, mais quels sont les autres domaines dans lesquels vous souhaiteriez intervenir dans l'intérêt de l'économie de notre pays ?
M. François Brottes. Vous êtes, si ce n'est le bras séculier de l'État car votre indépendance vous protège des aléas politiques et conjoncturels, du moins un pilier de l'action de notre pays, vos résultats en attestent.
En ce qui concerne l’investissement à long terme, on a même le sentiment que vous êtes un peu seuls, d'autant que votre politique de partenariat semble reposer sur les mêmes exigences qu'avant la crise, au risque de bloquer certains projets car on a en fait l'impression, qu'il n'y a plus aucun autre investisseur à long terme apte à sécuriser les fonds propres d'une entreprise qui se lance, avec un retour sur investissement à 8 ou 10 ans… Comment mobiliser à nouveau des acteurs en ce domaine ?
S'agissant de La Poste, j’ai lu que la concrétisation de votre entrée dans le capital serait progressive, en lien avec la réalisation effective du plan d'affaires. Exercez-vous de la sorte une forme de pression qui pourrait me faire croire que c’est vous qui avez exigé la tête de M. Patrick Werner, l'ancien président de la Banque Postale ?
Enfin, je pourrais comprendre que vous ne souhaitiez pas que je vous interroge sur les liens historiques de la Caisse des Dépôts avec l'entreprise Quick, mais je le fais quand même…
M. Jean Dionis du Séjour. Je veux saluer l'action de la Caisse des Dépôts dans notre paysage économique, son engagement dans le partenariat avec les collectivités locales et son rôle d'interface entre privé et public.
La question du financement des entreprises, en particulier des ETI, apparaît véritablement cruciale. Vous avez souligné votre volonté de vous engager en faveur du renforcement de leurs fonds propres, mais pourriez-vous nous indiquer plus précisément ce que représentent ces fonds propres et ce qu'apporte concrètement la Caisse ? Avez-vous les moyens de traiter véritablement ce problème majeur ?
S'agissant du numérique, sujet qui me tient particulièrement à cœur, je vous ai trouvé très prudent puisque vous avez insisté sur la nécessité d'agir tout en soulignant que la somme de 4 milliards ne semblait pas à la hauteur des défis. L'estimation des besoins variant de 25 à 40 milliards, on peut comprendre votre humilité...
Le très haut débit étant l'essentiel, il serait intéressant de se demander comment ces 4 milliards vont être répartis, sachant que dans certaines zones le marché n'a besoin de personne et que la fibre y est déployée rapidement. Les choses commencent-elles à se préciser, au sein de votre équipe comme de celle qui a la charge du grand emprunt ?
M. le président Serge Poignant. Des propositions ont été faites par le sénateur Maurey en vue d'abonder le fonds d'aménagement du territoire numérique prévu par la loi Pintat.
M. Pierre Gosnat. Ma première question porte sur le rôle que joue la CDC en matière de développement économique et de développement des territoires, en lien avec la gestion du livret A.
Le décret du 17 mars dernier fixe à 65 % le taux de centralisation du livret A à la CDC alors qu'il était de 70 % depuis le vote de la LME et de 100 % auparavant. À ce rythme, on risque d’atteindre rapidement les 50 % que demandent les banques… La LME garantit une centralisation équivalant au minimum à 125 % des encours de prêt pour le logement social, ce qui limite les effets sur le financement de ce dernier. En revanche, cette nouvelle décentralisation aura un effet direct sur le financement d'infrastructures publiques de type hôpitaux, transports, universités, et sur les prêts accordés aux TPE-PME. Puisque nous n'avons aucune garantie quant à l'utilisation des fonds du livret A par les banques privées, quel sera l’impact de cette baisse sur le financement du développement économique et des infrastructures publiques ?
Créé en 2008, le FSI est détenu à 51 % par la CDC et à 49 % par l'État. Une de ses missions d'origine a été d'investir dans des entreprises rencontrant des difficultés liées à la crise économique. Vous avez évoqué à son propos un problème de visibilité. De fait, de nombreux investissements ont été réalisés, mais sans véritable transparence quant à l'utilisation des fonds. Ainsi, certaines des entreprises qui en ont bénéficié n'ont pas hésité par la suite à délocaliser une partie de leur activité ou à conduire un plan social. Tel est le cas de la société Trêves qui, après que 55 millions d'argent public y ont été investis par le fonds de modernisation des équipements automobiles, a fermé ses sites d’Ay et de Crépy-en-Valois et a délocalisé au Maroc. Quels sont donc les critères d'emploi qui président aux choix d'investissement du FSI ? Est-il acceptable que l'argent public finance des entreprises qui se livrent ensuite à la casse de l'emploi ?
Ma dernière question a trait à la politique salariale de la CDC. Nous ne pouvons que nous satisfaire de ses bons résultats, avec les bénéfices que vous avez indiqués. Les salariés, par la voix de leur syndicat, proposent qu’un pour cent de ces bénéfices leur soit redistribué. La Caisse est très généreuse avec ses actionnaires, notamment ceux de ses filiales comme ICADE. Qui plus est, vous avez dit vouloir renforcer l’actionnariat salarié à La Poste. Or, les bons résultats de la CDC sont en partie liés aux efforts de ses salariés, notamment en termes de productivité. Une redistribution de la richesse me paraîtrait donc naturelle. Quelle est votre position sur ce point ?
M. le président Serge Poignant. Après que nous avons entendu les orateurs des groupes, je vais donner la parole aux autres collègues qui souhaitent vous interroger, en rappelant que si vous avez fait un point fort utile en ce qui concerne le livret A, tel n’est pas l’objet de la présente audition.
M. Daniel Fasquelle. On n'accorde pas suffisamment attention au secteur du tourisme, pourtant créateur d'emplois. Je sais que tel n'est pas votre cas. Il est urgent de moderniser nos capacités d'hébergement, en particulier dans le tourisme social. Vous vous êtes rapproché pour cela de l'Association nationale des chèques vacances et qu'il est envisagé de créer un fonds social d'investissement. Où en est-on ? En quoi un tel fonds pourrait-il être un levier utile ?
