COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
Mercredi 8 décembre 2010
La séance est ouverte à dix heures.
(Présidence de M. Pierre Méhaignerie, président de la Commission)
La Commission des affaires sociales entend M. Vincent Chriqui, directeur général du Centre d’analyse stratégique, sur le rapport « Vivre ensemble plus longtemps : enjeux et opportunités pour l’action publique du vieillissement de la population française ».
M. le président Pierre Méhaignerie. J’ai souhaité cette audition car le Centre d’analyse stratégique a publié, en juillet dernier, un volumineux rapport intitulé : « Enjeux et opportunités pour l’action publique du vieillissement de la population française ». Il aborde, en particulier, deux sujets qui seront au centre des préoccupations de la commission des affaires sociales au cours des prochains mois : l’emploi des seniors et la dépendance. C’est pourquoi l’analyse et les propositions contenues dans ce rapport nous sont précieuses.
M. Vincent Chriqui, directeur général du Centre d’analyse stratégique. Notre rapport avait pour objet de balayer les différents aspects du vieillissement, retraites mises à part : logement, impact de la dépendance en matière d’emploi, appui aux aidants, maladies liées au très grand âge… Avant d’en examiner les grandes lignes, deux observations s’imposent. D’abord, le grand âge est une question complexe et l’on a tort de considérer les plus de 65 ans comme un ensemble homogène. On peut être parfaitement actif à 65 ans. Il est important de poser d’autres seuils, à 75 et à 85 ans par exemple, qui sont des bornes d’âges aux conséquences différentes. Ensuite, il n’est pas possible de traiter des personnes âgées sans se pencher sur l’ensemble du cycle de vie. Qu’il s’agisse de santé, d’hygiène de vie ou de formation, on fait fausse route si l’on ne s’intéresse qu’à ce qui se passe après 65 ans. Ce sont des politiques d’ensemble à mettre en œuvre.
Premier point du rapport : la question du logement. Il est à cet égard très important de disposer de logements adaptés et accessibles. En France, on compte 450 000 chutes de personnes âgées chaque année, dont 62 % ont lieu à domicile. C’est un vrai problème de santé publique, lié en partie à l’inadaptation des logements. Ces chutes engendrent 10 000 décès par an et, surtout, sont une cause de dégradation de l’autonomie.
La France est en retard dans ce domaine : seulement 18 % des personnes âgées bénéficient d’aménagements spéciaux, contre 45 % pour les Pays-Bas et 38 % pour Israël. Certes, de nombreux pays font moins bien, mais nous avons tout de même beaucoup de retard sur les meilleurs élèves. La loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées du 11 février 2005, dite loi « Handicap », a représenté un grand progrès en imposant que les nouveaux logements soient accessibles aux personnes dépendantes. Mais, parallèlement à ce dispositif, on ne s’est pas donné les moyens de faire ce qui était nécessaire en matière de réhabilitation. Or, les personnes âgées ne sont pas très mobiles. Elles veulent souvent rester dans leur logement. En outre, même avec le flux actuel de logements neufs en bon état, notre système d’attribution ne garantit pas qu’ils aillent aux personnes qui en ont le plus besoin. Cette politique renchérit le coût des nouveaux logements de 5 à 6 %, sans garantir que les personnes les plus dépendantes soient dans des logements adaptés à leurs besoins.
Ce que nous proposons, c’est d’abord de solvabiliser la demande par la mise en œuvre d’un ensemble de mesures : prise en charge partielle par la puissance publique de l’assurance décès pour les emprunts des personnes âgées, aides de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH),… De nombreux dispositifs existent, mais ils sont trop éclatés. Il faut aussi envisager plus qu’aujourd'hui des déménagements, ce qui suppose, pour mettre les bons logements à disposition des bonnes personnes, de recenser les logements accessibles et de faire en sorte que ce soient les publics qui en ont besoin qui en bénéficient en priorité. Enfin, il faut mettre en place un guichet unique, sans doute à partir des centres locaux d’information et de coordination (CLIC), afin d’accompagner les personnes âgées dans le maquis des aides.
Deuxième point : l’emploi. À l’évidence, un nombre très important d’emplois liés à la dépendance sera créé dans les années à venir. Pour l’aide aux personnes âgées, les besoins devraient être d’un million de postes à l’horizon 2025, soit un doublement en vingt ans du nombre des intervenants à domicile et une augmentation de 25 % des postes en établissements pour personnes âgées. Une telle demande en services nouveaux, et donc d’emplois, constitue un défi qui ne sera pas facile à relever. En effet, ces métiers souffrent d’un manque d’attractivité : conditions de travail difficiles, déplacements nombreux, organisation du travail peu propice à la construction d’une carrière, absence de passerelles, rémunérations relativement faibles… Sans compter un problème d’image : parmi les emplois de services à la personne, il est souvent considéré comme plus valorisant de s’occuper de jeunes enfants que de personnes dépendantes.
Une réflexion sur ces métiers est donc nécessaire, à commencer, bien sûr, par la formation. Il faut créer de nouvelles filières d’un niveau pas forcément très élevé et, surtout, organiser des passerelles entre les différents métiers liés à la dépendance – interventions à domicile et fonctions en établissements – et même, dans l’idéal, entre les différents métiers d’accompagnement – jeune enfance, personnes handicapées et personnes dépendantes âgées. Ainsi, ces emplois pourront offrir une perspective de carrière. Enfin, il faut travailler sur leur image, ce qui passe par des campagnes de communication et une réflexion sur les conditions de travail.
Troisième point du rapport : l’aide familiale, qui est un élément très important dans l’accompagnement des personnes âgées. On estime que 3,5 millions de personnes soutiennent quotidiennement un proche malade, âgé ou handicapé. C’est considérable. Les trois quarts des bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), par exemple, sont aidés par au moins un proche – en moyenne, par 1,7 personne. De ce point de vue, les différences entre pays sont très intéressantes, liées bien sûr à leurs modèles familiaux. Au nord, on aide ponctuellement le parent qui a des difficultés. Au sud, l’aide passe plus par la cohabitation entre enfants et parents. La France et l’Allemagne sont dans une situation intermédiaire, comme c’est souvent le cas. Différents éléments cependant laissent présager une pénurie d’aidants familiaux, d’abord parce que les femmes de 50 à 64 ans – ce sont souvent elles qui assument cette solidarité – mènent une carrière professionnelle et sont moins disponibles, ensuite parce que les comportements des hommes conjoints de personnes dépendantes restent incertains, même si de nombreuses études montrent qu’ils s’impliquent et, enfin, du fait de l’évolution de la société – éloignement géographique des enfants, recomposition familiale,... On peut donc avoir des doutes sur la manière dont s’exercera la solidarité familiale à l’avenir d’autant que la charge peut être assez lourde pour ceux de la génération dite pivot, c'est-à-dire celle des 45-64 ans, qui, tout en exerçant un métier, doivent s’occuper à la fois de plus jeunes – leurs enfants à un âge qui plus est difficile – et de plus âgés – des ascendants dépendants –, tout en supportant par leurs cotisations les régimes de sécurité sociale. Or, si la loi de 2005 a reconnu un statut juridique aux aidants familiaux de personnes handicapées, il y a un manque s’agissant des personnes dépendantes. La France établit, en effet, des distinctions très rigides entre personnes dépendantes ou handicapées alors que dans d’autres pays les dispositifs existants pour les uns existent également pour les autres, ce qui donne parfois des résultats plus satisfaisants.
