Accueil > Contrôle, évaluation, information > Les comptes rendus de la mission d'information sur la compétitivité de l'économie française et le financement de la protection sociale

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit

Mission d’information sur la compétitivité de l’économie française et le financement de la protection sociale

Mercredi 8 juin 2011

Séance de 16 heures

Compte rendu n° 16

Présidence de M. Christian Blanc, vice-président, puis de M. Bernard Accoyer, président, puis de M. Christian Blanc, vice-président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Jean-François Dehecq, vice-président de la Conférence nationale de l’industrie, M. Yvon Jacob, ambassadeur de l’industrie auprès de l’Union européenne, et M. Jean-Claude Volot, médiateur des relations interentreprises industrielles et de la sous-traitance

– Audition, ouverte à la presse, de M. Pierre Gattaz, président du directoire de Radiall, président du Groupe des fédérations industrielles (GFI), président de la Fédération des industries électroniques, électriques et de communication (FIEEC)

– Présences en réunion

MISSION D’INFORMATION SUR LA COMPÉTITIVITÉ DE L’ÉCONOMIE FRANÇAISE ET LE FINANCEMENT DE LA PROTECTION SOCIALE

Mercredi 8 juin 2011

La séance est ouverte à seize heures dix.

(Présidence de M. Christian Blanc, vice-président de la Mission d’information,
puis de M. Bernard Accoyer, président, puis de M. Christian Blanc, vice-président)

La Mission d’information sur la compétitivité de l’économie française et le financement de la protection sociale entend, en audition ouverte à la presse, M. Jean-François Dehecq, vice-président de la Conférence nationale de l’industrie, M. Yvon Jacob, ambassadeur de l’industrie auprès de l’Union européenne, et M. Jean-Claude Volot, médiateur des relations interentreprises industrielles et de la sous-traitance.

M. Jean-François Dehecq, vice-président de la Conférence nationale de l’industrie. Les États généraux de l’industrie procédaient d’une volonté conjointe des pouvoirs publics et des partenaires sociaux, ce qui a été déterminant pour la manière dont ils se sont déroulés et dont fonctionne la Conférence nationale de l’industrie (CNI). Celle-ci rendra au début de 2012 son premier rapport, conformément au décret du Premier ministre cosigné par neuf ministres – nombre de signatures qui montre que ce qui touche à l’industrie n’est pas toujours simple.

La conférence met à parité de droit de dialogue les pouvoirs publics – avec neuf ministres représentés en séance plénière –, les salariés – avec un collège composé de dix syndicalistes représentant les cinq syndicats représentatifs – et les employeurs – avec un collège réunissant quinze dirigeants, représentant les syndicats professionnels de différents secteurs d’activité, auxquels s’ajoutent cinq ou six personnalités qualifiées, ainsi qu’un député, un sénateur et un membre du Parlement européen. Cette enceinte permet aux participants, issus de différents horizons, de se rencontrer et d’échanger dans un cadre qui n’est pas celui d’un face-à-face conflictuel. Comme les États généraux, en effet, la conférence est destinée à formuler des propositions et en aucun cas à mener des négociations – ce que les partenaires sociaux n’auraient jamais accepté.

Les États généraux, qui ont mobilisé  cinq mille personnes à travers la France, ont été un grand succès. Ils ont commencé avec des groupes de travail de trente à quarante personnes examinant à Paris une dizaine de sujets. Très vite la démarche s’est étendue aux régions, d’abord avec l’idée de conférences régionales organisées sous l’égide des préfets ; et finalement toutes les régions se sont autosaisies de la question et 183 groupes de travail se sont constitués, produisant en trois mois 7 000 pages de recommandations, lesquelles ont été synthétisées en un document d’une cinquantaine de pages, puis en un résumé de sept pages.

Je ne m’attarderai pas sur les grandes constatations. Le recul de l’emploi industriel et celui de la position de l’industrie française sont des évidences. Nous devons cependant éviter de nous comparer sans cesse aux Allemands, dont la progression a été liée à des raisons très particulières. Il est au moins aussi important de constater que l’emploi industriel et la position de l’industrie ont décru deux fois moins vite en Italie qu’en France, ainsi quand notre pays perdait 10 points, l’Italie n’en perdait que 4 ou 5.

Autre constat : la faiblesse de la dynamique d’investissement. L’industrie a peu investi au cours des dernières années. Quant à la recherche, elle est concentrée dans quelques secteurs ; beaucoup d’autres n’en font guère, ce qui empêche l’innovation, donc la création de marchés.

Nous avons également souligné la difficulté des petites et moyennes entreprises à devenir des entreprises de taille intermédiaire ; du fait des dispositions législatives applicables aux successions, la situation est bien différente de celle de l’Allemagne.

