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Commission des affaires sociales

Commission des affaires sociales

Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Jeudi 3 décembre 2009

Séance de 9 heures

Compte rendu n° 6

Présidence de M. Jean Mallot et M. Pierre Morange, coprésidents

– Auditions, ouvertes à la presse et au public, sur le fonctionnement de l’hôpital

– M. Gérard Vincent, délégué général de la Fédération hospitalière de France (FHF), et M. Yves Gaubert, responsable du pôle finances

– M. Jean-Loup Durousset, président de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), et M. Laurent Castra, directeur des affaires économiques

– M. Antoine Dubout, président de la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne (FEHAP), et M. Yves-Jean Dupuis, directeur général

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

MISSION D’ÉVALUATION ET DE CONTRÔLE
DES LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Jeudi 3 décembre 2009

La séance est ouverte à neuf heures.

(Présidence de M. Jean Mallot et M. Pierre Morange, coprésidents de la mission)

La Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) procède d’abord à l’audition de M. Gérard Vincent, délégué général de la Fédération hospitalière de France (FHF), et de M. Yves Gaubert, responsable du pôle finances.

M. le coprésident Jean Mallot, rapporteur. Nous entendrons ce matin les représentants des trois fédérations d’établissements hospitaliers. Dans le cadre du travail qu’elle a engagé sur le fonctionnement de l’hôpital, la MECSS a commencé par examiner des cas particuliers pour en tirer des enseignements susceptibles d’être généralisés à l’ensemble des établissements hospitaliers. Nous avons notamment étudié le cas du Centre hospitalier intercommunal de Poissy-Saint-Germain-en-Laye, pour tirer des leçons de son déficit, ainsi que d’autres établissements qui ont connu des processus de fusion plus ou moins réussis.

Nous avons voulu vous recevoir, messieurs, pour connaître votre analyse de la situation financière des hôpitaux et du traitement des déficits. Le renflouement par les tutelles ne fait-il que prolonger la maladie, ou est-il susceptible de rétablir la bonne santé financière des établissements ?

Par ailleurs, au moment où entre en vigueur la tarification à l’activité, les établissements ne disposent pas toujours des outils nécessaires à une comptabilité analytique performante. De fait, les outils informatiques et la formation des personnels, ainsi que leurs habitudes de travail, pourraient être améliorés. Quant à la facturation des prestations, elle est parfois lacunaire. Que peut-on, enfin, attendre des tutelles – quel peut-être, par exemple, le rôle de l’Agence nationale pour l’appui à la performance hospitalière (ANAP) ?

M. Gérard Vincent, délégué général de la Fédération hospitalière de France. Je soulignerai d’emblée que la collectivité ne renfloue pas les hôpitaux en déficit. En réalité, alors que l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) hospitalier est respecté, le déficit – qui représente 600 à 700 millions d’euros chaque année, soit 1,5 % seulement de la masse budgétaire malgré l’importance de la somme – est pris sur la substance des hôpitaux, c’est-à-dire sur leurs réserves et leurs fonds de roulement, ce qui présage pour les années à venir des difficultés en termes d’investissement. En effet, l’investissement hospitalier est en partie financé par les établissements eux-mêmes, à partir de l’amortissement ou des excédents d’exploitation. La diminution de la capacité d’autofinancement des hôpitaux est masquée par les apports en capital des plans Hôpital 2007 et Hôpital 2012 – qui, je le rappelle, figurent dans l’ONDAM sous forme de prise en compte des surcoûts liés aux emprunts, alors que le secteur privé bénéficie de dotations en capital. Sans ces aides, les hôpitaux ne pourraient plus investir. Cependant, si modeste soit-il, un déficit est toujours excessif.

Bien que nos concurrents privés affirment que la convergence entre public et privé doit être accélérée parce que les hôpitaux publics sont plus chers, l’avenir nous montrera que l’hôpital public est sous-financé par rapport au poids de ses missions de service public.

Le seul moyen de rester dans les limites des enveloppes qui nous sont accordées consiste à réduire l’emploi. De fait, la masse salariale représente aujourd’hui de 68 % à 70 % de nos charges et les 7,5 % à 8 % liés au coût des médicaments progressent à un rythme très supérieur à celui de l’inflation, balayant les effets des économies réalisées sur les fonctions logistiques ou de support. La seule variable d’ajustement est donc la masse salariale. Cette question est moins taboue qu’elle ne l’était voilà encore quelques années. La réduction de l’emploi doit cependant, pour être indolore, se faire le plus intelligemment possible, c’est-à-dire par la réorganisation des activités, notamment médicales. C’est là une question de volonté – et c’est précisément là que l’on rencontre des blocages politiques, parce que l’hôpital est un symbole, qu’il est le plus gros employeur local et qu’il est encore politiquement incorrect de toucher à l’emploi. Si donc les professionnels ont compris que la réduction de l’emploi était la seule solution pour tenir les budgets, il n’est pas certain que la collectivité nationale en soit déjà consciente. Le différentiel qui se creuse chaque année entre l’augmentation des charges et celle de l’ONDAM hospitalier confirme toutefois que, faute de pouvoir limiter l’activité dans le cadre de la tarification à l’activité (T2A), il faut jouer sur les moyens humains.

Nous sommes entrés dans une spirale inflationniste. De fait, l’ONDAM définit chaque année une augmentation des tarifs et du volume d’activité prévisionnel. Un établissement qui n’atteint pas l’augmentation prescrite – fixée par les pouvoirs publics à 1,7 % – ne percevra pas la partie de l’ONDAM correspondante, tandis que ses dépenses continueront à courir, ce qui le mettra dans une situation budgétaire difficile.

Je ne suis pas certain qu’il soit raisonnable d’obliger les hôpitaux à développer leur activité. Jean Leonetti, président par intérim de la FHF, soulignerait sans doute à ce propos l’importance de l’évaluation de la pertinence des actes et des interventions. Dans certains secteurs, comme la chirurgie, l’activité est en effet trop importante. On fait des choses inutiles et il y a là une source de vraies économies. Cependant, la suppression des activités inutiles se traduit par une diminution du chiffre d’affaires – à moins qu’elle ne s’accompagne d’une augmentation des tarifs.

Aujourd’hui, cette question n’intéresse personne. Les statistiques comparant les taux de césarienne par département, que nous avons publiées en décembre dernier, révèlent des écarts choquants, mais rien n’a été fait depuis – même s’il est probable que les professionnels ont modifié certains comportements. Comment expliquer que les arthroscopies du genou soient plus fréquentes dans un département plat qu’en Savoie ou en Haute-Savoie ? Cela révèle des comportements inacceptables, mais c’est là encore un sujet tabou. Les abus sont bien plus nombreux dans les cliniques privées que dans les hôpitaux, et l’on y opère des malades qui ne devraient pas être opérés. Il y a là des excès, et même des scandales.

L’évaluation de la pertinence des actes et des interventions est sans doute le dossier de santé publique de demain, pour des raisons tant financières que de santé publique. Je rappelle à ce propos que, voilà une trentaine d’années, les statistiques de prévalence par département de cette intervention grave qu’est l’hystérectomie totale ont fait apparaître des différences considérables, ce qui est monstrueux.

Quant à la maîtrise des dépenses, la seule solution est, je le répète, compte tenu de la contrainte économique, de toucher à l’emploi – en le faisant le plus intelligemment possible. Dans cette perspective, la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires devrait permettre de rationaliser l’offre de soins hospitalière dans le secteur public. De fait, à la différence d’un établissement privé, un hôpital public ne peut pas se contenter de fermer lorsqu’il connaît des difficultés.

La Fédération hospitalière de France vise non seulement à défendre le service public auprès des pouvoirs publics, mais aussi et surtout à animer le milieu, car le service public sera d’autant plus fort qu’il s’adaptera à l’évolution des besoins de la population et à l’évolution de la médecine. Elle cherche donc à développer une stratégie de groupe, qui permet d’élaborer un projet médical commun pour chaque territoire de santé, d’éviter les doublons et de réaliser des économies sur les fonctions de support, grâce aux gains de productivité réalisés sur la logistique.

La situation de déficit, même si elle n’est pas dramatique compte tenu des masses financières en jeu, ne nous satisfait pas. La seule solution est, je le redis encore, de réduire de la manière la plus indolore possible la masse salariale, en l’accompagnant d’une réorganisation de nature à éviter les drames et les conflits sociaux qui pourraient naître d’une restructuration hâtive et non réfléchie.

M. le coprésident Jean Mallot, rapporteur. Certains hôpitaux connaissent des situations particulières et font l’objet d’un plan de retour à l’équilibre et de diverses mesures prévoyant parfois la réduction des effectifs ou une réorganisation et s’accompagnant de dotations supplémentaires. Pourriez-vous donc, après le raisonnement « macro » que vous venez d’exposer, évoquer la gestion des hôpitaux d’un point de vue « micro » ? Ce sera l’occasion d’évoquer aussi, entre autres choses, l’application de la T2A.