Dans ce domaine, l’État pourrait accompagner les entreprises, afin de les inciter à à proposer des formules telles que le temps partiel ou le télétravail permettant de développer l’aide familiale. Surtout, il serait très important de mettre en place des dispositifs de soutien ponctuel, comme cela existe dans d’autres pays. En effet, les familles sont souvent disposées à assurer la solidarité, pour éviter de mettre la personne en établissement, mais ne peuvent le faire à plein-temps. Une prise en charge temporaire de quelques heures, voire d’un jour par semaine, ne constitue pas un investissement considérable tout en étant une solution plus satisfaisante que le placement en établissement. Enfin, les gérontechnologies représentent un grand espoir, car beaucoup sont de nature à faciliter la prise en charge par les familles.
Dernier point : l’emploi des seniors. La France a un modèle de fin de carrière ascendant sur le plan des rémunérations, contrairement à d’autres pays, ce qui satisfait les intéressés, mais ce qui explique aussi la forte tendance des entreprises à se séparer de leurs salariés les plus âgés. Certes, le recul progressif de l’âge de départ à la retraite va créer un « effet d’horizon », l’âge auquel les entreprises se sépareront de leurs salariés reculant également. Mais, encore faut-il accompagner cette évolution et il est donc intéressant de se pencher sur ce qui se passe à l’étranger.
Ainsi les pays nordiques ont-ils pris des mesures pour s’assurer qu’on se forme tout au long de la vie – ce qui illustre bien le fait que les politiques en faveur des seniors sont à envisager pendant toute la carrière, afin de pouvoir rester dans l’emploi assez tard : alors qu’en Finlande le taux d’emploi des 55-64 ans était le même qu’en France en 1994, il y est aujourd'hui plus élevé de quinze points ! De même, tandis que le taux de formation professionnelle pour la même tranche d’âge chute de façon drastique en France – les entreprises considèrent qu’après 55 ans la formation des seniors ne vaut pas la peine –, il est respectivement de 62 et 66 % pour la Suède et la Finlande contre 32 % chez nous. On voit l’effet d’une politique tout au long de la vie, étant entendu que les modèles anglo-saxons, que nous avons également étudiés, sont beaucoup plus individuels. Reste la possibilité d’individualiser les fins de carrière – ce qui nous renvoie aux discussions sur la retraite : le modèle suédois, par exemple, donne une très grande liberté dans la fixation de l’âge de départ en fonction de paramètres propres à chaque personne, ce qui permet d’adapter les fins de carrière.
J’en viens aux comparaisons internationales, car le défi du vieillissement et de la dépendance se pose bien entendu à l’ensemble des pays développés.
La population de plus de 75 ans devrait augmenter en Europe de 40 % d’ici à 2030, et si les variations devraient être importantes entre pays – avec une augmentation de 30 % au Royaume-Uni, de 50 % en France voire de 75 % aux Pays-Bas –, tous seront confrontés à une hausse très importante de la population dépendante. Pour y répondre, on distingue des modèles très différents, en particulier pour ce qui est de l’aide formelle, celle qui repose sur des financements publics. Dans les pays à tradition familiale, cette aide est souvent faible
– 0,6 % en Espagne, par exemple. Elle peut être très importante dans les pays à tradition d’intervention publique – 2,9 % en Suède –, la France étant dans une situation intermédiaire avec 1,6 %. Mais, ce taux est appelé à progresser. Tous les pays cherchent le juste dosage entre le maintien à domicile et l’offre de places en établissement – entre le health care et le social care – et partout, la tendance est à favoriser le maintien à domicile et à avoir des établissements de plus en plus médicalisés.
Pour distinguer ces différents modèles, deux critères principaux existent : la répartition de la prise en charge entre les trois acteurs que sont la famille, l’État et le marché
– en Allemagne par exemple, toutes les discussions tournent autour de cet équilibre –, et l’alternative entre maintien à domicile et résidence en institution. Les exemples dans les deux sens sont très intéressants. Ainsi, Israël a une politique de maintien à domicile forte, du fait de valeurs liées à une certaine conception de la famille. Cela va très loin, puisque les assurances santé bénéficient de primes selon le taux plus ou moins élevé de maintien à domicile de leurs assurés. À l’inverse, des pays comme la Suède ont des modèles de prise en charge en institutions médicalisées.
Sur la base de ces deux critères – l’équilibre entre les différentes prises en charge et le dosage entre domicile et institution –, on peut distinguer trois grands modèles.
D’abord, le modèle beveridgien, ou social-démocrate, qui accorde une aide importante, non contributive, et qui libère en quelque sorte la famille de ses obligations. C’est celui de la Suède, du Danemark et dans une certaine mesure du Royaume-Uni, encore qu’il y ait dans ce dernier cas une forte intervention du secteur privé.
Ensuite, un modèle de prise en charge forte par la famille, l’action publique intervenant davantage dans le domaine de l’aide sociale. C’est le cas de l’Espagne, qui a un faible nombre d’établissements. Mais, ces pays aussi évoluent vers une plus grande prise en charge publique, en particulier pour les familles les plus défavorisées.
Enfin, le modèle bismarckien, que représentent l’Allemagne et le Japon, avec des assurances fondées sur des cotisations et des prestations plus contributives, même si les aides peuvent être plafonnées et centrées sur les personnes les plus dépendantes. C’est de ce modèle que la France se rapproche le plus aujourd’hui, bien que ses critères aient tendance à évoluer, ce qui la rend difficile à classer. En fonction des choix qui seront faits sur différents points – recours sur succession, solution ô combien délicate, mais qui n’a pas été retenue pour l’APA, prise en charge par l’assurance, ciblage des aides sur les personnes les plus dépendantes –, nous nous rapprocherons peut-être de tel ou tel modèle, mais pour l’instant la réflexion reste entière s’agissant de notre modèle de dépendance. Aussi, les comparaisons internationales sont-elles importantes.
Pour prendre l’exemple de l’Allemagne, les plus de 60 ans devraient y représenter 39 % de la population à l’horizon 2050 – ce qui pour ce pays représente, encore plus que pour nous, un défi majeur du fait de son taux de fécondité extrêmement faible, soit 1,34 –, tandis que la répartition des personnes dépendantes entre domicile et institutions est d’environ deux tiers un tiers. Un système d’assurance obligatoire par répartition existe depuis 1995, avec une cotisation sociale alimentant le pilier d’assurance sociale relatif au risque dépendance. Le dispositif garantit un accès universel à l’assurance dépendance, même si l’ensemble des frais n’est pas couvert, en particulier pour l’hébergement – un marché assez dynamique se développe à cet égard dans le privé. Les prestations de prise en charge s’établissent en fonction de trois degrés de dépendance, selon un système comparable au nôtre, et peuvent être en nature ou en espèces, les personnes dépendantes préférant souvent les prestations en espèces, qui leur laissent plus de liberté, même si celles en nature sont plus élevées. Enfin, on compte deux millions de bénéficiaires de l’assurance obligatoire, dont les trois quarts reçoivent des soins à domicile.
La réforme la plus récente date de 2008. Elle comportait un relèvement des cotisations, indispensable compte tenu de l’évolution de la situation, l’accent étant surtout mis, comme dans de nombreux autres pays, sur les soins à domicile, avec des centres locaux de support – un pour 10 000 personnes, sous la responsabilité des Länder – pour accompagner les familles. Ces centres ont un fonctionnement de type case manager, ou gestionnaire de cas, c’est-à-dire qu’il y a une interface unique entre la famille et les structures qui peuvent participer à la prise en charge de la dépendance. En outre, un soutien plus important est accordé aux aidants avec l’octroi d’un congé de soutien familial de six mois. Enfin, les personnes atteintes de troubles mentaux font l’objet d’un ciblage – la maladie d’Alzheimer est une composante importante des programmes de dépendance dans tous les pays.
