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Mission d’information sur la compétitivité de l’économie française et le financement de la protection sociale

Mercredi 4 mai 2011

Séance de 16 heures

Compte rendu n° 11

Présidence de M. Bernard Accoyer, président puis de M. Marc Laffineur, vice-président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Hervé Drouet, directeur général de la Caisse nationale des allocations familiales, de M. Dominique Libault, directeur à la direction de la sécurité sociale, et de M. Frédéric Van Roekeghem, directeur général de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés

– Audition, ouverte à la presse, de M. David Appia, président de l’Agence française pour les investissements internationaux

– Présences en réunion

MISSION D’INFORMATION SUR LA COMPÉTITIVITÉ DE L’ÉCONOMIE FRANÇAISE ET LE FINANCEMENT DE LA PROTECTION SOCIALE

Mercredi 4 mai 2011

La séance est ouverte à seize heures.

(Présidence de M. Bernard Accoyer, président de la Mission d’information,
puis de M. Marc Laffineur, vice-président)

La Mission d’information sur la compétitivité de l’économie française et le financement de la protection sociale entend, en audition ouverte à la presse, M. Hervé Drouet, directeur général de la Caisse nationale des allocations familiales, M. Dominique Libault, directeur à la direction de la sécurité sociale, et M. Frédéric Van Roekeghem, directeur général de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés.

M. le président Bernard Accoyer. Nous recevons aujourd’hui trois représentants des institutions de sécurité sociale : M. Dominique Libault, directeur à la direction de la sécurité sociale depuis 2002, M. Frédéric Van Roekeghem, directeur général de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés depuis 2004, et M. Hervé Drouet, directeur général de la Caisse nationale des allocations familiales depuis 2008.

Je tiens à vous remercier tous trois de votre présence, et vous propose de présenter en particulier votre analyse sur l’hypothèse d’une évolution progressive du financement de la protection sociale – comme l’ont engagée notamment l’Allemagne et le Royaume-Uni – avec une contribution sociale sur la consommation, mal nommée « TVA sociale ».

M. Dominique Libault, directeur à la direction de la sécurité sociale. Dans la réflexion sur l’évolution de la protection sociale en France, le sujet de la compétitivité occupe une place fondamentale, tout comme celui de la solidarité. Encore convient-il d’abord d’en distinguer les enjeux à court et à moyen terme.

L’un des enjeux de la compétitivité des pays à moyen terme réside dans le ratio entre population active occupée et population inactive. Le défi du vieillissement actif est, en effet, central : d’ici vingt à trente ans, la compétitivité des pays dépendra pour beaucoup de leur capacité à mobiliser une grande partie de leur population pour produire de la richesse. Concernant d’ailleurs l’accroissement de la population active, l’Institut national de la statistique et des études économiques a reconsidéré ses précédentes évaluations et l’estime à 2 millions d’individus supplémentaires d’ici à quelques années grâce aux politiques de protection sociale visant, en matière de retraite, à accroître le niveau d’activité des seniors et, en matière de politique familiale, à assurer le renouvellement générationnel, disposer de suffisamment d’actifs dans les années à venir et concilier, surtout pour les femmes, vie familiale et vie professionnelle. La protection sociale constitue un tout – un financement et de la redistribution – qui, bien mené – en permettant à un maximum de gens de travailler, qu’ils soient chargés de famille ou avancés en âge –, peut être un atout pour la compétitivité à moyen terme de la France. Elle ne doit pas seulement être considérée comme une charge.

Aussi convient-il, ensuite, de se méfier de paradigmes, certes utiles, mais quelque peu simplistes, comme le niveau des prélèvements obligatoires. Si le coût global des systèmes sociaux demeure une préoccupation fondamentale pour les différents pays développés, le choix de rendre solidaire la protection en matière de santé n’est pas en soi un facteur de moindre compétitivité. Aux États-Unis, les prélèvements obligatoires en matière de protection maladie sont très faibles, ce qui pourrait laisser penser que ce problème de compétitivité est évité. Pourtant, le Président des États-Unis, Barack Obama, défendait ainsi sa réforme de l’assurance maladie : « L’une des plus grandes menaces qui pèse non seulement sur le bien-être de nos familles et la prospérité de nos entreprises, mais également sur les fondations mêmes de notre économie est l’explosion des coûts de la santé en Amérique aujourd’hui. Investir dans la réforme va permettre de réduire les coûts et sera le meilleur moyen de diminuer les déficits à long terme ». En effet, lorsque, dans un système où la protection obligatoire mutualisée à l’échelle de la nation est faible, des protections sociales d’entreprise fortes se créent, sans maîtrise du coût de la santé, ce dernier se reporte sur les entreprises.

Pour nos pays, le vrai défi tient, avec des coûts sociaux en augmentation du fait du vieillissement de la population, à l’efficience de la dépense, ce qui implique de s’interroger également – au-delà de la question de la solidarité – sur son mode de prise en charge : par la nation ou par d’autres circuits de financement. À cet égard, le choix français d’une protection sociale forte n’a pas empêché de très importants progrès ces dernières années quant à l’efficience du système. En matière d’assurance maladie, la progression des dépenses publiques de santé, qui était de 7 % au début de la décennie 2000, est ainsi passée à 3 % aujourd’hui, soit, sur un budget de l’ordre de 170 milliards d’euros par an, une économie de 7 milliards d’euros chaque année et de 40 milliards sur la période considérée, sachant que l’efficience de la dépense elle-même a aussi progressé. L’enjeu n’est pas seulement, en effet, de dépenser moins, mais également de dépenser mieux au bénéfice de la santé de tous, puisque la dépense en matière de protection sociale a pour objet d’améliorer le bien-être et la santé des personnes, notamment au travail. Une société compétitive, c’est aussi une société dans laquelle les gens vont bien, ont une santé qui leur permet de travailler et d’apporter de la richesse au pays.

Pour autant, accroître l’efficience du système de protection sociale passe également par une évolution des comportements individuels. La cohérence entre les politiques de solidarité et de compétitivité tient en effet aussi au bon usage des systèmes sociaux par l’ensemble de nos concitoyens, qu’il s’agisse, par une bonne compréhension des droits et des devoirs, de lutter contre les abus ou d’éviter les usages inutiles.

Enfin convient-il, toujours en termes de compétitivité, d’éviter, en matière de coût du travail et, plus généralement, de financement du système, des taux marginaux élevés qui découragent le travail ou conduisent à des délocalisations. Aussi suis-je favorable à la mise en place d’assiettes larges de prélèvements. Pour avoir participé à la création de la contribution sociale généralisée, je reste en effet convaincu que celle-ci a été une excellente réforme pour la protection sociale et qu’une assiette large et des taux modérés, une fois établi le choix du périmètre du financement, sont la meilleure option possible.

De même est-il important de choisir des modes de gouvernance efficaces. La persistance des déficits sociaux, qui constitue évidemment un handicap, montre que nous devons progresser – l’actuel projet de réforme constitutionnel répond d’ailleurs à cette préoccupation. Alors que nous étions l’année dernière à moins 20 milliards d’euros nous pouvons espérer, avec la réforme des retraites et une dépense d’assurance maladie en progression de 3 %, c’est-à-dire inférieure à celle du produit intérieur brut en moyenne, atteindre l’équilibre de nos finances sociales.

M. Frédéric Van Roekeghem, directeur général de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés. Avec des dépenses de santé atteignant 12 % du produit intérieur brut, soit 220 milliards d’euros, la France est l’un des pays qui dépense le plus pour sa santé. Certes, sa position relative par rapport aux autres pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques varie selon que l’on se réfère au produit intérieur brut ou à la parité en pouvoir d’achat par habitant, mais notre pays accomplit, en tout état de cause, un effort important dans le domaine de la santé. La gestion de son système de couverture obligatoire et, plus largement, des coûts de production des soins, constitue donc un enjeu majeur de compétitivité pour le pays, comme l’indiquait M. Michel Pébereau voilà quelques années dans un rapport toujours d’actualité.

La compétitivité se joue dans le temps, ce qu’ont bien compris nos voisins allemands qui ont lancé sur ce sujet, il y a déjà plusieurs années, une réflexion qui leur a permis d’aborder les questions de compétitivité en termes non seulement de prix, mais également de produits. Même si nous améliorons notre performance en matière d’efficience, il convient de ne pas oublier l’autre moteur de compétitivité qu’est l’innovation des entreprises, sans laquelle nous ne pourrons résister à la compétition internationale malgré tous nos efforts concernant tant le rééquilibrage que le financement des prestations sociales.

L’événement majeur relatif aux dépenses de santé des dix dernières années a été l’inflexion très forte du taux de croissance de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie. Alors que celui-ci était de l’ordre de 7 % sur la période 1998-2003, nous l’avons réduit de manière continue sur la période 2005-2011 sous l’effet d’efforts importants – qui continuent d’ailleurs de susciter des réactions. Aujourd’hui, avec un taux de croissance passé de 7 % à 3 %, c’est 0,7 point de contribution sociale généralisée par an de prélèvements obligatoires évité. Toute réflexion en profondeur sur la compétitivité nécessite donc de bien comprendre que tout se joue dans le temps.

Pour autant, la santé est un secteur producteur de richesses et d’innovations : le niveau de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie est donc tout aussi important que son contenu.

