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Commission des affaires sociales

Mardi 29 mars 2011

Séance de 17 heures 30

Compte rendu n° 35

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé, sur la mise en œuvre de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (MM. Christian Paul et Jean-Marie Rolland, rapporteurs)

– Informations relatives à la commission

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mardi 29 mars 2011

La séance est ouverte à dix-sept heures trente.

(Présidence de M. Pierre Méhaignerie, président de la Commission)

La Commission des affaires sociales entend, en audition ouverte à la presse, M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé, sur la mise en œuvre de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (MM. Christian Paul et Jean-Marie Rolland, rapporteurs).

M. Jean-Luc Préel. Monsieur le président, j’aimerais que vous nous apportiez quelques précisions concernant l’ordre du jour. Notre commission examinera ce soir la proposition de loi de Jean-Pierre Fourcade, qui n’a d’autre objet que de modifier certaines dispositions de la loi « Hôpital, patients, santé et territoires » et, jeudi, nous débattrons en séance publique de l’application de ladite loi. La discussion que nous abordons cet après-midi ne peut-elle être considérée comme la discussion générale de l’examen de la proposition de loi Fourcade ? La séance publique de jeudi vient-elle à point nommé, le jour même de l’élection des présidents de conseillers généraux ?

M. le président Pierre Méhaignerie. Notre commission se réunit en effet ce soir et demain pour débattre de la proposition de loi de Jean-Pierre Fourcade portant réforme de l’hôpital, qui sera examinée le mardi 12 avril en séance publique.

Quant au débat sur l’application de la loi HPST, il aura bien lieu jeudi après-midi, et je crains, moi aussi, que les parlementaires ne soient peu nombreux. Le président du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche en a convenu, d’autant que Jean-Marie Rolland ne pourra être parmi nous. Pour satisfaire le groupe SRC, qui tenait beaucoup à ce débat, j’ai proposé de le prévoir mercredi soir, mais c’est alors Christian Paul qui n’aurait pas été présent.

M. Christian Paul. Nous avions tous à cœur de présenter en Commission et dans l’hémicycle le bilan de la loi « Hôpital, patients, santé et territoires » en présence d’un grand nombre de députés et du ministre Xavier Bertrand. Il m’aurait en effet été impossible d’assister au débat s’il avait eu lieu mercredi et Jean-Marie Rolland ne pourra être présent jeudi. En revanche, nous aurions été tous deux présents s’il avait eu lieu la semaine prochaine.

M. le président Pierre Méhaignerie. Il aurait été plus cohérent en effet de regrouper la semaine prochaine l’examen du rapport d’information et celui de la proposition de loi de Jean-Pierre Fourcade.

M. Christian Paul. Sur ce point, le groupe SRC est en désaccord avec le président de la Commission. Nous pensons en effet qu’avant de « délégiférer » – c’est en partie l’objet de la proposition de loi de Jean-Pierre Fourcade – nous devons prendre le temps de juger de l’application de la loi HPST.

M. le président Pierre Méhaignerie. Nous accueillons M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé, sur la mise en œuvre de la loi Hôpital, patients, santé et territoires. Je rappelle que nos deux collègues Christian Paul et Jean-Marie Rolland ont été chargés d’un rapport, en application de l’article 145-7, alinéa 1, du Règlement.

M. Jean-Marie Rolland, corapporteur. Nous sommes réunis aujourd’hui pour dresser un premier bilan de l’application de la loi dite HPST, qui a occupé notre commission pendant de longues semaines au cours du premier trimestre 2009. Il ne s’agit pas d’un bilan qualitatif de la loi : celui-ci serait très prématuré puisque les agences régionales de santé ne sont mises en place que depuis à peine un an et que les structures de la nouvelle gouvernance de l’hôpital public viennent seulement d’être constituées.

L’objectif de ce rapport, plus modeste, est de vérifier que les mesures réglementaires nécessaires pour l’application de la loi votée par le Parlement ont bien été prises – ce qui ne nous empêche pas d’émettre des jugements sur les choix qui ont présidé à tel ou tel dispositif réglementaire. Conformément à l’article 145-7 du Règlement, notre rapport fait état de la publication des textes réglementaires et des circulaires nécessaires à la mise en œuvre de ladite loi ainsi que des dispositions qui n’auraient pas fait l’objet des textes d’application nécessaires. Une partie de notre bilan a donc un caractère notarial.

Initialement composé de 33 articles, le projet de loi HPST s’est considérablement enrichi puisque, à la fin de la longue discussion parlementaire qui a conduit à son adoption, il était constitué de 135 articles.

Un important travail réglementaire était nécessaire pour mettre en œuvre les nombreuses dispositions du texte : sur les 161 décrets en Conseil d’État attendus, 112 ont été publiés, et 42 décrets simples sur les 79 attendus.

Le taux de publication de l’ensemble des mesures réglementaires d’application, hors ordonnances et arrêtés, est de 64 %, mais il cache de grandes disparités. Si les titres Ier et IV, relatifs à la modernisation des établissements de santé et à l’organisation territoriale du système de santé, connaissent des taux de publication supérieurs à 80 %, les titres II « Accès de tous à des soins de qualité » et III « Prévention et santé publique » ont des taux de publication plus faibles, respectivement de 40 et 54 %.

Le jugement technique que nous portons sur l’application de la loi est donc partagé. S’il est positif sur les titres Ier et IV, il est beaucoup plus réservé s’agissant du titre III et, surtout, du titre II. J’espère que le Gouvernement nous apportera des explications sur ces retards et pourra nous indiquer les dates de publication prévues.