Hier, le ministre fédéral de la santé, M. Philipp Rösler, a annoncé un nouveau plan, qui comprend l’introduction d’un mécanisme par capitalisation pour compléter le dispositif, ainsi qu’un grand plan de formation aux métiers d’accompagnement de la dépendance, avec un rapprochement entre les formations en soins infirmiers et en soins aux personnes âgées afin de donner aux salariés des possibilités de transition professionnelle – ce qui renvoie à la nécessité que j’évoquais de prévoir des passerelles.
L’Allemagne emploie 800 000 personnes dans le secteur de l’aide aux personnes âgées. Elle prévoit, pour les mêmes raisons que nous, une pénurie de main-d’œuvre, ce qui explique qu’une concertation ait été ouverte sur un ensemble de mesures destinées à favoriser la reconversion et l’attractivité de ces métiers, comme la création d’un salaire minimal ou une enveloppe de 90 millions d’euros pour des reconversions professionnelles.
Nous avons également examiné la situation dans d’autres pays – Japon, Canada, Suède, Espagne, États-Unis, Israël, qui est un cas assez particulier –, en pratiquant une approche transversale, en particulier sur la question des aidants familiaux, et je me tiens à votre disposition pour aborder plus en détail le sujet des comparaisons internationales.
M. le président Pierre Méhaignerie. Peut-être conviendrait-il également de se demander quel niveau géographique est le mieux adapté pour une bonne gouvernance…
Derrière la question des seniors, objet de ce premier débat, nous serons vite confrontés à celle de la dépendance avec la nécessité de prévoir un socle de solidarité renforcée et de trancher entre plusieurs options, par exemple en matière de financement ou d’organisation du système d’assurance.
M. Denis Jacquat. Votre proposition 1 tend à prendre pour référence, dans les travaux statistiques et universitaires, « des groupes d’âge plus conformes aux réalités actuelles », en particulier en distinguant les personnes âgées de moins ou de plus de 75 ans. Je souhaiterais surtout que l’ensemble des études adopte les mêmes bases : avec des seuils d’âge et des horizons toujours différents, les comparaisons sont très difficiles à établir, même quand on connaît bien le sujet. J’espère que le Centre d’analyse stratégique s’y efforcera.
Je suis entièrement d’accord avec votre proposition 10, qui vise à faire des centres locaux d’information et de coordination (CLIC) et des maisons pour l'autonomie et l'intégration des malades Alzheimer (MAIA), des guichets uniques en matière de dépendance. Mais j’ai été surpris que les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ne fassent pas partie du même projet. Lorsque nous les avons créées, nous avions déjà envisagé la convergence avec les CLIC.
Quant au manque d’attractivité des emplois de service aux personnes dépendantes, l’ANPE a fait beaucoup de mal en y affectant d’office des chômeurs sans formation. Le métier se trouvait ainsi dévalorisé dès le départ. En outre, aucune formation initiale n’a été prévue. Or, il faut un minimum de formation initiale avant la formation continue… Une réflexion est donc indispensable, car c’est un gisement d’emplois énorme qui est en jeu, qui plus est non délocalisables.
Enfin, la distinction entre personnes handicapées et personnes âgées devra faire l’objet d’une discussion approfondie. En son temps, le Livre blanc des associations demandait qu’il n’y ait pas de barrière à 60 ans, et qu’on considère l’ensemble des personnes en perte d’autonomie, quel que soit leur âge. Mais, il faut aussi rappeler qu’une personne handicapée n’a pas les mêmes besoins selon son âge ! Bref, il faut pratiquer une approche globale, comme cela se fait à l’étranger, et non sectorielle.
Mme Martine Carrillon-Couvreur. Merci de cette présentation, qui montre bien que la question du vieillissement doit s’inscrire dans une réflexion sur l’organisation globale de la société et que nous avons encore des avancées à faire dans bien des domaines.
Pour ce qui est du logement, nous savons tous que nombre de personnes âgées ne peuvent rester à leur domicile faute d’aménagements. La loi de février 2005 avait tout de même, en matière d’accessibilité au sens large, ouvert des pistes – il n’est qu’à voir le nombre des tentatives de dérogations ! Il faudra vraiment nous attacher à cette question pour pouvoir répondre aux situations de perte d’autonomie. Vous avez indiqué que les chutes à domicile engendraient 10 000 décès par an. C’est considérable, et cela aussi représente un coût. C’est pourquoi, il ne faut pas se contenter du minimum en matière d’aménagement des logements.
Par ailleurs, je suis tout à fait d’accord avec vos propositions concernant les passerelles et l’attractivité de ces métiers, qui sont aujourd’hui extrêmement dévalorisés, ce qui n’aide pas à améliorer la situation. Il faut absolument reprendre ces filières et faire en sorte qu’elles soient accessibles à différents moments dans la vie.
Enfin, il y a longtemps que je pense au renforcement des missions des CLIC, afin d’en faire des centres de ressources et d’information dans les territoires en renforçant leur caractère de guichet unique et d’acteur de proximité. De création récente, ils peuvent apporter en effet des réponses très adaptées.
Mme Martine Billard. Compte tenu de l’évolution de la famille, avec des enfants moins nombreux parfois répartis sur tout le territoire national quand ce n’est pas à l’étranger, l’option du maintien à domicile à tout prix, qui est de plus en plus privilégiée en France comme en Europe, me semble inquiétante. C’est sans doute une bonne chose lorsque la personne a de la famille sur place ou dispose de réseaux sociaux ou de voisinage, mais on peut craindre que cela n’aboutisse à un isolement total, la personne se repliant chez elle lorsqu’elle n’est plus capable de sortir, cette misère sociale et culturelle pouvant même faire sombrer dans des maladies mentales.
La réflexion manque sur le passage entre domicile et institution, et surtout sur les passerelles entre les deux – la personne pourrait par exemple suivre des activités collectives en institution tout en gardant son logement. Vous avez parlé d’un centre pour 10 000 personnes en Allemagne : de telles expériences y sont-elles pratiquées ?
Mme Valérie Rosso-Debord. Le logement est bien une question primordiale. Des moyens loin d’être négligeables ont été mis en œuvre, dans le cadre des programmes locaux de l’habitat (PLH) ou de l’ANAH par exemple, pour financer des réhabilitations ou, dans le cadre de la loi de 2005, des constructions adaptées. Mais, s’il convient de recenser les logements accessibles, encore faudrait-il pouvoir les conserver pour des personnes qui en ont besoin. Or, les bailleurs sociaux n’ont pas le droit de destiner des logements à une seule catégorie de population. Il faut avancer sur ce sujet.
Je suis, par ailleurs, très attachée à votre proposition relative aux passerelles professionnelles. On ne peut pas demander à des gens de s’occuper de personnes âgées, grabataires, dépendantes pendant trente ans. C’est trop dur. Il faut vraiment encourager les passerelles, comme en Allemagne ou au Japon, entre les secteurs médico-sociaux, sanitaires et de la petite enfance. Tout est lié – formation, emploi, dépendance –, et il doit être possible de trouver des solutions.
Pour ce qui est des comparaisons internationales, vous avez dit mettre l’accent sur la problématique des aidants familiaux. Notre pays s’est focalisé sur les personnes handicapées, ce dont nous pouvons nous louer, mais n’a pas apporté de réponse en matière de dépendance. Or, les personnes qui accompagnent à domicile une personne âgée dépendante rendent un grand service à la société, qui devrait être beaucoup plus valorisé, par exemple par des trimestres de retraite, voire par un accompagnement financier. Que font les autres pays dans ce domaine ?
