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Commission des Finances, de l’économie générale et du Plan

Mission d’évaluation et de contrôle

Opérations militaires extérieures, notamment sous mandat international

Mercredi 29 avril 2009

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 26

Présidence de M. Georges Tron, Président

– Audition de Mme Sylvie Bermann, directrice des Nations unies, des Organisations internationales, des droits de l'Homme et de la francophonie au ministère des affaires étrangères et européennes

M. Georges Tron, Président. Je souhaite la bienvenue aux représentants du ministère des Affaires étrangères et européennes, Mme Sylvie Bermann, directrice des Nations unies, des Organisations internationales, des droits de l'Homme et de la francophonie au ministère des affaires étrangères et européennes, M. Olivier Guerot, sous-directeur pour les affaires institutionnelles et les contributions internationales à la direction des Nations unies, et M. Nicolas Lacôte, secrétaire des affaires étrangères.

Travaillant sans esprit partisan, la MEC tend à dégager des propositions de consensus afin d’améliorer les politiques publiques. Il s’agit aujourd’hui d’identifier les facteurs de la croissance tendancielle des dépenses liées aux opérations extérieures (OPEX). L’usage de la MEC est d’être accompagnée de représentants de la Cour des comptes, aujourd'hui représentée par Mme Françoise Saliou, présidente de section, et par M. Benoît d’Aboville, conseiller maître en service extraordinaire.

Les rapporteurs – Mme Françoise Olivier-Coupeau et M. Louis Giscard d’Estaing, respectivement membres des commissions de la Défense et des Finances – tiennent à recueillir le point de vue du ministère des Affaires étrangères sur les aspects propres aux opérations de maintien de la paix sous mandat international (OMP). Ils souhaitent également pouvoir approfondir leur réflexion sur la transition entre les opérations militaires et l’aide au développement.

Mme Sylvie Bermann. Les opérations de maintien de la paix sont des instruments essentiels pour la France. Nombreuses au milieu des années 1990, elles ont subi une certaine désaffection après les échecs au Rwanda, en Bosnie et en Somalie. Leur nombre a augmenté de nouveau à partir de 2002, lorsque sept nouvelles opérations requérant des effectifs importants ont été lancées. On compte aujourd’hui seize OMP, réunissant 130 000 personnels – dont 30 000 civils –, situées pour la plupart en zone subsaharienne.

Dans cette partie du monde qui intéresse plus particulièrement la France, les Nations unies sont intervenues à notre demande, soit en relève d’une opération française, comme en Côte d’Ivoire, soit en substitution, comme au Tchad.

Le mandat du Conseil de sécurité donne un cadre légitime et universel aux opérations. Ainsi, une intervention de l’OTAN au Liban aurait pu être ressentie comme une opération de croisés dans le monde musulman. C’est donc tout l’intérêt de la France que d’intervenir dans ce cadre, qui, en outre, offre des garanties sur le plan militaire. Enfin, en tant que membre permanent du Conseil de sécurité, la France se doit d’exercer ses responsabilités.

Les 383 millions d’euros que représentent les OMP en 2008 sont à rapprocher des 850 millions d’euros dépensés la même année par le ministère de la Défense au titre des OPEX. Le coût d’un casque bleu – environ 40 000 euros par an – est bien inférieur à celui d’un soldat envoyé par la France dans le cadre d’une intervention bilatérale, européenne ou sous l’égide de l’OTAN. Il conviendrait également de comparer le coût d’une OMP à celui – inchiffrable – d’une non-intervention.

Autrefois, les OMP prenaient fin le jour des élections dans le pays concerné, avec l’arrivée de la démocratie. C’est ce qui s’est passé à Haïti, où nous avons dû cependant revenir dix ans après, alors que la situation s’était beaucoup dégradée. Désormais, les opérations sont plus complexes et visent, par le maintien d’une présence sécuritaire, à l’instauration d’une paix durable. À cet effet ont été lancés, d’une part un nouvel instrument, la Commission de consolidation de la paix – émanation du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale, destinée à aider les pays à effectuer la transition difficile de la guerre à la paix –, d’autre part une réforme des activités opérationnelles des Nations unies pour favoriser une meilleure synergie avec les agences comme le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) ou le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), qui viennent en relais des opérations, et enfin des changements dans le secteur de la sécurité, tous éléments qui permettent de mieux gérer l’après-crise.