M. Gérard Vincent. Au moins autant que la convergence entre les secteurs public et privé, il convient d’opérer une convergence intrasectorielle, à l’intérieur même du secteur public. Il n’y a aucune raison pour que certains hôpitaux soient, à activité égale, beaucoup plus chers que d’autres, et tous devraient se rapprocher de la médiane. Ce mouvement est en route. La T2A est un système de financement par les tarifs, ce qui suppose un calcul de coûts moyens sur la base d’échantillons – l’étude nationale de coûts. Il est dès lors inévitable que certains établissements se situent au-dessus de la moyenne, et d’autres au-dessous. Les établissements en difficulté sont ceux dont les coûts sont supérieurs au tarif, qui encaissent moins qu’ils ne dépensent. Ces établissements doivent faire des économies – lesquelles, une fois encore, supposent de toucher à l’emploi, compte tenu en particulier du dérapage des dépenses de médicament, qui balaie les économies que l’on peut réaliser sur l’alimentation, le ménage ou l’électricité. Il semble en effet que le Comité économique des produits de santé encadre davantage le prix du médicament en ville qu’à l’hôpital, de telle sorte que l’hospitalisation paie le prix de l’encadrement du prix du médicament en ville. Redisons-le : si l’ONDAM est insuffisant pour maintenir la masse salariale existante, il faut faire des économies sur celle-ci.

Lorsque je tenais ces propos voici quelques années devant le conseil d’administration de la FHF, la seule personne qui déclarait ouvertement partager ce raisonnement était l’actuel directeur général de l’Assistance publique, homme très courageux qui était alors en poste à Lyon. Il est irréaliste de chercher à traquer d’hypothétiques économies cachées.

M. Jean-Luc Préel. Je souscris à votre analyse quant à la masse salariale. Il est d’ailleurs arrivé à plusieurs reprises que des mesures de revalorisation du personnel n’aient pas été financées.

Quelle est votre interprétation du rapport de la Cour des comptes qui a fait apparaître des différences très importantes selon les établissements – parfois de 1 à 10 – en termes d’encadrement de personnel ?

Par ailleurs, que pensez-vous du fait que seule l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) soit autorisée par la loi à voter un état prévisionnel de recettes et de dépenses (EPRD) en déséquilibre ?

Enfin, le statut des praticiens hospitaliers est-il adapté à la T2A ? Comment ces médecins peuvent-ils être intéressés à un développement de l’activité ?

M. Gérard Vincent. Nous avons publié un communiqué de presse saluant le rapport de la Cour des comptes. Il est tout de même rare qu’un organisme donne raison à la Cour des comptes lorsqu’elle critique ses adhérents ! Certains écarts entre établissements ne sont pas acceptables – mais la situation des responsables d’établissements n’est pas facile et je ne leur jette pas la pierre.

Ces écarts sont souvent le fruit de l’histoire. Ainsi, un directeur d’hôpital dont je ne citerai pas le nom, après avoir été considéré pendant trente ans comme l’exemple même du gestionnaire avisé et efficace dans le cadre de la dotation globale de financement parce qu’il avait de l’entregent, était soutenu par les politiques et obtenait chaque année une confortable augmentation de son enveloppe, accumulant ainsi des moyens et recrutant du personnel, est devenu d’un coup, avec l’instauration de la T2A, le plus mauvais gestionnaire de France !

La Cour des comptes a donc raison de dire qu’il faut réduire les inégalités. C’est précisément ce que j’appelle la convergence intrasectorielle – et nous faisons tout pour aider les hôpitaux à y parvenir. Nous avons ainsi mis en place depuis quelques années la banque de données hospitalière de France, bien connue des spécialistes, qui permet aux établissements de se situer sur l’ensemble des activités et de prendre les décisions qui s’imposent.

Toutefois, nous avons été surpris par les écarts, parfois de 1 à 5, relevés par la Cour des comptes, qui compile les rapports des chambres régionales des comptes. Ces écarts, qui existent peut-être sur de très petits créneaux, sont curieux et nous avons du mal à y croire. Sur le principe, en revanche, la convergence des moyens des hôpitaux est nécessaire – c’est d’ailleurs bien ce que traduisent les plans de retour à l’équilibre.

Pour ce qui concerne l’Assistance publique, il ne me semble pas opportun d’attaquer cette belle maison hospitalière, car ce « vaisseau amiral » connaît des problèmes et supporte des charges spécifiques. S’il est vrai, par exemple, que les médecins de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) travaillent moins que les autres, il faut aussi rappeler que ces médecins sont plus souvent que d’autres dans les congrès internationaux, contribuant à assurer à la médecine française l’audience et le respect dont elle jouit dans le monde. Quant à permettre à l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris de présenter un état prévisionnel de recettes et de dépenses en déséquilibre, cela relève du principe de réalité.

Gardons-nous de faire de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris un bouc émissaire. Une restructuration est certes nécessaire, mais son directeur général s’y emploie précisément en remettant à plat toutes les activités médicales, avec d’ailleurs l’appui courageux du président de la commission médicale d’établissement. Ces mesures – suppression d’activités dans certains hôpitaux et regroupements – devraient porter leurs fruits assez rapidement.

Quant à savoir si le statut des praticiens hospitaliers est adapté à la T2A, cela revient à dire, si je vous entends bien, qu’ils n’ont pas toujours intérêt à agir pour produire des soins. Nous nous sommes battus, dans le cadre de la discussion de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, pour que les hôpitaux puissent, lorsque c’était nécessaire, recruter des médecins sous contrat pour les intéresser à leur activité. Nous regrettons d’ailleurs que cette possibilité soit limitée aux postes à pourvoir et pensons qu’on aurait dû pouvoir recruter des contractuels. Cela aurait permis de bousculer un peu les statuts, car il est bon qu’il y ait une petite dose d’émulation et d’intéressement, même dans le service public.

M. Dominique Tian. Il faut aussi penser aux recettes, en particulier dans le contexte de la T2A. Qu’en est-il de la sous-facturation, voire de la non-facturation d’actes – et, en tout cas, de la mauvaise valorisation des actes – qu’on observe dans certains hôpitaux ?

M. Gérard Vincent. Ce sont deux problèmes distincts. Il y a, d’une part, avec l’absence de facturation et de recettes pour une activité qui a eu lieu, des défaillances administratives condamnables : l’administration n’a pas fait son travail pour assurer la facturation. Il y a, d’autre part, la question qualitative de savoir si la codification des actes est bien faite. Certains établissements ont ainsi perdu beaucoup d’argent parce que les activités étaient mal cotées. C’est là un problème de compétence, c’est-à-dire de qualification et de formation, continue notamment, des médecins des départements d’information médicale, qui sont la cheville ouvrière de la qualité des systèmes d’information et de la facturation. Je partage votre point de vue : il n’est pas normal qu’un hôpital perde des recettes parce qu’il est mal organisé.

M. Dominique Tian. Ma question était plus précise : avez-vous une idée de l’échelle de ces déperditions ? Comment s’expliquent les dysfonctionnements ? Quels sont, en outre, les progrès enregistrés ?

M. Yves Gaubert, responsable du pôle finances de la Fédération hospitalière de France. On ne peut pas évaluer très précisément la perte de recettes. La facturation systématique de tous les actes ne fait pas partie de la culture des cliniciens, ce qui explique sans doute une partie des pertes. Les chiffres de l’année en cours révèlent une progression à mesure que les médecins s’approprient ces nouveaux outils. Les volumes financiers perdus ne sont du reste pas considérables – quelques points de pourcentage en début d’exercice, avec une correction en cours d’exercice. En revanche, des pertes financières ont été causées par des retards de l’évolution de la législation, notamment pour le forfait sur les urgences. En effet, n’étaient intégrables dans l’activité que les éléments pris en charge par l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM), ce qui éliminait une partie des activités forfaitaires, d’une part, pour les patients étrangers bénéficiaires de l’aide médicale d’État (AME) et, d’autre part, pour les patients habitant les régions frontalières et non intégrés dans l’UNCAM. Ce problème technique indépendant des hôpitaux sera corrigé en 2010.

M. le coprésident Pierre Morange. Lors des précédentes auditions auxquelles a procédé la mission, l’état du système informatique hospitalier a été fréquemment évoqué, notamment pour ce qui concerne la saisie administrative. Il a été souligné que la comptabilité analytique était présente, au mieux, dans un tiers du parc hospitalier, et que le chemin était encore long pour assurer convenablement la saisie de la cotation des actes – d’où un recouvrement insuffisant. Selon les chambres régionales des comptes, les recettes non récupérées seraient dans l’ensemble de l’ordre de 5 % à 7 %. Dans des cas « aigus », le pourcentage pourrait atteindre 12 % à 15 %, ce qui renvoie à la question souvent abordée de l’alimentation financière de l’enveloppe hospitalière au sein de l’ONDAM et des moyens nécessaires pour remplir les différentes missions de l’hôpital. Confirmez-vous que, comme cela nous a été indiqué, la comptabilité analytique pourrait être à peu près opérationnelle dans l’ensemble du parc hospitalier d’ici à dix-huit mois ?

Par ailleurs, un dispositif informatique véritablement efficient pourrait-il être mis en place d’ici trois à quatre ans – question qui pose d’ailleurs celle de savoir comment la comptabilité analytique pourrait être mise en place avant le système informatique qui la rend possible ?

Quelle est, enfin, votre analyse de la question de la récupération des recettes ?

