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Commission des Finances, de l’économie générale et du Plan

Mission d’évaluation et de contrôle

Évaluation et perspectives des pôles de compétitivité

Mardi 12 mai 2009

Séance de 10 heures

Compte rendu n° 39

Présidence de M. David Habib, Président

– Audition, ouverte à la presse, de M. David Appia, président de l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII), ambassadeur délégué aux investissements internationaux.

M. David Habib, Président. Je vous souhaite la bienvenue, monsieur le Président.

La Mission d’information et de contrôle consacre cette matinée à l’aménagement et l’attractivité du territoire. Nos Rapporteurs – MM. Alain Claeys, Jean-Pierre Gorges et Pierre Lasbordes – souhaitent avoir des précisions sur la façon dont l’Agence française pour les investissements internationaux intervient à l’égard des pôles.

M. Alain Claeys, Rapporteur. Les pôles de compétitivité améliorent-ils la visibilité de nos entreprises ? Encouragent-ils les investissements internationaux ? Les pôles à vocation mondiale ont-ils mis en place des stratégies spécifiques ?

M. David Appia, président de l’Agence française pour les investissements internationaux. C’est incontestable : l’existence des pôles de compétitivité améliore l’image de la France à l’étranger et facilite la promotion de notre territoire.

M. Alain Claeys, Rapporteur. Qu’ont-ils apporté en termes d’investissements ?

M. David Appia. Votre question appelle deux réponses. Les pôles de compétitivité incarnent l’excellence française aux yeux de nos interlocuteurs étrangers – du moins c’est ainsi que nous les présentons – et représentent à leurs yeux un argument supplémentaire pour investir dans notre pays.

L’AFII, qui a pour mission de faire la promotion de la France, de prospecter et d’accompagner les investisseurs étrangers, a été mandatée pour mettre l’accent sur les pôles de compétitivité.

M. Alain Claeys, Rapporteur. Avez-vous évalué leur apport ?

M. David Appia. Nous procédons chaque année à une évaluation de nos actions. En matière de prospection et de premier contact avec les investisseurs, nous avons rempli les objectifs qui nous avaient été fixés puisqu’en 2008, sur les 7 500 entretiens directs que nous avons eus, 1 538 nous ont amenés à présenter un ou plusieurs pôles de compétitivité.

Lorsqu’un projet d’implantation est suffisamment mûr, nous présentons l’entreprise à nos partenaires régionaux et aux agences régionales de développement. En 2008, nous avons permis l’émergence de 217 projets, liés directement ou indirectement à un pôle de compétitivité.

Quant au nombre de projets ayant abouti à l’installation d’une entreprise étrangère dans un pôle de compétitivité, il est passé, entre 2007 et 2008, de 15 à 42.

M. Pierre Lasbordes, Rapporteur. Pouvez-vous nous donner un exemple concret de projet abouti ?

M. David Appia. Les exemples sont nombreux. Je vous en citerai quelques-uns après vous avoir présenté la typologie des entreprises étrangères présentes au sein des pôles.

Il s’agit tout d’abord d’entreprises ayant participé à la création du pôle. C’est le cas, par exemple, de Becton Dickinson, installée à Lyonbiopôle, d’une entreprise belge, dans le pôle Logistique Seine, et d’une entreprise danoise, LEO Pharma, qui fait partie de Pharma Valley – qui, sans être un pôle de compétitivité, possède tous les attributs d’un cluster.

D’autres entreprises étrangères ont rejoint un pôle existant. C’est le cas d’Algentech, société anglaise de biotechnologie, qui a rejoint le génopôle d’Évry, de Cell-ID, société de biotechnologie japonaise implantée à Lyonbiopôle, de la société américaine Regent Aerospace, qui a rejoint l’Aerospace Valley de Toulouse, et d’une société britannique spécialisée dans la finance islamique, intégrée au pôle Finance Innovation, situé à Paris.

Enfin, certaines entreprises étrangères rejoignent un pôle afin de nouer un partenariat industriel avec une entreprise française. L’entreprise américaine Altea Technology s’est ainsi associée, dans le cadre de Lyonbiopôle, à l’entreprise Protein’eXpert, déjà présente sur le site.