Une fois le mandat défini par le Conseil de sécurité, le budget consacré à l’opération est examiné par le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) – organe subsidiaire de l’Assemblée générale – puis par la Cinquième commission (administrative et budgétaire).

Il serait illusoire de penser que le nombre d’OMP ira décroissant. Le déploiement au Soudan de la Mission des Nations unies et de l’Union africaine au Darfour (MINUAD) n’est effectué qu’à moitié et la relève de la force européenne déployée depuis un an au Tchad et en Centrafrique (EUFOR Tchad/RCA) est en cours.

Nous avons beaucoup travaillé pour renforcer la professionnalisation des OMP, sur les plans tant militaire, afin de disposer des instruments de planification qui nous manquaient, que logistique et budgétaire. Parallèlement au département des opérations de maintien de la paix (DOMP) qui est un département – dirigé par Alain Le Roy – du Secrétariat des Nations unies, un département de l’appui aux missions (DAM), dirigé par Mme Suzanne Malcorra, a été créé dans le but d’accroître la transparence ainsi que l’efficacité et la rapidité des déploiements. Un séminaire a été organisé au mois de janvier, portant sur tous les aspects des OMP et le Conseil de sécurité.

Enfin, dans une optique de complémentarité, les Nations unies coopèrent avec les organisations régionales, telles l’Union européenne et l’Union africaine.

Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. À quoi tient la différence de coût entre un casque bleu et un soldat français envoyé dans le cadre d’une OPEX ?

Mme Sylvie Bermann. Dans la mesure où les Nations unies remboursent les États contributeurs, il revient moins cher pour la France d’envoyer un casque bleu qu’un soldat, dont la charge revient entièrement au ministère de la Défense. Par ailleurs, le niveau d’équipement n’est pas le même.

Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Les 383 millions d’euros consacrés aux OMP pèsent très lourdement sur le budget du ministère des Affaires étrangères et européennes. Comment financez-vous cette impasse ?

Mme Sylvie Bermann. Le budget des OMP est prélevé sur le budget de fonctionnement du ministère, ce qui pose problème. Pour échapper à cette contrainte, il avait été envisagé de créer un programme budgétaire spécifique, mais cette solution n’a pas été retenue.

M. Olivier Guerot, sous-directeur pour les affaires institutionnelles et les contributions internationales. La sous-dotation qui existait au début des années 2000 a pu être résorbée grâce à un effort budgétaire et à une baisse des coûts. L’équilibre a à peu près été atteint en 2002-2003, mais à partir de 2004 les moyens alloués ont été stabilisés alors que le coût, principalement des OMP, repartait à la hausse avec le lancement de nouvelles opérations. Le rebasage effectué en 2006 n’a pas permis de compenser la montée des coûts. La sous-dotation actuelle est financée par la levée de la réserve légale de crédits gelés et par des crédits dotés en loi de finances rectificative.

Mme Sylvie Bermann. Nos futures dépenses pourraient être contrôlées. Par exemple, compte tenu des conditions actuelles de sécurité, la France ne juge pas souhaitable de lancer une OMP en Somalie. Pour autant, d’autres crises peuvent éclater.

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Il est parfois difficile de faire la part des coûts correspondant aux OMP – c'est-à-dire la contribution de la France aux Nations unies et ses engagements en tant que pays contributaire – de ce qui relève des OPEX. Les dispositifs peuvent en effet soit être superposés soit engendrer des surcoûts au titre des OPEX – je pense notamment aux 70 millions d’euros à imputer à la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL).

Mme Sylvie Bermann. La part de la contribution française aux OMP a été fixée à 7,4 %, ce qui représente 646 millions de dollars pour 2009. Le barème devrait être révisé à la fin de l’année, ce qui nous laisse espérer une diminution de notre quote-part. Par ailleurs, nous participons à hauteur de 6,3 % au budget global des Nations unies.