On note également des éléments favorables, comme le rayonnement mondial des grandes entreprises françaises. Cependant ces entreprises créent de l’emploi à l’étranger, vendent à l’étranger et, au titre du bénéfice mondial consolidé, paient des impôts à l’étranger plutôt qu’en France. L’entreprise que j’ai construite s’est, quant à elle, enorgueillie durant des années d’être le plus gros contribuable français – elle l’est du reste toujours – car, si la France ne représentait que 6 % de son marché, elle abritait 35 % des effectifs et 70 % de la recherche. Les profits étaient en France et largement taxés, ce qui est normal et permet de répondre aux besoins de l’État. Oui, nous avons la chance d’avoir de grandes entreprises à rayonnement mondial, mais encore faut-il qu’elles jouent leur rôle dans notre pays.

Les facteurs pénalisants sont avant tout les prélèvements publics. Pour une même somme versée par l’employeur, le salarié perçoit beaucoup moins en France qu’en Allemagne. Mais il ne sert à rien de déplacer vers la fiscalité une part des charges sociales si l’argent ainsi économisé ne va pas à l’investissement ou à l’innovation, voire au pouvoir d’achat. Les décisions qui seront prises devront servir au développement des entreprises.

Autre point très important, souligné dans tous les rapports : l’inadéquation entre la formation et les besoins des entreprises – de plus en plus criante à mesure que l’on descend vers les petites et moyennes entreprises. Les entreprises auraient besoin de « faiseux », et non pas seulement de « causeux », c’est-à-dire au moins autant de titulaires de brevets industriels ou de certificats d’aptitude professionnelle (CAP) que de diplômés d’écoles d’ingénieurs. Ce défaut de formation professionnelle résulte de ce que l’industrie a perdu son aura, que le secrétariat d’État à l’enseignement technique a été supprimé et que l’instauration du collège unique a fait de l’orientation vers l’enseignement technique une punition pour les moins bons élèves.

Ce constat général étant établi, il faut avancer. À cet égard, la conférence nationale de l’industrie rassemble une équipe dont les membres ont par ailleurs une action fort utile, qu’il s’agisse de M. Jean-Claude Volot, de M. René Ricol ou de M. Yvon Jacob. Il faudra du temps pour remettre l’industrie au cœur d’un grand projet commun. Il faut presque une génération pour faire reprendre sens à l’enseignement technique et aux métiers manuels. Ne doutons pas que les Français aimeraient pouvoir faire réparer sur place et rapidement, par des professionnels compétents installés à proximité, leur machine à laver, leur aspirateur ou leur ordinateur !

Par ailleurs, nous avons besoin d’un pacte européen car nous sommes parfois lourdement freinés par l’absence de politique industrielle européenne.

Pour développer l’emploi et les compétences dans l’industrie, il faut déjà savoir ce que c’est que l’industrie. À l’époque des présidents Charles de Gaulle et Georges Pompidou, on parlait énormément d’industrie. De fait, une nation est fière de ce qu’elle produit – et non de ses banques et autres institutions de service. L’image de la France à l’extérieur est donnée par ce qu’elle fabrique. Rétablir cette image est un travail de longue haleine, qui ne se fera pas en six mois ou en un an. Depuis la période que je viens d’évoquer, le ministère de l’industrie s’est peu à peu étiolé, jusqu’à ce que l’on décide que l’on n’en avait plus besoin. Sans doute M. Jean-Pierre Chevènement a-t-il été un ministre de l’industrie qui souhaitait agir, mais il n’est pas resté longtemps à ce poste. Ses successeurs n’avaient pas sa passion de l’industrie et pensaient que l’on remplacerait les emplois industriels par les emplois de service, alors que les services se délocalisent en quelques jours, bien plus facilement encore que l’industrie. Sans industrie, il n’y a plus besoin de services ni de centres de recherche. Les choses sont donc simples : si on défend l’industrie, il y aura des emplois ; si on ne la défend pas, il n’y en aura pas.

M. Yvon Jacob, ambassadeur de l’industrie auprès de l’Union européenne. Au problème de compétitivité que rencontre la France, assez bien identifié, s’ajoute celui de la compétitivité de l’Europe, moins souvent évoqué. J’aborderai donc la problématique française à travers une approche européenne.

La vie de notre industrie dépend très largement de domaines relevant d’une responsabilité européenne exclusive ou partagée. Il en va ainsi de la politique de la concurrence et du marché unique, partagée mais largement décidée à Bruxelles ; de la politique des normes, notamment environnementales ou sanitaires, également partagée mais dans laquelle l’Union européenne a un poids très important ; enfin, de la politique du commerce et des échanges internationaux de marchandises, pour laquelle l’Union européenne a une compétence exclusive, gérant toutes les négociations internationales pour le compte des États membres. Depuis une trentaine d’années, ces politiques ont été essentiellement tournées vers l’intérêt du consommateur et ont largement oublié l’acte de production et le producteur. C’est ce qui explique sans doute en partie la position de l’Union européenne dans les négociations de l’Organisation mondiale du commerce. Je pense notamment à celles qui, voilà un peu plus d’une dizaine d’années, ont débouché sur l’entrée dans l’organisation de pays occupant aujourd’hui une place majeure mais qui étaient alors considérés comme émergents, et sur un phénomène de mondialisation asymétrique : lors de ces négociations, nous avons fait énormément de concessions, en abaissant la quasi-totalité de nos barrières tarifaires, dans l’espoir, en contrepartie, d’entrer sur ces marchés nouveaux, mais nous avons été quelque peu déçus.

