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Commission des Finances, de l’économie générale et du Plan

Mission d’évaluation et de contrôle

Gestion des ressources humaines au ministère de l’Écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire

Jeudi 17 avril 2008

Séance de 10 heures

Compte rendu n° 10

Présidence de M. David Habib, Président

–  Audition de M. Didier Lallement, secrétaire général du ministère, Mme Corinne Étaix, préfiguratrice du pilotage et de l'évolution des services, Mme Hélène Jacquot-Guimbal, directrice générale des personnels et de l'administration, M. Daniel Pfeiffer, chef de mission pilotage des services, et M. Benoît Piguet, conseiller au secrétariat général.

M. David Habib, Président : Nous poursuivons les travaux de la mission d'évaluation et de contrôle consacrés à la gestion des ressources humaines au ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, ou MEEDDAT.

Je remercie M. Didier Lallement, secrétaire général du ministère, Mme Corinne Étaix, préfiguratrice du pilotage et de l'évolution des services, Mme Hélène Jacquot-Guimbal, directrice générale des personnels et de l'administration, M. Daniel Pfeiffer, chef de mission pilotage des services, et M. Benoît Piguet, conseiller au secrétariat général, d’avoir répondu à notre invitation.

J'ai plaisir à saluer la présence de deux représentants de la Cour des comptes, M. Yves Gleizes, conseiller maître, et M. Alain Mangeol, rapporteur. Leur contribution à nos travaux est extrêmement précieuse.

Je salue également M. Michel Piron, qui partage la fonction de rapporteur avec M. Jean Launay, aujourd’hui excusé de même que M. Georges Tron, co-président de la MEC.

Monsieur le rapporteur, vous avez la parole.

M. Michel Piron, Rapporteur : Monsieur le secrétaire général, madame la directrice générale, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation à venir nous décrire, de la façon la plus détaillée possible, les changements structurels des administrations désormais intégrées dans le ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

Monsieur le préfet Didier Lallement, nous sommes heureux de vous accueillir en tant que secrétaire général du MEEDDAT, fonctions que vous exercez, certes, dans un nouveau ministère mais dans un ministère dont vous connaissez des rouages essentiels puisque vous avez été de 2005 à 2007, directeur du cabinet du ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, et, pendant une partie de l'année 2007, directeur général de l'aviation civile, avant de prendre vos fonctions actuelles en octobre de l'année dernière.

Madame Jacquot-Guimbal, en tant que directrice générale du personnel et de l'administration du MEEDDAT, vous avez su donner la semaine dernière à mon co-rapporteur Jean Launay et au président David Habib des réponses précises à nos questions sur le bilan des décentralisations de 2000 et 2004 pour votre ministère. Ces réponses m'ont été transmises et je vous en remercie. De même, je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui encore, alors que vous êtes en première ligne pour faire passer dans les faits les réformes de structure qui nécessitent sans aucun doute de très importants efforts d'explication et de mise au point.

Je remercie aussi pour sa participation Mme Corinne Étaix, préfiguratrice du pilotage et de l'évolution des services, qui a, notamment, la lourde tâche d'imaginer concrètement de nouveaux circuits d'information et de décision, de les tester et de les optimiser.

Merci également à M. Daniel Pfeiffer, chef de mission pour le pilotage des services. Merci enfin à M. Benoît Piguet, conseiller au secrétariat général du MEEDDAT, dont le rôle est essentiel pour l'organisation de ces auditions de la MEC.

Comme vous le savez, nous avons adopté ce qui peut être considéré comme une définition extensive de notre thème d'étude – la gestion des ressources humaines – en portant aussi notre attention sur la réforme des structures du MEEDDAT. Mais comment ne pas considérer que les structures conditionnent la gestion des ressources humaines, tout spécialement en période de réforme profonde de l'organisation ?

Au cours de l’audition de jeudi dernier, consacrée plus particulièrement au bilan, pour votre ministère, de la décentralisation résultant des lois de 2000 et 2004, des informations très intéressantes nous ont été fournies par Mme Jacquot-Guimbal et ses collaborateurs sur le thème de la gestion des ressources humaines dans les administrations centrales et les services déconcentrés, telles qu'elles ont été influencées par le transfert aux départements de près de 18 000 kilomètres de routes nationales d'intérêt local.

Nous attendons aujourd'hui une présentation aussi précise que possible de ce que sera le MEEDDAT une fois les réformes actuelles achevées, tant au niveau des administrations centrales qu'à celui de vos services dans les départements et les régions.

Parmi les nombreuses questions auxquelles notre commission des finances porte un intérêt particulier, je citerai :

– l'évolution non seulement des effectifs mais aussi des compétences au sein de votre ministère ;

– ses capacités d'évaluation ex ante de la rentabilité des investissements dans les infrastructures et la mesure ex post de leur contribution tant au développement durable qu’à la compétitivité de l'économie de notre pays ;

– l'efficacité de la dépense publique ;

– la qualité du service rendu aux usagers, individuels ou collectifs.

Conformément aux méthodes de la MEC, notre réunion se déroulera sous la forme d'échanges et de questions-réponses. Je commencerai par une question générale sur la finalité des réformes en cours au MEEDDAT.

La formation du MEEDDAT est présentée comme une grande première européenne, sinon mondiale. Pour quelles raisons n'y a-t-il aucune structure comparable ? Quels sont les avantages attendus de la nouvelle structure ministérielle ? Sur quelle durée sa constitution va-t-elle se dérouler ? Quels sont les écueils à éviter pendant ce processus ? Quels sont les inconvénients potentiels d'une structure administrative aussi étendue ? Comment les atténuer ?

M. Didier Lallement : Le MEEDDAT regroupe trois départements ministériels – la partie énergie du ministère de l’industrie, l’équipement et l’environnement – auxquels il faut ajouter la direction interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires – DIACT –, bien qu’il s’agisse d’un service du Premier ministre. Il n’existe pas d’élément de comparaison en Europe pour un tel périmètre. Beaucoup de pays de l’Union fonctionnent avec des administrations centrales très réduites et de grosses agences. En un certain sens, le MEEDDAT intègre pour sa part la fonction d’administration centrale et celle d’agence, même si certains opérateurs et établissements publics dépendent de ce ministère.