Mme Bérengère Poletti. Il est très intéressant de savoir ce qui se passe dans les autres pays, mais sans oublier de prendre en compte leur culture propre. La France n’est pas le Japon, et il faut se méfier des comparaisons. La Suède par exemple favorise le plus possible comme nous le maintien à domicile, mais empêche les personnes âgées d’entrer en établissement quand elles le souhaitent : il faut un niveau de dépendance assez avancé. Cela relativise les choses : même dans les pays qu’on cite en exemple, il n’y a jamais rien de parfait.
Par ailleurs, la proposition 8 sur le rapprochement des métiers de l’aide aux personnes âgées, aux personnes handicapées et de la petite enfance me laisse dubitative. Les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) éprouvent des difficultés à recruter du personnel. Beaucoup ont même du mal à dépenser leur forfait soins à cause de cela, car ce sont des métiers difficiles dont on s’échappe dès que possible, surtout en ville. En milieu rural en effet, il y a assez peu de possibilités de faire autre chose. Cela n’empêche pas pour autant les EHPAD, à l’image de plusieurs établissements de ma circonscription très rurale, d’assurer une progression interne de carrière et une bonne stabilité professionnelle, car ils ont compris que c’était bon pour les professionnels autant que pour les personnes âgées. Je crains donc que créer ces passerelles ne soit plus nuisible que positif. Je pense, au contraire, qu’il faut créer des métiers spécifiques à l’accueil de la personne âgée dépendante avec des parcours de valorisation internes.
Pour ce qui est du logement, on parle très souvent des problèmes d’accessibilité et des moyens qu’il faut y consacrer, mais pas assez des normes de construction, qui devraient être pensées le plus possible en amont. Plus on pense, dès le départ, à la largeur des portes et à la hauteur des boutons électriques, moins on dépense d’argent après.
Enfin, il faut que la réflexion sur la problématique de l’accueil des personnes âgées dépendantes se fasse en lien avec la recherche sur la maladie d’Alzheimer. Certains EHPAD comptent 70 ou 80 % de pensionnaires atteints de cette maladie. Qu’en sera-t-il de notre politique de construction d’établissements dans dix ou vingt ans, lorsqu’on aura trouvé des solutions peut-être pas pour guérir la maladie, mais pour en repousser l’échéance ?
Mme Danièle Hoffman-Rispal. Je partage le souci de notre collègue Denis Jacquat de disposer de statistiques permettant de comparer les données et les prévisions relatives au vieillissement de la population. À cet égard, le classement, dans la même catégorie des seniors, de personnes de 50 ans et de personnes de 75 ans me paraît vide de sens. Les premières font encore partie de la population active et, avec la nouvelle loi sur les retraites, travailleront jusqu’à 67 ans. Elles peuvent même être en situation de recherche d’emploi, et on ne peut donc les assimiler à des personnes de 75 ans qui commencent à connaître des troubles de santé et qui, parfois, perdent leur conjoint. Je comprends bien le ciblage de la proposition correspondante du Centre d’analyse stratégique, mais il faut éviter de telles confusions entre les âges.
Si j’approuve par ailleurs plusieurs des suggestions du rapport, ne faudrait-il pas mieux parler de soutien à domicile plutôt que de maintien à domicile ? L’observation de Martine Billard sur la situation différenciée entre les milieux urbains et les milieux ruraux ou désertifiés me paraît juste. S’y retrouver seul, à 90 ans, en GIR 2 n’a pas les mêmes conséquences.
De plus, quand on calcule précisément le coût d’un bon soutien à domicile, qui implique un niveau d’allocation personnalisée d’autonomie correspondant à une présence renforcée de six à dix heures par jour, on s’aperçoit qu’il est plus élevé que celui du séjour en établissement spécialisé. Si l’on met aux normes françaises le « baluchon Alzheimer » canadien, qui sert à suppléer l'aidant d'une personne malade à son domicile pendant des périodes d’une à deux semaines, son coût peut atteindre 220 à 250 euros par jour, contre 170 à 220 euros pour une journée en établissement. Je respecte le libre choix des personnes âgées, sachant que 85 % d’entre elles préfèrent rester à leur domicile, taux plus élevé que dans le reste de l’Europe. Mais, il faut aussi considérer que si les établissements offrent des services de qualité et se montrent plus attrayants, ils peuvent présenter un avantage par rapport à la situation de la personne qui vit chez elle sans pouvoir bouger ni être aidée.
À cet égard, ce n’est pas lorsqu’une personne est âgée de 75 ou 80 ans, habitant en étage sans ascenseur, qu’on doit lui proposer de déménager : elle a construit sa vie, et parfois son deuil, à un endroit auquel elle tient. La proposition doit intervenir au moment où la personne construit sa retraite et les bailleurs sociaux devraient d’ailleurs être incités à aider ces personnes. Si les 450 000 chutes évoquées ne concernent que des personnes âgées, cela signifie qu’il faut adopter des mesures en amont – confirmez-vous à cet égard le chiffre de 10 000 morts par an du fait de ces chutes ?
Vous avez parlé, à propos de l’exemple allemand, d’un centre local de support pour 10 000 personnes. Le case management, comme le montrent les exemples canadien et japonais, n’est-il pas plutôt adapté à de plus petites structures rassemblant moins de monde ?
M. Bernard Perrut. Le titre du rapport du Centre d’analyse stratégique traduit une vision à la fois humaniste et intergénérationnelle qui dépasse les analyses strictement quantitatives. Elle me rappelle cette formule : « L’important n’est pas seulement d’ajouter des années à la vie mais aussi de donner de la vie aux années ». Tel est bien notre objectif. Il nous faut relever le défit du vieillissement, un vieillissement si possible actif, notamment par l’appréhension des problèmes de santé et de prévention.
Des progrès considérables ont été accomplis au cours de ces dernières années dans le registre de la santé et des établissements afin d’accueillir les personnes âgées et de traiter les maladies dont elles sont fréquemment victimes comme la maladie d’Alzheimer. Des plans ont été mis en place à cet effet.
Se pose aussi la question du « où vivre » et du « comment vivre », ce qui touche au problème du logement et à celui des services aux personnes.
Nous engagerons, dans les semaines qui viennent, un débat sur la prise en charge des personnes âgées dépendantes, sur le coût du vieillissement et sur l’échelon de gouvernance le mieux adapté. Car aujourd’hui les collectivités locales, principalement les communes, réalisent des efforts importants pour l’accueil des personnes âgées en résidence et pour les services à domicile. Le département exerce aussi ses compétences en matière de solidarité, en particulier par la gestion de l’APA. L’État doit également assumer son rôle de cohésion sociale globale sur l’ensemble du territoire : certaines régions, au sud, comptent plus de personnes âgées que d’autres : à l’inverse, des territoires moins riches éprouvent des difficultés à assurer la solidarité entre les générations.
La dernière partie du rapport porte justement sur « l’enjeu des relations intergénérationnelles au cœur des politiques publiques ». Il aborde un problème bien plus vaste que ne peuvent le faire les analyses quantitatives ou qualitatives : celui de la famille. Il aborde un sujet sur lequel nous aimerions disposer de statistiques, celui de la « génération pivot » qui porte simultanément la responsabilité, financière comme pratique, de ses enfants, voire de ses petits enfants, et de ses parents. C’est là une des évolutions majeures de notre société, mais à quel coût ?
Je pourrais aussi parler des aidants familiaux, dont vous avez mentionné le besoin de reconnaissance, laquelle est aujourd’hui insuffisante.