Au-delà de ce bilan statistique, je souhaite vous livrer quelques appréciations personnelles sur trois enjeux particuliers de la loi que sont la formation des médecins généralistes, la démographie médicale et le statut des établissements de santé.

Je commencerai par saluer la contribution de la loi HPST à la revalorisation de la médecine générale et à l’essor de la filière universitaire. Crise des vocations, identité professionnelle en mutation, difficultés à trouver des remplaçants, burn out des praticiens, relations complexes avec les caisses d’assurance maladie : les signes d’une véritable crise de la médecine générale ne manquaient pas lorsque nous avons abordé l’examen du projet de loi HPST. Il n’existe pas de solution miracle à cette crise profonde, liée à l’évolution des pratiques professionnelles, à la démographie médicale et à des changements sociaux importants qui modifient la place du médecin dans notre société.

Le législateur a apporté une large contribution au traitement des difficultés de la profession à travers trois mesures principales, dont la mise en œuvre marque une nouvelle étape dans la revalorisation de la médecine générale.

Il a tout d’abord défini de façon légale, claire et positive la médecine générale, dite de premier recours, pour la distinguer des modes d’exercice particuliers ; il a également ouvert la voie à une recomposition profonde des structures d’exercice de la médecine générale en établissant un cadre légal favorisant le développement des maisons de santé et des pôles de santé et en confiant aux agences régionales de santé (ARS) la mission d’en organiser le déploiement, en lien avec les collectivités territoriales ; il a enfin apporté une contribution que l’on pourrait qualifier de volontariste à l’essor de la filière universitaire de médecine générale en fixant des objectifs quantifiés en matière de créations de postes d’enseignant de médecine générale.

Les deux premières mesures ne produiront des effets visibles qu’à moyen ou à long terme, lorsque les ARS auront mis en œuvre des politiques territorialisées d’aménagement de l’offre de soins et que nous disposerons du recul nécessaire pour en apprécier le bilan. Il apparaît que la structuration et la consolidation de l’offre de soins en médecine générale sont bien identifiées par les agences comme une priorité.

La médecine générale a été reconnue comme une spécialité à part entière en 2002 et l’internat a été créé en 2004, mais il a fallu attendre 2008 pour que soit institué un corps d’enseignants titulaires, indispensables au fonctionnement de la filière. Avec la loi HPST, les pouvoirs publics se sont donné les moyens de développer ce corps à la mesure de l’enjeu que constitue pour notre système de santé la formation des médecins généralistes de demain. Il ressort de nos travaux que la mise en application des dispositions correspondantes de la loi est satisfaisante et que celles-ci ont donné une véritable impulsion au développement de la filière universitaire de médecine générale.

En ce qui concerne la démographie médicale, la situation est assez paradoxale. La France n’a jamais eu autant de médecins que depuis quelques années mais, parallèlement, les déserts médicaux n’ont cessé de se développer. Les difficultés actuelles tiennent plus à la répartition des médecins sur le territoire qu’à leur nombre, et la baisse prochaine de leurs effectifs, conséquence d’une mauvaise gestion du numerus clausus des études médicales dans les années 1990, ne pourra que les aggraver si aucune mesure corrective n’est prise.

Pour agir sur la répartition de l’offre de soins, trois catégories de mesures sont envisageables : des mesures strictement incitatives, respectant le principe de la liberté d’installation des praticiens libéraux ; des mesures « désincitatives », consistant à mettre à contribution les médecins des zones très denses en matière d’offre de soins, pour répondre aux besoins de santé des zones moins favorisées ; enfin, des règles contraignantes d’installation pour les médecins, à l’image de celles mises en place pour les pharmaciens.

La stratégie qui sous-tend la loi HPST privilégie clairement le premier type de mesures. Elle a ainsi mis en place un dispositif de bourses d’études assorti de l’obligation de s’installer dans une zone déficitaire ; elle a également régionalisé l’internat pour former les futurs médecins au plus près des territoires qui ont le plus besoin d’eux ; enfin, elle a fait de la régulation de la démographie médicale une priorité assignée aux agences régionales de santé.

La loi a également diversifié les outils mis à la disposition des agences. Ainsi, à partir de 2013 – et seulement en cas d’échec des mesures incitatives –, les agences pourront, dans le cadre de « contrats santé solidarité » et à partir d’une évaluation concertée des besoins de chaque territoire, proposer aux médecins des zones « sur-dotées » de prêter main-forte à leurs confrères des zones déficitaires ou, s’ils refusent, de verser une contribution, destinée à abonder les fonds destinés à financer la pratique professionnelle des médecins installés en zones déficitaires.

Le Gouvernement a fait le choix de ne pas mettre en application les contrats santé solidarité. Il faut souhaiter que les autres mesures prévues par la loi HPST suffiront à résoudre les difficultés actuelles. Si tel n’est pas le cas, il est à craindre que les pouvoirs publics n’auront d’autre choix, pour garantir à nos concitoyens la protection de la santé que la Constitution leur garantit, que celui de recourir à des mesures contraignantes, qui seront bien plus difficiles à accepter par la profession.