Le remboursement par les Nations unies est forfaitaire et correspond à un coût moyen des personnels et de l’équipement. Si la France décide de déployer du matériel sophistiqué, comme cela a été le cas des chars Leclerc au Liban, elle doit assumer le surcoût correspondant.

Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. L’évolution de la contribution française aux OMP laisse attendre un pic impressionnant en 2010.

Mme Sylvie Bermann. D’ordinaire, une partie des appels de l’année N porte sur l’année N–1. Le barème étant révisé fin 2009, les appels 2009 ne porteront que sur 2009. Cela explique la baisse de 2009, compensée en 2010. À ce report technique, il faut ajouter la hausse des coûts liée aux opérations lancées au Tchad et au Darfour ainsi qu’au soutien logistique accordé à l’opération de l’Union africaine en Somalie (AMISOM).

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. S’agissant du Tchad, la Mission des Nations unies en République Centrafricaine et au Tchad (MINURCAT) prend le relais de l’EUFOR Tchad/RCA. Dans quelle mesure le budget qui lui est consacré va-t-il augmenter ?

M. Olivier Guerot. Les prévisions pour 2009 sont de 48 millions de dollars, contre 29 millions de dollars en 2008. Pour la France, cette augmentation sera compensée par la diminution du coût de l’EUFOR.

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Pourtant, c’est le ministère de la Défense qui finance l’EUFOR. Or c’est au ministère des Affaires étrangères que sera imputée cette augmentation.

Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Le financement des OMP trouve en effet son origine dans le budget du ministère des Affaires étrangères et les coûts des OPEX sont supportés par le ministère de la Défense. Mais c’est ce dernier qui reçoit les remboursements forfaitaires des Nations unies.

M. Olivier Guerot. Lorsqu’un déploiement français s’effectue, la première dépense est supportée par le ministère de la Défense. Les Nations unies remboursent ensuite forfaitairement les contributeurs de troupes, sur la base des crédits obtenus de l’ensemble des membres.

Mme Sylvie Bermann. Ce système de financement commun est plus avantageux pour la France. Notons qu’un tel système aurait pu être adopté dans le cadre européen, mais que les Britanniques l’ont refusé.

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Suite à une remarque de la Cour des comptes, les remboursements des Nations unies apparaissent depuis 2008 dans le budget du ministère de la Défense, considéré comme l’opérateur « technique ». Auparavant, ils étaient inscrits au budget général.

Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Le système instauré par les Nations unies vous paraît-il satisfaisant ?

Mme Sylvie Bermann. C’est un système équitable. Il est normal que les pays riches, mieux dotés sur le plan militaire, aient à supporter un surcoût.

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. En Afrique, la France est en première ligne pour ce qui est des opérations multilatérales. Or il semble que nous éprouvions quelque difficulté à convaincre d’autres nations – européennes ou africaines – d’intervenir à nos côtés. Quel regard portez-vous sur l’attitude réticente de nos partenaires ?

Mme Sylvie Bermann. Les opérations en Côte d’Ivoire et au Tchad ont été voulues par la France. La première était au départ bilatérale ; lorsqu’elle s’est multilatéralisée, nous nous sommes efforcés de convaincre nos partenaires. Un certain nombre de pays africains participent aujourd’hui à cette mission.

Nous avons réussi à rallier des États membres pour une opération européenne au Tchad, puis nous avons réussi à obtenir des Nations unies qu’elles relèvent cette opération au bout d’une année. Des pays africains – Togo, Bénin, Maroc – participent à la MINURCAT, qui a pris le relais de l’EUFOR le 15 mars.

Dans les années 1990, la France et ses partenaires européens étaient les premiers contributeurs de troupes. La situation est aujourd’hui différente, la FINUL faisant figure d’exception. Les effectifs des troupes européennes se réduisent de plus en plus, et avec eux, l’expertise militaire.

Les contingents africains sont nombreux sur le papier, mais ils manquent de matériel et de formation. Un programme européen, EURORECAMP, a pris le relais du programme français RECAMP (Renforcement des capacités africaines au maintien de la paix) afin de renforcer l’expertise, d’unifier les normes de commandement, de former les soldats aux notions d’État de droit ou de droits de l’Homme. Il nous faut à la fois encourager les capacités africaines de maintien de la paix et la participation directe des nations qui possèdent l’expertise.