Pouvez-vous également vous parler de l'action de la CDC en faveur de l'accueil des saisonniers, qui rencontrent les plus grandes difficultés à se loger sur leur lieu de travail ?
Enfin, les maires des communes rurales cherchent souvent les moyens de sauver un commerce nécessaire à l'animation, y compris touristique, de leur village. Comment la caisse peut-elle les soutenir dans des opérations de rachat de murs ou de fonds à des fins de location ?
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Vous avez dit qu’1,450 milliard d’euros de vos résultats iraient à l'État au titre de 2010. Pouvez-vous nous indiquer quelle a été l'évolution de ce montant lors des dernières années ? Y a-t-il à ce propos une négociation avec l'État ? Ce dernier donne en contrepartie sa garantie à la gestion des comptes d'épargne mais, au lieu que ces fonds reviennent au budget général, ne vous paraîtrait-il pas préférable qu'ils soient utilisés dans le cadre des politiques du logement, de développement et de renouvellement urbains et de la ville ?
Mme Frédérique Massat. Certes, La Poste n'est pas en crise au regard de ses résultats financiers, mais les citoyens s'inquiètent de son organisation territoriale et ses salariés ressentent un véritable malaise social. Au sein des 17 000 points de contact, les bureaux de poste sont de moins en moins nombreux et on trouve de plus en plus d'agences postales communales dans lesquelles les collectivités locales s'impliquent fortement, ainsi que souvent des épiceries. Pas moins de 11 700 emplois ayant été supprimés en 2010, l'actionnariat salarié va, de facto, concerner de moins en moins de personnes, mais les agents municipaux qui s'occupent des agences et les épiciers pourront-ils en bénéficier ?
Je souhaite moi aussi vous interroger sur le tourisme social. Un protocole d'accord a été récemment signé en vue de mobiliser des sommes importantes. Comment entendez-vous travailler dans ce secteur, en particulier en faveur des zones rurales et des zones de montagne, dont l'activité économique en est assez largement tributaire ?
Enfin, que pensez-vous de l'idée de mutualiser les fonds de la CDC, du FSI et d’OSEO afin de créer une banque publique destinée à soutenir dans les territoires les investissements des PME innovantes et les filières d'avenir ?
M. Jean-Pierre Nicolas. Vous nous avez montré l'étendue de vos activités : la Caisse est un acteur incontournable de l'économie française.
Certains pensent qu'il faudrait porter le plafond du livret A de 15 000 à 25 000 €, quel est votre avis ?
Vous avez dit par ailleurs vouloir investir dans 1200 entreprises afin qu'elles atteignent une taille suffisante pour garantir leur pérennité. Le faites-vous de votre propre initiative ou en réponse à des demandes ?
Pouvez-vous nous donner quelques exemples des dépenses d'intérêt général auxquelles vous avez dit que vous consacreriez 1,1 milliard ?
S'agissant des énergies renouvelables, vous voulez faire décoller les filières françaises et vous avez évoqué à ce propos la biomasse, mais pourriez-vous aussi nous donner votre sentiment sur ce sujet d'une grande actualité que sont les gaz de schiste ?
M. William Dumas. Pouvez-vous préciser votre stratégie en ce qui concerne la participation de la CDC, aux côtés des départements, au capital de la CNR, qui intervient dans un domaine particulièrement porteur dans la conjoncture actuelle. La bagarre ne risque-t-elle pas d'être chaude avec GDF-Suez, qui est un actionnaire minoritaire mais qui pourrait améliorer sa position si un département venait à faire défaut ?
Par ailleurs, ne vous paraîtrait-il pas intéressant d'encourager la création, à l’instar du fonds d'investissement Marguerite, doté de 750 millions d'euros, d’un FSI européen apte à soutenir une politique industrielle pour l’heure quasi inexistante à cette échelle ?
Mme Marie-Lou Marcel. Vous avez récemment déclaré que vous ne comptez pas revenir dans l'activité de prêts aux collectivités locales. Or, l'une des missions de la Caisse des dépôts est le développement des territoires, aux côtés des collectivités, le premier prêt ayant été accordé, en 1922, pour aider au développement du port de Dunkerque. Les collectivités locales sont actuellement très fragilisées sur le plan financier. Ne risquez-vous pas de passer à côté de projets dont le format serait parfaitement compatible avec votre stratégie ? Ne serait-il pas souhaitable de réorienter votre activité en faveur des collectivités locales, en particulier sous la forme de prêts bonifiés ?
Vous investissez par ailleurs beaucoup dans la filière photovoltaïque, notamment dans la société Midi-Pyrénées photovoltaïque investissement, créée en mai 2010 à Toulouse et qui aménage la première centrale photovoltaïque intégrée en toiture. Comment ressentez-vous le moratoire du Gouvernement sur cette filière d'avenir ?
M. Alain Suguenot. La LME a prévu qu'au cours de la période de transition 2009-2011 le taux de centralisation des encours des livrets d'épargne serait fixé pour 2012 et les années postérieures par un décret qui doit être pris avant le 30 septembre 2011. Le projet de décret qui sera prochainement soumis pour avis au conseil de surveillance de la CDC limiterait ce taux à 65 %, ce qui ne correspond pas aux engagements pris par le Gouvernement lors de la discussion devant la représentation nationale. Ce qui est en jeu, c'est la capacité de notre pays à financer non seulement la politique du logement social et la politique de la ville, mais aussi les investissements à long terme, dont les collectivités territoriales comme les autres acteurs publics auraient actuellement le plus grand besoin.