La loi HPST a profondément modifié le statut, la gouvernance et les missions des établissements de santé – c’est l’objet du titre Ier. Le projet déposé sur le bureau de l’Assemblée prévoyait de ne plus distinguer que deux catégories d’établissements de santé selon qu’ils étaient publics ou privés, ce qui plaçait dans la même catégorie légale les cliniques à but lucratif et les établissements à but non lucratif, qui constituaient auparavant la catégorie des établissements privés participant au service public hospitalier (hôpitaux PSPH). L’Assemblée a souhaité rétablir une catégorie légale spécifique pour ces établissements, désormais désignés sous le nom d’établissements de santé privés d’intérêt collectif (ESPIC).

Il ressort des auditions que nous avons conduites, Christian Paul et moi-même, que la spécificité des ESPIC n’a pas toujours été suffisamment prise en compte dans l’élaboration des décrets d’application, notamment en ce qui concerne l’organisation financière et l’investissement immobilier des établissements de santé, les possibilités de détachement de praticiens hospitaliers et les groupements de coopération sanitaire. J’aimerais, monsieur le ministre, que vous nous rassuriez sur ce point.

M. Christian Paul, corapporteur. Pendant plusieurs mois, Jean-Marie Rolland et moi-même nous sommes livrés à un travail d’un nouveau type qui nous a conduits à surveiller scrupuleusement la mise en œuvre d’une loi – en l’occurrence la loi HPST.

S’il avait suffi de faire un inventaire notarial des travaux réglementaires, notamment des décrets d’application, nous serions sans doute parvenus à des conclusions identiques. Mais, conformément à l’objectif de la mission de contrôle qui est désormais confiée au Parlement, nous ne nous sommes pas contentés de dresser un bilan quantitatif.

Le problème doit être envisagé plus globalement – et avec une certaine gravité. Le groupe socialiste s’était en son temps exprimé contre le projet de loi HPST, et ce n’est pas parce que nous minimisions les problèmes : nous sommes très conscients de leur gravité, qu’il s’agisse de l’égalité d’accès aux soins, des déserts médicaux, de la gouvernance de l’hôpital ou de la mise en place des agences régionales de santé. Mais il ne s’agit pas de réécrire la loi. Nous aurions pu trouver un accord sur les objectifs, mais nous désapprouvons totalement la très faible concertation qui a entouré la préparation de ce texte et, surtout, son manque d’ambition. En effectuant notre travail d’évaluation sur le terrain, il est apparu que nos inquiétudes étaient parfaitement justifiées.

Faire le bilan de la loi HPST en avril 2011, c’est en quelque sorte faire le bilan de cette législature en matière de politique de santé et d’organisation de l’offre de soins. C’est à ce travail que nous nous sommes livrés.

Si la loi HPST contient quelques outils qui produiront des effets à long terme et auxquels nous pourrions souscrire, ils ne sont pas en mesure d’enrayer la très profonde dégradation, dans nos territoires, de l’offre de soins et du système hospitalier.

En matière de lutte contre les inégalités d’accès aux soins, la loi HPST n’apporte pas de réponse satisfaisante, en dépit de son titre II : « Accès de tous à des soins de qualité ». Cet objectif n’est pas atteint et nous observons une dégradation profonde de la situation.

Je ne reviendrai pas sur les reculades des dernières années en matière d’encadrement des dépassements d’honoraires ou de lutte contre les refus de soins, ni sur la volonté de « délégiférer ». Avant même que la loi HPST soit appliquée, la majorité propose – elle l’a fait au Sénat et le fera peut-être ici même ce soir – de revenir en arrière en supprimant des outils efficaces pour répondre à diverses pressions.

L’échec le plus grave de la loi HPST est qu’elle n’a pas réussi à freiner la progression des déserts médicaux.

En 2008, notre commission avait adopté à l’unanimité le rapport d’information de notre collègue Marc Bernier, député de la majorité. Ce rapport contenait un certain nombre de propositions, qui ne sont que très peu reprises dans la loi HPST. Si l’article 36 de la loi définit les soins de premier recours et les missions du médecin généraliste, la portée de ses dispositions est quasiment inexistante. Nous avons appris au cours de nos auditions que 50 % seulement des contrats d’engagement de service public – il s’agit de bourses d’études assorties d’une obligation d’exercice en zone déficitaire – sont pourvus. Quant au contrat santé solidarité issu d’un amendement de notre collègue M. Rolland et que vous allez nous proposer dans quelques heures d’abroger, il n’a jamais été mis en œuvre. Je le regrette, tout en sachant que ce n’est pas une mesure miracle. Il aurait été courageux d’aller au bout de la démarche consistant à ce que les médecins installés en zone dense puissent exercer quelques années dans les zones « sous-dotées ». Cette mesure non plus, qui n’est pourtant pas révolutionnaire, n’a pas été appliquée.

Je donne toutefois acte au Gouvernement – dans un débat de ce type, il est important de faire preuve de la plus grande objectivité – que les dispositions relatives à la filière universitaire de médecine générale représentent un réel progrès et auront sans aucun doute des effets positifs dans une dizaine d’années.

En auditionnant les professionnels, nous avons eu le sentiment que cette législature n’a rien apporté – je le regrette car je suis confronté quotidiennement à des problèmes liés à la mauvaise répartition des médecins sur le territoire. Notre pays a perdu cinq années, dans un domaine dont tout le monde – la majorité comme l’opposition – reconnaît qu’il nécessite des mesures d’urgence.