C’est le premier choc que l’industrie française et européenne a eu à subir à la fin des années 1990 et au début des années 2000. La Chine, entrée dans l’Organisation mondiale du commerce en 2001, connaît depuis dix ans un taux de croissance du commerce extérieur de 15 % à 25 % par an – soit de 20 % en moyenne. La part de ce pays dans les échanges mondiaux est passée en moins de dix ans de 7 % à 14 % et devrait atteindre 25 % dans la décennie à venir – évolution cohérente avec l’importance de ce pays, mais d’une grande brutalité pour les autres partenaires mondiaux. L’irruption de la Chine dans le commerce international a en outre créé un fantastique déficit des balances commerciales en Europe. Le déficit cumulé européen s’élève à 1 100 milliards d’euros et pourrait atteindre dans cinq ans 1 800 milliard ou 2 000 milliards d’euros si le rythme actuel se poursuit. À cela s’ajoutent les problèmes que posent le taux de change de la monnaie chinoise et des pratiques commerciales parfois éloignées de nos usages.

Le deuxième choc, à peu près simultané, est l’élargissement de l’Europe, dont nous n’avons pas entièrement mesuré les conséquences : différentiels sociaux très importants avec les anciens pays membres ; divergences d’intérêts en matière industrielle, certains pays assez peu industrialisés voyant bien l’avantage pour eux de profiter d’une production mondiale à bas coût ; extrême complexité de la prise de décision à l’échelle des 27 pays de l’Union européenne ; surveillance du marché intérieur rendue encore plus difficile.

Pour la France, ces deux chocs ont entraîné des délocalisations, en particulier pour les approvisionnements, des pertes d’emplois, une baisse de la rentabilité qui a entraîné une diminution des ressources utilisables pour l’investissement, ainsi que des transferts ou des disparitions de savoir-faire.

L’Europe n’a pas eu de véritable réaction politique face aux effets de ces deux chocs. Malgré les rapports assez nombreux produits par la Commission, le Conseil des ministres n’a pas traité les problèmes. La situation est d’autant plus difficile à régler qu’il faut trouver un consensus à 27. Nous Français, devons nous employer à développer une force de proposition et de conviction ; Gouvernement, parlementaires et industriels doivent fixer des objectifs clairs pour notre industrie, dans une vision de long terme. Tous les acteurs doivent être rassemblés autour d’une stratégie cohérente – la Conférence nationale de l’industrie est là pour cela.

Enfin, au niveau international, nous avons besoin d’une régulation de la concurrence, aujourd’hui inexistante. Il est certes important de réguler l’économie financière, mais il faut aussi réguler l’économie réelle.

M. Jean-Claude Volot, médiateur des relations interentreprises industrielles et de la sous-traitance. Je présenterai un rapport d’étape de ma mission, qui correspond au douzième des 23 points dégagés par les États généraux de l’industrie. Le poste de médiateur a été réclamé, dans toute la France, par les 5 000 personnes qui y ont participé. Mon équipe et moi-même travaillons depuis quatorze mois à améliorer les relations entre les entreprises. Compte tenu du « frottement » constaté entre les entreprises, c’est là un facteur d’amélioration de la compétitivité et de la productivité globales.

Malgré la peur de recourir au médiateur dans un pays où « l’omerta » reste très forte, une véritable bonne volonté se manifeste dans les états-majors des groupes, grands ou moins grands, pour changer les choses. Nous effectuons, je le rappelle, des médiations individuelles, collectives ou de branche, de telle sorte qu’au cours de cette première année, nos actions ont concerné 13 000 entreprises, soit environ 450 000 salariés, avec un taux de succès de plus de 86 %.

Le Gouvernement nous avait également demandé de procéder à un état des lieux des mauvaises pratiques : nous en avons identifié d’abord 35, puis 38 et avons constaté qu’elles étaient toutes illégales. Mais je rappelle la phrase de Churchill : « En Angleterre, tout est permis sauf ce qui est interdit ; en Allemagne, tout est interdit sauf ce qui est permis ; en France, tout est permis, même ce qui est interdit »… Il faudra du temps pour effacer les mauvais plis et faire en sorte que l’intelligence et la créativité soient pleinement utilisées dans l’intérêt de notre pays.

La médiation entraîne de nombreux effets induits, notamment un regain de confiance de la part des fournisseurs. La fonction de médiation, née dans l’industrie, s’étend désormais à tous les domaines des relations entre les entreprises, y compris commerciales et de services, l’industrie représentant aujourd’hui à peine la moitié des missions que nous effectuons. Mon équipe et moi sommes assez fiers de nos performances au service de l’économie française.