À cet égard, nous avons d’abord accompli un effort de maîtrise des dépenses de santé qui nous met en position compétitive par rapport aux pays qui nous entourent. La direction de la sécurité sociale a ainsi montré, dans son analyse des comptes de la sécurité sociale, que nous maîtrisons mieux à l’heure actuelle les dépenses – à tout le moins de soins de ville – que nos voisins d’outre-Rhin, qui, après avoir réfléchi à la réforme du financement de la protection sociale avant nous, affectent des ressources nouvelles au financement de la santé, tout en maîtrisant les prélèvements obligatoires sur les entreprises. Pour autant, les réformes structurelles en cours dans notre pays sont de nature, me semble-t-il, à améliorer progressivement notre compétitivité.

Nous avons ensuite, conformément à l’une des recommandations que l’Organisation de coopération et de développement économiques formule régulièrement en matière de compétitivité, accru l’information des patients : la transparence est maintenant faite sur la qualité et sur le prix auxquels les soins sont délivrés.

Par ailleurs, le mode de rémunération des offreurs se trouve en cours de réforme profonde. La tarification à l’activité, l’un des leviers d’accroissement de la productivité des établissements hospitaliers, même si elle présente des inconvénients, constitue un moyen d’amélioration de notre compétitivité, de même que la mixité de la rémunération des offreurs de soins libéraux, en particulier des médecins traitants.

La meilleure coordination entre l’État et la sécurité sociale demeure cependant une préoccupation car la mise en place des agences régionales de santé ne résout pas tous les problèmes, même si nous progressons dans ce domaine.

Enfin, l’accompagnement des patients et les programmes anglo-saxons de disease management, qui ont pour objectif de rendre le patient plus actif par rapport à sa santé et donc de mieux maîtriser les volumes de soins et développer la prévention, sont des éléments qui, à terme, sont susceptibles d’améliorer l’allocation des ressources.

Pour autant, d’autres actions doivent être menées. Ainsi, le débat en France reste trop concentré sur le reste à charge. Or, en matière de compétitivité, toutes les entreprises privées savent que la question du coût complet des soins est essentielle. En effet, sans maîtrise de ce coût, il n’y a aucune chance de maîtriser le reste à charge des ménages. Un effort devrait donc être accompli afin d’améliorer la transparence du coût complet des soins, qui évolue en fonction des offreurs de façon importante, et d’étudier dans quelle mesure il peut être amélioré. On le sait, trois leviers principaux existent : optimiser le parcours de soins – grâce à une meilleure allocation de la valeur ajoutée médicale en fonction des pathologies des patients ; améliorer l’usage des produits de santé – des recommandations seront sans doute faites, dans le cadre des réflexions actuellement menées sur les produits de santé, notamment par les parlementaires ; enfin, augmenter la productivité intrinsèque des offreurs de soins. C’est donc bien dans le temps que se joue l’effort de productivité.

Même si les efforts de réduction des dépenses de santé ont permis de réduire à environ 4 milliards d’euros en 2008 le déficit constaté, le niveau de ce dernier demeure élevé et représente l’équivalent de près de 1,2 point de contribution sociale généralisée pour la seule branche Maladie. Aussi sera-t-il difficile de réduire ce déficit par la seule action sur les dépenses, sauf à ce que la croissance du pays s’améliore substantiellement, ce qui semble une hypothèse résolument optimiste. Sachant que, du fait du vieillissement de la population, du progrès médical et de la concentration croissante des dépenses, nous devons économiser au moins 2,5 milliards d’euros chaque année pour pouvoir maintenir un objectif national des dépenses d’assurance maladie en progression de l’ordre de 3 %, la question de la résorption de ce déficit devra donc passer par une réflexion sur le financement de la protection sociale.

Sur ce point, nos voisins allemands ont décidé, en 2007, d’affecter une partie de l’augmentation du taux de taxe sur la valeur ajoutée, de trois points, à la réduction des déficits, et une autre à l’allègement, si possible, du coût du travail. C’est un axe que la France a d’ailleurs elle-même choisi depuis de nombreuses années en veillant – avec la réforme « Balladur » de 1993 de budgétisation d’une partie des cotisations d’allocations familiales sur les bas salaires, avec les réformes « Juppé » de 1996 et 1997 d’élargissement de l’assiette de la contribution sociale généralisée, avec les réflexions autour de la retraite et les allégements de charges – à ce qu’il n’y ait pas d’alourdissement inconsidéré sur le coût du travail de la partie des cotisations imputables aux entreprises.

La « TVA sociale » reste, à cet égard, un sujet d’autant plus complexe à aborder que les derniers relèvements effectués en la matière en 1997 ont rappelé que l’augmentation de tout impôt – taxe sur la valeur ajoutée, contribution sociale généralisée, contribution pour le remboursement de la dette sociale ou autre – constitue toujours un moment difficile pour nos concitoyens, la taxe sur la valeur ajoutée ayant par ailleurs la caractéristique d’être répartie sur de très nombreux acteurs. Cela étant, elle présente l’avantage, dès lors qu’il ne s’agit pas d’une cotisation, de taxer les produits importés. Mais sur le fond, quel que soit l’impôt qui devra être éventuellement relevé pour financer les déficits actuels, le gouvernement qui en prendra la responsabilité aura préalablement à justifier de l’efficience de la dépense devant nos concitoyens assurés sociaux.

M. Hervé Drouet, directeur général de la Caisse nationale des allocations familiales. Comme l’ont souligné mes deux prédécesseurs, c’est avant tout en termes de performance de la dépense sociale – en l’occurrence la contribution des dépenses de la branche Famille à la compétitivité de l’économie – que le gestionnaire des dépenses de sécurité sociale doit réfléchir.

Il convient, en préambule, de rappeler les grandes composantes des dépenses payées par les caisses d’allocations familiales, qui se sont élevées à près de 74 milliards d’euros en 2010, étant entendu qu’il convient d’isoler dans ce montant les prestations de lutte contre la précarité, la pauvreté ou le handicap versées pour le compte de tiers, c’est-à-dire pour le compte de l’État – allocation adulte handicapé et aides au logement en faveur des personnes sans enfants – ou des conseils généraux – le revenu de solidarité active, qui englobe l’allocation de parent isolé et qui est complété, pour ce qui est le « RSA activité », par un financement de l’État.

La contribution de ces dépenses à la performance de l’économie doit également s’analyser en termes de soutien au pouvoir d’achat, de préservation de la cohésion sociale et d’insertion de publics en difficulté. Des progrès importants ont été réalisés pour leur permettre de mieux contribuer à l’incitation à la reprise d’activité, sachant qu’elles ont par ailleurs un objectif de soutien au pouvoir d’achat. La résistance du pouvoir d’achat pendant la période de crise économique et sociale profonde que nous continuons de traverser montre que ces prestations jouent bien le rôle contracyclique d’amortisseur social qu’on leur assigne et que les caisses d’allocations familiales se situent à cet égard en première ligne.

Financées par l’impôt, les dépenses en compte propre de la branche Famille, que ce soit sur le budget général de l’État ou sur celui des conseils généraux, s’élèvent – une fois isolées les prestations pour le compte de tiers – à 54 milliards d’euros et se décomposent en quatre blocs :

– le bloc des prestations traditionnelles à savoir, d’une part, celles qui compensent les charges supportées par les familles pour l’entretien des enfants – allocations familiales universelles – et, d’autre part, le complément familial et l’allocation de rentrée scolaire – sous conditions de ressources –, qui représente un montant de 15 milliards d’euros environ ;

– le bloc des prestations liées à la petite enfance, destinées à accompagner les familles lors de l’arrivée d’un enfant et à les aider à concilier vie familiale et vie professionnelle s’agissant en particulier du mode de garde des jeunes enfants : la prestation d’accueil du jeune enfant, pour un montant de 12 milliards d’euros, et toutes les dépenses engagées par les caisses d’allocations familiales pour les établissements d’accueil collectif des jeunes enfants, pour un investissement de 2 milliards d’euros, soit un total de 14 milliards d’euros ;

– le bloc des allocations logement en faveur des familles qui comprend l’allocation de logement familiale et la participation de la Caisse nationale des allocations familiales aux aides au logement, en particulier l’aide personnalisée au logement, versées – sous conditions de ressources – à des personnes ayant des enfants, pour un montant de 8 milliards d’euros ;

– le bloc universel des droits familiaux pour la retraite, qui correspond au versement de l’assurance vieillesse des parents au foyer, soit 4,4 milliards d’euros, et au financement des majorations de pension pour enfant à charge, pour un montant de 2,8 milliards d’euros.

Pour ces quatre blocs, qui mêlent prestations universelles et prestations sous conditions de ressources, le financement de la branche est composé, pour deux tiers, de cotisations sociales assises sur les salaires – exclusivement sur la part patronale – de 5,4 points, soit un peu plus de 34 milliards d’euros et, pour un tiers, des impôts et taxes affectés – majoritairement de la fraction de contribution sociale généralisée affectée à la branche Famille, qui a été réduite récemment – ainsi que divers autres impôts, soit un peu plus de 16 milliards d’euros.

Au-delà du soutien aux revenus pour lutter contre la pauvreté des familles et des enfants et pour égaliser les niveaux de vie entre foyers avec enfants et foyers sans enfant, la contribution décisive des dépenses sociales au dynamisme de l’économie tient à l’investissement en faveur du renouvellement des générations et du dynamisme démographique. À cet égard, l’efficacité de la politique familiale française a encore été soulignée la semaine dernière dans un rapport de l’Organisation de coopération et de développement économiques sur les politiques familiales comparées des États membres, lequel précisait notamment qu’ « investir de façon précoce dans la politique familiale garantit une meilleure efficacité et permet d’économiser à long terme ». M. Frédéric Van Roekeghem soulignait que la compétitivité se joue dans le temps : c’est spécialement vrai pour les dépenses d’investissement de ce type, les évolutions en matière démographique ne pouvant être évaluées que sur le long terme.