En Grande-Bretagne, un même département regroupe environnement et affaires rurales. En Suède, ce sont l’environnement, l’énergie et la communication qui sont réunis. Ces périmètres sont larges, mais sans équivalent ailleurs. Le MEEDDAT n’en a pas davantage.

L’objectif de cette nouvelle structure ministérielle est simple : intégrer en un lieu unique un ensemble de préoccupations afin que les questions relatives à la réalisation d’infrastructures ou à l’énergie ne puissent être abordées sans que l’on mette en avant les aspects environnementaux. Les inconvénients de cet objectif lui sont inhérents : le MEEDDAT ne doit pas devenir une « boîte noire » où l’on rendrait les arbitrages à la place du Premier ministre. Si l’avantage est de regrouper les préoccupations, le risque est de trop les intérioriser. Comme en beaucoup de matières, tout l’art sera dans l’exécution.

M. Michel Piron, Rapporteur : Si j’ai bien compris, la nouvelle structure laissera au ministre la possibilité de réchauffer une cuisine à moitié préparée…

Existe-t-il des éléments de comparaison avec l’Allemagne ?

M. Didier Lallement : Nous pourrons vous les fournir.

M. Michel Piron, Rapporteur : J’en viens au rôle et aux moyens du secrétariat général. En tant que structure transversale au MEEDDAT, quelles seront ses tâches au sein du ministère ? Quelles directions générales fonctionnelles lui seront directement rattachées ? Quel sera son rôle par rapport au cabinet du ministre et aux cabinets des secrétaires d'État, ainsi que par rapport aux directions générales dites « directions de métiers » ?

M. Didier Lallement : Il n’existe pas, à proprement parler, de spécificité du secrétariat général du MEEDDAT. Les modèles d’organisation se répartissent entre des versions très « animatrices », comme au ministère de l’économie où le secrétaire général coordonne la modernisation et dispose d’un nombre réduit de services, et des versions très « intégratrices », comme au ministère de l’intérieur où la plupart des fonctions support dépendent du secrétariat général. Le MEEDDAT a choisi le modèle intégrateur. Son secrétariat général regroupera les affaires internationales, les affaires juridiques, le pilotage des services et de leur modernisation, la communication interne et externe, ainsi que la direction générale des personnels, le service du budget et le service de défense.

On ne saurait nier que cette intégration des fonctions support, outre la recherche d’une meilleure efficacité, vise à réaliser des économies par rapport aux activités réparties dans les trois entités précédentes. L’objectif principal n’en reste pas moins de concilier des cultures et des pratiques administratives très différentes. La culture du ministère de l’équipement est très régalienne, très organisée, très lourde, tandis que celle de l’environnement est plus spontanée, plus mouvante…

M. Michel Piron, Rapporteur : Plus poétique, peut-être ?

M. Didier Lallement : Pourquoi pas ?

M. Michel Piron, Rapporteur : Je n’ai rien contre la poésie !

M. Didier Lallement : La partie issue du ministère de l’industrie, qui inclut notamment le secteur nucléaire, présente des caractéristiques beaucoup plus classiques.

Les origines de corps sont également très différentes. Le MEEDDAT regroupe des ingénieurs des Ponts et chaussées, des Mines, du Génie rural, des eaux et forêts. Les administrateurs civils y sont somme toute peu nombreux.

La question du mariage des cultures se pose également au niveau de l’organisation des anciens ministères. Le ministère de l’équipement abritait un petit nombre d’établissements publics importants, comme Météo France ou l’IGN, mais externalisait assez peu ses fonctions et conservait de grosses directions – mille personnes pour celle de l’aviation civile, par exemple. L’externalisation était au contraire une pratique courante du ministère de l’environnement, où l’administration centrale était réduite et les agences très développées. L’industrie se situe entre les deux modèles, notamment dans le secteur nucléaire où l’on a externalisé certains processus en les confiant, entre autres, à l’Autorité de sûreté nucléaire.

Cette situation disparate pose le problème de l’harmonisation du réseau des opérateurs, à la fois par rapport au ministre et sur le terrain. Nous devons notamment améliorer l’articulation entre l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie – ADEME – et les services déconcentrés de l’État.

Tous ces enjeux d’harmonisation et de synthèse des cultures justifient l’existence d’un secrétariat général très intégrateur.

M. Michel Piron, Rapporteur : En effet, les questions culturelles sont loin d’être indifférentes pour la réussite de la démarche.

Quels ont été les critères de la décision pour arrêter les nouvelles grandes directions de métiers au MEEDDAT ? Quelles sont ces directions générales de métiers et comment les structures précédentes s'y trouvent-elles intégrées ? Quel est le sort réservé à la délégation interministérielle à la sécurité routière ? A-t-on évalué les économies budgétaires générées par le regroupement des services en quatre ou cinq grandes directions générales, contre une douzaine auparavant ? Enfin, chacune des directions générales de métiers sera-t-elle dotée d'un échelon chargé du développement durable, ou la prise en compte de cette dimension est-elle du ressort du commissariat général ?

M. Didier Lallement : Le décret et les arrêtés d’organisation, qui doivent faire l’objet d’ultimes arbitrages interministériels, sont dans une phase de finalisation. Après leur examen par les trois comités techniques paritaires ministériels, qui feront ultérieurement l’objet d’une unification, ils devraient être publiés fin mai ou début juin, c'est-à-dire avant le début de la présidence française de l’Union européenne. Il est en effet important que toutes les connexions soient faites à temps puisque, selon nos estimations, environ 60 % des sujets de cette présidence pèseront sur les épaules du MEEDDAT.

À ce stade d’élaboration administrative, l’idée est de regrouper les quarante-deux structures dont les dirigeants sont nommés en Conseil des ministres – parmi lesquelles trente-deux directions d’administration centrale – dans cinq directions générales.

La première, celle de l’énergie et du climat, organisera la politique française en matière de lutte contre les changements climatiques. Elle sera le fruit de la fusion de la direction générale de l’énergie et des matières premières, issue du ministère de l’industrie, et des structures consacrées au climat dans l’ancien ministère de l’environnement. L’intégration inclura aussi certaines sous-directions comme celle de l’automobile – dont les compétences recouvrent les normes automobiles, la circulation et la sécurité routière. Il ne s’agit pas de jeter la pierre aux constructeurs automobiles mais de rassembler tous ces éléments. De même, la sous-direction de la construction, qui est aujourd'hui en charge des normes des bâtiments au sein de la direction générale de l’urbanisme et du logement, sera rattachée à la direction générale de l’énergie et du climat, qui sera en première ligne lors de la négociation du « paquet énergie-climat », un des grands enjeux de la présidence française.