Pourquoi notre économie n’a-t-elle pas la compétitivité qu’elle pourrait avoir ? Les entreprises françaises sont très compétitives : 34 grands groupes industriels sont des leaders mondiaux. Mais la compétitivité de la France ne dépend pas seulement des entreprises ; il faut tenir compte de l’ensemble de leur environnement, notamment de l’État. À cet égard, nous attendons du Parlement qu’il remédie à l’insécurité fiscale : les règles changent sans cesse, plus encore qu’en matière sociale. L’insécurité entraîne un manque de confiance qui se traduit, chez les entrepreneurs comme chez l’ensemble des Français, par un comportement d’épargne, préjudiciable à l’investissement.

Ainsi l’exit tax, condamnée par Bruxelles à l’époque du gouvernement de M. Lionel Jospin, est à nouveau évoquée par des parlementaires de tous bords : il n’y a rien de mieux pour effrayer l’entrepreneur français ! De même, il est dramatique que l’on parle, à l’approche des élections, de remettre déjà en cause l’excellent dispositif « Dutreil », qui avait enfin mis la France, en matière de coût des successions, au niveau de l’Allemagne – où nombre d’entreprises du Mittelstand sont dirigées par la troisième génération d’une même famille… Quant au retour à la retraite à 60 ans, même s’il n’a pas lieu, son évocation ne contribue pas non plus à instaurer un climat de confiance.

Il faut savoir aussi, même si personne n’en parle, que les jugements des chambres sociales des cours d’appel sont rendus quasi systématiquement contre les entreprises, même si les tribunaux de prud’hommes leur avaient donné raison. Ce sont malheureusement des statistiques secrètes…

Des décisions assassines de la Cour de cassation, comme celle qui a été rendue voilà deux semaines à propos du délit de marchandage, contribuent à la même insécurité. La pénalisation du délit de marchandage a été instaurée en 1848 pour lutter contre l’esclavage. Et aujourd’hui on sanctionne pénalement le sous-traitant et le donneur d’ordre.

Le fait de revisiter en permanence l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et ses constituants est également un facteur de grande insécurité, qui ne permet pas à l’entreprise d’être performante.

Quant à la réglementation applicable aux jeunes entreprises innovantes, elle a été entièrement modifiée au bout d’un an : comment avoir confiance ? Il en va de même du crédit impôt recherche, modifié et réduit dès l’année suivant sa création. Le dispositif de l’ISF-PME qui, quels que soient ses défauts, a permis d’investir un milliard d’euros au cours des dernières années, n’a pas cessé, lui aussi, de faire l’objet de réductions.

On ne saurait pourtant imaginer que les parlementaires ne disposent pas de la capacité d’anticiper les conséquences de leurs décisions, ni qu’ils regrettent d’avoir permis aux entreprises d’être plus performantes dans la compétition mondiale !

Sur le terrain, je ne fais qu’entendre des témoignages qui corroborent ce qui est exposé dans les 7 000 pages du rapport des États généraux de l’industrie. Le républicain que je suis vous demande d’établir une politique durable en matière de fiscalité et, secondairement, de cotisations sociales.

M. Christian Blanc, président. Pour faire écho aux propos de M. Yvon Jacob sur la nécessité de définir une stratégie et en réponse à M. Jean-François Dehecq, qui recommande d’éviter trop de comparaisons avec l’Allemagne, je rappelle que ce pays a rattrapé en une dizaine d’années son retard dans le domaine des biotechnologies grâce à des décisions stratégiques consistant à concentrer les efforts de recherche fondamentale, de recherche appliquée et d’innovation sur deux Länder – la Bavière et le Bade-Wurtemberg. Comment les chefs d’entreprise et industriels que vous êtes envisagent-ils les questions de stratégie ?

À propos de la compétitivité, je me souviens qu’à Bruxelles, un commissaire allemand prenait rarement une décision sans en avoir discuté avec des représentants de l’industrie allemande, qui étaient sur place ; les Français n’avaient pas les mêmes habitudes. Certes les parlementaires doivent être plus conscients des problèmes que rencontre l’industrie, mais encore faut-il que ses représentants leur parlent. Quelles seraient vos recommandations à la représentation nationale ?

M. Jean-François Dehecq. Sans aborder les sujets sur lesquels vous allez entendre M. Pierre Gattaz, je voudrais souligner que nous n’avons aucune cartographie de l’industrie en France. La définition de quatorze filières constitue une grande nouveauté ; un rapport présentera au début de l’année prochaine la structure et la compétitivité de chacune d’entre elles. L’Algérie, où je me trouvais la semaine dernière avec M. Jean-Pierre Raffarin, a bien compris l’intérêt de ces filières et a entrepris d’en construire. On ne fait pas d’industrie laitière sans savoir comment on nourrit les vaches ni comment on distribue les produits. De nombreuses personnes travaillent sur ces questions et il importe de savoir où l’on va.

Un problème important est celui du financement des petites et moyennes entreprises. En effet, si une grosse entreprise n’a pas de peine à emprunter des milliards, une petite et moyenne entreprise qui n’a plus de fonds propres après la crise n’a pas aussi facilement accès au crédit et ne peut pas suivre ses commandes lorsque l’activité redémarre. Plus les entreprises sont petites, plus le financement est difficile. Il faut orienter l’argent vers l’industrie – ce que permettait autrefois le découplage entre banques de dépôt et banques d’affaires. Ce ne sont pas l’État et les patrons qui redonneront vie à l’industrie française. Il faut que le corps social réalise que, faute d’industrie, il n’y aura plus de travail ni de pouvoir d’achat pour nos enfants et nos petits-enfants.