Les investisseurs potentiels sont amenés à visiter les pôles de compétitivité qui les intéressent. Nous les accompagnons au cours de ces visites. Nos 21 équipes en poste à l’étranger, tout comme celles de Paris, mettent tout en œuvre pour faciliter le dialogue entre les investisseurs et les pôles de compétitivité, en liaison avec les agences régionales de développement.

M. Jean-Pierre Gorges, Rapporteur. Quels sont les objectifs de l’Agence et comment organise-t-elle son travail autour des 71 pôles existants ?

M. David Appia. Les chargés d’affaires des 21 bureaux de l’AFII présents à l’étranger sont tenus de réaliser chaque année une centaine d’entretiens approfondis, occasions de promouvoir les pôles de compétitivité. Ces entretiens se déroulent dans les locaux des entreprises et s’adressent à des entreprises préalablement ciblées.

Nos bureaux à l’étranger se voient fixer un objectif par notre instance de tutelle. En 2008, ils devaient effectuer 1 100 entretiens centrés sur les pôles ; comme je l’ai indiqué, ils en ont réalisé 1 538, ce qui dépasse largement l’objectif. Le chargé d’affaires présente au responsable de l’entreprise les pôles qui semblent correspondre à ses besoins, s’attache à promouvoir la politique qui est menée en France en matière de soutien à l’innovation, comme le crédit impôt recherche, et valorise ce qui rend notre pays attractif.

Après cet entretien, nous restons à l’écoute de l’investisseur. S’il est intéressé par un pôle en particulier, nous lui proposons une visite du site, en collaboration avec les agences régionales.

M. Jean-Pierre Gorges, Rapporteur. L’Agence est-elle associée à la politique menée en direction des pôles ?

M. David Appia. Les contacts que nous avons avec les pôles passent par les agences régionales de développement, qui ont pour mission de coordonner l’action des acteurs régionaux de façon à transmettre une offre à l’investisseur potentiel. L’AFII facilite ces rapprochements et aide les investisseurs lors de leur installation, et l’agence régionale associe les responsables des pôles à la préparation du projet.

M. Jean-Pierre Gorges, Rapporteur. Nous avons l’impression que l’Agence est dans une position géostationnaire au-dessus des pôles. Vu d’en haut, savez-vous ce dont elle aurait besoin pour mieux vendre les pôles de compétitivité à l’étranger ?

M. David Appia. Nous avons un double souci. Il nous faut tout d’abord former et informer nos équipes, dans tous les pays du monde, sur les avantages de l’ensemble des pôles français. Pour y parvenir, nous travaillons en étroite collaboration avec les agences régionales de développement. Depuis peu de temps, l’Agence est en mesure de présenter aux investisseurs étrangers les atouts et les spécificités de chaque région française, et nous avons récemment entrepris de mettre à jour les informations que nous détenons sur chaque pôle de compétitivité. Nous avons pris conscience de l’importance, pour les investisseurs, de la description des pôles à vocation internationale. Nous souhaitons par ailleurs compléter nos informations sur la présence des entreprises étrangères au sein de chaque pôle, élément important pour les investisseurs. Nous espérons avoir terminé ce chantier avant l’été.

M. Pierre Lasbordes, Rapporteur. Le système des pôles de compétitivité n’est-il pas complexe pour un investisseur étranger, compte tenu de la multiplicité des intervenants – l’AFII, l’agence régionale de développement, les chambres de commerce ? Vous semblez dire que votre agence est au cœur du dispositif. Pour ma part, je n’en suis pas convaincu.

M. David Appia. Alors, sans doute me suis-je mal exprimé.

Le réseau international de l’Agence compte 21 bureaux et cinq correspondants dans des pays prometteurs comme le Brésil, le Mexique et la Turquie. Ces correspondants, qui sont des agents des missions économiques de la direction générale du Trésor et de la politique économique, consacrent une partie de leur temps à la prospection de nouveaux investisseurs.

L’AFII est la seule agence en mesure d’entrer en contact avec des investisseurs potentiels, car les quelques agences régionales de développement présentes à l’étranger disposent de réseaux souvent restreints.

Chaque semaine, nous réunissons l’ensemble des agences régionales pour partager les informations en provenance de notre réseau. Les milliers d’entretiens que nous avons réalisés en 2008 ont ainsi débouché sur mille projets potentiels. À la suite de ces réunions, les régions intéressées par un projet présentent une offre aux investisseurs.