Enfin votre rapport aurait pu davantage traiter de l’accompagnement des personnes en fin de vie, inévitable conséquence du vieillissement. En ce domaine, la loi doit être complétée, afin de reconnaître la place de la famille et des proches durant cette période terminale.
M. Elie Aboud. Vous avez avancé le nombre de 10 000 décès par an consécutifs à des chutes chez les personnes âgées. Il me paraît sous-estimé car, les gérontologues le savent bien, ces chutes ont aussi de graves conséquences indirectes et plus tardives.
La question du logement, dont je voulais parler, a déjà été posée par nos collègues Valérie Rosso-Debord et Bérengère Poletti. Je me limite donc à celle du guichet unique.
La puissance publique ne peut certes comparer son action aux expériences privées. Reste que l’exemple du Danemark, avec le développement généralisé de résidences pour les seniors, parrainées par la société Novo Nordisk, aurait pu être cité. C’est d’ailleurs ainsi que, dans ma circonscription, le guichet unique a été expérimenté, réunissant puissance publique
– conseil général et État – et secteur « privé » pour la culture et les loisirs. Les qualiticiens danois ont observé que cette formule avait provoqué une très forte demande, la personne âgée disposant d’une véritable liberté de choix. Le législateur que nous sommes doit en tenir compte. En Europe du Sud, des agents ne visitent-ils pas les personnes âgées pour les aider à traiter des problèmes administratifs ?
La loi dite « HPST » reste méconnue et, pour le moins, peu appliquée dans le domaine de la télémédecine. Celle-ci reste un outil purement inter-hospitalier. On pourrait aller au-delà. Les Danois y recourent, en France, pour leurs résidents.
M. Paul Jeanneteau. Le vieillissement de la population est le plus souvent présenté comme une charge pour la collectivité. Mais, on peut aussi le considérer comme une chance, car il est créateur d’emplois et donc de richesses. Emplois, au demeurant, non délocalisables, que l’on peut rattacher à ce qu’on appelle l’économie résidentielle, laquelle constitue une opportunité nouvelle pour les territoires, notamment pour ceux qui ne bénéficient pas d’un fort dynamisme économique. Le rapport estime à un million de postes le potentiel d’emplois prévisible dans quelques années, soit un doublement par rapport à aujourd’hui. Ce qui soulève plusieurs questions. Comment valoriser les métiers de services à la personne ? En dehors de l’aspect financier, comment les rendre plus attirants ? Comment les faire reconnaître comme des métiers à forte valeur sociale ajoutée ?
Vous avez estimé qu’il fallait créer de nouvelles filières de formation. Auxquelles pensez-vous en particulier ? Pour quels types de métiers ?
M. Georges Colombier. Le rapport du Centre d’analyse stratégique arrive à point nommé, en amont de la discussion qui viendra sur le financement de la dépendance. Quatre points importants ont été signalés : le logement, les intervenants à domicile auprès des personnes âgées, l’emploi des seniors et les aidant familiaux. Dans mon canton, en liaison avec le conseil général et la Mutualité sociale agricole, nous avons travaillé pendant un an sur ce dernier sujet, avec la participation des agents concernés, qui ainsi ont pu s’exprimer.
Je retiens donc plus particulièrement les propositions 7, 8, 9 et 10 du rapport. Le département de l’Isère mène une expérimentation sur les Maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades Alzheimer (MAIA). Je souhaiterais qu’on puisse la généraliser à terme.
Les Allemands ont mis en place un dispositif, dit du cinquième pilier, afin de favoriser, à titre complémentaire, la retraite par capitalisation. Il faudra, en France, beaucoup de pédagogie pour en expliquer l’utilité, même si nombre de personnes n’ont pas attendu une loi pour y recourir. Notre population se répartit en trois catégories : les riches, pour qui le financement de la dépendance ne soulève pas de difficultés ; ceux qui n’ont rien et dépendent donc de l’aide sociale ; et les classes moyennes, dont le revenu est insuffisant pour financer la dépendance, surtout lorsqu’elle concerne les deux membres d’un couple et constitue un vrai casse-tête pour les établissements spécialisés.
Mme Michèle Delaunay. Le rapport du Centre d’analyse stratégique converge totalement avec un rapport de notre groupe parlementaire sur le même thème. Je regrette simplement que nous ne nous soyons pas coordonnés dans nos approches respectives.
Le logement et l’urbanisme sont des enjeux essentiels : c’est une vraie révolution qu’il nous faut accomplir en la matière. À question nouvelle, réponses nouvelles. Les améliorations nécessaires aux conditions de vie des personnes âgées doivent désormais s’intégrer dans les normes de construction et d’aménagement. Nous suggérons à cet effet d’édicter des labels : de haute qualité d’usage (HQU) pour les matériaux et les objets, et de haute qualité de vie (HQV) pour les appartements et les quartiers, ainsi reconnus « amis de l’âge », donc amis de tous. À 75 ans ou davantage, on n’a plus envie, ni la force, ni forcément les moyens, de réaliser des travaux chez soi. Il faut donc préparer les aménagements nécessaires avec le maximum d’anticipation. J’en donne deux exemples : les prises électriques que l’on pourrait souvent placer plus haut, afin d’avoir à moins se pencher, et le moulage de rampes dans les parois des couloirs des logements sociaux. De même, dans les quartiers nouvellement aménagés, un label similaire pourrait s’avérer incitatif. Il existe ainsi mille idées à développer.
Or certaines initiatives, originales et personnelles, éprouvent beaucoup de difficultés à être soutenues. Je pense notamment à la maison des Babayagas, inventée par des femmes qui veulent, pour vivre ensemble, organiser une nouvelle forme de collectivité. La puissance publique doit dégager les moyens d’appuyer de tels projets, ce que les lois en vigueur ne permettent pas.
Enfin, il me semble que le rapport oublie l’informatique, outil crucial lors de l’avancée en âge. Car, il favorise les liens sociaux et facilite l’accès aux services domotiques. Nous devons user de notre influence pour accélérer son développement chez les personnes âgées.
M. le président Pierre Méhaignerie. À propos d’oubli, je suis surpris que personne n’ait encore abordé la question des résidences-hôtels pour personnes âgées...
M. Michel Issindou. Le vieillissement représente un enjeu de société auquel nous serions coupables de ne pas nous préparer puisque nous en connaissons les éléments. On peut donc l’anticiper. Nous savons que le nombre des plus de 75 ans va s’accroître de 40 % dans les prochaines années. Nous compterons 260 000 centenaires en 2050.
Or, notre situation pour faire face à cette évolution n’est pas très bonne. La ville est difficile à vivre pour les personnes âgées. Même si quelques commodités ont été mises en place, leurs déplacements demeurent problématiques. Quant au secteur du logement locatif, peu de mobilité existe. Des personnes ayant vécu dans de grands appartements ne veulent pas en bouger en dépit du départ de leurs enfants. De leur côté, les aidants familiaux exercent des métiers ingrats, peu payés et mal reconnus. Et les places disponibles dans les EHPAD sont de plus en plus rares. Nous avons trop peu construit, trop peu prévu. J’espère que nous parviendrons à rattraper notre retard, mais à quelle échéance ?
L’option entre maintien à domicile et hébergement en foyer ne peut faire l’objet d’une réponse dogmatique. Certaines personnes préfèrent vivre dans une ambiance collective, d’autres se sentent mieux chez elles. Chaque formule présente ses avantages et ses inconvénients. Il faut donc savoir s’adapter à la demande.