La procédure est la même pour les autres directions générales : nous ne nous contentons pas d’assembler des éléments épars, nous essayons de constituer des blocs cohérents.

La deuxième direction générale est celle des infrastructures et des transports, qui regroupera l’ensemble des directions ayant à connaître de sujets d’infrastructures dont, au premier chef, la direction générale de la mer et des transports et la direction générale des routes, qui seront fusionnées. L’objectif est de traiter les infrastructures de façon globale : le ferré et le routier, par exemple, seront abordés en fonction du sujet à traiter et non de façon sectorielle comme c’était le cas auparavant. La mise en œuvre de la priorité que constitue la réduction du trafic routier gagnera, nous l’espérons, en efficacité.

Si nous n’avons pas touché à la troisième direction générale, celle de l’aviation civile, c’est pour des raisons qui tiennent aux évolutions communautaires sur le « ciel ouvert » et au rôle des agences européennes en matière de navigation aérienne. Les négociations sont en cours et l’impact des décisions est difficile à prévoir. Il est cependant clair que la DGAC – qui présente cette particularité unique au monde de regrouper le contrôle, la sécurité et les aspects régaliens – ne sera plus, dans cinq ans, une direction générale de l’administration centrale. Pour autant, nous n’évoluerons certainement pas vers le modèle anglais car l’objectif n’est pas de privatiser la navigation aérienne.

La quatrième direction générale sera celle de l’aménagement, du logement et de la nature. Y seront réunies l’ancienne direction générale de l’urbanisme, de l’habitat et de la construction, la direction de l’eau et la direction de la nature et des paysages. Il s’agit donc, en quelque sorte, de mettre en place une approche globale de l’ensemble des habitats, humains ou non. C’est un pari. L’objectif reste d’atteindre les chiffres de construction de logements que le Gouvernement s’est fixés et relève, de ce fait, de la responsabilité de Mme Boutin. Telle est bien la spécificité de ce ministère, dont le fonctionnement, sous certains de ses aspects, est soumis à une double tutelle. Au total, cette direction s’attachera à mettre en place une gestion rationnelle et équilibrée des ressources naturelles, tant en matière de foncier que de biodiversité.

La cinquième direction générale, celle de la prévention des risques, rassemblera le traitement de l’ensemble des risques, technologiques, naturels ou chroniques, de façon à ce que notre approche soit plus transversale.

Il n’y a pas lieu de détailler dans cette audition la subdivision de chacune des directions générales : le ministère pourra vous fournir, messieurs les députés, ses avant-projets d’organigramme.

Le commissariat général est en quelque sorte la sixième direction du dispositif. Sont rassemblées sous cette appellation les missions de stratégie et d’évaluation du ministère. Les équipes de l’ancien ministère de l’équipement fournissaient un important travail statistique. Elles rejoindront l’Institut français de l’environnement, structure plus modeste issue du ministère de l’environnement, pour constituer un pôle statistique commun. Alimenté par les données de ce dispositif d’observation, le commissariat général établira la stratégie de développement durable non seulement du MEEDDAT, mais aussi de tous les autres ministères. En effet, le décret d’attribution du ministre d’État prévoit que celui-ci a à connaître des sujets relatifs au développement durable dans tous les autres départements ministériels. Le commissariat général aura donc à y promouvoir l’ardente obligation du développement durable.

Ni la délégation interministérielle à la sécurité routière, qui était tout à la fois une délégation interministérielle et une direction d’administration centrale de l’ancien ministère de l’équipement, ni la DIACT ne sont modifiées. L’une et l’autre sont mises à la disposition du ministre d’État, mais en tant que services du Premier ministre. Il n’est pas certain en revanche que la sécurité routière reste une direction du ministère, car nous sommes tenus par la nécessité de réduire le nombre de directions d’administration centrale. Il me paraît exclu, dans le futur périmètre ministériel, de dépasser le nombre total de vingt directions, directions générales et secrétariat général compris.

Pour ce qui est des économies budgétaires, si l’ensemble de ces actions vise à rendre le meilleur service possible au citoyen, la finalité est aussi de réduire les emplois. Nous ne connaissons pas encore la norme qui nous sera appliquée en la matière par rapport au principe général du non-remplacement d’un départ en retraite sur deux. Pour la période couverte par la prochaine loi de programmation budgétaire triennale, on peut estimer que 3 500 équivalents temps plein ne seraient pas remplacés. Ces ETP seront gagnés non pas sur les fonctions métiers mais sur les fonctions support, tant au secrétariat général que dans les services déconcentrés.

Autant le secrétariat général du MEEDDAT a une fonction support, autant le commissariat général exerce une fonction d’animation en matière de développement durable – il a ainsi organisé la semaine du développement durable, animation interministérielle impliquant le réseau déconcentré. Les deux structures s’efforcent, avec succès jusqu’à présent, d’être complémentaires.

De même, la répartition des tâches pour l’élaboration des projets de loi destinés à mettre en œuvre les conclusions du Grenelle de l’environnement est la suivante : le commissariat anime le secrétariat des comités opérationnels du Grenelle, puis le résultat de ces travaux est transmis au secrétariat général, qui se charge de l’écriture juridique et de la mesure de l’impact financier.

Pour en venir enfin aux relations entre le secrétaire général et les différents cabinets ministériels, il ne me semble pas que le MEEDDAT fasse exception. Le secrétaire général étant, par définition, en contact avec le ministre, il l’est avec son cabinet. Ses fonctions ne recoupent pas celles du cabinet, mais il doit les intégrer. Je considère qu’un secrétaire général ne doit pas se contenter de faire de l’« administration administrante » : il doit aussi établir des liens avec l’extérieur, avec le Parlement, etc. Cette fonction de représentation nécessite une bonne entente avec le cabinet. Un conflit entre un directeur de cabinet et un secrétaire général ne serait pas gérable.

M. Michel Piron, Rapporteur : Le commissariat général au développement durable rapportera-t-il directement au ministre ou sera-t-il placé sous l'autorité du secrétaire général ? Le commissariat sera-t-il chargé des études préalables au choix des infrastructures ? A-t-il vocation à prendre en charge toutes les études en amont des décisions prises par les directions générales ? De quels moyens disposera-t-il ?