M. Jean-René Marsac. Vous avez fait part de votre intention d'intervenir en faveur des fonds propres de 1 200 entreprises. Selon quels critères choisissez-vous ? Prenez-vous en compte les aspects liés à la responsabilité sociale et environnementale, ou pour le moins certains indicateurs permettant d'apprécier la qualité du projet de ces entreprises ? Quelles sont vos exigences en tant qu'actionnaire ? Agissez-vous surtout en tant que relais ou restez-vous durablement dans le capital de ces entreprises ?
M. Jean-Paul Anciaux. Un vaste programme a été engagé ces dernières années en faveur du logement étudiant et Mme Valérie Pécresse envisage d’en doubler la production à l'horizon 2020. Envisagez-vous d'apporter votre soutien aux CROUS et au CNOUS dans le financement des résidences universitaires et des logements à caractère social ?
M. Pierre Goldberg. La mise au point que vous avez faite à propos du livret A appelle quelques questions, en particulier sur le risque de pénurie du financement du logement social, même si le décret qui a finalement été adopté est moins défavorable qu'on avait pu le craindre. Lors de votre audition du mois de février, vous sembliez redouter que la nécessité d'intervenir en faveur d'autres financements à long terme, par exemple des hôpitaux et des universités, n'aggrave encore les choses. Avez-vous changé d’avis ?
Par ailleurs, votre filiale ICADE a dégagé d'importants dividendes en 2010, notamment grâce à la vente exceptionnelle de 23 000 logements. Quel rôle entendez-vous lui faire jouer dans le financement du logement social ? De façon plus générale, que pensez-vous d'un retour des institutionnels dans ce financement ?
M. Jean Proriol. Vous n’avez pas du tout parlé de la Banque Postale. Sa création a pourtant été un succès ; elle représente 9 à 10 % des parts de marché ; elle couvre désormais la quasi-totalité des prêts immobiliers et à la consommation, à l'exception du crédit-revolving. Vous paraît-il envisageable qu'elle s'oriente vers des prêts aux collectivités locales ? Pourrait-elle le faire seule ou conviendrait-il qu'elle passe des partenariats ? Avec qui ?
Mme Corinne Erhel. Le très haut débit est un enjeu considérable pour l'aménagement social et économique du territoire, en particulier si l'on veut que les réseaux soient en capacité de supporter les nouveaux usages et les nouveaux services. Force est de constater que, faute de coordination comme de péréquation, la France prend du retard dans un déploiement homogène de ces réseaux. Quel est votre avis à ce propos ?
Comment se fait-il par ailleurs que l'on soit incapable, un an après l'adoption de la loi contre la fracture numérique, d’estimer de façon fiable le coût de ce déploiement : les montants avancés par les différents opérateurs varient beaucoup et vous-même avez semblé incapable de nous dire s’il en coûtera 25 ou 30 milliards. Quel modèle économique vous paraît devoir être retenu ? Pensez-vous qu’un réseau unique mutualisé, comme cela été fait dans certains pays du nord de l'Europe et en Australie, permettrait d'avancer plus rapidement ?
M. Jean-Charles Taugourdeau. Seriez-vous disposés à étudier un partenariat entre les organismes HLM, les collectivités locales et vous-même de façon à développer le logement meublé, notamment en milieu rural ? Cela me paraîtrait de nature à faciliter la mobilité des demandeurs d'emploi, souvent freinée par le coût du logement et par la crainte que le CDI ne soit pas prorogé au-delà de la période d'essai. Pour les avoir expérimentés dans ma commune, je sais que les logements meublés sont très utiles dans ce cadre, mais aussi dans celui des stages et de la réinsertion.
M. François Pupponi. Vous avez dit que vous alliez financer 130 000 logements cette année, certains relèvent-ils de l’ANRU ?
Vous avez été sollicité pour financer le PNRU 1. Pouvez-vous nous indiquer quels ont été vos engagements ? Comment envisagez-vous le financement d’un PNRU 2 ? Quelle pourrait être la participation de la Caisse ?
Les grands investissements prévus autour de la capitale seront aussi l'occasion de construire un grand nombre de logements. Comment la Caisse des dépôts pourrait-elle être associée au projet du Grand Paris ?
M. Jean-Louis Gagnaire. Travailler avec la CDC en faveur du soutien aux entreprises est source de satisfaction. Pour vous, l'une des différences essentielles entre la France et l'Allemagne tient au haut du bilan et à la plus grande facilité qu'ont les PME allemandes de devenir des ETI. J'avais le sentiment que vous cherchiez surtout à venir appuyer des initiatives régionales, départementales ou locales ; je comprends donc mal que vous ayez jugé « malheureux » de ne pas trouver d'autres investisseurs à vos côtés en Alsace. Mais peut-être s'agissait-il d'un lapsus…
Nous sommes ici un certain nombre à croire à l'interface public-privé mais on a incontestablement des difficultés avec les apporteurs privés, en particulier en raison de la règle des 49 %. Le secteur bancaire est peu enclin à s'engager en faveur des capitaux investissement, quelle est votre position sur ce point ?
Vous n'avez pas évoqué par ailleurs la fusion de votre ancienne filiale Transdev avec Veolia Transports. Or, la question des transports est tout à fait essentielle et cette fusion pose un certain nombre de questions quant à la gestion des réseaux de transport urbain, pour lesquels la concurrence est hélas moins vive qu'auparavant. Pouvez-vous revenir sur ce thème ?
M. Augustin de Romanet. M. Trassy-Paillogues m'a tout d'abord demandé s'il existait des institutions similaires dans les pays voisins. L'Italie a adopté début 2008 un texte destiné à donner à la Caisse des dépôts italienne des missions très comparables aux nôtres et elle a aujourd'hui un bilan quasiment équivalent, d’à peu près 200 milliards d'euros. Elle gère également les dépôts postaux et le fait qu'une initiative soit prise en vue de la création d'un fonds d'investissement stratégique montre que ce pays est très proche de nous dans l’imitation. En Allemagne, la KfW est surtout un prêteur et donc plutôt l'équivalent de la COFACE et d’OSEO. Par ailleurs, en Afrique, le modèle de la Caisse des dépôts, qui consiste à utiliser l'épargne à vue pour un investissement long, a été pendant un temps contesté par la Banque mondiale mais il est maintenant reconnu comme utile.