Le débat sur la gouvernance de la dépendance est à venir : famille, assurance et État devront chacun tenir un rôle, le troisième ne pouvant se désengager. Il lui revient notamment d’intervenir dans la lutte contre les maladies, telles que celle d’Alzheimer, mais aussi contre les autres, comme le cancer.
Le plus grand problème rencontré aujourd’hui par les personnes âgées provient de l’écart entre le montant de leurs retraites, souvent très modestes – 50 % se situent au-dessous de 1 000 euros par mois – et le coût des établissements, qui va de 2 200 euros pour les moins chers à 4 000 euros, sans parler des établissements de luxe. Ce décalage n’est pas acceptable. Pour y faire face, il faut recourir à l’aide des enfants, à la liquidation du patrimoine, aux assurances… Toute une vie de labeur ne saurait s’achever autrement que dans la dignité. Viendra un moment où l’État devra la garantir, d’une manière ou d’une autre.
M. Jacques Domergue. Il existe de nombreuses similitudes entre le handicap et la dépendance. La différence tient à ce que l’on peut passer une vie sans subir le premier, mais que l’on aura de plus en plus de mal à échapper à la seconde – sauf à mourir jeune et en bonne santé... La prise en compte de la dépendance doit donc s’inspirer de ce qu’on réalise déjà en matière de handicap et qui couvre bien des aspects de la vie courante, y compris le logement.
On n’imagine pas que quelqu’un puisse toute sa vie s’occuper de personnes âgées. Les emplois correspondants sont aujourd’hui occupés par des Français qui se sont reconvertis dans ce secteur, après avoir connu des difficultés dans leur vie. Ne faut-il pas craindre que, comme pour d’autres métiers dits pénibles, les citoyens français refusent de les exercer dans les années à venir et qu’il faille alors faire appel à une main-d’œuvre étrangère ?
Parmi les dix propositions du rapport, nulle part n’est mentionnée l’importance de la famille, dont il faut rendre le rôle identifiable. Ce ne serait pas un bon choix de la déresponsabiliser et de tout faire reposer sur l’État. Celui-ci doit seulement se substituer aux familles déficientes.
M. Jean-Marie Rolland. Le rapport du Centre d’analyse stratégique a le mérite de planter le décor. Toutefois, je voudrais rappeler à nos collègues la chronique, publiée récemment par L’Express, de M. Jacques Attali. Celui-ci observe que l’on présente couramment, comme résultant de l’allongement de l’espérance de vie, la perspective « d’être bientôt noyés sous une armée de vieillards impotents, alzheimerisés ou parkinsoniens, dont les retraites ne suffiront pas à payer les besoins. » Mais selon sa théorie, qui mérite attention, « le fait de vivre plus longtemps n’augmente pas la durée de la dépendance, il ne fait que retarder la dernière année de vie, où se concentre l’essentiel des dépenses de santé. » Car l’allongement de l’espérance de vie s’accompagne d’une amélioration de la qualité de la vie, notamment de la santé. Ainsi, le nombre de personnes dépendantes, qui s’élève aujourd’hui entre un million et un million cent mille, avec une durée de 3,7 ans pour les hommes et de 4,7 ans pour les femmes, ne va augmenter que de façon très modérée. En outre, le vieillissement de la population va créer des emplois.
M. Jacques Attali conclut en écrivant que « la raison pour laquelle ce sujet terrifie est que nous sommes dans des sociétés où domine de plus en plus l’égoïsme, le chacun pour soi et la solitude. Chacun pense, au fond de lui-même, qu’il sera abandonné par ses enfants. » Cette analyse rejoint la première proposition du Centre d’analyse stratégique : bien regarder, sur le plan statistique, ce que devient chaque cohorte.
Mme Catherine Génisson. Je voudrais faire part, à propos justement des résidences-hôtels, monsieur le président, de l’expérience du béguinage développée dans la région du Nord-Pas de Calais et menée, le plus souvent, par les acteurs du logement social. Il s’agit d’ensembles de logements de plain-pied, mitoyens, configurés en arc de cercle, comportant au centre une salle commune avec une dame de compagnie, ou une « maîtresse de maison », qui s’occupe de résoudre les problèmes des uns et des autres. Généralement implanté au centre des villages, ce type de logement permet de maintenir une vie de communauté. Le système fonctionne bien et apparemment sans nécessiter de dérogation au régime juridique du logement social.
M. le président Pierre Méhaignerie. Dans les régions de l’Ouest, cela s’appelle une maison d’accueil rurale pour personnes âgées (MARPA).
Mme Catherine Génisson. Je ne crois pas car, à la différence de la MARPA, le béguinage n’est pas médicalisé.
M. le président Pierre Méhaignerie. La MARPA ne l’est pas non plus.
Mme Catherine Génisson. Nous avons trop souvent amalgamé vieillissement, dépendance et médicalisation. Il faut les dissocier, comme le montre peut-être aussi l’article de M. Jacques Attali. Je conteste d’ailleurs l’actuelle médicalisation des maisons d’accueil de personnes âgées et encore plus la permanence des soins.
Plusieurs de nos collègues, tels que Martine Billard et Bernard Perrut, ont évoqué la solitude de la personne âgée. On demande ainsi à la collectivité publique, au-delà même de ses engagements budgétaires, de pallier cette solitude en lieu et place de la cellule familiale. Proclamer que cette dernière doit s’investir davantage risque de demeurer un vœu pieux, car il est difficile d’envisager un retour en arrière. C’est un sujet majeur : comment allons-nous, solidairement, accompagner nos aînés ?
Enfin, si Internet représente un outil précieux pour les personnes âgées, il ne doit pas devenir, pour les enfants et les petits enfants, un moyen de se dédouaner vis-à-vis de leur famille, par exemple en envoyant des photos plutôt qu’en rendant des visites.
M. Jean Bardet. M. Jacques Attali a parfaitement raison. La durée de vie augmente globalement et, à due concurrence, celle de la vie en bonne santé, de sorte que, mathématiquement, le nombre de personnes dépendantes ne va pas augmenter dans des proportions qui en rendraient la prise en charge impossible.
Comme Martine Billard, je pense que le maintien des personnes à domicile n’est pas forcément la solution la plus humaine. Il n’est pas non plus la solution la plus économique. Je fus, il y a quelques années, responsable du plan pour les personnes âgées dans le Val d’Oise. Nous avons alors constaté que le placement en établissement était d’autant mieux supporté qu’il était précoce et volontaire. Quand, en revanche, il intervenait comme formule de dernier recours, il devenait presque synonyme d’arrêt de mort. Nous avons également observé que les enfants étaient beaucoup plus disposés qu’on ne le dit couramment à prendre chez eux leurs parents âgés lorsque leur situation, notamment leur logement, le permettent. Mais, ces derniers sont souvent réticents à l’idée de risquer de gêner leurs enfants.
M. Christian Hutin. Je voudrais revenir sur ce qu’on peut appeler la pré- dépendance ou la dépendance ressentie. Il arrive souvent que des personnes, avant de devenir médicalement dépendantes, ne veuillent plus vivre seules et ressentent diverses craintes à cet égard, fondées ou non. Ce sont alors souvent – en effet, monsieur le président – les résidences-hôtels, les MARPA, les béguinages et les foyers logements des années 1970 qui répondent le mieux à leurs besoins.
Toute loi sur la dépendance devrait comprendre un volet relatif au logement social, car nombre des immeubles concernés ne sont plus aujourd’hui conformes aux normes de la construction et de l’habitat. Ils nécessitent donc des travaux. Or, le déménagement des personnes hébergées durant le temps nécessaire à la réalisation de ceux-ci soulève de considérables problèmes pratiques aux municipalités.