Le site Internet du ministère indique que le commissariat s'appuiera sur un comité d'experts de haut niveau. S'agit-il d'un Conseil général de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, issu de la fusion du Conseil général des Ponts et chaussées et du Conseil général de l'environnement, ou d'une autre instance ?

M. David Habib, Président : On ne saurait trop se méfier des experts qui gravitent autour de ce ministère !

M. Michel Piron, Rapporteur : Vous m’autoriserez, monsieur le président, à ne pas partager tout à fait ce point de vue.

M. David Habib, Président : Bien entendu !

M. Didier Lallement : De même que le secrétariat général, le commissariat général dépend du ministre et s’inscrit dans un fonctionnement administratif traditionnel. Il comprend environ quatre cent cinquante fonctionnaires. En droit, le commissariat est une direction d’administration centrale ; au travers de son appellation originale, le ministre d’État a voulu marquer sa fonction d’animation de l’ensemble du dispositif du Grenelle de l’environnement et de la mise en place de la « gouvernance à cinq ». Au-delà de sa dimension stratégique, cette structure doit parvenir à servir d’interface au sein de cette gouvernance.

Ce n’est pas elle qui réalisera les études préalables : les directions de métiers en conserveront la charge. Le commissariat général élaborera en revanche le référentiel d’évaluation et vérifiera que ces études intègrent jusqu’au bout la dimension du développement durable. Il ne s’agit pas d’instaurer un climat de suspicion mais de compenser la tendance des directions d’administration centrales à s’affranchir des contraintes ne relevant pas de leur compétence.

Les experts de haut niveau n’ont pas été désignés. Le travail porte actuellement sur la gouvernance à cinq.

M. Michel Piron, Rapporteur : Pourriez-vous en rappeler les composantes ?

M. Didier Lallement : Elle associe les ONG, les entreprises, les syndicats, les élus et collectivités territoriales, et enfin l’État.

M. Michel Piron, Rapporteur : J’ose espérer que le Parlement est inclus dans la catégorie « élus ».

M. Didier Lallement : Je l’espère aussi.

M. David Habib, Président : J’espère pour ma part que l’ordre dans lequel vous avez cité les acteurs de la gouvernance à cinq ne reflète aucune hiérarchie.

M. Didier Lallement : S’il existe une hiérarchie, elle doit respecter les principes constitutionnels et les prérogatives du Parlement. Au demeurant, vos remarques mettent en relief le caractère inédit de ce système d’animation. Le commissariat général s’emploie à déterminer ce que signifiera la gouvernance à cinq en matière de grands projets. Se limitera-t-elle à une évaluation nationale ou descendra-t-elle au niveau local ? Un premier débat a eu lieu au sujet de la construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes : nous avons demandé au préfet de région d’organiser une table ronde. Le dispositif devra cependant être précisé et institutionnalisé. Il appartiendra à la représentation nationale de décider si la gouvernance à cinq s’exerce uniquement au niveau national ou si elle s’exerce projet par projet sur le plan local. Les deux options sont radicalement différentes. Il faudra également mesurer les incidences du dispositif sur le respect des compétences des collectivités territoriales, sur les déclarations d’utilité publique, les enquêtes publiques, etc. Les questions politiques et juridiques soulevées sont complexes. Il appartient au commissariat général de déblayer le terrain et de permettre d’avancer. C’est à cela que servira le think tank. Le ministère a d’ores et déjà mis en place un comité stratégique réunissant, sous la présidence du ministre d’État, les directeurs généraux, le commissaire général et le secrétaire général pour commencer à avancer sur ces sujets.

Pour résumer, le commissariat général est une structure intermédiaire entre une direction d’administration centrale et une interface avec le système résultant du Grenelle de l’environnement. Il n’est pas question qu’il assure la mise en œuvre des projets, qui restera de la compétence des directions de métier.

M. Michel Piron, Rapporteur : Le commissariat général assurera-t-il les études amont, dont dépend la qualité de la gouvernance ?

M. Didier Lallement : Il ne prendra pas en charge les études mais il en fixera les référentiels, qu’il s’agisse de chartes de qualité ou de cahier des charges des études. C’est en quelque sorte une norme qui sera établie, afin que l’on retrouve systématiquement un certain nombre d’items relatifs au développement durable dans les études, qui restent néanmoins de la compétence des directions de métiers.

M. Michel Piron, Rapporteur : Le rapport du conseil de modernisation des politiques publiques, en date du 4 avril, précise que le MEEDDAT doit « constamment veiller à renforcer ses capacités d'expertise dans les domaines nouveaux ou en croissance, comme la prévention des risques, l'expertise sur l'énergie ou la biodiversité ». Comment cet objectif sera-t-il atteint, par quelle stratégie et avec quels moyens ?

Le même rapport du conseil de modernisation précise que des marges de manœuvre en termes de personnels seront dégagées par le redéploiement des effectifs de l'ingénierie concurrentielle et d'une partie des effectifs du réseau scientifique et technique du ministère. Quels sont les effectifs des personnels concernés ? Quels sont les recrutements ou les formations envisagés ?

M. Didier Lallement : Nous sommes partis du principe qu’il convenait de conserver au sein des services tant centraux que déconcentrés de l’État une capacité d’expertise de haut niveau. Les services déconcentrés garderont donc leurs forces vives, car le MEEDDAT doit rester le ministère de l’expertise. La place qu’occupent les ingénieurs des différents corps dans l’organisation demeure donc essentielle.

Le système actuel d’expertise est assez ancien. Si l'Assistance technique pour la solidarité et l’aménagement du territoire – ATESAT – continuera d’apporter son aide en matière d’ingénierie aux petites communes, l’ingénierie de nos services déconcentrés doit évoluer. C'est ainsi qu’à la suite du Grenelle de l’environnement, ils doivent pouvoir apporter aux collectivités locales qui le souhaitent une ingénierie de qualité dans de nombreux domaines : villes durables, avec la prise en compte, dans l’organisation de la cité, de la politique des transports ou encore des changements climatiques ; bâtiments durables, qu’il s’agisse de la mise aux normes d’immeubles tant publics que privés, notamment HLM, ou de la rénovation énergétique des bâtiments ; lutte contre l’habitat indigne et insalubre ; meilleure connaissance et prévention des risques technologiques ; traitement des déchets ou encore planification et sécurité dans le domaine de l’eau. L’idée est de redéployer l’ingénierie traditionnelle vers ce type d’ingénierie.