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. D’après les informations que nous tenons de la Cour des comptes, sur les 88 000 soldats envoyés dans ce cadre, 13 000 sont européens. Ce sont surtout l’Italie, la France et l’Espagne qui sont contributaires – au contraire de la Suède, sans parler de la Grande-Bretagne –, les États membres engagés en Irak et en Afghanistan n’ayant pas souhaité participer à ces opérations.

Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. EURORECAMP est un programme utile ; cependant, les crédits consacrés à la coopération militaire diminuent.

Mme Sylvie Bermann. C’est le cas, malheureusement, de tous les budgets. Les contributions volontaires à l’ensemble du système ont également diminué de moitié.

La coopération dans le domaine militaire dépend de la direction de la Coopération, de la sécurité et de la défense (DCSD) du ministère. Parallèlement, le ministère de la Défense apporte un appui sur le terrain, notamment grâce aux hôpitaux de campagne, destinés aux troupes mais ouverts aux populations civiles.

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Précisément, dans les OPEX, l’activité du service de santé des armées est consacrée à 90 % aux populations civiles. Ne serait-il pas conforme à la logique de la LOLF de considérer ces actions comme relevant de la coopération, avec un financement adéquat ?

Mme Sylvie Bermann. Certes, l’activité est tournée vers les populations civiles. Mais elle n’existerait pas sans opération sur le terrain. C’est donc bien une dépense liée à une OPEX.

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Prenons un exemple. L’hôpital militaire de Tomboukro, en Côte d’Ivoire, démonté depuis, n’était visiblement pas calibré pour recevoir les contingents de l’opération Licorne, mais pour accueillir la population civile. Il n’y avait aucune raison de disposer d’un hôpital militaire de campagne de cette dimension par rapport aux risques purement militaires encourus par le contingent français. Une partie des activités du service de santé des armées est ainsi clairement destinée à apporter un soutien aux populations civiles. Les Britanniques ont une approche interministérielle de ces fonds, dédiés à la stabilisation, qu’ils distinguent des dépenses militaires pures.

Mme Sylvie Bermann. Une fraction de ces activités est comptabilisée comme aide publique au développement (APD). Par ailleurs, la DCSD mène des actions complémentaires dans le domaine de la santé.

Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Ces activités, parallèlement aux actions civiques menées par l’armée, concourent en effet à la stabilisation du pays. La Grande-Bretagne les a rassemblées dans une zone grise – budgétaire et conceptuelle. Toute la question est d’imaginer un dispositif – interministériel par exemple – suffisamment solide pour les inclure.

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. C’est une question d’affichage. Si ces actions relevaient de l’APD, le pourcentage du PNB que nous y consacrons s’en trouverait relevé. Lorsque l’on se rend en Afrique, il est frappant de constater combien les médecins militaires français soignant les populations locales sont plus nombreux que les médecins venus du Danemark ou de Norvège, deux pays affichant pourtant un ratio APD/PNB bien supérieur au nôtre.

Mme Sylvie Bermann. Leur PNB étant inférieur, il est normal que leur action soit moins visible.

Mais il est vrai que les activités militaires destinées aux populations civiles appartiennent à une zone grise. Malgré l’intérêt que représente leur développement en termes d’affichage, trop peu de fonds y sont consacrés. Je reviens de Géorgie, où la Mission d'administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK) ne dispose d’aucun crédit pour cela.

Une réflexion est en cours aux Nations unies pour renforcer cette dimension civile des opérations. Les critères du CAD de l’OCDE ont été révisés afin de comptabiliser certains aspects des activités dites « civilo-militaires » (ACM), comme la réforme du secteur de la sécurité ou la réinsertion des enfants soldats, dans un forfait représentant 7 % des OMP.

M. Olivier Guerot. Le ministère de la Défense établit une comptabilisation partielle des activités des hôpitaux militaires au titre de l’Aide publique au développement ; le ministère des Finances transmet ces données à l’OCDE.