Je crois beaucoup en l'actionnariat salarié. C'est un modèle que nous avons développé chez Egis, à l'occasion de l'achat d’Iosis, qui était détenu plus que majoritairement par ses salariés. Nous avons alors ouvert le capital à 350 cadres et à l'ensemble des 10 000 salariés, via un fonds commun de placement à risque (FCPR). Les salariés détiennent aujourd'hui 25 % du capital de la société. L'actionnariat salarié n'est sans doute pas transposable à toutes les entreprises, mais je persiste à juger cette piste très intéressante.
Je ne dispose pas du nombre d’ETI au Royaume-Uni et en Espagne. De mémoire, il y en a à peu près le double en Allemagne qu'en France, ce qui représente une puissance considérable.
Parmi les atouts de notre pays, je citerai la sécurité juridique pour tous les pays émergents et les infrastructures ; parmi les handicaps, le fait que de nombreux chefs d'entreprise étrangers jugent que l’incertitude de la jurisprudence sociale de la Cour de Cassation est un frein à leur implantation dans notre pays.
Il me semble que, pour lutter contre la désindustrialisation, ce qui se passe dans les pôles de compétitivité est beaucoup plus intéressant que ce que l'on a pu penser au début : ils permettent aujourd'hui de mettre véritablement en réseau des industriels qui se prennent en main. Je l'ai constaté récemment à Toulouse dans les pôles liés à l'agroalimentaire, l'aéronautique, la lutte contre le cancer et la thermique. Il me semble que la tendance au désintérêt de la France pour son industrie a cessé.
M. le président Serge Poignant. D’autant que les investissements d'avenir contribuent à insuffler une véritable dynamique.
M. Augustin de Romanet. Absolument. Au début des années 2000, on a pris conscience de l'importance des PME et de la nécessité de les soutenir. À la fin de cette période, on a à nouveau mesuré l'importance de l'industrie.
M. Trassy-Paillogues m'a également demandé comment associer les opérateurs au développement du numérique. J'évoquerai nos efforts en faveur de la coordination en répondant globalement à tous ceux qui m'ont interrogé sur le numérique.
S'agissant de la biomasse, j'ignorais que nous n'avions pas la possibilité d'utiliser les déchets comme le font les Allemands.
M. François Pupponi. Je ne comprends pas : ils sont d'ores et déjà utilisés sur notre territoire.
M. Augustin de Romanet. Il me semblait en effet que tel était le cas, en particulier chez Fertigaz en Picardie, pour les déchets des centres commerciaux, mais dès lors que l'un d'entre vous s’interroge à ce propos, c'est qu'il est nécessaire de clarifier les choses. Je vais donc me pencher sur ce sujet.
Le tourisme et les personnes âgées sont des domaines dans lesquels la Caisse des dépôts pourrait également intervenir davantage, j'y reviendrai en réponse à d'autres questions.
Nous n'avons pas, monsieur Brottes, vis-à-vis des investisseurs de long terme les mêmes exigences qu'avant la crise. Je suis fier de vous dire que le taux de rendement interne des investissements du Fonds Limousin participation est inférieur à 8 %. Il peut paraître paradoxal qu'un banquier soit fier que ce taux soit bas... Depuis que je suis à la tête de la Caisse des dépôts, je n'ai jamais vu refuser un bon projet ou un projet créateur de richesses à long terme au motif de son taux de rendement interne. Bien sûr, il peut arriver que des projets soient bloqués au niveau local pour de mauvaises raisons et que je n’en sois pas informé, mais nous restons dans l'idée que nous devons accepter des taux de rendement plus faibles que ceux qu’exigeait le marché avant la crise.
Attirer d'autres acteurs vers l'investissement à long terme est un véritable enjeu. Cela suppose en particulier qu'à l'occasion de la révision éventuelle du code général des impôts sur l’ISF, on prenne en compte le fait que, sur 2,4 milliards d'euros qui vont au capital-développement dans notre pays, un milliard provient du dispositif ISF-PME. Son aménagement risquerait donc d'avoir des conséquences sur l'investissement en fonds propres dans les PME.
Je puis vous assurer qu'il n'y a aucun lien entre le rythme de décaissement de notre apport en capital de 1,5 milliard et à la réalisation du plan d'affaires de La Poste. Nous nous sommes engagés une fois pour toutes à verser cette somme, quoi qu'il arrive. Le décaissement est progressif uniquement parce que nous souhaitons l’harmoniser avec les besoins en trésorerie de La Poste, qui ne sont pas immédiats.
S'agissant de l'ancien président du directoire de la Banque postale, vous pourrez demander à M. Bailly de vous confirmer que je me suis toujours interdit de porter le moindre jugement sur ses choix des managers du groupe.
Quick a été acheté en 2006 par une filiale de capital investissement de la Caisse des dépôts, dans le cadre d'un fonds géré en toute indépendance, à l'occasion d'une OPA à la bourse de Bruxelles, dans un processus totalement public et transparent. M. Jean Eichenlaub, qui préside ce fonds, qui s'appelle désormais Qualium, est à votre disposition comme à celle de tous les parlementaires membres de la Commission de surveillance, pour ouvrir tous les livres. J'ai regardé ce dossier de près et il n'y a jamais eu à ma connaissance la moindre opération contestable. La justice a eu à plusieurs reprises l'occasion de constater que le groupe Quick, qui crée beaucoup d'emplois et se développe fortement, qui a malheureusement fait l'actualité à la suite du drame survenu à Avignon, ne mérite pas l'excès d’intérêt que la presse lui manifeste. Je suis à votre disposition pour vous rencontrer en compagnie de M. Eichenlaub, afin qu'il réponde aux questions auxquelles je n'aurais pas répondu.