Pour ne citer que quelques chiffres, ce même rapport précise que « La France occupe une position favorable sur plusieurs dimensions des vies familiale et professionnelle : la fécondité est très supérieure à la moyenne de l’OCDE » – comme d’ailleurs de l’Union européenne puisqu’elle est légèrement supérieure à deux enfants par femme contre une moyenne européenne de 1,5 – « et le taux d’emploi des femmes âgées de 25 à 54 ans est, à 76,6 %, lui aussi supérieur à la moyenne » tant de l’Organisation de coopération et de développement économiques que de l’Union européenne. Il en résulte que les perspectives d’évolution de la population active sont orientées en France plus favorablement que dans les autres pays de l’Union européenne, ce qui avait d’ailleurs conduit, en 2009, le comité de politique économique de l’Union européenne à estimer que l’augmentation des dépenses à destination des personnes âgées serait à l’horizon 2050 deux fois moindre en France qu’en Allemagne, soit 4 % de son produit intérieur brut, et l’institut de l’économie allemande de Cologne à considérer, en 2008, que l’économie française serait en 2035 la plus dynamique d’Europe compte tenu de son assise démographique.

Même si les experts peuvent débattre de la quantification exacte de la contribution des politiques familiales au taux de fécondité, il n’en reste pas moins que la performance relative de la France est significativement supérieure à celle de ses voisins. Le différentiel de 0,5 point entre notre taux de fécondité de 2 et celui de l’Union européenne, de 1,5 en moyenne, doit être mis en regard du nombre d’enfants désirés par femme, lequel est relativement homogène et stable au sein de l’Union européenne puisqu’il se situe depuis deux décennies, selon l’Eurobaromètre, entre 2 et 2,5. La France se distingue en réussissant à combler l’écart entre le nombre d’enfants désirés – entre 2 et 2,5 donc – et celui des enfants effectivement mis au monde – soit 2 contre 1,5 en moyenne dans l’Union européenne. Notre pays a réussi à combler son différentiel de 0,5 point environ parce qu’il a créé un environnement favorable aux familles et à l’accueil des enfants ainsi qu’à la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle. Offrir aux couples, et spécialement aux femmes, la possibilité – tout en respectant leur libre choix – de faire garder leurs enfants en bas âge, est en effet depuis les années 1970 un objectif structurant de notre politique familiale.

Tel est, me semble-t-il, l’aspect sur lequel se joue surtout la compétitivité de notre économie, et c’est d’ailleurs à quoi contribuent significativement les politiques familiales mises en œuvre par les caisses d’allocations familiales, politiques d’investissement qui nécessitent, de par leur caractère de long terme, la stabilité de l’environnement des dispositifs et, en termes de financement, la pérennité des recettes affectées.

M. Marc Laffineur. Si les Français sont persuadés de bénéficier d’une bonne protection sociale, cela n’empêche pas d’être le plus économe possible... Cela étant, la « TVA sociale » vous semble-t-elle plutôt une bonne réponse en permettant une meilleure compétitivité grâce à une diminution des charges sur les salaires ? Par ailleurs, les exonérations de charges ciblées sur les bas salaires ont-elles selon vous permis d’augmenter le nombre d’emplois ?

M. Pierre Méhaignerie, corapporteur. Concernant le court et le moyen terme que vous avez bien différencié du long terme dans vos interventions, le poids des dépenses sociales a progressé de 6,1 points de produit intérieur brut en France contre 2,4 en moyenne européenne et en Allemagne, et moins 0,6 en Suède, au point que ce poids peut asphyxier l’emploi et la compétitivité française. Pour préparer les esprits de nos compatriotes, une double pédagogie menée par vous et fondée, d’une part, sur des comparaisons européennes – doit-on par exemple continuer à rembourser les affections longue durée à 100 % eu égard à leur augmentation ? – et, d’autre part, sur une perception claire de la différence entre salaire direct – qui leur paraît faible – et salaire indirect, ne devrait-elle pas être envisagée ?

Par ailleurs, la recherche de la performance vous paraît-elle compatible avec nos systèmes centralisés ? À taux de personnes âgées identiques, ce sont en effet les régions qui ont les meilleures performances économiques et la meilleure cohésion sociale, qui ont les dépenses les plus faibles. C’est ainsi que le rapport en matière d’allocation adulte handicapé peut aller de 1 à 5 selon les départements. Nos systèmes très centralisés appellent-ils à l’esprit de responsabilité – vertu des grands peuples – ou ne devrait-on pas plutôt mettre en place par exemple des objectifs régionaux d’assurance maladie (ORDAM) ?

M. Albert Facon. Si pendant la crise la protection sociale a joué un rôle d’amortisseur social, faut-il pour autant parler aujourd’hui d’économies à réaliser ? À cet égard, je ne peux pas être choqué du différentiel de 1 à 5 selon les départements, souligné par notre corapporteur. Il est normal, malheureusement, que le bassin minier et très ouvrier du Nord de la France, dont je suis l’élu, compte plus de handicapés que l’Ille-et-Vilaine, sachant, en outre, que nombre de mes concitoyens ne vont plus chercher leurs médicaments car ils n’arrivent plus à les payer – quand on ne dispose que de 800 euros par mois pour vivre, la vie est dure.

Surtout, l’injustice gêne les Français. Car à côté de ces gens qui ne peuvent se faire soigner, on observe par exemple de nombreuses personnes, surtout des femmes d’ailleurs – du fait de la silicose, on dénombre un homme pour dix femmes dans les foyers dans ma région –, qui partent en groupe en cure. Et je ne parle pas des soins dentaires : dans une salle d’attente, n’est-il pas insupportable pour une famille qui doit tout compter car elle doit vivre avec 1 200 euros par mois, d’entendre des patients ne rien vouloir se refuser car profitant de la couverture maladie universelle ? Un tel décalage peut permettre de comprendre pourquoi certains choisissent des votes extrêmes – je suis bien placé pour le savoir car au sein de ma communauté d’agglomération se trouve la ville d’Hénin-Beaumont qui a élu une certaine Marine.

Ce que je demande, en tant qu’élu de terrain, c’est donc plus de justice. Certes, une plus grande fécondité permettra de régler bien des problèmes, mais dans vingt ans ! D’ici là, comment faire en sorte d’instaurer plus de justice ?

M. Christian Blanc. Notre protection sociale étant extrêmement performante, nous devrions, à vous entendre mettre en corrélation niveau de protection sociale et niveau économique, et donc avoir l’une des économies les plus prospères au monde !

J’aborderai pour ma part le problème de l’intégration car la protection sociale devrait en constituer un facteur important. Elle l’est peut-être, mais faute pour la représentation nationale de pouvoir faire une évaluation en la matière, pourriez-vous indiquer ce que représente, dans le coût de la protection sociale, la politique d’intégration ?

M. le président Bernard Accoyer. En dépit de la situation de certains de nos compatriotes, je relève que, globalement, le système de protection sociale français est reconnu comme très développé, même si notre taux de fécondité, pour lequel nous sommes enviés, ne dépend pas que des prestations familiales, mais est également le résultat de toutes les politiques conduites, à différents niveaux, par l’État, les collectivités territoriales et les caisses d’allocations familiales notamment en faveur de l’accueil des jeunes enfants.

Pour autant, si le directeur de la Caisse nationale des allocations familiales a pu souligner l’augmentation à venir du nombre des actifs, il sait mieux que quiconque que c’est surtout le nombre des inactifs qui augmentera dans les années qui viennent, et cela pour une période assez longue. Or, le directeur de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés sait quant à lui que le grand âge coûte très cher à l’assurance maladie, les pathologies qui accompagnent le vieillissement étant, d’une part, prises bien souvent en charge au titre des affections de longue durée et, d’autre part, parmi les plus onéreuses du fait de la cherté des technologies nouvelles ou des produits nouveaux – domaines où d’ailleurs la France prend parfois un peu de retard, mais c’est là un autre sujet.

Dans ces conditions, le coût de la protection sociale à laquelle nous sommes tous très attachés va croître de façon importante. Aussi, comment ne pas réfléchir davantage – tout le monde reconnaissant qu’il faut garder de la création de richesse en France et faire en sorte, par notre compétitivité, de mettre un frein et si possible un terme aux délocalisations de production – à la situation dans laquelle nous sommes depuis la création de la sécurité sociale il y a bientôt soixante-dix ans, qui fait reposer plus de 70 % de son financement sur l’appareil de production, le travail, alors que c’est précisément ce que nous voulons sauvegarder et que le nombre de ceux qui travaillent ne cesse de diminuer ?