M. Yves Gaubert. Il y a plusieurs façons d’aborder la question de la comptabilité analytique. Les hôpitaux publics disposent déjà d’un système généralisé de comptabilité analytique qui n’est nullement négligeable : le « compte administratif retraité ». Celui-ci est constitué des retraitements comptables obligatoires pour tous les hôpitaux publics, lesquels sont transmis chaque année aux agences régionales de l’hospitalisation, font l’objet d’un traitement national au niveau du ministère et sont traités par nous-mêmes dans notre banque de données, où ils sont publics. Il existe certes un écart entre le compte administratif retraité, qui est la base de la comptabilité analytique – mais qui, notons-le, n’existe pas pour le secteur privé, ce qui interdit de procéder à des comparaisons –, et une comptabilité analytique développée, qui est celle de l’échelle nationale des coûts de la base d’Angers et qui concerne aujourd’hui une minorité d’établissements. Entre ces deux extrêmes, la marge de progression est large pour analyser dans le détail la comptabilité clinique, notamment les groupes homogènes de malades (GHM), ou pour contrôler la valorisation, la Fédération hospitalière de France assurant le traitement technique de la base d’Angers.

S’agissant des pertes de valorisation liées aux séjours, il est difficile d’avoir une visibilité précise des activités théoriquement perdues au sens de la classification des groupes homogènes de malades et des contrôles auxquels procède l’assurance maladie. Aujourd’hui, en effet, la seule base de vérification dont nous disposions pour la partie des séjours est constituée par les contrôles que réalise l’assurance maladie dans tous les hôpitaux publics et privés. Or, l’assurance maladie ne communique que sur les paiements indus et les sanctions qui en découlent, et nous ne disposons pas de mesure précise de ce qui devrait être valorisé et de ce qui ne l’est pas. En revanche, de l’argent est perdu du fait des admissions en non-valeur et des difficultés de récupération de sommes facturées pour lesquelles sont émis des titres de recettes non recouvrées. Cela renvoie notamment à la question du développement important que connaissent depuis quelques années les activités d’urgence, du fait que des patients qui se dirigeaient précédemment vers la médecine de ville viennent désormais à l’hôpital faute de permanence des soins ou, dans certains cas, parce qu’ils savent qu’ils pourront partir sans payer. À ce gros volume de passage correspondent de petites créances, de l’ordre de 50 euros, pour lesquelles le comptable public arrêtera très vite les poursuites, sachant que les coûts de recouvrement seront plus élevés que le montant des créances.

M. le coprésident Pierre Morange. Quelle est la proportion des établissements, peu nombreux selon vous, qui disposent d’une comptabilité analytique ?

M. Yves Gaubert. Ceux qui disposent du système le plus développé représentent environ 10 % du parc. Pour ceux qui possèdent une comptabilité analytique intermédiaire entre cette contrainte forte et le compte administratif retraité, l’éventail est progressif et les chiffres difficiles à évaluer. La comptabilité analytique est cependant une tendance lourde dans le secteur public et ne diffère guère de celle qui est utilisée dans le secteur privé – peut-être est-elle même meilleure, car elle dispose de données, publiables de surcroît.

M. le coprésident Pierre Morange. Vous paraît-il réaliste de considérer que la comptabilité analytique sera généralisée d’ici à dix-huit mois ?

M. Yves Gaubert. Le seul élément dont nous disposons pour en juger est le taux d’équipement en systèmes de comptabilité détaillée. Sur les 500 à 600 établissements pratiquant la tarification à l’activité dans le champ de la médecine, de la chirurgie et de l’obstétrique (MCO), plus de 300 sont équipés d’outils assez performants. L’utilisation de ces outils est progressive, mais il est réaliste de penser que ces systèmes se généraliseront d’ici à dix-huit mois.

M. le coprésident Pierre Morange. Cette généralisation se caractérisera-t-elle par une urbanisation et une interopérabilité ?

M. Yves Gaubert. L’interopérabilité est complexe, lorsqu’il est par exemple question de données relatives aux séjours, à la distribution des médicaments, aux actes de laboratoire et à l’imagerie. Le système fermé, global et unique de l’hôpital exige une montée en charge qui prendra plus de dix-huit mois.

M. Jean-Luc Préel. Je vous remercie d’avoir souligné l’importance de l’évaluation de la pertinence des actes et interventions.

Comment interprétez-vous les variations régulières de la T2A ? Nous en sommes en effet à la version 11, ou « V11 », qui semble démobiliser certains acteurs, car elle conduit à augmenter la durée de séjour alors que l’on incitait auparavant à réduire celle-ci. Que fait la Fédération hospitalière de France pour tenir compte de cette situation ?

M. Gérard Vincent. Pour compléter la réponse à la question de Monsieur le président Morange, je préciserai d’abord que le fait que tous les établissements ne sont pas équipés d’une comptabilité analytique parfaite ne signifie pas que les gestionnaires ou les décideurs hospitaliers pilotent dans le brouillard, comme cela se produisait au début de ma carrière, lorsque j’étais directeur d’hôpital. Ils disposent en effet de nombreuses informations qui leur permettent de prendre des décisions. La banque de données de la Fédération hospitalière de France, par exemple, leur permet de se comparer dans tous les domaines avec d’autres établissements. Nous sommes d’ailleurs tout à fait disposés à vous présenter un jour, si vous le souhaitez, à partir d’un exemple concret, les informations qui figurent dans cette banque de données.

M. le coprésident Pierre Morange. Lors de certaines auditions, il a été fait état de cas récents de pilotage en aveugle.

M. Gérard Vincent. Cela signifie que les gestionnaires n’utilisaient pas les données à leur disposition. De fait, il a été difficile, pendant quelques années, d’inciter les gestionnaires à utiliser ces bases de données très riches.

Monsieur Préel, la T2A va encore évoluer pendant quelques années, car ce système a été lancé assez vite malgré son imperfection – ce qui valait sans doute mieux que d’attendre qu’il fût parfait. La V11 a notamment permis de mieux décrire les activités médicales et, par conséquent, de multiplier les tarifs quasiment par trois. Tout cela va dans le sens d’une meilleure connaissance des activités, et donc d’un meilleur financement de chacune d’entre elles.

L’évolution n’est pas terminée et des ajustements interviendront sans doute encore dans les prochaines années. Cette situation perturbe un peu les établissements – qui nous demandent pourquoi nous acceptons des variations si subites et si profondes –, mais il faut que le système s’adapte, et nous sommes les premiers à le demander, car il décrit mal les activités et traduit mal la réalité des coûts sur le plan tarifaire.

M. Jean-Luc Préel. L’établissement qui faisait l’objet d’une audition précédente a indiqué qu’il avait motivé ses équipes pour réduire la durée de séjour, mais que la V11 allait dans le sens inverse. Comment interprétez-vous ce point ?

M. Yves Gaubert. L’évolution vers la V11 a été assez complexe, car elle supposait de diviser chacun des groupes homogènes de malades précédents en trois ou quatre niveaux. Quelques erreurs ont été commises, qui seront corrigées rapidement lors de la campagne 2010 grâce à l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH).

Cette évolution était néanmoins nécessaire, notamment pour décrire les comorbidités, pour lesquelles le système précédent était assez réducteur. La prise en charge peut en effet être très différente selon que le patient présente ou non des pathologies associées. C’est particulièrement le cas en médecine car, si le système de la classification commune des actes médicaux (CCAM) technique est bien adapté pour décrire en détail les activités chirurgicales à l’acte, nous ne disposons en revanche toujours pas de CCAM clinique. Avant la V11, la variance expliquée des coûts en médecine était de l’ordre de 40 % ou 41 %, c’est-à-dire que l’outil de mesure était d’une relative imprécision. La classification V11 a permis, autant que cela était possible, une amélioration dans le cadre d’une classification fondée sur une échelle de coûts. L’évolution prochaine et souhaitable serait donc de disposer d’une CCAM clinique qui prenne en compte correctement des activités autres que les actes techniques, en comptabilisant le temps médical.

M. le coprésident Pierre Morange. Messieurs, je vous remercie.

*

La Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) procède ensuite à l’audition de M. Jean-Loup Durousset, président de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), et de M. Laurent Castra, directeur des affaires économiques.

M. le coprésident Pierre Morange. Nous avons le plaisir d’accueillir maintenant M. Jean-Loup Durousset, président de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), et M. Laurent Castra, directeur des affaires économiques.

Dans le cadre de nos travaux sur le fonctionnement interne de l’hôpital, nous avons souhaité vous entendre sur la mise en œuvre, dans le secteur privé, du cadre réglementaire et législatif désormais opposable.

M. Jean-Loup Durousset, président de la Fédération de l’hospitalisation privée. Nous vous remercions de nous accueillir. Et comme les auditions sont publiques, nous nous sommes permis d’écouter la fin de l’intervention de nos confrères du secteur public.

Le grand principe qui, depuis quelques années, régit la politique hospitalière est théoriquement la convergence des acteurs, qu’ils soient publics ou privés, dans le but de tendre vers une seule tarification, mais par secteur. Or, force est de constater que celle-ci a du mal à se mettre en place. Décidée par la loi de 2004 instituant la tarification à l’activité, avec application dès 2005, elle devait être réalisée à 50 % en 2008 pour devenir effective en 2012. Cette date a été repoussée à 2018 par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010. Nous ne pouvons que le regretter, compte tenu des implications que cela a sur le terrain.