M. Christian Blanc, président. Le président d’OSÉO indiquait ce matin qu’une partie des personnes acquittant l’impôt de solidarité sur la fortune au profit des petites et moyennes entreprises n’en attendent pas un retour sur investissement, mais considèrent qu’il s’agit d’une contribution de solidarité avec des entreprises qu’elles connaissent, sur un territoire donné. Que pensez-vous de cette notion de solidarité territoriale ?

M. Jean-François Dehecq. Elle est essentielle, et liée à celle de bassin d’emploi. Sans OSÉO, qui est présent sur les territoires, les faillites seraient beaucoup plus nombreuses. Quant aux salariés, ils ne demandent pas que l’État subventionne l’industrie, mais que leurs salaires puissent, tant qu’ils sont en dépôt à la banque, alimenter des prêts à l’industrie, plutôt que la spéculation.

M. Jean-Claude Volot. Le monde de l’industrie a besoin d’un climat de confiance pour investir et se développer. Depuis dix ans, les industriels français se sont comportés comme des épargnants, en augmentant leurs fonds propres. Pour sortir de cette situation, il faut cesser de remettre sans cesse en cause les règles fiscales. Ainsi, la modification des bases de l’impôt de solidarité sur la fortune est propre à attiser les craintes. Il existe d’ailleurs au Sud-est de Bruxelles une grande forêt que les Bruxellois appellent le « ghetto des riches Français » : des entrepreneurs français ont vendu leur entreprise et sont venus y cacher leurs valises de billets…

Il est capital de demander aux filières d’établir des stratégies globales. Ces stratégies devront ensuite être déclinées pour l’ensemble des entreprises, jusqu’à la plus petite. En tant que président du comité consultatif « Industrie et financement des entreprises » au Commissariat général à l’investissement, j’ai dû me battre pour obtenir une enveloppe de 69 millions d’euros, dont le montant prévu était initialement de 300 millions, pour des actions collaboratives de filière et d’agglomération pour chacune des filières. Nous attendons des projets dans ce domaine, qui doivent tous intégrer les trois mots magiques que sont « stratégie », « recherche-développement » et « exportation ». Lorsque ces mots n’apparaissent pas, nous demandons aux auteurs des dossiers de s’efforcer de les y faire figurer. Cela fait aussi partie d’une stratégie de filière.

Les entreprises françaises sont globalement performantes, mais les chefs d’entreprise possédant une stratégie réelle sont peu nombreux – les autres recourant à l’intuition, à la tactique ou à l’itération quotidienne. C’est la raison pour laquelle M. Jean-François Dehecq, M. Christian Estrosi, M. René Ricol et moi-même avions demandé de pouvoir disposer d’une enveloppe permettant un effet de levier. La situation du Commissariat général à l’investissement est exceptionnelle et prometteuse pour l’avenir.

Oui, il y a des choses à faire pour les petites et moyennes entreprises. Oui, il faut pousser les responsables de filière à établir des stratégies. Il faudrait aussi, au moins pour la durée d’une mandature, ne pas trop modifier les règles fiscales s’appliquant à l’entreprise, afin d’assurer un climat de confiance.

M. Yvon Jacob. Ce dont l’industrie française a besoin avant tout, c’est d’un véritable consensus national sur son importance pour l’avenir de notre économie, donc pour l’emploi et pour le bien de tous. Les entrepreneurs ont vraiment besoin de se sentir soutenus par cette conviction collective. Les États généraux ont fixé les grandes lignes de ce qui pourrait être notre ambition, en formulant des propositions touchant aux divers aspects de la vie de l’entreprise. Mais il faut aussi agir au niveau européen : les Français, donc leurs représentants politiques et les acteurs industriels, doivent se mettre d’accord sur les objectifs à atteindre en ce domaine. Depuis quelque temps l’Europe dit vouloir se doter d’une politique industrielle, mais on en est encore au stade du discours ; et ce que nous Français disons sur le sujet n’est pas toujours très bien accueilli par nos partenaires. Sans doute est-ce parce que nous n’avons pas pris la précaution d’aller préalablement nous expliquer auprès de chacun d’eux. Nous en avons 26, aucun ne compte plus qu’un autre – car ils sont tous à égalité dans la prise de décision, même si 70 % ou 75 % de la valeur ajoutée industrielle de l’Union est produite par quatre pays membres.

C’est par des actions convergentes des organisations professionnelles, des entreprises et de l’État que nous pourrons faire bouger les lignes en faveur de l’industrie. Il faut aller convaincre ceux qui en Europe n’ont pas le même point de vue : certains pays, même s’ils ne sont pas nombreux, ne s’intéressent pas aujourd’hui à l’industrie ; et ils peuvent être les vecteurs, en Europe, de l’ambition de pays extra-européens. Il faut donc leur expliquer pourquoi les messages qu’ils relaient ne sont pas bons. Faisons de l’industrie un impératif national, en n’oubliant jamais que la moitié des emplois de service dépendent de l’industrie.