J’ai compris à demi-mot que le directeur de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés avait une solution, mais que celle-ci était impossible à appliquer pour des raisons politiques. La difficulté tient, selon moi, au fait que certains la désignent avec un vocabulaire inadapté, voulant faire peur – et y parvenant. Or, avec l’emploi de l’expression « TVA sociale », on trompe nos concitoyens sur la nature de ce prélèvement nouveau. Il s’agirait en effet d’une contribution sociale – à laquelle d’ailleurs le directeur de la sécurité sociale devrait être attaché puisqu’il a participé à l’invention de la contribution sociale généralisée. La « contribution sociale sur la consommation » serait le pendant de la contribution sociale généralisée. Et, contrairement à ce qui est également avancé, elle ne conduirait pas obligatoirement à une diminution du pouvoir d’achat par une augmentation du coût de la vie. S’il y avait un glissement très progressif, point par point – un point représentant à peu près 10 milliards d’euros –, il pourrait très bien être imaginé que cette somme soit répartie de façon égale entre l’entreprise et le salarié, de telle façon que 5 milliards d’euros de plus soient distribués en salaire net. Tel est bien, en effet, le problème de la France qui voit son coût du travail augmenter alors que les salaires nets y restent inférieurs à d’autres pays.

En outre, puisque l’assiette de la contribution sociale sur la consommation recouvrirait les produits d’importation, son produit permettrait d’équilibrer le pouvoir d’achat. Cette ligne a d’ores et déjà été suivie par d’autres pays, sans qu’il y ait des conséquences significatives sur le pouvoir d’achat.

Paradoxalement, alors que tout le monde s’accorde à sauver la sécurité sociale, on s’interdit, par les mots que l’on emploie, à préparer les conditions politiques d’un glissement progressif, partiel, de l’assiette du financement de la protection sociale. Il y a là un véritable défi pour les politiques sur lequel je souhaiterais que vous vous exprimiez.

(M. Marc Laffineur, vice-président, remplace M. le président Bernard Accoyer.)

M. Hervé Novelli. Je reviendrai sur deux problématiques qui viennent d’être abordées séparément, alors qu’elles devraient selon moi être liées.

La première, soulignée avec raison par notre corapporteur, a trait au rythme soutenu de la progression des dépenses sociales, sachant notamment qu’entre les années 1980 et aujourd’hui, le poids de ces dépenses par rapport au produit intérieur brut est passé de 20 % à plus de 31 %. Un tel rythme ne s’observe pas dans d’autres pays qui ne négligent pas pour autant leur protection sociale. La situation est d’autant plus paradoxale qu’elle tient, parmi d’autres explications, au manque de régulation du système. Ainsi, un système apparemment suradministré serait sous-régulé. C’est un premier problème que l’on doit examiner, de même d’ailleurs que l’on doit s’interroger sur le rythme de création de nouvelles prestations dans la période.

La seconde problématique, soulevée par le président Bernard Accoyer et M. Marc Laffineur, concerne le transfert des charges. Il ne sert à rien de transférer une charge pesant sur le travail vers la consommation si dans le même temps des instruments de ralentissement du rythme de progression des dépenses sociales ne sont pas mis en place. Nous retrouverions sinon les mêmes défauts qu’aujourd’hui sauf que ce ne serait plus le coût du travail qui serait affecté, mais le prix des produits qui supporterait ce transfert, lequel ne serait pas maîtrisé lui non plus du fait du rythme des dépenses.

Il faut donc absolument lier les deux problématiques – rythme de progression des dépenses sociales et éventuel transfert – car, faute de les résoudre en même temps, nous ne ferions que transférer des charges sans aucune régulation. Si, pendant la crise, il était légitime que les dépenses sociales progressent, il devient illégitime que cette croissance perdure ensuite au même rythme.

M. Jean Grellier. Si je comprends qu’il faille sinon ralentir les dépenses sociales du moins les optimiser et les contrôler, quel que soit le niveau auquel elles sont versées, la question de leur financement semble conduire à un choix entre coût du travail et « TVA sociale ». Que penseriez-vous, pour le financement de la protection sociale, d’une péréquation concernant l’ensemble du système productif avec l’instauration, d’un côté, d’un plafond de charges pour les entreprises qui versent des charges sociales élevées et, d’un autre côté, d’un plancher de charges pour celles qui en versent peu ?

M. Dominique Libault. Je partage le sentiment selon lequel l’efficience de la dépense constitue l’enjeu des années à venir. Il n’existe pas en effet de financement miracle : quel que soit le mode retenu, on ne peut s’exonérer d’une meilleure efficience de la dépense. En revanche, je ne peux laisser s’instaurer l’idée que rien n’aurait été fait pour lutter contre l’augmentation des dépenses. Si M. Pierre Méhaignerie a raison concernant les vingt-cinq dernières années, une rupture est apparue depuis une dizaine d’années. Les chiffres d’Eurostat relatifs aux dépenses publiques de protection sociale en pourcentage du produit intérieur brut montrent sur la période, par rapport à la Suède, à l’Allemagne, à l’Italie, à l’Espagne et au Royaume-Uni, une maîtrise de notre pays. Sans revenir sur le taux de croissance de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie, passé de 7 à 3 %, les données de l’Organisation de coopération et de développement économiques concernant les dépenses publiques de santé par habitant sur la période 2005-2008 montrent également que la France les a mieux maîtrisées. Certes, nous partions de haut, et il faut l’assumer. Mais une vraie évolution est intervenue dans les récentes années.

On le constate au vu des statistiques, les efforts des Français, qui ont tendance à désespérer car ils ont l’impression que leurs efforts ne servent à rien, portent leurs fruits : tout ce que l’on a accompli est utile, et l’on assiste à une vraie décélération des dépenses. Encore faut-il que ce processus soit équitable. À cet égard, la question de l’efficience reste liée à celle de l’équité car, je le rappelle, il s’agit de droits objectifs. Les ordonnateurs des dépenses publiques, dans un système de sécurité sociale, sont nos concitoyens eux-mêmes par l’intermédiaire de consultations ou encore d’une demande de médicaments. Aussi faut-il les convaincre que la politique suivie est bien fondée et que les efforts sont équitablement répartis. Nous avons d’ailleurs déjà progressé sur ce plan, puisque nous avons pu convaincre les Français que, par exemple, le générique soignait aussi bien que le médicament princeps. Avec une politique d’adhésion de l’ensemble de nos concitoyens, car la sécurité sociale demeure l’affaire de tous, nous réussirons à maîtriser la dépense avec de l’efficience.

Ainsi que plusieurs d’entre vous l’ont souligné, il existe encore de nombreuses marges de progression, qu’il s’agisse de lutter contre les dépenses inutiles, les abus, la mauvaise organisation ou encore les coûts trop élevés. À la limite, tous ces champs d’intervention possibles me rendent optimistes : malgré le vieillissement de la population, nous pouvons tenir un objectif de progression mesurée de la dépense dans les années à venir grâce à la trajectoire que l’on a commencé à tracer. Tout n’est pas à inventer.

Je connais l’attachement de M. Pierre Méhaignerie à la responsabilisation et, dans cet esprit, à la régionalisation. Mais, au-delà d’une centralisation au niveau local, se trouve en jeu la responsabilité individuelle de chacun. Lorsque l’on travaille avec l’assurance maladie sur le contrat d’amélioration des performances individuelles des médecins, nous cherchons à responsabiliser les prescripteurs individuellement. De même, lorsque l’on travaille sur le parcours de soins ou sur la problématique activité/retraite, notre objectif est d’améliorer les comportements individuels. On peut toujours discuter du mode de pilotage, mais en tout état de cause, c’est bien au moyen d’une responsabilisation individuelle et non pas uniquement de normes que l’on y parviendra.

Concernant le coût du travail, il convient de souligner que, ces dernières années, les cotisations sociales à la charge des entreprises n’ont pas augmenté. Méfions-nous à cet égard des statistiques internationales qui ne reposent que sur les prélèvements obligatoires sans prendre en compte le coût caché de la protection sociale pour les entreprises : lorsque les prélèvements sociaux obligatoires sont faibles, c’est le coût des protections d’entreprise qui augmente et qui pèse alors sur les employeurs. Le travail que nous avons effectué avec la Cour des comptes a ainsi montré qu’une partie de notre différentiel avec l’Allemagne tient au caractère facultatif des systèmes de retraite complémentaire allemands qui, de ce fait, n’apparaissent pas dans les prélèvements obligatoires au niveau des comptes nationaux. Il faut prendre en compte l’ensemble des charges si l’on veut comparer les coûts entre les différents pays.

S’agissant de l’interrogation de M. Christian Blanc sur le coût de l’intégration, je n’ai pas d’éléments pour lui répondre précisément, mais ma conviction est que l’un des enjeux d’une politique de protection sociale est la cohésion sociale, sachant qu’assurer cette dernière constitue un facteur de compétitivité pour l’économie. Pour autant, nous sommes conscients du fait que disposer d’une assurance maladie permettant d’accueillir correctement sous condition de résidence régulière l’ensemble des résidents ne peut résoudre ni tous les problèmes d’intégration ni tous ceux de la compétitivité. Il ne faudrait pas en effet que la protection sociale soit comprise à travers nos propos comme le moyen de résoudre tous les problèmes de compétitivité Le forum de Davos, notamment, l’a montré : la question de l’innovation reste fondamentale dans ce domaine, au-delà du seul coût du travail, et l’on sait bien que la France souffre en la matière de faiblesses, en particulier par rapport à l’Allemagne.