Le groupe SRC a fait des propositions très claires sur le sujet. Pour nous, la liberté d’installation n’est plus un tabou. Nous ne défendons pas des mesures coercitives, mais des mesures de régulation. La loi HPST ne prévoyait pas le plafonnement des installations dans les zones denses – ce qui pourrait être confié aux ARS, par le biais des schémas régionaux d’organisation des soins ambulatoires – et n’allait pas assez loin dans la mise en place des maisons de santé pluridisciplinaires et des centres de santé. Nous sommes en désaccord avec la majorité sur le fond, et le bilan de l’application de la loi nous conforte dans l’idée qu’aujourd’hui, et plus encore qu’en 2007, il est indispensable d’agir.

En ce qui concerne l’hôpital public, la loi HPST avait été annoncée comme un véritable big bang en matière d’organisation et d’efficience médico-économique. Manifestement, le big bang n’a pas eu lieu : le système hospitalier se trouve toujours dans une situation de crise aiguë. Et, si les nouveaux outils de gouvernance sont mis en place sur le papier sans difficultés apparentes, leur mise en œuvre sur le terrain déstabilise toujours les professionnels médicaux et paramédicaux et nourrit le malaise profond du système hospitalier. On peut difficilement demander aux professionnels de réfléchir à une évolution qualitative de leur profession et leur proposer essentiellement des mesures de gestion de pénurie budgétaire ! Les directeurs d’hôpital ont été promus managers et, depuis plusieurs semaines, ils sont soumis à des indicateurs de performance fondés essentiellement sur leur capacité à réaliser des économies budgétaires. Après l’application brutale de la tarification à l’activité (T2A), qui avait profondément transformé l’hôpital public, ils ressentent cela comme une double peine.

En ce qui concerne l’hôpital public et sa gouvernance, de plus en plus calquée sur celle du secteur privé, des évolutions essentielles comme la coopération hospitalière, présentée comme une solution miracle, semblent marquer le pas ; quant à la démocratie sanitaire, très attendue par les associations, locales et nationales, nous avons le sentiment que la loi HPST ne l’a pas fait progresser.

Enfin, nous ne contestons pas le bien-fondé des agences régionales de santé, mais leur première année de fonctionnement a donné lieu à un interminable meccano administratif, ce qui a nui à la mise en place des politiques publiques. Les équipes qui forment les agences régionales de santé ont établi leurs feuilles de route en matière de prévention, de politique d’éducation thérapeutique ou de SROS ambulatoire, mais les résultats ne sont pas mesurables.

Les directeurs des agences sont désormais soumis à des indicateurs de résultats, et nous souhaitons vous entendre sur ce point, monsieur le ministre. Les performances quantitatives que vous voulez appliquer aux directeurs généraux des agences et aux directeurs des hôpitaux sont-elles la meilleure manière de piloter la transformation du système hospitalier ? Le groupe SRC ne le pense pas.

Nous avons procédé à l’évaluation du travail réglementaire avec la plus grande précision, mais il était de mon devoir d’alerter notre commission sur la situation réelle sur le terrain. L’application de la loi HPST est très en retard. L’absence d’ambition initiale se retrouve dans ce faux-plat interminable qui affecte l’ensemble des dossiers, notamment la lutte contre les déserts médicaux.

Vous l’aurez compris, je porte sur la mise en œuvre de la loi HPST une appréciation extrêmement critique.

M. le président Pierre Méhaignerie. Dans un pays drogué au pessimisme, il convient de rappeler que notre système de santé est l’un des plus efficaces et des plus solidaires du monde, et il est préférable à celui de nombreux pays européens. Veillons à ne pas tomber dans le pessimisme ambiant, très démobilisateur !

S’agissant de la médecine de premier recours, l’expérience montre que les mesures « négatives », compte tenu de l’évolution des professions vers le salariat, ne produiront que peu d’effets. En revanche, les maisons pluridisciplinaires de santé ont des effets très positifs, mais nous attendons des réponses claires quant à leur mode de financement.

Enfin, les agences régionales de santé sont un très bon produit, à condition qu’elles ne se traduisent pas par une couche supplémentaire de bureaucratie. Elles doivent pouvoir disposer de marges de manœuvre suffisantes pour être des acteurs de terrain et empêcher les administrations centrales de reprendre le pouvoir.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé. La loi HPST, réforme majeure, a modifié l’organisation territoriale de notre système de santé, en même temps qu’elle visait à le moderniser. Son adoption a été précédée d’une longue concertation : commission Larcher, états généraux de l’organisation de la santé, rapport Ritter sur la création des ARS, rapport Flajolet sur les disparités territoriales des politiques de prévention sanitaire, entre autres. Et les débats, tant en commission qu’en séance publique, devant les deux assemblées, ont été longs et approfondis.

Le texte était d’ampleur avec quatre titres et 135 articles. Les huit ordonnances nécessaires à son application ont été prises. Sur les 154 décrets prévus, 112 ont été publiés. Une vingtaine sont en cours d’élaboration et devraient être publiés d’ici mai. Les autres font encore l’objet d’une concertation, dont pas moins de dix concernant la biologie, dans l’attente de l’examen par le Sénat du projet de loi relatif à la bioéthique, qui aura lieu la semaine prochaine. Enfin, quelques dispositions du texte, notamment celles relatives aux contrats santé solidarité, demeurent en suspens dans l’attente de l’adoption de la proposition de loi de M. Jean-Pierre Fourcade. La proposition de loi déposée par le sénateur Fourcade, adoptée par le Sénat et que l’Assemblée va examiner, permettra d’avancer.