En se préoccupant de la situation des personnes pré-dépendantes ou ressenties comme telles, on pourrait probablement reculer l’échéance de la dépendance absolue et en réduire le coût pour la société. Car les personnes qui n’ont pas les moyens de se faire héberger dans des résidences-hôtels, et recourent donc au logement social, bénéficient dans ce cadre d’une veille qui participe de ce souci du care dont on parle souvent.
M. Guy Malherbe. Qui va s’occuper des personnes âgées ? Compte tenu de l’évolution que nous connaissons de la démographie médicale, comment allons-nous organiser les différentes professions de santé dans le cadre du maintien à domicile ? Le rapport du Centre d’analyse stratégique évoque le sujet dans sa proposition 6, relative à la coordination des divers responsables sanitaires et sociaux.
Dans les EHPAD, se pose le problème du recrutement des personnels, rendu parfois difficile par la concurrence entre établissements d’accueil spécialisés. En effet, certaines personnes préfèrent travailler auprès des personnes handicapées plutôt que des personnes âgées : les métiers y sont mieux reconnus et plus valorisants. Il faut donc se montrer prudent avec la notion de professionnalisation, la première qualité nécessaire aux personnels étant d’aimer les personnes âgées. Je rappelle que l’exigence d’un agrément pour les aides à domicile a rendu plus difficile les recrutements par les associations de soins à domicile. Il s’agit donc d’un problème complexe et délicat.
M. Dominique Dord. J’interviens en qualité de maire d’une ville qui apporte, depuis des siècles, du bien être collectif à des personnes âgées : il conviendrait, en effet, avant de mettre en place des dispositifs nouveaux, de s’assurer de la préservation des dispositifs existants. Or, chaque année, la prise en charge du thermalisme, notamment du thermalisme rhumatismal, qui concerne rarement les plus jeunes, est systématiquement remise en cause dans notre Assemblée et même dans notre Commission.
Le souci du bien vieillir, l’accompagnement des personnes âgées, l’attention à sa propre santé devraient inciter le Centre d’analyse stratégique à signaler à la sécurité sociale les bienfaits du thermalisme pour les affections rhumatismales, de façon à assurer, une fois pour toutes, le maintien de la prestation sociale afférente, essentielle pour les personnes âgées.
M. Rémi Delatte. Nous avons tous conscience de la complexité de la prise en charge de la dépendance. Je voudrais appeler votre attention sur l’expérience conduite dans ma commune et consistant à mettre en place une formule mixte entre le placement en EHPAD et le soutien à domicile : des appartements dits protégés hébergent jusqu’à une vingtaine de personnes en cours de perte d’autonomie, chacune disposant bien sûr d’un espace privé, l’ensemble fournissant une structure très proche de celle de la famille. À leur arrivée dans cette structure, les personnes ne ressentent pas le même choc que lors d’une installation en établissement classique. En outre, le coût de journée y est relativement restreint grâce aux personnes dites « maîtresses de maison », qui assurent l’accompagnement des pensionnaires.
Nous sommes tous d’accord pour reconnaître qu’il n’existe pas, en la matière, de solution unique. Il ne faut donc pas craindre d’innover.
Mme Bérengère Poletti. Je voudrais relever un oubli que nous avons tous commis : le rôle pivot du médecin traitant dans l’accompagnement des personnes âgées dépendantes. Il reste beaucoup à faire pour la formation et l’information de celui-ci.
M. Fernand Siré. Il existe deux types de handicaps liés au vieillissement : l’un est physique, l’autre psychique. Certaines personnes n’ont plus toute leur volonté, il nous faut alors nous substituer à elles. D’autres ont conservé leur capacité de décision et, parfois, préfèrent rester dans leur saleté ou dans leur précarité plutôt que d’aller en établissement. Les familles ont quelquefois tendance à essayer d’évacuer le problème par le placement en maison de retraite, comme on enferme un oiseau en cage pour le protéger du chat. Or, il faut savoir respecter les personnes et le choix qu’elles font de leur vie.
M. le président Pierre Méhaignerie. En France, tout est toujours compliqué, dans ce domaine comme dans les autres, en raison d’une sorte de balkanisation des responsabilités. Elle ne facilite guère la cohérence d’ensemble. Quelle est donc la meilleure structure de gouvernance ? Les communautés de communes et d’agglomérations ont, au moins dans les zones urbaines, tué l’action des départements.
Nous avons évoqué les différents types de structures d’accueil, telles que les béguinages et les MARPA. Je suis très surpris de constater, dans une ville de 18 000 habitants, le succès des résidences-hôtels. Leur prix de journée n’est pas très éloigné de celui des autres structures compte tenu du système de déductions fiscales. Je pense notamment à Nexity et à d’autres. Pour vaincre la solitude, ou l’insécurité, les personnes âgées ont du mal à se résoudre à un hébergement en EHPAD, où elles côtoient des personnes lourdement handicapées, ce qui est assez traumatisant. La résidence-hôtel, avec ses services intégrés, comprenant, par exemple, une salle de gymnastique, constitue une formule intéressante qu’il ne faut pas négliger.
M. le directeur général du Centre d’analyse stratégique. Merci d’abord pour les mots aimables que j’ai entendus à propos du rapport du Centre d’analyse stratégique, qui ne peuvent que nous encourager à poursuivre notre réflexion sur le sujet.
Pour reprendre rapidement les réflexions des uns et des autres, je répondrai en premier lieu à Mme Martine Billard qui faisait remarquer que le maintien à domicile à tout prix n’était peut-être pas, avec toutes ces familles éclatées, la solution la plus appropriée. Notre propos n’était pas de distinguer une solution par rapport à une autre, mais simplement d’ouvrir cette possibilité pour les familles qui le souhaitent, même si du chemin reste à parcourir pour y parvenir, concernant par exemple, parmi les dispositifs évoqués, l’accueil temporaire.
Plusieurs d’entre vous ont abordé la question du logement des personnes dépendantes. Si des progrès ont été accomplis s’agissant des logements neufs depuis la loi de 2005, la solution repose selon moi sur la prise en compte de cette question dans la politique du logement en général. La manière de gérer l’attribution des logements sociaux pour traiter l’exclusion sociale, qui tient surtout compte de la situation de plus ou moins grand éloignement par rapport au logement ou encore des revenus, ne permet pas en effet d’aborder d’autres aspects, dont celui de la dépendance.
S’il faut par ailleurs, comme le soulignait Mme Bérengère Poletti, des passerelles entre les métiers, une certaine stabilité est également nécessaire. Pour autant, si aucun dispositif n’obligera jamais, au bout de vingt ans, quelqu’un à faire quelque chose de différent, la question est importante. À cet égard, la valorisation des emplois ne passe pas nécessairement par une augmentation progressive de leur niveau de formation, contrairement à ce qui se passe en France où la tentation est grande, pour valoriser tel ou tel emploi, de passer simplement d’un recrutement à bac+2 à un recrutement à bac+5. Cela aboutit en fait à trouver encore moins de candidats, alors que le besoin que l’on a identifié pourrait très bien être pourvu par des gens qui n’ont pas un niveau élevé. Il conviendrait plutôt, dans une logique de valorisation des acquis de l’expérience, de prendre en compte les compétences pratiques, qu’il s’agisse de les utiliser ailleurs ou de progresser dans la carrière.
Ainsi que cela a été souligné, l’anticipation, point que je n’ai pas évoqué, est souvent la clef de la réussite. C’est vrai en matière de logement, d’emploi ou encore de choix d’un établissement : si l’on s’y prend à l’avance, le passage est beaucoup moins brutal. Malheureusement, la balkanisation des intervenants qu’évoquait le président Méhaignerie rend la démarche très compliquée. De ce fait, on n’a pas envie de s’occuper de la question tant qu’on n’est pas au pied du mur, et c’est comme cela que l’on ne réussit pas la transition.