Selon les politiques menées, la protection sociale peut s’avérer un atout plus ou moins fort pour la compétitivité de la France. Ne la voyons pas comme une charge, même si d’autres éléments permettront évidemment à notre pays de jouir d’une bonne compétitivité, car s’il faut maîtriser la dépense en matière de finances sociales, il faut aussi de la croissance. C’est là sans doute le principal aléa pour les finances publiques dans les années à venir

M. Frédéric Van Roekeghem. Les facteurs de compétitivité sont en effet multiples : à côté de l’innovation, la formation et la politique de l’offre sont des sujets majeurs. Si nous voulons résister à la concurrence de pays dont les salaires et la protection sociale sont bien moindres qu’en France, je ne crois donc pas que ce soit uniquement par la réduction de la protection sociale que nous y parviendrons. Comme l’a souligné M. Dominique Libault, une inflexion a eu lieu voilà cinq ou six ans et nous sommes maintenant sur le bon chemin – à l’instar des Allemands qui s’y sont pris un peu plus tôt que nous.

D’après les statistiques de l’Organisation de coopération et de développement économiques couvrant la période 1997-2007 – laquelle nous désavantage puisque notre effort a porté sur les années 2005-2010 –, le taux de croissance des dépenses de santé a été en termes réels de 4,1 % pour l’ensemble de l’Organisation de coopération et de développement économiques contre 3,7 % en Suède et 2,5 % chez nous. Sur dix ans, cette différence de 1,5 % de croissance de la dépense de santé entre la France et l’Organisation de coopération et de développement économiques équivaut à une trentaine de milliards d’euros. Dans ce contexte, une politique de maîtrise de la dépense sociale ou plutôt favorisant la dépense utile soulève effectivement la question de la régionalisation. À cet égard, les écarts énormes de consommation de soins dans le domaine de la santé entre les différentes régions ne s’expliquent pas totalement par les inégalités de santé – une étude que nous avons publiée sur ce sujet le montre. En tout cas, si la protection sociale ne peut être la solution à la compétitivité, elle peut sans nul doute y participer, le premier levier restant la bonne maîtrise de la dépense.

Notre système centralisé l’empêche-t-il ? Aux États-Unis, si les dépenses de santé correspondent à 18 % du produit intérieur brut, 47 millions de personnes n’étaient pas couvertes avant la réforme. Certes, ce nombre comprend des jeunes et des personnes très riches, mais surtout des personnes pauvres qui ne peuvent se soigner, ce qui a un coût pour la collectivité – payé parfois par les hôpitaux ou les établissements de santé américains au sens large. Au-delà de la croissance inflationniste, il suffit de lire ce qu’écrivent les grands cabinets de conseil internationaux sur la situation de la dépense américaine pour comprendre que la concurrence généralisée entre les offreurs et les assureurs qui caractérise ce marché s’exerce au détriment de la valeur ajoutée produite et du consommateur de soins.

Cela étant, si nous disposons d’avantages compétitifs, nous avons encore des gains de productivité importants à trouver. Dans le domaine du médicament, par exemple, une comparaison entre la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni que nous venons de publier montre, concernant deux classes thérapeutiques qui représentent à peu près 2 milliards d’euros de dépenses pour la sécurité sociale – les statines, médicaments contre le cholestérol, et les inhibiteurs de la pompe à protons, médicaments contre les ulcères qui restent très consommés dans notre pays –, un écart de 900 millions d’euros par rapport à nos deux voisins.

Nous ferons en juin ou juillet prochains des propositions à cet égard après avoir examiné notamment à quel prix exactement les médicaments sont vendus dans notre pays et chez nos voisins, pourquoi les médecins prescrivent tel ou tel médicament et pourquoi nous sommes par ailleurs plus ou moins consommateurs de tels médicaments. Des marges de manœuvre existent donc, même si elles ne sont pas infinies.

En matière d’équité, si la mise en place de la couverture maladie universelle complémentaire s’est traduite par une amélioration de la situation des personnes plus précaires, l’effet de seuil a conduit à ce que les personnes situées au-dessus de ce seuil, bien qu’ayant de très faibles ressources, n’accèdent pas au même niveau de protection sociale que les bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire. Nous avons tenté, par des politiques publiques, notamment les aides à la complémentaire santé, de résoudre une partie du problème, mais la situation reste insatisfaisante en dépit des efforts réitérés des différents gouvernements et des caisses d’allocations familiales et d’assurance maladie. Nos prochaines propositions porteront également sur ce problème, le bouclier sanitaire ne nous apparaissant pas répondre à l’ensemble des problèmes posés. Le conseil de la Caisse nationale de l’assurance maladie estime ainsi que c’est là une solution qui présente aussi certains inconvénients.

S’agissant du financement, la situation actuelle des déficits publics, tout particulièrement ceux de la protection sociale, nous conduira à aborder le problème de leur résorption. Pour ce qui est de la contribution sociale sur la consommation à propos de laquelle le Parlement s’interroge, je ne trouve pas illégitime à titre personnel que nous nous posions la question de la participation au coût de la protection sociale de la consommation sur les produits d’importation.

Quant à la responsabilité des régions, quel modèle évoquons-nous ? S’il s’agit de mettre en place un système d’objectif régional des dépenses d’assurance maladie sans que la région soit le financeur de la dépense, il n’y aura pas de responsabilité car cette dernière implique certes celle de la dépense, mais aussi la celle du financement et du solde. Je n’ai pas l’impression qu’à ce stade, les réflexions autour de la responsabilité de la région visaient ce modèle. Le système dont nous disposons, qui a ses inconvénients, conduit tout de même à ce que l’État, in fine, partage à un moment donné, par le biais du vote d’une loi de financement, l’ensemble de ses responsabilités en matière de dépenses, de ressources et de déficit. En ce qui me concerne, je ne serais en tout cas pas favorable à un système où les décisions en matière de dépenses seraient prises par les régions et où la responsabilité du financement incomberait à l’État.

M. Pierre Méhaignerie, corapporteur. Ce n’est pas non plus ce que je demande.

M. Hervé Drouet. Si les facteurs de compétitivité et de croissance sont multiples et débordent largement les seules questions de la performance de la dépense sociale et du modèle de protection sociale, je me bornerai, s’agissant des prestations en faveur des familles, à rappeler cette maxime célèbre de Jean Bodin au XVIe siècle : « Il n’est de richesse que d’hommes ». La croissance démographique constitue, en effet, le premier déterminant de la croissance d’un pays. Encore faut-il évidemment qu’il y ait des emplois qui permettent à la population en âge de travailler d’être active, mais c’est là la responsabilité des politiques en faveur de l’employabilité, du travail, des conditions de travail ou encore de l’innovation.

La problématique en matière de croissance des dépenses de prestations familiales est différente de celle des autres branches de la sécurité sociale, en particulier de celle de l’assurance maladie. Elles sont en effet majoritairement indexées sur l’inflation et croissent donc assez lentement, à législation constante, par rapport aux recettes qui, assises pour les deux tiers sur la masse salariale, évoluent en fonction de la richesse nationale, donc plus rapidement que les dépenses. De ce fait, la branche Famille est structurellement à l’équilibre et même excédentaire. La progression de ses dépenses sur la longue période est en effet due davantage à la création de prestations ou à la forte revalorisation de prestations existantes – ce qui dépend de décisions politiques – qu’à une dynamique propre de progression de la dépense.

Je vous invite d’ailleurs à prendre connaissance des projections financières qui ont été établies par le Haut conseil de la famille et qui font état, malgré la situation financière conjoncturellement dégradée de la branche – comme les autres branches de la sécurité sociale -, d’un retour spontané à l’équilibre, à législation constante, à horizon 2017-2018 pour le compte courant et aux alentours de l’année 2025 pour l’équilibre du bilan – horizon qui est plus ou moins rapproché selon les hypothèses de croissance.

Pour autant, si la branche est structurellement à l’équilibre, il faut bien sûr se poser la question de la maîtrise de ses dépenses et de leur efficience. À cet égard, deux axes nous concernent essentiellement : la lutte – comme pour les autres branches de la sécurité sociale – contre les fraudes et les abus, et l’accroissement de l’efficience de la dépense. Il s’agit, en particulier, d’optimiser le taux d’occupation des établissements d’accueil du jeune enfant que nous finançons. En moyenne – ce qui recouvre évidemment des situations très disparates – leur taux d’occupation financier, c’est-à-dire le rapport entre la capacité théorique d’heures que l’on peut facturer et celles effectivement facturées, est de 65 %, tandis que leur taux d’occupation physique, fondé sur la présence constatée des enfants, est de 55 %. Un tel résultat, pour des établissements coûteux financés sur fonds publics, reste insatisfaisant, ce qui explique que, par la contractualisation avec les partenaires et les collectivités territoriales qui les financent – généralement les municipalités –, nous ayons une action forte en matière d’accroissement de l’efficience de cette dépense.

Concernant la question posée par M. Christian Blanc sur la contribution de la sécurité sociale aux problématiques d’intégration, les prestations sous condition de ressources versées en compte propre par la branche Famille, ainsi que les aides à la lutte contre la précarité et la pauvreté et les aides au logement – aides versées par les caisses d’allocations familiales, mais financées soit par l’État soit par les conseils généraux s’agissant du revenu de solidarité active – concourent non pas à des politiques visant directement l’intégration proprement dite, laquelle fait l’objet d’autres politiques publiques avec des instruments dédiés, mais à l’objectif de préservation de la cohésion sociale par l’inclusion sociale.