Si l’on nous dit que la convergence ne peut être réalisée à cause des importants efforts qu’elle nécessite, c’est oublier que les établissements privés ont déjà dû faire d’énormes efforts depuis 2005. Ils ont subi, chaque année, une baisse ou une hausse de leur rémunération – la convergence s’établissant par rapport à un point défini comme médian – allant jusqu’à 3 % de leur chiffre d’affaires. Vous pouvez imaginer l’impact que peut avoir sur un établissement une perte annuelle de 3 % d’activité depuis 2005…

Cette difficulté, récurrente, nous l’assumons. Pour autant, elle ne justifie pas la non-convergence entre les deux secteurs ; il doit y avoir une autre raison.

Dans le même temps, le législateur et les agences régionales de santé ont appelé les acteurs de terrain à coopérer et à proposer des solutions de soins harmonisées. Depuis 2005, un certain nombre de tentatives de rapprochement entre cliniques privées et hôpitaux publics ont eu lieu. Mais comment peut-on travailler ensemble si le point essentiel, à savoir la ressource, constitue un élément de divergence ? Pour notre part, nous appelions de nos vœux une convergence tarifaire parce qu’elle nous semblait de nature à faciliter les coopérations sur le terrain.

Dans la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, le législateur a de nouveau tenté, par la création des groupements de coopération sanitaire, de rapprocher les établissements afin qu’ils offrent à la population des soins de qualité et cessent de se comparer ou de s’analyser. Mais, tant qu’il n’y aura pas convergence, les difficultés sur le terrain resteront grandes, la convergence étant quasiment, pour nous, un devoir de santé publique.

Nous aurions souhaité qu’un point d’horizon soit fixé. C’est pourquoi nous reprochons à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 d’avoir repoussé l’échéance à 2018. Nous espérions qu’un amendement fixe au moins les modalités ou oblige le ministère et, en particulier, la direction de l’hospitalisation et de l’organisation de soins (DHOS) à définir la méthode pour parvenir à cette convergence. On peut comprendre que le chemin soit long, mais pas qu’aucune méthode n’ait été arrêtée depuis 2005, au prétexte qu’il est nécessaire de mener des études complémentaires pour connaître les raisons permettant d’expliquer les différences de coûts entre les acteurs. En tant que gestionnaire de plusieurs établissements, c’est un argument que je ne peux pas présenter ; je ne me vois pas dire à des établissements : « Des études sont en cours. Je répondrai à votre demande lorsque celles-ci seront terminées. »

La méthode permettant de parvenir à la convergence aurait dû, selon nous, être présentée aux parlementaires cette année. De fait, vous risquez de vous entendre dire, chaque année, qu’une autre étude est nécessaire et que la méthode vous sera donnée une fois toutes les études finies !

La direction de l’hospitalisation et de l’organisation de soins ayant annoncé que les études devraient être terminées en 2012, cela signifie qu’une méthode devrait être présentée en 2013, pour une application en 2018. Si le principe de convergence consiste bien à rapprocher les tarifs des établissements publics et ceux des établissements privés, avec un écart de 25 %, on peut d’ores et déjà prédire que la convergence ne sera pas atteinte en 2018.

La Fédération hospitalière de France a réagi en 2009 à la décision, prise sans concertation, de reporter la date de mise en place de la convergence. Pas plus sur la loi de financement de la sécurité sociale que sur le principe de convergence ou encore sur la V11, il n’y a eu de véritable concertation entre les acteurs. Encore un autre reproche à adresser.

Nous aurions souhaité l’institution d’un principe de « contractualisation ». Ce terme n’étant peut-être pas le plus approprié, je m’explique. Nous pensons que la Fédération hospitalière de France, la Fédération de l’hospitalisation privée et la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne sont des acteurs responsables. Pour que la sécurité sociale aille mieux, il faut, à l’évidence, que les acteurs soient responsabilisés. Or, la responsabilisation implique deux protagonistes – l’État, qui fait valoir qu’il a des obligations, et les acteurs, qui mettent en avant qu’ils ont des contraintes – et consiste à trouver un point d’équilibre. C’est d’ailleurs pourquoi, nous aurions souhaité qu’il y ait une contractualisation des trois fédérations sur des objectifs communs.

L’un de ces objectifs aurait pu être le développement de la chirurgie ambulatoire, système qui est bon pour la collectivité car le passage d’un séjour hospitalier à une hospitalisation d’un jour génère une économie substantielle. C’est également relativement bon pour les établissements puisque, comme les patients n’y restent plus qu’un jour au lieu de cinq, ils peuvent supprimer le personnel de nuit et réorganiser les services à d’autres fins. Enfin, c’est bon pour les patients car il a été démontré qu’une hospitalisation prolongée n’apportait rien à la qualité des soins et faisait peser des risques d’infections nosocomiales.

À l’inverse de 1982, il nous est proposé, non de nous contractualiser, mais de nous soumettre à une entente préalable et de nous sanctionner. De ce fait, nous ne nous considérons plus comme des acteurs responsables, mais comme des acteurs à contrôler.

Or comment juger de la pertinence des actes, sinon en s’adressant à des acteurs responsables et en définissant une méthode à utiliser pour, par exemple, opérer une prothèse de hanche ou procéder à une appendicectomie. Le cadre étant posé, la règle ayant été définie et acceptée par tous, les professionnels et l’État peuvent s’engager, et il peut y avoir contrôle. La délégation ou la responsabilité n’exclut pas ce dernier.

Proposer comme a priori le contrôle et la sanction n’est pas sans soulever des difficultés, d’autant que se pose le problème majeur de l’interprétation des dispositions envisagées. La dernière version de la V11 aurait fait, nous a-t-on dit, l’objet de concertations entre l’Assurance maladie et l’État. Mais à nos questions sur l’interprétation à faire des conclusions qui avaient résulté de ces concertations, nous n’avons pas reçu de réponse autre que celle nous informant que nous allions être contrôlés et probablement sanctionnés puisque notre interprétation risquait d’être différente.

Nous regrettons l’absence d’engagements forts de l’État sur des projets qui auraient pu être contractualisés, qu’il s’agisse des grandes orientations à donner aux établissements sanitaires, du développement de la médecine, des soins palliatifs ou de la chirurgie ambulatoire, du travail spécifique sur la gériatrie. Nous sommes prêts à nous engager sur de tels projets au plan national et à les décliner à l’échelon régional.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous appelions le Parlement à prendre position en faveur de la contractualisation, car celle-ci est importante.

Bien sûr, des difficultés se présentent, des établissements doivent être restructurés, des réticences se font jour, mais pourquoi nous considérer comme des acteurs irresponsables, alors que nous est confiée la chose la plus importante pour nos concitoyens : leur santé ?

M. le coprésident Jean Mallot, rapporteur. Je comprends votre logique. En même temps, je pense qu’une part de la difficulté vient de l’acception qui est faite du terme « convergence ». La convergence est souvent perçue, dans le cadre du débat politique, comme une marche vers une identité de tarifs entre le secteur public et le secteur privé. Et c’est peut-être une des raisons pour lesquelles les études préalables au lancement de la marche vers cette convergence sont un peu plus longues qu’il n’était prévu au départ.

Par ailleurs, le lien « convergence-T2A » suppose que les outils soient en place pour y voir clair. Or, dans certains établissements, il n’y a toujours pas de comptabilité analytique. À partir du moment où il y a une tarification à l’activité, il faut que les tarifs soient justes et correspondent à une réalité, et que le gestionnaire puisse les comparer à ceux pratiqués dans son établissement. La situation des établissements que vous représentez est-elle bonne de ce point de vue ? Les systèmes d’information et la formation des cadres chargés de les gérer et des personnels amenés à les activer sont-elles suffisantes ?

M. Jean-Loup Durousset. Dans vos propos, je sens l’ambiguïté qui existe entre tarification à l’activité et gestion de l’hôpital.

M. le coprésident Jean Mallot, rapporteur. Elle est réelle.

M. Jean-Loup Durousset. Certes, mais si le ministère de la santé doit être le régulateur du système de soins, il n’a pas forcément vocation à devenir le gestionnaire de l’hôpital, car cela serait source d’ambiguïté.

Je reconnais au législateur et à l’Assurance maladie le droit de fixer des tarifs. Un tarif est une incitation à faire ou à ne pas faire : si on réduit le tarif du traitement de la cataracte et qu’on augmente le tarif de traitement du cancer du colon, par exemple, on incite les acteurs à bouger ou à ne pas bouger.

Si l’on est dans une logique de gestion de l’hôpital, on voudra que la tarification n’ait pas de conséquences sur l’équilibre de l’établissement. On essaiera donc, comme vous venez de le dire, de déterminer les coûts.

Les établissements privés maîtrisent la comptabilité analytique. Mais 85 % des ressources d’un hôpital sont consacrées à des frais fixes. Par exemple, un bâtiment qui a été construit une bonne fois pour toutes représente un coût fixe de 12 % des coûts fixes, coût qui correspond à un loyer.

Ensuite, selon la clé de répartition choisie, on peut faire dire tout ce qu’on veut en matière de comptabilité analytique : on peut expliquer qu’en impactant davantage telle ou telle charge, le tarif de l’accouchement va monter ou baisser. C’est pourquoi nous avons demandé à la direction de l’hospitalisation et de l’organisation de soins, d’une part, d’essayer d’éclairer les tarifs par les coûts mais pas de les déterminer par les coûts, et, d’autre part, d’accepter l’idée que certains tarifs puissent être négatifs, dans la mesure où ils constituent une incitation à faire baisser les coûts.