Vous avez été plusieurs à revenir sur la question des chutes accidentelles. Outre qu’elles peuvent constituer, comme le soulignait M. Élie Aboud, un facteur aggravant pour les personnes âgées souffrant déjà de pathologies plus ou moins graves, elles entraînent, selon l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), 10 500 décès par an dont 85 % concernent les plus de 65 ans.
Parmi les oublis relevés dans notre rapport, j’ai bien noté – outre bien sûr le principal, à savoir le thermalisme rhumatismal... – celui concernant l’informatique. Nous menons toutefois des travaux en matière de nouvelles technologies, en particulier sur la question de savoir ce que ces dernières peuvent apporter. Si envoyer un mèl à un parent âgé peut, certes, être un bon moyen de se dédouaner pour la famille, on peut toujours se demander si, en l’absence de l’outil informatique, quelque chose aurait été fait. Au moins le mèl a-t-il le mérite d’exister ! Plus généralement, l’informatique peut apporter des solutions nouvelles aux personnes âgées dépendantes avec ces innovations que sont, par exemple, les réseaux sociaux de type Facebook. On peut également très bien imaginer que demain existeront des outils informatiques plus conviviaux qu’aujourd'hui tels que l’iPad qui est beaucoup plus facile à utiliser qu’un PC.
Une question très sensible a été posée par M. Jacques Domergue, celle du recours à l’immigration pour occuper des métiers pénibles. Si l’immigration par le travail doit permettre de trouver des personnes à employer là où existe un déficit de recrutement, il ne faudrait pas non plus qu’une sorte de fuite des Français aboutisse à n’employer que des personnes immigrées, ce qui ne serait une bonne chose ni pour le futur de ces emplois ni pour les personnes immigrées elles-mêmes. Là aussi, il y a un équilibre à trouver.
Concernant la chronique – que j’ai également lue avec beaucoup d’intérêt – de M. Jacques Attali, ce dernier a entièrement raison : pour la dépendance comme pour la santé, la plupart des études montrent que la durée de vie de qualité, sans grand handicap, augmente à peu près au même rythme que la durée de vie elle-même – la période où peuvent apparaître des difficultés importantes reculant d’autant. Des études fines font même apparaître que la progression des dépenses de santé ne tient pas principalement au vieillissement, mais au progrès technologique avec, par exemple, l’arrivée de nouveaux médicaments forcément chers lors de leur mise sur le marché. L’augmentation de la dépendance – il est bon de le souligner – n’est pas quelque chose de mécanique. Non, la dépendance n’est pas, au même titre que le handicap, inévitable. Tout le monde ne sera pas dépendant – et pas seulement ceux qui meurent à 40 ans dans un accident de voiture...
Il n’empêche qu’en même temps, dans une société qui progresse, qui devient malgré tout plus riche, la demande de services augmente. Demain on voudra, encore plus qu’aujourd'hui, mieux accompagner nos personnes âgées, même si, en tout état de cause, le vieillissement entraîne certaines conséquences.
Pour conclure sur une remarque d’ordre plus général, il s’agit en la matière, comme l’ont souligné Mme Martine Carrillon-Couvreur et M. Bernard Perrut, d’un enjeu de société. Ainsi que nous l’avons souligné dans notre rapport, nous ne répondrons au défi du vieillissement qu’en instillant des réponses dans l’ensemble de nos politiques publiques et pas seulement dans celles relatives aux seniors. C’est vrai de quasiment tous les sujets évoqués : c’est vrai des logements – il faut faire en sorte que nos procédures permettent de rendre des logements disponibles en priorité pour les personnes âgées ; c’est vrai de la formation et de l’emploi des seniors – les systèmes de formation et d’emploi doivent être adaptés à une durée du travail plus longue ; c’est vrai de la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle : si des solutions existent, elles sont ciblées, par exemple en direction des femmes qui travaillent et qui ont des enfants, alors que les dispositifs en question – télétravail, temps partiel, congés plus ou moins longs,... – pourraient également servir aux personnes qui ont des petits-enfants ou qui ont des ascendants dépendants.
M. Jacques Attali écrivait que si le sujet de la dépendance nous terrifie, c’est parce que l’on a tous peur que nos enfants se coupent de nous. J’ajouterai que c’est également parce que l’on a tous peur de ne pas pouvoir s’occuper de nos parents comme on le voudrait. Certains d’entre vous ont insisté sur le fait que quelques fois c’étaient les parents eux-mêmes qui ne voulaient pas des solutions qui leur étaient proposées par leur famille. Telle est la raison pour laquelle ce défi est difficile à relever : c’est parce qu’il renvoie à quelque chose de très intime qui a trait à la relation au sein même des familles. C’est bien pourquoi d’ailleurs il n’y aura pas de modèle unique : la solution ne viendra pas le jour où l’on aura identifié un seul modèle pour tout le monde, mais où l’on aura mis en place un système suffisamment généreux, mais aussi suffisamment souple pour que chacun puisse trouver la solution qui lui convienne.
M. le président Pierre Méhaignerie. Merci, monsieur Chriqui, sachant que vous aurez à cœur de fournir les éléments complémentaires que certains de nos collègues vous ont demandé, en particulier en termes de comparaisons internationales, même si la culture de chaque pays est à prendre à compte.
Comme l’ont souligné plusieurs de nos collègues, la richesse d’une société tient à ses solidarités familiales. Faisons en sorte que nous ne les tuions pas dans notre législation future, mais que nous trouvions un équilibre.
La séance est levée à onze heures cinquante.
——fpfp——
Présences en réunion
Réunion du mercredi 8 décembre 2010 à 10 heures
Présents. - M. Élie Aboud, Mme Edwige Antier, M. Jean Bardet, Mme Gisèle Biémouret, Mme Martine Billard, Mme Valérie Boyer, M. Yves Bur, Mme Martine Carrillon-Couvreur, Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Georges Colombier, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Rémi Delatte, Mme Michèle Delaunay, M. Guy Delcourt, M. Vincent Descoeur, M. Jacques Domergue, M. Dominique Dord, Mme Cécile Dumoulin, Mme Cécile Gallez, Mme Catherine Génisson, Mme Anne Grommerch, Mme Danièle Hoffman-Rispal, M. Christian Hutin, M. Michel Issindou, M. Denis Jacquat, M. Paul Jeanneteau, M. Guy Lefrand, M. Claude Leteurtre, M. Michel Liebgott, M. Guy Malherbe, M. Jean Mallot, M. Pierre Méhaignerie, M. Pierre Morange, M. Philippe Morenvillier, Mme Dominique Orliac, M. Bernard Perrut, M. Étienne Pinte, Mme Bérengère Poletti, M. Jean-Luc Préel, M. Arnaud Richard, M. Arnaud Robinet, M. Jean-Marie Rolland, Mme Valérie Rosso-Debord, Mme Françoise de Salvador, M. Fernand Siré, M. Dominique Tian, Mme Marisol Touraine, M. Francis Vercamer
Excusés. - M. Gérard Cherpion, M. Jean-François Chossy, M. Jean-Pierre Door, Mme Jacqueline Fraysse, M. Maxime Gremetz, Mme Catherine Lemorton, M. Jean-Claude Leroy, M. Roland Muzeau, Mme Marie-Renée Oget, M. Simon Renucci, M. Christophe Sirugue
Assistait également à la réunion. - M. Régis Juanico