Schématiquement, un peu plus de 60 % des dépenses versés par la branche Famille sont sous condition de ressources. Pour autant, laisser penser qu’elle contribue à hauteur de 60 % de ses dépenses à un objectif de politique inclusive serait présenter les choses un peu rapidement. Aussi, je vous invite à prendre connaissance des programmes de qualité et d’efficience qui sont joints en annexe à la loi de financement de la sécurité sociale. Le fascicule concernant la branche Famille présente des indicateurs que nous avons élaborés pour rendre compte de la réduction des écarts de niveau de vie entre familles selon leur configuration et les déciles de revenus. Il s’agit de mesurer avant toute redistribution – qu’elle provienne de la fiscalité par le biais du quotient familial ou des différentes aides fiscales, ou des prestations sociales familiales ou de lutte contre la pauvreté – la réduction des écarts entre familles selon leur niveau de revenu et selon leur configuration.

Des indicateurs de ce type ont également été repris dans le rapport de l’Organisation de coopération et de développement économiques sur les politiques familiales comparées des États membres auquel j’ai fait allusion, et quand on compare les performances de la France à celles des autres pays, il apparaît que le poids de ses dépenses de transfert a un effet levier assez fort sur la réduction des écarts de niveau de vie.

M. Pierre Méhaignerie, corapporteur. Que pensez-vous de l’impact des personnes étrangères sur les dépenses de santé ? Jusqu’où peut-on aller dans leur prise en charge ?

Qu’en est-il de ce commerçant nantais qui a eu de nombreux enfants de trois femmes différentes ? Quelles ont été les suites de cette affaire ?

Comment peut-on prendre en compte le phénomène de recomposition familiale, dans la mesure où il entraîne souvent la perte de l’aide personnalisée au logement ou de certaines prestations comme l’allocation de parent isolé lorsqu’elle existait encore ?

Enfin, existe-t-il un accord, au sein de la Caisse nationale des allocations familiales, sur la nécessité de regrouper les assistantes maternelles pour limiter le coût des crèches ? Certains conseils généraux sont-ils toujours sources de blocages dans ce domaine ?

M. Marc Laffineur, président. Vous avez évoqué un taux d’occupation financier des crèches de 65 %, et un taux d’occupation physique de 55 %. De tels résultats ne sont-ils pas extrêmement faibles, compte tenu du nombre de nos concitoyens qui se plaignent de ne pas trouver de place ?

M. Pierre Méhaignerie, corapporteur. La réponse se trouve dans la flexibilité des horaires des personnels, car le nombre d’enfants peut varier beaucoup d’un jour à l’autre.

M. Dominique Libault. En ce qui concerne les taux d’occupation, la question se pose aussi pour les établissements hospitaliers : on a tendance à mettre en avant les situations dans lesquelles l’offre paraît insuffisante par rapport à la demande, mais à y regarder de plus près, de nombreuses structures connaissent plutôt une sous-occupation. Il importe de comprendre pourquoi et de rechercher les moyens d’y remédier. Cela peut venir d’un positionnement géographique inadéquat, ou d’une offre ne correspondant pas à la demande, notamment en ce qui concerne certaines spécialités médicales.

On trouve des assistants maternels au chômage : il ne faut donc pas croire que l’insuffisance de l’offre de garde par rapport à la demande est une réalité en tout point du territoire. Il existe certes des points de tension, mais pas partout.

Par ailleurs, il est exact que pour la collectivité, le coût des assistants maternels est moins élevé que celui des crèches. Nous cherchons donc à développer ce mode de garde, y compris grâce au regroupement mais les politiques d’agrément des assistants maternels demeurent différentes d’un département à l’autre. Ainsi, alors que le Gouvernement a souhaité que l’agrément puisse être donné pour l’accueil de quatre enfants et non de trois, cela reste compliqué dans certains cas. Nous allons travailler avec l’Association des départements de France afin d’harmoniser les pratiques en ce domaine et d’accroître l’offre de garde lorsque les crèches ne permettent pas de répondre aux besoins. Quoi qu’il en soit, cet exemple montre une fois de plus qu’il existe encore des possibilités d’optimiser la dépense sociale.

S’agissant de la protection sociale des étrangers, je rappelle qu’il est nécessaire de se trouver en situation régulière pour pouvoir en bénéficier en France. Par ailleurs, nous sommes attentifs – et cela nous a valu quelques échanges avec la Commission européenne – à ce que la liberté de circulation au sein de l’Union européenne ne s’applique, s’agissant des inactifs, qu’à la condition de disposer au préalable de revenus et d’une protection maladie, afin qu’il soit impossible de s’installer en France au seul motif de vouloir bénéficier de son généreux dispositif de protection sociale.

M. Hervé Drouet. Je communiquerai ultérieurement à M. Pierre Méhaignerie des éléments de précisions sur les maisons d’assistantes maternelles.

Les taux d’occupation représentent une moyenne, et recouvrent des situations très différentes. Lorsqu’un établissement est ouvert sans interruption de huit heures à dix-neuf heures, la journée compte des heures creuses qui font mécaniquement baisser la moyenne. Un taux de 65 % est donc faible, mais pas aberrant.

S’agissant de l’affaire de Nantes, une procédure judiciaire est en cours, dans lequel la Caisse d’allocation familiale s’est portée partie civile. Si la fraude aux aides sociales est avérée, en particulier sur le critère d’isolement, nous demanderons le remboursement des sommes indûment versées.

M. Marc Laffineur, président. Messieurs, je vous remercie.

La Mission d’information sur la compétitivité de l’économie française et le financement de la protection sociale entend ensuite, en audition ouverte à la presse, M. David Appia, président de l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII).

M. David Appia, président de l’Agence française pour les investissements internationaux. Les deux notions de compétitivité et d’attractivité sont étroitement liées. Pour les dirigeants de sociétés étrangères que nous rencontrons, tout ce qui renforce l’une a également un effet positif sur l’autre.

La France est depuis longtemps ouverte à l’investissement étranger, si bien que la présence sur son sol d’entreprises issues d’autres pays est significative. L’investissement étranger concerne plus de 20 000 entreprises, réparties sur tout le territoire – même si elles se concentrent surtout dans les grandes villes. Leurs pays d’origine sont essentiellement les États-Unis, l’Allemagne, le Royaume-Uni, la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas. Ces entreprises apportent une contribution très importante à notre économie, puisqu’elles représentent plus de 2 millions d’emplois, 22 % de la recherche-développement et environ un tiers des exportations françaises – dans le secteur manufacturier, ce chiffre atteint même 40 %.

Entre pays européens, la concurrence est forte pour attirer ces entreprises étrangères. C’est pourquoi la France, comme la plupart de ses voisins, développe depuis quelques années des politiques d’attractivité qui reposent sur quatre piliers.

Le premier est structurel : il concerne toutes les mesures ayant pour effet de renforcer la compétitivité de l’économie et des entreprises françaises. On peut citer les dispositions visant à introduire plus de flexibilité sur le marché du travail, la politique de soutien à l’innovation – crédit d’impôt recherche, pôles de compétitivité, réforme des universités – ou la suppression de la taxe professionnelle. Toutes ces mesures servent l’image, et donc l’attractivité de notre pays aux yeux des investisseurs étrangers.

Par ailleurs, il faut rester à l’écoute des entreprises étrangères et améliorer sans cesse l’environnement dans lequel elles évoluent, au moment de leur accueil sur notre territoire comme au stade de leur développement. En effet, il ne suffit pas de les convaincre de s’installer en France, encore faut-il qu’elles y restent. À cet égard, depuis la création de l’Agence française pour les investissements internationaux en 2001 – et singulièrement depuis 2003 –, plus de 130 mesures dites « d’attractivité » ont été étudiées et mises en œuvre pour répondre à un besoin, une attente particulière des investisseurs internationaux. Les dernières mesures de cette nature ont été annoncées le 28 mars 2011, lors de la réunion du Conseil stratégique de l’attractivité. Toutes vont dans le sens d’une simplification des procédures.

Ensuite, il faut faire savoir à l’étranger ce qui se passe en France, faire connaître les atouts français, valoriser les éléments de différenciation. Dans un environnement ouvert et concurrentiel, il importe d’identifier les points sur lesquels le site France se distingue des sites concurrents, en particulier européens.

Enfin, pour assurer le maintien et le développement des entreprises étrangères sur notre territoire et l’apport de nouveaux investisseurs étrangers, il est nécessaire de développer une politique très active de prospection et d’accompagnement. L’Agence française des investissements internationaux remplit cette mission avec l’aide de ses partenaires, notamment les agences régionales de développement économique – qui sont elles-mêmes en relation avec l’ensemble des acteurs territoriaux.

Cette activité de prospection nous conduit à nouer des contacts avec des entreprises étrangères et à écouter ce que leurs dirigeants disent de la France. Selon la façon dont ils jugent la compétitivité de l’économie française, nous pouvons ainsi identifier les points forts et les points faibles de notre pays et proposer des mesures d’amélioration.

Auprès des investisseurs étrangers, la France présente notamment deux points faibles, et même si nous nous employons à les corriger depuis quelques années, ces perceptions – voire ces clichés – perdurent. Le premier concerne le marché du travail : la perception demeure d’un manque de flexibilité et de difficultés trop importante à ajuster les effectifs en période de crise économique. Le deuxième est la perception d’une fiscalité non pas trop pesante, mais trop complexe et parfois instable.

J’en viens aux points forts. La France dispose, en matière d’attractivité, d’atouts de nature structurelle, liés au marché, à sa dynamique, à sa profondeur et à sa connexion au marché européen. Sa démographie – élément important d’appréciation du marché dans une perspective de moyen et long terme – est également favorable. De même, là où elles s’implantent, les entreprises peuvent avoir recours à une main-d’œuvre dont la qualification et la productivité sont reconnues hors de nos frontières. Enfin, le pays dispose d’infrastructures de qualité.