Les acteurs ont tout intérêt à dire qu’ils ne s’en sortent pas, que leurs coûts augmentent et que les tarifs fixés sont inférieurs aux coûts réels : c’est un vieux principe appliqué par l’hôpital public. Dans le cas des cliniques privées, c’est l’Assurance maladie qui a toujours fixé les tarifs, et quand les coûts d’un établissement sont supérieurs, elle lui demande de les baisser.

Les regroupements opérés dans le secteur hospitalier privé, le développement de la chirurgie ambulatoire dans ce secteur ainsi que la mise en place d’un certain nombre d’alternatives à l’hospitalisation ont été favorisés par une pression économique. Elle n’est pas forcément agréable à subir mais elle est un facteur incitatif fort.

Les tarifs doivent donc être déterminés par un acteur de l’État en fonction de sa politique sanitaire. S’il veut développer la médecine, il devra « tarifer » fortement la médecine et baisser les tarifs de la chirurgie. C’est un choix et nous l’acceptons. Ensuite, que les tarifs donnés soient éclairés par les coûts, c’est tout à fait normal.

La loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires a introduit une ambiguïté, et c’est pourquoi nous aurions souhaité que le gestionnaire soit différent du régulateur.

La comptabilité analytique de mon établissement est établie par service, parce que mes charges sont fixes du fait de la normalisation des règles imposées : si mon service de réanimation doit avoir une infirmière pour deux malades et si j’ai dix lits, je connais mon taux d’activité ; quant au coût de mon service de réanimation, il varie du simple au double si j’ai cinq malades dans les dix lits ou si j’en ai dix. Quand l’État me demande quel est le coût d’un service, je lui réponds qu’il varie d’un mois sur l’autre en fonction de la pathologie et du nombre des malades. Par contre, je suis en mesure d’indiquer son coût annuel. Cela dit, il m’incombe de faire en sorte que mes coûts soient les plus corrects possibles pour assurer le fonctionnement de mon établissement.

M. le coprésident Jean Mallot, rapporteur. Il y a, en effet, plusieurs ambiguïtés, puisqu’on veut faire converger des secteurs différents, répondant à des logiques différentes.

Par ailleurs, deux écoles de pensée s’opposent. D’un côté, la tarification à l’activité peut être perçue, comme vous nous y invitez, comme un outil de pilotage du système : en définissant les tarifs, la collectivité oriente dans un sens ou dans un autre. Toutefois, le pilotage est très délicat et n’est pas toujours efficace, comme on peut le constater en agriculture. D’un autre côté, on peut considérer qu’en apportant une sorte de vérité des prix, la T2A assainirait le système et permettrait une gestion équilibrée. Il faudra forcément trouver, au bout du compte, un équilibre entre ces deux conceptions contradictoires.

En attendant, si nous ne disposons pas d’éléments de mesure, nous resterons au stade de la querelle. Or je ne suis pas sûr que l’on ait aujourd’hui ces outils, ni même que l’on dispose de lieux d’échange de l’information.

M. Jean-Loup Durousset. L’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH) finance une centaine d’établissements publics et privés participant à l’enseignement et au service public pour qu’ils fassent de la comptabilité analytique, afin de produire des coûts. Nous ne contestons pas la méthode, et les sites qui ont été choisis délivrent une information. Toutefois, celle-ci ne peut qu’éclairer les tarifs car, d’un établissement à l’autre, et même d’un site expérimentateur à l’autre, les coûts varient. On ne pourra tirer de cette information qu’une échelle de coûts, permettant de déterminer le poids de l’accouchement par rapport à une prothèse de hanche. En aucun cas, elle ne permettra de déterminer le bon coût de la prothèse de hanche ; et si vous voulez le faire, je vous mets en garde contre le poids de la structure, lequel est terrible pour un gestionnaire : les variations peuvent aller du simple au double entre un CHU bien organisé et un autre qui l’est moins.

Il est, me semble-t-il, dans la logique de l’État, d’une part, d’exercer une vigilance sur l’équilibre économique global du dispositif de soins, parce qu’il ne serait pas souhaitable que l’ensemble des établissements hospitaliers soient en déficit ou, à l’inverse, en excédent de façon massive, et, d’autre part, de définir une vraie politique tarifaire.

Ce que nous souhaiterions, c’est ne plus vivre dans l’ambiguïté actuelle, d’autant que nous n’avons rien demandé. La loi a posé le principe de la convergence. Il y a une enveloppe commune au secteur public et au secteur privé et il est demandé aux deux secteurs d’obéir aux mêmes principes et de coopérer sur le terrain. Nous sommes respectueux de la loi, mais, sur le terrain, nous redevenons différents, ce qui n’est pas très correct.

À la limite, qu’il n’y ait pas de convergence ne nous gênerait pas, à condition de nous le dire. Il peut très bien y avoir, à côté du secteur public, un secteur privé qui ne soit pas financé à 100 % par l’Assurance maladie et qui cherche ses ressources auprès des patients et des complémentaires. Il peut y avoir une enveloppe hospitalière publique et une enveloppe hospitalière privée, chaque secteur négociant et vivant sa vie.

La situation actuelle est très dommageable pour nous parce que nous travaillons dans l’esprit d’une convergence alors que, en fait, sur le terrain, nous sommes divergents.

M. le coprésident Jean Mallot, rapporteur. Je pense que l’ambiguïté concerne tout le monde. Cela étant, il me semble percevoir dans vos propos le souhait qu’il y ait une économie administrée de la santé, secteur dans lequel la puissance publique, à partir des éléments dont elle dispose, déterminerait les tarifs et orienterait les choses dans tel ou tel sens ?

M. Jean-Loup Durousset. Permettez-moi de vous dire que c’est déjà le cas.

L’année dernière, vous avez voté un objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) en progression de 3 %. Or la direction hospitalière ayant décidé de remettre à plat la tarification des cliniques privées, celles-ci ont connu des variations spectaculaires pouvant atteindre 20 % en plus ou en moins. Si ce n’est pas une réorientation totale de l’activité, dites-moi ce que c’est. L’administration gère et planifie ; elle pèse totalement sur l’organisation hospitalière. Au reste, je préviens toujours mes collègues qu’ils ne détermineront jamais ni leur lieu d’implantation, ni leur activité, ni leur organisation, ni même leur tarification. Si cela ne résulte pas d’une politique administrée de la santé, j’aimerais savoir de quoi cela résulte !

M. Dominique Tian. Certains disent que la T2A a beaucoup profité aux cliniques. Vous tenez un propos différent. A-t-on enregistré de nombreux regroupements d’établissements privés ? Y a-t-il eu beaucoup d’accords passés avec les hôpitaux dans les régions ? Pouvez-vous nous brosser un panorama des établissements que vous représentez en précisant leur nombre, leurs activités et leur situation ?

M. Jean-Loup Durousset. La Fédération hospitalière de France regroupe 1 200 établissements, répartis en trois grandes catégories : quelque 700 établissements dans le secteur de médecine, de chirurgie et d’obstétrique (MCO), quelque 400 établissements de soins de suite et de réadaptation (SSR) et une centaine d’établissements de psychiatrie. Le secteur soins de suite et de réadaptation connaît un certain développement puisqu’il a bénéficié de quelques autorisations de création d’établissements.

Le secteur hospitalier privé a connu, au cours des quinze dernières années, une forte restructuration puisqu’il a perdu 500 établissements. L’hôpital public, de son côté, n’en a perdu aucun. C’est vraiment, comme le soulignait M. Claude Evin, la grande différence entre l’hôpital et les cliniques. Dans le même temps, les cliniques se sont regroupées et ont réfléchi à une nouvelle organisation de leurs structures tandis que l’hôpital a eu du mal à faire sa restructuration.

La situation économique des cliniques est sur le fil, du fait, notamment, des grands bouleversements tarifaires intervenus l’année dernière : près de 40 % d’entre elles sont en déficit et plus de 60 % ont connu une année déficitaire au cours des trois dernières années. La rentabilité moyenne des structures ne cesse de se dégrader depuis trois ans. Selon les dernières études réalisées, elle s’établirait à 1 % du chiffre d’affaires.

Cela signifie que, quand Mme Podeur décide une variation, elle déséquilibre assez vite la situation d’une structure privée. La tension est très forte. Nous sommes sur le qui-vive, constamment à l’affût.

En dépit de l’augmentation de 3 % de l’ONDAM l’an dernier, les établissements de santé privés, notamment ceux du secteur MCO, n’ont bénéficié que d’une hausse tarifaire de 0,45 %, soit bien inférieure à l’évolution de leurs coûts, ne serait-ce qu’à celle du coût des salaires ; si bien que la Fédération a proposé, l’an dernier, de ne pas augmenter les salaires. Cette année, la hausse ne devrait être encore que de 0,30 ou 0,40 % car, selon l’analyse du ministère, les missions d’intérêt général et l’aide à la contractualisation (MIGAC) doivent évoluer plus vite que l’ONDAM. Il y a captation d’une ressource significative dans l’enveloppe destinée aux tarifs. On nous explique ensuite qu’il faudra déduire l’effet volume, puisque nous allons enregistrer une progression. Or la progression est très variable d’un établissement à l’autre. Ainsi, dans une ville où l’hôpital est dans un processus de redynamisation, une clinique privée dont l’activité est déjà stabilisée ne pourra que connaître un phénomène de baisse, à moins de mener une politique agressive vis-à-vis de l’hôpital public. Toutefois, selon la loi, elle doit non pas être agressive, mais coopérer. Nous retrouvons là l’ambiguïté que je dénonce depuis le début de mon propos.