« Avez-vous les moyens d’aider les ETI ? », m’a demandé M. Dionis du Séjour. Le fonds stratégique d'investissement dispose d'une enveloppe considérable de 20 milliards d’euros permettant de répondre notamment aux besoins des ETI dans les deux ou trois prochaines années. À l'heure où je vous parle, nous n'avons donc pas de contrainte financière. Le FSI peut investir environ 2 milliards par an et je n'ai jamais refusé quelque dossier que ce soit parce que les fonds nécessaires n'étaient pas disponibles. Dans son discours de Saint-Nazaire sur la politique industrielle, le Président de la République a en outre annoncé qu'il mettrait à la disposition du FSI 1,5 milliard d'euros en provenance du fonds d'épargne. Si des besoins supplémentaires se faisaient jour, d'autres fonds publics pourraient abonder le FSI. On peut donc dire que nous manquons peut-être davantage de projets que de carburant.
Je l’ai dit, je reviendrai de façon globale sur toutes les questions relatives au haut débit.
Monsieur Fasquelle, grâce au Fonds Tourisme social et investissement (TSI), qui associe l’ANCV, la CDC et un certain nombre de groupes mutualistes, 15 millions d’euros seront consacrés chaque année pendant dix ans à des opérations de réhabilitation des villages de vacances du tourisme social associatif et familial. Nous distinguerons exploitation et immobilier car l'expérience montre qu'il faut des professionnels à la fois de l'accueil et de la gestion immobilière. Nous voulons donc rénover les bâtiments et les confier à des exploitants professionnels.
S'agissant des saisonniers, la Compagnie des Alpes a passé avec une station de bord de mer un accord relatif aux personnes qui travaillent en montagne l'hiver et dans des stations balnéaires en été. Je vous le transmettrai bien volontiers car il pourrait selon moi constituer un modèle, que nous pourrions diffuser plus largement.
Nous nous sommes jusqu'ici surtout intéressés au rachat des fonds de commerce, voire des murs, en milieu urbain. En effet, à Paris, M. Bertrand Delanoë nous a demandé d'étudier la possibilité de racheter des murs afin que ne s'y installent pas systématiquement des commerces de vêtements et que subsistent dans le centre de Paris des commerces de type culturel. Il s'agit donc de quelque chose que nous pouvons faire. Je ne suis pas certain qu'on nous l'ait déjà demandé en zone rurale, mais nous pourrions envisager une réponse de ce type si un nombre suffisant d'élus y voyaient une utilité.
Monsieur Le Bouillonnec, depuis dix ans, le résultat du livret A oscille chaque année entre 500 millions et 1,5 milliard.
Il vous appartient de dire, dans le cadre de la loi de finances, s'il est superfétatoire que l'État fasse rémunérer sa garantie. Jusqu'à présent, il y avait beaucoup plus de ressources que de besoins au sein du Fonds d'épargne. Ainsi, en 2007, les ressources étaient de 220 milliards, pour 90 milliards d'encours de prêts. Je l'ai dit, ce dernier va croître de 80 % en huit ans en raison de l'explosion des flux annuels de nouveaux prêts depuis 2004. Le moment n'est pas encore venu de se demander si l'État doit renoncer au prélèvement. Je rappelle que, sur 1,450 milliard de résultats, 485 millions demeurent au sein du Fonds d'épargne pour réalimenter les fonds propres, qui s'élèvent à 7,5 milliards, l'État ne prélevant que 965 millions.
Je suis très conscient, madame Massat, des enjeux sociaux à La Poste.
Je ne me suis pas encore demandé si l'actionnariat salarié pourrait être ouvert à d'autres que des salariés de La Poste. Je ne veux pas insulter l’avenir, mais cela me semble a priori difficile.
Dans le cadre de notre action en faveur du tourisme social, nous sommes particulièrement mobilisés pour la rénovation des résidences de montagne. Nous avons notamment réalisé, il y a quelques mois, une opération avec Cap Vacances et nous travaillons également avec l'UCPA.
La Caisse des dépôts étant actionnaire à 51% du FSI ainsi que d’OSEO, à hauteur de 26 %, je puis vous dire que ces trois entreprises essaient de faire du mieux possible et que tout ce qui assure leur promotion va dans le bon sens. Lorsque l'on finance une entreprise, il faut cependant être attentif à ne pas mélanger le prêteur et l'apporteur de capitaux propres, car les deux peuvent se trouver en conflit d'intérêts. Nous faisons donc attention, dans les établissements financiers, à ce que les deux missions ne soient pas exercées côte à côte au sein des mêmes équipes.
M. Nicolas s’est demandé s'il serait possible de relever le plafond du livret A. Ce curseur est à la disposition du Parlement, mais il doit être manié d’une main tremblante, d’une part parce qu’il entraîne une dépense budgétaire, d’autre part parce que tout déplacement des flux d'épargne a des effets sur le financement global de l'économie. Il faut en particulier un équilibre avec l'assurance-vie et les dépôts dans les établissements bancaires, dont je n'ai jamais considéré qu'ils jouent un rôle négligeable.
Il existe en effet un certain nombre de secteurs dans lesquels nous nous engageons de façon déterminée. En 2007, lorsque nous nous sommes demandé ce qui relevait principalement de l'intérêt général, nous avons identifié le logement, les PME, le développement durable, les universités. Deux autres domaines sont très proches de nos priorités et nous allons nécessairement y jouer un rôle dans les années qui viennent : le tourisme et l'hébergement des personnes âgées. Nous venons de créer une petite société foncière au capital de 10 millions d'euros, CDC Générations, qui va d’abord investir dans la création de 2 000 places en EPHAD pour les personnes âgées dépendantes qui sont trop riches pour percevoir l’aide sociale et pas assez pour accéder établissements du marché. S'il s'agit pour l'heure d'une expérimentation, je suis convaincu que, dans 15 ans, ce sera une mission prioritaire de mon successeur. Ce besoin allant croissant, nous avons par exemple engagé une réflexion sur des procédures de viager permettant aux personnes de disposer des moyens d'habiter dans des résidences.