Mais notre pays présente également des atouts de nature plus conjoncturelle. Ainsi, dans une période agitée comme celle que nous avons connue depuis le déclenchement de la crise financière, la façon dont les pays réagissent renforce ou affaiblit l’attractivité. En l’occurrence, la France a tiré son épingle du jeu, puisque nous avons observé en 2009 – c’est-à-dire à un moment où l’investissement international était en décroissance – un pallier dans l’apport de nouveaux investissements étrangers dans le pays. En 2010, alors que l’investissement international dans la zone européenne connaissait une baisse de 10 %, le nombre de projets d’investissement créateurs d’emplois en France et provenant de l’étranger a augmenté de 22 %.

En 2010 s’est également confirmée une tendance importante : l’Allemagne, traditionnellement deuxième pays d’origine de l’investissement créateur d’emplois en provenance de l’étranger, est passée à la première place, devant les États-Unis – les deux pays étant toutefois très proches l’un de l’autre. L’Allemagne et l’Amérique du Nord assuraient cette année-là 87 % de l’ensemble des projets d’investissement créateurs d’emplois. Cela montre à quel point la compétitivité française est reconnue à l’étranger, puisqu’en s’installant en France, les États-Unis et le Canada, pays lointains, visent à prendre pied sur le marché européen. Quant à l’intérêt soutenu des entreprises allemandes en faveur d’une implantation ou d’une extension de leurs capacités en France, il traduit également la perception favorable que ce pays a de la compétitivité de l’économie française. C’est en tout cas la lecture que nous en faisons.

Bien entendu, nous nous intéressons de plus en plus aux pays émergents, compte tenu de leurs capacités croissantes d’émission d’investissements vers l’Europe. Mais ils ne représentaient encore que 6 % des nouveaux projets en 2010, soit en tout 47 projets – dont 35 en provenance de Chine.

Je terminerai en rappelant que la mesure de la compétitivité et de l’attractivité est à la fois simple et complexe. Elle est simple si l’on s’intéresse au nombre de nouveaux investissements décidés par des entreprises étrangères en France – 782 décisions nouvelles en 2010, portant création ou maintien de 32 000 emplois. Mais on peut aussi la mesurer au travers de comparaisons internationales et de rapports publiés par des organismes tels que la Banque mondiale – comme la publication annuelle Doing business, qui classe les pays du monde en fonction des facilités d’implantation –, des observatoires tels que l’international institute for management development (IMD) de Lausanne ou le World economic forum, ou des sociétés de consultants comme Ernst & Young. Depuis plusieurs années, la France a gagné quelques places dans la plupart de ces classements. Sa position est même parfois bien meilleure que ce que l’on pourrait imaginer, en particulier en comparaison avec son grand voisin allemand.

M. Marc Laffineur, président. C’est précisément la question que je souhaitais vous poser : en matière d’investissements étrangers, quelle est la position de la France par rapport aux autres pays européens et à ceux de l’Organisation de coopération et de développement économiques ? Avez-vous le sentiment que notre pays a amélioré sa compétitivité depuis dix ans ? Quel est le rôle joué par le crédit d’impôt recherche en la matière ?

M. Pierre Méhaignerie, corapporteur. Le président d’American Express juge qu’en France, tout est trop compliqué. Celui de Nestlé affirme quant à lui qu’il met tellement de temps pour fermer une usine en France qui ne correspond plus aux besoins du consommateur qu’il n’en a plus pour ouvrir de nouvelles unités. Enfin, le directeur de l’usine Sanden de Tinténiac m’a confié que malgré la baisse de 30 % du chiffre d’affaires, il avait eu de grandes difficultés à adapter les effectifs.

L’adaptation doit-elle peser sur les seules entreprises, ou passe-t-elle par une sécurisation des parcours professionnels ? Ne peut-on faire preuve de pédagogie et faire comprendre à l’opinion publique que les plans de sauvegarde de l’emploi nuisent à notre image et sont une entrave à notre attractivité ?

Par ailleurs, il est très facile d’acheter des petites et moyennes entreprises en France – grâce à la technique du leverage buy-out, par exemple –, d’autant que l’existence d’un impôt sur la fortune favorise la vente d’entreprises. Vous recensez les projets d’investissement créateurs d’emploi, mais est-ce que vous observez ce que deviennent les entreprises cinq ou dix ans après leur création ? Dans certains cas, on constate un transfert du siège social, des services administratifs ou de ceux de recherche. Ne faudrait-il pas tenter de savoir combien d’entreprises relocalisent une partie de leurs salariés ?

Enfin, la multiplicité des agences – départementales, régionales, nationales et internationales – constitue-t-elle un avantage ou un inconvénient ? Donne-t-elle de notre pays une image de sérieux ?

M. Jean Grellier. Êtes-vous en mesure de faire la différence entre les entreprises étrangères qui investissent en France et les investisseurs étrangers qui prennent des participations dans les entreprises françaises ? Quel est le rapport entre ces deux formes d’investissement ?

À l’instar de M. Pierre Méhaignerie, je m’interroge sur la multiplication des acteurs en matière d’investissement étranger. J’ai été en charge de l’économie et de l’emploi dans la région Poitou-Charentes, et les six premiers mois, j’ai éprouvé des difficultés à m’y retrouver. Ne faudrait-il pas, dans ce domaine, tendre vers une certaine harmonisation ?

M. David Appia. Si l’on observe l’ensemble des flux d’investissements directs étrangers, tels que recensés par les balances des paiements et rassemblés une fois par an par la la Conférence des nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED), la France est le troisième pays d’accueil derrière les États-Unis et la Chine – incluant Hong-Kong. Cela étant, des rapports récents – notamment un rapport du Conseil d’analyse économique piloté par Lionel Fontagné – montrent qu’une grande partie des flux entrant en France est interne aux groupes et répondent à des logiques d’optimisation fiscale ou financière. Ils ne sont donc pas nécessairement le reflet de l’attractivité des territoires.

C’est pourquoi nous nous sommes concentrés sur les investissements étrangers créateurs d’emplois, dont nous assurons le suivi au quotidien en accueillant chaque année environ 500 entreprises étrangères venues explorer les possibilités d’implantation. Sur ce critère, et d’après l’étude annuelle réalisée par Ernst &Young, la France est le deuxième pays d’accueil en Europe, derrière le Royaume-Uni, mais devant l’Allemagne. Notre pays est donc bien positionné depuis plusieurs années.

Je le répète : notre pays a bien résisté depuis le début de la crise. Non seulement le nombre de nouveaux projets étrangers créateurs d’emplois a été supérieur à 620 entre 2007 et 2009, mais nous avons même observé un rebond en 2010, avec 782 projets. Cela reflète à la fois la reprise de l’activité et de la confiance des investisseurs et le bon positionnement de la France sur ce terrain.

Le crédit d’impôt recherche est clairement, en Europe, un élément fort de différenciation pour le site France. C’est un élément d’attractivité d’autant plus important qu’il concerne l’innovation. En effet, l’investissement international est le fait d’entreprises à la recherche de nouveaux marchés, mais aussi, et de plus en plus, de sociétés attentives à la qualification de la main-d’œuvre et à un environnement favorable en matière de recherche-développement et d’innovation. De ce point de vue, le crédit d’impôt recherche est très largement considéré à l’étranger comme un atout maître dans la main française.

De nombreux témoignages vont dans ce sens. Je pense par exemple à une entreprise américaine dont les dirigeants étaient divisés au moment du choix de la localisation en Europe. Certains, pointant les rigidités sur le marché du travail et la difficulté d’ajuster les effectifs en cas de nécessité, plaidaient pour une implantation dans un autre pays que la France. D’autres, qui l’ont finalement emporté, faisaient valoir l’avantage constitué par le crédit d’impôt recherche. Le maintien de cette politique est donc un élément fondamental de notre attractivité.

Elle produit, en effet, des résultats remarquables : alors qu’en 2008, nous avions enregistré 21 nouveaux projets d’investissement dans le domaine de la recherche-développement, ce nombre est passé à 42 en 2009 et à 51 en 2010. Une telle progression a certainement un lien direct avec le maintien du crédit d’impôt recherche et avec la plus grande connaissance que les entreprises étrangères ont du dispositif, d’autant que nous en assurons la promotion aussi largement que possible.

En 2010, nous avons demandé à plusieurs dirigeants d’entreprises étrangères, en particulier dans les pays émergents – Chine, Inde, Brésil –, de participer dans leur pays de résidence à une campagne de communication sur la France. Alors qu’ils avaient carte blanche pour identifier le thème de leur intervention, huit sur dix ont choisi l’innovation et la recherche-développement.

Il est cependant vrai que la difficulté à ajuster les effectifs reste perçue comme un point faible de notre pays. Tous les acteurs au contact des investisseurs étrangers s’emploient donc à faire preuve de pédagogie. Nous nous efforçons par exemple de valoriser les dispositions prises depuis quelques années, comme la rupture conventionnelle du contrat de travail – une option qui a connu un certain succès – ou la défiscalisation des heures supplémentaires. Nous expliquons par ailleurs à nos interlocuteurs que la France accueille 20 000 entreprises étrangères dont plus de 4 000 américaines et plus de 3 000 allemandes. Par ailleurs, chaque année, 30 % des nouveaux projets d’investissements portent sur des extensions de capacités, ce qui traduit la satisfaction des entreprises concernées. Nous avons ainsi identifié une dizaine d’entreprises ayant investi sans discontinuer en France depuis cinq ans.