Le travail accompli par les services du ministère de la santé, dont je salue le professionnalisme des personnels, a donc été considérable. Pouvions-nous aller plus vite ? L’un des plus sûrs moyens de parvenir à publier tous les textes réglementaires en temps utile est, comme je l’avais fait lors de la réforme de l’assurance maladie en 2004, alors que j’étais secrétaire d’État à la santé, de les préparer et de les soumettre à la concertation en même temps que le projet de loi – sachant qu’en moyenne à peine 5 % d’un texte est modifié par voie d’amendement. On gagne ainsi un temps considérable. Je m’étais engagé en juin 2004, lors du vote de la loi, à ce que 80 % des décrets soient publiés à la fin de l’année : à l’échéance, 92 % l’avaient été !

Venons-en au fond.

La loi HPST a modifié en profondeur l’organisation interne de l’hôpital, lequel s’inscrit désormais clairement dans une offre de soins territoriale, et décloisonné notre système de santé. Le changement est en marche : l’hôpital prend sa place dans les filières de soins, en relation avec l’ensemble des acteurs de santé. Le plus important aujourd’hui pour les établissements est de s’adapter à leur environnement pour être au plus près des besoins sanitaires de la population et y répondre au mieux. La réforme de la gouvernance des établissements de santé a également été menée à bien.

Nous allons prochainement célébrer le premier anniversaire des ARS, ce qui nous donnera l’occasion de dresser un premier bilan. J’ai des réunions de travail mensuelles avec leurs directeurs généraux. Depuis le début, je ne cesse d’appeler leur attention sur l’importance pour les ARS de n’être pas perçues comme des structures administratives repliées sur elles-mêmes – sur ce point, je partage tout à fait l’avis du président Méhaignerie. Établissements publics placés sous la tutelle des ministres chargés de la santé, de l’assurance maladie, des personnes âgées et des personnes handicapées, les ARS se sont, dans chaque région, substituées à sept structures : l’agence régionale de l’hospitalisation (ARH), les directions régionale et départementale des affaires sanitaires et sociales (DRASS et DDASS), le groupement régional de santé publique (GRSP), l’union régionale des caisses d’assurance maladie (URCAM), la mission régionale de santé (MRS) et les caisses régionales d’assurance maladie (CRAM). Elles se sont au début concentrées sur leur mission qui était de faire se fondre toutes ces structures en une seule entité. Des questions légitimes se sont fait jour, tant de la part des élus que des professionnels de santé. Ceux-ci notamment s’interrogeaient : ces nouvelles structures seraient-elles un animateur du système de santé en région, ou un ennemi ?

Le périmètre de compétences des ARS intègre tous les secteurs du champ de la santé. En un mot, il recouvre tout le parcours de soins, très diversifié, des patients. Un patient qui consulte un jour dans une clinique privée peut fort bien se rendre plus tard à l’hôpital public. Dans le même temps, il voit divers professionnels de santé en ville et quand, plus âgé, il entre en maison de retraite, établissement médico-social, ses soins y sont pris en charge par l’assurance maladie. Les ARS, qui ont compétence en tous ces domaines, ont un rôle d’animateur et contribuent ainsi au décloisonnement de notre système de santé. Loin de se refermer sur elles-mêmes, elles ont vocation à se tourner vers l’ensemble des acteurs de la santé.

La proposition de loi du sénateur Fourcade permettra de revenir sur certaines incompréhensions sur lesquelles j’aurai d’ailleurs l’occasion de m’exprimer lors du débat parlementaire des 12 et 13 avril. Elle comporte notamment des mesures issues de la concertation sur la médecine de proximité que Nora Berra et moi-même avons engagée avec l’ensemble des professionnels. L’enjeu est bien de renforcer l’attractivité de la médecine de premier recours et de revaloriser la médecine générale. En la matière, après la période 2004-2007 et l’institution du médecin traitant, nous avons franchi une étape supplémentaire. Il y a maintenant une véritable reconnaissance de la spécificité de la médecine générale, laquelle était attendue depuis longtemps. Les différents acteurs ne se plaignent évidemment pas de ce point qui est essentiel pour l’avenir de notre système de santé.

Pour que la loi HPST soit efficace, il convient en effet qu’elle soit simple et que l’ensemble des outils qu’elle préconise soit mis en place. C’est précisément ce à quoi vise la création de la société interprofessionnelle de soins ambulatoires (SISA), une adaptation du droit de la société civile de moyens (SCM) ou de la société civile professionnelle (SCP) étant fiscalement problématique : nous ne savions pas, en effet, comment prendre en compte et reverser l’ensemble des rémunérations. Quoi qu’il en soit, si le nom diffère, l’esprit n’en demeure pas moins identique.

Les maisons de santé sont quant à elles désormais dotées de la personnalité juridique et peuvent accueillir différents professionnels de santé – le Gouvernement et le rapporteur vous proposeront d’y inclure également les pharmaciens.

S’agissant du contrat santé solidarité, j’assume pleinement la volonté d’en retirer la partie coercitive et d’en conserver la partie incitative, seule garante d’efficacité. Je crains que, si l’on commence à toucher à la liberté d’installation, les professionnels de santé ne s’interrogent sur un encadrement à venir de la liberté de prescription ou sur la mise en place de nouvelles modalités de rémunération. Ébranler l’un des piliers de la médecine libérale, c’est la déstabiliser avant de la détruire, et ce n’est ni mon intention, ni mon ambition. Tant que j’occuperai mes fonctions, je demeurerai dans cette logique.