Il convient toutefois de laisser émerger un secteur privé, car si toutes les conséquences du Grenelle sont tirées, les besoins seront énormes ne serait-ce qu’en matière de mise aux normes des bâtiments. L’État n’a pas vocation à remplir tout le spectre. Les collectivités territoriales doivent pouvoir s’adresser indifféremment soit au secteur privé soit à l’État.

Sur le terrain, le renforcement de l’expertise du MEEDDAT conduit à recruter beaucoup plus d’agents de catégorie A, c’est-à-dire d’ingénieurs, que de personnels de catégorie C. Un plan de reconversion, ou de repyramidage, sera donc effectué dans les prochaines années. Une circulaire adressée aux préfets leur demande de réfléchir d’ores et déjà sur ce sujet, et une concertation sera engagée avec les représentants des collectivités territoriales – AMF, ADF, ARF – afin d’éviter toute méprise, sachant que notre objectif est de susciter une ingénierie de haut niveau.

M. Michel Piron, Rapporteur : Comme dans le domaine routier, il est donc envisagé un certain partage d’expertise. Cependant, le secteur de la sécurité nécessitera peut-être, du fait de son caractère régalien, une ingénierie publique prédominante.

M. Didier Lallement : Les priorités pourront être hiérarchisées, mais l’idée est avant tout de redéployer une ingénierie qui, si elle a beaucoup servi au développement du pays, n’a pas toujours vocation à être conservée au niveau de l’État – comme pour les routes à la suite de leur décentralisation. Il s’agit de faire émerger un autre type d’ingénierie, concurrentielle, car les collectivités territoriales ne voudront pas forcément s’adresser à l’État.

Pour les personnels du MEEDDAT, très attachés à l’ingénierie, le ministère doit rester celui de l’expertise. Leur crainte est que les services déconcentrés soient absorbés par les services d’autres ministères, mais l’ingénierie sera conservée car il est essentiel de reconnaître le travail des personnels et sa valeur ajoutée. À cet égard, l’ingénierie apparaît également comme un outil de transformation interne.

M. Michel Piron, Rapporteur : Dans son rapport budgétaire pour 2008, M. Hervé Mariton, rapporteur spécial, indique que l'impasse de financement, pour les projets d'infrastructures de transport retenus, est de 10,5 milliards d'euros, compte non tenu des projets proposés par le Grenelle de l'environnement et de ceux décidés par le Président de la République. C'est ce qui explique l'importance accrue du calcul économique pour le choix des investissements et leur programmation.

Selon le rapport du conseil de modernisation des politiques publiques en date du 4 avril 2008, le Gouvernement aurait déjà engagé la révision du référentiel de calcul économique des grands projets d'infrastructure. Quelles sont les grandes orientations qui ont été arrêtées ?

Il est par ailleurs envisagé de mettre en place, au niveau national, un cadre formalisé de discussion des choix d'investissement de la nation associant l'ensemble des parties prenantes, selon une gouvernance à cinq. Quelles sont les principales caractéristiques de ce cadre formalisé ? Quelle sera la place des élus, en particulier des parlementaires dans cette instance ?

Il est enfin prévu de rendre la procédure de débat public national plus transparente et de l'appuyer sur une évaluation socio-économique contradictoire. La Commission nationale du débat public sera-t-elle confirmée dans son rôle, mais modifiée dans sa structure et ses modes de travail et d'intervention ?

M. Didier Lallement : M. Mariton avait soulevé la question de l'équilibre budgétaire de l’Agence de financement des infrastructures de transports – AFIT. Ce problème n'est cependant pas une surprise puisqu’il résulte du choix fait à l’époque de privatiser les autoroutes. En effet, il avait bien été précisé qu’au terme de la consommation de la part de 4 milliards d’euros de recettes de privatisation affectée à l’Agence, celle-ci devrait trouver d’autres modes de financement. Aussi proposerons-nous à l’examen de la représentation parlementaire la « taxe poids lourds », qui ne pourra toutefois être l’unique source de financement de l’AFIT, celle-ci ayant progressivement pris en charge des compétences qui n’étaient pas initialement prévues, notamment la rénovation des voies ferrées.

M. Michel Piron, Rapporteur : Cette taxe poids lourds vous paraît-elle être à la hauteur des enjeux ?

M. David Habib, Président : Ne faut-il pas plutôt se demander si c'est la privatisation des autoroutes qui est à la hauteur des enjeux ?

M. Didier Lallement : Le revenu de la taxe poids lourds n'est pas très éloigné de ce que pouvait être la productivité financière des autoroutes. En tout état de cause, le débat sur l’équilibre budgétaire de l’AFIT aura lieu en loi de finances, sachant que ses dépenses sont de 2 milliards en moyenne annuelle et que l’État a la possibilité d’abonder lui-même budgétairement l’Agence, ce qu'il fait d’ores et déjà.

Le référentiel de calcul économique doit intégrer non seulement le taux de rentabilité des investissements, mais également leur dimension en termes de développement durable, ce qui est d’ailleurs plus facile à faire pour les nouveaux projets que pour les anciens. Par exemple, lorsque le Président de la République annonce le gel de certaines constructions autoroutières, à quel moment du processus le réexamen des projets doit-il intervenir ? Il en va de même que pour le projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes : à quel moment la gouvernance à cinq doit-elle s’appliquer ?

Pour ce qui est du cadre formalisé de discussion des choix d’investissement, l’avant-projet de loi issu du Grenelle de l’environnement prévoit qu’une conférence nationale associant ces fameux cinq partenaires se réunira chaque année pour valider les indicateurs du développement durable. Il convient maintenant de trouver un mode de consultation portant sur les infrastructures majeures afin de définir le niveau auquel la discussion doit avoir lieu. Selon qu’il s’agira du niveau national ou local, le choix sera politiquement lourd de sens.

M. Michel Piron, Rapporteur : Ne peut-on concevoir que la discussion se déroule sur les deux plans, sans pour autant prendre les mêmes formes ?

M. Didier Lallement : C'est un choix à faire dans le cadre de la préparation du projet de loi. Pour notre part, nous réfléchissons à la gouvernance à cinq afin de proposer des mécanismes qui fonctionnent.