Bref, une augmentation des tarifs de 0,45 % est stupide puisqu’elle provoque des tensions sur les volumes alors que l’État nous demande de coopérer.

Nous avons réclamé au ministère une évolution significative des tarifs. Ceux-ci doivent être revalorisés car, si vous affichez un effet volume à 1,7 %, vous affichez clairement, par là même, votre souhait que les établissements se concurrencent. Toutefois, il ne sera pas facile d’augmenter le volume de 1,7 % car, d’une part, l’on ne trouve pas de nouveaux patients tous les jours et, d’autre part, les exigences en matière de qualité de la prestation des soins vont croissant.

M. Jean-Luc Préel. Les missions de service public que la loi vous confie incluent l’accueil des urgences, ce qui entraînera une modification de la chirurgie programmée à laquelle vous êtes habitués. Comment envisagez-vous cette évolution ? Cela induira-t-il beaucoup de changements ?

Par ailleurs, comment comptez-vous impliquer les praticiens dans cette réforme ? Quel rôle allez-vous donner aux conférences médicales d’établissement ?

M. Jean-Loup Durousset. Quand a été reconnu, dans la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, le droit aux établissements privés de participer aux missions de service public, cela a été un moment de satisfaction pour nous. Cela faisait plusieurs années que nous le souhaitions. D’ailleurs, 139 établissements privés assurent déjà sur le territoire la mission des urgences. Agréés par les agences régionales de l’hospitalisation au même titre qu’un hôpital public, ils ont les mêmes contraintes que ce dernier, remplissent les mêmes missions et accueillent tout un chacun au tarif opposable. Plus ces missions seront élargies, plus l’hospitalisation privée sera satisfaite. Quand les 139 établissements ont été reconnus, 200 candidats participaient déjà au dispositif d’urgence sur le territoire.

Nous allons également pouvoir remplir la mission de formation. Pour nous, un bon système de santé doit présenter aux étudiants en médecine toute la palette d’activités qu’ils peuvent être appelés à exercer. Alors que 50 % des étudiants iront dans le secteur privé et 50 % dans le secteur public, on ne peut pas continuer à leur proposer une formation que dans un seul secteur : imaginez que tous les ingénieurs informaticiens soient formés chez IBM, cela poserait certainement quelques problèmes au terme des études. La palette des activités enseignées doit être suffisamment ouverte pour inclure la médecine générale et la médecine exercée dans les campagnes. Pour notre part, nous sommes prêts à remplir cette mission. Elle entraînera des contraintes supplémentaires car accepter une mission, c’est prendre des engagements. La question clé, pour nous, est l’accueil de tout un chacun sans distinction liée à la rémunération de l’acte ; nous sommes pour une politique de reste à charge le plus faible possible. Mais, pour y parvenir, il faudrait que nous soyons aidés et que notre demande de convergence des tarifs soit entendue. Si vous nous dites que les mutuelles doivent financer le secteur privé, cela pose un problème pour l’accueil de tous.

Ce qui a fait la force de l’hospitalisation privée, c’est son mode d’organisation médicale : pendant longtemps, nous avons échangé avec les médecins – pas seulement nous, mais également l’État – de la liberté contre de la responsabilité. J’ai eu le grand plaisir de gérer des établissements avec des médecins libéraux. Il n’y a jamais eu de problème pour assurer la permanence des services d’urgence ou de la maternité : les médecins libéraux s’auto-organisaient pour assurer, chaque jour, une présence vingt-quatre heures sur vingt-quatre sans que j’aie besoin de les réunir pour fixer le calendrier. Il y avait échange de responsabilité contre liberté. Or ce système risque de changer. On le voit dans la médecine de ville : étant donné qu’il y a moins de liberté, il y a moins de responsabilité, et les médecins attendent de l’administration des consignes d’organisation et des indemnisations. C’est un choix de société. Les vertus de l’exercice libéral n’ont pas été perçues : tant pis pour nous.

Nous négocions avec les médecins un certain nombre de règles dans plusieurs domaines.

Premièrement, nous leur rappelons qu’il est du devoir d’un médecin d’assurer la permanence des soins dans les établissements qui ont choisi de le faire. Les médecins sont tenus, de par le règlement, de pratiquer les urgences en secteur 1.

Deuxièmement, nous leur conseillons, dans leur pratique, d’avoir des tarifs transparents. Ce n’est pas parce que l’État et l’administration les autorisent à pratiquer des suppléments d’honoraires qu’ils doivent faire n’importe quoi. Nous souhaiterions qu’ils rentrent dans une logique de contractualisation sur l’hospitalisation, de manière à ce que le patient dispose d’une information claire sur la totalité de la note qu’il devra acquitter, ce qui n’est pas encore tout à fait le cas.

Nous formons beaucoup d’espoir sur le secteur optionnel, lequel devrait faire l’objet d’une reconnaissance réglementaire. Il présente l’avantage de fixer les règles du jeu pour les médecins, ce qui introduit de la transparence dans le fonctionnement.

L’histoire des établissements privés est fondée sur l’initiative médicale. C’étaient les médecins qui étaient propriétaires des structures et qui décidaient du mode d’organisation et du mode de fonctionnement de celles-ci. Pendant longtemps, la commission médicale d’établissement n’avait pas de sens puisque les conseils d’administration des établissements étaient composés uniquement des médecins libéraux exerçant dans l’établissement – à la différence du secteur public, où le gestionnaire n’est pas le médecin. Avec le temps, les établissements privés ont évolué : 40 % d’entre eux sont gérés aujourd’hui par des non-médecins. La commission médicale d’établissement prend donc plus d’importance. Nous souhaitons donc que son rôle soit clarifié. A-t-elle un rôle corporatiste, c’est-à-dire de représentation du corps médical face à l’administration ? Ou a-t-elle un rôle constructif et de suggestion ?

Si la commission médicale d’établissement participe à l’élaboration du projet médical, est une source de propositions dynamiques et a la possibilité, une fois le projet validé, de le faire respecter par le corps médical, elle nous intéresse parce que nous préférons discuter avec dix membres de la commission médicale d’établissement plutôt qu’avec cent cinquante ou deux cents médecins. En revanche, si elle se borne à donner un avis, nous préférons continuer à traiter avec les cent cinquante médecins en court-circuitant la commission médicale d’établissement.

M. le coprésident Pierre Morange. Nous aimerions connaître votre méthodologie de travail, d’une part, en matière de facturation et de recouvrement et, d’autre part, en matière de cotation des actes. Cette cotation est-elle assurée par les professionnels de santé eux-mêmes – ils sont les mieux à même de le faire mais cela suppose qu’ils connaissent cette codification – ou déléguez-vous cette responsabilité à un médecin ou à un administratif affecté spécialement à cette tâche ?

M. Jean-Loup Durousset. Notre histoire passée avec l’Assurance maladie nous a habitués aux contrôles. Nous restons sur cette logique du conventionnement : les établissements de santé privés envoient régulièrement des factures à l’Assurance maladie, ainsi qu’aux patients et aux mutuelles. Je rappelle que la loi prévoit que l’hôpital public fasse de même ; or on nous explique que c’est difficile. Mais je ne vois pas en quoi puisque tous les établissements de santé privés le font et que leur facturation est plus complexe que celle de l’hôpital public dans la mesure où elle comporte une partie haute, correspondant à la partie hospitalière, et une partie basse, reprenant la cotation de chaque médecin. La facturation de l’hôpital public ne comporte, quant à elle, qu’une partie haute qui regroupe dans son groupe homogène de séjour (GHS) la rémunération des médecins et celle de l’établissement.

L’Assurance maladie pratique sur nous des contrôles a priori. Quand j’envoie mon projet de facturation, elle procède par le biais de l’informatique à un certain nombre de vérifications. Entre 4 et 5 % de nos factures sont rejetées, pour des problèmes divers – alors que l’hôpital public fait une déclaration statistique.

Nous demandons à ce que la pratique soit standardisée, que tout le monde élabore une facture et que le patient soit informé du coût du séjour, de la partie prise en charge par la sécurité sociale et du montant qui reste à sa charge – une telle information éclairerait nos concitoyens sur le système de soins. Notre demande n’a toujours pas abouti.

Nous avons une vieille culture du contrôle : des médecins contrôleurs – ils s’appelaient médecins conseil auparavant – de l’Assurance maladie viennent régulièrement, depuis 1972, effectuer des contrôles dans nos établissements. Ce que disait tout à l’heure M. Gérard Vincent, délégué général de la Fédération hospitalière de France, sur la pertinence des actes nous intéresse parce que nos médecins ont tous été contrôlés, ce qui n’est pas le cas de l’hôpital public. Nos médecins sont habitués à avoir des « descentes » de médecins de l’Assurance maladie qui viennent contrôler, entre autres, que l’acte facturé a bien été réalisé.

Dans le cadre du conventionnement des médecins, figure un article très important selon lequel nul ne peut coter un acte si celui-ci n’a pas été pratiqué par lui-même. Nous appliquons cette règle : c’est le médecin, et lui seul, qui cote. L’administratif que je suis ne peut pas modifier la cotation du médecin sans son accord car ce dernier est le seul à pouvoir mettre sur sa feuille ce qui a été fait. S’il se trompe, il en porte la responsabilité, mais sa responsabilité engage, bien évidemment, l’établissement.