Par ailleurs, notre système de santé a besoin de confiance et ceux qui prétendent le réformer sans les professionnels de santé font fausse route : il est fallacieux de croire que nous saurions mieux faire qu’eux, sans eux, et c’est pourquoi nous avons besoin d’outils nouveaux.

Je précise également que je tiens à supprimer l’obligation de déclaration des absences programmées.

S’agissant du développement personnel continu (DPC) – pour lequel je souhaite l’organisation d’une gestion paritaire –, les textes sont prêts, mais j’ai d’autant moins l’intention de les publier pendant que se déroulent les assises du médicament que nous pouvons nous permettre d’attendre le mois de juin.

Monsieur Christian Paul, il n’est pas question d’entrer dans la logique des objectifs quantifiés de l’offre de soins (OQOS) telle qu’imaginée par certains services : je ne crois ni au rationnement des soins ni à l’application de mesures coercitives. Aucun hôpital n’a fermé le 30 octobre faute d’argent et cela ne se produira pas. Je préfère proposer une progression de l’ONDAM à hauteur de 2,8 % – ce qui demande des efforts, j’en ai conscience – plutôt que d’être contraint d’imposer un jour des sacrifices avec un ONDAM qui serait en baisse d’autant, comme tel est d’ailleurs le cas dans certains pays.

En outre, le nombre de personnels médicaux a augmenté dans les hôpitaux ces dernières années. Leurs postes seront préservés et les effectifs garantis. Le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux ne s’y applique pas et il serait pure folie qu’il en aille autrement quand les besoins de santé de la population évoluent, notamment en raison de son vieillissement.

En ce qui concerne les contrats de bourses d’études, je tiens à mettre fin à plusieurs aberrations. Nos services doivent être plus rapides afin de les débloquer, de les valoriser et de garantir qu’un étudiant signant un contrat et souhaitant par exemple exercer en Picardie pourra le faire. Cela n’étant pas le cas aujourd’hui, il ne faut pas s’étonner que les jeunes soient peu nombreux à s’y précipiter.

Quelques mois après la mise en œuvre de la loi, il est possible d’en pointer les imperfections. J’assume ce travail d’évaluation et de correction, lequel doit d’ailleurs être permanent.

S’agissant des indicateurs de performance, aucun directeur d’hôpital ou d’ARS ne se métamorphose en costkiller ou n’ambitionne d’être bien noté parce qu’il réduirait l’accès aux soins. Aucun responsable politique, quel que soit son camp, ne saurait raisonner de la sorte.

En ce qui concerne les ARS, j’ai veillé à ce que, dans le cadre de la campagne tarifaire des établissements de santé, des garanties soient prises quant aux dotations affectées aux missions d’intérêt général et à l’aide à la contractualisation (MIGAC). D’aucuns assurent, dont les fédérations nationales des établissements de santé, que cela ne s’est jamais vu. D’ordinaire, la visibilité des MIGAC – qui offrent pourtant sur le terrain de véritables moyens de négociation et de restructuration – est nulle du début à la fin de l’année. Désormais, compte tenu de l’évolution de l’activité et des tarifs, les budgets augmenteront, mais les directeurs d’ARS disposeront des moyens qui leur sont nécessaires afin de promouvoir la contractualisation. Notre seule logique est de faciliter un développement harmonieux et décloisonné de l’ensemble du système.

Par ailleurs, j’ai l’intention de travailler au problème des incidences des prescriptions hospitalières sur la médecine de ville, la question de la pertinence des actes ne constituant en rien un tabou à mes yeux, bien au contraire.

Je répète ce point essentiel : la loi HPST contribue à moderniser, à optimiser et à réorganiser notre système de soins, tout en le décloisonnant.

M. Jean-Pierre Door. Le comité d’évaluation de l’application de la loi HPST créé par un amendement parlementaire à son article 35 rendra un rapport au Parlement au mois de juin. Présidé par Jean-Pierre Fourcade et installé à la fin de 2009, il a permis d’auditionner plus de 120 personnes – représentants des administrations, des établissements de santé, des conférences de territoire, des syndicats de professionnels de santé. Il a de surcroît procédé à une enquête nationale auprès des présidents de conseils de surveillance, de commissions médicales d’établissement (CME) et d’hôpitaux publics de six régions, y compris ultramarines. En tant que membre de ce comité, je puis témoigner du sérieux de ses travaux et je regrette que notre débat se déroule avant la remise de son rapport, lequel proposera un certain nombre d’amendements utiles à de futures discussions parlementaires.

Le comité a constaté que l’esprit de la loi est globalement salué par les personnes auditionnées, même si certaines critiques se sont fait jour. Outre que les nouvelles institutions de la gouvernance hospitalière ont été mises en place dans les délais prévus sans aucun blocage ni conflit, les acteurs de l’hôpital en ont souvent assimilé l’esprit. L’enquête menée par la conférence des présidents de CME montre également que les hôpitaux sont désormais dirigés par un binôme : le directeur et le président de la CME.

Les ARS, quant à elles, se bureaucratisent et les enjeux de management y sont importants puisque les effectifs y sont nombreux. Nous savons que le processus sera long et difficile, en particulier pour les agences les plus importantes.

Outre que le comité continuera ses travaux afin d’approfondir et de valider ces différents constats, il vous fera part prochainement, monsieur le ministre, des nombreux amendements qui pourront être discutés avec vos services afin de modifier éventuellement la loi HPST pendant l’été.

Enfin, le comité Fourcade et les services du ministère de la santé travaillent beaucoup ensemble, mais je note parfois quelques difficultés ou contradictions selon que nos débats se déroulent en interne ou à l’extérieur.