Notre souci est de prendre en compte le développement durable, non de mettre fin à la construction d’infrastructures autoroutières ou ferroviaires. Il s’agit, pour le MEEDDAT, d’arbitrer entre le développement durable et la poursuite d’un développement au bénéfice des populations et des entreprises. À cet égard, la gouvernance à cinq ne doit pas être un obstacle. Elle doit, au contraire, nous aider à progresser et à mieux faire accepter certains projets essentiels, face à des coalitions d’opposition dont la cohérence ne provient pas forcément de leur attachement à l’intérêt général.

M. David Habib, Président : Dispose-t-on d’éléments permettant de comparer le temps qu’il faut en France par rapport aux autres pays de l’Union européenne pour passer de la genèse d’un projet – une autoroute, par exemple – à sa réalisation ? N’ajoute-t-on pas, avec la gouvernance à cinq, une étape supplémentaire retardant le processus de décision de l’action publique ? Le ministre d’État a-t-il été alerté sur le risque qu’il y a, en termes tant d’aménagement du territoire que de croissance économique, à multiplier ces étapes ?

M. Didier Lallement : La direction générale des routes pourra vous adresser un comparatif des temps de réalisation.

Quant à la gouvernance à cinq, elle devrait permettre de dépasser certaines contradictions, même si, au moment des choix, nous serons toujours confrontés à des oppositions.

M. David Habib, Président : Selon vous, la gouvernance à cinq permettra-t-elle de les surmonter ?

M. Didier Lallement : La réalisation d’une route, par exemple, demande aujourd’hui beaucoup plus de temps que lorsque j’ai débuté ma carrière. La gouvernance à cinq ne permettra pas de mettre tout le monde d’accord, mais au moins montrera-t-elle que la discussion a eu lieu. Les gens semblent en effet finir par se persuader du contraire alors que les enquêtes publiques leur ont permis de s’exprimer. Certes, cela n’empêchera pas un riverain d’intenter un recours, mais personne ne pourra dire qu’il n’a pas été consulté.

M. David Habib, Président : On sait, en outre, que des associations représentées dans la gouvernance à cinq peuvent participer à de tels recours. Peut-être est-ce là le côté poétique souligné par M. le rapporteur ?

M. Michel Piron, Rapporteur : La gouvernance ne doit-elle pas obéir tout simplement à l’intérêt général et chercher la meilleure manière de le servir ? Lorsque l’on ne fait plus la différence entre le point de vue de l’élu, censé exprimer l’avis d’une majorité, et celui des particuliers qui, bien que regroupés sous une forme associative, ne représentent qu’une somme d’intérêts individuels, c’est l’idée même d’intérêt général qu’il devient difficile de faire valoir.

La formalisation doit faire en sorte que les notions d’intérêt général et d’utilité publique ne soient jamais perdues de vue dans les procédures complexes, sources de contentieux. Ce n'est pas le contenant qui doit déterminer le contenu, mais l’inverse. La hiérarchisation des points de vue est à cet égard essentielle.

M. David Habib, Président : Les procédures de plus en plus sophistiquées finissent en effet par faire oublier qu’il y a une mission à remplir. La concertation est souhaitable, mais elle ne peut résumer l’action publique.

M. Michel Piron, Rapporteur : Il ne faut pas en effet la confondre avec la délibération.

M. David Habib, Président : André Labarrère, auquel j’ai succédé, me rappelait toujours que, pour arriver au même résultat, la concertation coûtait deux fois plus cher et demandait dix fois plus de temps – c'est ce qui explique peut-être que je sois l’un des sept députés socialistes qui n’ont pas bénéficié du soutien des Verts lors des dernières législatives !

La réponse à la question relative au délai nécessaire pour réaliser un projet permettra de mieux comprendre pourquoi l’action publique n’aboutit pas aussi rapidement qu’on le souhaite, entraîne des coûts souvent exorbitants par rapport à nos moyens et n’est pas de nature à assurer une bonne régulation entre les différents acteurs puisque les contentieux ont malgré tout lieu.

Le processus initié par le Président de la République, que nous aurons à valider avec les projets de loi issus du Grenelle de l’environnement, permettra à chacun de faire valoir sa vision de la démocratie participative.

M. Bernard Piron, Rapporteur : Qu’en est-il à cet égard de la Commission nationale du débat public ?

M. Didier Lallement : Il n'est pas prévu, à ce stade, de la faire évoluer de façon substantielle.

M. Michel Piron, Rapporteur : La comparaison internationale concernant les délais de réalisation des grandes infrastructures me semble également très intéressante.

M. David Habib, Président : Nous avons beaucoup à apprendre de l’Espagne, notamment dans le domaine des liaisons ferroviaires.

M. Didier Lallement : Nous ne construisons pas suffisamment d’aéroports pour que la comparaison en la matière soit pertinente, mais des études seront conduites dans le domaine des autoroutes, des voies ferrées ou encore des voies navigables.

M. Bernard Piron, Rapporteur : Parlons de la structure du budget. Après la constitution du MEEDDAT, le nombre de programmes de votre mission, qui sont au nombre de douze dans la loi de finances de 2008, seront-ils modifiés ? Faut-il s'attendre à des rectifications de périmètres pour certains programmes et lesquels ?

Le nombre d'objectifs de chaque programme sera-t-il revu à la baisse ? Quels indicateurs de performance seront mis en place pour mesurer la contribution des différentes actions d'un programme au développement durable ?

Les actions de recherche relatives au développement durable seront-elles rattachées à la mission MEEDDAT ou appartiendront-elles à la mission Recherche et enseignement supérieur ? Dans le second cas, comment la coordination pour le choix des priorités et le contrôle des résultats seront-ils organisés entre les deux missions ou les deux ministères ?

M. Didier Lallement : La maquette budgétaire construite pour 2008 ne connaîtra pas d’évolution majeure. Nous tirerons simplement les conséquences de la réorganisation du ministère en regroupant au sein d’un programme Infrastructures tout ce qui a trait au réseau routier national et aux transports terrestres et maritimes ainsi qu’à la gestion des infrastructures et au trafic, domaines qui relèvent du programme Sécurité routière. De même, un programme Aménagement, urbanisme et ingénierie publique sera créé qui reprendra, à l’instar de la réunion de la direction générale de l’urbanisme et de la construction et de la direction de l’eau, de la nature et des paysages, des éléments budgétaires figurant dans les programmes précédents.