M. le coprésident Pierre Morange. C’est ce que je voulais vous entendre dire.

Nous vous remercions, messieurs.

*

La Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) procède enfin à l’audition de M. Antoine Dubout, président de la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne (FEHAP), et de M. Yves-Jean Dupuis, directeur général.

M. le coprésident Pierre Morange. Je souhaite la bienvenue à M. Antoine Dubout, président de la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne (FEHAP) et à M. Yves-Jean Dupuis, son directeur général.

Nos travaux, vous le savez, portent sur le fonctionnement interne de l’hôpital, que nous examinons à la lumière de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires. Nous souhaitons notamment pouvoir bénéficier de vos analyses sur l’articulation entre le secteur sanitaire et le secteur médico-social dans les établissements de santé. Notre approche de la philosophie générale de la loi et de sa mise en œuvre sur le terrain est pragmatique.

M. le coprésident Jean Mallot, rapporteur. L’examen de cas particuliers nous a déjà permis de tirer quelques enseignements. Nous nous intéressons aux modalités de gestion des établissements, à leur santé financière, à la tarification à l’activité (T2A), aux systèmes d’information et à la comptabilité analytique. Que peut-on dire de la santé financière des établissements de votre fédération au regard de celle des établissements des deux fédérations que nous avons déjà auditionnées ? Présentent-ils des spécificités de mise en œuvre de la comptabilité analytique, de la gestion du personnel, de la cotation des actes, bref des outils qui permettent aux gestionnaires des établissements de les piloter, dans un contexte de mise en place progressive de la tarification à l’activité et une optique de convergence entre les secteurs ?

M. Antoine Dubout, président de la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne (FEHAP). La FEHAP a pour spécificité de regrouper des établissements d’accueil de handicapés, médico-sociaux et sanitaires.

Les établissements de santé qui lui sont affiliés partagent les valeurs de l’hôpital public – globalement – et les contraintes des établissements privés. Un élément très prégnant est que, au contraire de l’hôpital public, la faillite est possible chaque année et qu’elle survient parfois. Cette contrainte très sévère nous interdit d’être très longtemps en déficit.

Certains de nos établissements ayant été placés autrefois sous le régime de l’objectif quantifié national (OQN), et d’autres sous celui de la dotation globale, nous sommes à même de comparer les deux systèmes. Quoique leur grande diversité m’empêche de vous faire part de statistiques globales, je peux néanmoins vous indiquer que la situation d’ensemble des établissements est fragile, voire très fragile. Ils sont dans l’obligation d’être, au moins à moyen terme, à l’équilibre. Dans le cas contraire, il nous revient de les rapprocher, voire de les faire disparaître. De telles décisions sont prises tous les ans. Le taux de rapprochement et de concentration est très voisin de celui de l’hôpital privé ; pour ce qui est du pourcentage de disparitions, il est d’environ 30 % depuis dix ans. En revanche, je ne suis pas capable de vous indiquer combien d’établissements sont en déficit.

Contrairement à une idée parfois reçue, les établissements participant au service public hospitalier (PSPH) ne sont pas des établissements publics, mais des organismes privés.

Enfin, notre secteur partage avec le secteur privé lucratif la spécificité forte d’une gouvernance simple et claire. Chaque structure est dotée d’un président et d’un directeur général. Nommé par le président, le directeur général a autorité sur l’ensemble du personnel. Cette gouvernance permet d’identifier les responsabilités et d’en tirer les conséquences en cas de dérive.

M. le coprésident Jean Mallot, rapporteur. Que pouvez-vous nous dire de plus sur les outils de gestion ?

M. Antoine Dubout. La quasi-totalité des établissements disposent d’outils de comptabilité analytique. Certes, cet outil n’est pas sans ambiguïtés : les résultats qu’il produit dépendent du paramétrage qui a été choisi. Cependant, nos établissements ne peuvent pas fonctionner sans lui.

M. le coprésident Jean Mallot, rapporteur. Les résultats dépendent en effet des paramètres. Mais s’il en allait autrement, les chiffres nous gouverneraient.

Les outils de comptabilité analytique dont ils disposent permettent-ils aux établissements de comparer leurs coûts réels aux tarifs qui servent à les rémunérer, et d’orienter leurs activités en conséquence ?

M. Antoine Dubout. Absolument. Cependant, le deuxième élément qui nous gouverne, c’est-à-dire nos valeurs, conduit à prendre des décisions qui ne sont pas seulement financières, par exemple le maintien d’activités qui, analytiquement parlant, sont déficitaires.

M. le coprésident Pierre Morange. Telle personnalité auditionnée, exerçant des responsabilités en établissement PSPH après avoir occupé des fonctions éminentes dans des structures publiques d’organisation d’offres de soins, a fait état de difficultés en matière de comptabilité. Elle a notamment évoqué des insuffisances notoires en matière de facturation et de recouvrement de recettes. Ces propos ne sont-ils pas incompatibles avec les vôtres ?

M. Antoine Dubout. Mes propos, je l’ai dit, valent pour la quasi-totalité des établissements. Celui auquel vous faites allusion est…

M. le coprésident Pierre Morange. … l’exception qui confirme la règle ?

M. Antoine Dubout. La qualité de la gestion des établissements affiliés à notre fédération – une centaine – n’est pas égale. Les établissements en difficulté que nous sommes obligés de fermer chaque année en constituent la preuve. La rigueur nécessaire a manqué à celui que vous évoquez – par ailleurs médiatiquement très connu. Nous avons nous-mêmes proposé à la direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS) une action commune. Le récent changement de gouvernance nous a rassurés.

M. le coprésident Pierre Morange. Je conclus de vos propos que le secteur que vous représentez a bien compris la nécessité des outils de mesure. Pour reprendre une litote des administrations compétentes, le secteur public, lui, dispose encore d’une marge de progression.

Au-delà du recouvrement et de la facturation, nous nous intéressons aussi à l’organisation de la cotation des actes, élément stratégique qui constitue la base des recettes. Par qui la cotation doit-elle être établie ? Par le professionnel de santé ? Par un praticien maîtrisant de façon plus approfondie l’informatique médicale et ayant reçu délégation ? Par délégation encore, par un membre du personnel administratif disposant d’une culture médicale ? Ces solutions sont toutes utilisées. Indissociable de l’acte, la cotation engage la responsabilité du professionnel et de l’établissement.

M. Antoine Dubout. Les solutions sont en effet très diverses. L’établissement que je préside, l’hôpital Saint-Joseph de Marseille, est, avec plus de 800 lits, le plus important hôpital PSPH de France. Il est en bonne santé financière. Les cotations y sont effectuées par les praticiens. Cependant, un médecin spécialisé, embauché à cet effet, les vérifie toutes et les reprend si nécessaire avec ses collègues. Mais peut-être est-ce la dimension de l’établissement qui permet cette solution ?

M. le coprésident Jean Mallot, rapporteur. Le médecin spécialisé vérifie-t-il avec ses collègues la pertinence des cotations, ou les reprend-il pour s’assurer, en cas de doute, qu’elles sont effectuées dans un sens profitable à l’établissement ?

M. Antoine Dubout. Il les reprend pour en vérifier la pertinence.

M. Yves-Jean Dupuis, directeur général de la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne. La réponse n’est pas univoque. Le médecin spécialisé reprend la cotation pour évaluer la pertinence de l’acte. Il arrive aussi que des médecins oublient de coter un acte complémentaire qui pourrait faire basculer la cotation du séjour. Du fait de l’évolution et de la complexité accrue des règles de nomenclature, notamment sous l’effet de la version 11 (V11) de la classification des groupes homogènes de malades (GHM), il est utile qu’un médecin spécialiste puisse éclairer ses confrères. En tout état de cause, ce n’est pas celui-ci, mais bien le médecin qui a effectué l’acte qui va le coter. Nous restons bien dans cette logique de responsabilité.

M. le coprésident Jean Mallot, rapporteur. Pour certaines cotations, une marge d’appréciation peut être à l’origine d’un débat entre le médecin qui effectue l’acte et celui qui cote.

M. Yves-Jean Dupuis. En effet, le médecin qui effectue l’acte peut ne pas connaître l’incidence de la non-cotation d’un acte réalisé mais non-enregistré.

M. le coprésident Pierre Morange. Quelle est votre analyse du financement direct des actes par l’Assurance maladie sur présentation des factures ? Dans le secteur public, le financement se fait sur la base d’un état statistique communiqué aux agences régionales de l’hospitalisation. Quelle méthode appliquez-vous ? Plus généralement, quel est le degré d’interopérabilité des systèmes d’information et d’informatique ? La maîtrise de l’information, pour chacune des parties administrative et strictement médicale, est un élément stratégique.

M. Yves-Jean Dupuis. Nous bénéficions de l’expérience des établissements ex-OQN. Lors de la mise en place de la T2A à 100 %, ils ont dû s’adapter rapidement pour pouvoir transférer sans difficulté les bordereaux. Avec les services de l’Assurance maladie et des assurances complémentaires, nous avons donc travaillé à ce que les bordereaux correspondent aux activités de nos établissements et permettent une facturation rapide.