S’agissant des missions d’intérêt général, vous trouverez de nombreux exemples dans les documents de présentation des résultats 2010 du Groupe Caisse des dépôts que je vous ferai parvenir.
Je n'ai ni compétence ni certitude en ce qui concerne le gaz de schiste.
S'agissant de la question de M. Dumas sur le capital de la CNR, je précise que même si une collectivité locale souhaite vendre, la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, dite loi MURCEF, interdit que cette société passe dans le secteur privé. En tant qu'actionnaire, nous souhaitons que la CNR soit un opérateur de référence pour les énergies renouvelables et nous espérons qu'elle sera bien placée et conquérante pour le renouvellement des concessions hydrauliques, d'ores et déjà ouvert dans de nombreux bassins.
La création d'un FSI européen serait une formidable nouvelle car cela signifierait que tous nos pays ont surmonté la tentation nationaliste… Même s'il s'agit sans doute d'une idée d'avenir, il me semble que la construction européenne n'en est pas encore à un stade permettant d'éviter la théorie du juste retour.
Ce n'est pas par hasard, madame Marcel, que j'ai dit que je ne pensais pas que la CDC doive revenir dans l'activité de prêts aux collectivités locales. Même si je suis bien évidemment convaincu qu'il s'agit d'une mission d'intérêt général je ne souhaite pas, s'il était acquis que le secteur privé ne pouvait pas financer les collectivités locales, qu'à un moment où un grand financeur des collectivités locales se trouve dans une situation financière délicate, certains se disent qu'il suffit de confier à la Caisse des dépôts cette mission qu’aucun acteur privé ne voudrait exercer… Si certaines missions sont difficiles, eh bien il faut qu'elles soient assurées dans le contexte d'un marché difficile.
Le moratoire sur le photovoltaïque découle d'une inquiétude du ministère face à l'envolée des projets dans un secteur dont la prospérité dépend encore trop fortement de curseurs fixés par l'administration. Je pense que le ministère du développement durable est lui-même conscient que c'est un secteur qu'il faut regarder à la loupe et qu'il réfléchit à des correctifs.
M. Suguenot m'a interrogé sur le taux de centralisation de 65 %. À l'occasion du vote de la LME, pour éviter qu'un produit ne cannibalise l'autre, vous avez décidé de rapprocher livret A, centralisé à 100 %, et livret de développement durable, centralisé à 15 % : 100 + 15, pondérés par les masses, cela faisait 70 %. Toujours dans le cadre de la LME, vous avez décidé que la CDC aurait non pas un pourcentage des dépôts mais un montant fixe de 160 milliards d'euros. Il s'est trouvé que ce montant correspondait à 65 %. Compte tenu de l'envolée des prêts au logement social et à la politique de la ville, mon pronostic est que le taux va remonter, peut-être pour dépasser les 70 % après 2016.
Je tiens à la disposition de M. Marsac les grilles de cotation des investissements du FSI. Je précise à ceux qui estiment que le Fonds n'est pas assez transparent que je suis fier d'avoir imposé dès sa création la présence du président de la Commission de surveillance de la Caisse des dépôts au sein de son comité d'investissement. En dépit de certaines résistances à ce que le Parlement ait ainsi accès au détail des livres du FSI, je suis convaincu que c'est un gage de transparence. Le FSI développe beaucoup sa démarche d'investisseur socialement responsable. Parmi nos critères de choix d'investissements, nous attachons la plus grande importance aux politiques sociale, environnementale, de recherche, de formation professionnelle. S'agissant de la durée, il est pour moi impossible de mener à bien un tel projet dans une période inférieure au minimum à cinq ans et en moyenne à sept ans. Certes, cela n'a rien de scientifique, mais pour moi on n’est investisseur de long terme qu’à partir de 7 ans.
Nous sommes tout à fait favorables, monsieur Anciaux, à l'investissement dans les résidences universitaires. ICADE et la SNI ont beaucoup de projets dans ce domaine. Dès lors que le ministère des universités nous sollicite et se réjouit de notre intervention, nous sommes ravis de l'aider.
Vous avez raison de souligner, monsieur Goldberg, que l'insuffisance des ressources ne permettrait pas de financer la totalité des nouveaux emplois du livret A, qui sont relativement récents : ils ont décollé après la crise de 2008, lorsque le Président de la République a décidé d'affecter aux infrastructures et aux collectivités locales des enveloppes respectives de 8 et de 5 milliards d'euros. En 2008, c'est parce que cela répondait à l'intérêt général que nous avons été très heureux de prêter aux collectivités locales, sur l'enveloppe du livret A, 2,5 milliards en quelques semaines. Mais de là à créer une banque concurrentielle au profit des collectivités locales, il y a un tout autre pas à franchir.
ICADE s'est désengagé du logement, sauf pour la promotion.. Il s'agit désormais principalement d'une foncière tertiaire et d'un promoteur, qui joue un rôle dans l'aménagement notamment du parc des Portes de Paris – l’ancien EGMP –, c'est-à-dire des 80 hectares situés à Aubervilliers et à Saint-Denis. Le rôle d’ICADE dans le financement des logements sera donc résiduel. Au sein du groupe Caisse des dépôts, la construction de logements relèvera désormais de la SNI, qui en gère déjà 250 000.