Pour le reste, le ministère présente la spécificité de disposer d’un programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables qui est très mutualisé. Il sera conservé, car il servira à réaliser l’intégration en même temps que des économies.

Les programmes seront recalés en fonction de notre organisation, de manière à faire parfaitement coïncider le champ des directions générales concernées et la maquette budgétaire. Il ne sera cependant pas touché à la mission interministérielle Recherche et enseignement supérieur, tout simplement parce qu’elle n’est pas directement de notre compétence.

Les premières discussions avec la direction du budget ont montré, en revanche, un souhait partagé de limiter les objectifs à cinq par programme et les indicateurs à deux par objectif. Il conviendra de préciser quels indicateurs nous conservons au regard de l’impact du développement durable sur les différents programmes.

M. Michel Piron, Rapporteur : Selon la circulaire du Premier ministre du 19 mars 2008, des directions régionales du développement durable reprendront les compétences des directions régionales de l'équipement – DRE –, y compris le logement, des directions régionales de l'environnement – DIREN – et des directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement – DRIRE –, à l'exception, pour ces dernières, de leurs missions de développement industriel.

Séparées d'une année, trois vagues de fusion sont programmées, la première étant prévue pour janvier 2009. Quelles sont les principales difficultés prévisibles pour une telle réforme ? Comment le retour d'expérience sera-t-il mis en œuvre ? Quelles sont les économies de fonctionnement attendues de ce regroupement ?

M. Didier Lallement : Le regroupement au niveau régional se fera bien en trois phases et non en deux comme au niveau départemental avec la fusion des DDE et des DDA menée après une expérimentation dans huit départements. Certes, une expérience a eu lieu avec la fusion des DRIRE et des DIREN dans cinq régions, mais elle n'est pas transposable pour un mariage à trois.

M. Michel Piron, Rapporteur : Pourquoi cette expérience ne pourrait pas servir en la matière ?

M. Didier Lallement : On ne peut tirer de l’expérience de fusion des DRIRE et des DIREN, menée sous la précédente législature en Corse, en Haute-Normandie, dans le Nord-Pas-de-Calais, en Picardie et en PACA, un modèle généralisable du fait de la taille des DRE. C’est d’ailleurs toujours ce problème de taille qui pose problème tant au niveau de l’administration centrale qu’au niveau régional, car à chaque fois l’on trouve une partie équipement importante, une partie environnement plus légère et une partie industrie d’importance intermédiaire.

M. Michel Piron, Rapporteur : On peut être poète et penser. Il n’y a pas forcément antinomie entre cultures rationalistes et cultures plus créatives. Finalement, ces questions de taille ne cachent-elles pas des questions de pouvoir ?

M. Didier Lallement : La poésie n’empêche en effet pas le pragmatisme. Cependant, de tels rapprochements soulèvent des problèmes non seulement de taille, mais également de culture et, bien entendu, de gestion de corps. Alors que l’équipement comprend une majorité d’ingénieur des Ponts, les DRIRE comptent une majorité d’ingénieurs des Mines, tandis que les DIREN accueillent des ingénieurs à la fois des Mines et des Ponts. En outre, les modes de rémunération sont différents. Il n’existe pas, par ailleurs, d’emploi fonctionnel de DRIRE contrairement à la DRE et à la DIREN.

La question fondamentale est de savoir comment la future entité sera organisée. Si elle doit l’être en trois services, en reprenant chacun des services précédents, la fusion n’aura pas été réussie. Il faut donc l’organiser de façon plus transversale, ce qui demande de la réflexion, de l’ingénierie et la maîtrise technologique du processus de fusion.

L’étalement de cette dernière sur trois ans tient également au fait qu’il faudra passer, en métropole, de soixante-six directeurs à vingt-deux. Au terme de la réorganisation de l’administration centrale, une vingtaine de directeurs, quarante-quatre directeurs régionaux et cinquante directeurs départementaux ne seront plus directeurs, car si l’on comptera, par exemple, toujours 100 directions départementales de l’équipement et de l’agriculture (DDEA), le partage des emplois à part égale avec le ministère de l’agriculture a été décidé – la répartition aurait logiquement dû être de 80/20, mais nous avons préféré mettre notre patriotisme de ministère de côté au regard de l’intérêt général que représente la fusion.

D’autres ministères connaissent un même problème de retraitement de cadres supérieurs, mais il n’atteint une telle intensité que dans le nôtre. Or régler l’aspect humain demande du temps, car on ne fait pas de réforme en décourageant l’encadrement. Certains directeurs régionaux accepteront d’être adjoints dans une autre région, mais d’autres, à juste titre, le refuseront. Il faut les utiliser sans forcément les envoyer au Conseil général des Ponts et chaussées, qui deviendra demain le Conseil général du développement durable.

M. Michel Piron, Rapporteur : Il va de soi que la fusion ne peut être réalisée de façon mécanique.

Le rapport du Conseil de modernisation des politiques publiques, en date du 4 avril 2008, indique que la réorganisation du MEEDDAT s'accompagnera d'un regroupement des personnels sur un nombre limité de sites, principalement à La Défense. Quels sont ces sites ? Quels critères sont utilisés pour décider de regrouper telle ou telle autre direction générale ? Quelles ont été les réactions et les demandes des personnels ?

S'agissant de la direction générale de l’énergie et des matières premières - DGEMP – et de ses personnels, quelle sera leur localisation, leur situation actuelle dans le XIIIe arrondissement les plaçant à l'écart des autres équipes ?

M. Didier Lallement : Le schéma immobilier que nous avons présenté repose sur le regroupement de l’ensemble des implantations sur deux pôles : d’une part, le pôle traditionnel du ministère de l’équipement à Saint-Germain, agrandi des bâtiments du ministère des transports, soit une surface allant de l’hôtel de Roquelaure à la rue du Bac, où sera implanté l’ensemble des cabinets ministériels ainsi qu’un nombre limité de fonctionnaires dont le Haut fonctionnaire de défense (HFD) ; d’autre part, le pôle du quartier de La Défense, qui accueillera l’ensemble des services, à l’exception de la direction générale de l’aviation civile qui conservera son bâtiment en propriété le long de l’héliport. Toutefois, nous souhaitons garder le bâtiment traditionnel de l’entité Mer de la place Fontenoy qui accueille non seulement les services maritimes du MEEDAT, mais également l'Établissement national des invalides de la marine – ENIM –, la sécurité sociale des marins, la direction des affaires maritimes et la direction des pêches, laquelle relève du ministère de l’agriculture.