Nous nous attendions à une poursuite à l’identique de ces travaux dans le secteur de l’hôpital public. Lorsque les groupes de travail se sont réunis au ministère, nous avons donc été très présents – ainsi que l’Assurance maladie et les assurances complémentaires – pour y décliner la même logique. Aujourd’hui, nous sommes prêts. La FEHAP a mis en place une cellule informatique, dotée d’un responsable, pour accompagner nos établissements. Leurs systèmes informatiques devront en effet être mis en adéquation avec ceux qui seront retenus par l’Assurance maladie. Malheureusement, le groupe de travail progresse peu…

M. Dominique Tian. La semaine dernière, vous avez lancé une campagne de publicité sur le coefficient correcteur. Pourriez-vous nous expliquer la notion de différentiel de coût, qui a fait l’objet de débats récents à l’Assemblée nationale et qui fonde une revendication très forte de la FEHAP ?

M. Antoine Dubout. Ce débat est commun avec ceux de la convergence et de la T2A. Si la FEHAP est favorable à la convergence, les termes de celle-ci doivent être rendus objectifs. Convergence ne signifie pas forcément tarif unique. Que l’hôpital public supporte des charges spécifiques est parfaitement concevable ; encore faut-il qu’elles soient identifiées et quantifiées.

Le débasage effectué l’an dernier au profit des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation (MIGAC) et au détriment de la T2A nous a profondément heurtés. La Cour des comptes s’y est du reste intéressée. Alors que l’augmentation de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) hospitalier avait été fixée à 3 % environ, ce débasage a paradoxalement limité l’augmentation des tarifs à 0,4 % seulement. En 2010, en application des mêmes règles, l’augmentation de l’ONDAM de 2,8 % devrait se traduire par une diminution des tarifs de 0,3 % ou 0,4 %. Ce dispositif ne pourra pas perdurer bien longtemps.

De façon choquante, alors que ce débasage a abouti à un transfert de 800 millions d’euros de l’ONDAM aux MIGAC, aucune justification n’en a été fournie. Nous avons pourtant demandé, par écrit, des justifications à la direction de l’hospitalisation et de l’organisation de soins, puis à la ministre. Devant leur silence, nous envisageons de saisir la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA), pour qu’elle impose au ministère de nous laisser accéder aux justificatifs.

Par ailleurs, une mission de l’Inspection générale des affaires sociales, conduite à la demande de la ministre, avait conclu à l’existence d’une différence de charges de 4,05 % entre le secteur public et le secteur privé non lucratif, au détriment de celui-ci. Cette analyse a été validée l’an dernier par une étude complémentaire.

Nous sommes favorables à la convergence. La différence de charges ayant été objectivement mise en évidence par un organisme d’État – nous considérions jusqu’alors qu’elle était de 9 % –, nous avons demandé qu’elle soit compensée. Dans la mesure où elle était validée par les services mêmes de l’État, cette demande, qui ne constituait évidemment pas une attaque contre l’hôpital public, nous a paru justifiée. Tel a du reste été l’avis de la commission mixte paritaire qui a examiné le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010.

Par ailleurs, après avoir évalué le surcoût à 500 millions d’euros, la direction de l’hospitalisation et de l’organisation de soins l’a réduit à un montant de 180 à 200 millions d’euros. Jusqu’à preuve du contraire – mais comment cette preuve pourrait-elle être fournie, puisque l’accès aux chiffres nous est refusé ? –, nous considérons qu’il faut y ajouter 80 à 100 millions d’euros. Ces conditions de présentation ont perturbé la représentation parlementaire elle-même.

Telles sont les raisons qui nous ont amenés – et surtout certains de nos adhérents – à un peu d’agressivité.

M. Yves-Jean Dupuis. L’échelle tarifaire qui nous est appliquée est commune avec celle de l’hôpital public. Les salaires nets de notre secteur en étant très proches, nous sommes tenus, pour un même acte, de dégager une productivité supérieure de 4 % à la sienne pour obtenir les mêmes résultats. Comme nous avons l’obligation d’équilibrer nos résultats, la gestion de nos établissements est soumise à un double défi : d’une part, gagner en productivité par rapport à l’hôpital public pour chaque tarif et, d’autre part, être à l’équilibre en fin d’exercice, faute de quoi les reports de charges ainsi créés peuvent aboutir au déclenchement de la procédure d’alerte par le commissaire aux comptes, avec les lourdes conséquences qui peuvent s’ensuivre sur le fonctionnement de l’établissement.

L’importance des gains de productivité qui nous sont demandés met certains établissements en situation de grande détresse. De façon générale, la situation de nos établissements est légèrement déficitaire. Mais, entre les établissements en bonne santé et ceux qui sont dans les situations les plus difficiles, les écarts sont élevés, peut-être les plus élevés du secteur hospitalier. En 2009, un établissement de 1 000 salariés a fermé ses portes avant d’être vendu à l’acquéreur le mieux disant au prix… d’un euro symbolique. Si le différentiel de charges avait été pris en compte – son cumul, année par année, finit par représenter des montants considérables ! –, cet établissement aurait pu continuer à exister.

M. Jean-Luc Préel. Merci de ces précisions. La convergence entre les établissements de soins publics et privés – dont font partie ceux qui relèvent de la FEHAP – comporte des déclinaisons intrasectorielles. Les difficultés budgétaires de certains établissements dans la mise en œuvre de celles-ci sont-elles dues à des problèmes de tarification ou de gestion interne ?

M. Yves-Jean Dupuis. La gestion peut bien sûr être mise en cause. Un exemple a été cité. Cependant, les cas sont relativement rares. Les gestionnaires sont soumis à un double contrôle : le contrôle annuel qu’est l’établissement du budget et le suivi des commissaires aux comptes, qui vérifient la bonne exécution de celui-ci.

Les raisons des difficultés actuelles sont en réalité multiples. L’inadaptation de certaines activités par rapport aux besoins de la population en est une. Les variations inexpliquées de tarifs d’une année à l’autre en sont une autre. Une variation majeure d’un tarif d’une année à l’autre – lors de son audition, le président de la Fédération de l’hospitalisation privée, M. Jean-Loup Durousset, a cité l’exemple d’une diminution de 20 % – pourra mettre en grande difficulté un établissement à l’équilibre et le contraindre à aménager son activité en cours d’exercice : ainsi, un établissement de la région de Nice, en situation d’équilibre, qui avait pris en charge la cardiologie pour le compte de l’hôpital local, a vu l’année suivante ses résultats dans ce secteur d’activité diminuer de 10 % en raison de la modification des tarifs. La V11, avec notamment la mise en place de bornes hautes et basses, accentue ces déséquilibres. Enfin, certains établissements peuvent rencontrer des difficultés d’adaptation. Cependant, c’est peut-être une des forces de notre fédération que d’être capable d’adapter très rapidement les organisations aux besoins des populations.

M. le coprésident Pierre Morange. Quelles sont vos relations avec des structures comme la Mission nationale d’expertise et d’audit hospitaliers (MEAH), désormais intégrée à l’Agence nationale pour l’appui à la performance hospitalière (ANAP) ? Un travail d’accompagnement est-il effectué en vue d’une recherche permanente d’amélioration de l’efficience ? Au-delà des critères organisationnels et financiers, que nous avons abordés à plusieurs reprises, la mesure des prestations rendues aux citoyens, du service rendu à l’assuré, prend-elle en compte des paramètres facilement lisibles, comme le temps d’attente aux urgences ? Dans ce domaine, J’avais lancé une expérience au sein des hôpitaux Bichat et Beaujon, avec l’assistance du cabinet McKinsey et l’appui financier de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris. La participation du personnel a été remarquable. La réussite a été au rendez-vous : à moyens humains et financiers constants, le temps d’attente a diminué de 40 % en l’espace de quelques mois.

M. Antoine Dubout. Comme je l’ai dit en introduction, notre secteur est très divers. Nous travaillons avec la Mission nationale d’expertise et d’audit hospitaliers (MEAH), mais peut-être de façon moins structurée que l’hôpital public. Nous avons défini des critères de qualité. En revanche, nous n’avons pas jusqu’à présent procédé à leur généralisation. La qualité est mesurée plutôt établissement par établissement, par le biais d’enquêtes de satisfaction anonymes à domicile une semaine ou deux après l’hospitalisation par exemple. Nous allons engager une réflexion d’ensemble sur la qualité : son lancement officiel aura lieu dans deux semaines à l’hôpital de la Croix Saint-Simon, à Paris.

Je voudrais enfin souligner que la mise en place de la V11 cette année a représenté la caricature de ce qu’il ne faut pas faire. La V11 n’a été connue qu’au printemps. À ce retard se sont ajoutées des difficultés avec les logiciels fournis. De ce fait, nos établissements n’ont pu connaître leurs ressources qu’à la fin du printemps. Comment un établissement, qui a dû attendre la fin du mois de mai pour calculer ses recettes, peut-il redresser en six mois un déséquilibre ? Comme je l’ai dit à Mme la ministre, les résultats de cette pratique ont été catastrophiques.

M. le coprésident Pierre Morange. Merci, messieurs. Si vous souhaitez faire à la mission des propositions précises pour améliorer le service rendu à nos concitoyens, nous étudierons avec une très grande attention les conditions dans lesquelles elles pourraient être déclinées sur le plan législatif ou réglementaire. Nous entendons remettre notre rapport dans le courant du mois de janvier.

La séance est levée à onze heures quinze.