L’AFII est dans son rôle, comme sont dans le leur les agences régionales et les acteurs locaux. Il ne nous appartient pas de construire l’offre remise à l’investisseur étranger. Lorsqu’un territoire prépare une offre, nous la transmettons à l’investisseur et nous veillons à ce que le dialogue entre ce dernier et les acteurs locaux soit rapide et efficace, sachant que, dans l’environnement concurrentiel qui est le nôtre, la moindre faiblesse du dispositif affaiblit la position de la France face aux autres pays européens.

M. Alain Claeys, Rapporteur. La recherche est la spécificité des pôles de compétitivité ; d’un autre côté, les laboratoires français ont des contrats avec les entreprises étrangères pour développer certains aspects de la recherche. Quels liens l’Agence entretient-elle avec les organismes de recherche ?

M. David Appia. L’AFII a une mission nationale ; son objectif est de persuader les investisseurs de s’implanter en France. À ce titre, elle ne peut promouvoir une région en particulier, ni tel pôle de compétitivité, sauf lorsque la nature du projet de l’investisseur étranger, ou sa demande, le justifient. D’ailleurs, en pratique, nos collaborateurs dans les pays étrangers présentent aux investisseurs potentiels tout autant les pôles à vocation nationale que les pôles à vocation internationale ou mondiaux.

M. Alain Claeys, Rapporteur. La vocation de l’Agence est-elle de promouvoir le territoire français ou de développer les investissements internationaux ?

M. David Appia. Elle est de promouvoir le territoire français pour y amener des investisseurs étrangers susceptibles de créer des emplois et de contribuer à la bonne santé de notre économie.

M. Alain Claeys, Rapporteur. Elle a donc un rôle spécifique en matière d’aménagement du territoire.

M. David Appia. Notre activité a un lien direct avec l’aménagement du territoire, mais il ne nous appartient pas de favoriser une région, au détriment d’une autre, pour des raisons qui seraient liées à l’aménagement du territoire. La DIACT, qui participe à la concertation que l’AFII conduit avec les agences régionales de développement, est mieux placée pour veiller à cette dimension.

M. Alain Claeys, Rapporteur. La carte des pôles de compétitivité montre clairement que les pôles d’excellence transcendent la notion de région. Je suppose que l’Agence en tient compte ?

M. David Appia. Naturellement. Nous présentons à nos collaborateurs en poste à l’étranger l’ensemble des pôles présents sur le territoire. Sur les quinze pôles que nous évoquons le plus souvent devant des entreprises étrangères, quatre sont des pôles nationaux. J’ai la conviction que cette qualification n’a pas d’importance dans le cadre de notre action à l’étranger, car ce qui intéresse un investisseur, c’est l’écosystème dont bénéficiera son entreprise. Que le pôle ait ou non un rayonnement international ou qu’il ait conclu des partenariats avec des pôles étrangers est souvent plus important pour nous que pour l’investisseur, lequel espère avant tout que son implantation sera simple, rapide et efficace.

M. Alain Claeys, Rapporteur. L’avantage pour un investisseur de s’implanter sur un pôle de compétitivité tient-il à la qualité des propositions qui lui sont faites par les collectivités ou à la possibilité d’accéder à des financements conjoints avec des laboratoires de recherche ?

M. David Appia. Cet avantage est multiple. En choisissant un pôle de compétitivité, l’investisseur étranger a la certitude de bénéficier d’un écosystème favorable, du fait de la coopération entre pouvoirs publics, universités et entreprises partenaires.

M. Alain Claeys, Rapporteur. À ce titre, la gouvernance des pôles, dont l’importance a été mise en évidence dans l’audit publié en juin 2008 à la demande du Gouvernement, vous paraît-elle satisfaisante ?

M. David Appia. Le fonctionnement actuel des pôles et leur gouvernance ne font l’objet d’aucune critique de la part des investisseurs étrangers que nous rencontrons. Au cours de mes déplacements à l’étranger, j’ai rencontré les responsables de plusieurs entreprises ayant acquis une expérience dans ce domaine : tous se félicitent de leur implantation dans un pôle français, ce qui devrait nous encourager encore à les promouvoir.