Si je n'ai pas parlé de la Banque Postale, comme l'a fait observer M. Proriol, c'est parce qu'on ne parle jamais des trains qui arrivent à l’heure… Il n'est pas interdit qu'elle puisse intervenir le moment venu dans les prêts aux collectivités locales. Je n'ai en la matière aucune religion. On me demande souvent si je vais militer pour un rapprochement entre Dexia et la Banque Postale. Je suis particulièrement prudent sur ce point car je ne souhaite pas que l'on donne vie artificiellement à un ensemble que l’on qualifierait de « monstre » et qui ne serait pas satisfaisant pour les deux parties. Néanmoins, compte tenu des évolutions complexes que va connaître dans les prochaines années la situation financière des collectivités locales, je pense qu'elles auront intérêt à trouver un interlocuteur local qui connaît bien la situation de chacune. Dans cette perspective, je ne vois pas pourquoi la bonne connaissance du terrain qu'a la Banque Postale ne serait pas un atout pour être aux côtés des collectivités pour financer tel ou tel projet. Mais je ne fais en la matière aucune annonce : je ne suis pas le président du groupe La Poste et je n'ai nulle légitimité pour influer directement sur la politique de la Banque Postale.
Madame Erhel, je répondrai dans quelques instants à votre question sur le haut débit.
Monsieur Taugourdeau, tout comme elle est ouverte au rachat des murs des commerçants en milieu rural, la Caisse est prête à soutenir des projets qui peuvent avoir une utilité, notamment celui relatif aux meublés, qui me paraît très intéressant.
Il est exact, monsieur Pupponi, que dans les 133 000 logements financés en 2010, 20 000 sont issus des programmes ANRU, de même qu'un grand nombre des 220 000 logements réhabilités grâce aux prêts sur fonds d'épargne.
Il faudra bien sûr mobiliser tous les dispositifs classiques en faveur de l’ANRU 2. La CDC y participera, notamment par des prêts sur fond d'épargne, avec des réhabilitations selon les normes BBC (Bâtiment basse consommation).
En tant qu'investisseur immobilier, nous continuerons à débloquer chaque année environ 80 millions d'euros. Comme expérimentateur, je suis par exemple très intéressé par ce que nous faisons à Clichy-sous-Bois, dans une copropriété très dégradée, que nous allons racheter pour essayer d’y reconstituer un équilibre social satisfaisant.
Nous travaillons aussi à des propositions de nature à faciliter les montages, avec une approche intégrée qui consiste à ne pas traiter uniquement les immeubles mais aussi toute l'activité économique qu’il y a autour. Il me semble que, dans l’ANRU 1, on a trop laissé les architectes travailler tous seuls, sans s'occuper des commerces en pied d’immeuble, des zones industrielles, des incubateurs, etc. Il est en outre probablement nécessaire d’étudier avec les collectivités locales le zonage et les règles d'urbanisme.
S'agissant du Grand Paris, nous avons dès l'origine travaillé avec le ministère de M. Christian Blanc, et aujourd’hui avec M. Maurice Leroy. Nous signerons dans les semaines qui viennent une convention par laquelle nous nous engagerons à apporter un montant significatif pour financer les contrats de développements territoriaux de chaque commune.
M. Gosnat s'est montré quelque peu sévère en ne citant que l'exemple du groupe Trêves à propos du Fonds de modernisation des équipements automobiles. Il est vrai que cette entreprise a été obligée de supprimer des emplois, je pense néanmoins que le Fonds, qui a été capable d'investir en moins d'un an 200 des 600 millions mis à sa disposition, a sauvé la filière de la sous-traitance automobile.
S'agissant de la transparence du FSI, je dis à nouveau que la Caisse des dépôts est une maison ouverte au Parlement. Depuis quatre ans, je n'ai jamais refusé de répondre à quelque question que ce soit émanant d'un parlementaire. Quand bien même je ne le ferais pas, votre collègue Michel Bouvard est membre du comité d'investissement du FSI et il a à ce titre accès à tous les dossiers.
Il ne me semble pas que la politique salariale de la CDC soit un sujet d'intérêt national… Il nous faut être attentifs à respecter l'équilibre entre salariés et fonctionnaires. C'est parce que le Parlement nous a donné, par la LME, la faculté d'ouvrir l'intéressement à la Caisse des dépôts que j'ai été cette année en mesure de signer avec quatre syndicats sur cinq un accord pour accroître cet intéressement dans des proportions significatives et pour faire passer de 6 à 7 % la proportion de la masse salariale qui y est dédiée. De la sorte, il me semble que M. Gosnat a satisfaction.
Non, monsieur Gagnaire, je n'ai pas commis de lapsus lorsque j'ai parlé de l'Alsace. Bien évidemment, la région apporte des fonds, mais ce qui me trouble c'est que ce n'est pas le cas d'investisseurs privés. Nous avons fini par convaincre le Crédit mutuel, mais je juge « malheureux » qu'il s'agisse de la seule région où une banque régionale accepte, aux côtés de la région et du FSI, de venir en soutien des fonds propres des entreprises.
Vous m'avez par ailleurs interrogé sur les règles qu'il conviendrait de modifier. J'insiste à nouveau sur le fait que le dispositif ISF-PME est un enjeu crucial.
La représentation nationale doit savoir que je ne me serais jamais lancé dans une fusion avec Veolia Transports si le directeur général de Transdev ne me l'avait pas proposé. Je l’ai fait en plein accord avec tous ceux qui considéraient qu'il était sans doute excessif pour un pays comme le nôtre de disposer de quatre groupes de transports (RATP, Keolis, Transdev, Veolia). Nous sommes très attachés à préserver les valeurs qui ont fait la réputation de Transdev auprès des collectivités locales, en particulier les valeurs de proximité. Nous sommes aussi attachés à respecter les règles de la concurrence. Cette dernière ne tient pas seulement au nombre des acteurs mais aussi au jeu qui est le leur. Nous veillons ainsi à ne jamais établir de lien entre le fait qu'une collectivité locale apporte un contrat à Transdev et une intervention du groupe Caisse des dépôts. Il est très important que tous les groupes respectent de telles règles ; je pense à certains concurrents, liés à de grands groupes de transports, dont je ne souhaite pas qu'ils établissent un lien entre le transport par autobus ou tramway et le transport ferroviaire. Pour notre part, nous veillerons à respecter la concurrence tout en apportant le service demandé par les élus. M. Fousseret, maire de Besançon – ville qui a un remarquable réseau de transports en commun –, a pris un risque en choisissant Transdev au détriment de l'opérateur avec lequel il travaillait depuis 20 ans. Il a été quelque peu désarçonné par notre alliance avec Veolia. Je prends donc l'engagement solennel que lui-même, pas plus que les autres maires qui ont choisi Transdev, ne sera déçu. C'est bien sûr un défi !