Le président Bernard Accoyer remplace M. Christian Blanc, vice-président, à la présidence de la séance.

M. Jean-François Dehecq. Je me réjouis que depuis trois ans, on puisse parler d’industrie sans avoir l’air d’un passéiste. On ose parler de politique industrielle, non dans le sens d’un Gosplan, mais dans celui de la fixation d’une stratégie. En outre, les États généraux ont permis non pas d’arriver à un consensus social, ce qui serait impossible, mais de définir des lignes de convergence. La conférence nationale de l’industrie, qui est pérenne, prend le relais. La cohésion sociale dépend de cette démarche collective.

M. le président Bernard Accoyer. Merci à tous de nous avoir présenté vos observations et vos propositions. La cohésion nationale est bien l’objectif poursuivi par cette mission d’information, s’agissant de la création de la richesse, de sa répartition et du financement de la protection sociale. Je retiens de vos propos votre souhait, partagé par beaucoup, que les comportements évoluent à l’égard de l’industrie, afin qu’elle retrouve toute la place qu’elle mérite dans notre économie.

La Mission d’information sur la compétitivité de l’économie française et le financement de la protection sociale entend ensuite, en audition ouverte à la presse, M. Pierre Gattaz, président du directoire de Radiall, président du Groupe des fédérations industrielles (GFI), président de la Fédération des industries électroniques, électriques et de communication (FIEEC).

M. le président Bernard Accoyer. Nous avons maintenant le plaisir d’accueillir M. Pierre Gattaz, président du directoire de Radiall, président du Groupe des fédérations industrielles (GFI), président de la Fédération des industries électroniques, électriques et de communication (FIEEC), qui a succédé il y a un an à la M. Yvon Jacob à la présidence du GFI. Celui-ci rassemble les plus importantes fédérations industrielles et représente environ 80 % de l’industrie.

M. Pierre Gattaz, président du directoire de Radiall, président du Groupe des fédérations industrielles (GFI), président de la Fédération des industries électroniques, électriques et de communication (FIEEC). Je suis en effet le patron de Radiall, société familiale spécialisée dans la connectique. Sur notre site de Château-Renault, trois cent cinquante personnes fabriquent des connecteurs. Nous sommes leaders mondiaux pour approvisionner Boeing et Airbus. Si nous avons pu conquérir le marché de Boeing depuis dix ans, c’est parce qu’en France, l’écosystème Airbus-Safran-Thales nous avait permis de créer de nouvelles technologies et de nous développer. D’où ma première observation : pour se développer à l’exportation, il est fondamental qu’existe une base d’écosystème et de marché en France et en Europe ; quand elle disparaît, il très difficile pour les petites et moyennes entreprises et entreprises de taille intermédiaire de survivre. À l’inverse, la crise de la filière des télécommunications en 2001 nous a fait beaucoup souffrir ; nous avons perdu une cinquantaine de clients en France – que nous avons essayé de suivre en Chine. Nous avons fait en sorte de compenser la baisse du chiffre d’affaires dans ce secteur par d’autres marchés – militaire, spatial, aéronautique –, mais d’autres n’y sont pas parvenus : sur les trente connecticiens français qui existaient il y a vingt ans en France, il en reste quatre – Radiall, entreprise familiale, et trois autres qui appartiennent à des groupes financiers. En Allemagne au contraire, il y avait cinquante entreprises familiales de connectique il y a vingt ans, et il y en a toujours autant. Pourquoi cette différence ? Telle est la question à laquelle j’ai voulu réfléchir.

Bien sûr, il y a les problèmes de charges et de compétitivité. Mais avant toute chose, il faut des commandes. À la Fédération des industries électroniques, électriques et de communication, nous avons donc beaucoup travaillé sur les filières d’excellence du futur : il faut une ambition industrielle pour la France. Je mène ce même combat dans le cadre du Groupe des fédérations industrielles depuis un an. Dans notre pays, il ne s’agit plus de produire des vélos et des cafetières mais d’explorer les besoins sociétaux de base. Nos concitoyens, qui vont vivre de plus en plus vieux, ont des besoins de santé, d’accompagnement, de sécurité – aussi bien dans les transactions financières que sur la route ; ils ont besoin aussi, pour vivre mieux, que l’on améliore l’efficacité énergétique. À ces besoins correspondent des opportunités industrielles fantastiques : les réseaux électriques du futur, la route intelligente – qui tuerait moins et provoquerait moins d’accidents –, la santé – avec la « e-santé », la télémédecine, l’imagerie et toutes les solutions imaginables pour améliorer les soins tout en réduisant la facture – ou la rationalisation de l’éclairage urbain. Nous avons tout ce qu’il faut en France – technologies, ingénierie – pour développer ces secteurs, qui comptent déjà des champions capables de jouer le rôle de locomotives, ainsi que des entreprises de taille intermédiaire et des petites et moyennes entreprises prêtes à accompagner le mouvement. Il y a cinq ans, ce discours était inaudible : on ne va pas revenir à l’époque des plans, me disait-on. Mais il ne s’agit pas du tout de cela : nous ne voulons pas, bien entendu, nous voir imposer par quelques hauts fonctionnaires un choix industriel, comme à l’époque du plan machine-outil ou du plan Calcul ; nous souhaitons que, tel le MITI japonais (Ministry of International Trade and Industry), l’État favorise ces réflexions et que les acteurs que nous sommes se mettent d’accord avec les chercheurs et avec l’Éducation nationale pour développer quelques filières. La Conférence nationale pour l’industrie, où je suis l’adjoint de M. Jean-François Dehecq, essaie de mettre en place ces filières stratégiques. Rappelons une fois encore l’importance de l’industrie : elle représente 85 % de l’innovation, 80 % du commerce extérieur ; un emploi industriel crée deux emplois de service, l’industrie représente 15 % du produit intérieur brut (PIB) mais en ajoutant les services associés ou induits, on atteint 30 % à 35 % du PIB. Si l’industrie va mal, toutes les activités qui lui sont liées iront mal aussi.