Comme je crois beaucoup à la valeur de l’exemple, je m’installerai dans l’une des tours de La Défense au début du mois de mai. Nous étalerons les déménagements tout au long de la présidence française afin de ne pas la perturber, car ces déménagements sont l’occasion de mettre en place le nouvel organigramme de l’administration centrale. En l’occurrence, je pense plus particulièrement à la direction générale de l’énergie et des matières premières. En effet, le poids qu’aura la future direction générale de l’énergie et du climat dans la négociation qui sera menée sous présidence française empêche d’envisager son déménagement avant le deuxième trimestre 2009.

À terme, lorsque tous les déménagements auront été réalisés, l’implantation Ségur sera vendue. Le ministère sera alors l’un des rares à être implanté en dehors de Paris. Il faut souhaiter que cet exemple soit suivi par mes collègues secrétaires généraux d’autres ministères.

M. Michel Piron, Rapporteur : La création du MEEDDAT résulte d'une forte volonté politique. La question de l'efficacité de la nouvelle structuration de l'action publique dans le domaine de la protection de l'environnement, de l'énergie, du logement, de l'équipement, des transports, de la prévention des risques, doit toutefois être posée.

Sachant que l'efficience du nouvel ensemble sera mesurée à l'aune du développement durable, quels sont les critères d'ensemble qui peuvent être définis dès maintenant à cet effet ?

M. Didier Lallement : Le propre de la constitution du ministère est de définir des critères, même si les conclusions du Grenelle de l’environnement ou le discours du Président de la République en ont déjà donné un certain nombre, tel l’objectif de réduction de 20 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2020. Ces critères ambitieux serviront d’indicateurs pour mesurer si nous avons été ou non efficaces. Auparavant, le paquet « Énergie-Climat » permettra déjà de savoir si, dans le cadre de la présidence française, des dispositifs ont pu être présentés au Parlement européen en matière d’énergie et de climat ou encore de taux d’émission de CO² des véhicules. Au fur et à mesure de la mise en œuvre des engagements internationaux, de nombreux éléments permettront de juger de la pertinence du dispositif ministériel.

Le ministère a les moyens de son ambition. À lui de réussir. C’est d’ailleurs pourquoi nous tenons à régler tout de suite les problèmes d’organisation. La finalité de l’administration n'est pas sa réorganisation. S’il lui faut rationaliser l’utilisation de ses locaux, diminuer le nombre de ses emplois, elle doit surtout mettre en œuvre les politiques du Gouvernement et démontrer à la représentation parlementaire que ses objectifs ont été atteints.

M. Michel Piron, Rapporteur : Le terme de développement durable est composé d’un substantif et d’un qualificatif. Pour prendre l’exemple du logement, si l’aspect durable a été mis en valeur avec le Grenelle de l’environnement, il ne faut pas oublier l’aspect développement, en particulier, la production de logements en termes quantitatifs, fut-elle qualifiée de durable.

L'audition précédente a fait apparaître une dimension fondamentale à prendre en compte dans la mise en œuvre de la réforme, à savoir le service rendu aux collectivités territoriales et aux consommateurs. Quel est le point de vue du ministère sur cette question ?

La dématérialisation des procédures peut-elle servir de substitut au contact direct avec les usagers ? Des enquêtes de satisfaction sont-elles prévues pour mesurer l'impact de la réforme ?

M. Didier Lallement : On ne peut répondre à ces questions sans rappeler ce qu’a été la réorganisation de nos principales implantations territoriales à la suite de la décentralisation des routes. L’ex-ministère de l’équipement s’est, à l’époque, rapproché des collectivités locales afin que le nombre d’implantations territoriales reste assez proche de ce qu’il était avant la fusion, mais le transfert empêchait de garder les mêmes implantations. Dans certains endroits, les personnels ont eu du mal à le comprendre, et c'est pourquoi nous avons mis en place un système d’antennes qui était coûteux en termes de personnels, mais qui rassurait à la fois ces derniers et les élus des petites communes, très attachés à la présence de l’équipement sur leur territoire. Devoir se rendre au chef-lieu pour y trouver un guichet unique répondant à tous les besoins, n'est en effet tout simplement pas concevable pour certains maires ruraux.

M. David Habib, Président : Je vous invite à m’accompagner en Béarn dans un canton de ma circonscription afin que vous vous rendiez compte du niveau d’écoute de votre ministère vis-à-vis par exemple d’un pétitionnaire en matière de certificat d’urbanisme !

M. Didier Lallement : Ma carrière m’a permis de vivre des moments surréalistes, notamment lorsque des élus m’expliquaient qu’ils pourraient à la limite se rendre à la sous-préfecture, mais certainement pas – plus pour une question de culture que de transport – au chef-lieu distant de soixante kilomètres.

Si je faisais ce rappel de la décentralisation des routes, c'est pour expliquer qu’en matière d’implantations territoriales, le ministère a donné ce qu’il y avait à donner. Il n'est pas envisagé en effet dans la réorganisation des services départementaux d’aller plus loin. L’ATESAT sera maintenue et les ETP resteront à 1 800 dans les bleus budgétaires qui lui sont consacrés. Ce service de proximité est une absolue nécessité pour les communes rurales. Il est d’ailleurs exigé par la loi, et l’engagement est pris devant vous de ne pas le réduire en le réorganisant.

Pour ce qui est de la satisfaction des usagers, la dématérialisation des procédures n’a pas de sens partout. Ne trouve-t-on pas encore dans les fermes de nombreux Minitel, matériel qui reste toujours un outil pour les aides agricoles ? Les générations qui vont arriver aux affaires passeront sans difficulté à l’Internet, mais nombre de nos anciens ne s’y mettront jamais. Un système de guichet reste donc nécessaire.

M. David Habib, Président : Il me reste, monsieur le secrétaire général, à vous remercier. La tâche est énorme, mais notre impatience l’est tout autant. Aussi comptons-nous organiser ultérieurement des auditions tant avec les organisations syndicales qu’avec l’échelon local en la personne d’un préfet et d’un président de conseil général.

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