J'en viens, enfin, au très haut débit. C'est un domaine très technique, dans lequel je suis d'abord obligé de reconnaître qu’il est facile de se perdre. Lorsque j'ai commencé à m'intéresser à ce sujet l'an dernier, j'avais été convaincu par mes collaborateurs qu'un schéma du type de celui de RFF – c'est-à-dire un opérateur, au capital duquel pourraient être tous les opérateurs privés et la CDC, qui mutualiserait les infrastructures – était adapté au financement du très haut débit. J'ai lancé cette idée et elle a fait long feu, mais elle n'est peut-être pas totalement morte car elle permettrait d'opérer une péréquation territoriale et d'harmoniser le déploiement.
Aujourd'hui, nous travaillons avec le Commissariat général à l'investissement au dépouillement de l’appel à manifestation d'intérêt, auquel les opérateurs privés ont répondu le mois dernier en proposant un calendrier pour le déploiement du très haut débit. L'analyse technique de ces propositions est très compliquée et je n’ai aujourd'hui pas d'opinion sur le fait qu'elles répondent à l'objectif que l'État s'est fixé d’une desserte de tous les Français en très haut débit d'ici 2025.
Plusieurs d'entre vous ont insisté à juste titre sur la nécessité d'une instance de gouvernance ad hoc, que nous nous efforçons de faire émerger, d'autant que l'État a conscience que le succès de l'opération est à ce prix, l’ARCEP exerçant pour sa part un rôle de régulation et de coordination.
Faut-il alimenter le fonds national d'aménagement numérique de la loi Pintat par de nouvelles taxes ? Le moment n'est pas très bienvenu pour cela. Sans doute serait-il utile de prévoir que d'éventuels moyens non utilisés du fonds puissent être réorientés vers des actions des collectivités locales, afin d'établir une péréquation entre zones denses et non denses.
Je suis conscient que cette réponse est très insatisfaisante, mais, s'agissant d'un domaine dirigé par la technique, nous essayons de nous mettre au niveau du meilleur état de l’art. Ainsi, une de nos équipes se rendra prochainement en Corée pour voir ce qui y a été fait en la matière. Je demande sans cesse que l'on s'efforce de traduire les principaux enjeux de l'équipement du territoire numérique en langage « journal de 20 heures »… Je suis en effet persuadé qu'il est indispensable que nous-mêmes, représentants de la nation et responsables des entreprises publiques, sachions exprimer les enjeux de la sorte. Mais, à l'heure où je vous parle, je n'ai pas encore de certitude quant à la qualité des rails sur lesquels nous mettons le train…
M. le président Serge Poignant. Merci beaucoup pour cette excellente audition, au cours de laquelle vous avez répondu à nos questions et exprimé votre point de vue sur de nombreux domaines d'actualité mais aussi de réflexion pour le futur, qui intéressent les élus aussi bien nationaux que locaux.
◊
◊ ◊
Information relative à la commission
La commission a procédé à la nomination d’un rapporteur.
Elle a désigné M. Michel Raison rapporteur sur la proposition de résolution européenne de M. Hervé Gaymard sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant modification du règlement (CE) n°1234/2007 en ce qui concerne les relations contractuelles dans le secteur du lait et des produits laitiers (n° 3326).
——fpfp——
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du mercredi 6 avril 2011 à 10 h 15
Présents. - M. Jean-Paul Anciaux, M. Jean Auclair, M. Thierry Benoit, M. Christian Blanc, M. François Brottes, M. Louis Cosyns, Mme Catherine Coutelle, M. Jean-Michel Couve, M. Jean-Pierre Decool, M. Jean Dionis du Séjour, M. William Dumas, Mme Corinne Erhel, M. Daniel Fasquelle, M. Yannick Favennec, Mme Geneviève Fioraso, M. Jean-Louis Gagnaire, M. Claude Gatignol, M. Jean Gaubert, M. Bernard Gérard, M. Pierre Gosnat, Mme Pascale Got, M. Jean-Pierre Grand, M. Jean Grellier, Mme Anne Grommerch, M. Gérard Hamel, M. Henri Jibrayel, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, M. Michel Lefait, M. Jean-Marc Lefranc, M. Michel Lejeune, Mme Annick Le Loch, M. Jean-Claude Lenoir, M. Jean-Louis Léonard, M. Serge Letchimy, M. François Loos, M. Louis-Joseph Manscour, Mme Jacqueline Maquet, Mme Marie-Lou Marcel, M. Jean-René Marsac, Mme Frédérique Massat, M. Kléber Mesquida, M. Jean-Marie Morisset, M. Jean-Pierre Nicolas, M. Serge Poignant, Mme Josette Pons, M. Jean Proriol, M. François Pupponi, M. Michel Raison, M. Bernard Reynès, M. Franck Reynier, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Francis Saint-Léger, M. Alain Suguenot, M. Lionel Tardy, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Alfred Trassy-Paillogues, M. François-Xavier Villain, M. Jean-Michel Villaumé
Excusés. - M. Louis Guédon, Mme Conchita Lacuey, Mme Laure de La Raudière, M. Pierre Lasbordes, M. Jacques Le Guen, M. Philippe Armand Martin, M. Daniel Paul, Mme Anny Poursinoff, Mme Catherine Vautrin
Assistaient également à la réunion. - M. Daniel Goldberg, M. Gaël Yanno