Les entreprises étrangères choisissent les pôles de compétitivité pour bénéficier, au même titre que les entreprises françaises, de financements, de soutiens publics et de partenariats en vue de promouvoir la recherche. Pour le responsable d’Icera, entreprise britannique du secteur des télécommunications qui emploie 250 personnes, la dynamique du pôle est essentielle. Son entreprise est implantée à Sophia Antipolis, pôle qui regroupe 1 400 entreprises, et il est certain d’y trouver les ressources humaines et les compétences dont l’entreprise a besoin.

M. Pierre Lasbordes, Rapporteur. La politique des pôles de compétitivité s’est-elle traduite par un accroissement important des investissements étrangers en France ? A contrario, existe-t-il des domaines dans lesquels l’Agence n’a pas été capable de présenter des partenaires aux investisseurs étrangers ?

M. David Appia. Je rappelle qu’en 2008, sur environ 300 projets que nous avons accompagnés, 42 ont abouti, parce que l’entreprise étrangère est devenue membre du pôle ou parce que la création d’un pôle l’a encouragée à choisir ce territoire.

Cela étant, l’existence d’un pôle de compétitivité n’est pas le seul critère de choix pour les entreprises étrangères. Certaines ne souhaitent pas s’intégrer à un pôle, soit pour ne pas s’implanter dans l’entourage de leurs concurrents, soit parce que leur stade de développement est tel que le pôle ne leur apporterait rien.

Il est heureux que les investissements étrangers concernent l’ensemble du territoire, en dépit de concentrations régionales traditionnelles. Quoi qu’il en soit, les investissements étrangers ne se limitent pas aux pôles de compétitivité.

M. Pierre Lasbordes, Rapporteur. La nouvelle politique menée à l’égard des pôles a-t-elle généré un accroissement important des investissements ? Subsiste-t-il des domaines dans lesquels nous ne sommes pas en mesure de présenter des territoires partenaires ?

M. David Appia. Si les pôles n’existaient pas, nous pouvons supposer qu’un cinquième des nouveaux investissements n’auraient pas été réalisés, mais je ne peux l’affirmer. Cela dit, notre offre territoriale est tellement diversifiée et attractive que nous sommes toujours en mesure de répondre à la demande d’un investisseur étranger.

M. Jean-Pierre Gorges, Rapporteur. La classification entre des pôles mondiaux, des pôles nationaux et des pôles à vocation mondiale semble correspondre à la taille des services de recherche. Pourquoi ne pas multiplier les critères ?

M. David Appia. J’ignore quels sont les bons critères, mais sur les 217 nouveaux projets que nous avons enregistré en 2008 liés à un ou plusieurs pôles – dont 42, je le rappelle, ont abouti à une installation – 47 concernent la recherche – développement, 49 des activités de production, 40 des activités de commerce et les services aux entreprises, et 81 correspondent à l’implantation d’un centre de décision ou d’une filiale.

M. Jean-Pierre Gorges, Rapporteur. Pour vous, les 71 pôles ont-ils un sens et une réalité ?

Vous avez souligné le fait que Pharma Valley n’était pas un pôle de compétitivité. Il se trouve qu’il est situé dans ma circonscription. Pourquoi n’a-t-on pas constitué un pôle Pharma, quand on sait que treize pôles n’ont pas rempli les objectifs de la politique des pôles de compétitivité ?

M. David Appia. La présence de 71 pôles est un élément très positif, car cela permet d’élargir la gamme des investisseurs potentiels. Nous considérons, à l’Agence, que la diversité et le nombre des pôles sont, dans notre domaine, un avantage pour notre pays.

Si nous évoquons moins souvent certains pôles, c’est que les investisseurs internationaux ne sont pas nécessairement concernés par l’ensemble des activités qui composent l’économie française. Mais tous les pôles ont leur utilité et tous représentent un atout pour la France dans la prospection de nouveaux investissements venus de l’étranger.

Toutes les initiatives locales qui développent la recherche et les partenariats entre les entreprises, les universités et les acteurs locaux valorisent et renforcent l’attractivité de la France, tout comme les dispositifs qui contribuent à dynamiser les territoires. À ce titre, ils méritent d’être présentés aux investisseurs étrangers.

M. David Habib, Président. Nous vous remercions.