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Ce n’est pas tant le volume de l’aide civile, même s’il est dérisoire, qui pose problème, que son affectation. En Afghanistan, on constate d’importantes négligences dans l’organisation des actions. De manière générale, il y a dévaluation de la notion d’aide.

Mme Sylvie Bermann. Le département des opérations de maintien de la paix réfléchit à l’élaboration d’une nouvelle démarche qui tiendrait compte de ces éléments. En Haïti, la sécurité n’est pas encore rétablie, mais les demandes de la population portent plus sur le développement que sur la sécurité. Cela relève-t-il des missions du PNUD et des agences de développement, ou cela dépend-il aussi des questions de sécurité ?

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. La Commission de consolidation de la paix est justement censée fédérer et coordonner les initiatives visant la sécurité aussi bien que le développement en sortie de crise, comme à Haïti. Quelle est la contribution française à cet organe ?

Mme Sylvie Bermann. Pour la France, qui a souhaité sa création, c’est un outil indispensable à la continuité des actions qui a manqué à Haïti. Créée par l’Assemblée générale et par le Conseil de sécurité, la Commission de consolidation de la paix compte la France parmi ses membres de droit. Une année a été nécessaire à sa mise en place. Il a été décidé d’inscrire à son programme deux pays chaque année. Le Burundi, la Sierra Leone et le Liberia, qui se trouvent plutôt dans une logique de stabilisation, font partie des premiers. La France milite pour l’inscription d’Haïti et de la République Démocratique du Congo (RDC). Mais la cohabitation sur le terrain entre un bureau de la Commission et une OMP est considérée comme risquée.

Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Les soldats français envoyés à l’étranger sont soumis à l’obligation de visa, notamment en Côte d’Ivoire, au Tchad, au Liban et en Afghanistan. Cela contraint les intéressés à acquérir un passeport, les armées à organiser la collecte et la redistribution des documents, et ôte toute souplesse à l’organisation en rendant difficiles les remplacements de dernière minute.

Ces visas sont-ils payants ? Le ministère pourrait-il négocier l’exemption pour ces militaires, dont la carte d’identité pourrait être considérée comme suffisante ?

Mme Sylvie Bermann. Les soldats n’achètent pas leurs passeports : ils leur sont fournis soit par le ministère de la Défense soit par les Nations unies.

Les Français ne peuvent obtenir d’exemption dans le cadre d’une opération multilatérale, qui concerne des casques bleus de toutes les nationalités, originaires de pays où la carte d’identité, parfois, n’existe pas. Par ailleurs, ils doivent transiter par différents pays qui exigent un passeport ; il est inimaginable que seuls les Français ne soient pas soumis à cette obligation. Cela dit, je n’ai jamais entendu parler de difficultés qu’aurait pu éprouver, notamment, le ministère de la Défense dans la gestion de ces affaires.

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Quel regard portez-vous sur la Mission européenne de police et de justice (EULEX), qui a pour objet de mettre sur pied un système juridique et policier au Kosovo ?

Mme Sylvie Bermann. C’est un programme européen qui a pris le relais des forces des Nations unies au Kosovo. Le pays n’étant pas reconnu de tous, il a été jugé préférable de laisser l’Europe intervenir dans le cadre d’une opération civile, relevant davantage des besoins du pays.

Nous suivons indirectement ce programme, dans la mesure où la coopération est nécessaire lors des phases de transition. Il est parfois frappant de constater combien les problèmes peuvent être inversés : en Géorgie, la MONUG dispose d’une imposante flotte de voitures, mais manque de moniteurs ; la mission de surveillance de l’UE en Géorgie (MSUE) a suffisamment de moniteurs et pas assez de voitures !

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Êtes-vous au courant du contentieux qui existe entre l’EUFOR et les Nations unies sur la reprise du Camp des étoiles à Abéché ?

Mme Sylvie Bermann. Comparé aux opérations européennes, qui s’organisent très vite, le déploiement des Nations unies est lent, contraint notamment par les modalités de passation de contrats. Nous nous efforçons de raccourcir ces délais. Le contentieux du Camp des étoiles, qui porte sur le stockage et le stationnement, est donc lié à des méthodes de planification différentes.

M. Georges Tron, Président. Nous vous remercions.

——fpfp——