La crise aura eu le mérite de nous ouvrir les yeux. À côté de nous, le modèle allemand fonctionne merveilleusement bien : les industriels allemands innovent, exportent, créent des emplois. En France, l’industrie a connu dix années calamiteuses. En tant que dirigeant d’entreprise, j’ai vécu le départ des clients hors de France, j’ai connu le discours, y compris dans les cercles patronaux, selon lequel l’avenir n’était pas dans l’industrie, mais dans les services et « l’économie de l’intelligence ». Or ces services ne peuvent fonctionner qu’avec des infrastructures efficaces – réseaux électriques intelligents, réseaux haut débit…

Notre combat est celui de l’emploi : l’économie française dans son ensemble ne peut bien fonctionner que si le socle industriel ne disparaît pas ; quant à l’emploi industriel lui-même, nous sommes persuadés qu’il est possible de le conserver et même de le développer. L’exemple de Radiall en témoigne : pour pénétrer le marché américain de l’aéronautique, j’ai créé au Mexique une usine de trois cents personnes ; et je me suis aperçu qu’entre deux crises, je créais aussi trente emplois à Château-Renault. Une spirale vertueuse est possible : lorsqu’un marché existe en France ou en Europe, on va conquérir la Chine ou l’Inde ; et grâce à ces parts de marché nouvelles, la rentabilité augmente et permet d’innover. Or l’innovation, qu’il s’agisse de Recherche & Développement ou de process de fabrication, peut se faire en France.

Les propositions du groupe des fédérations industrielles pour redresser l’industrie française s’organisent autour de trois axes.

Tout d’abord, il faut définir une nouvelle ambition pour l’industrie, via la Conférence nationale de l’industrie ; malheureusement, celle-ci ne dispose pas de moyens suffisants. Le lancement de onze filières stratégiques – auxquelles vont sans doute s’en ajouter deux ou trois autres – représente du travail. On ne peut pas faire un MITI avec des bouts de chandelle… Il reste que la conférence, cadre de discussions fructueuses entre le patronat, les syndicats et l’État, est le bon instrument pour définir un cap.

Ensuite, pour concrétiser l’ambition et libérer la croissance, il est indispensable de pérenniser le crédit impôt recherche, de faire en sorte que les entreprises de taille intermédiaire aient accès aux facilités de trésorerie accordées aux petites et moyennes entreprises. Le dispositif, ne l’oublions pas, a permis de garder en France des sociétés telles que Microsoft ou Google. C’est un outil formidable – qu’il faudrait peut-être élargir à l’innovation : sans doute sommes-nous plus créatifs que les Allemands, mais nous sommes défaillants pour le passage de l’idée à la réalisation.

Il faut aussi, pour libérer la croissance, agir sur le coût du travail. En la matière, notre industrie avait il y a dix ans un avantage sur l’Allemagne de 12 % à 15 % ; aujourd’hui, nous sommes tombés à zéro. Si rien n’est fait, il y a fort à craindre que dans cinq ou dix ans, le coût du travail soit bien plus élevé en France qu’en Allemagne, ce qui serait dramatique. Pour réduire le coût du travail, nous ne prônons pas du tout une baisse des salaires nets ; en revanche, nous demandons d’agir sur les charges : s’il y avait une seule mesure à prendre, ce serait de transformer les 33 milliards d’euros de charges qui sont liés à la politique familiale en points de taxe sur la valeur ajoutée – quitte à exempter certains produits de première nécessité – ou de contribution sociale généralisée. Si nous voulons des entreprises dynamiques, qui créent de la richesse et de l’emploi en France, capables d’affronter un environnement mondial très dur, nous devons savoir prendre une décision courageuse comme celle-ci – faute de quoi ce sont les entrepreneurs qui vont se décourager, abandonner et partir à l’étranger. Une telle mesure aurait pour effet de renchérir les importations de Chine ou d’Inde, qui rencontrent fort peu de barrières en Europe – alors qu’à l’inverse, pour exporter dans ces pays, nous sommes confrontés à de multiples contraintes : c’est tout le problème de la réciprocité dans les échanges, qu’il conviendrait également de régler.