Mme Catherine Lemorton. La proposition de loi de M. Jean-Pierre Fourcade aura au moins le mérite de nous montrer ce que signifie « délégiférer ». Si nous n’avions pas bien compris les propos du Président de la République au lendemain des élections régionales, nous savons aujourd’hui les traduire : faire ou défaire, c’est toujours travailler.

Je ferai quelques remarques sur le seul titre III, « Prévention et santé publique », dont nous avions d’ailleurs eu l’occasion de dénoncer le peu de substance. S’il est passé de 4 à 35 articles, un certain nombre de décrets d’application ne sont en effet pas parus.

L’article 82 dispose qu’un rapport sera remis avant le 31 décembre 2010 sur le nombre de malades souffrant de pathologies dues à l’alcool, au tabac et à la drogue. Or il n’en a rien été alors que la mission commune à l’Assemblée nationale et au Sénat sur la toxicomanie, à laquelle j’appartiens, a auditionné des représentants d’institutions et d’associations qui lui ont déjà communiqué les chiffres. Si nous en avions disposé plus tôt, notre travail aurait été facilité.

L’article 83 concerne la pharmacovigilance et le signalement d’effets indésirables de certains médicaments par des patients ou leurs associations. Le décret d’application de cet article, voté au mois de juillet 2009, n’est toujours pas paru alors que, pendant la pandémie de grippe A, les malades ont pu déclarer directement les effets secondaires dont ils étaient victimes sur les sites des centres de pharmacovigilance.

Nous pouvons en revanche nous féliciter que le décret d’application concernant l’article 84 ne soit pas publié puisque nous présenterons des amendements à la proposition de loi de M. Fourcade concernant l’éducation thérapeutique – nous constatons en effet depuis l’été dernier un certain nombre de dérives dont l’industrie pharmaceutique est responsable.

Comment expliquer que le décret concernant l’article 87 n’ait pas été publié alors qu’il concerne la contraception d’urgence et que l’on déplore plus de 200 000 avortements chaque année ?

L’article 107 est quant à lui relatif aux conditions d’application des règles en matière de lutte contre la propagation internationale des maladies. Alors que nous avons eu l’occasion de réaliser, si j’ose dire, des travaux pratiques quelques mois après le vote de la loi, comment expliquer une fois encore que le décret n’ait pas été publié ?

Enfin, le constat est identique s’agissant du décret concernant l’article 112 dédié à la prévention de l’obésité et du surpoids. La discussion de ce dernier avait été l’occasion de formuler un certain nombre de remarques que nous partagions d’ailleurs avec Mme Valérie Boyer qui, à la suite de son remarquable rapport, avait déposé plusieurs amendements. Tout est, hélas, tombé à l’eau au motif qu’une charte éthique sur la publicité télévisuelle avait été signée avec l’industrie agro-alimentaire afin de favoriser les changements de comportement alimentaire. Pourtant, je n’ai pas constaté de changement dans l’information diffusée aux enfants entre les dessins animés !

(M. Bernard Perrut, vice-président de la Commission, remplace M. Pierre Méhaignerie à la présidence de la séance.)

M. Jean-Luc Préel. Je félicite MM. Christian Paul et Jean-Marie Rolland pour le bon travail qu’ils ont accompli. Je sais, par ailleurs, que M. Jean-Pierre Door remettra un autre rapport, mais je crains que les élections présidentielles ne surviennent avant que nous puissions légiférer de nouveau.

L’importante loi HPST était très attendue et si l’on peut se féliciter que 154 décrets d’application sur 240 aient été publiés, il n’en reste pas moins qu’elle a été votée au mois de juin 2009. Son objectif, même s’il n’est hélas pas encore atteint, était d’assurer un excellent système de santé pour tous sur l’ensemble du territoire. Ambitieuse, elle comportait également un grand nombre d’articles. Enfin, elle doit être revisitée dans le cadre de la proposition de loi de M. Fourcade, votée au Sénat en première lecture, laquelle revient sur un certain nombre de dispositions, ce qui n’est pas sans soulever un problème législatif puisque des articles, comme celui qui concerne le contrat santé solidarité, ont été votés mais n’ont pas été appliqués.

Par ailleurs, cette loi n’a pas résolu le problème majeur de l’équilibre financier cher à Yves Bur. Or, en prolongeant l’existence de la CADES de quatre années supplémentaires, nous avons confié à cette dernière le soin d’absorber les déficits de 2011. Ne pensez-vous pas, monsieur le ministre, qu’il est donc impératif de voter une loi de financement pour 2012 en équilibre si nous ne tenons pas à en créer de nouveaux ?

Je reviendrai sur trois points essentiels, non sans avoir préalablement mentionné la question des dépassements d’honoraires : une chose est d’évoquer une médecine d’excellente qualité pour tous, une autre est qu’elle le soit à des tarifs remboursables. Que comptez-vous donc faire en la matière ?

Tout d’abord, les ARS, service unique de la santé sur le plan régional, sont désormais installées – même si cela n’a pas été pas simple –, les décrets d’application ayant été publiés. Défenseur d’un tel concept depuis longtemps, d’abord à l’UDF puis au Nouveau Centre, je ne peux que m’en réjouir car il convenait de remédier à ce défaut majeur qu’était la séparation entre la médecine de ville et la médecine hospitalière, les secteurs sanitaire et médico-social, les domaines de la prévention et du soin. À cela s’ajoute que l’échelon régional me semble pertinent. En revanche, pourquoi continuons-nous à voter un ONDAM avec des sous-objectifs qui constituent autant de cloisonnements alors que nous avons voulu supprimer ces derniers en mettant en place un responsable unique de la santé sur le plan régional ? Je rappelle que le président Méhaignerie est lui-même également très attaché aux objectifs régionaux pour les dépenses de santé (ORDAM).