Il est sans doute facile, en effet, d’acheter des petites et moyennes entreprises en France. Ce que nous observons, c’est que 6 % à 7 % du total des investissements étrangers créateurs d’emplois ou permettant de sauvegarder des emplois correspondent à des rachats d’entreprises en difficulté. Cela représente une cinquantaine de cas chaque année. Depuis dix ans, 422 entreprises en cessation de paiement ou en liquidation judiciaire ont ainsi été rachetées. Nous devons en faire une lecture positive, puisque 61 000 emplois ont de cette façon été préservés.

Vous vous demandez ce qu’il advient de l’entreprise ainsi rachetée, mais la question peut se poser pour l’ensemble des investissements étrangers : quand une entreprise annonce son intention de s’implanter en France et de créer des emplois, il est utile d’observer la situation cinq ans plus tard. Nous avons effectué ce travail d’analyse rétrospective au milieu des années 2000 : au bout de cinq ans, le nombre de projets effectivement réalisés était certes légèrement inférieur à celui des projets annoncés, mais le bilan en termes d’emplois était sensiblement le même, certains projets annoncés ayant connu un développement plus rapide que prévu. Nous effectuons aujourd’hui le même travail pour ce qui concerne les années récentes.

Il est par ailleurs légitime de se demander si des déplacements ou des fermetures d’entreprises ont eu lieu. Mais il faut aussi avoir conscience que dans les années récentes, un certain nombre de sociétés étrangères installées en France ont pris des décisions favorables au territoire français, notamment en y rapatriant des activités qui avaient été sous-traitées ou délocalisées à l’étranger. Je pense notamment à une société japonaise du secteur de l’automobile qui a décidé de localiser en France une activité jusqu’alors sous-traitée en Turquie et en République tchèque. Les mouvements se produisent donc dans les deux sens.

Je pense que nous devons nous féliciter de la multiplicité des agences et des acteurs en matière d’investissement international. L’Agence française pour les investissements internationaux (AFII) dispose d’une petite équipe de direction et d’analyse à Paris, comprenant soixante personnes, et de quatre-vingt-dix agents à l’étranger, implantés dans 22 bureaux placés au sein de nos ambassades. Leur travail quotidien consiste à rencontrer les investisseurs potentiels et à les convaincre de venir en France. En revanche, nous n’avons pas de réseau en France et nous devons nous appuyer sur les acteurs territoriaux. Les correspondants de premier rang sont les agences régionales de développement économique, mais à travers elles, nous travaillons avec les agences départementales ou de métropole. Le risque de dispersion de l’effort français à l’étranger peut certes exister, mais nous y avons répondu en proposant aux agences territoriales d’utiliser le réseau de l’agence à l’étranger. Nous accueillons ainsi dans nos bureaux les représentants des territoires désireux de se projeter à l’international, de façon à faciliter leurs contacts avec les investisseurs étrangers. Lorsque nous avons lancé ces partenariats, les missions conjointes s’effectuaient à un rythme d’une quinzaine par an. En 2009, nous avons modifié nos procédures, et cette année, nous avons décidé de conduire une soixantaine de missions avec les différentes collectivités territoriales françaises. Nous sommes donc capables de coopérer, y compris pour nouer des contacts avec les entreprises étrangères.

M. Marc Goua. Vous dites que les étrangers sont friands de recherche-développement et d’innovation. Je partage le même sentiment qu’à la suite de leur rachat, un certain nombre de petites et moyennes entreprises françaises ont vu leurs technologies être diffusées au-delà de nos frontières. D’une certaine manière, les investisseurs font leur marché et récupèrent ce qui leur paraît le plus intéressant – et cela peut d’ailleurs se comprendre. Le problème est que les Français sont souvent de bons innovateurs, mais qu’ils ont parfois des difficultés à passer à la production de masse.

Par ailleurs, vous avez rappelé que la productivité était considérée comme excellente dans notre pays. Je constate avec satisfaction que l’on ne brandit plus l’épouvantail des 35 heures.

M. Pierre Méhaignerie, corapporteur. Vous n’avez pas évoqué le cas des entreprises qui font l’objet d’une succession. À cause de l’impôt de solidarité sur la fortune, la tentation de vendre n’est-elle pas plus forte que la volonté de transmettre ?

M. David Appia. Un de nos atouts, qui est fortement valorisé à l’étranger, est la productivité horaire de la main-d’œuvre française, la troisième au monde selon le Bureau international du travail, derrière les États-Unis et la Norvège. C’est un élément important, sachant que la main-d’œuvre française est de surcroît considérée comme très bien formée. Un jour, le représentant d’une grande entreprise américaine du secteur de l’informatique m’a confié qu’il ne fallait pas sous-estimer l’atout que représentait pour l’attractivité de notre pays l’excellence de notre école de mathématique et d’informatique. C’est certainement vrai dans de nombreux autres domaines, puisque nos ingénieurs sont très prisés à l’étranger.

Quant à la transmission d’entreprises, il s’agit d’un vrai sujet. Lorsque nous comptabilisons les investissements étrangers créateurs d’emploi en France, nous nous appuyons largement sur les agences régionales, afin d’approcher la réalité au plus près. Mais il est des domaines dans lesquels ce travail se heurte à des difficultés méthodologiques. Ainsi, nous ne sommes pas en mesure de recenser les prises de participation au capital d’entreprises françaises par des investisseurs étrangers. Nous sommes contraints d’avoir recours aux sources d’information spécialisées. De la même manière, nous ne sommes pas outillés pour dénombrer les rachats d’entreprises françaises bien portantes, quelle que soit la situation – problème au moment de la transmission, volonté des actionnaires de vendre.

Ce que nous comptabilisons en revanche, ce sont les rachats d’entreprises françaises en difficulté. Dans la plupart des cas, en effet, nous sommes alertés soit par l’entreprise elle-même, soit par les pouvoirs publics. Quand une entreprise se trouve en difficulté, et que le rachat par une entreprise française n’est pas envisageable, ces derniers se tournent souvent vers l’Agence française pour les investissements internationaux pour lui demander de rechercher un repreneur à l’étranger. Nous instruisons en permanence une quarantaine de dossiers de cette nature. Environ 15 nouveaux cas sont enregistrés chaque année, mais depuis le début de la crise, ce chiffre est en augmentation.

Il est assez difficile de convaincre un investisseur étranger de racheter une entreprise en dépôt de bilan, mais nous avons toutefois connu des succès. Le dernier est celui de l’entreprise McCormick située à Saint-Dizier et spécialisée dans les transmissions pour tracteurs. Le groupe italien dont elle était une filiale voulait s’en défaire, et ses emplois étaient menacés. Deux sociétés chinoises se sont déclarées intéressées, et le tribunal de commerce a finalement désigné l’entreprise chinoise Yto, qui va investir dans l’usine.

Il est vrai que les entreprises étrangères acquièrent en même temps les brevets, la matière grise, le capital et les outils en matière d’innovation. Mais nous ne devons pas oublier que 30 000 entreprises françaises se sont implantées à l’étranger, soit directement, soit en rachetant des entreprises sur place. En général, elles acquièrent des actifs qui en valent la peine, et parfois même des pépites technologiques. – ce dont elles ne se cachent pas, bien au contraire. C’est pourquoi il ne faut pas s’émouvoir du fait que certaines entreprises étrangères en font autant sur notre territoire.

Le plus important est qu’elles restent, c’est-à-dire que la valeur ajoutée se développe et qu’elles continuent d’investir et de faire travailler la main-d’œuvre française – sans que cela exclue des stratégies d’internationalisation. De nombreuses entreprises étrangères installées en France sont fortement contributrices en matière d’exportations, ce qui se comprend bien : souvent, elles localisent une de leurs bases de production et de commercialisation en France pour gagner d’autres marchés européens.

Depuis deux ans et demi que j’exerce mes fonctions à l’agence, je n’ai pas observé de cas d’entreprise étrangère ayant racheté une entreprise française avant de transférer l’appareil industriel vers son pays d’origine, même si, dans plusieurs cas, le dirigeant de l’entreprise concernée m’a dit avoir songé à le faire. S’ils y ont finalement renoncé, c’est parce qu’ils ont vite constaté que, si les machines ou les brevets faisaient partie des actifs de l’entreprise, le savoir-faire, la qualité des ingénieurs, la connaissance de l’outil de production comptaient également beaucoup. Dans ces conditions, un transfert aurait représenté une perte. Ce témoignage ne signifie pas que des situations moins favorables ne puissent être observées, mais d’une manière générale, je n’ai pas le sentiment que le premier objectif de l’investissement étranger en France soit ce que certains appellent le pillage technologique, ni même le transfert ou la délocalisation d’actifs.

M. Marc Laffineur, président. Je vous remercie pour ces informations très intéressantes.

La séance est levée à dix-huit heures vingt.

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Présences en réunion

Réunion du mercredi 4 mai 2011 à 16 heures

Présents. – M. Bernard Accoyer, M. Christian Blanc, M. Albert Facon, M. Marc Goua, M. Jean Grellier, M. Marc Laffineur, M. Pierre Méhaignerie, M. Hervé Novelli

Excusés. – M. Jérôme Cahuzac, M. Paul Giacobbi, M. Jean-Marie Sermier