Notre objectif est de faire repartir l’emploi industriel en France, grâce à l’innovation. Il faut aussi savoir gérer les effectifs, en pratiquant la flexisécurité : nous ne sommes plus dans le monde des Trente glorieuses, nous allons de crise en crise ; mais le licenciement à l’anglo-saxonne n’est pas notre modèle, il faut plutôt suivre le modèle allemand, négocier avec les partenaires sociaux un chômage partiel, en profiter pour dispenser des formations. En France, les chefs d’entreprise ont encore trop peur d’embaucher, par crainte de ce qu’ils feront de leurs salariés à la prochaine crise. Bien entendu, il est également indispensable de promouvoir l’apprentissage et l’alternance.

Enfin, il me paraît impératif de simplifier et stabiliser la réglementation française – fiscale, sociale et environnementale. Un enfant de cinq ans est capable de se servir d’un iPhone, les ingénieurs d’Apple ayant désormais compris la nécessité d’exempter l’utilisateur des éléments de complexité, en les intégrant dans l’appareil lui-même ou en les laissant dans les réseaux extérieurs. Pourquoi ceux qui établissent les réglementations ne pourraient-ils pas faire de même ? Il y a trois ans, au sujet des heures supplémentaires, il nous a fallu lire et comprendre une note de Bercy de 80 pages… Les chefs d’entreprise ont besoin d’un environnement stable – il ne faut pas changer la loi sans cesse – et simplifié : cela me paraît un bon programme pour les décennies qui viennent.

M. le président Bernard Accoyer. Merci beaucoup pour cette analyse. Je ne doute pas que ce que vous venez de nous dire nourrira d’autres échanges.

M. Christian Blanc, vice-président, remplace le président Bernard Accoyer à la présidence de la séance

M. Jean Grellier. Comment assurer la convergence de toutes les structures existantes – pôles de compétitivité, comités stratégiques de filière, schémas régionaux de développement économique, Médiateur de la sous-traitance, Conseil d’analyse stratégique – ?

S’agissant des charges, que pensez-vous de l’idée d’instituer non seulement un plafond de charges par rapport au chiffre d’affaires, mais aussi un plancher, afin d’assurer une certaine péréquation ? Je m’interroge sur la raison pour laquelle cette proposition faite par des industriels n’a pas été mise à l’étude ; cela permettrait de faire un peu moins peser les charges sur les entreprises qui créent de l’emploi, en assurant un rééquilibrage avec les entreprises qui délocalisent ou importent.

M. Pierre Gattaz. J’aimerais en connaître davantage sur cette proposition. Aujourd’hui le consensus se fait plutôt sur la formule dont j’ai parlé – substitution de prélèvements fiscaux comme la taxe sur la valeur ajoutée ou la contribution sociale généralisée à certaines charges sociales, afin de réduire le coût du travail, et même éventuellement d’augmenter le salaire net –, ce qui permettrait d’endiguer les importations chinoises ou indiennes.

S’agissant des diverses structures mises en place, la Conférence nationale de l’industrie me paraît être l’instrument le plus important au niveau national, dans la mesure où y sont associés patrons, syndicats et Gouvernement ; le problème est le peu de moyens accordés pour la faire fonctionner. Les pôles de compétitivité jouent également un rôle très positif au niveau local. Toutes ces initiatives me paraissent s’articuler naturellement. La conférence essaie de bâtir des filières stratégiques, avec une vision à moyen ou long terme.

Pour le reste, il faut créer des écosystèmes, faire en sorte que les grandes sociétés entraînent les moyennes, prendre exemple sur l’Allemagne pour « chasser en meute ». Une initiative comme « Pacte PME » est à cet égard très intéressante.

M. Christian Blanc, président. Merci beaucoup pour la qualité et l’enthousiasme de vos propos, dont je salue la tonalité optimiste. Nous comptons sur vous pour initier les mouvements nécessaires.

M. Pierre Gattaz. Nous sommes des combattants de l’industrie. Permettez-moi un dernier message car il y a urgence : en France les industriels ont l’impression de ne pas être aimés ; ils auraient besoin que le climat devienne plus favorable. Cela commence par l’éducation : à Radiall, nous avons montré pendant trois jours à des élèves de Première et leurs professeurs ce qui se faisait dans l’entreprise. Ils ont découvert des métiers, et en même temps constaté que l’on était loin de la lutte des classes et que chacun était content de venir travailler le matin. Il faudrait développer ce genre d’initiatives.

M. Christian Blanc, président. Merci.

La séance est levée à dix-huit heures dix.

——fpfp——

Présences en réunion

Réunion du mercredi 8 juin 2011 à 16 heures dix

Présents. – M. Bernard Accoyer, M. Christian Blanc, M. Jean Grellier, M. Pierre Morange

Excusés. M. Jérôme Cahuzac, M. Marc Laffineur, M. Pierre Méhaignerie