Il conviendrait, de surcroît, de clarifier les relations entre la CNAM et les ARS. La première est une agence atypique qui ambitionne de s’occuper de l’ensemble du secteur de la santé et son directeur, M. Van Roekeghem, que je connais bien, s’intéresse beaucoup au secteur hospitalier auquel la Caisse impose parfois des sanctions financières disproportionnées.

Les conférences régionales de santé devraient être quant à elles plus autonomes de manière qu’elles puissent jouer un véritable rôle.

Ensuite, si la loi HPST a défini la médecine de premier recours, les mesures relatives au contrat santé solidarité qui ont été votées présentent un certain nombre de lacunes. La proposition de loi de M. Fourcade doit y remédier, mais les problèmes demeurent et ils sont loin d’être réglés : démographie des professionnels de santé, répartition territoriale, permanence des soins, dépassements d’honoraires. S’agissant du premier point, il convient de redonner du temps médical en diminuant les tâches administratives et en favorisant un transfert de certaines d’entre elles grâce à la création d’un corps d’infirmières cliniciennes. Les évolutions, sur ce plan-là, sont très timides.

Comme la loi le prévoit, nous devons également mettre en place un numerus clausus régional par spécialité en tenant compte des besoins dans les dix prochaines années. Qu’en est-il exactement ?

Afin de promouvoir une meilleure répartition des professionnels de santé, il convient aussi de développer des mesures incitatives et de les faire connaître, d’installer le guichet unique – également très attendu par les étudiants – et de faire en sorte que les maisons de santé disposent d’un véritable projet médical.

Que comptez-vous faire s’agissant du secteur optionnel, dont la mise en place était prévue depuis plusieurs mois, un accord ayant été signé entre la CNAM et les assurances complémentaires ?

Enfin, l’installation d’un « patron de l’hôpital » constitue, semble-t-il, un progrès, mais celui-ci est placé sous la dépendance directe des ARS, lesquelles le contrôlent de manière assez stricte – ce qui n’est peut-être pas un mal – sans que les médecins aient leur mot à dire. Un malaise semble d’ailleurs se faire jour parmi eux. Ne serait-il pas opportun de redonner un peu de pouvoir aux CME afin qu’elles soient à même de voter le projet médical ?

La loi HPST ne prend pas en compte les problèmes spécifiques des hôpitaux psychiatriques, dont ceux de l’hospitalisation sous contrainte et de la sectorisation. En sera-t-il bientôt différemment ?

La proposition de loi de M. Fourcade concerne principalement la médecine ambulatoire. Or des réformes sont sans doute nécessaires dans le domaine hospitalier ainsi que dans les autres secteurs de la santé. Quand sera-t-il donc possible de toiletter la loi HPST sur ces plans-là ?

M. le ministre. J’ai tenu à être personnellement présent lors de cette audition comme MM. les corapporteurs et M. le président me l’ont demandé. Plusieurs d’entre vous souhaitent légitimement m’interroger mais, compte tenu de mon emploi du temps, je suis contraint de partir et je ne veux absolument pas bâcler mes réponses. Si vous le souhaitez, je peux annuler mes rendez-vous prévus en début de soirée pour revenir devant vous à vingt et une heures.

M. Bernard Perrut, président. Mes chers collègues, je vous propose donc de nous retrouver à vingt et une heures, pour une séance dont la première partie sera consacrée à la poursuite de l’audition de M. le ministre, que je remercie en votre nom pour sa disponibilité.

La séance est levée à dix-huit heures quarante-cinq.

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Informations relatives à la Commission

La Commission des affaires sociales a désigné :

– M. Francis Vercamer, rapporteur sur la proposition de loi de M. Jean-Christophe Lagarde tendant à encadrer le financement public des plans sociaux (n° 2964),

– M. Yvan Lachaud, rapporteur sur la proposition de loi de M. Yvan Lachaud visant à interdire l’utilisation des phtalates, des parabènes et des alkylphénols (n° 2738).

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Présences en réunion

Réunion du mardi 29 mars 2011 à 17 heures 30

Présents. – Mme Edwige Antier, M. Gérard Bapt, Mme Gisèle Biémouret, Mme Valérie Boyer, M. Yves Bur, Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Georges Colombier, M. Rémi Delatte, Mme Michèle Delaunay, M. Jacques Domergue, M. Jean-Pierre Door, M. Dominique Dord, Mme Danièle Hoffman-Rispal, Mme Monique Iborra, M. Michel Issindou, M. Paul Jeanneteau, M. Guy Lefrand, Mme Catherine Lemorton, M. Jean Leonetti, M. Claude Leteurtre, M. Céleste Lett, M. Guy Malherbe, M. Jean Mallot, M. Pierre Méhaignerie, Mme Dominique Orliac, M. Christian Paul, M. Bernard Perrut, Mme Bérengère Poletti, M. Jean-Luc Préel, M. Jean-Marie Rolland, M. Fernand Siré, M. Francis Vercamer

Excusé. - M. Jean-François Chossy

Assistaient également à la réunion. - M. Régis Juanico, M. Richard Mallié